M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Je vous remercie, madame la ministre, de vos réponses, même si elles ne me satisfont pas complètement.
Dans l’académie de Bordeaux, plus particulièrement en Dordogne, des efforts sont actuellement consentis en faveur des langues régionales, qu’il s’agisse du basque ou de l’occitan. Toutefois, les moyens affectés par l’éducation nationale aussi bien aux collèges qu’aux lycées sont nettement insuffisants.
Pour ce qui concerne l’école élémentaire, une sensibilisation aux langues régionales est engagée. Je pense notamment au financement partiel des écoles Calandreta par les collectivités.
Cela étant, il faut persévérer dans ce domaine afin de garantir des enseignements de langues régionales aux élèves qui le souhaitent et attribuer des moyens supplémentaires permettant la nomination de nouveaux professeurs. En effet, en Dordogne, par exemple, le manque de professeurs enseignant l’occitan est patent.
Pour conclure, je le répète, madame la ministre, votre réponse laisse à désirer.
situation des roms : en finir avec le nomadisme forcé
M. le président. La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 590, adressée à M. le Premier ministre.
M. Michel Billout. Madame la ministre, je souhaite attirer une nouvelle fois votre attention sur les difficultés d’application de la circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites.
Plus d’un an après son entrée en vigueur, force est de constater que l’attitude des pouvoirs publics a conduit de nombreuses associations à saisir le Défenseur des droits à propos du refus d’inscription à l’école, de la mise en place forcée de conditions de scolarisation hors de l’école en milieu isolé, des conditions d’interpellation et d’incarcération des enfants, des conditions d’évacuation de terrains occupés en Île-de-France, particulièrement dans mon département, la Seine-et-Marne.
Les situations dénoncées concernent les droits de l’enfant au titre de son droit à être protégé et de son droit à la sécurité mais, plus généralement, des questions complexes de sécurité sanitaire, de déontologie de la sécurité, ainsi que le suivi de ces populations en matière d’accès au logement et les discriminations dont elles font l’objet dans le domaine de l’accès à l’emploi.
Les expulsions répétées, sans application ou avec une application très partielle de la circulaire, ont pour conséquence de rompre la scolarité des enfants et le suivi sanitaire des familles.
Ce fait aggrave la situation des collectivités locales et territoriales comme des services de l’État qui sont confrontés à des regroupements de plus en plus importants sans avoir la capacité de trouver des solutions d’hébergement provisoires ou pérennes pour toutes les personnes expulsées de campements. La mise en place de dispositifs d’accompagnement indispensables en vue de garantir l’accès de celles-ci au logement et à l’emploi est donc totalement ignorée.
Ces difficultés sont relatées par de nombreux élus ; elles ont été évoquées lors du sommet des maires sur les Roms et du congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe, qui a constaté que les pouvoirs locaux et régionaux chargés d’appliquer les politiques gouvernementales sur les questions relatives aux Roms pouvaient être confrontés à l’insuffisance de leurs moyens financiers. Le congrès a d’ailleurs suggéré au conseil des ministres du Conseil de l’Europe de recommander aux États membres de veiller à ce que les stratégies nationales sur les questions relatives aux Roms comprennent des dispositions pour une mise en œuvre effective à l’échelon local, notamment en garantissant aux pouvoirs locaux et régionaux des ressources suffisantes et un soutien spécialisé, ainsi qu’en témoigne la recommandation 315 du 16 mars 2012.
Dans ce contexte, je souhaiterais connaître les mesures que compte prendre le Gouvernement pour que soit enfin pleinement appliquée la circulaire interministérielle précitée, dans un cadre d’apaisement, pour en finir avec un nomadisme forcé, qui résulte des pratiques trop fréquemment observées sur le territoire national, situation qui ne fait que déplacer géographiquement le problème et précariser davantage la situation de ces familles, brisant ainsi toute perspective d’intégration sociale.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur le sénateur, vous avez rappelé les situations difficiles que connaissent nombre de familles installées dans des habitats provisoires et précaires et qui se déplacent fréquemment.
