M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. Henri Cabanel. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Le 1er juin, les prix de l’électricité ont augmenté de près de 6 %. Cette augmentation considérable devrait encore être amplifiée en août prochain. Pour un foyer qui se chauffe à l’électricité et dépense annuellement en moyenne 1 500 euros, cette hausse représentera un surcoût de près de 90 euros.
Vous avez annoncé que la formule de fixation du prix de l’électricité serait revue à l’occasion de l’examen du projet de loi sur l’énergie, qui doit intervenir dans les prochaines semaines. Mais derrière la révision d’une formule technique, il y a d’abord une volonté politique. Elle consiste à donner des instructions pour aller dans un sens ou dans un autre afin de protéger certains plutôt que d’autres.
Plusieurs associations de consommateurs ont mis en évidence que cette hausse est deux fois supérieure à l’augmentation des coûts d’EDF, qui s’élève à 3 %, le surplus de hausse servant à favoriser la bonne santé des concurrents d’EDF. L’Autorité de la concurrence avait d’ailleurs rendu un avis défavorable à la proposition de la Commission de régulation de l’énergie en soulignant les fragilités juridiques.
Lors de l’examen du projet de loi que j’évoquais, nous discuterons pour savoir ce qui doit justifier le coût de l’électricité. Nous trancherons sur ce qui doit être consacré à la transition énergétique, laquelle suscite beaucoup d’attentes chez nos concitoyens. Nous discuterons aussi du coût du nucléaire, sachant que l’entretien et la sécurité des centrales ne sont pas négociables.
Alors que, dans quelques jours, nous débattrons d’une proposition de loi sur la question de la précarité énergétique, je crois pouvoir dire que nous serons attentifs à ce que ce ne soient pas que les plus modestes qui paient. Or ceux-ci sont particulièrement exposés. En effet, leurs logements sont mal isolés et les taxes qui pèsent pour un tiers sur le prix de l’électricité sont également soumises à la TVA, impôt particulièrement injuste, car il frappe sans distinction toutes les classes de la société.
Le Gouvernement va-t-il donner pour instruction de modifier la formule du prix de l’électricité afin de protéger les ménages des hausses intempestives ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Cabanel, vous le savez – vous l’avez d’ailleurs redit –, le mode de calcul des tarifs régulés de l’électricité n’est pas la décision directe du Gouvernement. Fruit d’une disposition législative votée en 2010 au Parlement et confirmée en 2015, il est, disons-le, un compromis entre l’opérateur historique, EDF, et l’ouverture à la concurrence.
M. Ladislas Poniatowski. On peut la changer !
M. François de Rugy, ministre d’État. Ce mode de calcul tient bien sûr compte des coûts de production.
Le principe du tarif régulé veut que les prix payés par ceux qui souscrivent des contrats d’électricité au tarif régulé ne soient pas plus élevés que les coûts de production. Cela intègre, bien sûr, les coûts de l’électricité vendue en gros sur le marché, qui ont beaucoup augmenté ces deux dernières années, ce qui explique principalement cette hausse.
Il y a un levier, vous en avez parlé, il s’agit du tarif de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, l’Arenh, avec un prix garanti de 42 euros le mégawattheure, même si EDF demande qu’il soit revalorisé à la hausse. Eh bien, c’est cet accès qui offre une maîtrise des prix et évite de suivre totalement les variations du marché.
Le texte Énergie-climat contient en effet un article de loi qui permettra de se prononcer sur la possibilité d’offrir un accès plus large à cette électricité à un coût maîtrisé, qui est celui de l’Arenh. Il revient maintenant au débat parlementaire de définir les orientations.
