Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise donc à supprimer l’article 14, c'est-à-dire à ne pas prévoir une extension du plafonnement des taxes affectées. Cette nuit, nous avons eu un long débat sur l’effort de chacun au redressement des finances publiques, en évoquant les collectivités et l’État. Il serait anormal que les opérateurs ne contribuent pas à ce redressement, notamment par le plafonnement de leurs taxes affectées.
La Cour des comptes l’a souligné dans le rapport, demandé par le Sénat, sur la masse salariale de l’État : la masse salariale des opérateurs qui a augmenté de 50 % depuis 2009 – certes, des changements de périmètre sont intervenus, notamment pour les universités – a progressé beaucoup plus vite que celles de l’État et des collectivités.
Tout le monde doit participer à l’effort de redressement. Voter en faveur de cet amendement conduirait à ne pas faire participer, par le plafonnement de taxes affectées, les différents opérateurs de l’État à cet effort. C'est la raison pour laquelle la commission est évidemment défavorable à cet amendement, comme je l’avais annoncé dans mon propos introductif.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je profite de ma prise de parole sur cet amendement pour réagir aux interventions liminaires du rapporteur général et de M. Bouvard.
Effectivement, le Gouvernement s’inscrit dans cette ligne, qu’il a lui-même d’ailleurs confirmée dans la loi de programmation des finances publiques, de bonne maîtrise de la dépense. Pour cela, il faut respecter des principes, qui ont été rappelés : le plafonnement et la vigilance, ce qui n’exclut bien évidemment pas un regard intelligent sur des situations variées. Certains opérateurs disposent de fonds de roulement abondants, et d’autres non ; il en va de même pour le patrimoine. M. Bouvard a eu raison d’évoquer la question, et j’aurai l’occasion dans les semaines qui viennent de vous indiquer les changements que le Gouvernement entend mettre en œuvre en matière de gestion de la politique immobilière de l’État. Il est nécessaire d’avoir un regard global sur le patrimoine immobilier.
Il est fini le temps où chaque ministère, chaque opérateur gérait son patrimoine sans regarder s’il n’y avait pas de moyen de mutualiser et d’optimiser la gestion immobilière. Car c'est un facteur important de dépenses.
Le Gouvernement est évidemment défavorable à cet amendement de suppression.
Cependant, j’y insiste, il faut respecter les principes que j’ai évoqués et se montrer lucide et exigeant à l’égard des opérateurs. Les taxes qui leur sont affectées sont souvent très dynamiques. En tout état de cause, certaines d’entre elles ont pu l’être par le passé ! Nous aurons probablement l’occasion de les passer en revue lorsque nous examinerons l’ensemble des amendements déposés à l’article 14.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons présenté cet amendement, parce que nous nous interrogeons fortement sur le principe du transfert vers des agences de tout un ensemble de politiques que l’État n’a pas voulu continuer à mener et pour lesquelles ont été mises en place des taxes affectées.
Le produit de ces taxes a, par définition, une destination. On n’oserait imaginer, par exemple, qu’une collectivité perçoive une taxe affectée sur l’électricité et décide d’utiliser son produit à d’autres fins !
J’y vois un vrai problème de déontologie. Le montant du produit des taxes affectées doit être conforme à leur destination.
En cela, notre amendement est pleinement justifié.
Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-425, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
1° bis Après la troisième ligne, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
«
III. – de l’article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 |
Agence de financement des infrastructures de transport de France |
715 000 |
III bis de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 |
Agences de l’eau |
2 300 000 |
»
II. – Alinéa 19
La première colonne du tableau est ainsi modifiée :
1° À la première ligne, les mots : « Article L. 2132-14 du code des transports » sont remplacés par les mots : « Article 1609 sextricies du code général des impôts » ;
2° À la deuxième ligne, les mots : « Article L. 2132-15 du code des transports » sont remplacés par les mots : « Article 1609 septtricies du code général des impôts ».
III. – Alinéa 63
Remplacer les mots :
à 2,3 milliards d’euros
par les mots :
au montant prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012
IV. – Alinéa 64
Remplacer le mot :
deuxième
par le mot :
premier
V. – Alinéa 81
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
VII. – Le III de l’article 36 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 est remplacé par un alinéa ainsi rédigé :
« III. – À compter de 2016, une part du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue à l’article 265 du code des douanes revenant à l’État est affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. »
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cet amendement de coordination a deux objets.
