M. le président. L'amendement n° 11 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 19, présenté par M. Calvet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer les mots :
en encadrant les conditions dans lesquelles le juge peut être saisi d’un recours en annulation ou d’une demande de suspension,
La parole est à M. François Calvet.
M. François Calvet. Compte tenu de la discussion que nous avons eue précédemment, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 19 est retiré.
L'amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Bizet, Bas et Revet, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après le mot :
suspension
insérer les mots :
en particulier par le versement d’une provision préalable à toute action engagée par une association ou une fondation,
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Les dispositions de cet amendement ne sont pas étrangères à celles que j’ai défendues tout à l’heure.
Je voudrais d’abord tout reconnaître, et souligner, le rôle important des associations et fondations qui œuvrent pour la protection de l’environnement. Il n’est bien entendu pas question de remettre en cause ce rôle.
Toutefois, il convient de constater que beaucoup d’élus locaux en charge de l’urbanisme sont fréquemment confrontés à des situations conflictuelles avec ces associations. C’est particulièrement vrai dans le département de la Manche, où l’importance du contentieux relatif à l’application de la loi littorale pose réellement problème.
Or il n’est pas facile d’entamer une procédure pour requête abusive, car le juge considère souvent que le bénéficiaire d’une autorisation de construire peut la mettre en œuvre, les recours en annulation n’ayant pas de caractère suspensif.
Au travers de cet amendement, je propose donc que les associations et les fondations s’acquittent d’une provision avant d’ester en justice.
En effet, on ne peut pas laisser les élus seuls face au comportement de certaines associations qui, par leurs excès, mettent les projets de développement des collectivités en grande difficulté. Il s’agit ici uniquement de revenir sur les abus, non sur la procédure elle-même, ce que devrait permettre cette provision préalable à toute action engagée par une association ou une fondation.
M. le président. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin et Fortassin, Mme Laborde et MM. Hue, Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall, Vendasi et Collombat, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après le mot :
suspension
insérer les mots :
en particulier en exigeant des requérants un intérêt suffisamment direct à agir tenant aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de leur bien susceptibles d’être affectées,
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Cet amendement vise à inscrire dans la loi une définition de l’intérêt à agir, ainsi que le propose, d’ailleurs, le rapport Labetoulle, dont nombre d’entre vous, mes chers collègues, ont dit le plus grand bien.
Il s’agit pour nous d’une préoccupation ancienne, largement partagée : les délais de traitement des recours en matière d’urbanisme, ainsi que certaines pratiques, reconnues largement sur toutes les travées, qui consistent à détourner de leur finalité les recours administratifs dans une intention de nuire ou de bloquer systématiquement, posent problème. La durée des litiges est en effet un frein considérable à la mise en œuvre de projets de constructions, et le coût économique et social de ce frein est connu de tous.
L’habilitation qui est donnée au Gouvernement ouvre la voie à une évolution des règles du contentieux urbanistique et administratif qui devrait normalement accroitre sa fluidité, ainsi que nous le souhaitons.
Le premier objectif doit donc être de réduire les délais. Le rapport Labetoulle préconise pour ce faire la cristallisation des moyens soulevés par les demandeurs, un transfert de compétence aux cours administratives d’appel pour les recours portant sur les grosses opérations et la possibilité de régulariser le permis de construire en cours d’instance.
Néanmoins, il s’agit surtout de lutter contre les recours abusifs. Le contentieux administratif repose sur le droit dont dispose chaque citoyen de contester devant le juge une décision qui lui fait grief ou qui ne respecte pas le principe de légalité ou une norme hiérarchiquement supérieure.
Il me semble donc que nous devons exiger des requérants un intérêt suffisamment direct à agir. Il s’agit de lutter contre des recours à caractère mafieux ou contre ceux de voisins irascibles ou d’associations opportunistes, autant de contentieux qui servent en tout cas des intérêts souvent très particuliers, parfois bien cachés et détachés de l’intérêt général ou d’un préjudice réel.
Il est exact que plusieurs réformes sont intervenues pour durcir par petites touches les conditions de recevabilité du recours, notamment en matière d’urbanisme. C’est le cas de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, qui exige le dépôt des statuts d’association antérieurement à l’affichage de la demande du pétitionnaire. Cette loi a d’ailleurs fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité, et le Conseil constitutionnel a donné raison au législateur.
Toutefois, nous considérons qu’il faut aller plus loin aujourd'hui, en liant clairement l’intérêt à agir aux inconvénients ou dangers que présente un projet de construction pour les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance d’un bien. De même, il faut, vous l’avez d’ailleurs dit, madame la ministre, lier l’intérêt à agir au mépris des règles d’urbanisme. Tel est l’objet de cet amendement.
Bien sûr, nous souhaitons que ces recours abusifs soient lourdement sanctionnés financièrement.
Vous avez précisé, madame la ministre, que les associations agréées pour la protection de l’environnement n’auront pas vocation à être l’objet de ces restrictions. Je me permets de vous dire que si nombre d’entre elles œuvrent indéniablement pour l’intérêt général et mènent un travail considérable, d’autres, en revanche, n’ont malheureusement pas les mêmes qualités. (M. Rémy Pointereau applaudit.)
M. Jean Bizet. Exactement !
M. le président. Le sous-amendement n° 37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 13 rectifié, alinéa 5
Supprimer les mots :
tenant aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de leur bien susceptibles d’être affectées,
La parole est à Mme la ministre.
