M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Jacques Lozach. Ma question s’adresse à Mme la ministre des sports.
Les festivités saluant le fantastique parcours sportif de l’équipe de France de football sont encore dans tous les esprits, et les échos de ce moment de ferveur populaire et de communion nationale résonnent toujours. Comment capitaliser sur ce formidable événement, au moment où les débats se poursuivent sur la gouvernance du sport et alors qu’approche le débat budgétaire pour l’année prochaine ?
Nous souhaitons mettre en perspective cette belle aventure populaire, source de joie et d’inspiration, avec les interrogations que suscite la politique sportive du Gouvernement.
Le 9 juillet dernier, devant le Congrès, le Président de la République a présenté sa vision politique sur de très nombreux sujets. Force fut de constater un absent : le sport. De même, les moyens budgétaires mobilisés dans la loi de finances pour 2018 au bénéfice de cette politique publique ont connu une régression.
Les vingt-trois joueurs de l’équipe nationale présentent vingt-trois parcours de formation de très grande qualité, bien souvent dans des clubs aux moyens modestes. Il importe de préserver cette richesse associative. Or ces clubs traversent une période difficile, caractérisée par la baisse des dotations des collectivités, la réduction du nombre de contrats aidés, l’ubérisation du sport, le manque de reconnaissance pour le bénévolat, ainsi que la diminution en 2018 des crédits du Centre national pour le développement du sport.
Madame la ministre, face à l’afflux probable de nouveaux licenciés à la suite de l’engouement provoqué par cette victoire, comment allez-vous favoriser l’accueil de tous ces jeunes, et pas seulement dans le football ?
Plus largement, le moment n’est-il pas venu de proposer un projet de loi de programmation budgétaire pour le sport, afin de préparer les jeux Olympiques de 2024 à Paris dans les meilleures dispositions, animé par des ambitions fortes dans la construction de l’héritage olympique, par-delà la recherche de médailles, avec l’augmentation du nombre de pratiquants, le développement des équipements de proximité, le désengorgement de la filière des métiers du sport ou bien encore la promotion du sport scolaire ? Comment entendez-vous relever ces défis ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.
Mme Laura Flessel, ministre des sports. Monsieur le sénateur Lozach, depuis un an, le sport français connaît une période exceptionnelle, tant au niveau de ses résultats que de l’obtention de grands événements sportifs. (Exclamations sur diverses travées.)
M. Patrick Kanner. C’est aimable pour moi !
Mme Laura Flessel, ministre. Cette situation nous oblige à faire ce qui n’a jamais été fait.
Comme vous l’avez rappelé, j’ai engagé une réforme profonde de la gouvernance du sport français, gouvernance qui n’a pas bougé depuis soixante ans.
M. Rachid Temal. Ah oui ?
Mme Laura Flessel, ministre. Il y a encore une heure, je présidais le dernier comité de pilotage de ce chantier. Tous les acteurs étaient présents. Les représentants des collectivités territoriales, des mouvements sportifs et du monde économique ont salué la très grande qualité de ce travail collectif et ils ont jugé historique le résultat auquel nous étions parvenus. Historique, car, depuis le 13 septembre dernier, le sport français est au rendez-vous avec l’histoire, et c’est le genre de rendez-vous qu’on n’a pas le droit de manquer.
Cette nouvelle gouvernance va conduire à une mutation économique du modèle sportif français,…
M. Jacques Grosperrin. Avec une baisse des budgets !
M. Rachid Temal. Et la suppression des contrats aidés !
Mme Laura Flessel, ministre. … parce que, je l’assume, ce n’est pas le rôle de l’État de financer durablement les clubs.
L’État accompagnera les acteurs associatifs dans cette période de transition – c’est pourquoi j’ai décidé de libérer une enveloppe de 5,6 millions d’euros pour le soutien aux clubs en difficulté –, mais le changement doit avoir lieu vers un modèle économique moins dépendant des fonds publics. C’est cela l’autonomie du mouvement sportif.
Pour le reste, vous le savez comme moi, la discussion budgétaire est en cours. Nous devrons trouver les moyens de financer nos ambitions en matière de haute performance et d’accès à la pratique, car le sport ne peut avancer que sur deux jambes. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)
rapport du cap 22
M. le président. La parole est à M. Jean Sol, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Sol. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre, mais je voudrais au préalable féliciter l’équipe de France de football au nom de mon groupe.
