M. Vincent Delahaye. Cet amendement reprend les termes d’un amendement que j’avais présenté dans le cadre du projet de loi de finances, concernant la taxation des plus-values immobilières, qui est aujourd'hui très compliquée, avec une taxation de base, un abattement progressif pour une durée de détention jusqu’à vingt-deux ans, un prélèvement social avec un abattement social pour une durée de détention jusqu’à trente ans, des surtaxes et des dégrèvements.
L’idée est de simplifier ce système et d’élargir la base en conservant un produit identique. On m’avait répondu à l’époque que Bercy n’avait pas pu chiffrer mes propositions, à savoir un taux de 7 % pour la taxe et de 10 % pour les prélèvements sociaux. Le Gouvernement s’était engagé à me donner des éléments chiffrés avant l’examen du projet de loi de finances rectificative.
Ces éléments, qui nous sont parvenus assez récemment, ne me convainquent pas. Je souhaite donc que notre travail avec Bercy se poursuive, afin de disposer d’estimations un peu plus précises concernant l’impact des mesures proposées, sachant que, d’après les auteurs de la note qui nous a été transmise, un taux strict de 9,5 % pour la taxation des plus-values et le maintien du taux actuel, à savoir 15,5 %, pour le prélèvement social permettraient de conserver le même produit. Pour ma part, j’estime que ce produit sera bien supérieur, dans la mesure où la base est élargie.
Cela étant, j’ai modifié mon amendement pour tenir compte de la note transmise par le Gouvernement. Le produit sera identique, mais avec une simplification du système, des impôts plus lisibles et, enfin, une base plus large. Tel est l’amendement que je soumets aujourd’hui au vote du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue soulève là un réel problème ; ainsi qu’il l’a rappelé, il avait d’ailleurs défendu un amendement identique lors de l’examen du projet de loi de finances et nous l’avions alors invité à le déposer une nouvelle fois dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. D’après les simulations qui ont été faites, il semblerait qu’il soit neutre sur les plans fiscal et social et que la recette soit à peu près équivalente.
La commission voit la proposition de notre collègue d’un œil plutôt favorable. Force est de reconnaître en effet que le régime actuel est extrêmement complexe.
Deux régimes d’abattement coexistent selon la durée de détention : ainsi, les plus-values de cessions de propriétés bâties sont désormais totalement exonérées au titre de l’impôt sur le revenu au bout de vingt-deux ans de détention ; en revanche, les abattements applicables au titre des prélèvements sociaux demeurent calés sur une durée de détention des biens de trente ans.
Allez comprendre les raisons de cette différenciation… Il serait tout de même plus compréhensible que les durées d’amortissement soient identiques.
En outre, l’une et l’autre ne sont pas linéaires. Ainsi, l’abattement au titre de l’impôt sur le revenu s’élève à 6 % à compter de la sixième année de détention et à 4 % pour la vingt-deuxième année, cependant que les abattements applicables au titre des prélèvements sociaux, calés sur une durée de détention des biens de trente ans, connaissent des taux différenciés selon la durée de détention – jusqu’à 9 % par année de détention à compter de la vingt-troisième année !
De surcroît, ce régime a été rendu encore plus complexe par les multiples réformes dont il a fait l’objet. Cette année ne fait pas exception, puisque le Gouvernement a défendu des amendements visant à créer des abattements exceptionnels ou des exonérations sur les terrains à bâtir.
Ainsi, le régime des plus-values de cessions immobilières est modifié en permanence, soit par la création de surtaxes – par exemple, sur les plus-values de cessions dites « élevées », au-delà de 50 000 euros –, soit par la création d’abattements ou d’exonérations visant à encourager la construction.
Pourquoi ces incessants mouvements de va-et-vient ? Parce que l’on considère que la durée de détention est un frein à la cession immobilière. C’est pourquoi je suis assez en phase avec notre collègue Vincent Delahaye : un système à la fois complexe et qui incite les propriétaires à conserver leur bien nuit à la fluidité du marché et ne favorise pas les rentrées fiscales.
