M. François-Noël Buffet. Madame le ministre, à travers la loi de refondation de l’école, votre ambition, bien naturelle, est la réussite pour tous. Nous entendons que la lutte contre l’échec scolaire est une priorité nationale, et nous partageons avec vous cet objectif.
Comme vous le savez, la pratique musicale, et plus largement artistique, a des conséquences directes sur l’acquisition des fondamentaux de l’école, tout en favorisant l’équilibre des enfants dans leur développement. Depuis trente ans, les neuf centres de formation de musiciens intervenants, ou CFMI, forment des artistes – tous musiciens professionnels – pour que les enfants pratiquent la musique à l’école primaire dans une démarche de projet avec les professeurs des écoles. L’action des 5 000 musiciens intervenant à l’école ou « dumistes » est ainsi unanimement reconnue tant par les employeurs – les élus des collectivités locales que nous sommes – que par les responsables des ministères de l’éducation nationale et de la culture, les professeurs des écoles et les parents d’élèves.
Les « dumistes » sont incontestablement des acteurs professionnels importants pour relever ce défi de la réussite scolaire pour tous les enfants de France. Or, malgré le bilan positif de leur action, qui s’inscrit totalement dans les objectifs et les attendus de la loi, les CFMI sont aujourd’hui en difficulté. Ils sont de moins en moins en capacité de maintenir le cap des objectifs ambitieux de formation artistique, supérieure et professionnelle que les trois ministères de l’éducation nationale, de la culture et de l’enseignement supérieur leur ont fixés dans les années quatre-vingt. En effet, l’absence d’une concertation régulière entre les services centraux des trois ministères porte atteinte à la pérennité des moyens humains et financiers mis à disposition de ces établissements.
Je souhaite donc vous poser deux questions aujourd’hui.
Premièrement, comment le Gouvernement envisage-t-il de préserver et de renforcer les lieux de formation que sont les centres de formation de musiciens intervenant à l’école et de s’appuyer sur les artistes, musiciens professionnels, qui en sont issus, pour atteindre l’ambition de réussite scolaire pour tous inscrite dans cette nouvelle loi ?
Deuxièmement, comment le Gouvernement compte-t-il réactiver la coopération interministérielle, indispensable pour un vrai développement de l’éducation artistique et culturelle dans nos écoles et nos communes ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur Buffet, j’ai bien entendu vos interrogations sur l’avenir des centres de formation de musiciens intervenant à l’école, et je vais donc tâcher de vous rassurer.
Comme vous le savez, le 29 avril 1983, les ministres chargés de l’éducation nationale et de la culture ont signé un protocole d’accord afin de développer une collaboration entre le service public de l’éducation et le secteur culturel. Dans le cadre de cet accord, des CFMI à l’école élémentaire et préélémentaire ont été créés. Au nombre de neuf, ils fonctionnent au sein de neuf universités françaises et sont habilités à délivrer le diplôme universitaire de musicien intervenant.
L’objectif de ces centres est de donner à des musiciens une formation spécifique, à la fois musicale, pédagogique et générale, leur permettant de travailler, dans le cadre de l’école élémentaire et préélémentaire, en collaboration avec les professeurs des écoles. Ces musiciens apportent donc leur collaboration aux enseignements et activités artistiques à l’école, leurs interventions ayant lieu durant le temps scolaire.
Leur formation comporte également une dimension de médiation culturelle qui accompagne, dans les grandes zones urbaines, les partenariats mis en place par diverses institutions. Au fil des années, il est apparu que les titulaires de ce diplôme exerçaient non seulement dans des écoles maternelles et élémentaires, mais également dans des écoles de musique ou des associations culturelles. Leurs compétences sont aussi reconnues par des établissements spécialisés tels que des crèches, des hôpitaux, des maisons de retraite, des centres pénitentiaires, etc.