Monsieur le Premier ministre, vous êtes ici devant la représentation nationale, devant des élus de la Nation. La Constitution nous confie deux missions : faire la loi et contrôler l’action du Gouvernement. Nous avons le sentiment que, depuis quelque temps, notre tâche n’est pas simplifiée.
Concernant la fabrique de la loi, après un premier trimestre législatif peu dense au cours duquel le Gouvernement n’a présenté aucun texte important, nous faisons face à un embouteillage – et je n’évoque même pas les commissions mixtes paritaires non conclusives. Rien ne semble avoir été fait pour l’éviter. Pourquoi ne pas avoir choisi le Sénat en première lecture pour certains textes ?
Mme Esther Benbassa. Très bien !
M. Philippe Dallier. Très bonne question.
M. Jean Sol. J’ajoute que, trop souvent, les textes nous arrivent insuffisamment préparés. Nous ne comptons plus les amendements du Gouvernement qui modifient substantiellement les projets de loi la nuit précédant le débat. Nous avons atteint l’apothéose avec l’amendement annoncé par le Président de la République, qui a balayé d’un revers de main le volet « chômage » du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Monsieur le Premier ministre, la totalité des informations dont nous avons besoin pour légiférer ou contrôler ne nous parvient pas toujours exhaustivement dans un délai raisonnable. Nous avons besoin de plus de transparence de la part du Gouvernement.
Qu’est devenu le schéma d’emplois 2019, usuellement annexé aux documents de préparation du débat d’orientation budgétaire ? Nous aimerions connaître vos projets et vos objectifs en matière d’emplois publics, ministère par ministère.
Pouvez-vous nous expliquer par quelle logique la presse dispose du rapport du Comité Action publique 2022, alors que notre collègue Christine Lavarde, membre de cette instance, n’en a même pas eu connaissance ?
Le Parlement mérite d’être respecté et personne, pas même le Président de la République, ne peut prétendre incarner à lui seul l’édifice républicain. Comment comptez-vous corriger ce qui pourrait être interprété comme de la défiance et du mépris vis-à-vis du Parlement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur de nombreux sujets…
M. Marc-Philippe Daubresse. Tout se télescope !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. … – tous excellents –, tels que la qualité du travail parlementaire, la qualité de la relation entre le Gouvernement et les deux assemblées, le projet de révision constitutionnelle, la façon dont nous envisageons la transformation de l’action publique ou encore l’utilisation d’un travail d’experts qui nous a été rendu.
Je vais essayer de répondre, sinon à toutes ces questions, du moins de la façon la plus claire possible.
Vous avez évoqué la façon dont le Gouvernement envisage, domaine par domaine, chapitre par chapitre, de transformer l’action publique pour essayer à la fois de mieux servir nos concitoyens, de faire en sorte que le service public soit plus efficace et aussi, assumons-le, qu’il soit rendu avec une économie de moyens. C’est l’objet du travail que j’ai confié aux membres du Comité Action publique 2022, qui ont procédé à des auditions, travaillé avec les ministères et les administrations compétentes pour produire un rapport. Ce rapport existe.
M. Marc-Philippe Daubresse. Oui, mais on ne l’a pas !
M. Xavier Iacovelli. Il est où ce rapport ?
M. Rachid Temal. Eh oui, il est où ?
M. Vincent Éblé. Ne pas l’avoir, c’est inacceptable pour la représentation nationale !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il me paraît plus intéressant, et je suis sûr que vous allez comprendre le sens de ma réponse, de discuter de ce que nous allons faire plutôt que de tel ou tel rapport. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.) Sachez que j’assume parfaitement cette position !
M. Marc-Philippe Daubresse. Dans ce cas, il ne fallait pas demander de rapport !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. J’ai souvenir de beaucoup de rapports – j’ai même participé à la rédaction de certains d’entre eux – formulant cinquante, soixante-dix, cent ou cent vingt propositions. Or, dès leur publication, le débat se concentrait toujours sur une seule mesure.
M. Vincent Éblé. Donnez-nous ce rapport au lieu de nous en parler ! C’est inacceptable !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Sarkozy avait bien publié le rapport Attali !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président, j’essaie de répondre à M. le sénateur Sol…
Je disais donc que notre objectif est de faire en sorte d’intégrer les propositions formulées dans ce rapport dans une série de mesures qui vont transformer l’action publique.