En pratique, les propriétaires sont incités non pas à vendre leur bien, mais à le conserver pour espérer être exonérés à terme de l’impôt sur les plus-values de cessions immobilières. C’est pourquoi ce système mériterait d’être profondément remanié.
La proposition formulée par notre collègue de ne plus tenir compte de la durée de détention des biens et de fiscaliser les plus-values de cession à un taux plus bas, mais sur une base élargie, va dans le sens d’une plus grande fluidité du marché, me semble-t-il. Si l’on supprimait, d’une part, la condition de durée de détention et, d’autre part, les abattements ou surtaxes actuellement en vigueur, les propriétaires n’hésiteraient plus à vendre leur bien, ce qui serait sans doute source de recettes supplémentaires pour l’État.
Il n’en demeure pas moins que je me demande s’il serait bien opportun de voter, dans le cadre de ce collectif budgétaire, une mesure immédiatement applicable. On se plaint très souvent de l’instabilité fiscale au nom de la nécessaire information des contribuables s’agissant des modifications des règles en la matière. Des ventes sont en cours, des propriétaires envisagent de vendre leur bien : mettre en place un système totalement neuf pour 2016 pourrait se révéler très brutal.
Quoi qu’il en soit, nous devrons travailler collectivement sur ce sujet dans le cadre de la commission des finances. Nous souhaitons, unanimement, me semble-t-il, réviser la fiscalité de l’immobilier, qui est devenue au fil du temps inefficace, illisible et instable. Et les résultats sont connus : le marché est complètement atone, le nombre de permis de construire délivrés n’a jamais été aussi faible et l’on compte toujours autant de nos concitoyens qui ont du mal à se loger. Le système a donc atteint ses limites.
Comme Vincent Delahaye, je pense qu’il faut réformer la fiscalité immobilière, y compris le régime d’imposition des plus-values de cession. La proposition de notre collègue va dans le bon sens ; elle nécessite simplement d’être expertisée plus en avant.
C’est pourquoi je demande à Vincent Delahaye de retirer son amendement – une demande très bienveillante –, non pas que je veuille évacuer le sujet, mais, au contraire, pour permettre à la commission d’y travailler collectivement et d’aboutir à un système opérationnel dans le cadre du prochain projet de loi de finances.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le rapporteur général a établi un diagnostic de l’état du marché immobilier. Notre objectif prioritaire, c’est la relance, donc la stabilité. Vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est avant tout ce que demandent nos concitoyens en général, mais aussi et surtout les agents immobiliers, les notaires ou les constructeurs.
Or, sur la forme, la fiscalité des cessions immobilières a été entamée l’année dernière et l’article 4 du projet de loi de finances pour 2015 procède déjà à un alignement du régime des plus-values de cessions de terrains à bâtir sur celui qui est applicable aux cessions d’immeubles bâtis, régime qui avait été modifié l’année dernière. Aussi, il convient de ne pas rebattre les cartes et revenir sur l’équilibre auquel nous allons parvenir afin de relancer la demande.
Sur le fond, pour atteindre cet objectif, la durée de détention nécessaire pour une exonération totale des plus-values de cession d’un bien cédé a été abaissée et un abattement exceptionnel de 25 % a été mis en place pour inciter la remise de biens sur le marché immobilier.
Cette démarche d’allégement de la fiscalité sur les plus-values de cessions immobilières se poursuit cette année de manière cohérente pour aboutir à un système équilibré.
Vous proposez de supprimer l’abattement pour durée de détention et l’abattement exceptionnel de 25 % pour les opérations de démolition-reconstruction. L’abrogation de ces mesures incitatives ne contribuerait pas à la relance du marché foncier et du marché immobilier.
Aussi, monsieur le sénateur, vous comprendrez que le Gouvernement émette un avis défavorable sur votre amendement, qui tend à revenir sur une réforme d’ensemble de l’imposition des plus-values de cessions immobilières dont les effets bénéfiques sont tant attendus, pour ce qui est de l’offre comme de la demande.
