M. le président. Le sous-amendement n° 615 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny et Anziani, Mme Bataille, M. Berson, Mmes Bonnefoy et Campion, MM. Cazeau, Courteau, Labazée, Madrelle, Manable et F. Marc, Mmes Monier et Schillinger, MM. Sueur et Vincent, Mme Yonnet et M. Durain, est ainsi libellé :
Amendement n° 15 rect
I. - Au début de l'alinéa 2
Insérer les mots :
Hors usage médical,
II. - Après l'alinéa 2
Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :
I bis. – Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage mentionnés au I.
I ter.- Les I et I bis entrent en vigueur dans le délai de deux ans suivant la promulgation de la présente loi.
III. – Après l'alinéa 3
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation ont qualité pour rechercher et constater les infractions au I du présent article, ainsi qu’aux mesures prises pour leur application. À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Au regard des avis rendus sur les cabines de bronzage par l’Académie nationale de médecine, le Centre international de recherche sur le cancer et l’INVS, mais aussi d’un encadrement réglementaire de leur usage qui reste, bien que constamment renforcé, mal appliqué ou inappliqué, nous soutenons l’amendement présenté par notre collègue Jean-François Longeot, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
À travers ce sous-amendement, nous vous proposons également de tenir compte de la situation des exploitants de cabines de bronzage, qui ont développé une activité autorisée et se sont encore récemment conformés aux nouvelles prescriptions des décrets publiés en 2014.
Il y a là une question de prévisibilité qui justifie un délai d’application. La responsabilité de l’État ne risquerait-elle pas en effet d’être engagée du fait de la loi ? C’est pourquoi nous vous proposons que cette interdiction s’applique deux ans après la promulgation de la loi.
Nous proposons également, à l’identique du texte adopté par notre commission, d’une part, de donner compétence aux agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation et, d’autre part, de prévoir un arrêté pour fixer les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage.
Sur ce dernier point, madame la ministre, une compensation pourrait être envisagée au bénéfice des exploitants faisant une application anticipée de l’interdiction. Nous ne pouvions le proposer compte tenu du risque d’irrecevabilité financière. Je fais donc cette suggestion de vive voix au Gouvernement.
Mes chers collègues, l’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, complété de cette manière par notre sous-amendement, permettra de satisfaire à la fois un impératif de santé publique et une mise en œuvre effective et responsable.
M. le président. L'amendement n° 604 rectifié, présenté par Mme Jouanno, M. Médevielle et Mme Billon, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 614 rectifié bis, présenté par MM. Daudigny et Anziani, Mme Bataille, M. Berson, Mmes Bonnefoy et Campion, MM. Cazeau, Courteau, Labazée, Madrelle, Manable et F. Marc, Mmes Monier et Schillinger, MM. Sueur et Vincent, Mme Yonnet et M. Durain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Hors usage médical, la vente, la mise à disposition à titre gratuit ou onéreux et l’utilisation d’appareils de bronzage, définis comme les appareils émettant des rayonnements ultraviolets destinés à exercer une action sur la peau à des fins esthétiques, sont interdites.
II. - Un arrêté du ministre chargé de l’environnement fixe les conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils de bronzage mentionnés au I.
III. - Les I et II entrent en vigueur dans le délai de deux ans suivant la promulgation de la présente loi.
IV. - Le non-respect de l’interdiction prévue au I est puni d’une amende de 100 000 euros.
V. - Les agents mentionnés au 1° du I de l’article L. 215–1 du code de la consommation ont qualité pour rechercher et constater les infractions au I du présent article, ainsi qu’aux mesures prises pour leur application. À cet effet, ils disposent des pouvoirs prévus au livre II du code de la consommation.
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Personne ne contestera que nous attendons des mesures législatives que nous votons qu’elles soient très concrètement applicables et qu’elles tiennent compte du contexte dans lequel elles seront mises en œuvre.
Nous sommes ici face à un double constat : d’une part, la dangerosité aujourd’hui amplement avérée des cabines de bronzage ; d’autre part, la poursuite du développement des centres de bronzage artificiel et de l’activité commerciale qui s’y attache, dans le cadre d’une réglementation pourtant constamment renforcée.