Comme vous l’avez indiqué, le Gouvernement a agi sans délai et défini une ligne de conduite équilibrée sur ce sujet dès le mois d’août 2012. Il tente de concilier deux exigences : la fermeté dans l’exécution des décisions de justice, en particulier lorsque la santé ou la sécurité des personnes sont mises en cause, et l’humanité de l’action administrative face à des situations souvent assez douloureuses.
L’enjeu principal pour les services de l’État est d’anticiper les opérations d’évacuation afin de trouver des solutions globales, adaptées aux personnes et aux familles concernées, notamment en termes d’hébergement et d’accès aux droits. C’est l’impulsion que tend à donner la circulaire interministérielle du 26 août 2012.
La tâche est difficile, car il existe un écart important entre nos souhaits et la réalité sur le terrain. D’ailleurs, les associations dont vous avez parlé jouent un rôle qu’il faut saluer, car elles essaient souvent d’apporter humanité et solidarité lors de l’accueil d’un certain nombre de personnes en grande difficulté dans notre pays.
Si chacun a conscience de ces difficultés relayées notamment par la presse, il faut aussi saluer les expériences positives qui se multiplient sur le terrain. Dans plusieurs départements, des solutions durables ont été trouvées. Il en est ainsi de la création de villages d’insertion ici ou là, ou de la mise à disposition de bungalows, dans la région lyonnaise, singulièrement.
Même si toutes ces mesures ne correspondent pas exactement à ce que nous voulions, je tiens à saluer ces actions pragmatiques et ces bonnes pratiques. Cela étant, il est indispensable d’engager une concertation apaisée sur ces questions afin de trouver des solutions.
Le Gouvernement est conscient de la nécessité de poursuivre les efforts déployés. Aussi a-t-il décidé de confier à Adoma, opérateur historique, une mission d’appui selon des principes établis nationalement. Il reviendra ensuite aux préfets d’aider cet établissement pour mobiliser ses capacités immobilières mais aussi son expérience d’ingénierie sociale.
Par ailleurs, je tiens à rappeler que la situation des Roms a une dimension européenne. Vous avez signalé, monsieur le sénateur, les possibilités offertes aux collectivités d’obtenir des crédits européens pour poursuivre leurs efforts. Nous devons aussi développer une coopération décentralisée qui est actuellement mise en place avec les pays d’origine, la Roumanie et la Bulgarie, afin de favoriser l’insertion de ces populations dans leur pays d’origine, ce qui mettra fin à l’une des raisons de leur départ.
M. le président. La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Madame la ministre, je connais votre engagement personnel sur ces questions et je salue l’action du délégué interministériel qui œuvre beaucoup en la matière. Mais le seul élément nouveau que vous m’apportez n’est pas pour me rassurer totalement.
En effet, même en ce début d’hiver, nous assistons à de nouvelles expulsions massives en Île-de-France, à Saint-Ouen et à Champs-sur-Marne, tandis que les propositions de relogement ont été très rares. Par conséquent, nous allons retrouver les populations expulsées installées un peu plus loin, et leur situation sera encore plus précaire. Les associations qui interviennent seront confrontées à de grandes difficultés. Il faut vraiment faire beaucoup plus.
S’agissant de la dimension européenne, je suis moi-même auteur d’un rapport et d’une proposition de résolution européenne, qui a été adoptée par le Sénat, sur l’intégration des Roms.
Il n’en faut pas moins que, localement, nous ayons les moyens d’agir. À travers ma question, je pose donc aussi celle des moyens financiers des collectivités. Alors que leurs finances sont aujourd’hui exsangues, c’est un problème supplémentaire qu’elles doivent régler. Il me semble par conséquent indispensable que l’État français se montre plus incitatif et prévoie davantage de moyens d’accompagnement.
exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties en zone « natura 2000 »
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy, auteur de la question n° 593, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget.
M. Philippe Leroy. Madame la ministre, l’article 1395 E du code général des impôts, issu de la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux, exonère de taxe foncière sur les propriétés non bâties, ou TFNB, les propriétés situées en zone « Natura 2000 ».
