M. le président. Monsieur Raynal, l'amendement n° 475 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Raynal. Oui, monsieur le président !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 22.
L'amendement n° 395 rectifié, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 199 sexvicies du code général des impôts, il est inséré un article 199 … ainsi rédigé :
« Art. 199 … – I. – Les contribuables domiciliés en France au sens de l’article 4 B peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu au titre de dépenses engagées à compter du 1er janvier 2017 et jusqu’au 31 décembre 2026, dans le cadre d’une rénovation d’un logement achevé depuis au moins neuf ans et qu’ils destinent à une location meublée n’étant pas exercée à titre professionnelle et dont le produit est imposé dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux.
« II. – La réduction d’impôt est calculée sur le prix de revient des travaux de rénovation entrant dans le cadre du I retenue pour sa fraction inférieure à 50 000 €.
« Le taux de la réduction d’impôt est de 20 %.
« Lorsque le logement est détenu en indivision, chaque indivisaire bénéfice de la réduction d’impôt dans la limite de la quote-part du prix des dépenses de travaux correspondant à ses droits dans l’indivision.
« La réduction d’impôt est répartie sur cinq années.
« Ce dispositif ne pourra être reconduit qu’au terme des cinq années d’application de ladite réduction d’impôt.
« La réduction est accordée au titre de l’année d’achèvement de ces travaux et imputée sur l’impôt dû au titre de cette même année puis sur l’impôt dû au titre de chacune des quatre années suivantes à raison d’un cinquième de son montant total au titre de chacune de ces années.
« Lorsque la fraction de la réduction d’impôt imputable au titre d’une année d’imposition excède l’impôt dû par le contribuable au titre de cette même année, le solde peut être imputé sur l’impôt dû au titre des cinq années suivantes.
« III. – Le propriétaire doit s’engager à proposer le logement à la location pendant au moins neuf ans, sur une période minimum de douze semaines chaque année et avec une location effective d’un minimum de huit semaines.
« Le logement doit être proposé à la location dans un délai maximum de neuf mois qui suit la date d’achèvement des travaux de rénovation.
« En cas de non-respect de l’engagement de location ou de cession du logement, la réduction pratiquée fait l’objet d’une reprise au titre de l’année de la rupture de l’engagement ou de la cession. Toutefois en cas de licenciement ou de décès du contribuable ou de l’un des époux soumis à imposition commune, la réduction d’impôt n’est pas reprise.
« La réduction n’est pas applicable au titre des logements dont le droit de propriété est démembré. Toutefois lorsque le transfert de la propriété du bien ou le démembrement de ce droit résulte du décès de l’un des époux soumis à imposition commune, le conjoint survivant attributaire du bien ou titulaire de son usufruit peut demander la reprise à son profit, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités du bénéfice de la réduction prévue au présent article pour la période restant à courir à la date du décès.
« IV. – Un contribuable ne peut pour le même logement bénéficier à la fois des réductions d’impôt mentionnées aux articles 199 undecies A et undecies B et du présent article. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Avant-hier, nous avons achevé dans la nuit l’examen du projet de loi Montagne. Ce texte prévoit le recentrage du dispositif dont on vient de parler.
Tous les élus des zones touristiques travaillent sur le problème des « lits froids » depuis des années, et singulièrement les élus de montagne.
En effet, dans les zones urbaines du littoral, un logement touristique non loué pour la saison peut toujours basculer en résidence principale, compte tenu de l’extension urbaine. Je citerai l’exemple de la Grande Motte pour Montpellier. Les élus de montagne sont de surcroît confrontés à une rareté foncière qui rend la réhabilitation des logements vacants impérative.
Dans les années 1970, de nombreux logements ont été construits grâce aux dispositifs de promotion de résidences de tourisme, mais qui n’avaient que peu à voir avec ce que nous entendons par là aujourd’hui. À l’époque, on n’y trouvait que quelques services communs et un accueil. Les actuelles résidences de tourisme, notamment en montagne, comprennent désormais des lieux de restauration ou de relaxation et autres.