Les avis scientifiques sont sans appel : dès 2003, puis à nouveau en 2009 et 2010, l’Académie de médecine alerte sur les risques liés à l’exposition aux UV artificiels. En 2009, le Centre national de recherche sur le cancer classe cette pratique dans le groupe des agents cancérogènes certains pour l’homme. En 2011, l’Institut national de veille sanitaire, l’INVS, constate que le nombre de mélanomes a plus que triplé entre 1980 et 2005 en France. Dans son dernier avis publié le 2 février 2015, l’Académie de médecine est catégorique : « hors usage médical, il faut interdire totalement les cabines de bronzage ».
Ainsi, porter au niveau législatif un encadrement, même rendu plus strict encore, risque de n’y rien changer. L’interdiction de mise à disposition des appareils de bronzage aux mineurs de dix-huit ans, prévue par le texte qui nous est soumis, figure d’ailleurs déjà dans le décret du 27 décembre 2013. En tout état de cause, le risque est avéré, quel que soit l’âge.
Si l’interdiction des cabines de bronzage s’impose donc, le moins est aussi qu’elle s’applique avec un minimum de prévisibilité à l’égard des exploitants qui ont développé leur activité dans le cadre de la réglementation existante.
C’est pourquoi nous vous proposons que cette interdiction entre en vigueur deux ans à compter de la promulgation de la loi.
Par ailleurs, notre sous-amendement reprend deux mentions du texte adopté par notre commission, s’agissant des conditions de récupération, de destruction et de mise au rebut des appareils, d’une part ; de la compétence des agents de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, d’autre part.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est vrai que, en juillet, nous n’avions pas émis un avis favorable sur l’amendement de la commission du développement durable présenté par M. Longeot, qui visait à interdire les cabines UV. Nous considérions en effet que l’interdiction des appareils du jour au lendemain, y compris à domicile et sans mesure transitoire, poserait un problème de sécurité juridique. Nous avions donc préconisé plutôt des mesures transitoires.
La nocivité des cabines de bronzage à laquelle l’Académie de médecine fait référence depuis de nombreuses années me paraît largement établie.
La commission a souhaité que des mesures transitoires soient prises, que le caractère hors usage médical soit vraiment bien défini. Tel est le sens du sous-amendement n° 615 rectifié bis présenté par le sénateur Daudigny. La commission donne un avis favorable sur ce sous-amendement, de même qu’à l’amendement n° 15 rectifié sous réserve de l’adoption du sous-amendement. L’amendement n° 614 rectifié bis est une version consolidée des deux.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Tout d’abord, je veux dire que la nocivité de l’exposition aux rayons UV est évidemment avérée. Nous sommes, en France, comme dans d’autres pays, confrontés à une augmentation très importante du nombre de cancers de la peau, de mélanomes. Ce phénomène doit nous amener à prendre un certain nombre de mesures.
Faut-il que ces mesures soient l’interdiction ? Contrairement à ce que certains d’entre vous semblent penser, la logique du projet de loi n’est pas celle de l’interdiction. La logique du projet de loi en termes de santé publique est celle de l’information, de la régulation, de l’encadrement, qu’il s’agisse de l’alcool, du tabac. Si les méfaits du tabac sur la santé sont avérés, le projet de loi ne prévoit pas d’interdire le tabac. Il prévoit d’encadrer, de réguler notamment les mécanismes ou les procédés de publicité. Des mesures de régulation ont été engagées dès 1997 pour ce qui est des cabines de bronzage et ces règles ont été renforcées en 2013.
Le présent projet de loi porte des mesures d’encadrement renforcées, en interdisant la publicité pour la vente des appareils de bronzage ou pour l’offre d’une prestation de service, en interdisant la vente ou la cession d’appareils de bronzage aux particuliers pour éviter que l’on ne s’en serve n’importe comment à domicile puisqu’on ne peut d’ores et déjà pas acheter sur internet, en interdisant les forfaits illimités, qui constituent un encouragement à des pratiques extrêmement dangereuses. Le projet de loi introduit une obligation de formation de ceux qui sont amenés à proposer cette pratique.
Telle est la démarche retenue par le projet de loi. J’entends très bien la volonté qui s’exprime. Toutefois, ce n’est pas la perspective dans laquelle nous nous situons, d’autant moins que nous avons été un certain nombre de ministres en charge de la santé à saisir la Commission européenne pour voir quel type d’harmonisation des pratiques pourrait se faire. Un groupe de travail s’est mis en place au niveau européen. Il doit proposer, au premier semestre de l’année 2016, d’après ce qui m’a été dit, des orientations dont je ne connais pas actuellement la teneur. À ce stade, le Gouvernement entend en rester là.
