Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la situation de la filière bois, en exprimant clairement le dilemme auquel nous sommes confrontés : il faut tenir compte de l’intérêt économique, d’une part, des scieries et des transformateurs et, d’autre part, de ceux qui produisent du bois et trouvent des débouchés rémunérateurs dans le cadre de l’exportation. J’ai parfaitement conscience de cette situation.
Le travail que nous devons réaliser – nous avons eu des débats extrêmement précis sur ces questions, dans cet hémicycle, lors de l’examen du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt – consiste à trouver un nouvel équilibre pour l’ensemble de la filière bois, entre les intérêts des forestiers et ceux des industries de transformation.
Premier constat : depuis 2011, le volume des exportations de bois non transformé n’augmente pas. Tant mieux ! Certaines scieries rencontrent un problème d’approvisionnement conjoncturel, lié à la pluviométrie de cet hiver et à l’absence de gel, car l’état des sols a rendu difficile la récupération du bois coupé.
Restent les enjeux que vous avez évoqués : comment réorganiser la filière de la transformation, comment redonner des moyens aux scieries qui, aujourd’hui, rencontrent effectivement des difficultés économiques et d’approvisionnement ?
Ces sujets stratégiques ont été évoqués non seulement lors de la discussion du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, mais aussi avec Arnaud Montebourg ; j’y reviendrai.
Un premier point concerne les taxes à l’importation de produits transformés ou à l’exportation des produits bruts. Je suis obligé de vous avouer que les décisions dans ce domaine sont prises à l’échelon de l’Union européenne. Nous travaillons donc dans ce cadre pour faire évoluer la situation, mais les décisions ne pourront pas être prises à l’échelle nationale. En ce qui me concerne, je saisirai toutes les occasions qui se présenteront dans ce domaine, car je suis, comme vous, très attaché à la filière bois.
En ce qui concerne le traitement phytosanitaire des grumes destinées à l’exportation, exigé par les pays importateurs, j’envisage une hausse du coût de la délivrance des certificats d’exportation des grumes. En effet, cette mesure est de l’ordre du possible.
Par ailleurs, le traitement des grumes en forêt, préalable à l’exportation, doit être effectivement réalisé, contrôlé et sans impact négatif sur l’environnement et sur la santé des applicateurs ou des usagers de la forêt. Une prochaine saisine de l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, sur l’impact des méthodes et des produits utilisés pour le traitement des grumes en forêt permettra de nous assurer toutes les garanties sur ces points. Cette étude prendra donc en compte les difficultés que vous avez évoquées.
Enfin, la solution pour la filière bois doit être envisagée plus globalement, car il s’agit de trouver un équilibre entre les capacités de production et de transformation du bois. Toute perte dans la transformation se traduit non seulement en termes de valeur ajoutée, mais aussi du point de vue des coproduits liés à cette transformation, en particulier les sciures – avec toutes les conséquences qui en résultent pour la cogénération et la production d’énergie.
Nous devons donc nous mobiliser pour permettre à cette filière de répondre aux enjeux. Nous le faisons, premièrement, avec le Fonds stratégique de la forêt et du bois pour la plantation et le renouvellement de notre forêt et, deuxièmement, grâce aux choix stratégiques effectués dans le cadre du plan national de la forêt et du bois, signé avec Arnaud Montebourg, pour structurer cette filière.
Un comité stratégique de filière a été créé dans le cadre des vingt-quatre filières stratégiques pour le redressement productif. Ce comité a été installé le 10 mars 2014, en présence d’Arnaud Montebourg et de moi-même, et il présentera dès l’été un contrat de filière. Ce contrat doit permettre d’établir une adéquation entre la production de bois et les besoins de l’industrie de transformation digne d’un grand pays forestier comme le nôtre.
Mme la présidente. La parole est à M. Marcel Rainaud.
M. Marcel Rainaud. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je ne peux que me féliciter de votre engagement et des différentes mesures que vous venez d’annoncer en faveur de cette profession. J’aurai à cœur de les lui transmettre.
permis de conduire et mise en œuvre du logiciel faeton
Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 679, adressée à M. le ministre de l’intérieur.