Ma question porte sur les sites « Natura 2000 » forestiers, qui concernent essentiellement des communes peu peuplées et à fort taux de boisement, dont la TFNB représente le plus gros revenu.
En vertu de la loi, l’exonération de TFNB dans les zones « Natura 2000 » fait l’objet d’une compensation au profit des communes concernées, sur la base des taux votés en 2003. Cette obligation de compensation constitue à l’évidence une contrainte très forte pour l’État.
Depuis 2009, en dépit de nombreuses protestations, la compensation est intégrée au périmètre des variables d’ajustement de l’enveloppe normée des concours de l’État aux collectivités territoriales. De fait, elle a été progressivement réduite, au détriment des communes forestières ; c’est ainsi que, en 2013, elle a couvert seulement 51 % de la perte de recettes. Cette tendance devrait se poursuivre en 2014.
En s’obstinant à ne pas vouloir exclure, pour les terres forestières, la compensation de l’exonération « Natura 2000 » du périmètre des variables d’ajustement, le ministère des finances renie les engagements de l’État au bénéfice des politiques environnementales.
Il en résulte un risque de rejet de la politique « Natura 2000 » par les communes concernées : souvent pauvres, elles subissent, du fait du système actuel, un manque à gagner considérable, estimé à 1 million d’euros en 2014.
C’est pourquoi je demande à M. le ministre de l’économie et des finances et à M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie de bien vouloir exclure la compensation de l’exonération « Natura 2000 » des variables d’ajustement pour les terres forestières.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur Leroy, vous avez bien voulu me faire part de vos interrogations sur la compensation par l’État des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties au bénéfice des propriétaires s’engageant dans la préservation durable des zones « Natura 2000 » et des zones humides.
Comme une grande partie des allocations compensatrices, ces compensations ont été intégrées aux variables d’ajustement qui permettent chaque année de réguler l’évolution de l’enveloppe, dite normée, des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales.
Je vous rappelle que le périmètre de ces variables a été élargi, par la loi du 27 décembre 2008 de finances pour 2009, à la majorité des allocations compensatrices versées par l’État, parmi lesquelles celle qui fait l’objet de votre question.
Conformément aux engagements pris dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité conclu entre l’État et les collectivités territoriales le 16 juillet dernier, sous l’égide du Premier ministre, les collectivités territoriales ont consenti, dès 2014, un effort de 1,5 milliard d’euros sur les concours financiers de l’État. Ainsi, les collectivités territoriales participeront à l’effort de rétablissement des comptes publics mis en œuvre par le Gouvernement.
Dans ce contexte, monsieur le sénateur, il n’est pas souhaitable d’exclure de l’assiette des variables d’ajustement les allocations compensatrices comme celles qui sont relatives à l’exonération « Natura 2000 », sauf à concentrer l’effort des collectivités territoriales sur un nombre restreint de variables, ce qui risquerait de le rendre moins soutenable pour celles qui demeureraient impactées.
Le périmètre large des variables d’ajustement est ainsi un gage de pilotage équilibré de la trajectoire des concours de l’État aux collectivités territoriales qu’il n’apparaît pas opportun de réduire.
M. le président. La parole est à M. Philippe Leroy.
M. Philippe Leroy. Madame la ministre, vous pensez bien que votre réponse ne me satisfait en aucune façon !
Permettez-moi de corriger un de vos propos. Vous avez dit que les collectivités territoriales avaient consenti une baisse de 1,5 milliard d’euros des transferts qui leur sont alloués. Or, elles n’ont rien consenti du tout : c’est évidemment contre leur gré qu’elles subissent cette diminution de leurs recettes !
Par ailleurs, que le ministère de l’économie et des finances impose, pour une économie de seulement 1 million d’euros sur les compensations prévues par la loi, un tel sacrifice à de petites communes qui tirent souvent leurs seuls revenus de la forêt et qui sont profondément ancrées dans le territoire rural français est à mes yeux un signe d’irrespect et de négligence à leur égard.