Avec l’un des présidents du Comité Action publique 2022 et la rapporteuse chargée des questions relatives au service public de l’emploi, nous avons fait le point sur les propositions formulées par ce comité, et nous avons indiqué que nous allions en retenir trois. J’ai d’ailleurs précisé dans le communiqué de presse – je suis certain que vous l’avez lu avec attention – lesquelles nous ne retenions pas, sujet par sujet.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Publiez donc l’ensemble du rapport !
M. Vincent Éblé. Oui, rendez-le public !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous allons continuer ce travail, qui n’est pas achevé, et nous porterons dans le débat public les propositions de transformation sur lesquelles nous nous engageons. À l’issue de ce travail, le rapport sera rendu public. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Non, il faut le faire avant !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je crois plus intéressant de lancer le débat sur ce que nous voulons faire que sur un travail d’experts qui nous a été rendu pour nourrir notre réflexion. (Le rapport ! sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Voilà ce que je voulais vous dire sur ce sujet, monsieur le sénateur, malgré un certain brouhaha…
M. Vincent Éblé. Le Gouvernement n’est pas le seul à avoir le droit de travailler ! Les parlementaires aussi en ont le droit !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. J’en viens au deuxième sujet sur lequel vous m’avez interrogé, monsieur le sénateur : la qualité du travail entre le Gouvernement et le Parlement.
Je l’ai toujours dit, j’ai le plus grand respect pour le Parlement (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),…
M. Bruno Retailleau. Il faut le montrer !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. … notamment pour ses deux chambres. Les deux chambres produisent des idées, apportent des corrections, font des propositions, déposent des amendements qui sont souvent de nature différente.
Être respectueux du travail de chacune des assemblées ne veut pas dire – je pense que vous en conviendrez – être systématiquement d’accord avec l’ensemble des propositions et l’ensemble des sujets.
M. Vincent Éblé. On aimerait bien savoir si on est d’accord avec le rapport, mais on ne l’a pas !
M. Patrick Kanner. Libérez le rapport ! Libérez le rapport !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. L’objectif est de faire en sorte que le débat puisse être plein et entier et que nous puissions, lorsque nous ne sommes pas d’accord, admettre et documenter nos points de désaccord pour faire en sorte d’aboutir, par le jeu du bicamérisme et de la navette parlementaire, au meilleur texte possible.
Tel est exactement l’état d’esprit qui est le mien sur le projet de loi que vous discutez en ce moment au Sénat comme sur tous les autres. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Sylvie Vermeillet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.
Monsieur le ministre, dans le cadre du Comité Action publique 2022, votre ministère s’est engagé dans une démarche de révision des aides fiscales. Parmi vos propositions figure la suppression des taux réduits de TVA concernant le bâtiment.
Dans un entretien accordé à un quotidien national, vous avez écarté l’idée de toucher au taux réduit de TVA dans la restauration, estimant « que l’augmentation des impôts n’était pas la bonne solution ». Vous semblez toutefois valider en creux l’idée d’un abandon des taux réduits applicables à la rénovation énergétique et à l’amélioration du bâti.
À l’heure où les travaux de rénovation stagnent et où l’État souhaite lutter contre la précarité énergétique, la suppression de ces taux réduits pénaliserait les ménages les plus modestes et produirait des effets désastreux pour le secteur du bâtiment.
Les travaux de rénovation représentent près de 60 % des 135 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel du secteur du bâtiment, notamment grâce au taux réduit de TVA, dont vous ne pouvez ignorer l’effet sur l’activité économique de notre pays. Un relèvement du taux de TVA, donc des prix, entraînera une baisse du volume des travaux déclarés, c’est-à-dire une hausse du travail au noir, et, par conséquent, la destruction de milliers d’emplois. Quelque 27 000 emplois seront ainsi supprimés. Adieu croissance, adieu transition énergétique, bonjour chômage et fraude fiscale !
Dans la perspective du projet de budget pour 2019, pouvez-vous nous indiquer quelles sont les intentions du Gouvernement concernant le secteur du bâtiment ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Madame la sénatrice Sylvie Vermeillet, comme l’a bien exposé le Premier ministre, tous les ministères sont actuellement engagés, chacun dans leur champ de compétences, dans une démarche vertueuse d’évaluation de leurs missions et des dispositifs fiscaux et non fiscaux qui les concernent, afin d’identifier les réformes nécessaires à une plus grande efficacité. C’est tout le sens du programme Action publique 2022, lancé en février dernier.
