Mme la présidente. Madame Laborde, le sous-amendement n° 42 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Votre réponse, monsieur le ministre, a l’avantage d’être très claire : c’est le procureur qui fera ce travail grâce au guichet unique. Je l’entends, mais, n’étant pas la seule signataire de ce sous-amendement, je le maintiens.
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 42 rectifié.
(Le sous-amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Monsieur Carle, le sous-amendement n° 38 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Carle. Non, madame la présidente, je le retire au profit du sous-amendement du Gouvernement, qui apporte les mêmes garanties, voire des garanties supérieures.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 38 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote.
M. Jacques-Bernard Magner. Je pensais m’adresser à M. Carle, mais, comme notre collègue a retiré son sous-amendement, mon explication de vote portera sur celui du Gouvernement.
Le diable se cache dans les détails. Or un détail pervertit l’ensemble de la proposition de loi : le dossier de déclaration est considéré comme complet si l’autorité compétente en matière d’éducation n’a pas réclamé les pièces manquantes dans un délai de quinze jours.
S’il devait être adopté, ce sous-amendement ferait de cette proposition de loi une coquille vide, un texte de pur affichage. C’est là toute la stratégie : dénaturer un dispositif afin d’adopter un texte qui finit par être totalement inefficient.
Pourquoi ce sous-amendement – j’emploierai une expression un peu triviale – dézingue-t-il votre proposition de loi, madame Gatel ? Toute personne malintentionnée désirant se soustraire aux conditions d’ouverture déposera intentionnellement une demande d’ouverture incomplète, de préférence concernant l’objet de l’enseignement, et tablera sur les délais d’examen des dossiers par l’administration pour s’exonérer des conditions d’ouverture gênantes pour son projet, et ce d’autant plus que le délai outrancièrement minimaliste de quinze jours est, si je puis m’exprimer ainsi, du pain béni pour les futurs contrevenants. (M. Claude Bérit-Débat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Je veux m’exprimer sur le sous-amendement de M. Carle. En le retirant, il nous a privés d’un débat savoureux.
M. Jean-Claude Carle. Vous venez de le dire, j’ai retiré le sous-amendement !
M. David Assouline. Oui, mais, comme je connais la technique, je veux la révéler. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques-Bernard Magner vient de nous dire ce qui est absolument sidérant pour nous tous : si le dossier est incomplet, mais que l’éducation nationale, l’État, ne l’a pas signifié dans un délai de quinze jours, que ce soit en raison d’un manque de moyens ou de complications, il sera considéré comme complet. Autrement dit, on donne un blanc-seing ! (Protestations sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Hervé Marseille. Non !
M. David Assouline. Bien sûr que si !
Pourquoi une telle mesure ? C’est là que j’en reviens à M. Carle.
En commission, comme on va le voir en séance publique, on a assisté à des coups de boutoir pour supprimer toute forme d’encadrement. Ça a été fait de façon relativement radicale, parce que, avec M. Retailleau, ils ont été les porte-parole de milieux traditionalistes, qui ont une vision idéologique de l’école. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Vous ne me démentirez pas, vous en êtes fiers ! Vous avez même dit – assumez-le, parce que c’est un vrai débat –, l’école publique et l’école privée sous contrat ayant fait faillite, ne limitons pas trop l’école privée hors contrat, qui sera l’école de la réussite. Eh bien, nous, nous sommes opposés à cette vision des choses !
Vous avez donc déposé des amendements pour pousser Mme Gatel ou M. le ministre à faire des compromis et qu’on puisse quand même arriver à un texte. Vous avez grappillé à chaque fois quelque chose. Résultat, le compromis a eu lieu avec vous et on n’est pas resté sur des principes permettant d’encadrer un peu mieux l’enseignement privé hors contrat.
J’expliquerai tout à l’heure ce qu’est Espérance banlieues, dont vous vous faites le relais, et quels milieux traditionalistes sont derrière. (M. Michel Dagbert applaudit.)