Nous butons donc sur le problème des « lits froids » depuis des années. Nous avions ainsi travaillé avec Michelle Demessine à la mise en place du dispositif ORIL–VRT, c'est-à-dire opérations de réhabilitation de l’immobilier de loisirs – villages résidentiels de tourisme –, dont l’attractivité reposait notamment sur la récupération de la TVA pour les travaux réalisés. Malheureusement, quand le taux de la TVA est passé de 19,6 % à 5,5 %, ce qui était une bonne nouvelle pour tout le monde le fut beaucoup moins pour notre dispositif…
Le présent amendement vise à inciter les propriétaires, dont beaucoup sont aujourd’hui âgés, à réhabiliter des logements existants qu’ils n’utilisent en général plus, en contrepartie d’une incitation assortie d’un certain nombre de conditions de mise en marché.
Le dispositif est assez vertueux, puisqu’il encourage ces propriétaires à réaliser des travaux significatifs pour favoriser la mutation des logements : plus les travaux sont nombreux, plus le montant des aides est élevé…
Le dispositif est également destiné à accompagner les personnes qui voudraient acheter des logements par lots. C’est très important, car toute une génération de propriétaires est aujourd’hui en situation de chercher à revendre des logements. La mesure contribuerait donc à animer le marché de la revente et de la rénovation des logements.
Voilà dans quel esprit ce dispositif a été construit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. La question que Michel Bouvard soulève à l’instant concernant les meublés et la rénovation du parc constitue, sans doute, un véritable sujet.
Toutefois, nous n’avons pas pu évaluer le coût de la mesure dans le délai qui nous était imparti, et il est à craindre que celui-ci ne soit élevé, le dispositif, d’après ce que j’en ai compris, pouvant concerner tous les meublés, sans limitation à certaines zones.
Plutôt que de créer un crédit d’impôt dont le coût n’est absolument pas évalué, la commission préfère demander le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Il est défavorable. Cet amendement, me semble-t-il, est déjà largement satisfait par la création de la nouvelle réduction d’impôts pour les travaux de réhabilitation de logements, inscrite à l’article 41 du projet de loi de finances pour 2017.
M. le président. L'amendement n° 25 rectifié ter, présenté par MM. de Legge, Vaspart, Doligé et Masclet, Mme Cayeux, MM. Longuet, Panunzi, Mouiller, Fouché, Huré et Trillard, Mme Deromedi, MM. G. Bailly, Mayet, Houpert, D. Laurent, Laménie, Lefèvre et Pointereau, Mme Morhet-Richaud, MM. Mandelli, Vasselle, Chasseing, de Nicolaÿ, del Picchia, B. Fournier, Charon et Chaize, Mmes Giudicelli et Gatel, MM. Gremillet et Reichardt, Mme Lamure et M. Genest, est ainsi libellé :
Après l'article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le deuxième alinéa du IV de l’article 199 novovicies du code général des impôts est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« À titre expérimental, pour une durée d’un an à compter de la promulgation de la loi n° … du … de finances rectificative pour 2016, dans les zones géographiques autres que celles mentionnées au premier alinéa, la réduction d’impôt s’applique aux logements situés dans des communes caractérisées par des besoins particuliers en logement locatif qui ont fait l’objet, dans des conditions définies par décret, d’un agrément du représentant de l’État dans la région après avis du comité régional de l’habitat et de l’hébergement mentionné à l’article L. 364-1 du code de la construction et de l’habitation, sur la base d’une demande présentée par la commune intéressée, ou, lorsqu’elle appartient à un établissement public de coopération intercommunale doté d’un programme local de l’habitat exécutoire pris en application des articles L. 302-1 et L. 302-4-1 du même code, par cet établissement public.
« L’existence de besoins particuliers en logements locatifs privés est appréciée en se fondant notamment sur l’évolution de la population, le nombre de mises en chantier annuelles et le nombre de logements sociaux, rapporté au nombre de demandes. Les communes faisant l’objet d’un arrêté de carence mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 302-9-1 dudit code ne peuvent faire l’objet de l’agrément mentionné au deuxième alinéa. »
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2017.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Avec cet amendement, nous entendons contribuer à régler les difficultés rencontrées dans la production de logements.
Il existe aujourd'hui un dispositif dit Pinel qui fonctionne bien. Pour autant, il ne peut être étendu à certaines zones sous tension. Il vous est donc proposé, mes chers collègues, à titre expérimental et en liaison avec le préfet, de permettre qu’il soit ouvert en marge des zones B.