Par ailleurs, vous le savez, nous avons pris des mesures d’urgence en refusant d’augmenter le tarif de l’électricité durant l’hiver pour préserver les gens qui se chauffent à l’électricité. Nous avons augmenté le montant et le nombre des bénéficiaires du chèque énergie pour aider les plus modestes à payer leurs factures d’énergie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
projet de fermeture du train de fret perpignan-rungis
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Pascal Savoldelli. Ma question s’adressait à Mme la ministre chargée des transports, mais je pense que c’est vous, monsieur le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui allez me répondre.
Dans le cadre de sa réforme constitutionnelle, le Président de la République souhaite inscrire dans la Constitution la préservation de l’environnement. Nous avons entendu la préoccupation de votre majorité vis-à-vis du réchauffement climatique, mais, au-delà des déclarations d’intention, c’est grâce aux actes qu’on croit aux paroles !
L’une des principales lignes de fret de notre pays, celle qui relie Perpignan à Rungis, va fermer. Cette fermeture se traduira bientôt par la présence de 25 000 camions sur les routes, avec toute la pollution et la dégradation des voiries que cela engendre. Pourtant, cette ligne marche économiquement : de la plateforme logistique de Perpignan, elle approvisionne le MIN de Rungis de 1 400 tonnes de fruits et légumes par jour.
Afin de maintenir cette ligne, Fret SNCF est prêt à investir 25 millions d’euros dans le renouvellement de la flotte de wagons. Cet investissement devrait durer sur vingt ans. Or pour qu’il soit rentable, il est nécessaire que la SNCF obtienne le monopole sur la ligne. Allez-vous confier le monopole du fret ferroviaire à Fret SNCF ? Allez-vous annoncer un plan de réinvestissement qui permette de relancer le fret ferroviaire en France, durement impacté depuis son ouverture à la concurrence en 2006 ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.
M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Je tiens à redire ici ce que la ministre chargée des transports a déjà dit à plusieurs reprises.
Nous avons réuni les principaux acteurs : la SNCF, qui transporte aujourd’hui ces fruits et légumes en provenance du sud de la France depuis la plateforme de Perpignan jusqu’à Rungis, les plateformes de Rungis et de Perpignan et les clients de ce transport – pour remplir les wagons, il faut évidemment que des producteurs de fruits et légumes, des grossistes utilisent ces transports ferroviaires.
Vous le savez, monsieur le sénateur, nous sommes engagés dans une politique de développement du transport ferroviaire. Nous n’avons jamais autant investi dans le rail en France qu’en cette période. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)
Vous pouvez dire le contraire sur toutes les travées, il peut y avoir des protestations de la droite à la gauche de l’hémicycle, mais les chiffres sont là : c’est 40 % ! (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.) Vous pouvez vociférer, cela ne changera rien au chiffre : les investissements ont augmenté de 40 % dans le transport ferroviaire !
Mme la sénatrice Létard le disait tout à l’heure à propos d’Ascoval : les commandes de rails pour régénérer les voies ont été multipliées par deux. C’est du concret ! Cela signifie qu’on rénove deux fois plus de rails aujourd’hui qu’on ne le faisait auparavant. (Exclamations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe Les Républicains.)
M. Pierre-Yves Collombat. Deux fois zéro est égal à zéro !
M. François de Rugy, ministre d’État. Dans ce domaine, nous ne voulons plus être dépendants d’un seul opérateur. Nous considérons donc, contrairement à vous, monsieur le sénateur, mais c’est une différence que nous assumons pleinement, que, plus les opérateurs ferroviaires seront nombreux, mieux ce sera pour avoir le meilleur service possible au moindre coût.
La réforme ferroviaire permettra d’accélérer la modernisation des services ferroviaires pour que les chargeurs de marchandises utilisent davantage le train et moins le camion. En l’occurrence, pour ce qui est de Rungis, la SNCF s’est engagée à poursuivre le service…
M. le président. Il faut conclure !
M. François de Rugy, ministre d’État. … jusqu’à la fin de l’année, aux mêmes conditions, et à faire des propositions concrètes pour poursuivre le service les années suivantes. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le ministre d’État, vous voulez inscrire l’écologie dans la Constitution et, là – mais vous ne nous répondez pas ! –, on va mettre 80 camions par jour sur les routes ! Mais, enfin, il faut dire la vérité !