L’article 10 de la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République définit le rôle de l’éducation artistique et culturelle, qui participe au développement de la créativité et des pratiques artistiques. Je tiens à cet égard à vous rassurer : l’éducation musicale et les CFMI s’inscrivent pleinement dans le parcours d’éducation artistique et culturelle instauré par la loi. Ils constituent une richesse qu’il convient de ne pas négliger.
Comme vous le soulignez, la pratique musicale, et plus largement artistique, a des conséquences directes sur l’acquisition des fondamentaux de l’école ; elle permet également de mieux lutter contre l’échec scolaire. Ainsi, afin de réduire efficacement les inégalités et de favoriser un égal accès de tous les jeunes à l’art et à la culture, la loi du 8 juillet 2013 met en place un parcours d’éducation artistique et culturelle personnalisé tout au long de la scolarité des élèves, ce qui donnera à chaque enfant la possibilité de développer sa créativité, sa curiosité intellectuelle, sa sensibilité et son jugement esthétique.
Dans ces conditions, le rôle des CFMI doit être conforté, et nous avons d’ores et déjà défini le pilotage et le suivi du parcours d’éducation artistique et culturelle. De surcroît, les futurs enseignants, dans le cadre de leur formation dispensée au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, seront sensibilisés au travail avec d’autres acteurs que ceux de l’éducation nationale, notamment ceux qui sont issus des milieux culturels ou artistiques comme les musiciens du CFMI.
La refondation de l’école suppose une plus grande ouverture de l’établissement sur son environnement. La nouvelle organisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires ménage précisément des séquences consacrées à une activité culturelle, en lien avec l’environnement de l’école.
Les CFMI apparaissent donc comme des partenaires incontournables dans la mise en œuvre de l’éducation artistique et culturelle. Une réflexion commune des ministères chargés de l’enseignement supérieur, de l’éducation et de la culture va toutefois s’engager afin de conforter leur rôle dans la formation d’intervenants qui ont toute leur place dans la mise en œuvre des parcours d’éducation artistique et culturelle des élèves.
Vous le voyez, la loi d’orientation et de programmation est une bonne loi. Dommage que vous ne l’ayez pas votée…
M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet.
M. François-Noël Buffet. Dans la commune d’Oullins, que j’ai l’honneur de diriger, nous salarions quatre musiciens intervenants depuis près de dix-sept ans maintenant. Ils collaborent étroitement avec l’éducation nationale, pour un résultat tout à fait exceptionnel.
Nul besoin de voter des lois pour parvenir à ce résultat. Il suffit de travailler avec les gens du CFMI, de les rassurer, de les conforter dans leur travail et de leur permettre de l’exercer correctement.
Je vous remercie toutefois de vos propos, madame le ministre : ces centres de formation doivent en effet être préservés. Ils doivent aussi pouvoir être identifiés, car ils accomplissent un travail important.
menaces de fermeture du 3e régiment du génie à charleville-mézières
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 542, adressée à M. le ministre de la défense.
M. Marc Laménie. Ma question porte sur le devenir du 3e régiment du génie, en garnison à Charleville-Mézières, sur lequel planent des menaces de fermeture depuis plusieurs années.
Ce régiment, qui a été créé dans les années 1810, est installé à Mézières depuis 1947. Il attestait la volonté de la nation de maintenir une présence militaire sur ses frontières – de par la position géographique du département des Ardennes –, car, si les Ardennes sont aujourd’hui au cœur de l’Europe, elles ont payé un lourd tribut aux guerres qui se sont succédé au cours des XIXe et XXe siècles.
La disparition de cette unité aurait des conséquences économiques et sociologiques désastreuses. Elle impliquerait une perte de 2 000 habitants dans la ville chef-lieu et marquerait la fin irrémédiable de la présence militaire dans les Ardennes, après le départ du 12e régiment de chasseurs de Sedan, dans les années 1980, et la fermeture du centre d’entraînement commando de Givet en 2008.