M. André Reichardt. Les permis de conduire font l’objet d’un traitement sécurisé depuis la mise en œuvre du logiciel FAETON, qui fait suite à la transposition de la troisième directive européenne relative au permis de conduire. Cette directive vise à harmoniser les règles de gestion de ce titre au sein de l’Union européenne, notamment dans le souci de renforcer la lutte contre la fraude, avec la délivrance d’un document sécurisé renouvelable.
L’objet du logiciel FAETON est de gérer l’ensemble des dossiers relatifs aux permis de conduire, depuis l’inscription en auto-école jusqu’à la gestion des droits à conduire, c’est-à-dire le suivi des points disponibles, en passant, bien évidemment, par la délivrance des titres.
Or, alors que les flux et le stockage des données sont naturellement dématérialisés entre les différents acteurs concernés, il apparaît que le déploiement de FAETON conduit en fait dans nombre de départements, dont le mien, le Bas-Rhin, à centraliser le processus de délivrance des permis de conduire. Ainsi, le permis de conduire ne peut désormais être retiré dans mon département qu’en préfecture, ce qui oblige les personnes concernées à se rendre à Strasbourg. Pour ceux qui habitent les territoires les plus éloignés du chef-lieu du département, le déplacement aller-retour peut prendre trois heures, auxquelles il faut ajouter les difficultés liées à l’accès à Strasbourg, notamment en raison de l’absence de grand contournement Ouest, sans parler des ralentissements observés aux heures de pointe.
Nos concitoyens considèrent, fort légitimement à mon sens, cette nouvelle obligation comme peu adaptée aux temps actuels – je pense notamment à la dématérialisation des communications – et à leurs attentes de proximité avec l’administration. Dès lors, monsieur le ministre, pouvez-vous me dire s’il est prévu de remédier à ces difficultés et, le cas échéant, m’indiquer les mesures susceptibles d’être prises à cet égard ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre de l’intérieur, au nom duquel je vais répondre.
Vous évoquez l’enjeu de sécurité lié à la délivrance des permis de conduire, qui a conduit à plus de centralisation, au détriment de la qualité du service rendu à nos concitoyens.
Les conditions de délivrance des titres ont fortement évolué ces dernières années. De nouvelles applications informatiques ont été mises en place afin de délivrer des titres sécurisés, qu’il s’agisse des passeports, des certificats d’immatriculation, des titres de séjour pour les étrangers ou des permis de conduire. Elles nécessitent des procédures de délivrance de plus en plus sécurisées et un regroupement de la production.
L’objectif est double : d’abord, spécialiser les équipes afin de renforcer la lutte contre la fraude documentaire et de fiabiliser la fabrication des titres par un opérateur national unique ; ensuite, rendre un service plus efficace et de meilleure qualité à l’usager, notamment par le développement des téléprocédures, tel le changement d’adresse en ligne pour les certificats d’immatriculation.
La mise en place du permis de conduire sécurisé, conformément à la directive 2006/126 du 20 décembre 2006, s’accompagne d’évolutions destinées à améliorer l’information des usagers et à éviter des déplacements. Ainsi, depuis le 4 novembre 2013, le courrier d’accompagnement du titre comprend un code confidentiel permettant à l’usager de consulter son solde de points sur le site « Télépoints ». En effet, chacun n’a pas toujours conscience du nombre de points encore en sa possession, certains ayant parfois même oublié qu’il ne leur en restait peut-être aucun !
De plus, depuis le 3 mars 2014, les usagers ont la possibilité de suivre l’état d’avancement de la production de leur titre en ligne sur le portail de l’Agence nationale des titres sécurisés. Ils peuvent également recevoir, depuis le 18 mars 2014, un SMS ou un courriel leur annonçant que leur permis de conduire est disponible en préfecture.
Enfin, dans le cadre de la centralisation de la délivrance en préfecture, deux nouveaux guichets ont été spécialement ouverts à la préfecture du Bas-Rhin, dont l’un est entièrement dédié au retrait des titres, ce qui limite ainsi le délai d’attente pour les usagers.