M. Bruno Retailleau. C’est lamentable !
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. J’aimerais, en tant qu’auteur de la proposition de loi, revenir sur les raisons qui ont motivé son dépôt afin que personne n’affabule.
Je l’ai dit précédemment, ce texte n’obéit à aucun ordre ; il répond à la volonté des centristes de faire en sorte que, dans notre pays, la loi puisse être appliquée, que le maire de Raismes, dans le Nord, ne se retrouve pas seul dans un désert de responsabilités et qu’on puisse protéger les enfants de France.
Monsieur Assouline, si vous avez des choses à dire sur les positions idéologiques des uns et des autres, ne prenez pas prétexte de ce texte, qui traite d’un sujet beaucoup plus sérieux : notre bien commun, notre République, que nous défendons. Techniquement, sachez que le délai de quinze jours qui est proposé pour qu’un dossier soit réputé complet existe déjà en matière d’urbanisme et que c’est celui qui a été retenu dans le dispositif général du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.
Si je devais aller sur votre terrain, je pourrais dire que l’administration est en faillite parce qu’elle est incapable, pour un, deux ou trois dossiers, de répondre dans un délai de quinze jours… J’aimerais que chacun retrouve la raison ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Martin Lévrier et Mme Colette Mélot applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mme Gatel a expliqué qu’elle souhaitait, à juste titre, clarifier le régime d’ouverture des établissements privés hors contrat au regard de la loi existante, afin de ne pas laisser les élus locaux démunis face à des problèmes qu’il incombe à l’État et à l’éducation nationale de régler. Or la mesure qui nous est proposée ici ne s’inscrit pas du tout dans cette lignée. Philosophiquement, il s’agit de faciliter la démarche des porteurs de projet.
Je n’ai pas a priori le goût de rendre les choses plus difficiles aux porteurs de projets corrects, mais, la fragilité de notre dispositif, ce sont les maires qui se sentent seuls, non pas pour dire oui, mais pour dire non lorsque des situations leur paraissent peu conformes à l’idéal républicain et à l’intérêt des enfants.
Si je suis toujours favorable à tout ce qui permet d’éviter un État tatillon en matière de documents d’urbanisme ou administratifs, je ne suis pas d’accord pour affaiblir sa capacité à bloquer un projet éducatif qui a des conséquences sur la vie des enfants, leur liberté et même les valeurs de notre République. Quinze jours ou trois semaines de plus pour être sûr que tous les papiers sont bien conformes, ce n’est pas se montrer tatillon, c’est opter pour une garantie minimale.
Il y a suffisamment de risques de voir se multiplier dans notre pays des structures pseudo-éducatives, qui ont d’autres orientations que celles de partager nos valeurs et de former la libre conscience et le haut niveau d’indépendance intellectuelle et morale de nos enfants, qu’il vaut mieux en la matière être trop tatillon que trop laxiste. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Madame Gatel, vous avez fait appel à la raison ; moi, au droit. Nous pourrions donc nous retrouver.
Permettez-moi de vous signaler, chers collègues, que, la semaine dernière, dans cet hémicycle, vous avez de concert voté un amendement dans le cadre du projet de loi relatif à l’orientation et à la réussite des étudiants visant à préciser que, lorsque l’étudiant n’avait pas de réponse, cela valait refus de son dossier par l’université. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Jacques-Bernard Magner. Eh oui !
M. Pierre Ouzoulias. Il serait bien que le droit de la semaine dernière soit aussi le droit de cette semaine et que l’on n’y déroge pas quand ça vous arrange ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Carle. M. Assouline m’ayant attribué des propos que je n’ai pas tenus, je voudrais simplement lui rappeler que tout ce qui est excessif est insignifiant. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. David Assouline. Qu’est-ce qui est excessif ? J’ai des citations !
