M. Claude Kern. Sans mettre en cause vos compétences, monsieur le secrétaire d’État, je pensais naïvement que chaque ministre viendrait défendre en personne son budget, à commencer par celui qui administre le premier budget de la nation. Mme la ministre préfère participer à un meeting politique en Rhône-Alpes… Quel mépris pour notre assemblée ! (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Le présent budget pour la mission « Enseignement scolaire » nous semble des plus classiques. Il ne détonne pas par rapport aux précédents, quelles que soient les majorités, il faut bien le reconnaître.
En l’occurrence, les crédits de la mission, qui constituent le premier poste de dépenses de l’État, continuent d’augmenter, mais l’inflation budgétaire se poursuit sans que, pour autant, les performances du système s’améliorent. Au contraire, même s’il n’est pas question ici de rouvrir le débat sur l’école, force est de constater que ce budget est révélateur des dérives et carences du système français d’enseignement primaire et secondaire.
Nos rapporteurs l’ont très bien montré, contrairement aux autres pays de l’OCDE, nous concentrons beaucoup trop les crédits sur le secondaire et très insuffisamment sur le primaire. Le résultat est que, arrivés au collège, nombre d’élèves ne maîtrisent toujours pas la lecture et l’écriture. Le présent budget s’inscrit dans cette tendance.
Ces contreperformances deviennent caricaturales après le bac, avec la difficulté qu’éprouvent nombre de bacheliers à s’insérer dans le supérieur et, surtout, dans la vie professionnelle.
Ainsi, à travers les différents budgets de l’éducation nationale, l’enseignement professionnel ne peut plus être dispensé comme avant. Certes, quels que soient les efforts réalisés par les uns et les autres, nous n’atteindrons jamais une adéquation entre la formation et l’emploi. L’éducation nationale n’est pas, et ne sera jamais, assez réactive face à des besoins des entreprises qui varient très rapidement.
Pour remédier à cette absence de souplesse du système, il nous faut soutenir plus activement la filière de l’apprentissage, afin d’assurer un avenir à nos jeunes en garantissant leur insertion professionnelle.
Or, comme le démontrait Françoise Férat, spécialiste incontestable du sujet, s’il y a un exemple de réussite en matière d’enseignement professionnel, c’est bien celui de l’enseignement agricole !
Mme Françoise Férat. Et comment !
M. Claude Kern. Malheureusement, c’est justement là que le Gouvernement a choisi de passer un coup de rabot de 2,5 millions d’euros.
M. Jacques Grosperrin. C’est un scandale !
M. Claude Kern. Pour améliorer la qualité de l’enseignement dans notre pays, j’ai évoqué la réallocation des moyens entre primaire et secondaire, ainsi qu’une meilleure articulation avec le monde du travail. Un troisième aspect ne peut toutefois être négligé, à savoir la faible attractivité des carrières des enseignants. C’est un problème majeur, qui affecte nécessairement les performances du système.
L’un des points négatifs est la rémunération des enseignants, qui est très insuffisante. Les chiffres sont éloquents : 2 200 euros nets en moyenne par mois pour un professeur des écoles en fin de carrière, soit deux fois moins qu’en Allemagne !
Or le Gouvernement a résolument choisi le recrutement au détriment de la revalorisation des rémunérations. Il poursuit son plan de création de 54 000 nouveaux postes dans l’éducation nationale durant la législature. En 2016, quelque 8 561 postes nouveaux seront ainsi créés.
Néanmoins, face à la faiblesse de l’attractivité de la carrière, les concours sont très peu performants. Lorsqu’on arrive presque, pour certains d’entre eux, à un candidat pour un poste, est-ce toujours un concours ? Franchement, la question se pose sérieusement.
De même, on peut se demander si la création de certains de ces postes ne relève pas de l’effet d’annonce. Je pense notamment aux 2 150 assistants d’éducation recrutés pour les réseaux d’éducation prioritaire, alors que le programme « Vie de l’élève » ne permettrait d’en financer que 1 000…
Pour en terminer justement sur ce programme, reste le lancinant problème des rythmes scolaires qui, une fois de plus, a placé les collectivités en première ligne de réformes décidées par l’État, et dont le fonds de soutien est insuffisamment doté, plus spécifiquement pour aider les établissements privés sous contrat d’association.