Je le dis à mes collègues ici : les agents, on les a, pour faire fonctionner la ligne ; les locomotives, on les a ! Dès demain, on peut louer des wagons neufs réfrigérés pour acheminer les 1 400 tonnes de fruits et légumes au MIN de Rungis. La SNCF est prête ! Il faut évidemment que la ligne soit rentable, concept qui entre en principe dans vos éléments de langage… Pour ça, confiez-lui le monopole de cette ligne d’intérêt national entre Perpignan et Rungis. En plus, ça vous permettra de respecter vos engagements. L’écologie ne peut pas se réduire à des paroles, il faut passer aux actes !
M. le président. Il faut conclure !
M. Pascal Savoldelli. Dernière chose : vous opposez les chargeurs, les transporteurs, en gros les entreprises privées et le fret.
M. le président. Il faut conclure, cette fois-ci !
M. Pascal Savoldelli. Vous n’avez rien fait pendant un an ! Vous avez démantelé cette ligne ! Vous portez une très lourde responsabilité ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.)
avenir et moyens du ministère du sport
M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Gilbert-Luc Devinaz. Ma question s’adresse à Mme la ministre des sports.
Demain va s’ouvrir la Coupe du monde féminine de football. L’engouement populaire est fort et les attentes sont importantes pour notre équipe nationale.
En 2024, ce sont les jeux Olympiques et Paralympiques que Paris va accueillir. Des événements qui consacrent l’élite du sport tout en suscitant une attente collective énorme.
Pourtant, le mouvement sportif s’inquiète, madame la ministre : trois ans de baisse continue du budget du ministère des sports hors JO, la diminution du nombre d’emplois aidés, une agence nationale aux contours flous, 1 600 conseillers techniques et sportifs dont l’avenir est plus qu’incertain, ce qui provoque une crise dont le dénouement est impératif pour regagner la confiance du monde sportif. Tout cela sans oublier la baisse significative du CNDS. Dans nos territoires, l’inquiétude est palpable.
Sous couvert de donner une plus grande autonomie aux fédérations et aux collectivités, cette orientation ne cache-t-elle pas une forme de désengagement de l’État ? Comment pourra-t-on former la future génération de sportives et sportifs sans l’aide publique de l’État ? Devra-t-on passer par des structures payantes, privées, à but lucratif, qui feront la part belle aux disciplines en vogue, oubliant les activités moins médiatisées ?
Votre projet semble casser notre modèle national. N’est-il pas en train de briser toute la dynamique sportive, de nous faire courir le risque d’un déclassement dans les prochaines années ? Êtes-vous certaine de favoriser l’excellence et la renommée du sport à la française ?
Nous aurions pu lever ces interrogations si un vrai débat parlementaire avait eu lieu.
Madame la ministre, je vais vous poser quatre questions : où en est le programme Sport et société ? Où en est la mise en œuvre de l’institut du sport pour tous ? Comment l’Agence nationale du sport va-t-elle se décliner dans nos territoires ? Pourquoi maintenir votre position sur le détachement d’office des conseillers techniques et sportifs ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.
Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. L’organisation du sport français n’a que très peu évolué depuis les années soixante. À l’époque, les fédérations étaient balbutiantes, les collectivités locales n’existaient pas et le monde économique ne s’intéressait pas au sport. Depuis, le monde a changé, les attentes des Français aussi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Patrick Kanner. Répondez aux questions, madame !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Aujourd’hui, une majorité de Français fait du sport en dehors d’un club. Surtout, un Français sur deux ne pratique aucune activité physique. Il était devenu impératif de requestionner notre modèle.