D’une part, il vise à intégrer dans le tableau de l’article 46 de la loi de finances pour 2012 les plafonds des taxes affectées aux agences de l’eau et à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France. Je précise que ses dispositions ne modifient nullement le montant des plafonds adoptés par l’Assemblée nationale pour 2016, à savoir 2,3 milliards d’euros par an pour les agences de l’eau et 715 millions d’euros pour l’AFITF.
D’autre part, cet amendement tend à actualiser les références des articles relatifs aux taxes affectées à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l’ARAFER, à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement du Gouvernement qui visait à intégrer ces taxes au code général des impôts.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° I-431, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Amendement n° I-425, alinéa 4, tableau, troisième colonne, première ligne
Remplacer le nombre :
715 000
par le nombre :
1 139 000
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ce sous-amendement de cohérence vise à tenir compte des difficultés de financement de l’AFITF.
En effet, vous vous souvenez, mes chers collègues, que, l’année dernière, à la suite de l’épisode douloureux de l’écotaxe, sur lequel je ne reviendrai pas, l’AFITF s’était tout simplement vue privée de ses ressources. Je salue, d'ailleurs, Marie-Hélène Des Esgaulx, qui avait attiré notre attention sur cette difficulté. L’augmentation de 2 centimes d’euros par litre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, sur le diesel pour les particuliers et l’exonération de 4 centimes d’euros par litre sur le gazole des poids lourds, pour un montant de 1,13 milliard d’euros, avaient été affectées à l’Agence, en compensation de la perte de la fameuse éco-redevance.
Très concrètement, le présent sous-amendement vise à tirer les conséquences des besoins en ressources de l’AFITF, en augmentant les crédits qui lui sont dévolus.
Monsieur le secrétaire d'État, comment le Gouvernement entend-il assurer le financement de l’AFITF ?
Mme la présidente. Les trois amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° I-121 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° I-174 est présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° I-255 rectifié est présenté par MM. Mézard, Requier, Collin, Arnell, Castelli, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et M. Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 81
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour présenter l’amendement n° I-121.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. M. le rapporteur général a tout dit !
L’équilibre financier de l’AFITF est pour le moins instable. D’ailleurs, son président, M. Philippe Duron, affirme lui-même que l’Agence a besoin de 2,2 milliards d’euros !
Le compte n’y est pas. Il manque 400 millions d’euros, somme correspondant justement à l’augmentation de la TICPE qui avait été décidée l’an dernier pour le financement des infrastructures routières.
Je ne vois pas du tout l’intérêt d’une telle diminution.
Certes, l’année dernière, la hausse de la TICPE a permis de financer le manque à gagner lié à l’abandon de l’écotaxe. Certes, cette année, les sommes à compenser sont plus faibles, et c’est heureux – par ma part, je les trouve encore beaucoup trop élevées, compte tenu des décisions qui ont été prises. Il n’en demeure pas moins que l’AFITF, au regard de ses obligations en matière d’infrastructures routières, doit être convenablement servie. Le report des investissements et les retards de financements sont bien trop importants.
Il faut véritablement s’en tenir au niveau de recettes qui avait été décidé l’an dernier. C’est pourquoi je propose de supprimer l’alinéa 81 de l’article 14.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Bocquet, pour présenter l’amendement n° I-174.
M. Éric Bocquet. Nous abordons, au travers de cet amendement, un sujet devenu essentiel pour l’avenir de notre belle nouvelle région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, qui a besoin d’outils comme l’AFITF pour son développement. Ce ne sont pas mes collègues Christian Manable et René Vandierendonck qui me démentiront !
Dans le présent projet de loi de finances, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France se trouve privée de 421 millions d’euros, alors que, l’an dernier, on reconnaissait la nécessité d’augmenter ses ressources.
Le grand rassemblement international qu’est la COP 21 devrait fixer des engagements audacieux et significatifs en matière de limitation des gaz à effet de serre et de préservation de notre maison commune, la Terre. À cet égard, le domaine des transports mérite une attention toute particulière, compte tenu de l’importance qu’il revêt dans les désagréments et les troubles qui nous perturbent – plus de 14 % nous dit-on.
De ce point de vue, le projet du canal Seine-Nord Europe, qui devrait permettre de donner une nouvelle impulsion à l’ensemble de la filière du transport fluvial dans notre pays, a évidemment une importance essentielle. Félicitons-nous que le coût de l’opération ait été intelligemment réduit, grâce à l’abandon de la procédure du partenariat public-privé, à la suite notamment des recommandations contenues dans le rapport de M. Rémi Pauvros, député socialiste de la circonscription comprenant le Val de Sambre.
