Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 et 553 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. L’amendement n° 199 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
… Après le septième alinéa de l’article L. 722-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le directeur général de l’office peut, dans une situation d’urgence liée à une évolution, soudaine ou imminente, dans un pays, en suspendre l’inscription de la liste des pays d’origine sûrs. Dans ce cas, le conseil d’administration est réuni dans les meilleurs délais et se prononce sur le maintien ou la radiation du pays de la liste des pays d’origine sûrs dans les conditions prévues au quatrième alinéa du présent article. » ;
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. J’ai déjà défendu cet amendement, aidé en cela par le président de la commission des lois, qui a fait preuve d’une force de conviction que je ne saurais égaler.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à introduire une procédure exceptionnelle de suspension d’un pays de la liste des pays d’origine sûrs, mise en œuvre exclusivement par le directeur de l’OFPRA, puis confirmée par le conseil d’administration.
Une procédure exceptionnelle similaire existe déjà, mise en œuvre par le conseil d’administration : elle lui permet de suspendre l’inscription d’un pays sur cette liste en cas d’évolution rapide et incertaine de la situation d’un pays.
S’il est normal que le conseil d’administration soit convoqué dans les meilleurs délais quand les circonstances l’exigent, le Sénat souhaite que la décision demeure collégiale.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je maintiens malgré tout l’amendement, car il faut bien que le conseil d’administration se réunisse. Il s’agit de prévoir une compétence spécifique du directeur de l’OFPRA, dans l’attente d’une réunion du conseil d’administration. Même si celle-ci ne saurait tarder, il n’y aurait pas de difficultés pendant deux ou trois mois.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. J’ai un peu de mal à comprendre l’amendement, car la situation s’est déjà produite. Dans ce cas, le directeur général convoque immédiatement le conseil d’administration et, du fait de l’urgence de la situation, suspend l’inscription sur la liste des pays d’origine sûrs. On n’attend pas deux ou trois mois, c’est immédiat !
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 199 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 120 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Assassi, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Watrin, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer les mots :
ou une association de défense des personnes homosexuelles ou des personnes transgenres
par les mots :
, une association de défense des personnes LGBTQI,
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. L’article L. 722-1 du CESEDA permet aux associations de défense des droits de l’humain, de défense des droits des étrangers ou des demandeurs d’asile, de défense des droits des femmes ou de défense des droits des enfants de saisir le conseil d’administration de l’OFPRA d’une demande tendant à l’inscription ou à la radiation d’un État de la liste des pays considérés comme des pays d’origine sûrs. Complété en commission des lois par un amendement de nos collègues socialistes, le texte prévoit désormais d’accorder ce droit aux associations de défense des personnes homosexuelles et transgenres.
Ces amendements ont fort heureusement été adoptés par la commission des lois, en cohérence avec la protection accordée aux personnes persécutées en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Nous estimons cependant que ces avancées ne sont pas satisfaisantes en l’état et souhaitons remplacer la mention « personnes homosexuelles ou transgenres » par « personnes LGBTQI », afin que les bisexuels et les intersexes soient protégés au même titre.
Le cas des personnes bisexuelles est particulièrement préoccupant comme nous l’ont confié les associations de défense des droits des personnes LGBTQI que nous avons auditionnées ces dernières semaines. Les bisexuels se voient en effet souvent refuser une demande de séjour au titre des persécutions subies de par leur orientation sexuelle, car ils auraient eu par le passé des compagnons ou des compagnes du sexe opposé.
Le terme « LGBTQI » permettrait d’offrir une protection plus effective et inclusive à ces requérants, qui subissent de nombreuses violences et persécutions dans leur pays d’origine.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cela vient d’être rappelé, la commission a adopté un amendement visant à élargir l’habilitation des associations susceptibles de saisir le conseil d’administration de l’OFPRA.
Introduits dans un texte législatif, des acronymes sont susceptibles de poser des difficultés. La rédaction de la commission semble plus adaptée, claire et juridiquement sérieuse.
L’avis est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.
Mme Esther Benbassa. Je ne vois pas en quoi c’est une difficulté d’adapter notre législation à de nouvelles dénominations. Pourriez-vous m’expliquer, monsieur le rapporteur, pourquoi ce serait difficile, car je ne le comprends pas ?
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. La rédaction de la commission tient compte de toutes les situations, sans exclusive. Elle ne pose donc pas de difficulté particulière, et elle est, sur le plan législatif, parfaitement correcte. Il n’est pas souhaitable d’introduire dans les textes des acronymes de toute nature.
Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 41 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Bocquet, Mmes Brulin, Cohen et Cukierman, MM. Gay et Gontard, Mme Gréaume, MM. P. Laurent et Ouzoulias, Mme Prunaud et MM. Savoldelli et Watrin, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 722-6. – L’Office émet par lettre recommandée avec accusé de réception les notifications prévues au présent livre ainsi qu’au livre VIII. » ;
II. – Alinéas 16, 17, 25, 27 et 28
Remplacer les mots :
tout moyen
par les mots :
lettre recommandée avec accusé de réception
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Sous couvert de simplification administrative, l’article 5 du projet de loi autorise l’OFPRA à adresser la convocation à l’entretien individuel « par tout moyen », y compris électronique : messages téléphoniques, courriels, et j’en passe. Sans entrer dans des considérations juridiques, si j’en appelle d’abord au bon sens, chacun peut entendre que cette mesure est parfaitement injuste et s’inscrit dans une logique purement comptable.
Cette liberté dans la transmission des informations se fera inévitablement au détriment des demandeurs d’asile, étant donné leur situation particulièrement vulnérable et leurs conditions de vie précaires, évoquées hier par Esther Benbassa.
La notification par tout moyen ne permet pas le contrôle de l’envoi et de la bonne réception de la convocation ou des décisions par les intéressés. Aucune disposition ne garantit que la décision ne soit pas opposée lorsqu’il n’est pas certain que le demandeur ait pu en prendre personnellement connaissance. D’ailleurs, comme le souligne dans son rapport François-Noël Buffet, l’OFPRA note qu’il existe actuellement de nombreux dysfonctionnements dans la réception effective des convocations ou des notifications de décision par les demandeurs d’asile. Pensez-vous donc sérieusement que ces nouvelles modalités d’envoi « par tout moyen » amélioreront la situation ?
En outre, ce mode d’envoi de la convocation ne respecte pas le principe de confidentialité, que le Conseil constitutionnel a érigé au rang de garantie essentielle du droit d’asile, principe de valeur constitutionnelle impliquant que les demandeurs d’asile bénéficient d’une protection particulière. Le présent amendement prévoit donc d’envoyer systématiquement la convocation et les décisions de l’OFPRA par lettre recommandée avec accusé de réception, et non par tout moyen, comme le permet le projet de loi.
Les dispositions adoptées en commission des lois à l’Assemblée nationale qui encadrent cette autorisation n’apportent pas de garanties suffisantes au regard de la situation particulièrement précaire des demandeurs d’asile. Les précisions souhaitées par la commission des lois du Sénat et renvoyées à un décret en Conseil d’État sont également loin d’être satisfaisantes. Seule la voie postale permet le contrôle de l’envoi et de la bonne réception de la convocation ou des décisions par les intéressés et garantit, donc, l’efficacité de la transmission des informations aux demandeurs d’asile.
Mme la présidente. L’amendement n° 333 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
Après le mot :
assurer
insérer les mots :
le caractère personnel de l’envoi,
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. La notification écrite que vient d’évoquer notre collègue, telle qu’elle existe aujourd’hui, garantit non seulement la réception par le demandeur des documents qui lui sont envoyés, en particulier les notifications, mais aussi sa compréhension.
Rappelons que plus de la moitié des demandeurs d’asile n’ont pas hébergement ; ils sont domiciliés dans des plateformes d’accueil ou chez des associations, qui ont mis en place des dispositifs pour les alerter lorsqu’ils reçoivent un courrier.
Ces plateformes et ces associations insistent sur la nécessité d’accompagner le demandeur afin qu’il comprenne les documents qu’il reçoit, en particulier les notifications, et de lui permettre dès réception, a fortiori si les délais sont réduits, d’engager les démarches utiles pour répondre à une convocation ou, plus important encore, engager un recours.
Si la voie dématérialisée, telle qu’elle est préconisée par l’Assemblée nationale, peut sembler plus simple, il n’en reste pas moins que son efficacité pose problème. Le Conseil d’État a donc, dans son avis, proscrit les envois automatiques.
Si l’amendement déposé par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste n’était pas adopté, il conviendrait alors de garantir deux éléments. Le premier fait l’objet du présent amendement n° 333 rectifié bis : il s’agit du caractère personnel de l’envoi et de la confidentialité de la transmission des documents. Le second fait l’objet de notre amendement n° 334 rectifié bis, lequel vise à assurer le contrôle du caractère personnel de cette réception.