Bien évidemment, je le précise, les communes n’ayant pas satisfait à leurs obligations découlant de la loi Duflot ne pourraient bénéficier de ce dispositif, expérimental et, donc, d’une durée limitée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Dominique de Legge propose de créer un dispositif expérimental concernant les zones C. Pourquoi pas ?…
Mais la rédaction proposée pour cet amendement ne semble pas convenir, car on risquerait d’écraser un dispositif, normalement maintenu, permettant l’application de la réduction d’impôt Pinel sur les zones B2. Il ne semble pas que ce soit l’objectif que l’on cherche à atteindre !
La proposition soulève d’autres interrogations. La définition des zonages relevant du Gouvernement, nous souhaitons donc entendre Mme la secrétaire d’État sur le sujet, afin de pouvoir évaluer le caractère opérationnel du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Cette disposition aurait plutôt sa place à l’article 40 du projet de loi de finances pour 2017, tendant à proroger le dispositif Pinel pour l’année 2017. Un amendement sera déposé par le Gouvernement en ce sens.
Sans retrait de cet amendement, j’émettrai donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. On ne va pas nous la faire, ou nous la refaire, mes chers collègues ! Figurez-vous que cet amendement, j’en ai la preuve, a été rédigé par les propres services du Gouvernement, qui nous ont proposé de le placer, dans ce texte, à cet endroit précis !
Vous venez maintenant m’expliquer, madame la secrétaire d’État, que la proposition ne trouve pas sa place ici. J’ai en ma possession le message du cabinet de M. Eckert. Alors, mettez-vous d’accord entre vous !
Cette façon de procéder m’étonne : si vous considérez que la rédaction proposée par les équipes de votre collègue n’est pas la bonne, dites-le-moi très simplement… Je n’ai fait qu’un copié-collé !
M. Philippe Dallier. Vérité d’un jour n’est pas celle du lendemain !
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. La présentation de cet amendement s’explique aussi par le fait que les zonages, nous l’avons encore expliqué voilà quelques jours, confinent à l’absurde !
Il va bien falloir, un jour, que l’on accepte d’examiner ces zonages autrement qu’en ayant une vue très générale depuis Paris, ou au travers des tableaux Excel élaborés par Bercy, dans lesquels on considère que la population zonée ne peut dépasser tel niveau.
Quand toutes les grandes stations de sports d’hiver sont classées en catégorie C, alors qu’elles enregistrent des prix du foncier identiques à ceux des quartiers les plus chers de l’Île-de-France et que les coûts de construction, du fait de leur situation en altitude, y sont accrus de 35 %, il faut que l’on m’explique comment loger leur population permanente.
Les jeunes ménages souhaitant rester au pays et travailler dans les stations ne peuvent plus se loger. Il n’y a plus de foncier disponible et la production de logement social y est nulle ou insuffisante, non pas, d’ailleurs, parce que les communes ne souhaitent pas en construire, mais parce qu’elles ne peuvent le faire avec les conditions de financement proposées en catégorie C, totalement inadaptées à leur situation.
Le problème est le même pour le locatif privé couvert par le dispositif.
Je profite de l’occasion pour insister sur ce point : le zonage est absurde, et le présent amendement a le mérite de contourner cette absurdité !
Il serait vraiment bienvenu de permettre la mise en œuvre de quelques projets sous dispositif Pinel à Chamonix ou dans d’autres grandes stations afin de loger la population permanente. On ne peut pas s’intéresser qu’aux saisonniers ; même si ce sujet est prioritaire et essentiel, il y a tout de même des habitants permanents, qui ont le droit de continuer à vivre chez eux, même s’ils n’ont pas les moyens – c’est notamment le cas des jeunes - de construire. (Très bien ! et applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 22.
L'amendement n° 368, présenté par MM. Assouline, Antiste et D. Bailly, Mme Blondin, M. Carrère, Mmes Cartron, Ghali, D. Gillot et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mmes D. Michel et Monier, M. Percheron et Mme S. Robert, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le VII de l’article 220 sexies du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les œuvres cinématographiques difficiles ou à petit budget, lorsque le montant total des aides publiques accordées hors crédits d’impôt excède le seuil de 50 % précité, les crédits d’impôt obtenus peuvent avoir pour effet de porter le montant total des aides publiques accordées jusqu’à 70 % du budget de production. »
II. – Le I s’applique aux crédits d’impôts calculés au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017.
III. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de regarder le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.
V. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par l’instauration d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Voici, mes chers collègues, une série d’amendements visant à ajuster des dispositifs de crédit d’impôt destinés au secteur de la culture.