Dans ce cadre, le ministère de l’économie et des finances mène une revue des aides budgétaires et fiscales aux entreprises, afin d’évaluer leur efficience économique au regard du coût qu’elles représentent pour les finances publiques. Ces aides font également l’objet de nombreuses concertations avec les associations et fédérations d’entreprises. Cela ne signifie pas qu’elles ont vocation à terme à être remises en cause.
Le ministre de l’économie et des finances a par ailleurs annoncé lors de la commission d’évaluation des politiques publiques qu’il souhaitait associer les parlementaires à cette démarche d’évaluation.
Le Gouvernement est pleinement conscient de l’importance pour les secteurs concernés des taux réduits de TVA, qu’il s’agisse du taux de 10 % ou de celui de 5,5 % dont bénéficient les travaux de rénovation. La ligne du Gouvernement reste la même : rechercher un impact optimal pour ces réformes en faveur de l’activité économique et de l’emploi. Ce sont donc les dispositifs les moins efficaces à cet égard qu’il faut modifier ou supprimer.
Lors du congrès national de la Fédération française du bâtiment, Bruno Le Maire a rappelé l’attention particulière qu’il portait au bâtiment, en annonçant notamment des évolutions positives pour ce secteur : le relèvement de 5 % à 20 % des avances sur les marchés de travaux passés par l’État pour les PME et l’interdiction dans les marchés publics des ordres de service à zéro euro.
Nous mènerons ces actions avec détermination.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour la réplique.
Mme Sylvie Vermeillet. Il est certes plus simple de supprimer des emplois dans le bâtiment qu’à Bercy…
Si une chose échappe toutefois à Bercy, parce qu’elle ne se décrète pas, c’est la confiance. Or, dans un contexte de croissance fragile, la confiance dans le secteur du bâtiment, vous en aurez sacrément besoin ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
cabinet de la présidence de la république (III)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Raimond-Pavero, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Isabelle Raimond-Pavero. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Je reviens sur l’affaire Benalla, car les réponses de M. le Premier ministre ne nous ont pas convaincus.
Un membre du cercle rapproché du Président de la République a été filmé en train de frapper un manifestant à terre alors que ce dernier avait été isolé par les CRS. Cela s’est passé le 1er mai dernier, et celui qui était alors chef de cabinet adjoint du Président de la République arborait un casque des forces de l’ordre.
Son parcours n’est pas exempt d’incidents.
Arnaud Montebourg, qui l’avait recruté comme chauffeur, s’en était séparé au bout d’une semaine, car il avait provoqué un accident de voiture et voulait prendre la fuite.
Il y a plus d’un an, il a arraché l’accréditation d’un journaliste de la rédaction de Public Sénat avant de l’évacuer d’un meeting de M. le Président de la République.
Ce qui s’est passé le 1er mai n’a échappé ni au Président de la République, qui en a été informé, ni à son directeur de cabinet. Une sanction est tombée discrètement, aussi dérisoire que symbolique.
Madame la garde des sceaux, pourquoi avoir attendu que les faits soient rendus publics pour que la justice se saisisse et ouvre une enquête préliminaire ? Pouvez-vous nous donner la raison pour laquelle le cabinet du Président de la République n’a pas, en application de l’article 40 du code de procédure pénale, saisi lui-même le procureur de la République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Jean-Pierre Sueur. Très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Jean-Pierre Sueur. Il faut répondre sur l’application de l’article 40, monsieur le ministre d’État !
M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice, je réponds à la place de Mme la garde des sceaux, qui est à l’Assemblée nationale pour l’examen du projet de loi constitutionnelle.
Je crois en un ordre républicain. Seules les forces de sécurité intérieure sont chargées d’assurer le maintien de l’ordre. Et c’est ce qu’elles font !
Lors de la manifestation du 1er mai, qui, vous vous en souvenez, ne s’est pas déroulée sans difficultés, les forces de l’ordre ont assuré avec calme le droit à manifester d’un certain nombre de personnes. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.)
M. Rachid Temal. Ce n’est pas la question !
M. Jean-Pierre Sueur. Pourquoi ne pas avoir appliqué l’article 40 ?
M. Xavier Iacovelli. Répondez-nous !
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Nous ne saurions accepter que des personnes se substituent aux forces de l’ordre. C’est pour cela que le rapport qui a été demandé à l’IGPN sera rendu public. Vous disposerez donc de toutes les informations sur ce qui constitue évidemment un grave dysfonctionnement. (M. Didier Guillaume applaudit.)