Le Conseil d’État a considéré que si ces deux éléments n’étaient pas garantis, on pourrait considérer, d’une part, que les notifications sont incertaines et, d’autre part, qu’elles pourraient porter atteinte au caractère équitable de la procédure.
Mme la présidente. L’amendement n° 334 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 6, seconde phrase
après le mot :
et
insérer les mots :
le contrôle de
La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. L’amendement est défendu.
Mme la présidente. L’amendement n° 129 rectifié, présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 519 rectifié, présenté par M. Arnell, Mmes Costes et M. Carrère, MM. Requier, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Dantec, Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Menonville et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 19 à 26
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. Dans la même logique que notre amendement à l’article 4 destiné à laisser des marges d’appréciation à l’OFPRA s’agissant des décisions de rejet ou de retrait d’une protection internationale, cet amendement vise à laisser à l’Office de plus grandes marges de manœuvre dans sa décision de clôture des dossiers.
Depuis la loi du 29 juillet 2015, l’OFPRA a la possibilité de clôturer des dossiers de demande d’asile dans plusieurs cas, notamment lorsque la personne concernée retire sa demande d’asile, à l’occasion d’un entretien ou par courrier, lorsqu’elle n’a pas introduit sa demande dans le délai de 21 jours, lorsqu’elle ne s’est pas présentée à l’entretien ou encore lorsqu’elle n’a pu être contactée, faute d’avoir transmis son adresse à l’Office dans un délai raisonnable.
En raison des difficultés pratiques déjà évoquées et liées aux mauvaises conditions d’hébergement des demandeurs d’asile, il est probable que ces situations soient fréquentes.
Il semble donc que cette disposition produise des effets limités dans une perspective de désengorgement de l’OFPRA, alors même qu’elle pourrait donner lieu à des clôtures de dossiers de demande d’asile légitimes et avoir des conséquences négatives sur l’activité de l’OFPRA, comme sur celle des préfectures.
En effet, le CESEDA permet aux demandeurs d’asile de solliciter auprès de l’OFPRA la réouverture de leur dossier, dans les neuf mois suivant la décision de clôture. Selon le dernier rapport d’activité de l’Office, ces réouvertures sont peu nombreuses, preuve de l’utilisation pertinente de cette facilité par l’OFPRA. On en comptait 30 en 2016, puis 142 en 2017. II est à craindre que la clôture automatique donne lieu à une augmentation considérable des demandes de réouverture de dossier, ce qui aurait le défaut de toucher non seulement l’OFPRA, mais également les préfectures.
Une plus grande flexibilité serait bénéfique. Nous faisons confiance à l’OFPRA pour utiliser de façon raisonnable son pouvoir de clôture et sommes donc favorables au maintien du droit en vigueur.
Mme la présidente. L’amendement n° 212 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et Jacques Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 23
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Rachid Temal.
M. Rachid Temal. Je tiens tout d’abord à saluer à présence de M. le ministre d’État, qui est présent parmi nous en cette Journée mondiale des réfugiés.
Cet amendement concerne l’article L. 723-13 du CESEDA, qui prévoit les cas de clôture d’examen de demandes d’asile. Nous proposons la suppression de l’alinéa 23 de l’article 5 du projet de loi, lequel crée un nouveau cas de clôture pour cause de non-introduction de la demande. Cette disposition est, selon nous, de nature à prêter à confusion, car ce cas existe d’ores et déjà.
La coexistence de deux cas de clôture pour cause de non-introduction de la demande – l’un soumis à une condition de délai et l’autre pas – pose un problème d’application du texte et d’intelligibilité pour les demandeurs d’asile.
Mme la présidente. L’amendement n° 133 rectifié, présenté par M. Poadja, Mme Billon et MM. Henno et Kern, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Pour ce qui concerne les amendements nos 41 rectifié bis, 333 rectifié bis et 334 rectifié bis, je rappelle que l’intérêt de l’article 5 est de permettre à l’OFPRA de notifier ses décisions au demandeur par tout moyen possible, et pas seulement par lettre recommandée avec accusé de réception, comme c’est le cas aujourd’hui, même s’il est vrai que la lettre recommandée avec accusé de réception présente un caractère de certitude.
L’objectif est ici de rendre plus rapide le dispositif actuel de notification des décisions de la transmission, sans perdre le bénéfice de la certitude de la réception par le demandeur. C’est la raison pour laquelle la commission des lois, conservant le dispositif mis en place par le Gouvernement, qui lui paraît utile, a souhaité que les conditions dans lesquelles les nouveaux moyens de communication pourraient être utilisés pour notifier les décisions soient définies par décret en Conseil d’État. Cela permettrait au pouvoir réglementaire d’organiser et de structurer le dispositif ainsi que de lui conférer une certitude juridique que, au demeurant, tout le monde recherche.