Non-revalorisation des rémunérations des enseignants, non-financement de postes dont la création est annoncée, non-accompagnement de la réforme des rythmes scolaires, autant de carences qui sont d’autant plus choquantes que le programme « Soutien de la politique de l’éducation nationale » semble être celui de tous les dérapages. Elles ont été stigmatisées par notre rapporteur : coût du programme informatique de gestion des ressources humaines SIRHEN, retards significatifs et surcoûts croissants dans les grands projets immobiliers du ministère…
Une série d’amendements a donc été déposée sur cette mission. Et parce que les choses sont toujours bien faites au Sénat, chacun de ces amendements vise justement à corriger, même marginalement, mais symboliquement, chacune des insuffisances et des dérives dont j’ai fait état.
Le premier amendement tend à infléchir la politique du recrutement, le deuxième à supprimer les crédits destinés à SIRHEN en 2016, le troisième, déposé par Françoise Férat et nombre de nos collègues du groupe UDI-UC, à rétablir les crédits de l’enseignement technique agricole, les quatrième et cinquième à améliorer l’accompagnement des communes par l’État en matière scolaire, en le faisant participer au renouvellement des manuels scolaires dans le premier degré et en anticipant l’abondement du fonds de soutien aux activités périscolaires pour les écoles privées sous contrat.
Le vote du groupe UDI-UC dépendra donc du sort de ces amendements, que nous soutiendrons fermement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission, mes chers collègues, je dirai un mot tout d’abord pour déplorer la réduction drastique du temps de parole pour la discussion de cette mission, la plus importante de l’État par ses enjeux comme par son volume de ses crédits.
Les moyens mobilisés dans les trois derniers budgets ont financé la reconstruction d’une formation initiale en recréant des postes d’enseignants stagiaires, ce qui était absolument indispensable.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous avions pour notre part prôné la mise en place d’une formation alimentée par de véritables prérecrutements, où les étudiants ne sont pas utilisés comme des moyens d’enseignement en responsabilité de classe.
Je continue de plaider en faveur de cette solution, car la crise du vivier persiste et montre que cette question est toujours d’actualité.
Concernant les professeurs de lycées professionnels, ou PLP, comment expliquer, monsieur le secrétaire d’État, que, sur l’année 2014-2015, quelque 60 % des stagiaires PLP exerçaient à temps plein devant des élèves, et qu’ils sont encore 40 % sur la session 2015-2016 ?
M. Jacques Grosperrin. Ils enseignent deux matières !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le respect du mi-temps serait déjà une première étape et le gage d’une véritable attention à la formation des professeurs des lycées professionnels, les grands oubliés depuis la réforme de la mastérisation.
Ce budget pour 2016 est marqué par la prise de fonction de nombreux fonctionnaires stagiaires : 12 011 ETP dans le premier degré et 12 534 ETP dans le second. Cela se traduit par une augmentation nette de 5 920 ETP dans les plafonds d’emplois : 3 411 ETP dans le premier degré et 2 509 ETP dans le second degré. C’est plus du double de l’année dernière, et ce ne sera pas de trop sur le terrain.
En effet, je voudrais dire à M. Longuet qu’il n’y a pas trop d’enseignants en France, ni dans le primaire ni dans le secondaire. Cher collègue, vous présentez cette année un amendement similaire à celui de l’année dernière, visant à diminuer les crédits de la mission en supprimant des créations de postes de stagiaires et en prévoyant le non-remplacement d’un départ à la retraite sur deux dans le second degré.
Ce dogme a déjà sévi sous le précédent quinquennat et il a abouti à la suppression de 80 000 postes.
M. Jacques Chiron. Eh oui !
M. Jacques-Bernard Magner. Exactement !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Or je n’ai pas le souvenir que les traitements des enseignants, notamment ceux du premier degré, aient été significativement améliorés ! Pis, en guise de « revalorisation » du métier, vous avez supprimé la formation initiale ! Nous voterons donc contre les amendements déposés par la majorité sénatoriale de droite.
Oui, il faut recruter plus d’enseignants et les former davantage, et même aller au-delà de ce que le Gouvernement fait aujourd’hui, car les moyens mobilisés depuis le PLF 2013 n’ont pas permis de répondre à de nombreux autres besoins sur le terrain.
J’évoquerai tout d’abord les moyens de remplacement. Dans certaines académies de région parisienne par exemple, le volant de remplaçants était déjà épuisé quelques semaines seulement après la rentrée pour pourvoir des postes de titulaires. Je pourrais citer une école maternelle, que je connais bien, dans laquelle une classe de petite section a vu se succéder trois enseignants en deux mois !