M. Rachid Temal. Pas de réponse !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Raimond-Pavero, pour la réplique.
Mme Isabelle Raimond-Pavero. Monsieur le ministre d’État, une sanction modeste et une saisine de la justice qui intervient sous la pression un mois et demi après les faits, c’est-à-dire une fois que ceux-ci ont été rendus publics, voilà qui donne le sentiment que, à l’Élysée, on pense être au-dessus des lois !
M. Rachid Temal. Eh oui !
Mme Cécile Cukierman. Absolument !
Mme Isabelle Raimond-Pavero. Quelles que soient les suites de cette affaire affligeante, l’Élysée, en ayant tenté d’étouffer les faits et en ne saisissant pas la justice dès le premier jour, aura failli à son devoir d’exemplarité. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste, du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
imam de toulouse
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains.
M. François Bonhomme. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
Depuis plusieurs mois et même depuis plusieurs années, les violences antisémites et les provocations islamistes se multiplient dans notre pays.
L’imam de Toulouse a récemment tenu des propos que l’on aimerait ne plus jamais entendre sur notre sol. Il a lancé un appel au meurtre des juifs au nom de l’islam et au nom « du respect des commandements divins ».
Cet imam est coutumier du prêche haineux et violent. Ses références sont celles des islamistes. Son modèle est celui des Frères musulmans. Il affiche tranquillement son hostilité à la démocratie et sa haine de la France. Il brandit régulièrement la victimisation des musulmans, fustige la loi française et ses choix démocratiques sur fond de réquisitoire contre l’Occident et ses valeurs.
Face à cette situation, le maire de Toulouse a procédé à un signalement à la justice, ce qui a fait réagir le parquet, qui a demandé une enquête. En revanche, on ne vous a guère entendu sur cette affaire, monsieur le ministre d’État. J’ai bien cherché, mais en vain. C’est pourquoi je vous interroge : que comptez-vous faire face à un imam algérien qui prêche régulièrement la haine des juifs sur notre sol, dans une langue étrangère de surcroît, et lance des appels au meurtre contre les juifs dans notre propre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur les propos tenus par M. Tatai, imam de la grande mosquée de Toulouse.
Il se trouve que, quelques jours après qu’il a tenu ces propos, je participais au dîner du CRIF à Marseille. L’émotion dans cette assemblée était très forte, et j’y ai condamné avec la plus grande fermeté des propos qui incitent effectivement à la haine.
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Cela ne suffit pas !
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Les actes antisémites se sont multipliés en France ces dernières années et l’on déplore une succession de personnes sauvagement assassinées.
Comme je l’ai annoncé à Marseille, j’ai demandé qu’une plateforme de pré-plaintes en ligne soit créée, car un certain nombre de victimes n’osent pas porter plainte par peur des représailles.
En outre, nous avons formé un certain nombre de policiers au traitement des actes antisémites pour qu’ils sachent comment réagir.
Le préfet a porté plainte contre cet imam. Nous faisons confiance à la justice, car – je le dis solennellement dans cette assemblée – on ne peut, en France, appeler à tuer des juifs impunément. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
MM. Roger Karoutchi et Bruno Sido. Expulsez-le !
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Monsieur le ministre d’État, j’ai bien écouté votre réponse. Sachez qu’un ministre a réagi, celui des affaires religieuses d’Algérie : il a appelé les médias français à cesser leur propagande au profit de tout ce qui porte atteinte à l’islam et à ses symboles.
Je ne veux pas de cette montée d’une nouvelle forme d’antisémitisme, venue cette fois de l’islamisme, que vous ne désignez pas. Je vous rappelle que des juifs vivant en banlieue ont dû massivement déménager, car ils ne pouvaient plus habiter certains quartiers. Je vous rappelle également l’assassinat de Sarah Halimi, le meurtre de Mireille Knoll, défenestrée à quatre-vingt-cinq ans, ou encore l’affaire Médine, un rappeur qui célèbre le djihad, qui s’attaque à la laïcité et qui, au mépris des victimes, va se produire en octobre prochain au Bataclan.
Nous ne voulons ni prêchi-prêcha, ni contorsions, ni circonvolutions. Nous vous demandons simplement de dénoncer clairement le mal en désignant le radicalisme musulman, qui a produit et qui produit de l’antisémitisme. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu le mardi 24 juillet prochain, à seize heures quarante-cinq.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)