Toutefois, nous ne sommes qu’au début d’un projet, dont nous devons définir les accompagnements nécessaires. Je pense à la mise au gabarit européen de l’Oise, de Creil à Compiègne, qui est déjà prévue, mais aussi, pour ce qui concerne l’opération dans son ensemble, à l’amélioration de la qualité des transports ferroviaires autour de Rouen et du Havre et à la connexion de ces grandes plateformes portuaires avec l’arrière-pays.
Il faut accompagner le projet du canal Seine-Nord Europe avec l’écluse fluviale du Havre, avec la modernisation de la ligne Serqueux-Gisors, pour permettre une meilleure liaison entre Le Havre et Amiens, comme entre Dieppe et Amiens,…
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Éric Bocquet. … avec la modernisation de la ligne reliant Motteville à Montérolier-Buchy, entre autres dispositions. Il faudrait aussi réfléchir à la liaison avec le Dunkerquois.
Mes chers collègues, quelques dizaines de millions d’euros doivent être trouvés pour mener ces opérations complémentaires, qui amélioreront la qualité de vie et la qualité de l’air dans la partie nord de la France.
Nous avons, avec le canal Seine-Nord Europe, les moyens d’un report modal décisif sur la voie d’eau et sur la voie ferrée, dans des régions au contact de la « banane bleue » européenne aujourd’hui littéralement envahies par un trafic routier en progression constante, finissant par poser de sérieux problèmes de congestion des agglomérations. Ce matin encore, il fallait deux heures et demie pour parcourir vingt kilomètres dans la métropole lilloise !
Dans ces conditions, notre amendement paraît pleinement pertinent ! (MM. Joël Labbé, Christian Manable et René Vandierendonck applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° I-255 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Lors de l’examen de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » par l’Assemblée nationale, à l’automne 2014, Ségolène Royal, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, avait annoncé que le budget de l’AFITF pourrait atteindre 2,24 milliards d’euros en 2015 compte tenu de l’évaluation retenue pour les taxes qui lui étaient affectées.
Aussi, dans ces circonstances, il ne semble pas opportun d’amputer les recettes de l’Agence d’au moins 424 millions d’euros pour l’année 2016, alors que sa situation financière est dégradée et que les deux grands projets que sont le canal Seine-Nord Europe et le tunnel de la ligne ferroviaire Lyon-Turin doivent être financés.
Il serait judicieux d’affecter à l’AFITF la totalité de la fraction de la TICPE qui lui revient et de maintenir, ainsi, le niveau de son budget.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° I-425 du Gouvernement est un amendement de coordination technique, puisqu’il vise simplement à tirer les conséquences des votes intervenus à l’Assemblée nationale, en intégrant le plafond de certaines taxes affectées à l’AFITF dans un tableau récapitulatif. Cependant, il faut bien voir que son adoption conduirait aussi à entériner la baisse du produit de ces taxes ! Dès lors, j’émets un avis favorable sur cet amendement, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° I-431.
Pour ce qui concerne l’amendement n° I-121, Mme Des Esgaulx a appelé notre attention sur la baisse des ressources de l’AFITF, qui ne peut faire face au rythme des paiements. Je ne m’étendrai pas sur l’ensemble des besoins en matière d’infrastructures : chacun sait qu’ils sont considérables ! Selon l’AFITF, il faudrait décaisser environ 2,2 milliards d’euros pour faire face aux différents engagements contractés, qu’il s’agisse des lignes ferroviaires ou encore des canaux. C’est d'ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement lui avait dédié, l’année dernière, des recettes nouvelles, issues de la fiscalité des carburants.
Toutefois, l’article 14 du présent projet de loi de finances n’affectera qu’une fraction du produit affecté de TICPE, pour un montant de 715 millions d’euros.
Au contraire, Marie-Hélène Des Esgaulx, en sa qualité de rapporteur spécial, propose de maintenir le plafond de la TICPE affecté à l’AFITF à 1,139 milliard d’euros.
Sur le fond, la commission des finances y est favorable, comme elle l’est, bien évidemment, à l’amendement n° I-174, défendu par le groupe CRC, et à l’amendement n° I-255 rectifié, présenté par des membres du groupe du RDSE, qui vont exactement dans le même sens. Il s’agit de fournir à l’AFITF de nouvelles ressources.
Néanmoins, la commission demande à leurs auteurs de se rallier à son sous-amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Soyons précis sur les recettes et les dépenses de l’AFITF.
Je prendrai l’année 2014 pour point de référence.