Autre point noir : les moyens consacrés à la formation continue des personnels restent très insuffisants. Ainsi, pour le premier degré, les crédits de l’action n° 4 diminuent légèrement par rapport à 2015, passant de 18,5 millions d’euros à 17,8 millions d’euros.
S’agissant du second degré, les moyens pour la formation continue des personnels, à l’action n° 10 du programme 141, augmentent certes de 20 millions d’euros par rapport à 2015 – 49,5 millions d’euros en 2016, contre 29,5 millions d’euros l’année précédente –, mais ces 20 millions d’euros supplémentaires sont destinés à financer un plan de formation pour « bâtir une culture commune sur le numérique ». S’il est indispensable, cet effort ne peut cependant répondre à lui seul aux besoins de formation nécessaires pour permettre à tous les enseignants d’appréhender et de déjouer les mécanismes de l’échec scolaire. Or, excepté cette dotation, les crédits sont identiques à ceux de 2015.
Pourtant, la rentrée de 2016 verra entrer en vigueur les nouveaux programmes du primaire et du collège. Je m’inquiète donc du peu de moyens consacrés et des modalités retenues actuellement pour préparer les enseignants à ces changements pédagogiques considérables.
Je crains une nouvelle fois que la formation continue ne soit cantonnée à de la prescription, pour présenter les réformes ou décrypter les dispositifs nouveaux, et ne permette pas l’émergence de véritables collectifs enseignants, qui permettraient à ces derniers de réfléchir entre eux sur leur métier, hors des injonctions et des prescriptions de l’institution.
L’expérience de tels collectifs d’enseignants, menée sous la houlette de l’équipe de clinique de l’activité du Conservatoire national des arts et métiers, le CNAM, avait offert des perspectives intéressantes ; ces groupes de pairs échangeant sur leur travail, sans aucun regard hiérarchique en surplomb, ont le mérite de « dépsychologiser » les difficultés rencontrées par les participants dans leurs classes, car les problèmes individuels sont réinterprétés comme des problèmes généraux, liés à l’organisation du travail et non à la personne de l’enseignant lui-même.
Une démarche à rebours de la tendance à diffuser des « guides de bonnes pratiques » formatées et stéréotypées, qui visent la standardisation des pratiques enseignantes pour en faciliter le contrôle, sans améliorer leur efficacité pédagogique. Ce chantier, monsieur le secrétaire d’État, est donc toujours au point mort.
Enfin, j’aborderai rapidement la question des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE. En l’absence d’un fléchage des moyens, certaines ESPE éprouvent des difficultés pour accueillir et former l’ensemble de leurs stagiaires dans les meilleures conditions. Le Comité de suivi sur la loi d’orientation, dont je fais partie, rendra dans quelques jours son premier rapport. Il pointera cette question des ESPE, avec un état des lieux et des propositions très utiles.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, vous le voyez, nous portons un regard critique sur ce budget. Toutefois, notre vote dépendra du rejet ou non des amendements défendus par la majorité sénatoriale de droite. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mesdames les présidentes des commissions, mes chers collègues, comme chaque année, le budget de la mission « Enseignement scolaire » est de loin le plus gros budget de l’État, avec 67 milliards d’euros.
Nous pourrions nous en réjouir si les défaillances de notre système éducatif n’étaient pas de plus en plus importantes, ce qui est extrêmement grave pour notre jeunesse et pour l’avenir de notre pays. Chaque année, quelque 150 000 jeunes décrochent : ils n’ont ni diplôme ni formation. Cela peut être considéré comme une énième répétition, mais c’est malheureusement une réalité.
Très souvent, l’orientation, qui se fait par défaut, conduit non pas à la réussite des élèves, mais à l’exclusion, et l’apprentissage, pour des raisons idéologiques, n’a plus la place qu’il devrait avoir dans notre système éducatif. C’est pourtant une voie d’excellence et un formidable levier pour lutter contre le chômage des jeunes.
Notre système scolaire coûte proportionnellement plus cher que la moyenne de ceux des pays de l’OCDE, mais ses performances sont inférieures. Certains pays de l’OCDE ont tenu compte des résultats du rapport PISA – Program for International Student Assessment – et ont mis en œuvre des réformes, comme la Finlande, l’Allemagne ou l’Italie.