M. Jean-Claude Carle. Je souhaite que nous continuions à débattre sereinement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Dominique de Legge. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Le guichet unique, bravo ! Le bulletin n° 2, j’ai entendu la réponse ! La liste qui devait faire l’objet d’un décret et qui est maintenant inscrite dans la proposition de loi, soit ! Mais les quinze jours, ça ne passe pas…
C’est vrai qu’il y aura peu de dossiers. On peut donc considérer qu’ils pourront être traités en quinze jours, mais on pourrait aussi considérer, comme il n’y en a pas beaucoup, qu’on pourrait avoir une petite signature…
Ce que dit mon collègue Ouzoulias est exact : la semaine dernière, l’absence de réponse valait refus ; cette semaine, c’est le contraire.
Je vous demande, monsieur le ministre, de nous rassurer sur ce délai de quinze jours, parce que, je le répète, là, vraiment, ça ne passe pas.
Mme la présidente. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.
Mme Samia Ghali. L’éducation de nos enfants et un permis de construire, ce sont deux choses différentes. Là, il s’agit de l’avenir qu’on réserve, ou pas, à certains enfants. Comme un enfant n’est pas en mesure de décider ce qui est bon pour lui, ce sont les parents qui vont faire ce choix, mais sans savoir forcément où ils mettent réellement leurs enfants. Je ne comprends donc pas qu’on puisse faire une comparaison avec une histoire de permis de construire, qui ne met en quelque sorte personne en péril.
Il est toujours plus compliqué de fermer une école que d’en ouvrir une, et on laisse les maires face à des situations toujours plus complexes. Si je dis ça, c’est parce que, sur mon territoire, j’ai été choquée de voir la façon dont on peut accueillir certains enfants – j’y reviendrai –, sans même parler de l’enseignement qui leur est dispensé. Or personne ne vérifie quoi que ce soit.
Monsieur le ministre, comment peut-on être capable, d’un côté, de mettre en œuvre le doublement des classes, mesure à laquelle vous savez que je suis favorable, et, de l’autre, d’accepter que certains enfants soient complètement perdus parce qu’on ne saura pas quelle éducation leur sera donnée ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Annick Billon, rapporteur. J’ai déjà donné mon avis sur ce sous-amendement, mais j’ai l’impression qu’on ne parle pas tous du même sujet.
Je rappelle que, quinze jours, c’est le délai pour dire si le dossier est complet. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je souhaite revenir sur l’esprit de cette proposition de loi tel que je le perçois et sur un point technique.
En ce qui concerne l’esprit, je suis un peu surpris de l’évolution du débat, parce que, à mes yeux, cette proposition de loi devrait faire consensus.
M. Claude Kern. Tout à fait !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. J’entends bien que certains souhaitent arriver à un niveau 2 de protection, mais, quand on part du niveau 0, ils devraient déjà être contents de ce pas vers le niveau 1 et se rallier à ce dispositif.
Il ne faudrait pas renverser l’argumentation et, au moment où l’on fait progresser la protection des enfants au travers de cette proposition de loi, se trouver bizarrement mis en accusation de ne pas vouloir cette protection. Nous sommes tous d’accord pour empêcher que les enfants de notre pays soient confiés à des structures qui n’ont de scolaires que le nom. C’est cette préoccupation qui nous rassemble, ne l’oublions pas dans nos débats.
Forts de cette bonne foi, regardons chaque point technique pour voir si l’on atteint un équilibre. Depuis le début de nos débats, nous le savons tous, il s’agit de trouver un point d’équilibre entre la liberté d’enseignement, qui est extrêmement importante dans notre pays, et la protection des enfants, qui l’est tout autant. Ce point d’équilibre que nous recherchons, sur un sujet tout de même un peu technique, me paraît atteint. Bien entendu, on peut le discuter, mais cela ne doit pas nous conduire à tenir des propos excessifs.
La nécessité pour l’administration de réagir dans un délai de quinze jours est prévue dans le cadre d’autres dispositifs au sein du code des relations entre le public et l’administration. Il n’y a là aucune innovation invraisemblable, simplement l’obligation pour mon administration de réagir rapidement après le dépôt des dossiers – en somme, le seul qui devrait se plaindre, c’est moi… (Sourires.)