À l’heure où l’on s’apprête à commémorer le centenaire de la guerre de 1914, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement quant au maintien d’une présence militaire sur le sol ardennais.
Certes, le ministre de la défense a indiqué hier que le 3e régiment serait maintenu en 2014. Cependant, les perspectives pour 2015-2019 ne sont pas rassurantes. De nombreuses interrogations demeurent et interpellent les Ardennaises et les Ardennais, les forces vives et les élus. La présence de ce régiment est vitale pour le département des Ardennes !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser Jean-Yves Le Drian, retenu par d’autres obligations et qui m’a demandé de vous répondre.
Le projet de loi de programmation militaire présenté par le ministre de la défense en Conseil des ministres le 2 août dernier va déterminer la configuration de nos armées pour les années à venir, sur la base des orientations définies par le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale remis au Président de la République le 29 avril 2013.
La loi de programmation militaire repose sur un effort financier important de la nation avec la reconduction décidée par le Président de la République du budget de la défense à hauteur de 31,4 milliards d’euros, c’est-à-dire au niveau où il se situe cette année.
Cette loi respecte un équilibre entre les deux impératifs qui s’imposent à nous : celui de notre autonomie stratégique et celui de notre autonomie budgétaire, qui est un autre enjeu de souveraineté pour notre pays. Elle fixe également un cap ambitieux : la France se donne les moyens de mettre en œuvre un modèle d’armées adapté aux évolutions de notre environnement stratégique des quinze prochaines années.
Dans le même temps, la loi de programmation militaire intègre pleinement la nécessité d’un redressement des comptes publics et s’inscrit dans la trajectoire budgétaire globale de la nation, ce qui nécessite un nouvel effort de nos armées, comme de l’ensemble de nos administrations publiques. À cet égard, la diminution nette des effectifs pour la période 2014-2019 résulte des objectifs arrêtés cette année – 23 500 emplois – et des suppressions qui restent à opérer au titre de la précédente programmation militaire. Dans le détail, il faut souligner que les nouvelles suppressions .de postes concerneront pour les deux tiers l'administration, les soutiens, les structures organiques des états-majors et pour un tiers seulement les forces opérationnelles.
C'est dans ce contexte de réforme globale que viennent d'être prises les décisions de restructurations des armées pour l'année 2014.
Le ministre de la défense a souhaité prendre le temps de l'écoute avant de rendre ses arbitrages. Le choix des régiments, bases aériennes ou structures administratives devant être conservés résulte donc d'une analyse fonctionnelle et multicritères.
Au-delà de cette analyse, le ministre de la défense a conduit sa réflexion dans une logique de préservation des forces et des missions, avec le souci constant de l’aménagement du territoire. Il a donc été tenu le plus grand compte de l'implantation ancienne des unités militaires et de la situation économique et sociale des territoires concernés ainsi que des éventuelles restructurations prévues par d'autres administrations de l'État.
S'agissant du 3e régiment du génie de Charleville-Mézières, et ce dès avant l'été, Jean-Yves Le Drian a pu prendre toute la mesure de l'attachement que Charleville-Mézières porte à son régiment, en garnison dans la ville depuis 1947, notamment par la voix de la maire, Mme Claudine Ledoux, du député de la circonscription, M. Christophe Léonard, ainsi que du président du conseil régional de Champagne-Ardenne, M Jean-Paul Bachy. Vous-même, monsieur le sénateur, serez également reçu au ministère dans les tout prochains jours.
Lors des échanges entre les élus et le ministère, il a été souligné que la Champagne-Ardenne n'a pas été épargnée par les restructurations antérieures et que, d'une manière générale, la région fait face à des problématiques d'aménagement du territoire qui doivent être prises en compte à un niveau interministériel.
Il résulte de tous ces éléments que le 3e régiment du génie de Charleville-Mézières ne sera pas impacté par les rationalisations d'effectifs en 2014 et que sa présence sera maintenue sur le sol ardennais. Pour les territoires qui seront quant à eux impactés par des restructurations, un accompagnement spécifique est prévu tant vis-à-vis des élus, du corps préfectoral que du personnel civil et militaire.
Voilà la réponse positive que je suis en mesure de vous apporter de la part de M. Le Drian.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Je remercie M. le ministre de la défense, ses collaboratrices et collaborateurs, ainsi que vous, madame la ministre, de cette réponse. Cependant, je demeure réservé quant aux éléments qui me sont apportés. Certes, pour l’année 2014, la présence du régiment à Charleville-Mézières est assurée, mais après ?
Nous comprenons les contraintes financières pesant sur le budget de l’État. Nous partageons tous, dans cet hémicycle, cette préoccupation. Reste que l’impact économique, humain, social d’une fermeture du 3e régiment du génie serait important pour le département des Ardennes, qui a un vrai passé militaire – comme d’autres départements, je m’empresse de le dire.
Malgré le sursis accordé pour l’année 2014, la période 2015-2019 reste exposée à de nombreuses incertitudes, et nous ne sommes pas rassurés. Nous resterons donc vigilants.
affichage environnemental et avenir des élevages
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 487, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
M. Jacques Mézard. Ma question concerne le dispositif d’affichage environnemental expérimenté entre juillet 2011 et juillet 2012 dans le cadre de la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 », et qui devait faire l’objet d’un rapport d’évaluation, le Parlement pouvant être saisi en vue d’une éventuelle généralisation du dispositif.
Il apparaît que la méthodologie utilisée dans le cadre de cet affichage – l’analyse du cycle de vie – provient du monde industriel. Elle nous semble par conséquent totalement inadaptée au secteur agricole, d’autant qu’elle aboutit à des résultats qui relèvent du non-sens écologique : les produits les plus pénalisés sont ceux qui sont issus des systèmes d’élevage les plus extensifs, voire biologiques.
En se focalisant sur les émissions de méthane « tout au long de la vie » des ruminants et en ne tenant absolument pas compte des externalités positives, comme l’entretien des prairies, les viandes rouges issues de ces filières d’élevages herbagers se retrouvent « dernières de la classe » en matière d’impact environnemental. De même, l’affichage environnemental défavorise le « local », les impacts du transport étant négligeables par rapport à ceux de l’amont et de la production.
Le constat négatif est donc double.
En premier lieu, parce qu’il repose sur des méthodes non consolidées et des bases de données non fiables, l’affichage environnemental sera à l’origine d’une véritable désinformation du consommateur. Comment celui-ci percevra-t-il le fait qu’une viande étiquetée bio soit si mal « notée » sur le plan environnemental ?
En second lieu, l’affichage environnemental n’aboutira pas à une amélioration des pratiques en matière de préservation de l’environnement, puisque les méthodes sont encore trop peu fiables et simplistes pour servir d’outils d’amélioration dans les exploitations. Actuellement, elles conduiraient à abandonner l’herbe dans l’alimentation des ruminants pour qu’ils émettent moins de méthane, ce qui serait une aberration.
Ce sont donc les objectifs mêmes de la mise en place d’un affichage environnemental qui se trouvent « annulés » par ces limites méthodologiques.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaiterais connaître vos intentions face à ce paradoxe écologique – ce n’est pas le seul, nous en connaissons beaucoup. N’est-il pas nécessaire de laisser le temps de la réflexion et de l’étude, pour aboutir à une information juste et utile pour le consommateur, plutôt que de se précipiter dans une mesure qui ne relèverait que du marketing et de « l’éco-blanchiment » ?
M. Jean-Michel Baylet. Très bien, monsieur Mézard !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question qui porte sur un sujet que la commission du développement durable de la Haute assemblée, présidée par mon ami Raymond Vall, a traité à l’occasion d’une table ronde qui s’est tenue au mois de juin dernier.
L’affichage environnemental doit permettre aux consommateurs de choisir en connaissance de cause les produits qu’ils achètent, en intégrant entre autres critères l’impact des produits sur l’environnement. Il s’agit d’un outil précieux pour la transition écologique, car il vise à donner davantage de poids et de pouvoir aux citoyens pour orienter les modes de production, sans alourdir les normes qui pèsent sur les producteurs.
Ainsi, dans la continuité des travaux engagés par votre assemblée, je souhaite que nous poursuivions avec détermination dans cette direction.
Bien sûr, la mise en œuvre d’un tel instrument mérite de la concertation. Nous devons prendre en compte les spécificités de chaque secteur, et particulièrement du secteur agricole. Venant moi-même d’un territoire – le Gers – particulièrement rural qui compte un important cheptel de Blondes d’Aquitaine, je suis sensible au fait que l’on ne méconnaisse pas la réalité du travail de nos éleveurs.
Je n’ignore pas les critiques adressées à la méthode actuelle de calcul des impacts environnementaux ou les inquiétudes qu’elle suscite dans le secteur agricole. Soyez assuré que nous prenons en considération ces inquiétudes et qu’un important travail d’analyse est mené pour tenir compte des spécificités du secteur agroalimentaire et des labels existants.
Mes services mènent actuellement plusieurs actions pour dissiper ces inquiétudes.
Ainsi, un rapport du commissariat général du développement durable tirera prochainement les enseignements d’une première expérimentation nationale, laquelle a rassemblé cent soixante-huit entreprises volontaires des secteurs de l’agroalimentaire, du textile, de l’ameublement, de la beauté, de l’hygiène et de l’hôtellerie. Cette expérimentation portait sur un affichage multicritères intégrant les émissions de CO2.
Je peux d’ores et déjà vous annoncer que cette phase d’essai a confirmé l’intérêt et la faisabilité de l’affichage environnemental. L’expérimentation a également mis en évidence l’ampleur du travail restant à accomplir avec tous les acteurs et notamment – vous avez raison d’y insister – les producteurs du secteur agricole. C'est pourquoi une nouvelle méthode de calcul des empreintes carbone des produits agroalimentaires est en cours d’élaboration. Cette nouvelle méthode sera plus favorable à l’élevage extensif et prendra mieux en compte le stockage de carbone dans les prairies et la qualité herbagère. On ne parle pas assez du rôle des prairies dans le stockage du carbone.
M. Jean-Michel Baylet. C’est vrai !
M. Philippe Martin, ministre. Les instituts techniques agricoles et l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, travaillent sur cette nouvelle méthode avec des chercheurs.
Une étude a également été pilotée pendant un an par mon ministère afin de construire un indicateur « biodiversité » pour les produits agricoles et d’élevage. Cet indicateur est fondé sur les infrastructures agro-écologiques ; il est donc favorable à l’élevage biologique.
En conclusion, je tiens à souligner que la Commission européenne, inspirée par les initiatives françaises, qui sont pour le moment uniques en Europe, vient de décider de lancer sa propre expérimentation, qui aura lieu de 2014 à 2016. Avec 11 % des projets déposés, la France est le premier État membre pour le nombre de candidats à l’expérimentation européenne.
Avec tous les acteurs, ainsi qu’avec vous-même, monsieur le sénateur, je veillerai à la bonne avancée du dossier dans sa globalité et à la mise en place de modalités pertinentes pour chaque secteur, et notamment pour le secteur agricole.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je ne doutais pas que la Blonde d’Aquitaine du Gers…
M. Jean-Michel Baylet. La Blonde d’Aquitaine se trouve surtout dans le Tarn-et-Garonne !
M. Jacques Mézard. … pouvait sauver la production bovine de nos départements. (Sourires.)
Je me félicite qu’une nouvelle méthode de calcul des empreintes carbone soit en cours d’élaboration. Vous savez comme moi, et comme nous tous, que, si nous ne prenons pas de dispositions spécifiques pour l’élevage, l’affichage environnemental aura des effets contraires à ce que nous souhaitons tous : nous pénaliserons durement la production agricole et en particulier l’élevage. Il est donc indispensable que la nouvelle méthode de calcul tienne vraiment compte des spécificités de l’élevage et des qualités de nos prairies.
compteurs communicants fabriqués en france
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch, auteur de la question n° 534, adressée à M. le ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.
Mme Mireille Schurch. Je commencerai par citer les propos qu’a tenus le ministre du redressement productif lors de la présentation des trente-quatre plans de reconquête industrielle : « Redonner le goût de l’industrie et de l’innovation, engager la bataille du Made in France, c’est d’abord croire en nous-mêmes. C’est poser un regard résolument optimiste sur les capacités de notre pays à se redresser. Une nation sans industrie est une nation qui se condamne au déclin. »
Parmi les plans de reconquête industrielle, le plan « Réseaux électriques intelligents » a vocation à consolider les filières électriques et informatiques françaises sur de nouveaux marchés à forte croissance et créateurs d’emplois. Le plan doit également permettre d’accompagner le déploiement des compteurs communicants Linky. Le compteur Linky est un fleuron de la technologie française. Il a été mis au point en France, sur le site montluçonnais de l’entreprise Landis+Gyr, dont je suis fière. Ses équipes de recherche et développement ont travaillé avec ERDF pour en faire un produit disposant de composants et de logiciels évolutifs.
Le Premier ministre a récemment annoncé le lancement d’un appel d’offres en vue d’installer les compteurs de nouvelle génération d’ici à 2018. L’entreprise montluçonnaise est bien placée pour répondre à un tel appel d’offres, car elle dispose de l’historique du produit et de l’expertise nécessaire. C’est un atout sérieux tant pour la qualité de la production que pour la réactivité en cas de problème ou de réajustement. La fabrication de ce compteur en France permettra de créer de nouveaux emplois, directs et indirects, et répondra à l’exigence de privilégier les circuits courts, qui nous préoccupe dorénavant. L’enjeu est donc à la fois social, environnemental et industriel.
Alors que nous entrons maintenant dans la phase opérationnelle de consultation, monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur trois points.
Le premier est le volume de l’appel d’offres. La consultation fait état de trois millions de compteurs installés au cours de la première étape, de 2015 à la mi-2017. Cela pose la question de l’importance de l’investissement nécessaire à la production. Le PDG, que j’ai rencontré, estime à 700 000 euros la ligne de fabrication d’un million de compteurs. Un volume trop restreint ne permettrait pas de procéder dès maintenant à une automatisation suffisante, et il pourrait donc être difficile de se lancer dans une production en plus grand nombre.
Le deuxième point concerne les conditions générales contractuelles d’achat. ERDF cherche, et c’est bien naturel, à sécuriser sa commande. Elle ne doit pas pour autant, dans un contexte économique fragile, imposer des contraintes excessives. Elle doit notamment veiller à ce que les garanties demandées aux entreprises restent au plus près des réalités.
Enfin, et je relaie ici, vous le comprenez bien, la parole des habitants, des industriels et des élus du bassin de Montluçon, il est plus que jamais indispensable de doper l’outil industriel en utilisant le dynamisme et les savoir-faire existants en accord avec les exigences de développement durable.
La mise en fabrication imminente des compteurs communicants représente une grande opportunité pour notre industrie, comme vous allez sans doute nous le confirmer, monsieur le ministre. Ma question est donc double : comment le Gouvernement entend-il valoriser les industriels qui font le choix de produire en France ? Comment accompagner ERDF dans ses choix afin que les critères imposés dans le cadre contractuel restent raisonnables, c’est-à-dire qu’ils permettent à nos entreprises de prendre des risques sans pour autant remettre en cause leur pérennité ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Martin, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. La transition énergique illustre la volonté du Gouvernement de structurer des filières industrielles ancrées dans nos territoires, créatrices d’emplois durables et non délocalisables.
Le déploiement du compteur intelligent dit « Linky » permettra une connaissance fine du profil de consommation des usagers et rendra possible la transmission d’ordres et d’informations relatives aux consommations. Mais le compteur Linky représente également – vous l’avez souligné, madame la sénatrice – un projet industriel pour nos entreprises et nos territoires ; votre question le met parfaitement en exergue.
Comme vous le savez, le Premier ministre a annoncé en juillet dernier un premier déploiement par ERDF de trois millions de compteurs d’ici à 2016. Tous les logements seront équipés d’ici à 2020 ; environ trente-cinq millions de compteurs seront ainsi installés. Un appel d’offres sera lancé très prochainement par ERDF. Le déploiement devrait avoir lieu sur tout le territoire.
Les investissements nécessaires à ce projet, estimés par ERDF à 4,5 milliards d’euros, seront financés par les gestionnaires de réseaux de distribution. Grâce aux gains de productivité réalisés, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, le TURPE, n’augmentera pas. Il n’y aura donc aucun impact pour l’usager, conformément à l’engagement pris par le Gouvernement.
La concertation avec l’ensemble des parties prenantes, menée par le Gouvernement de novembre 2012 à février 2013, a notamment permis de souligner les forts enjeux industriels attachés à ce projet pour de nombreuses entreprises implantées en France, ainsi que ses conséquences bénéfiques pour l’emploi. ERDF estime en effet que le projet Linky serait en mesure de créer environ 10 000 emplois directs et indirects en France. L’enjeu est donc très important.
Les appels d’offres qui seront réalisés par ERDF respecteront les principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, incompatibles avec des critères de sélection des offres fondés sur l’origine de l’entreprise candidate ou la localisation de sa production. Pour autant, cette procédure ouverte, transparente et non discriminatoire laisse toutes leurs chances aux entreprises françaises ou produisant en France, qui sont d’ores et déjà très bien positionnées sur ce marché d’avenir.
Parmi les trois entreprises retenues au titre de l’appel d’offres de cette expérimentation, deux disposaient de sites de production en France : l’entreprise Landis+Gyr installée à Montluçon, à laquelle vous avez fait référence, madame la sénatrice, et l’usine d’Itron, installée à Chasseneuil-du-Poitou, beau village bien connu du Sénat grâce à la personnalité qui y est attachée.
Le déploiement de Linky est un exemple parfait de la mise en œuvre de la transition énergétique et écologique dans notre pays. Cette transition doit porter ses fruits en matière tant de protection de l’environnement que – vous l’avez souligné – de développement économique et industriel de nos territoires.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je n’en attendais pas moins de votre part. Vos propos constituent un encouragement pour nos entreprises. Nous devons promouvoir nos savoir-faire et développer la production française de qualité. Nous espérons que nos entreprises seront retenues dans le cadre de l’appel d’offres.
L’entreprise Landis+Gyr m’a informé de son succès en Grande-Bretagne : elle vient de signer un contrat de 710,5 millions d'euros avec British Gas. Cela fait trois ans que, sur le site de Peterborough, les deux entreprises travaillent de conserve au développement de compteurs intelligents. Suite à l’annonce de la signature du contrat, Landis+Gyr prévoit de doubler ses effectifs en Grande-Bretagne, où elle emploie déjà six cents personnes. Elle compte accroître ses capacités de production non seulement pour permettre le déploiement prévu par British Gas mais également pour répondre aux demandes de ses autres clients britanniques. Pour sa part, British Gas a annoncé la création de plus de mille nouveaux postes d’experts en énergie intelligente dès 2014.
Monsieur le ministre, serons-nous capables de faire mieux ou du moins aussi bien ? Je compte sur vous, et j’attends une réponse favorable pour nos industriels.