L’AFITF était alors financée par différentes redevances, la taxe d’aménagement du territoire, contribution versée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, la redevance domaniale, de même origine, et une partie du produit des amendes issues des radars, ainsi que par une subvention de l’État (M. Michel Bouvard le confirme.), pour un montant total de produits d’environ 1,75 milliard d’euros.
Ses dépenses concernaient plusieurs secteurs : 1,714 milliard d’euros de dépenses dites « opérationnelles » – consacrées au financement des opérations d’investissement –, 48 millions d’euros de remboursement à l’Agence France Trésor, pour une opération qui courra encore pendant quelques années et dont le montant annuel va, d'ailleurs, en diminuant, et 1 million d’euros de dépenses de fonctionnement. Autrement dit, c’est la partie opérationnelle de l’AFITF, c'est-à-dire le montant effectivement consacré au financement des infrastructures de transport, qui compte.
En 2015, vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, l’AFITF a dû faire face à un remboursement exceptionnel, lié à la dénonciation du contrat Ecomouv’. Tout et même plus a été dit sur cette affaire ; il ne s’agit pas d’y revenir ce soir ! Cependant, je veux rappeler que le montant en jeu s’élevait à 529 millions d’euros. Autrement dit, le budget global de l’AFITF a été porté à 2,4 milliards d’euros, quand les dépenses opérationnelles s’élevaient à 1,844 milliard d’euros.
Et c’est pour permettre à l’AFITF de consacrer le même montant aux investissements que lui avait effectivement été affectée, en plus, une part du produit de la TICPE, constituée de diverses ressources supplémentaires – les 2 et 4 centimes d’euros par litre de gazole qui ont été évoqués tout à l'heure –, pour un montant de 1,139 milliard d’euros, le tout, en substitution de l’ancienne dotation budgétaire de l’État.
Que va-t-il se passer en 2016, mesdames, messieurs les sénateurs, si vous suivez la proposition du Gouvernement ? La dépense principale de remboursement de l’indemnité liée à la dénonciation du contrat Ecomouv’ disparaît, ou en tout cas s’effondre considérablement, puisqu’on passe de 529 millions d’euros à rembourser – ce qui a été fait – à un reliquat de 47 millions d’euros qui devra être versé pendant encore quelques années. Et l’AFITF aura une capacité d’intervention légèrement supérieure à celle de l’année dernière – de 1,844 milliard d’euros, elle atteindra 1,855 milliard d’euros – et pourra donc continuer d’accompagner le financement de projets, dont certains s’étalent parfois sur de longues années : il a été fait allusion au canal Seine-Nord Europe, mais on pourrait également parler du tunnel Lyon-Turin. Eu égard à leur étalement dans le temps, de tels projets sont soumis à de nombreux aléas et les dépenses ne sont pas toujours en rapport avec ce qui a pu être prévu.
Dans la mesure où l’AFITF va conserver le même pouvoir d’intervention directe – pas plus, certes – en termes de financement et bénéficie de cette contribution exceptionnelle des sociétés d’autoroutes, à hauteur de 100 millions d’euros – en vertu de ce fameux accord conclu cet été entre le Gouvernement et les sociétés précitées – le Gouvernement vous propose d’affecter à l’Agence un montant de 715 millions d’euros au titre de la TICPE.
Il est toujours possible de réclamer davantage de capacité de financement. C’est une position que je peux comprendre. Mais, à votre tour, comprenez que, à 11 millions d’euros près – à la hausse –, les capacités de financement de l’AFITF seront les mêmes en 2016 qu’en 2015.
Le Gouvernement est défavorable au sous-amendement de la commission. L’amendement qu’il vous propose est un amendement de coordination, mais dont je comprends qu’il nécessite d’être corrigé pour tenir compte des différents amendements proposés.
Pour les raisons que je viens d’évoquer, le Gouvernement est défavorable aux autres amendements, qui consistent tous à majorer les recettes de l’AFITF.
Mme la présidente. La parole est à M. Maurice Vincent, pour explication de vote sur le sous-amendement n° I-431.
M. Maurice Vincent. Mon groupe se félicite que les ressources de l’Agence soient maintenues, comme vous venez de l’expliquer, monsieur le secrétaire d’État, en dépit du contexte budgétaire et des économies importantes réalisées sur la dépense publique.
Par les temps qui courent, le maintien de budgets est un signe positif en soi. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas le sous-amendement proposé par M. le rapporteur général.