M. le président. Mes chers collègues, avant d’aborder la question orale suivante, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinq, est reprise à onze heures quinze.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 587, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Yannick Vaugrenard. Madame la ministre, je souhaite attirer votre attention sur le dossier de l’adoption plénière d’enfants nés en Haïti et arrivés en France au début de 2010, à la suite du séisme survenu le 12 janvier de la même année.
Le traitement équitable des familles adoptantes et de leurs enfants est compromis par l’application de la circulaire adressée aux procureurs en date du 22 décembre 2010. Prenant prétexte de ce que les autorités haïtiennes auraient décidé de ne plus légaliser la signature des notaires sur les consentements, elle leur demande d’opposer un avis défavorable aux requêtes de conversion en adoption plénière présentées par les familles.
La loi haïtienne sur l’adoption prévoit que l’adopté a, dans sa nouvelle famille, les mêmes droits et les mêmes obligations que ceux qui résultent d’une filiation biologique légitime ou naturelle. Aujourd’hui, Haïti fait évoluer son dispositif législatif afin de reconnaître l’adoption plénière.
Jusqu’à présent, toutefois, les adoptions étaient prononcées par les tribunaux d’Haïti avec le consentement éclairé et légalisé, un document notarié par lequel les parents biologiques donnent leur accord irrévocable pour que l’adoption devienne plénière en France. Les parents adoptifs pouvaient ainsi obtenir un jugement d’adoption plénière auprès du tribunal de grande instance de leur lieu de résidence.
Pour le précédent garde des sceaux, la fin de la légalisation de la signature des notaires compromettait la validité du document par lequel l’adoption des enfants originaires d’Haïti devient plénière en France. Il a donc émis la circulaire de 2010 précitée, dont les conséquences ont été désastreuses, tout particulièrement sur les procédures d’adoption déjà engagées.
Cette circulaire s’est appliquée sans délai. Toutefois, sa prise en compte a été, et demeure, extrêmement variable d’un tribunal de grande instance à l’autre. En effet, si certains procureurs émettent un avis défavorable, certaines familles ont pu obtenir, malgré tout, une adoption plénière. Je veux souligner que des familles se sentent lésées par des décisions leur refusant une adoption plénière, alors même que leur dossier est identique à celui d’autres familles vivant dans d’autres départements et relevant donc d’un autre tribunal de grande instance, dont la demande a connu une issue favorable. D’une certaine manière, ces jugements à géométrie variable contreviennent au principe de l’unicité de la République.
Je m’interroge également sur les conséquences qu’emportera, pour les procédures en cours, l’application de la nouvelle loi sur l’adoption votée en Haïti en août dernier. En effet, après la promulgation de cette loi, les légalisations devraient devenir beaucoup plus aisées.
Madame la ministre, je souhaite par conséquent savoir si vous avez l’intention de demander à vos services de réexaminer la circulaire de 2010, en concertation avec les autorités haïtiennes. Comment comptez-vous suivre le dossier afin de débloquer des situations pénalisantes pour des enfants qui ont commencé à trouver leurs racines dans leur famille française ? Comptez-vous intervenir pour mettre fin aux différences de traitement constatées selon les juridictions ?
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Le dossier est extrêmement sensible et à forte charge émotionnelle, comme le sont tous les contentieux impliquant des enfants.
Concernant votre observation relative à une différence de traitement selon les juridictions, la direction des affaires civiles et du sceau, interrogée par mes soins, n’a pas eu connaissance de remontées du terrain faisant état d’une diversité des jugements, et je ne dispose donc pas d’éléments précis sur ce point. Si vous en avez, je vous remercie par avance de bien vouloir me les communiquer, car nous sommes nous aussi très soucieux de l’unité des jugements, comme en témoigne le travail que nous avons engagé pour rapprocher les jurisprudences à tous les niveaux.
En ce qui concerne l’adoption d’enfants haïtiens par des familles françaises, un accord avait été conclu, après le séisme, entre l’ambassade de France et le Premier ministre de la République d’Haïti afin de faciliter la procédure pour 300 enfants en cours d’adoption. Une circulaire avait été prise sur cette base, mais, en 2009, le commissaire au Gouvernement d’Haïti a considéré que les conditions de transformation d’une adoption simple en adoption plénière n’étaient pas conformes au décret de 1974. Il a alors été précisé, dans la circulaire, que les adoptions devraient être légalisées. Il n’existe pas de convention bilatérale entre Haïti et la France qui aurait permis de se dispenser de cette formalité. La République d’Haïti n’avait pas, alors, ratifié la convention de La Haye. Elle l’a fait récemment, et une loi adoptée en août 2013, dont nous attendons la promulgation, en tire les conséquences. Cela facilitera les choses.
Pour l’heure, l’adoption simple permet déjà la prise en charge des enfants et l’autorité parentale exclusive, ainsi que l’attribution du nom et l’engagement des démarches en matière de déclaration de nationalité française. À leur majorité, les enfants adoptés pourront faire le choix d’une adoption plénière. Néanmoins, il est exact que, dans l’attente que la promulgation de la loi produise ses effets, la situation actuelle pose question. Je la sais douloureuse pour les familles françaises : elles n’ont pas compris la position de la République d’Haïti, que nous sommes cependant tenus de respecter, comme l’ont confirmé la Cour de cassation et le Conseil d’État, saisi pour abus de pouvoir. Nous sommes également obligés de respecter les effets qui découleront de la ratification par Haïti de la convention de La Haye.
Nous allons étudier avec la République d’Haïti la possibilité de trouver une solution sécurisante pour les familles et les enfants, concernant toutes les adoptions antérieures à l’entrée en vigueur de la loi d’août 2013.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.
M. Yannick Vaugrenard. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.
L’adoption plénière a été accordée sans problème par les tribunaux de grande instance de Bourges, de Poitiers et d’Angers, tandis que celui de Nantes a rejeté les demandes de sept ou huit familles présentant des dossiers en tous points similaires.
Ce sont des situations douloureuses, vécues difficilement par les familles et les enfants concernés, qui commencent à grandir. La ratification par Haïti de la convention de La Haye pourra-t-elle avoir un effet rétroactif en matière d’adoption plénière ? Je sais que la chose est compliquée, mais cela permettrait de rassurer les familles et les enfants.
Quoi qu’il en soit, j’ai pris bonne note de votre réponse, madame la ministre, et j’espère que ce dossier pourra avancer dans les mois à venir. Je vous remercie par avance de vos efforts en ce sens.
avenir de la maison d’arrêt d’aurillac
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 592, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jacques Mézard. Madame la garde des sceaux, je veux tout d’abord vous exprimer, au nom de mon groupe, notre amitié et notre soutien face aux agressions et aux épreuves que vous avez subies.
Ce message d’amitié étant délivré, j’en viens à la question orale que je me suis trouvé dans l’obligation de déposer, faute de parvenir, depuis des mois, à obtenir une réponse précise par un autre moyen.
La maison d’arrêt d’Aurillac, que je visite régulièrement en tant que parlementaire, présente certaines caractéristiques.
Tout d’abord, elle est située à deux heures et quart de route du siège de la cour d’appel et de la maison d’arrêt de Riom, et à près de quatre heures de route de la direction régionale de l’administration pénitentiaire de Lyon, dont elle relève. Son implantation est donc essentielle au maintien d’un service public de la justice proche et accessible. En effet, sa disparition entraînerait inéluctablement, à terme, la suppression d’un tribunal de grande instance, ce qui imposerait aux citoyens de faire plus de deux heures de route pour accéder au service public de la justice.
Si les conditions de détention y paraissent encore tout à fait acceptables par rapport à ce que l’on constate dans de nombreux établissements similaires, de deux à quatre détenus occupent néanmoins certaines cellules, ainsi que j’ai pu l’observer au mois d’août.
À la suite de sa visite de l’établissement, en 2012, l’ancien garde des sceaux, notre collègue Michel Mercier, s’était engagé à faire conduire au plus vite des expertises afin, d’une part, de mener des travaux de mise en conformité avec les nouvelles obligations découlant de la loi pénitentiaire, et, d’autre part, d’assurer la pérennité de l’établissement, en dépit des souhaits contraires de la direction régionale de l’administration pénitentiaire de Lyon, qui n’a aucune envie de maintenir une maison d’arrêt située à quatre heures de route de son siège. Sur ce dernier point, il m’avait d’ailleurs adressé un courrier très clair.
Malheureusement, à ce jour, aucun de ces travaux essentiels de mise aux normes n’a été réalisé, tandis que les restrictions apportées au financement courant entravent l’entretien normal du site. Pour votre information, madame la garde des sceaux, sachez qu’il faut maintenant passer par Lyon pour acheter des ampoules ! C’est ainsi que cela fonctionne…
Je vous ai précisément interrogée sur un point particulier, qui met en question le fonctionnement et l’avenir de cet établissement : la maison d’arrêt ne dispose pas de sas d’entrée ni de système de vidéosurveillance. Les travaux nécessaires doivent être réalisés, mais ils sont reportés d’année en année, parce que la direction régionale de Lyon n’a strictement aucune envie de les engager.
Je souhaite donc obtenir des réponses précises à ces questions précises, que je vous pose depuis plusieurs mois.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Mézard, je vous remercie de vos paroles de soutien et de solidarité, auxquelles je suis extrêmement sensible.
En ce qui concerne l’établissement d’Aurillac, son taux d’occupation, de 62,5 %, est relativement faible au regard de la surpopulation carcérale souvent constatée ailleurs. Je n’ai cependant pas accédé aux demandes de fermeture dont il a été l’objet, motivées par la future implantation d’un centre pénitentiaire à Riom.
Je souhaite le maintien de cette maison d’arrêt, qui assure la fluidité du fonctionnement des juridictions et des extractions, et j’ai donc pris la décision de ne pas la fermer. Par conséquent, il n’y aura pas de fermeture en cascade d’un tribunal de grande instance ou d’autres établissements relevant du ministère de la justice.
Je souligne qu’un certain nombre de travaux ont déjà été effectués : la sauvegarde du bâtiment, pour 181 000 euros, comprenant le remplacement des fenêtres, la réfection des réseaux d’eaux usées et pluviales, ainsi que la réparation de la toiture ; l’amélioration des conditions de détention, au moyen de la réfection des douches, de la mise en place de la ventilation mécanique et de la téléphonie, ainsi que de la réfection du quartier des arrivants ; l’amélioration des conditions de travail des agents, grâce notamment à l’installation d’une chambre de nuit.
D’autres travaux ont été effectués, pour 161 000 euros. Les chaufferies ont ainsi été livrées récemment, le 9 octobre dernier, tandis que le remplacement des sols et des revêtements défectueux est encore en cours.
J’entends vos observations relatives à l’absence de sas d’entrée et de système de vidéosurveillance. J’ai arrêté un plan de sécurisation concernant l’ensemble des établissements pénitentiaires sur tout le territoire, pour un montant total de 33 millions d’euros.
À cette occasion, j’ai demandé à l’administration pénitentiaire de procéder à une étude minutieuse de l’état de sécurité de nos établissements. Il est vrai que la maison d’arrêt d’Aurillac n’a pas été intégrée dans la première vague, celle des sites nécessitant des travaux d’urgence. L’administration pénitentiaire gère tout un ensemble d’établissements selon des critères objectifs, tels le taux de surpopulation carcérale ou l’état de vétusté. À Aurillac, je l’ai dit, il n’y a pas de surpopulation carcérale et les deux bâtiments les plus anciens datent de 1967, mais votre appréciation de la situation locale est certainement plus fine que celle de l’administration pénitentiaire.
J’ai pris bonne note de votre remarque concernant les achats d’ampoules : je vais contrôler ce point très rapidement. Je veillerai à ce que la gestion de nos établissements pénitentiaires ne relève pas d’une bureaucratie pré-cubaine ou post-soviétique ! (Sourires.)
Je vous propose, monsieur le sénateur, de prendre part très prochainement à une séance de travail à la Chancellerie avec le conseiller pénitentiaire et le conseiller budgétaire de mon cabinet, pour faire le point sur la situation de la maison d’arrêt d’Aurillac.