Comme vous le savez, les économies de la culture – cinéma, musique, etc. – connaissent, avec la révolution numérique, de véritables bouleversements. De ce fait, certains acteurs passent au travers des mailles des dispositifs de crédit d’impôt, tels qu’ils ont été conçus, et sont privés de certains avantages.
Le premier de cette série d’amendements vise à permettre aux films les plus fragiles d’être produits dans de meilleures conditions économiques, en rehaussant le seuil d’intensité d’aides publiques à 70 % au titre du crédit d’impôt pour dépenses de production déléguée.
Il s’agit de mieux accompagner les films dits « difficiles » – premiers ou deuxièmes films – et les films à petit budget, dont le coût est inférieur à 1,25 million d’euros.
Ces œuvres sont celles qui participent directement à la diversité et au renouvellement de la création française. Par la même, elles contribuent au rayonnement du cinéma français à l’étranger et dans les plus grands festivals internationaux.
Ce sont également elles qui favorisent l’émergence de jeunes auteurs, acteurs ou techniciens. Elles permettent à ces jeunes talents de faire leur preuve avant qu’ils ne bénéficient de la confiance des investisseurs, notamment des chaînes de télévision, pour leurs films suivants.
La mesure proposée améliorera le financement de ces films qui, le plus souvent, ne bénéficient pas – ou peu – de préfinancements par une chaîne, et ce au bénéfice de leur qualité artistique et technique.
Je veux signaler dans cet hémicycle que le crédit d’impôt cinéma, mesure que j’avais portée et que nous avons adoptée, notamment pour l’export, a placé le cinéma français, en très peu de temps, dans une situation exceptionnelle de réussite : il se classe deuxième, après le cinéma américain, si l’on ne tient pas compte du marché intérieur indien.
Ce dispositif, qui, comme tous les crédits d’impôt, suscitait des discussions, n’est aujourd'hui contesté par personne. En outre, il a permis de relocaliser immédiatement d’énormes tournages.
Je propose ici de préciser le mécanisme en vigueur, en ciblant les films « du milieu », qui permettent la diversité culturelle française. C’est là, mes chers collègues, que réside l’excellence de notre cinéma et que les jeunes talents peuvent émerger. Malheureusement, ces films ne sont pas pleinement dans le viseur des crédits d’impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je suis d’accord sur le fait que le crédit d’impôt cinéma, tel qu’il a été réformé, a permis la relocalisation en France des productions. À l’époque, d’ailleurs, j’avais soutenu cette proposition, permettant d’éviter que les tournages n’aient lieu à l’étranger.
Pour autant, est-il opportun d’étendre aujourd'hui le dispositif aux films à petit budget ou aux premiers films, dits « difficiles » ? J’observe que le taux actuellement proposé est déjà extrêmement élevé, avec un plafond dérogatoire de 60 % pour les films à petit budget, et que l’extension de la niche à 70 % n’est pas chiffrée.
Pour ces raisons, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Les œuvres dites « difficiles » ou à petit budget bénéficient déjà d’un soutien public, puisque le seuil d’intensité des aides est fixé à 60 % du budget de production de l’œuvre, au lieu de 50 % pour les autres films. J’ai bien entendu vos arguments concernant la diversité et la richesse induites par cette offre culturelle, monsieur Assouline ; j’émettrai néanmoins un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Comme souvent avec les propositions un peu précises et techniques, découlant d’une certaine connaissance de ce qui se passe dans ce milieu, il n’est pas aisé de convaincre dans cet hémicycle !
M. le rapporteur général et Mme la secrétaire d’État m’ont apporté une réponse très générale : pourquoi changer puisqu’il existe déjà un crédit d’impôt ?
Pourquoi ? Parce que, mes chers collègues, si l’on a travaillé sur ces questions, on sait que, dans un secteur en forte extension, fleuron de l’industrie culturelle française dans le monde, certains – ils sont déjà aidés au travers du crédit d’impôt, me dit-on, mais tout le cinéma français l’est ! – éprouvent de réelles difficultés. Ils risquent même d’être les naufragés de ce développement.
De qui s’agit-il ? Des petits films et des jeunes créateurs ayant un ou deux films à leur actif, à qui on ne fait pas immédiatement confiance et, donc, qui doivent se lancer avec peu de préfinancement des chaînes de télévision.
Ce sont ces films « difficiles » qui font la diversité de la culture française, avec son originalité, mais aussi sa capacité à prendre des risques. Après tout, une production française ressemblant aux productions américaines, cela fonctionne sans problème ! Mais produire une œuvre avec tout ce qui fait la valeur ajoutée française, c’est un peu plus compliqué !
Je souhaite que ce seuil soit rehaussé, car, comme le montrent les analyses, malgré la progression du cinéma français et le succès qu’il rencontre, ce cinéma-là est particulièrement en danger.
La représentation nationale ne devrait pas hésiter à entrer dans ce niveau de précision. C’est d’ailleurs une proposition formulée par tous les spécialistes et par le ministère de la culture, qui, dans les discussions que nous avons eues, m’ont assuré de sa justesse.
M. le président. L'amendement n° 370, présenté par MM. Assouline, Antiste et D. Bailly, Mme Blondin, M. Carrère, Mmes Cartron, Ghali, D. Gillot et Lepage, MM. Lozach, Magner et Manable, Mmes D. Michel et Monier, M. Percheron et Mme S. Robert, est ainsi libellé :
Après l’article 22
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La première phrase du b du II de l’article 220 octies du code général des impôts est ainsi rédigée :
« Porter sur des albums de nouveaux talents définis comme des artistes ou groupes d’artistes n’ayant dépassé au cours des sept années précédant ce nouvel enregistrement ni le seuil de 100 000 ventes pour deux albums distincts publiés ni le seuil de 400 000 ventes pour un album publié. »
II. – Le présent article s’applique aux crédits d’impôt calculés au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017.
III. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
IV. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Le présent amendement vise à modifier la définition des « nouveaux talents » dont les albums sont éligibles au crédit d’impôt phonographique.
L’évolution proposée est rendue nécessaire par celle du marché de la musique. Les carrières étant de plus en plus brèves et erratiques, l’accompagnement de la création française sur le long terme nécessite à la fois un renforcement du soutien aux talents émergents et une amélioration du soutien aux artistes en redémarrage de carrière.
En effet, les critères actuels d’accès au crédit d’impôt privent les producteurs de leurs capacités à accompagner le développement des carrières des artistes sur le long terme.
Si le fait d’avoir atteint des ventes de plus de 100 000 albums pour au moins deux projets distincts était réellement un gage de pérennité de la carrière avant la crise du disque, c'est-à-dire avant 2003, il n’en est plus de même du tout aujourd'hui. En outre, le marché du disque est aujourd'hui bien plus versatile qu’il ne l’était en 2006, année où le crédit d’impôt a été mis en place.
Le risque associé à l’investissement dans le projet d’un artiste dont les succès sont intervenus plus de sept ans auparavant est en réalité comparable à celui d’un projet d’un artiste n’ayant jamais rencontré de succès.
Ces mutations du marché ont rendu les conditions d’accès au crédit d’impôt trop restrictives. Elles excluent ainsi un large éventail d’artistes dits du « milieu », dont la majorité des albums enregistrent au mieux quelques dizaines de milliers de ventes. Ces artistes représentent pourtant un intérêt majeur pour la préservation de la diversité culturelle.
Cette proposition, bien que différente de celle que j’ai défendue pour le cinéma, s’inscrit néanmoins dans le même état d’esprit. Lors de la création du crédit d’impôt phonographique, en 2006, les mutations du marché du disque, d’une très grande ampleur, et leurs conséquences sur la durée de vie des albums et des carrières n’ont pas été prises en compte. Il s’agit donc d’ajuster le dispositif.
Nous devons être capables, une fois constatés les effets de tous ces bouleversements, de reconnaître que les dispositifs que nous avons élaborés ne touchent plus la cible que nous visions et, en conséquence, être capables de rectifier le tir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. L’octroi du crédit d’impôt phonographique est soumis à une condition, que l’on peut contester, mais qui est relativement simple : il faut, comme vient de l’expliquer notre collègue David Assouline, ne pas avoir dépassé 100 000 exemplaires vendus pour deux albums distincts.
Il est proposé de la modifier en la combinant avec une limite de sept ans précédant le nouvel enregistrement – je sais que le marché du disque a évolué, mais pourquoi sept ans ? – et en ajoutant un autre critère : que l’artiste n’ait jamais sorti d’album ayant dépassé le seuil de 400 000 ventes. Cette évolution nous paraît source de complexification.
Le dispositif existant devait déjà prendre fin en 2015. Il a été pérennisé dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2015. Faut-il le complexifier encore ? Ce n’est pas l’avis de la commission, qui a émis un avis défavorable.