M. le président. Monsieur Delahaye, l'amendement n° 135 est-il maintenu ?
M. Vincent Delahaye. Madame la secrétaire d’État, vos arguments ne me convainquent absolument pas. Vous parlez de stabilité, mais les règles sont modifiées chaque année : une fois, on crée une taxe, une autre fois, on instaure un prélèvement social, une autre fois encore une surtaxe ou un abattement exceptionnel de 25 %...
Le système de taxation des plus-values de cessions immobilières concentre tous les défauts de la fiscalité française : il est à la fois très compliqué, quasi illisible, avec des taux faciaux très élevés qui atteignent 34,5 %, ce qui fait de nous les champions d’Europe en la matière – j’ai étudié ce qui se passait au-delà de nos frontières. Certes, il existe chez nous des abattements que l’on ne retrouve pas chez nos voisins.
Toujours est-il que ce système est devenu non seulement aberrant, mais de surcroît antiéconomique, puisqu’il incite les propriétaires à conserver leur bien très longtemps.
Je suis favorable à un impôt plus simple, plus lisible, plus intéressant sur le plan économique. C’est la logique à laquelle obéit mon amendement et je ne comprends pas que le Gouvernement ne me suive pas dans cette voie, alors même que le rendement fiscal et social de la mesure que je propose est identique à celui du régime en vigueur. Je vous le dis à vous, madame la secrétaire d’État, comme je l’avais dit à votre collègue du budget.
D’après les simulations qui nous ont été transmises par Bercy, j’ai noté que le nombre des transactions n’avait cessé de diminuer depuis trois ans. Va-t-on réagir à un moment donné ? On vante le statu quo, alors que les taux et le montant des abattements ont été modifiés dans tous les sens ! Je veux bien du statu quo, mais cela doit valoir pour tout !
Il faut un impôt lisible, avec une base large et un taux faible. Le taux que je propose dans cet amendement me semble d’ailleurs encore trop élevé et, à cet égard, je suis en désaccord avec les simulations faites par Bercy, qui, à mon avis, sont erronées, même si je donne acte au Gouvernement qu’il me les a transmises.
Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015, le secrétaire d’État au budget et le rapporteur général m’avaient assuré que l’on reviendrait sur le fond de cette question en projet de loi de finances rectificative, une fois les simulations réalisées. Nous y sommes ! Ayant à cœur de faire un travail sérieux, je veux bien que nous nous donnions un petit peu plus de temps encore, car je ne suis pas certain des chiffres qui m’ont été fournis. Mais, sur le fond, mettons-nous d’accord pour mener cette réforme de l’imposition des plus-values de cessions immobilières à son terme, à la fois pour des raisons économiques et pour des raisons fiscales.
Pour répondre à votre question, monsieur le président, je vais retirer cet amendement, à condition toutefois que et la commission et le Gouvernement s’engagent formellement à travailler dans le sens que je propose.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. L’engagement avait déjà été pris lors de l’examen du projet de loi de finances et je le renouvelle aujourd’hui, mon cher collègue.
Je souscris totalement à ce que vous avez dit : notre système est illisible.
Madame la secrétaire d’État, vous parlez de stabilité, mais nous venons d’avoir une nouvelle preuve de l’échec en la matière. Pourquoi est-on en permanence obligé de créer de nouveaux abattements ? Parce que le système ne fonctionne plus, parce que le marché est bloqué. Si l’on examine les chiffres relatifs aux droits de mutation à titre onéreux, on constate qu’il n’y a jamais eu aussi peu de transactions immobilières. La fiscalité notamment des plus-values de cessions immobilières suscite des blocages.
À partir du moment où le système d’imposition repose sur la durée de détention, les vendeurs ont tout intérêt à conserver leur bien pour échapper à toute taxation. C’est pourquoi il faut s’inspirer de ce que pratiquent d’autres pays, qui tiennent compte non pas de la durée de détention du bien, mais de l’inflation. Cela leur permet d’avoir des taux plus bas et des bases plus larges. Et, surtout, ils s’épargnent ces phénomènes de blocage.