Il n’y a aucun intérêt à ne pas avoir la certitude qu’une décision a été notifiée, compte tenu des enjeux qu’elle induit. En effet, la notification permet soit d’avertir une personne qu’elle bénéficie de la protection demandée, soit qu’elle n’en bénéficie pas et, auquel cas, qu’elle dispose de moyens de recours pour contester cette décision. Tout le monde a intérêt à ce que cela fonctionne et aille plus vite. Le dispositif confié au Conseil d’État devrait, de ce point de vue, donner satisfaction.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 519 rectifié et 212 rectifié bis, qui tendent à supprimer les nouveaux cas de clôture d’une demande d’asile par l’OFPRA prévus par le projet de loi : la clôture de l’examen du dossier de demande d’asile dès lors que le demandeur n’a pas introduit, sans motif légitime, sa demande d’asile ; la clôture lorsque le demandeur ne satisfait pas aux conditions d’accueil et d’hébergement, introduit par la commission – ce cas est conforme à l’article 28 de la directive Procédures et est de nature à dissuader les demandes d’asile abusives – ; enfin, s’agissant de la compétence liée de l’OFPRA en cas de retrait d’une demande d’asile par un demandeur, il semble logique de prévoir alors la clôture du dossier. En effet, dès lors que les conditions d’application de cet article sont réunies, l’OFPRA doit décider, de droit, que le dossier est clôturé.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Je me permets de vous rappeler, puisque nous en sommes au début de nos échanges, quels sont la position et l’objectif du Gouvernement au travers de ce projet de loi.
Pour que soient examinées l’ensemble des demandes, il convient que les avis soient rendus dans un délai de six mois, et ce pour deux raisons : premièrement, permettre à celles et ceux auxquels sera reconnu le statut de réfugié de s’intégrer plus rapidement au sein de la société française ; deuxièmement, pouvoir débouter en six mois celles et ceux qui ne seront pas reconnus comme réfugiés, afin qu’ils ne perdent pas tout lien social avec leur pays d’origine. Voilà pourquoi je disais précédemment que la coopération internationale est importante.
Je comprends que puisse se manifester un certain scepticisme. Aussi, permettez-moi de prendre l’exemple de ce que nous avons décidé pour le premier rendez-vous en préfecture : à l’automne dernier, il fallait vingt et un jours pour l’obtenir. Il en faut aujourd’hui six en moyenne, et nous espérons parvenir à trois jours. Lorsque l’on se fixe un objectif et que l’on va de l’avant, on peut l’atteindre !
Si nous voulons éviter que la France connaisse demain les crises que subissent d’autres pays, nous devons résoudre, de manière équilibrée, cette problématique de l’asile et de la migration.
L’avis est donc défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Nous voterons ces amendements.
Accélérer la procédure d’examen des demandes d’asile est une nécessité. Ce qu’il faut avant tout pour y parvenir, ce sont des moyens. Il est vrai que, au cours des dernières semaines, quelques progrès ont été observés.
Toutefois, dès lors que les préfectures vont plus vite, si les plateformes ne parviennent pas à traiter les demandes et si, finalement, les demandeurs d’asile ne sont pas accompagnés comme il convient, alors ceux-ci perdront la réactivité nécessaire pour construire leur récit et répondre aux convocations de l’OFPRA.
Par ailleurs, si l’on suit votre vision, les demandeurs d’asile ne semblent pas constituer une catégorie de personnes vulnérables ayant subi des traumatismes et ne pouvant faire preuve, pour des raisons matérielles et psychologiques, d’une réactivité immédiate.
Pour faire respecter les droits de ces personnes, qui ne sont ni en situation ni en mesure de recevoir une notification par tout moyen, qui ne peuvent ni réagir immédiatement ni comprendre notre langue, il est important d’adopter ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.
M. Didier Marie. Ce texte méconnaît la situation des demandeurs d’asile qui, je l’ai dit précédemment, sont pour la plupart domiciliés virtuellement dans des plateformes. Ils ne sont donc pas tous, tant s’en faut, en mesure d’accéder à une adresse numérique. Par ailleurs, ils ne sont pas tous capables de comprendre la notification qui leur est envoyée. Enfin, la plupart du temps, il ne leur est pas possible d’engager les démarches pour y répondre.