C’est parce que les acteurs du monde du sport se sont démultipliés que l’Agence nationale du sport a été créée. Avec ce nouvel opérateur, l’État garde la main, mais il la tend aussi. En effet, le sport, c’est, outre le haut niveau, le moyen d’être en bonne santé, de s’épanouir, d’éduquer ou de réparer.
Cette agence marchera bien sur ses deux jambes : la haute performance et le développement du sport pour tous.
M. Patrick Kanner. La réponse, madame !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Elle aura pour mission de piloter le déploiement des politiques sportives en concertation avec tous les acteurs et au plus près des territoires. L’État doit être plus agile et capable de s’adapter aux besoins de chaque Français.
M. Patrick Kanner. Et les conseillers techniques ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. La création de l’Agence traduit aussi une nouvelle ambition, un État stratège et partenaire. Elle augmente la capacité d’action du ministère des sports, qui va assurer pleinement ses missions de sécurité des pratiquants, de respect des règles et d’éthique, de l’intégrité, de la formation, de l’élaboration de politiques interministérielles. Le ministère des sports conserve son rôle central dans l’élaboration, le pilotage et la mise en œuvre des politiques publiques.
J’entends dire, comme vous l’avez dit, monsieur le sénateur, que, depuis mon arrivée, le ministère des sports serait affaibli.
M. Patrick Kanner. Oui !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Permettez-moi, mesdames, messieurs les sénateurs, de le répéter devant vous, je suis fière de l’action d’un Gouvernement qui fait le choix fort de développer des politiques sportives ambitieuses et qui le traduit par un ministère des sports de plein exercice,…
M. Patrick Kanner. Votre budget, madame !
M. le président. Il faut penser à conclure !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. … un Gouvernement qui permettra de vous présenter une exécution budgétaire 2018 à son plus haut niveau depuis dix ans ; de l’action d’un Gouvernement…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. … engagé derrière Paris 2024 pour en faire un grand événement populaire ; des politiques sportives et un ministère des sports…
M. le président. Il faut vraiment conclure !
M. le président. Madame la ministre, moi aussi, je travaille au chronomètre !
Mme Roxana Maracineanu, ministre. … et encore plus fort demain !
situation des petites lignes ferroviaires
M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Genest. Madame la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, j’aurais pu poser ma question à votre collègue ministre chargée des transports, mais j’ai considéré qu’elle soulevait un véritable problème d’aménagement du territoire.
Lors de la restitution du grand débat, M. le Président de la République a déclaré : « Les Français ont confiance dans leurs élus locaux et ce nouvel acte de décentralisation doit porter sur des politiques de la vie quotidienne », dont le transport, « pour garantir des décisions prises au plus près du terrain. » Il avait bien compris que le détonateur de la crise des « gilets jaunes » avait été le prix du carburant.
À l’occasion de la loi Mobilités, un tir en règle s’est déclenché contre les petites lignes aériennes intérieures à travers des amendements visant à demander une nouvelle contribution au décollage et la suppression de la quasi-totalité des lignes.
Vous n’ignorez pas que ces petites lignes ont un rôle essentiel de désenclavement pour ces territoires éloignés. Je pourrais citer Aurillac, Le Puy, Biarritz, Clermont-Ferrand et d’autres. J’affirme que, contrairement aux dires des auteurs de ces amendements, ces lignes sont empruntées non par des privilégiés mais en majorité par des acteurs essentiels de l’économie locale.
Madame la ministre, quelle est la position du Gouvernement face à ces attaques contre des territoires enclavés et que proposez-vous ? Le Gouvernement est-il prêt à s’engager à renoncer à toute taxation supplémentaire ou interdiction qui pénaliserait une fois de plus l’aménagement du territoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales…
Non, ce sera M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire qui va vous répondre. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François de Rugy, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Genest, je remarque la joie qui vous emplit de me voir répondre à votre question. (Sourires.) En effet, c’est moi qui suis le ministre de tutelle des transports, et Élisabeth Borne est actuellement retenue à l’Assemblée nationale par la discussion du projet de loi d’orientation des mobilités.