La commission et plusieurs de nos collègues ont manifesté un grand intérêt pour cette question. Je serais très heureux que nous puissions proposer un système parfaitement opérationnel. Nous rendrions alors un éminent service aux vendeurs et aux acquéreurs tout en permettant de débloquer le marché immobilier français.
M. le président. Qu’en est-il de l’amendement, monsieur Delahaye ?
M. Vincent Delahaye. J’attends la réponse de Mme la secrétaire d’État, monsieur le président !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne peut pas s’opposer à ce que le Parlement mène ses travaux comme il l’entend… Mesdames, messieurs les sénateurs, vous êtes libres de choisir vos thèmes de travail !
Le Gouvernement ne veut pas perturber le régime de taxation des plus-values de cessions immobilières qu’il essaie à l’heure actuelle de stabiliser.
Cette réforme a une logique : initiée l’année dernière, elle a été complétée cette année. Si, par la suite, elle peut être améliorée sans que soient complètement remises en cause les règles posées, il va de soi que le Gouvernement entendra les propositions, en l’occurrence du Sénat, en particulier si elles vont dans le sens d’une plus grande simplification, parce que je partage votre souci de lisibilité de la fiscalité applicable aux plus-values de cessions immobilières.
Ce débat ne peut pas être clos à l’occasion de l’examen d’un projet de loi de finances rectificative.
M. le président. Monsieur Delahaye, l'amendement n° 135 est-il finalement maintenu ?
M. Vincent Delahaye. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 135 est retiré.
L'amendement n° 183, présenté par M. Marseille, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1615-13 du code général des collectivités territoriales, les mots : « un seuil fixé par décret », sont remplacés par les mots : « 15 millions d’euros hors taxes ».
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. Le bail emphytéotique administratif est un moyen simple et efficace d’organiser des travaux de rénovation énergétique sur du patrimoine public.
Par ce moyen, des régions proposent à leurs collectivités, pour la réalisation de travaux d’efficacité énergétique, un montage en tiers financement dans lequel une société publique locale réalise les travaux, les finance, puis perçoit en contrepartie une rémunération. Dans un tel bail, la rémunération distingue les coûts d’investissement, de fonctionnement et de financement.
Cette rémunération est généralement soumise à TVA, en partie compensée par le bénéfice d’attributions du Fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA.
Ces attributions sont essentielles pour de tels projets en tiers financement, seul moyen de les concrétiser en période de raréfaction de la ressource budgétaire.
Aujourd’hui, seuls les baux emphytéotiques administratifs dont le montant, y compris les frais de financement et de fonctionnement sur la durée totale du bail, est inférieur à 10 millions d’euros sont éligibles.
Or ce seuil, inchangé depuis 2009, se révèle actuellement insuffisant pour des projets modestes, par exemple un lycée, dès lors que l’on envisage un programme ambitieux de performance énergétique ou la production d’énergie à partir de ressources renouvelables.
Un relèvement de ce seuil à 15 millions d’euros permettrait la réalisation de travaux de rénovation énergétique en tiers financement, y compris sur des bâtiments publics.
Il s'agit non pas d'étendre le périmètre opérationnel de couverture par le FCTVA à des opérations qui lui seraient aujourd'hui totalement étrangères, mais seulement d'augmenter le montant maximal éligible à ce fonds pour des opérations déjà incluses dans le champ du FCTVA. En effet, les baux emphytéotiques administratifs, dans la limite de 10 millions d'euros, sont aujourd'hui déjà éligibles au FCTVA.
Dès lors, l'amendement proposé ne consiste qu’à faire passer ce seuil de 10 millions à 15 millions d'euros, de sorte que le surcoût pour le FCTVA induit par ce relèvement de ce seuil équivaudrait à 16 % de la différence entre le seuil proposé de 15 millions d’euros et celui, en vigueur, de 10 millions, soit en l'espèce 800 000 euros.
