Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette réponse et de celle que vous m'avez déjà apportée par écrit. Ce sujet nous préoccupe tous deux.
Vous parlez de mesures qui seront prises dans quelques semaines. Je crois que la profession a pris bonne note des annonces qui ont été faites, mais elle s'impatiente, car elle craint que, si l’on n’avance pas assez vite, certaines entreprises ne finissent par connaître des situations dramatiques.
Il y a urgence, des mesures doivent être prises sans attendre, surtout pour ce qui concerne la procédure administrative de l’export.
Je vous citerai quelques pistes, que vous connaissez mieux que moi, monsieur le ministre : imposer une déclaration préalable de tout produit destiné à l’export, faire passer obligatoirement les grumes par une « plateforme de traitement » – cela avait été évoqué par votre collègue au Gouvernement –, rendre obligatoires et systématiques les contrôles de tous les conteneurs et, surtout, porter le coût de délivrance des certificats phytosanitaires à un niveau réellement dissuasif. Seules des mesures comme celles-là permettront de faire en sorte que les grumes restent en Lorraine et que nos scieries puissent être alimentées.
recherche sur les maladies du bois de la vigne
Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rainaud, auteur de la question n° 735, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
M. Marcel Rainaud. Monsieur le ministre, jusqu’en 2001, l’arsénite de sodium, appelé communément pyralium, était le seul fongicide capable d’enrayer les maladies du bois de la vigne : l’eutypiose, l’esca et le BDA, ou black dead arm. Ce produit phytosanitaire cancérigène pour les vignerons et toxique pour l’environnement a été heureusement interdit ; depuis lors, aucun traitement curatif n’a été capable de lutter contre ces champignons.
En effet, si le mildiou peut faire des ravages, le traitement à la bouillie bordelaise, par exemple, est permis ; efficace, il préserve la récolte. Toutefois, l’eutypiose, l’esca et le BDA demeurent, et ils déciment les parcelles. Le taux de ceps contaminés ne cesse de progresser et, à partir de 20 %, c'est toute la parcelle qu’il faut arracher.
Ces champignons constituent, avec la flavescence dorée, les dangers phytosanitaires les plus préoccupants pour le vignoble. Des facteurs environnementaux étant très propices aux vecteurs, l’absence de moyens de lutte directs fait de ces champignons le rocher de Sisyphe des viticulteurs.
Aussi, désemparés, les viticulteurs n’ont pour eux que des mesures prophylactiques. Dans mon département, l’atelier bois et plants de vigne de la chambre d’agriculture de Palaja, – vous l’aviez visité et inauguré, monsieur le ministre, en 2012 – a mené des recherches fructueuses sur le traitement à l’eau chaude, portée à cinquante degrés, qui est le seul moyen préventif et biologique pour traiter les plants touchés par la flavescence dorée.
Concernant l’esca, les viticulteurs agissent également en limitant les plaies de taille, en arrachant et en brûlant les souches malades, ainsi qu’en désinfectant leurs outils.
Je cite les spécialistes : « L’esca, c’est le phylloxéra du XXIe siècle. Si on laisse faire, dans vingt ans, il n’y a plus de parcelles plantées en vigne ».
En conséquence, l’urgence est aujourd’hui de trouver des solutions durables pour maîtriser les maladies du bois de la vigne qui affectent lourdement le secteur viticole. Les viticulteurs français ont besoin d’avancées de la recherche, pour que celle-ci puisse proposer des outils fiables, rapides, non dangereux pour l’homme et l’environnement, économiques, rentables et simples d’utilisation.
La mise en commun des connaissances des chercheurs européens est par conséquent nécessaire.
Aussi, je souhaiterais, monsieur le ministre, avoir un état des lieux des projets de recherche en cours et vous demander si nous ne pourrions pas lancer, au niveau français et européen, avec l’INRA et l’Institut français de la vigne et du vin, un grand projet de recherche publique fondamentale.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je m’intéresse à ce sujet depuis que j’ai pris mes fonctions de ministre de l’agriculture ; vous l’avez rappelé, l'arsénite de sodium, qui était l’un des produits utilisés pour lutter contre ces maladies du bois, a été interdit, à juste titre, car il était cancérigène et causait des problèmes environnementaux.
À partir de là se présente une difficulté majeure : trouver des solutions de rechange. Notez que cette démarche vaut aussi bien dans le domaine de la vigne et de la maladie du bois que dans d’autres domaines, compte tenu des questions posées par les produits phytosanitaires et leurs solutions de substitution potentielles, en particulier celles qui sont liées à ce que l’on appelle aujourd'hui le biocontrôle, que je cherche à développer.
Vous l'avez très bien dit : il est nécessaire de chercher ces solutions de rechange. Le ministre que je suis, les sénateurs que vous êtes, vos collègues qui sont ici, tous, nous aimerions que l’on aille beaucoup plus vite et que l’on trouve des solutions… Néanmoins, il reste clair que, depuis mon arrivée, nous avons lancé ces recherches, ces appels à des partenariats publics et privés, à l’échelle européenne.
Le soutien à la recherche à travers le compte d'affectation spéciale « Développement agricole et rural » a été prolongé, notamment via un nouvel appel à projets doté d’un million d’euros. Cet appel a ainsi permis de retenir trois projets en 2013.
Le premier consiste à étudier l’agressivité des champignons impliqués dans les maladies du bois de la vigne et à comprendre le mode d’action de l’arsénite de sodium, afin de proposer de nouveaux moyens de lutte efficace.
Le deuxième projet porte sur les microflores pathogènes et protectrices du bois de la vigne, les réponses adaptatives de la plante et le développement de marqueurs de tolérance et de diagnostic.
Le troisième projet consiste à évaluer l’impact de techniques agricoles et des facteurs environnementaux pour prévoir les maladies du bois de la vigne et lutter contre elles.
Ces trois projets, portés par des partenariats publics-privés associant, pour chacun d’eux, l’Institut français de la vigne, seront conduits jusqu’en 2016.
Au sein de mon cabinet, comme dans mon administration, toutes ces recherches font l’objet d’un suivi. Nous œuvrons au maximum à la découverte de solutions de rechange, car, comme vous l'avez dit, ce sont aujourd'hui 5 % à 10 % du bois et des ceps de vigne qui sont touchés par ces maladies, mettant en cause nos capacités de production et la faculté des exploitants à dégager un revenu.
Nous faisons donc face à une urgence. La recherche des solutions adaptées dépend justement des moyens que nous mobilisons, ainsi que de la dynamique que nous sommes capables de créer. Monsieur le sénateur, sachez que je suis, comme vous, extrêmement attentif à trouver des solutions de rechange.
Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rainaud.
M. Marcel Rainaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je disais que l'esca était le rocher de Sisyphe des viticulteurs. Je vois que vous en avez conscience, et les crédits que vous avez ouverts prouvent votre volontarisme. Souhaitons que ces recherches aboutissent et que le secteur viticole ne soit plus menacé.
inadaptation de la réglementation actuelle relative au loup
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Masson-Maret, auteur de la question n° 700, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Mme Hélène Masson-Maret. Monsieur le ministre, le problème de la cohabitation entre le loup et l’agropastoralisme a fait l’objet, vous avez pu le constater il y a quelques semaines, de nombreux débats au Sénat lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture. Trois amendements, dont les dispositions vont permettre une gestion responsable de la population lupine, ont été adoptés.
J’espère donc que les mesures qui, d’une part, définissent des zones de pâturages préservées de prédateurs et, d'autre part, autorisent l’abattage de loups dans des zones de protection renforcée, indépendamment du prélèvement défini au niveau national, ne seront pas supprimées lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale.
Je compte sur vous, monsieur le ministre, pour que cela ne soit pas le cas, car ces mesures correspondent à une réelle avancée.
Je tiens à rappeler que, aujourd’hui, le loup n’est plus une espèce menacée, car la population lupine est d’environ quatre cents bêtes et augmente de 20 % par an, envahissant des territoires de plus en plus larges.
Dans mon département des Alpes-Maritimes, le plus touché par le nombre d’attaques et de victimes, la prédation a augmenté de plus de 60 % entre 2011 et 2012. Mon département, à lui seul, recense 50 % des attaques avec seulement 6 % de la population ovine nationale, et il a subi près d’un millier d’attaques en 2012, avec près de 2500 bêtes tuées.
L’objet de ma question est le suivant, monsieur le ministre : comment éviter que ces nouvelles dispositions prises dans le cadre d’une loi nationale ne se heurtent, dans leur application, au droit international et européen ?
Je m’explique. La France a adhéré à la convention de Berne, qui date de 1979. En la signant, elle a classé le loup dans la catégorie des espèces strictement protégées. Il est donc nécessaire de reconnaître que nous sommes dans une impasse, monsieur le ministre.
D’un côté, des dispositions adoptées par le Sénat tentent d’apporter – bien que je les considère comme insuffisantes, mais c’est un autre problème – une réponse équilibrée aux attaques de loups.
D’un autre côté, ces dispositions sont confrontées au droit international invoqué par des associations de défense du loup. Les recours de ces dernières devant les tribunaux administratifs se réfèrent à la convention de Berne et conduisent à la suspension des arrêtés préfectoraux, la décision restant finalement à l’appréciation du juge.
C’est ainsi que des arrêtés préfectoraux ont été suspendus par le tribunal administratif, en septembre 2013, dans mon département, après que deux loups avaient été tués en vingt-quatre heures. Le quota national de vingt-quatre loups prévu par le plan loup n’a même pas pu être atteint.
Ma question est donc double, monsieur le ministre : le Gouvernement va-t-il enfin se décider à demander le déclassement du loup dans la convention de Berne, d’« espèce strictement protégée » à « espèce protégée simple », seule solution incontestable et solide à long terme ? Dans l’attente, comment sécuriser juridiquement les arrêtés préfectoraux face aux recours qui invoquent régulièrement ces textes européens ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, vous avez évoqué la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, pendant laquelle nous avons essayé, ensemble, de trouver des solutions face à la détresse des éleveurs dont les troupeaux sont victimes des attaques de loups.
Vous le savez également, nous avons, avec Delphine Batho, négocié un plan loup avec l’ensemble des ONG environnementales et des représentants professionnels pour la production ovine et agricole de manière plus générale.
La capacité de prélèvements a été portée de onze à vingt-quatre loups. Des procédures de tirs plus adaptées, en particulier au niveau local, ont été mises en place, afin de permettre aux chasseurs de tirer et aux éleveurs de se protéger.
Des amendements adoptés par le Sénat lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture visent à renforcer cette dimension : je pense aux dispositions autorisant les éleveurs à des tirs de prélèvements pendant six mois après des attaques, ou encore à celles qui permettent l’abattage des loups dans certaines zones de protection renforcée en fixant des sous-quotas de prélèvements.
Vous avez évoqué, madame la sénatrice, la difficulté devant laquelle nous nous trouvons. La convention de Berne a été signée en 1979, à une époque où le loup était une espèce en voie de disparition. Elle a conduit l’Europe à adopter la directive « habitats », qui considère le loup comme une espèce protégée puisqu’en voie de disparition. Or la population de loups, qui est comprise aujourd'hui entre trois et quatre cents bêtes, continue visiblement à s’accroître.
Comment pouvons-nous mettre en adéquation la législation que nous souhaitons instaurer et le cadre législatif de la convention de Berne et de la directive « habitats » au sein de l’Union européenne ?
Pour faire évoluer la législation, nous devons chercher à renégocier en trouvant des appuis chez nos partenaires concernés. Aujourd’hui, comme je l’ai indiqué lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, nos partenaires italiens et espagnols ne souhaitent pas s’engager dans une renégociation de la directive « habitats ».
Par conséquent, nous avons essayé d’améliorer nos dispositifs législatifs nationaux. Pour qu’ils soient applicables et ne soient pas remis en cause par les tribunaux administratifs, nous devons également essayer de modifier les législations à l’échelle européenne.
Toutefois, pour modifier le droit existant à l’échelle européenne, il faut trouver une majorité ; c’est le temps de la négociation, de la conviction, pour faire en sorte de protéger les élevages.
Vous le savez, sur ces questions, j’ai toujours pris en compte la détresse des éleveurs et œuvré au maximum pour obtenir des réponses. Nous devons continuer à le faire, en particulier afin d’améliorer les prélèvements. Seuls sept loups sur vingt-quatre ont été tués, nous sommes donc loin du compte. Notre politique doit être plus efficace sur ce point, comme je l’ai dit devant le Sénat.
Nous sommes en train d’étudier, avec le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le moyen de rendre encore plus opérationnel le plan loup. Bien que ce plan comporte des avancées, je sais qu’il faudrait aller plus loin, en modifiant le cadre général du droit actuel pour répondre à la détresse des éleveurs. C’est malheureusement un travail de longue haleine, qui ne peut être réalisé en quelques semaines ou en quelques mois.
Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Masson-Maret.
Mme Hélène Masson-Maret. Monsieur le ministre, je connais votre volontarisme concernant ce problème, mais votre réponse n’est pas tout à fait satisfaisante.
Pour vous donner un exemple, le préfet a pris ces jours-ci un arrêté dans mon département : que va-t-il se produire en cas de recours devant le tribunal administratif, puisque, comme je l’ai rappelé dans ma question, c’est le juge qui va décider de la validité de l’arrêté au regard des lois internationales ? Il conviendrait donc de prendre des mesures bien plus draconiennes que celles que vous proposez.
Je vous rappelle qu’un loup a été identifié dans la Meuse voilà quelques jours, à 250 kilomètres de Paris. Alors, à quand un loup dans les bois d’Île-de-France ?
Ce qu’il faut aujourd'hui, monsieur le ministre, c’est du courage politique. La Suisse a demandé la renégociation de la convention de Berne. Le rejet de cette demande ne doit pas nous empêcher de tenter, nous aussi, de chercher des alliés parmi nos partenaires signataires de cette convention.
Je voudrais surtout m’insurger contre toute tentative de dire que la France ne sait pas gérer son problème de loups, car comparer les difficultés créées par le loup en France et dans les autres pays est une erreur fondamentale à mes yeux. En effet, il est indispensable de prendre en compte nos spécificités par rapport à celles de nos voisins et des quarante-sept États cosignataires de la convention. Nous avons une spécificité de climat, de géographie et de faune.
Nous ne pouvons donc pas continuer à nous laisser influencer par les dérives de certains mouvements écologistes, qui prônent sans discernement le retour au sauvage et au naturel. L’écologie, ce n’est pas de l’idéologie !
Enfin, monsieur le ministre, il est indispensable que tous ces questionnements soient pris en compte lors de la prochaine réunion du comité permanent de la convention de Berne. Sans vouloir faire preuve d’emphase, le rôle régalien de l’État, c’est d’assurer la protection des biens et des personnes !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Madame la sénatrice, je trouve assez décevante la manière dont vous avez conclu cet échange.
Je connais vos préoccupations, vous connaissez les miennes. Vous ne pouvez pas dire que rien n’est fait. Si la Suisse a quelque peu évolué sur la question, ce n’est que très récemment. Comme je vous l’ai indiqué, nous avons pris des contacts. Toutefois, je le répète, il n’y a ni en Italie ni en Espagne de volonté de renégocier la directive « habitats », même si nous continuons à y travailler.
Pour ma part, je ne fais pas d’idéologie, madame la sénatrice. C’est d'ailleurs moi qui ai introduit la possibilité pour les chasseurs de tirer sur le loup dans la négociation du plan loup.
suppression de la cour d'appel de nîmes
Mme la présidente. La parole est à M. Simon Sutour, auteur de la question n° 677, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Simon Sutour. Monsieur le ministre, je regrette que l’emploi du temps de Mme Taubira, garde des sceaux, ne lui ait pas permis d’être présente ce matin pour répondre à cette importante question relative à l’avenir de la cour d’appel de Nîmes, mais je suis particulièrement heureux que le porte-parole du Gouvernement me réponde.
Je souhaite attirer l’attention de Mme la garde des sceaux au sujet d’un rapport qui lui a été remis le 16 décembre dernier par M. Didier Marshall, premier président de la cour d’appel de Montpellier, qui préconise, entre autres, une régionalisation des cours d’appel calquée sur les régions administratives – les régions administratives actuelles…
Ce rapport, commandé par la Chancellerie, est censé proposer différentes pistes sur l’avenir des juridictions au XXIe siècle.
L’application stricto sensu des critères de régionalisation tels qu’ils sont proposés, à savoir un rattachement des vingt-huit départements qui dépendent d’une cour d’appel située hors de leur région administrative à celle de leur région, conduira inévitablement à la suppression de plusieurs cours d’appel dont le ressort ne correspond pas à celui d’une région et, par voie de conséquence, à la disparition de la cour d’appel de Nîmes.
La cour d’appel de Nîmes figure pourtant dans le premier tiers des trente-deux cours du territoire : elle est onzième sur trente-deux en termes d’activité et d’efficacité, puisqu’elle ne traite annuellement pas moins de 6 185 affaires nouvelles en matière civile et 2 128 en matière pénale, et ce, dans des délais parmi les plus brefs.
La disparition de la cour d’appel de Nîmes, comme son démembrement, aurait des conséquences dramatiques, et pas seulement pour les professions judiciaires, l’université et les professions juridiques proches comme les notaires, les experts, les huissiers ou les commissaires aux comptes, dont les instances administratives sont calquées sur le ressort de la cour.
Cette disparition aurait aussi, et surtout, des conséquences dramatiques pour les justiciables, qui, compte tenu de l’éloignement, verraient le coût du procès se renchérir, notamment pour les plus démunis bénéficiant de l’aide juridictionnelle avec la désignation d’un avocat distant. Ce serait un très mauvais signal, alors même qu’il nous faut agir pour un rapprochement de la justice et de nos concitoyens.
Il ne faut pas négliger non plus les conséquences en termes économiques, puisque des centaines d’emplois publics, privés et libéraux seraient ainsi délocalisées ou supprimées.
C’est pourquoi, face à l’énorme émotion, bien légitime, suscitée par ce rapport dans le département du Gard et dans le ressort de la cour d’appel de Nîmes, je souhaiterais que vous puissiez nous rassurer, monsieur le ministre, et vous engager sur la pérennisation de cette juridiction.
Je rappelle que j’ai abordé cette question, à la fin du mois de février dernier, lors d’un débat sur l’organisation juridictionnelle, et que Mme Taubira m’a répondu d’une formule un peu vague : « La cour d’appel de Nîmes vivra ». Cette réponse n’a pas satisfait les membres des professions juridiques, ainsi que les populations de mon département et des départements concernés par la cour d’appel de Nîmes, à savoir la Lozère, l’Ardèche, le Vaucluse.
Une grande manifestation s’est ainsi tenue à Nîmes, le mardi 18 mars dernier. Le quotidien Midi Libre a alors titré : « Tous unis pour sauver la cour d’appel de Nîmes ». Je suis fière, madame la présidente, monsieur le ministre, de porter le badge qui était arboré par tous les manifestants ce jour-là (M. Simon Sutour montre un badge accroché au revers de sa veste.), sur lequel il est écrit : « Sauvons la cour d’appel de Nîmes ».
À la suite de cette manifestation, Mme la garde des sceaux m’a adressé un courrier comportant des précisions et qui semblait pérenniser cette juridiction. Toutefois, les professions juridiques, les avocats notamment, craignent que l’on ne maintienne la cour d’appel en la vidant de sa substance à travers ce que l’on appelle la « spécialisation », autrement dit qu’on la maintienne, mais sans chef de cour.
Quand il a reçu une délégation de parlementaires gardois, parmi lesquels figurait le président du conseil général, le directeur adjoint de cabinet de Mme la ministre nous a dit qu’il était tout à fait possible d’avoir une cour d’appel sans chef de cour. Toutefois, sans chef de cour, il n’y a plus de cour d’appel ! C’est ce risque que nous craignons, et c’est la raison pour laquelle j’insiste : je demande au Gouvernement une réponse claire, nette, précise et définitive.
À défaut, le combat continuera, car nous n’admettrons pas la suppression de la cour d’appel de Nîmes.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Cher Simon Sutour, votre question porte sur l’organisation de la justice. Je vous prie de bien vouloir excuser Mme la garde des sceaux, qui ne peut être présente aujourd’hui. Son cabinet et elle-même m’ont fourni des éléments de réponse.
J’ai bien compris les inquiétudes que vous avez exprimées très clairement. Vous l’avez rappelé, le 25 février dernier, à l’occasion d’un débat sur la justice de première instance, Mme Taubira vous avait donné une première réponse : la cour d’appel de Nîmes vivra.
Depuis son arrivée aux responsabilités, contrairement à ce qui s’était passé précédemment, la ministre de la justice a rouvert des juridictions : les tribunaux de grande instance de Tulle, Saint-Gaudens et Saumur seront rétablis en septembre prochain. Elle a également ouvert des chambres détachées là où le besoin s’en faisait sentir. Sa démarche s’inscrit donc dans une dynamique inverse de celle qui était mise en œuvre par le précédent gouvernement, dont nous nous souvenons tous qu’il avait décidé la fermeture de plusieurs juridictions.