Je pensais que votre question porterait sur les petites lignes ferroviaires. Elle concerne en réalité les « petites » lignes aériennes, ces lignes qui permettent le désenclavement de villes comme Aurillac, dont vous avez parlé. On pourrait également évoquer Castres et d’autres villes assez éloignées de Paris qu’il est difficile de rejoindre en train ou en voiture dans des temps de parcours acceptables. Pour ces trajets, l’avion apporte un surcroît de service.
Je tiens à dire que ce qui a été voté à l’Assemblée nationale ne consiste pas à surenchérir le coût des billets d’avion. La solution choisie est de prélever un surplus non utilisé de la taxe dite Chirac – créée sous la présidence de Jacques Chirac pour financer des mesures de solidarité internationale. Cette somme de 30 millions à 40 millions d’euros financera l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Même s’il s’agit d’une demande largement exprimée, notamment par les « gilets jaunes », que vous n’avez pas hésité à soutenir lors d’une question précédente, je vous le rappelle,…
M. Jacques Genest. Je l’assume !
M. François de Rugy, ministre d’État. … nous avons refusé de taxer le kérosène sans distinction. Nous avons choisi d’écarter du dispositif les vols intérieurs, car nous savons que cela aurait un effet de concurrence déloyale avec nos voisins. Nous aurions une bataille au niveau européen.
Je vous confirme que nous continuons à subventionner ces lignes – car subvention il y a. Nous cherchons, là aussi, les meilleurs opérateurs pour remplacer les compagnies qui veulent se désengager, afin de garantir la desserte de tout le territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Genest, pour la réplique.
M. Jacques Genest. Je vous remercie, monsieur le ministre d’État, mes inquiétudes sont un peu levées, mais pas tout à fait.
Pas d’autoroute, pas de TGV, parfois pas même de train – si vous avez la chance d’être à deux ou trois heures d’une gare de TGV, celui-ci est régulièrement en retard et souvent complet –, explosion du prix de l’électricité, alors que vous nous invitez à acheter des voitures électriques, et maintenant menaces sur les lignes aériennes intérieures : quel tableau pour la mobilité dans nos territoires enclavés !
Je vous propose de ne pas affecter le surplus de 30 millions d’euros de la taxe sur les billets d’avion à l’Afitf, agence qui, comme les autres, coûte très cher en frais de fonctionnement. Je vous propose à la place plusieurs choix.
M. le président. Il faut conclure dans vos choix !
M. Jacques Genest. Je vous propose de les affecter, soit à une baisse des taxes sur les petites lignes, soit à des travaux routiers prioritaires dans ces secteurs. Je vous suggérerais également volontiers, avec un peu d’humour, d’acheter des trottinettes, mais pas électriques, puisque l’électricité coûte trop cher ! (Marques d’impatience sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. Il faut vraiment conclure !
M. Jacques Genest. Vous n’avez pas retenu la leçon : il faut arrêter l’écologie punitive, comme l’avait dit M. Hulot lors de son départ du Gouvernement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
déremboursement des médicaments homéopathiques
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Yves Détraigne. Ma question s’adressait à Mme la ministre des solidarités et de la santé ; du fait de son absence, je l’adresserai plutôt à Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès d’elle.
Je souhaite appeler votre attention, madame la secrétaire d’État, sur le déremboursement des médicaments homéopathiques, qui semble être envisagé. L’avis de la commission de la transparence de la Haute Autorité de santé n’a certes pas encore été rendu, mais il est à craindre, selon les bruits qui courent, que cette décision soit déjà officieusement prise.
Pourtant, toutes les études d’opinion convergent pour constater que plus de 70 % des Français sont attachés à la liberté de choisir entre allopathie et homéopathie. Trois quarts des Français interrogés pensent que l’homéopathie a prouvé son efficacité et sont favorables au maintien de son remboursement.
Une étude menée à la demande du ministère de la santé en 2006 a d’ailleurs démontré l’intérêt de l’homéopathie pour la santé publique : ce comité d’experts indépendants indiquait que, à niveau de gravité égal, le résultat de la pratique des médecins homéopathes était comparable à celui de leurs collègues qui ne prescrivent pas d’homéopathie, mais surtout qu’il offrait un gain réel du fait de l’économie de prescription de médicaments conventionnels. Ainsi, un patient traité par homéopathie consomme trois fois moins d’anti-inflammatoires et d’antibiotiques.
Par ailleurs, l’homéopathie est un recours indéniable auprès des enfants et des femmes enceintes. Elle est aujourd’hui utilisée quotidiennement comme soin de support aux traitements anticancéreux. Ne plus la rembourser engendrerait une surconsommation de médicaments allopathiques et une augmentation de la charge financière supportée par notre système de santé.
Enfin, économiquement parlant, le déremboursement entraînerait, à moyen terme, la fin de cette filière en France, alors même que nous abritons sur notre territoire le leader mondial en ce domaine et que les trois laboratoires pharmaceutiques opérant dans ce secteur ont tous fait le choix de l’Hexagone pour la production de leurs médicaments : ils emploient plus de 3 200 personnes réparties sur l’ensemble du territoire national. Une telle décision aurait donc également des conséquences sociales particulièrement fâcheuses.
M. le président. Votre question ?
M. Yves Détraigne. J’y viens, monsieur le président.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer si vous allez, ou non, dérembourser ces remèdes médicaux naturels et peu onéreux qui permettent de réduire la consommation allopathique ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d’État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. La commission de la transparence, commission spéciale de la Haute Autorité de santé, est une instance collégiale, scientifique et indépendante qui regroupe cliniciens et membres d’associations de patients et d’usagers.
La commission de la transparence a rendu le 15 mai dernier un avis commun à l’ensemble des médicaments, en offrant des conclusions détaillées par maladie ou par symptôme, selon les données disponibles. Elle a fondé son évaluation sur les preuves disponibles et la littérature – près de 800 études ont été consultées –, sur les données déposées par les trois laboratoires que vous avez cités, monsieur le sénateur Détraigne, mais aussi sur les contributions des parties prenantes.
Depuis les années soixante, l’homéopathie bénéficie d’un statut et d’un régime dérogatoires. Il était important de mettre fin à ce débat en mobilisant une expertise scientifique et indépendante qui se baserait sur une analyse de la totalité de la littérature. C’est pour cette raison que Mme la ministre a saisi la Haute Autorité de santé en août 2018.
En France, le remboursement des médicaments se fonde sur un principe fort : on prend en charge les thérapies dont l’effet est scientifiquement prouvé. Les patients doivent pouvoir bénéficier d’une information claire et appropriée sur ces médicaments, afin de pouvoir choisir d’y avoir recours ou non, en cas de maintien du remboursement comme en cas de déremboursement.
Ces médicaments sont, pour leur grande majorité, vendus sans ordonnance et ne sont actuellement pas remboursés. Une partie d’entre eux est prise en charge à hauteur de 30 % par la sécurité sociale. Il ne s’agit donc pas de réformer pour faire des économies.
Enfin, sur la question de l’emploi, le Gouvernement est sensible bien évidemment à ce sujet. Nous comprenons celles et ceux qui s’inquiètent, au sein des territoires, des risques que ce déremboursement pourrait avoir sur l’emploi et sur l’économie locale. Les laboratoires pharmaceutiques sauront s’adapter à cette situation : nous ne sommes pas en train d’interdire l’homéopathie. Par ailleurs, les industriels qui produisent en France pourront continuer à vendre leurs médicaments dans notre pays, mais aussi à l’international. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
prédation de l’ours