Par ailleurs, dernière information importante, près de 60 % des quelque 1 200 000 permis de conduire délivrés depuis le 16 septembre 2013 ont été acheminés directement au domicile des usagers. Cela concerne l’ensemble des titres délivrés après réussite à l’examen, ainsi que les titres délivrés à la suite d’une perte ou d’un vol du précédent.
Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt.
M. André Reichardt. Monsieur le ministre, comme vous l’avez dit au début de votre intervention, il faut trouver le bon équilibre entre les contraintes liées à la lutte contre la fraude, qui passe naturellement par un renforcement des règles de sécurisation des documents, et les nécessités d’une réelle proximité entre les citoyens et l’administration.
À l’heure de l’e-administration, il n’est bien entendu pas concevable que des déplacements de plusieurs heures soient encore nécessaires pour retirer un document. Par ailleurs, vous l’avez bien compris, les personnes dont le domicile est le plus éloigné du lieu de délivrance du document considèrent – à mon sens, à juste titre – être discriminées par rapport à d’autres dont le domicile serait plus proche du chef-lieu du département, voire situé au chef-lieu même. Une réponse adaptée doit donc leur être apportée.
Je vous remercie tout particulièrement de l’information que vous me donnez concernant l’expédition à domicile d’un certain nombre de titres. Elle pose toutefois question. En effet, soit cet envoi est possible, et, dans ce cas-là, il faudra veiller à le généraliser, soit il n’est pas possible, et il faudra alors, à l’heure de l’e-administration, dotée des moyens de communication que nous connaissons, renouer avec la possibilité de retirer un document en sous-préfecture, comme cela se faisait sans difficulté particulière par le passé.
La dégradation du service que j’ai évoquée pose tout de même un problème, et je voudrais vraiment que M. le ministre de l’intérieur en soit conscient. Il faut essayer d’améliorer encore le système même si – j’ai commencé par cela et je termine ainsi – on doit naturellement veiller à la sécurisation de ces processus.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.)
précarité des personnels contractuels en situation de handicap au sein des collectivités territoriales
Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Bourzai, auteur de la question n° 708, adressée à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l’État et de la fonction publique.
Mme Bernadette Bourzai. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique et porte sur la précarité des personnels contractuels des collectivités locales qui sont en situation de handicap.
L’un des objectifs de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique est de remédier aux situations de précarité les plus graves des agents non titulaires de la fonction publique.
Parmi ces agents contractuels, ceux en situation de handicap sont particulièrement exposés à cette précarité. De plus, ils sont confrontés à des situations paradoxales qui les fragilisent. En effet, pour une personne en situation de handicap qui bénéficie de l’AAH, l’allocation aux adultes handicapés, et de l’ASS, l’allocation de solidarité spécifique, l’alternance de périodes travaillées et chômées a pour conséquence d’engendrer, pour les périodes de travail, des « trop-perçus » au regard des droits à l’AAH. Ces sommes doivent ensuite être remboursées à la caisse d’allocations familiales, ce qui implique, au final, des baisses de revenus significatives.
Quand on sait en outre que ces salariés contractuels et intérimaires, qui sont majoritairement embauchés en remplacement pour de courtes périodes dans des postes de catégorie C, ne bénéficient pas des mêmes avantages légaux en termes de contrats de prévoyance et de santé et que leur titularisation, bien qu’elle soit prévue par la loi, ne leur est pas souvent proposée même s’ils remplissent les critères demandés, nous arrivons à des situations extrêmement difficiles et bloquées qui rendent une intervention nécessaire.
Je peux citer l’exemple d’une personne qui enchaîne depuis vingt ans – vingt ans ! – des contrats de remplacement en tant qu’agent d’entretien dans divers lycées du département de la Gironde, avec un salaire qui varie entre 700 et 1 000 euros par mois, environ six mois sur douze. Pendant les vacances ou lorsqu’elle n’a pas de mission, cette personne doit revenir à chaque fois vers Pôle emploi, sans oublier qu’elle est pénalisée par les baisses d’allocations déjà mentionnées. Comment peut-on vivre dignement dans ces conditions ? Alors que son handicap est jugé compatible avec les emplois qu’elle occupe, la titularisation ne lui a pourtant jamais été proposée !
Madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement entend-il adopter afin d’améliorer la situation de ces personnels vulnérables et de la sécuriser ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Madame la sénatrice, vous abordez là une question difficile et l’exemple que vous avez cité me touche.
Les personnes en situation de handicap disposent de deux voies d’accès à la fonction publique territoriale : le recrutement par concours, qui est le mode d’accès de droit commun aux cadres d’emploi territoriaux et auquel tout le monde tient, ainsi que le recrutement contractuel, qui donne vocation à titularisation.
Par dérogation au principe du recrutement par concours, l’article 38 de la loi du 26 janvier 1984 prévoit la possibilité pour les personnes handicapées d’acquérir la qualité de fonctionnaire, après un recrutement direct en qualité d’agent non titulaire. Dans ce cas, le recrutement s’effectue par un contrat au terme duquel l’agent a vocation – et, vous l’avez dit, seulement vocation – à être titularisé dans un emploi de catégorie A, B ou C, dans les conditions prévues par le décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996.
Les candidats doivent remplir des conditions d’aptitude physique. Leur handicap doit ainsi avoir été jugé compatible avec l’emploi postulé. Des conditions de diplôme ou de niveau d’études sont également requises
La durée du contrat correspond à la durée que doivent normalement accomplir les fonctionnaires stagiaires du corps ou cadre d’emplois concerné, soit généralement six mois ou un an, avant d’être titularisés.
Les articles 8 et 9 du décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996 prévoient la procédure selon laquelle est opérée la titularisation des travailleurs handicapés et, le cas échéant, la procédure applicable lors d’un prolongement du contrat ou d’un refus de titularisation. Il en résulte notamment que l’autorité territoriale, laquelle est responsable en l’occurrence, apprécie l’aptitude professionnelle de l’agent au vu de son dossier individuel et après entretien avec celui-ci.
Le refus de titularisation ne peut intervenir que dans le cas où l’agent apparaît inapte à l’exercice de ses fonctions après que l’employeur a pris toutes les mesures visant à favoriser son intégration et après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d’emplois concerné. En cas de refus de titularisation, l’intéressé peut bénéficier des allocations chômage.
Ces dispositions sont de nature à favoriser l’insertion professionnelle des agents handicapés recrutés en qualité de contractuel sur le fondement de l’article 38 de la loi du 26 janvier 1984 et à lutter ainsi contre d’éventuelles situations de précarité.
S’agissant de la situation des personnes handicapées qui alternent des périodes d’activité et de chômage et sont éligibles à l’allocation aux adultes handicapés, dont elles peuvent bénéficier sous certaines conditions, le décret n° 2010-1403 du 12 novembre 2010 modifiant les règles d’évaluation des ressources prises en compte pour le calcul des droits à l’allocation aux adultes handicapés, et sur lequel nous pourrons éventuellement travailler ensemble, a permis d’adapter de manière plus réactive le montant de l’AAH à la situation immédiate de la personne. En effet, ce décret a instauré depuis le 1er janvier 2011 une déclaration trimestrielle de ressources pour les allocataires exerçant une activité professionnelle en milieu ordinaire, afin de pouvoir calculer chaque trimestre le montant de l’allocation en fonction de leurs besoins. Il s’agit donc d’une couverture de solidarité.
Cela étant, les remplacements « en boucle », qui ne concernent d’ailleurs pas que des personnes en situation de handicap, tant dans la fonction publique hospitalière, dans les collectivités territoriales qu’auprès des opérateurs ou agences de l’État, sont problématiques. Je vais donc étudier cette question avec la Direction générale de l’administration et de la fonction publique, car je pense qu’il faut faire mieux. Pour autant, je ne peux pas imposer de règles trop strictes aux autorités territoriales. Loin de moi l’idée de souffler le chaud et le froid. Je considère simplement que nous devons travailler mieux, tout en laissant une marge de liberté aux collectivités territoriales.
La dérogation au principe du recrutement par concours est une bonne chose pour les personnes en situation de handicap. Cependant, force est de constater que des situations semblables à celle que vous avez décrite existent dans plusieurs départements, même si elles ne sont pas très nombreuses sur l’ensemble du territoire français.
J’espère, avec vous, trouver une solution aussi bonne que possible, même si je ne peux déroger aux principes de fond. Je vais donc demander à mes services de travailler sur ce point, et je vous tiendrai informée, madame la sénatrice, des éventuelles pistes que nous aurons retenues.
Mme la présidente. La parole est à Mme Bernadette Bourzai.
Mme Bernadette Bourzai. Je remercie Mme la ministre de sa réponse très argumentée. Je lui fais confiance pour résoudre ce problème que je saurai, le cas échéant, rappeler à son attention.
dotation globale de fonctionnement des communes
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, auteur de la question n° 712, transmise à Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l’État et de la fonction publique.
M. Jean Louis Masson. Madame le ministre, j’avais adressé cette question à votre collègue de l’intérieur. Je constate qu’il vous l’a transmise. Sur le principe, je n’y vois pas d’inconvénient, mais je voudrais tout de même souligner que c’est aujourd’hui la quatrième fois consécutive que je pose une question orale au ministre de l’intérieur. Or, à chaque fois, il s’abstient de venir me répondre ! Cela devient fastidieux...
Voilà quinze jours, alors que je devais lui poser une question orale, il s’est fait représenter par la secrétaire d’État à l’économie numérique. Je reconnais que, aujourd’hui, il y a un progrès...
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l’État et de la fonction publique. Merci !
M. Jean Louis Masson. Votre domaine de compétence, madame le ministre, « chevauche » en effet le sujet. Il n’en demeure pas moins que cela commence à faire beaucoup ! Il serait opportun que le ministre de l’intérieur fasse l’effort, de temps en temps, de venir répondre aux questions orales qui lui sont posées. Je signale d’ailleurs que, si le ministre de l’intérieur répondait aux questions écrites qu’on lui adresse, on ne serait pas obligé de lui poser des questions orales.
Vous me rendriez service, madame le ministre, en informant votre collègue que je n’ai toujours pas obtenu de réponses aux 221 questions écrites que je lui ai envoyées, et dont certaines datent de neuf mois. Je ne vais tout de même pas venir tous les quinze jours poser une question orale dans cet hémicycle parce qu’on ne répond pas à mes questions écrites... Cela commence à bien faire ! Les rapports entre le Parlement, en particulier le Sénat, et le Gouvernement, devraient être plus corrects, courtois et respectueux.
J’en viens à ma question.
Je souhaite rappeler la très grande préoccupation des élus municipaux, et notamment des maires, face aux projets du Gouvernement, lequel envisage de réduire considérablement la dotation globale de fonctionnement, ainsi que les autres subventions de l’État dont bénéficient les communes. La DGF représente, en effet, parfois la moitié des recettes budgétaires de ces dernières.
Par ailleurs, certaines décisions inconsidérées, comme, par exemple, la modification des rythmes scolaires, imposent des réformes très coûteuses pour les communes. Dans le même temps que l’on réduit les crédits alloués à ces collectivités, on leur impose des dépenses supplémentaires !
Je vous demande, madame le ministre, s’il vous semble pertinent que des dépenses supplémentaires soient mises à la charge des communes, sans leur demander leur avis, et que, parallèlement, on réduise leurs ressources. Si vous avez une recette miracle pour équilibrer les comptes dans ces conditions, j’aimerais que vous nous la fassiez connaître.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique. Vous avez souvent évoqué, monsieur le sénateur, vos difficultés à obtenir des réponses à vos questions. Avec tout le respect que je dois au sénateur que vous êtes, je me permets cependant de vous faire remarquer que 221 questions, c’est peut-être beaucoup. Je ferai cependant part à mon collègue de votre demande.
En l’occurrence, j’aurais été choquée que le ministre de l’intérieur réponde à ma place à la présente question orale, dans la mesure où je suis en charge au sein de ce gouvernement non seulement de la fonction publique et de la réforme de l’État, mais aussi de la décentralisation et de la réforme des finances des collectivités territoriales. À ce titre, j’ai proposé une réforme de la DGF. Tous les arbitrages n’ayant pas été rendus sur ces sujets, je trouve normal que le ministre de l’intérieur préfère que je réponde aux questions y afférentes, qui relèvent de ma compétence.
Vous évoquez le problème que pose l’effort de 11 milliards d’euros demandé aux collectivités.
Chacun convient qu’il faut redresser les finances publiques et qu’il s’agit d’un défi collectif primordial pour l’avenir de notre pays. C’est d’ailleurs l’objet du pacte que le Premier ministre va présenter, dans les prochaines heures, aux deux assemblées.
Je tiens à souligner, de ce point de vue, que l’effort demandé aux collectivités territoriales est juste parce qu’il est proportionnel à leurs dépenses, lesquelles représentent aujourd’hui 20 % de la dépense publique nationale. Il est légitime que la part de l’effort national qui leur est demandé soit équivalente à 11 milliards d’euros sur les 50 milliards d’euros à économiser. À moins que l’on estime qu’il n’est pas nécessaire de faire cet effort, mais c’est un autre débat...
Avec la baisse de 1,5 milliard d’euros de 2013 et de 11 milliards d’euros sur le triennal 2015-2017, l’effort demandé correspond à la hausse constatée des dépenses des administrations publiques locales, les APUL, entre 2010 et 2012, soit environ 12,5 milliards d’euros. Il s’agit donc bien de stabiliser et de maîtriser la dépense publique.
D’autres que vous, monsieur le sénateur, me font le reproche que ces 11 milliards d’euros constituent, dans le triennal, une rectification de la trajectoire, et non pas une baisse des dépenses. Vous voyez que l’on pourrait en débattre longtemps...
Cet effort trouvera à se réaliser dans la réforme de la DGF que vous évoquez, mais pas seulement : c’est l’ensemble des concours financiers de l’État qui doit pouvoir, comme l’a souhaité le Premier ministre, être réinterrogé en concertation avec les élus – je pense aux associations et au Parlement. Ce travail se fera donc en commun au sein d’un bloc tripartite constitué des pouvoirs exécutif et législatif ainsi que des associations d’élus.
L’effort trouvera aussi à se réaliser dans la mise en place d’outils de clarification de l’organisation territoriale et de renforcement de l’efficacité de l’action publique. Nous avons pu, sur la base d’une première loi, présenter une trajectoire de rationalisation, par exemple au travers des conférences territoriales. Par ailleurs, au sein du Conseil des ministres, le Premier ministre a entamé avec nous une discussion sur l’organisation territoriale de la République, sujet qui englobe la part de l’État et celle des collectivités locales, la fin des doublons, la maîtrise des dépenses des opérateurs, des agences, etc.
Je comprends votre inquiétude, monsieur le sénateur, mais nous mettrons en place des outils afin d’examiner les moyens de réaliser ces économies.
J’en viens au sujet, que vous avez évoqué, des dépenses supplémentaires. Je laisse de côté la question des rythmes scolaires, qui fait l’objet d’un débat récurrent. Le ministre de l’éducation nationale a d’ailleurs fait droit à un certain nombre de demandes d’assouplissement à la fin de la semaine dernière.
Nous avons créé à la demande du Sénat, qui a choisi cette formule plutôt que celle d’un Haut Conseil des territoires, le Conseil national d’évaluation des normes, qui sera mis en place avant l’été et donnera plus de place aux élus. Nous suivrons attentivement ses propositions. MM. Lambert et Boulard en avaient eux-mêmes émis dans leur rapport sur l’inflation normative. Et M. Lambert, cette fois-ci associé à M. Malvy, en a fait d’autres relatives aux finances des collectivités territoriales, en posant, en parallèle, la grande problématique des normes.
Pour conclure, je souhaite vous dire que la question des services publics importe aussi à la citoyenne que je suis. Mais, comme vous et beaucoup d’autres, j’ai pris conscience que nous avions parfois manqué de simplicité. Or la complexité a entraîné des dépenses supplémentaires.
J’espère que nous parviendrons à résoudre ces problèmes, notamment grâce aux travaux menés au Sénat. Je compte beaucoup sur l’entrevue que j’aurai, le 5 mai prochain, avec les membres de la délégation aux collectivités territoriales, présidée par Mme Gourault, et qui devrait nous permettre de définir les bornes de ce travail.