À défaut de retrait des amendements prévoyant l’interdiction complète des cabines de bronzage, j’émets un avis défavorable.
Pour le reste, je veux dire à M. Daudigny que les appareils en cause ne concernent que des visées esthétiques. Ce sont des modèles qui n’ont pas de visées médicales. Il me semble donc que le sous-amendement proposé pour éviter que les appareils à visée médicale ne soient concernés dans la perspective de votre propre amendement d’interdiction n’a pas lieu d’être parce que ce ne sont pas du tout les mêmes matériels.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour explication de vote.
Mme Chantal Deseyne. Madame la ministre, je vous remercie pour vos propos. Je ne conteste pas les dangers d’une surexposition aux rayonnements UV, en particulier le risque de développer un cancer de la peau. On sait par ailleurs que cela concerne seulement une partie de la population, estimée entre 5 % et 7 %. Cette population est parfaitement identifiée : ce sont généralement les personnes à peau claire ou qui présentent de nombreux grains de beauté.
Vous disiez tout à l’heure que les mélanomes avaient triplé. Pour autant, la fréquentation des cabines de bronzage a-t-elle triplé ? Je ne le crois pas. Les mélanomes sont aussi développés par l’exposition aux rayonnements naturels, aux UV solaires.
Supprimer les cabines, c’est aussi mettre en danger toute une filière. Dans cet hémicycle, on n’a pas toujours eu autant de scrupules. Je pense en particulier à l’amendement présenté pour demander la suppression de la publicité dans les programmes télévisés destinés à la jeunesse. Cela nous a valu de nous entendre expliquer que pour protéger toute une filière et une production on pouvait maintenir à destination des jeunes publics des messages qui ne sont pas forcément des messages sanitaires !
De plus, nous sommes sur deux logiques très différentes. Alors que je défends l’information, l’éducation et l’encadrement, laissant chacun responsable de ses choix, vous êtes, monsieur Longeot, beaucoup plus radical dans votre positionnement et vous proposez une interdiction stricte.
Pour toutes ces raisons je ne voterai pas ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.
Mme Patricia Schillinger. Je tenais à remercier Mme la ministre pour avoir dit qu’il faut une harmonisation au niveau européen. Elle sait très bien que j’habite une région frontalière où il y a la Suisse et l’Allemagne. Pour faire une meilleure prévention, il faut vraiment que dans différents domaines il y ait une harmonisation. Cela me rassure beaucoup. Aussi, je suivrai Mme la ministre.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 615 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l’article 5 quinquies E est ainsi rédigé, et l’amendement n° 614 rectifié bis ainsi que les amendements nos 1156 rectifié bis et 1159 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces deux derniers amendements.
L'amendement n° 1156 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, M. Cornu, Mmes Deromedi et Morhet-Richaud et MM. Lefèvre et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. – Les offres par abonnement de mise à disposition au public d'un appareil de bronzage sont interdites, de même que les publicités pour ce type d’offres.
L'amendement n° 1159 rectifié bis, présenté par Mme Deseyne, M. Cornu, Mmes Deromedi et Morhet-Richaud et MM. Lefèvre et Cambon, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 2° Les conditions de mise à la disposition du public d’un appareil de bronzage, notamment le régime de déclaration des appareils ou des établissements qui les mettent à disposition ;
Mes chers collègues, nous avons examiné 87 amendements au cours de la journée ; il en reste 929.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
13
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 16 septembre 2015 :
À quatorze heures trente :
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation de notre système de santé (n° 406, 2014-2015) ;
Rapport de M. Alain Milon, Mmes Catherine Deroche et Élisabeth Doineau, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 653, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 654, 2014-2015) ;
Avis de M. Jean-François Longeot, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 627, 2014-2015) ;
Avis de M. André Reichardt, fait au nom de la commission des lois (n° 628, 2014-2015).
À vingt et une heures trente et la nuit :
Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur l’accueil des réfugiés en France et en Europe, en application de l’article 50-1 de la Constitution.
Suite de l’ordre du jour de l’après-midi.
En outre, de quatorze heures trente à quinze heures :
Scrutin pour l’élection d’un membre titulaire représentant la France à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en remplacement de M. Jean-Marie Bockel.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le mercredi 16 septembre 2015, à une heure trente.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART