M. Philippe Dallier. En effet, ce n’est pas tous les jours !
M. Christian Cambon. Profitez-en !
M. Marc Daunis. M. Placé a le syndrome du scorpion !
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà au terme d’environ 45 heures de débats. Nous avons examiné un peu plus de 800 amendements. J’ai fait un petit comparatif : l’Assemblée nationale avait examiné 1 300 amendements en 36 heures. C’est seulement un clin d’œil, mais cela m’incite à penser que le texte adopté par la Haute Assemblée sera certainement de meilleure qualité que celui de nos collègues députés. (M. Claude Dilain, rapporteur, et Mme Marie-Noëlle Lienemann acquiescent.)
Cela tient à notre règlement, et je m’en réjouis. Même si nous pressons parfois l’allure pour terminer, nous prenons le temps de débattre et de présenter chacun des amendements que nous avons déposés. Je tenais à le rappeler.
Au nom du groupe UMP, j’adresse à notre présidente de séance et aux présidents de séance qui se sont succédé nos remerciements pour la manière dont ils ont présidé nos débats. Je remercie également nos rapporteurs, qui ont fait un travail très important sur un texte comportant de très nombreux articles. Mes remerciements s’adressent enfin à Mme la ministre, pour la qualité de ses réponses, toujours très pédagogiques, et pour le temps qu’elle y consacre.
Je salue la qualité de nos débats. Il y a eu très peu de poussées de fièvre. Abstraction faite des quelques incidents, inévitables, nous avons beaucoup discuté du fond. C’est très bien ainsi.
Le projet de loi comporte de bonnes dispositions ; chacun l’a souligné. Je pense notamment aux mesures de lutte contre les marchands de sommeil, l’habitat indigne et les copropriétés dégradées, qui font avancer les choses et nous permettront de mieux combattre ces fléaux.
J’en viens à ce qui représente pour nous les trois plus gros morceaux du projet de loi, sur lesquels notre avis n’a pas changé à l’issue de ce débat.
Le premier est l’encadrement des loyers. Les critiques ont été nombreuses dès le départ. J’ai rappelé celles que le professeur Michel Mouillart a émises lors de la publication de votre projet. Il avait assez aisément démontré qu’une telle mesure pourrait conduire à des effets de bord étonnants, avec des baisses de loyer dans les plus beaux appartements parisiens, évidemment habités par des personnes qui en ont les moyens, et des augmentations de loyer dans les logements occupés par les familles les plus modestes.
Le texte initial a été modifié par l’Assemblée nationale, puis par le Sénat. Pendant que nous débattions, le Conseil d’analyse économique, le CAE, a publié son fameux rapport, qui contient de nouvelles critiques à l’égard du dispositif. On peut penser ce que l’on veut des membres du CAE, que certains dans cet hémicycle ont qualifié – la formule restera sans doute dans les mémoires – de « professeurs Tournesol ».
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je le maintiens ! La FNAIM a dit que leur rapport était une élucubration !
M. Christian Cambon. Vous ne la citez que quand cela vous arrange !
M. Philippe Dallier. Nous mettrons les membres du CAE et les représentants de la FNAIM face à face, et ils s’expliqueront ! En tout cas, tout cela prouve que de grandes craintes subsistent au sujet de l’encadrement des loyers.
Madame la ministre, vous nous avez parlé de l’exemple allemand, mais le système allemand n’est pas exactement le même que celui que vous proposez. En Allemagne, les loyers sont libres, mais le locataire peut demander au juge de réajuster le loyer à la baisse. Surtout, la situation démographique est radicalement différente, nous le savons bien. En outre, il n’y a pas en Allemagne l’équivalent de la métropole de Paris : Berlin n’est pas en zone tendue, même si les prix sont en train de monter. Bref, les situations ne sont pas comparables.
Je forme le vœu que vous ne vous soyez pas trompée, madame la ministre. En effet, si ce que nous craignons se produit, et si les investisseurs se désengagent, les conséquences seront assez dramatiques pour la construction de logements.
Le deuxième sujet est la garantie universelle des loyers. Je l’ai suffisamment souligné, elle n’a d’universel que le nom, puisqu’elle ne couvre pas tout le monde. Peut-être est-ce se payer de mots que d’utiliser cet adjectif. Et, à force de se payer de mots, on finit par donner aux Français le sentiment qu’on se paie leur tête, ce qui n’est jamais très bon, car cela favorise le vote aux extrêmes.
Le système que vous proposez est très lourd. On va créer une agence dont on ne sait pas très bien comment elle sera financée. Les modifications apportées par le Sénat permettent d’éviter que les collectivités locales n’y participent ; je pense que c’est une bonne chose. Mais combien cela coûtera-t-il au bout du compte ? Aujourd’hui, nous n’en savons rien. Il faudra attendre que la préfiguration donne ses résultats et que vous nous disiez comment l’effort sera réparti entre les propriétaires et les locataires. Nous avions cru comprendre que ce serait moitié-moitié, mais ce n’est plus si clair. Puisque vous renvoyez les réponses à l’examen du projet de loi de finances, nous attendrons jusque-là, mais comprenez que cela perturbe un peu ceux qui s’intéressent à ce marché de l’immobilier, dont notre économie a tant besoin.
Le dernier gros morceau du projet de loi est le PLU intercommunal. Il a donné lieu à un débat important ; au Sénat, c’est normal. Un nouveau dispositif a été adopté, et, grâce à l’amendement de la commission, il est plus protecteur que le texte initial. Pour autant, l’inquiétude reste grande parmi les maires, notamment les maires ruraux. Il conviendra donc de revenir sur le sujet en deuxième lecture.
Madame la ministre, mes chers collègues, au vu de tout ce que je viens de dire, vous imaginez bien que le groupe UMP ne votera pas ce projet de loi. Je forme une fois encore le vœu que le texte ne conduise pas les acteurs du secteur du logement, notamment les investisseurs privés, à se désengager ; le résultat serait catastrophique. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je m’exprime au nom de ceux de mes collègues qui ont été les « figures de proue » de mon groupe au cours de cette semaine d’examen du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové : Daniel Dubois, Valérie Létard et Pierre Jarlier.
L’examen du projet de loi – les précédents orateurs l’ont souligné – a été une véritable course de fond, avec plus de 820 amendements examinés en une cinquantaine d’heures. C’est assez exceptionnel, mais le nombre et l’importance des sujets abordés justifiaient que nous y passions autant de temps.
Je tiens avant tout à saluer la qualité des débats. Notre Haute Assemblée a rempli son rôle, en exprimant des désaccords, en trouvant des compromis et en imprimant sa marque. Reste à l’Assemblée nationale à nous entendre. Je tiens aussi à féliciter tous nos rapporteurs, au fond et pour avis, qui ont, chacun dans son domaine, travaillé avec sérieux et entrain, et cherché à écouter les propositions émanant de toutes les travées. Je vous remercie également, madame la ministre, de votre implication pédagogique.
Sur la forme, ce projet de loi a une qualité : il aborde nombre de sujets importants pour les citoyens et les élus locaux. Il soulève des questions sur le logement et l’urbanisme ; des attentes très fortes se sont exprimées sur ces sujets. Le texte a aussi un défaut : il est très long. Je le souligne, car j’aimerais que le Gouvernement en tire la leçon pour les projets de loi futurs. Il est quasiment impossible d’examiner sérieusement, techniquement, toutes les mesures d’un tel projet de loi. C’est dommage, car cela nous oblige parfois à nous exprimer sur des sujets dont nous n’avons pas mesuré les conséquences.
Sur le fond, le groupe UDI-UC est un peu déçu du résultat des débats, en raison de la faible prise en compte de certaines de nos propositions.
Une dizaine de nos amendements seulement ont été adoptés, le plus souvent contre l’avis du Gouvernement. Je mentionne l’exclusion des résidences de service pour les étudiants et pour les seniors du système de plafonnement des loyers, les travaux dans les copropriétés. Je pense aussi, naturellement, à quelques amendements sur l’urbanisme, dont celui qui portait sur l’article 64, adopté à l’unanimité ce matin.
Malgré cela, nous demeurons insatisfaits sur des sujets majeurs.
En matière d’encadrement des loyers, nous sommes profondément opposés à l’article 3 du projet de loi, pour différentes raisons.
D’abord, c’est, selon nous, une forme d’étatisation de la relation entre propriétaires et locataires, alors qu’il s’agit de contrats de droit privé.
Ensuite, la création d’observatoires locaux et la responsabilisation des préfets dans la fixation des loyers médians semblent impraticables. C’est ignorer les structures qui observent aujourd’hui le niveau des loyers et réunissent les professionnels du secteur.
Enfin, une telle mesure d’encadrement risque d’avoir des effets pervers mal mesurés, notamment une hausse des loyers pour les ménages les plus modestes dans des zones de grande diversité de loyers.
Nous avons besoin non pas d’encadrement et de règles toujours plus strictes, mais d’assouplissement et d’oxygène pour un secteur qui ne demande qu’à se développer.
La proposition très précise que nous avons formulée sur la garantie universelle des loyers est sans doute plus efficace que le dispositif prévu à l’article 8 et elle peut entrer en vigueur très rapidement. Nous regrettons de ne pas avoir été entendus, notamment par le Gouvernement. Toutefois, nous saluons l’initiative du président de la commission des affaires économiques de constituer un groupe de travail sur le sujet. Mes collègues Valérie Létard et Jean-Marie Vanlerenberghe – d’ailleurs, j’avais oublié de le mentionner au début de mon intervention, alors qu’il a été présent ; c’est le risque quand on fait une liste ! (Sourires.) – formuleront des propositions pour pouvoir obtenir un mécanisme assurantiel de protection des locataires et des bailleurs. Nous souhaitons que le Sénat puisse imprimer sa marque à cet égard en deuxième lecture.
Sur les questions d’urbanisme, notre groupe était uni pour refuser l’obligation automatique du transfert de la compétence en matière d’urbanisme aux EPCI voulue par l’Assemblée nationale. Mais nous avons été satisfaits par l’amendement adopté à l’article 64 permettant l’approbation du PLU intercommunal par l’obtention d’une majorité qualifiée de deux tiers des votes au sein du conseil communautaire.
Je tiens aussi à signaler que M. Jarlier est mécontent pour les constructions en zone rurale. (Sourires.)
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, malgré la qualité de nos échanges au cours de cette semaine de débat, les avancées obtenues par le groupe UDI-UC ne nous semblent pas satisfaisantes. Aussi, les sénateurs centristes ne pourront pas voter en faveur du projet de loi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Madame la ministre, je tiens à vous remercier fortement de votre implication personnelle, de celle de vos collaborateurs de cabinet, des services de l’État, qui ont permis de nouer un dialogue constructif dans l’enceinte du Sénat, afin de faire aboutir le projet de loi.
Je veux également remercier nos rapporteurs pour avis, qui ont tous apporté leur contribution – je salue M. le rapporteur pour avis de la commission des lois –, et, surtout, les deux rapporteurs de la commission saisie au fond, MM. Bérit-Débat et Dilain, qui ont su trouver les compromis nécessaires, en prenant en compte le vécu des élus, pour rendre opérationnelle cette loi à fort contenu.
Beaucoup de commentateurs ne misaient pas gros sur le passage de ce texte devant notre Haute Assemblée en première lecture. Chacun connaît les équilibres politiques complexes qui régissent la majorité sénatoriale de gauche, de surcroît très courte. Les observateurs avisés pensaient donc que vous trébucheriez sur les marches du Palais de Luxembourg, madame la ministre. Ce n’a pas été le cas !
Au contraire, vous avez su montrer votre compréhension des élus locaux. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) Vous avez tenu bon sur des positions essentielles, avec toujours la même volonté de rassembler largement, y compris jusque sur les travées de l’opposition.
Nous pensons tous que le droit au logement est un enjeu républicain. L’avenir de nos territoires pose problème à l’ensemble des élus, auxquels vous avez su vous adresser pour tenter de résoudre leurs problèmes.
Je listerai rapidement les grandes avancées, que d’autres orateurs ont déjà eu l’occasion de rappeler : la régulation des loyers, la garantie universelle des loyers, la GUL, les copropriétés dégradées et l’habitat indigne, l’urbanisme rénové.
Je ne vais pas rappeler tout ce que nous avons apporté au texte, mais il est permis d’affirmer que le Sénat a fait son travail. Oui, monsieur Dallier, le projet de loi est meilleur qu’à sa sortie de l’Assemblée nationale !
M. Philippe Dallier. Il est moins mauvais, en tout cas…
Mme Catherine Procaccia. Les textes qui sortent du Sénat sont toujours meilleurs ! (Sourires.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je vais quand même m’arrêter sur deux points.
Tout d’abord, le groupe socialiste tient à ce que l’amendement de M. Bérit-Débat sur les PLU intercommunaux, finalement approuvé par la commission, fasse l’objet d’un engagement fort du Gouvernement et que nous retrouvions cette avancée en deuxième lecture.
Ensuite, j’y insiste, des dispositions très importantes ont été votées sur l’habitat indigne, sur la protection des locataires, sur les marchands de biens ou sur les outils pour les organismes d’HLM. Nous espérons qu’elles seront non seulement comprises par tous, mais aussi soutenues par le Gouvernement et approuvées par nos collègues de l’Assemblée nationale.
Il y a encore des rendez-vous pour la deuxième lecture. Nous avons soulevé ensemble beaucoup de questions, et il faudra pouvoir avancer lors du deuxième passage à l’Assemblée nationale. Il en est ainsi de l’émergence de la métropole et de ses conséquences sur le présent projet de loi, un sujet complexe. Il faudra également reparler du groupe de travail sur la GUL, ainsi que de l’habitat et de l’urbanisme en secteur rural.
En tout cas, notre groupe est disposé à poursuivre le travail pour que la deuxième lecture soit aussi réussie que la première. Madame la ministre, ce texte, qui est aussi celui de tout le Gouvernement, cher Jean-Vincent Placé, marquera l’Histoire. À mon sens, ce sera une grande loi, qui rapprochera les loyers des revenus, tout en sécurisant les locataires et les propriétaires. Puisse-t-elle ouvrir une ère nouvelle pour que notre République soit à la hauteur de son idéal en garantissant le droit au logement pour tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, M. Daniel Raoul, qui a dû partir, m’a confié le soin d’intervenir à sa place avant le vote final.
Tout d’abord, j’associe aux remerciements l’ensemble des sénatrices et sénateurs qui sont intervenus au cours de ces cinq jours de séance. Nos débats, reconnaissons-le, ont fait honneur à la Haute Assemblée. Je me félicite notamment de la qualité des échanges sur la garantie universelle des loyers ou sur le PLU intercommunal. Les débats ont été constructifs, dans la phase préparatoire comme en séance publique, sur toutes les travées.
Les chiffres le montrent : en commission, 339 amendements ont été adoptés, dont 278 de nos rapporteurs, 8 de la commission des affaires sociales, 1 de la commission du développement durable, 18 du groupe socialiste, 18 du groupe UMP – chers collègues de l’UMP, j’attire votre attention sur cette parité avec le groupe socialiste –, 9 du groupe UDI-UC, 4 du groupe CRC et 4 du groupe écologiste ; en séance publique, 217 amendements ont été adoptés, dont, outre les 67 de la commission des affaires économiques, les 4 du Gouvernement et les 19 de la commission des lois, 51 amendements du groupe socialiste, 17 du groupe UMP, 16 du groupe UDI-UC, 17 du groupe CRC, 16 du groupe écologiste et 10 du groupe RDSE. Cela témoigne à la fois de la qualité et de l’écoute qui ont caractérisé nos débats.
Je salue également nos rapporteurs pour avis, Aline Archimbaud, pour la commission des affaires sociales, Jean-Luc Fichet, pour la commission du développement durable, et René Vandierendonck, pour la commission des lois.
Surtout, j’ai une pensée particulière pour nos deux éminents et brillants rapporteurs de la commission des affaires économiques, Claude Dilain et Claude Bérit-Débat, qui ont effectué un travail considérable – on pourrait dire « titanesque » – sur un projet de loi très dense, dans des délais contraints. Avec l’aide des collègues de la commission saisie au fond, mais aussi de toutes celles et ceux qui ont voulu apporter leur pierre à l’édifice, ils ont très largement contribué à l’amélioration du texte.
Je souhaite également vous remercier, madame la ministre, de votre disponibilité, de la qualité et de la précision toute pédagogique de vos explications, qui ont, je le crois, été appréciées sur toutes les travées.
Lors de votre première intervention en séance publique devant le Sénat, sur la proposition de loi déposée par notre ancien collègue Thierry Repentin sur l’abrogation de la loi relative à la majoration des droits à construire, M. Raoul vous avait accueillie en formant le vœu que vous appréciiez la qualité des travaux et la liberté de ton de notre Haute Assemblée. Je suis persuadé que c’est bien le sentiment qui vous anime aujourd’hui.
Je salue également les membres de votre cabinet et les services de votre ministère, qui ont énormément travaillé sur le texte et dont la collaboration a été très appréciée par les rapporteurs.
Au terme de onze heures de débats en commission et de ces cinq jours de séance publique, le projet de loi a été sensiblement modifié et complété. Le Sénat a pris date sur un certain nombre de points. Je pense à la garantie universelle des loyers, thématique sur laquelle nous continuerons à travailler d’ici à la deuxième lecture. Vous vous y êtes engagée, tout comme vous vous êtes engagée sur d’autres sujets. Nous serons donc amenés à enrichir encore ce texte au cours de la navette.
Sur le PLU intercommunal, à une fausse liberté des communes – dans le droit actuel, 50 % des communes représentant deux tiers de la population peuvent imposer leur volonté aux 50 % restant représentant un tiers des habitants un PLU intercommunal –, nous avons substitué une vraie protection. Il faut bien en mesurer la portée. Nous avons envoyé un message de respect et de confiance aux maires, aux conseillers municipaux et aux délégués des intercommunalités. Je pense qu’ils apprécieront cette protection supplémentaire.
Mme Catherine Procaccia. On verra !
M. Marc Daunis. Madame la ministre, j’avais eu l’honneur de porter auprès de vous, avec mes collègues Mirassou, Bourquin et Vaugrenard, entre autres, la proposition sur la minorité de blocage, car nous avions perçu les craintes. Après l’enrichissement du dispositif par M. le rapporteur, vous avez vous aussi entendu la nécessité de donner confiance aux territoires et de leur adresser un message de respect.
C’est pourquoi nous comptons sur vous pour porter devant les députés cet équilibre protecteur, dynamique, adapté aux enjeux de l’intercommunalité, qui est aujourd’hui profondément modifiée ; notre collègue Philippe Dallier a eu raison de le rappeler en évoquant ces structures nées de véritables mariages forcés dans certains territoires. Il convenait donc d’être encore plus protecteur.
J’espère que le Sénat adoptera ce texte qui, bien qu’il n’ait pas été étudié à vive allure, n’en possède pas moins une fière allure. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je le rappelle, lorsque la droite était au pouvoir, nous avions combattu ensemble, sur les travées de la gauche, la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, plus communément appelée loi Boutin.
Aujourd'hui, la droite n’est plus à la tête de l’État, et nous nous en félicitons ! Pour notre part, dès l’arrivée aux responsabilités de la nouvelle majorité, nous avons fait savoir que ce gouvernement pouvait compter sur les élus communistes pour soutenir toutes les politiques qui iraient dans le bon sens, celui d’une véritable rupture avec les logiques d’hier.
C’est dans cet esprit que nous avons voté un certain nombre de textes. Ainsi, nous avons particulièrement soutenu, dès l’automne 2012, la première loi visant à renforcer la loi SRU.
Compte tenu de cette première avancée, les attentes – je dis bien « les » attentes ; il ne s’agit pas simplement des nôtres – étaient fortes. Nous avons donc formulé un certain nombre de propositions et déposé des amendements, dont certains, seize me semble-t-il, ont été adoptés. Nous nous en réjouissons. Au-delà des chiffres, l’important, c’est le sens de ces amendements ; j’y reviendrai.
Sur le fond, je voudrais quand même souligner que nous sommes dans une situation quelque peu bizarre. Ce texte, comme les autres projets de loi, s’intègre dans un climat politique particulier. Dès lundi, le Sénat entamera l’examen en séance publique de la réforme des retraites. Au gel des aides au logement s’ajoutent, entre autres, la réduction des déficits, la baisse des dotations aux collectivités. Autant de projets qui ne s’attaquent pas à l’économie de la rente, que vous souhaitiez pourtant combattre, madame la ministre ; autant de projets qui ne s’en prennent pas à la finance, pourtant visée par le Président de la République.
On finit par se demander avec quel argent vous allez financer de telles mesures. On se pose la question de savoir comment vous pourrez engager la nécessaire construction avec aujourd’hui si peu de ressources, l’État et les collectivités étant financièrement étranglées.
Au final, nous craignons que les tentatives de ce texte d’ériger des garde-fous instaurés, comme l’encadrement des loyers ou la garantie universelle des loyers, ne permettent ni de juguler la crise du logement ni de réduire les appétits de rentabilité présents sur le marché.
Je voulais brièvement m’arrêter sur le volet relatif au droit des sols et à l’urbanisme, afin de la clarifier la position de notre groupe, qui a trop souvent été caricaturée, notamment lors de l’examen du texte sur les métropoles, voire, dans une moindre mesure, au cours de ce débat. Nous ne contestons pas le principe intercommunal ; d’ailleurs, nous sommes dans des intercommunalités et, parfois, nous les dirigeons. Vous le savez, nous sommes pour des intercommunalités de projets, et non pour des intercommunalités contraintes.
Ce que nous contestons, c’est le fait de rendre obligatoires les intercommunalités. Nous estimons, je le répète, que les coopérations entre les collectivités ne sont opérantes et pertinentes qu’avec l’adhésion volontaire de ces dernières
Mme Didier l’a indiqué, nous voterons ce texte. Cela rejoint ce que j’ai souligné au début de mon propos. Nous prenons tout ce qui va dans le bon sens. Or ce texte contient des éléments positifs, des avancées.
Encore une fois, nous attendons beaucoup de la navette et du débat à l’Assemblée nationale. Nous ne voudrions pas que les avancées obtenues ici fassent l’objet d’un désaveu à l’Assemblée nationale. Je le dis franchement, ce sera la clé de notre vote en deuxième lecture.
Madame la ministre, je veux vous remercier personnellement de votre capacité d’écoute et la clarté de votre argumentation sur les différents sujets.
Je remercie aussi l’ensemble des rapporteurs, notamment Aline Archimbaud – il n’y a pas que des hommes ! –, de leur excellent travail et de leur capacité d’écoute. Je salue également les administratrices et les administrateurs qui les ont accompagnés, ainsi que M. le président de la commission des affaires économiques, avec lequel nous avons beaucoup dialogué tout au long du débat parlementaire.
Je terminerai par une dédicace à Mme la présidente Bariza Khiari, qui a dirigé les derniers temps de nos débats avec brio. (Applaudissements.)
M. Marc Daunis. Un brio remarquable !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tout à l’heure, dans la précipitation, je n’ai pas mentionné les fonctionnaires du Sénat, en particulier les administrateurs de la commission des affaires économiques ; je pense que beaucoup de collègues s’associeront à mes remerciements.
Je remercie également Mme la présidente Bariza Khiari, qui nous a permis de bien débattre dans des temps, sinon raisonnables, du moins contenus.
Mme la présidente. La parole est à M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis.
M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis de la commission des lois. Madame la ministre, pendant la discussion générale, j’avais indiqué que nous ne nous connaissions pas et que le hasard m’avait offert la chance d’être rapporteur pour avis sur l’un de vos textes.
À l’issue de nos débats, je vous confirme le plaisir que j’ai ressenti à travailler avec vous et le respect qui est le mien envers votre écoute et votre maîtrise des dossiers. Je salue la qualité du travail de vos collaborateurs et le soin que vous portez à entretenir la concertation. C’est une remarque de forme, mais la forme, ça compte !
Depuis les grands textes gaullistes, les lois Vivien et autres textes sur l’habitat indigne, il y avait longtemps que l’on ne sentait plus du souffle ! Il suffit de faire parler Nancy Bouché et le pôle d’éradication !
Je vous remercie de vous être saisie de la question comme vous l’avez fait. Nous l’avons dit sans ambiguïté, des réglages restent à faire ; c’est l’objet de la navette. Je remercie d’ailleurs le Gouvernement de ne pas avoir choisi la procédure accélérée.
Nous avons incontestablement progressé sur l’habitat indigne ; cela a été dit par les collègues qui sont confrontés au problème. Nous pouvons profiter de la navette pour aller plus loin encore.
Madame la ministre, vous n’êtes pas tombée dans le piège qui vous guettait. Car, comme si le challenge ne suffisait pas, évoquer le PLU intercommunal à quelques mois des élections municipales et, forcément, du renouvellement sénatorial…
M. Philippe Dallier. C’était une bonne idée !
M. René Vandierendonck, rapporteur pour avis de la commission des lois. … tenait, en termes de concordance des temps, de la gageure ! Vous n’êtes pas tombée dans le piège !
Avec l’aide vraiment formidable de la commission, qui mérite les mêmes compliments pour ses qualités d’écoute et son travail de collaboration, vous avez introduit quelque chose dont vous sous-estimez peut-être la portée.
Pendant très longtemps, des générations successives d’énarques ont considéré que la seule manière de faire progresser nos territoires était de faire progresser l’intercommunalité comprise comme un mécanisme de transfert des compétences. Or transférer la compétence, c’est la perdre !
Dans ce texte, ce qui se réinvente, c’est une forme de partage de la compétence. Après tout, pourquoi la codécision et la subsidiarité seraient-ils l’apanage du seul droit européen ? Une réflexion s’impose quant à l’articulation des compétences. Claude Bérit-Débat a parfaitement repéré cet aspect du problème.
Je suis un chaud partisan – je ne l’ai pas caché, malgré la période – du PLU intercommunal, à condition qu’il se fasse avec les communes. C’est le « avec » qui mérite aujourd’hui d’être expertisé. Je vous remercie d’avoir commencé à le faire, tout comme je vous remercie pour les copropriétés dégradées. Je salue aussi le rapport de M. Dilain, qui a fait bouger les lignes. C’est vraiment très important ! Les plus pauvres des plus pauvres sont là !
Merci aussi pour les friches ! C’est un établissement public foncier de l’État, qui, à la fin des années quatre-vingt-dix, à partir des premières grandes résorptions de friches industrielles, a commencé à se poser le problème des sites et sols pollués et des conditions dans lesquelles ils pouvaient être remis sur le marché. Aujourd’hui, avec ce texte, vous faites vraiment avancer la cause de la ville durable !
Sur la préemption, et sur la valeur du foncier, vous pouvez encore aller plus loin. M. Daunis l’a bien repéré. Nous le savons, avec M. Dallier et quelques autres, aujourd’hui, lorsque vous questionnez la Direction des domaines sur les friches industrielles, vos interlocuteurs vous avouent que, faute d’avoir la formation nécessaire, il leur faut faire une décote sur la valeur du site.
Je conseille au Gouvernement de s’intéresser à la méthode dite du « compte à rebours », qui n’a aucune valeur réglementaire aujourd’hui. Elle réside dans une simple circulaire. Elle mériterait quand même d’être corrigée, parce que, quelque part, elle transpose le raisonnement spéculatif à l’intérieur même de l’appareil d’État, au niveau de la fixation de la valeur des biens. Dans ce domaine, il y a certainement encore des choses à faire progresser.
Nous ne demandons qu’à travailler avec vous. L’ampleur de ce texte nous a permis de progresser. Nous avons effectué un travail « transcommissions » associant la commission saisie sur le fond, qui a accepté de travailler avec les commissions saisies pour avis, et provoquant l’intérêt de la commission des finances, amenée à s’investir sur le sujet. Cela prouve qu’il peut se passer une réaction positive même si l’essai reste à transformer. C’était un plaisir, mais nous n’en sommes qu’à la première mi-temps ! Ne relâchons surtout pas l’attention ! (Applaudissements.)