M. Jacques-Bernard Magner. Et si elle ne réagit pas ?
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Or j’ai pris, à la tribune, l’engagement d’adapter mon administration à cette nouvelle contrainte d’efficacité.
Pour le reste, je souscris pleinement aux objectifs que les uns et les autres ont exposés. Toutes les conditions sont réunies pour que ce sous-amendement soit débattu dans la sérénité. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 46 rectifié.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 44 rectifié bis.
M. David Assouline. En complément de ce qui a été dit, je tiens à faire une petite mise au point.
Comme je l’ai dit d’emblée et comme l’a bien expliqué le porte-parole du groupe socialiste et républicain dans ce débat, nous pensons, très clairement, qu’il convient de mieux contrôler un phénomène qui n’est tout de même pas bénin, parce qu’il est en expansion, non seulement pour ce qui est des écoles fondamentalistes, ou islamistes – cela a été souligné –, mais aussi du fait de l’offensive et de la prolifération de milieux traditionalistes catholiques engagés, de sectes et autres. Ce phénomène, tout le monde y concourt.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, nous pensons que l’autorisation est meilleure, justement parce que nous souscrivons à la vision que vous avez exposée : en dessous du niveau 2 de protection, soit l’autorisation, il y a le niveau 1, soit la proposition initiale de Mme Gatel. Remarquez, ma chère collègue, que je soutiens votre proposition, moi qui pourtant ne vous ai pas souvent soutenue. C’est dire si je ne suis pas excessif (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Union Centriste.) – je suis plutôt excessivement ouvert… (Rires.)
Seulement, MM. Retailleau et Carle ont fait quelque chose en commission – alors, pourquoi le passer sous silence ? Nous n’avons pas dit, nous : si vous ne rejoignez pas notre position, nous ne soutenons pas le pas en avant que vous proposez. Eux, en revanche, ont bataillé, et même fait battre Mme la rapporteur. Oui, il faut le dire : en commission, le rapport a été battu par MM. Retailleau et Carle ! C’est avec eux que le compromis s’est fait, pas avec nous !
M. Bruno Retailleau. Vous avez voté contre l’amendement de la rapporteur !
M. David Assouline. Or ce compromis a vidé de son sens le pas en avant que nous pouvions accompagner, à savoir le projet pédagogique.
Mais je veux m’adresser à M. Carle, et ce sera ma dernière phrase. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Daniel Laurent. Ça, c’est une bonne nouvelle !
M. David Assouline. Je vous signale que je n’ai pas dépassé mon temps de parole. (Protestations sur les mêmes travées.)
M. Claude Kern. Si, il est épuisé !
M. David Assouline. Évidemment, si vous m’empêchez de parler, cela peut durer encore deux minutes – remarquez, je sais faire…
Mme la présidente. Mon cher collègue, vous avez, cette fois, dépassé votre temps de parole !
M. David Assouline. Monsieur Carle, ce qui est excessif est insignifiant ? Dites-le au patron de votre formation politique plutôt qu’à moi !
Mme la présidente. Je mets aux voix le sous-amendement n° 44 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner, pour explication de vote sur l’amendement n° 40 rectifié bis. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques-Bernard Magner. Cet amendement étant à l’origine des sous-amendements successifs, il est normal que nous réaffirmions notre position avant sa mise aux voix. Pour nous, il constitue un recul par rapport à la proposition de loi initiale sur le plan pédagogique.
Madame Gatel, je répète que nous ne doutons pas de votre volonté ferme ni de votre bonne foi pour mieux encadrer l’ouverture des écoles privées hors contrat dans le pays. Dès lors, pourquoi ne plus faire mention du projet pédagogique, des programmes et des horaires dans les pièces à fournir pour toute ouverture d’établissement, quel que soit le niveau ? N’est-ce donc pas d’école qu’il s’agit, d’instruction, de formation des esprits, d’éducation ? Vous ne pouvez pas considérer que le projet pédagogique, les programmes et les horaires sont des informations insignifiantes ou subalternes pour l’ouverture d’un établissement scolaire privé – ou public, d’ailleurs, si la question se posait.