Toutefois, compte tenu de de l’importance des travaux évoqués – je songe au tunnel Lyon-Turin et au canal Seine-Nord Europe –, il faudra certainement réfléchir, si l’on souhaite maintenir des projets de cette ambition, en sus de l’aménagement indispensable de certaines régions en termes de grandes infrastructures, à une consolidation et à une augmentation du budget de l’Agence dans les années à venir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx M. le secrétaire d’État a beaucoup peiné pour nous expliquer – je le dis comme je le pense –...
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. … que l’AFITF disposera des moyens opérationnels véritablement nécessaires.
Nous ne connaîtrons le budget de l’Agence qu’au mois de décembre, mais M. Duron fait d'ores et déjà campagne partout ! Je ne pense pas que l’on puisse contester la position du président de l’AFITF, toujours très mesuré dans ses propos, qui dit avoir absolument besoin du montant en cause.
L’Agence doit beaucoup d’argent – elle est notamment endettée vis-à-vis de la ligne Tours-Bordeaux – et ses retards de paiement sont considérables.
Ma proposition ne dégrade pas le solde : la recette induite par l’augmentation de 2 centimes de la TICPE, décidée l’année dernière, demeure dans le budget. Le Gouvernement propose de ne plus l’affecter aux infrastructures de transport, ce qui n’est pas convenable. Dans l’esprit de tout le monde, et surtout des automobilistes qui paient la facture, cette recette est dédiée aux infrastructures de transport.
En 2014, malheureusement, elle fut affectée à l’épisode de l’écotaxe, ce que je regrette vraiment, tant cela revenait à jeter de l’argent à la poubelle. Aujourd’hui, cette part de la TICPE va permettre le paiement de soldes d’infrastructures d’ores et déjà décidées comme à venir. Il va en effet falloir avancer sur les deux projets très importants que vous avez évoqués, monsieur le secrétaire d’État, car nous allons devoir fournir des assurances à l’échelon européen. Le niveau de financement de l’AFITF me paraît donc aujourd’hui absolument irréductible. Nous ne pouvons qu’aller dans ce sens.
Monsieur le secrétaire d’État, vous ne m’avez vraiment pas convaincue. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je respecte tous les points de vue, madame Des Esgaulx, mais vous ne pouvez pas dire que votre proposition ne dégrade pas le solde.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Non, il n’est pas dégradé !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, si vous augmentez les dépenses de 425 millions d’euros, vous dégradez le solde de 425 millions d’euros !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Absolument pas ! La ressource existe, c’est vous qui l’affectez ailleurs !
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je soutiendrai bien évidemment le sous-amendement de la commission, mais aussi les amendements identiques qui ont été présentés. Il faut prendre conscience de la nécessité, d’augmenter les ressources de l’AFITF.
Cela fait des années que l’on décrie les excès du « tout à la route » et que l’on dénonce le scandale de nos infrastructures ferroviaires, complètement bradées. Il n’y a pas que le TGV !
M. Charles Revet. Tout à fait !
M. Marc Laménie. Nous devons aussi penser aux petites lignes de voyageurs ou de fret ferroviaire. On nous parle du réseau capillaire, mais on nous met devant le fait accompli avec la réforme ferroviaire et SNCF Réseau ! Après quoi, on se tourne vers les chargeurs et les collectivités territoriales ! À un moment donné, il faut arrêter !
On dénonce le flux excessif de camions, on prône partout le développement durable, mais, au final, on marche sur la tête ! C'est la raison pour laquelle je voterai l’amendement du groupe CRC. Arrêtons le gâchis de l’infrastructure ferroviaire !
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Bien évidemment, nous allons soutenir ces amendements, qui visent à maintenir les moyens d’action de l’AFITF.
N’attendons pas de vivre, comme l’Allemagne, les affres du vieillissement des infrastructures qui pénalise sa croissance économique.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Tout cela nécessite quelques explications. Il s’agit tout de même du financement d’infrastructures majeures.
L’AFITF doit environ 700 millions d’euros pour le ferroviaire…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Depuis que M. Duron nous le confirme !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Et c’est une dette qui ne date pas d’aujourd'hui !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’ai relu encore une fois la lettre du président de l’AFITF. À moins de mettre en cause ce qu’il écrit, les besoins de financement de l’Agence sont bien de 2,3 milliards d’euros par an, ce qui est loin du montant inscrit dans ce projet de loi de finances.
L’année dernière, on nous a « vendu » une augmentation de la fiscalité sur le gazole. Cette recette exceptionnelle, nous disait-on, devait servir à indemniser Ecomouv’. Concrètement, les automobilistes ont donc payé 2 centimes par litre de plus sur leur facture de gazole.