Aujourd'hui, le coût potentiel induit par des projets susceptibles de bénéficier de cette mesure est estimé à un peu plus de 2,2 millions d'euros pour 2015. Pour l'instant, il demeure sans impact sur l'année 2016.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Un amendement identique a été examiné la semaine dernière par le Sénat, qui l’avait rejeté dans la mesure où il coûtait plusieurs dizaines de millions d’euros. La commission n’a pas trouvé d’arguments nouveaux de nature à la convaincre d’émettre un avis favorable.
Donc, pour des raisons de coûts et de cohérence avec le vote émis lors de la discussion du projet de loi de finances, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Je partage l’avis de M. le rapporteur général. Cet amendement aurait un impact très net sur le budget de l’État. Bien que cet impact soit difficile à évaluer, il est toutefois certain que l’amendement dégrade la trajectoire budgétaire.
J’ajouterai que le Gouvernement a montré son engagement en faveur de l’investissement local, en décidant d’accroître le taux de rendement de ce même FCTVA destiné aux dépenses d’investissement des collectivités locales. Le sujet est, en ce moment même, en cours de discussion à l’Assemblée nationale dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances.
Comme vous le savez, les demandes pour dépenses d’investissement déposées au titre de ce fonds sont directement remboursées. L’augmentation du montant remboursable pour ce type de baux, qui passerait, si l’on suivait M. Marseille, de 10 millions d’euros à 15 millions d’euros, n’est ni prévue ni supportable par l’État.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. J’appuie totalement, au nom du groupe écologiste, cet amendement de notre collègue Hervé Marseille, d’autant plus que nous avions nous-mêmes formulé une proposition identique la semaine dernière.
Il nous avait été répondu alors que cela coûterait cher, mais que l’on ne savait pas combien. Je parie, quant à moi, que cela ne coûte pas si cher, et je me demande ce qu’ont fait les services de Bercy durant une semaine. Nous ne pouvons pas nous en tenir à l’estimation, à la louche, de notre rapporteur général, qui n’a pas plus que nous les moyens de mesurer l’impact de cet amendement !
J’aimerais donc savoir ce que Bercy a fait pendant la semaine et obtenir le résultat de ses calculs. Je n’ai pas pour habitude de tenter ma chance au tirage et au grattage – ni, donc, de systématiquement présenter des amendements déjà déposés sur d’autres textes – mais, en l’occurrence, cela donnait le temps aux services de Bercy de nous fournir le chiffrage précis de l’impact réel du dispositif.
Je puis vous assurer que nombre de projets de sociétés publiques locales sont aujourd’hui bloqués parce que, comme le rappelait Hervé Marseille, les travaux s’élèvent à 10,8 millions d’euros et ne sont donc pas éligibles. En somme, les projets n’aboutissent pas justement parce qu’ils sont ambitieux. Or il s’agit, je vous le rappelle, d’assurer la transition énergétique en construisant des immeubles conformes aux nouvelles normes dont nous voulons nous doter.
Cela ne concerne pas des projets très nombreux - on peut citer quelques cas en région Rhône-Alpes, ainsi qu’en région parisienne -, mais ils sont très importants pour les SPL concernées.
On ne peut donc pas nous répondre ainsi, au jugé, que cela coûtera quelques dizaines de millions d’euros. Je veux savoir ce qu’en dit Bercy, ce qu’en disent les services. Quelle évaluation ont-ils de l’impact d’un tel amendement ? Nous pourrons ensuite discuter de savoir si l’on met le plafond à 15, 12 ou 13 millions d’euros, mais, en tant que parlementaires, à un moment donné, nous aurions besoin d’être, nous aussi, informés.
Les services du ministère ne travaillent pas que pour le ministère ; ils travaillent pour la collectivité et, aussi, pour les représentants de la Nation. Nous avons de plus en plus souvent l’impression que ce n’est pas le cas et nous n’avons nous-mêmes ni le temps ni les moyens de procéder à une contre-enquête.
Donc, que font les si puissants et si bien renseignés services de Bercy ? Que vont-ils nous dire ?
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour explication de vote.
M. Hervé Marseille. Comme mon ami Gattolin – j’allais dire « mon camarade », mais c’est à force de le fréquenter ! –, je ne partage pas les conclusions de Mme la secrétaire d’État sur le coût que représenterait cet amendement. On nous dit que cela va coûter cher, sans préciser. C’est Fernand Raynaud et le fût du canon : un certain temps, un certain coût ! (Sourires.)
Je l’ai dit dans ma présentation, passer de 10 millions d’euros à 15 millions d’euros, cela représente 16 % de différence. Aujourd’hui, le coût potentiel induit par les projets qui peuvent bénéficier de cette mesure est de 2 millions d’euros – 2,2 millions d’euros précisément pour 2015, et rien pour 2016. Donc, ce ne sont pas « des » millions, mais seulement deux millions ! C’est la Fédération des entreprises publiques locales qui a calculé ce coût, car le dispositif a bien évidemment été travaillé avec elle.
Certes, c’est un surcoût, mais, dès lors que l’on parle d’effort énergétique et de travaux innovants, cela a forcément un coût. Veut-on ou non assumer ce coût, qui est, au demeurant, très limité ? Je laisse la réponse à l’appréciation du Sénat.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 193 rectifié est présenté par MM. Mézard, Collin et Requier, Mme Laborde, MM. Fortassin et Bertrand et Mme Malherbe.
L’amendement n° 238 rectifié bis est présenté par Mme Lienemann et les membres du groupe socialiste et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le premier alinéa de l’article L. 31-10-2 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi :
« Dans des conditions fixées par décret, pour l’acquisition d’un logement faisant l’objet d’un contrat régi par les dispositions de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière, signé à compter du 1er janvier 2015, les dispositions du présent chapitre peuvent être appréciées selon leur rédaction en vigueur à la date de signature de ce contrat sur accord commun de l’emprunteur de l'établissement prêteur lors de l'offre de prêt. »
II - Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yvon Collin, pour défendre l’amendement n° 193 rectifié.
M. Yvon Collin. Cet amendement, identique à celui qui est porté par Marie-Noëlle Lienemann, concerne le soutien à l’accession sociale à la propriété.
Le 25 septembre dernier, était signé l’accord triennal « Agenda HLM 2015 – 2018 » lors de la clôture du 75e congrès de l’Union sociale pour l’habitat, l’USH. Le Gouvernement et le mouvement HLM s’y engageaient notamment à mobiliser leurs moyens respectifs pour développer l’accession sociale et sécuriser les projets des accédants.
À ce titre, les parties ont souhaité développer l’ancrage du prêt à taux zéro à l’entrée dans les lieux pour la levée de l’option d’achat. Cet ancrage permet en effet à un locataire-accédant, dans le cadre d’un prêt social location-accession, ou PLSA, de pouvoir compter sur le bénéfice d’un prêt à taux zéro, et ce à la date de signature de son contrat.
Ce faisant, le locataire-accédant sera sûr de pouvoir compter sur le prêt à taux zéro, et ce quelle que soit la date de levée de l’option d’achat. Les contours de ce prêt à taux zéro seront, eux, définis au moment de la levée de l’option.
Ce prêt social location-accession, qui permet l’accession sociale à la propriété, bénéficie d’avantages fiscaux – la TVA à taux réduit et l’exonération de la taxe foncière –, et peut se cumuler sous certaines conditions avec un prêt à taux zéro. Notre objectif, madame la secrétaire d’État, est d’éviter que le locataire signant un contrat de location-accession ne soit dans le doute quant à son éligibilité au prêt à taux zéro le jour où il décide de lever l’option et d’acquérir son logement.
Nous le savons, l’accession à la propriété est rendue plus difficile ces dernières années. C’est particulièrement vrai en zone tendue. Dans le cas de ménages aux ressources modestes et sans apport personnel, l’accession à la propriété relève de la gageure, pour ne pas dire de l’exploit. La modification, minime, que nous proposons à travers notre amendement vient donner un « coup de pouce » à ces ménages, en complément des dispositifs existants.
Tel est, mes chers collègues, le sens de cet amendement que je vous invite à adopter.