Un rapport de la Cour des comptes de mai 2013, intitulé « Gérer les enseignants autrement », montre que l’éducation nationale ne souffre pas d’un manque de moyens ou d’un trop faible nombre d’enseignants, mais d’une « gestion défaillante ».
M. Michel Savin. Bien sûr !
Mme Colette Mélot. Malgré l’ampleur du déficit public, le Gouvernement a fait le choix de créer 60 000 postes pendant le quinquennat. Pour 2016, le projet de loi de finances prévoit la création de 10 821 postes nouveaux. L’entrée « frais de personnels » risque, une fois de plus, d’excéder ses crédits.
Ces moyens seraient mieux employés à lutter contre les inégalités pointées par l’étude PISA, notamment en revenant sur la prépondérance accordée au second degré. Un rapport de la Cour des comptes de 2015 confirme en effet que les inégalités se cristallisent sur le premier degré, alors que le coût d’un lycéen français est supérieur de 38 % au coût moyen d’un lycéen dans les autres pays de l’OCDE. C’est une anomalie.
Les réformes des programmes des collèges engagées par le Gouvernement ne vont pas dans le bon sens. Nous avons dénoncé la suppression des classes bilangues et des sections européennes. Ces classes, pourtant, ne favorisent pas l’élitisme, mais obtiennent de très bons résultats et sont ouvertes aux élèves de tous les milieux sociaux.
J’ai pu le constater dans un collège de ZEP – devenu « REP+ » – de Seine-et-Marne, où j’ai enseigné pendant dix ans. Les élèves de la classe européenne ont vécu des expériences intéressantes et ont participé à des déplacements dans d’autres pays dont tous les élèves ne pourront pas bénéficier, alors que l’on envisage de saupoudrer pour tous des notions de langue dès la classe de cinquième.
De plus, le remplacement de deux heures d’aide personnalisée individuelle par trois heures en classe entière est une aberration. Un élève en difficulté a besoin d’une aide individuelle, à son niveau. En traitant tous les enfants de la même façon, on commet une injustice envers les plus vulnérables.
L’égalitarisme n’est pas un facteur de réussite et ne favorise pas l’égalité des chances. Les tests PISA ont démontré que notre système était inégalitaire. Dans cette période troublée, nous avons conscience que l’éducation et la culture sont essentielles pour la cohésion sociale et le « bien vivre ». Ce sont des moyens de lutte contre la délinquance et la radicalisation.
Pour terminer, je voudrais évoquer la formation des enseignants. Les ESPE semblent se mettre en place et ont été intégrées dans les universités. Pourtant, le Gouvernement peine à recruter des enseignants dans les disciplines fondamentales, comme les mathématiques, le français ou l’anglais, ce qui pourrait se traduire par une baisse du niveau des reçus. Dans les académies déficitaires, comme celle de Créteil, où les besoins sont immenses, le recrutement est difficile et des postes n’ont pas pu être pourvus.
Le salaire des enseignants français est inférieur de 15 % à 20 % à celui de leurs homologues des États membres de l’Union européenne ou de l’OCDE. C’est peut-être l’une des raisons du manque d’intérêt pour cette profession. Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le métier d’enseignant n’attire plus dans notre pays ; c’est un signe alarmant.
La réforme de l’éducation nationale est devant nous. Nous devons agir vite et protéger nos jeunes, car nous ne pouvons plus en laisser tant au bord du chemin. Il nous faut mettre en œuvre des dispositions efficaces. Il ne saurait donc être question d’intérêts particuliers, d’ordre idéologique ou politique. C’est l’avenir de nos enfants et de nos petits-enfants qui est en jeu ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la question est posée : 700 millions d’euros d’augmentation des crédits pour l’enseignement scolaire pour 2016, pour quoi faire ?
C’est très simple : pour mettre des enseignants bien formés devant les élèves. Eh oui, cela a un coût ! Pour scolariser à nouveau en maternelle, et soutenir la priorité à l’école primaire. Eh oui, cela a un coût ! Pour respecter les exigences du dispositif « Plus de maîtres que de classes » et l’accompagnement des élèves les plus en difficulté. Eh oui, cela a un coût !
Cette année encore, nous opérons un rattrapage nécessaire, nous engageons un effort indispensable. Monsieur Carle, vous avez affirmé que le « toujours plus » ne résolvait rien. Je vous réponds que le « toujours moins » a montré ses limites sous le précédent quinquennat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. Les résultats n’étaient pourtant pas plus mauvais !
Mme Françoise Cartron. Monsieur le rapporteur pour avis, vous avez également défendu le caractère primordial de l’enseignement primaire. Nous sommes d’accord ! Il y a deux ans, pourtant, vous votiez ici même contre la loi de refondation de l’école, dont l’axe principal visait à accorder la priorité au plus jeune âge. Or, pour la première fois, cette ambition a été mise en œuvre.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. Cela ne se traduit pas dans les faits.
Mme Françoise Cartron. J’avoue parfois avoir des difficultés à vous suivre !
M. Jacques Grosperrin. Nous aussi !
Mme Françoise Cartron. Pourtant, je suis avec vous quand vous appelez à un redéploiement du secondaire. Chiche ! Il faudra bien que nous nous attaquions à toutes ces options qui sont extrêmement coûteuses et dont nous avons vu qu’elles pouvaient susciter des défilés.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. Nous sommes d’accord !
Mme Françoise Cartron. Nous accordons également la priorité à la lutte contre le décrochage scolaire, en lui attribuant les moyens nécessaires. Une bonne nouvelle a été annoncée aujourd’hui, avec de premiers résultats positifs relevés par l’OCDE : en 2014, le nombre de décrocheurs a baissé en France de 26 000 ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Grosperrin. Tant mieux !
Mme Françoise Cartron. L’effort doit se poursuivre, nous sommes sur la bonne voie.
Vous défendez également l’apprentissage des fondamentaux. Nous sommes tout à fait d’accord. Rappelons cependant que, toujours selon une note de l’OCDE, les enfants français passent plus de temps à apprendre à lire qu’ailleurs. Notre pays consacre 37 % du temps d’instruction obligatoire à l’étude du français en primaire, contre 22 % dans les autres pays.
M. Jacques Grosperrin. Et que dit McKinsey ?
Mme Françoise Cartron. Pourtant, l’OCDE nous démontre, enquête après enquête, que notre niveau n’est pas à la hauteur de nos espérances.
M. Loïc Hervé. CQFD !
Mme Françoise Cartron. L’enjeu des années à venir réside donc dans l’innovation pédagogique.
M. Loïc Hervé. Ah !
M. Jacques Grosperrin. Le pédagogisme, donc !
Mme Françoise Cartron. Nous la mettons au cœur de nos réformes, quand vous la combattez. Chers collègues de l’opposition, au vu de certaines de vos propositions récentes, je vous répète qu’il est illusoire de croire que les solutions aux problèmes d’aujourd’hui et de demain se trouvent dans les recettes du passé !
M. Jacques Grosperrin. C’est vous qui êtes nostalgiques de Jules Ferry !
Mme Françoise Cartron. Je dirai un mot sur la réforme des rythmes scolaires, que vous avez largement évoquée. Vous relevez deux écueils. D’une part, elle aurait aggravé les inégalités entre les territoires.
M. Loïc Hervé. « Eh oui, cela a un coût ! » (Sourires sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)
Mme Françoise Cartron. Non, elle les a révélées. Demain, les nouveaux rythmes permettront de les réduire.
Vous avez affirmé d’autre part que le fonds de soutien était en baisse.
M. Loïc Hervé. « Eh oui, cela a un coût ! »
Mme Françoise Cartron. Ce n’est pas exact : son niveau est maintenu tel qu’il avait été pérennisé dans la loi de finances.
Je me souviens de votre désengagement, lors de la mandature précédente, s'agissant de la scolarisation des enfants de moins de trois ans. Au sein de la commission, nous avions examiné un rapport qui disait tout le mal possible de l’école maternelle…
M. Jacques Grosperrin. Nous n’avons jamais dit cela !
Mme Françoise Cartron. … et vantait les jardins d’éveil, entièrement payés par les communes, sans accompagnement de l’État ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste.)
M. Jacques Grosperrin. Ce n’était qu’une option, et sans doute pas la meilleure.
Mme Françoise Cartron. Ce n’était qu’une option, mais c’était la seule, cher collègue !
Souvenons-nous que le Gouvernement a mis en place durant ces trois dernières années les crédits nécessaires pour mener cette politique ambitieuse. Ne boudons pas notre plaisir, saluons cet effort et saluons ce budget, qui est le premier de la nation ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.