Avoir pour seule référence un objet d’enseignement conforme au socle commun de compétences et de connaissances ne permet pas aux rectorats de s’assurer que les programmes suivis permettent aux élèves d’acquérir effectivement le socle commun selon une progression des apprentissages adaptée à l’âge des enfants, et, comme l’a souligné mon collègue David Assouline, dans le cas où ils ne pourraient pas rester dans ces établissements, d’être au niveau des autres élèves de mêmes âge et niveau.
Les programmes ont des attendus qui permettent l’acquisition du socle commun et le respect de la progression des élèves en fonction des cycles, autant de jalons sur lesquels s’appuie l’éducation nationale pour mener ses contrôles – vous le savez mieux que moi, monsieur le ministre.
Oui à la liberté pédagogique, non à la liberté des programmes que revendiquaient nos collègues du groupe Les Républicains dans leur amendement initial !
Vous êtes très exigeant sur les fondamentaux quand il s’agit de l’enseignement public, et c’est normal ; mais il semble que vous soyez nettement moins regardant quand il s’agit de l’enseignement privé, en particulier hors contrat…
Notre devoir est de nous assurer que nous ne verrons pas des enfants, voulant retourner dans l’enseignement public, échouer aux tests de compétences et de connaissances, parce qu’ils auront reçu un enseignement lacunaire ou parcellaire, voire orienté. Nous regrettons donc beaucoup, madame Gatel, que vos exigences pédagogiques se soient émoussées au fil des travaux, en commission et en séance. Cela ne sert pas le droit à l’éducation de nos enfants. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.
M. Max Brisson. J’estime au contraire que l’amendement de Mme Gatel assure un juste équilibre dans l’objectif de sa proposition de loi : il s’agit à la fois d’encadrer l’ouverture des écoles et de protéger la liberté fondamentale, constitutionnelle, qu’est la liberté d’enseignement.
Le texte initial prévoyait le dépôt du projet pédagogique et de la liste des professeurs, une obligation qui, compte tenu des délais, pouvait rendre dans les faits très difficile, voire impossible, l’ouverture d’une école. Il y avait donc un déséquilibre.
Je me réjouis que Mme Gatel ait elle-même déposé un amendement pour améliorer profondément sa proposition de loi en réalisant un juste équilibre entre ces deux principes essentiels de notre République : la liberté, fondamentale et constitutionnelle, je le répète, d’ouvrir une école et la nécessité d’encadrer les ouvertures pour prévenir les dérives.
Je voterai donc résolument cet amendement d’équilibre, en rappelant à certains des orateurs précédents que, dans l’histoire de notre pays, les déclarations préalables n’ont pas toujours correspondu à de grandes heures en matière de libertés. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. Monsieur le ministre, le dépôt de votre sous-amendement montre que vous soutenez cet amendement.
Vous nous expliquez que, dans la mesure où l’on part de zéro, il faut accepter le compromis qui permet d’aller un peu plus loin. Or, le plus loin, c’est ce qui se passe dans les trois départements d’Alsace-Moselle et que vous semblez ne pas connaître. Je veux donc être rassuré : vous ne demandez pas que s’applique dans ces trois départements le régime qui sera en vigueur ailleurs, au lieu du système actuel d’autorisation prévu par le code de l’éducation ?
Je vous invite à vous renseigner davantage sur la manière dont ce système fonctionne, afin que, si la proposition de loi est examinée par l’Assemblée nationale, vous proposiez aux députés, en fonction des renseignements que vous aurez pris dans vos services locaux, de passer au niveau supérieur, qui fonctionne déjà sur une partie du territoire national. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Gabouty. Le groupe du RDSE est favorable à la ligne directrice de cette proposition de loi, et moi particulièrement, même si le régime de l’autorisation nous semble préférable sur le plan opérationnel : mieux vaut une autorisation vérifiée qu’une déclaration vérifiée au cas où quelque chose n’est pas conforme.
L’auteur de la proposition de loi et vous-même, monsieur le ministre, avez opté pour le régime déclaratif, ce qui est un choix de souplesse.
Vous nous avez assuré que votre administration serait capable de répondre dans les délais. Dans les différents débats au cours desquels je suis intervenu, j’ai toujours plaidé pour la réduction des délais dans tous les domaines de recours et de mise en œuvre – c’est une constante chez moi. En l’occurrence, toutefois, je pense que la question ne se pose pas de la même manière, et je regrette le délai de quinze jours, qui me paraît minimal.
Avec un dossier déposé début août, je ne suis pas sûr, monsieur le ministre, que la réactivité de vos services ne soit pas prise en défaut… En acceptant ce délai, vous faites donc prendre un risque à votre administration. Je le déplore, mais, après tout, c’est votre responsabilité. (M. David Assouline et Mme Françoise Laborde applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Pour ouvrir un cabinet d’expertise comptable, on doit présenter tous les actes prouvant, notamment, qu’on a le diplôme d’expert-comptable. Et, dans le domaine de l’éducation, on pourrait ouvrir une école comme on ouvre n’importe quelle entreprise de services ou association, à n’importe quel moment ?
La liberté, c’est, bien sûr, une liberté dans un cadre collectif. Par ailleurs, la première liberté à préserver, c’est celle des enfants. Or le projet éducatif est un élément essentiel pour vérifier qu’une entreprise ou une association à vocation d’école préserve les droits de l’enfant et les capacités de celui-ci à atteindre le niveau éducatif requis.
Pour être très sensible aux enfants dyslexiques et à tous les enfants « dys », je pense aux écoles qui mènent un projet pédagogique un peu innovant. Notre système éducatif n’ouvrant pas assez, à mon avis, les formes éducatives pour ces enfants-là, l’école privée, d’abord hors contrat, puis sous contrat, est parfois une démarche – je le reconnais sans sectarisme. Or ces structures n’ouvrent pas au dernier moment : elles réfléchissent à leur projet éducatif. Il appartient ensuite à l’éducation nationale de vérifier si ce qui est proposé, sans être forcément identique à ce qui se fait ailleurs, sert les mêmes objectifs. Ce contrôle est vital sur le plan de la crédibilité.
L’absence de contrôle est la porte ouverte à des démarches non sérieuses, qui ruineront la crédibilité des amorces qui pourraient, ensuite, être reprises dans le secteur privé sous contrat. Ce problème-là, que Mme Gatel avait, à l’origine, assez bien perçu, a été mis de côté sous la pression de lobbys qui, d’ailleurs, ne défendent pas la cause qu’ils croient défendre – je le dis quand bien même je ne la partage pas.
Nous avons besoin de façon globale, dans le secteur public comme dans le secteur privé, d’un haut niveau éducatif correspondant aux valeurs de notre République. Pour ma part, je défends l’école publique d’abord et avant tout, mais je défends aussi les enfants. De ce point de vue, on s’apprête à faire un mauvais coup, car il y a un gros risque lié aux projets éducatifs d’établissements qui pourraient ouvrir sans même avoir obtenu d’autorisation.
L’autorisation est la bonne solution. Elle existe déjà en Alsace-Moselle, où, que je sache, il n’y a pas de privation de liberté. Quand un système fonctionne bien quelque part, je ne vois pas pourquoi on ne le généraliserait pas ! (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Comme Mme Lienemann, je regrette que la notion de projet pédagogique ait disparu du texte, parce que le projet pédagogique fait l’identité d’une école.
Un projet pédagogique innovant, c’est parfois ce qui fait la différence entre des écoles ; comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, c’est aussi ce qui peut permettre à l’école publique de retrouver dynamisme et, parfois, qualité.
La décision des parents d’inscrire leur enfant dans telle ou telle école dépend, pour l’essentiel, de leur adhésion à son projet pédagogique. Pour qu’ils puissent choisir en toute connaissance de cause, le projet pédagogique devrait être connu dans les écoles privées hors contrat comme dans les autres. C’est une question de transparence et d’information, mais aussi d’émulation entre écoles.