Aussi, je m’étonne, monsieur le rapporteur, que vous n’acceptiez pas les amendements nos 333 rectifié bis et 334 rectifié bis, lesquels ne visent pas à remettre en cause la notification par voie dématérialisée, mais à l’encadrer, en prévoyant deux garanties – le caractère personnel de l’envoi, conformément aux recommandations du Conseil d’État, et le contrôle de la réception personnelle par le demandeur –, les modalités techniques et matérielles étant définies par décret.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Décidément, monsieur le ministre d’État, il est difficile d’être au Gouvernement ! (Sourires.) Il y a trois ans, et encore même il y a deux ans, quand j’étais rapporteur spécial de la commission des finances de la mission « Immigration, asile et intégration », avant que mon ami Sébastien Meurant ne me remplace, j’entendais régulièrement dans les débats, tout comme vous, mes chers collègues, ainsi que le gouvernement de l’époque, que le délai de traitement par les préfectures et par l’OFPRA était beaucoup trop long et qu’on créait des situations de fragilité. Maintenant que vous avez fait un effort dans les préfectures et à l’OFPRA en embauchant du personnel et en faisant en sorte de raccourcir le délai de traitement, on vient vous dire que c’est beaucoup trop court et que vous créez des situations de fragilité ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Mme Éliane Assassi. Nous vous parlons de droits !
M. Roger Karoutchi. En clair, quand le délai est trop long, vous créez des situations de fragilité, mais, quand vous faites un effort, vous créez des situations de fragilité…
M. Julien Bargeton. C’est comme pour l’artillerie !
M. Roger Karoutchi. Je me demande si, finalement, il ne vaudrait mieux pas que vous ne fassiez rien ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mes chers collègues, j’ai entendu beaucoup d’entre vous, plutôt de gauche, dire qu’il ne fallait pas que la tutelle du ministère de l’intérieur soit trop lourde et qu’il fallait laisser des marges de manœuvre à l’OFPRA.
Sur les convocations, sur la manière même de traiter les dossiers, je le dis parce je n’ai pas d’intérêt particulier, l’OFPRA fait un travail, et je le pense très sincèrement, formidable, tout comme l’OFII, l’Office français de l’immigration et de l’intégration, et leurs tâches sont très difficiles.
Peut-être pourrions-nous faire confiance à l’OFPRA et le laisser traiter les dossiers au mieux sans fragiliser le dispositif ! Il n’y a pas de volonté de clôturer les dossiers sans que les intéressés le sachent : on sait très bien que si on les clôture sans que les personnes aient été prévenues ou aient pu répondre, celles-ci ont des voies de recours. L’OFPRA ne va pas chercher volontairement à les pousser à faire un recours ; cela n’aurait aucun sens et ne ferait que prolonger la durée de traitement des dossiers.
Je suis donc tout à fait sur la ligne de la commission et du Gouvernement : laisser traiter les dossiers par l’OFPRA !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. La réduction des délais était absolument nécessaire, personne ne le conteste. D’ailleurs, elle a commencé bien avant. On a atteint un pic en 2015-2016, mais depuis, heureusement, les délais ont été réduits.
Je souscris à l’objectif de parvenir à des délais largement inférieurs à une année – une durée de six mois est tout à fait raisonnable –, mais à la condition que la réduction des délais ne se fasse pas au détriment des droits.
Il existe deux grandes façons de réduire les délais.
On peut augmenter les moyens des instances chargées d’instruire, l’OFPRA et la CNDA, la Cour nationale du droit d’asile. On le voit avec les mouvements récents, notamment à la CNDA, la situation n’est toujours pas satisfaisante.
Le fait d’être reçu plus rapidement en préfecture est une bonne chose, que personne ne conteste. Mais, comme on le voit point après point, il y a aussi la « lime à droits » : on lime les droits des demandeurs pour accélérer la procédure. C’est cela qui est très contestable.
Nos amendements visent à s’assurer qu’un demandeur reçoit réellement et personnellement la notification. C’est la base, il n’y a rien là d’extraordinaire ! L’application de cette simple règle de bon sens et de droit a d’ailleurs été soulignée par le Conseil d’État. Vous renvoyez d’ailleurs à un décret en Conseil d’État le soin de préciser ultérieurement les choses.
Les amendements qui sont présentés visent simplement à ne pas restreindre les droits en la matière. Si vous voulez accélérer la procédure en restreignant les droits à tous les étages, vous allez multiplier les situations d’injustice et les décisions mal fondées. Cet objectif, nous ne pouvons le partager.