C’est dans cette perspective qu’une réflexion sur l’organisation judiciaire de première instance a été engagée. Elle s’est poursuivie dans les juridictions après la tenue d’un débat national, les 10 et 11 janvier dernier, à la maison de l’UNESCO, à Paris.
Le ministère de la justice est dans l’attente de l’analyse de ces contributions. Toutes les juridictions ont répondu. Toutes les professions du droit ont été consultées et ont adressé de nombreuses contributions. Vous le voyez, il s’agit d’une consultation de très grande ampleur, réalisée sur l’ensemble du territoire national.
Mme Taubira donne donc rendez-vous très bientôt à la représentation nationale pour annoncer, comme elle s’y est engagée en janvier dernier, les premières mesures de la réforme judiciaire.
Je peux d’ores et déjà vous confirmer – c’est le message que l’on m’a chargé de vous transmettre – qu’aucun tribunal de grande instance, de même qu’aucune cour d’appel, ne sera supprimé.
La réforme judiciaire permettra à la justice d’être au plus près des besoins de droit, et je sais combien ils sont importants dans votre département.
Je mesure tout l’attachement que vous et vos concitoyens portez à la cour d’appel de Nîmes. En témoigne la création d’une association pour son maintien, dont vous portez aujourd’hui le badge, comme vous l’avez rappelé. Soyez assuré, monsieur le sénateur, de l’attention portée par le Gouvernement à la situation de la région Languedoc-Roussillon et, plus particulièrement, à celle de ce beau département du Gard.
Mme la présidente. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Monsieur le ministre, porte-parole du Gouvernement, je vous remercie de votre réponse.
On ne supprimera pas de cour d’appel, j’en prends acte. Toutefois, ce que nous demandons – c’est sur ce point que nous attendons des engagements, et peut-être le texte annoncé par Mme la garde des sceaux nous donnera-t-il satisfaction –, c’est que l’on ne vide pas les cours d’appel de leur substance par le truchement de la spécialisation. C’est cela que j’évoquais dans ma question.
J’y insiste : c’est sur ce point que nous voulons des éléments de réponse concrets. J’espère que nous les aurons très prochainement. Cela dit, je vous remercie encore, monsieur le ministre, de votre réponse.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures cinq.)
dotation horaire globale du collège de bessan
Mme la présidente. La parole est à M. Robert Tropeano, auteur de la question n° 726, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Robert Tropeano. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur les fortes menaces de baisse de la dotation globale horaire, ou DGH, du collège de Bessan, dans l’Hérault, pour la prochaine rentrée scolaire.
L’ensemble des membres de la communauté éducative, ainsi que les parents d’élèves, m’ont alerté, dès le mois de janvier dernier, sur cette question. À mon tour, j’avais aussitôt alerté le ministère de cette inquiétante situation.
En effet, la baisse envisagée serait de quarante-deux heures, notamment du fait de la suppression d’une classe de sixième. Or comment peut-on raisonnablement accueillir en classe de sixième tous les élèves du CM2 dans de bonnes conditions si le nombre d’élèves par classe excède trente enfants ?
Par ailleurs, je tiens à porter à votre connaissance que, dans ce collège, le nombre d’élèves en retard à l’entrée en sixième est globalement plus élevé que dans le reste du département. Ainsi, sur les cinq dernières années, ce taux était supérieur de 4 % à la moyenne départementale.
Si une telle décision devait être maintenue, cela aurait de très graves répercussions sur le fonctionnement et la qualité de l’enseignement dispensé dans ce collège.
Des heures en demi-groupes seraient supprimées, ce qui serait synonyme de pratiques pédagogiques moins diversifiées, alors que la population accueillie dans cet établissement se caractérise par une précarité avérée. Le taux de représentation des professions et catégories socioprofessionnelles – les PCS – défavorisées de ce collège est en effet supérieur de 7,4 % à celui du département, tandis que le taux de représentation des catégories socioprofessionnelles favorisées y est inférieur de 8,2 %.
Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite que cette décision de baisse de dotation globale horaire soit annulée, afin que tous les élèves accueillis en classe de sixième dès la prochaine rentrée puissent bénéficier des meilleures conditions possible, leur garantissant ainsi de plus grandes chances de réussite scolaire.