Mme Cécile Duflot, ministre. Si vous le voulez bien, monsieur le président, j’en profiterai pour donner d'ores et déjà l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 12 rectifié et 13 rectifié.
Monsieur Bizet, vous avez compris que le Gouvernement souhaite lutter de façon efficace contre les recours malveillants.
M. Jean Bizet. C’est facile !
Mme Cécile Duflot, ministre. En revanche, la disposition que vous proposez ne me paraît pas de nature à atteindre cet objectif, et cela pour deux raisons.
Tout d’abord, les recours malveillants sont en général l’œuvre de ceux que M. René Vandierendonck a pu qualifier de « raquetteurs », qui ont les moyens leur permettant de payer la consignation que vous demandez.
À l’inverse, les associations ou fondations qui ont un intérêt légitime à intervenir ne sont pas nécessairement dotées des moyens qui leur permettraient alors d’ester en justice. Il me semble donc inadéquat de les obliger à consigner des sommes avant de pouvoir ester en justice.
Par ailleurs, la question de la constitutionnalité d’un tel dispositif peut se poser. Je ne me prononce pas sur celle-ci, mais je vous rappelle, et c’est dans ce cadre contraignant que nous avons fait travailler la commission Labetoulle, que le droit d’ester en justice est un droit constitutionnel extrêmement conservé.
M. Jean Bizet. Nous ne le contestons pas !
Mme Cécile Duflot, ministre. Pour des raisons tant de fond que d’opportunité, le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 12 rectifié.
Pour ce qui est de l’amendement n° 13 rectifié de M. Mézard, j’ai indiqué lors de la présentation du projet de loi que nous souhaitions effectivement préciser l’intérêt à agir. Je ne suis donc pas contre le fait de mentionner dans le projet de loi d’habilitation qu’il s’agit de définir l’intérêt à agir.
En revanche, je propose un sous-amendement n° 37 tendant à supprimer les mots : « Tenant aux conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de leur bien susceptibles d’être affectées ». Nous avons déposé ce sous-amendement pour les raisons que vous avez évoquées vous-même, monsieur Mézard.
Au passage, cela me permettra de répondre aux quelques interventions ayant porté sur la question de la durée de rédaction des ordonnances : tout d’abord, nous allons travailler de façon très précise pour que le texte des ordonnances soit extrêmement robuste juridiquement ; par ailleurs, comme j’en ai pris l’engagement devant les membres de la commission des affaires économiques, je serai à votre disposition pour vous les présenter avant leur signature par le Président de la République, si vous le souhaitez, afin de respecter l’engagement de concertation pris par le Gouvernement.
Monsieur Mézard, je vous propose donc un sous-amendement visant à reprendre les premiers termes de votre amendement et à en retrancher les derniers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 12 rectifié, Mme la ministre a excellemment résumé ce que j’ai développé ce matin devant la commission, laquelle a émis un avis défavorable, tant pour les raisons évoquées par Mme Duflot que pour le risque d’inconstitutionnalité qui risque d’apparaître.
Pour ce qui est de l’amendement n° 13 rectifié de M. Mézard, que le Gouvernement propose de sous-amender, nous pensions qu’il revenait au Gouvernement de préciser le contenu d’une ordonnance. Tenir le stylo du ministre ne nous semblait pas conforme à l’esprit des ordonnances. Aussi, nous avions décidé de demander à M. Mézard de retirer son amendement. À défaut, nous y aurions été défavorables.
Par ailleurs, à mon sens, le sous-amendement du Gouvernement tend à confirmer que notre appréciation de ce matin était bonne, puisqu’il s’agit de restreindre le champ de l’amendement n° 13 rectifié.
La commission n’a pas eu le temps de se réunir. Toutefois, cette solution me semblant acceptable, j’émets à titre personnel un avis favorable sur le sous-amendement n° 37 et sur l’amendement n° 13 rectifié ainsi amendé.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Je soutiens l’amendement n° 12 rectifié et l’amendement n° 13 rectifié, mais pas le sous-amendement n° 37 du Gouvernement.
S’agissant de l’amendement n° 12 rectifié, je m’inscris en faux contre la démonstration que vient de faire Mme la ministre.
Il ne s’agit pas d’ériger un barrage à l’accès des associations et des fondations aux prétoires, puisque seul le juge pourra demander le versement, en quelque sorte, d’un cautionnement à l’occasion d’une demande faite par ces personnes morales tendant à l’annulation d’un permis de construire. Ce dispositif est d’autant plus utile que le rapport Labetoulle tend à prévoir qu’une association ou n’importe quel requérant qui aurait fait un recours manifestement malveillant ayant entraîné des dommages pour un propriétaire soit condamné à verser une indemnité.
Or, si la procédure va jusqu’au bout, comment voulez-vous que cette disposition puisse être effective dans le cas où l’association ou la fondation qui a formulé un recours malveillant n’a pas les moyens d’indemniser le propriétaire ?
C’est la raison pour laquelle il faut faire confiance au juge : s’il estime, en raison des moyens développés à l’appui de la demande, que celle-ci est malveillante, il admettra alors la demande reconventionnelle du propriétaire tendant, avant le jugement final, à ce qu’une caution soit déposée. Le requérant sera ainsi suffisamment alerté sur la nécessité de renoncer à son recours et il se désistera, car il aura peur de devoir payer.
Le dispositif aura ainsi été efficace : il aura permis, conformément à l’objet du texte du Gouvernement, d’accélérer la construction quand des entraves malveillantes ont été mises à l’exécution d’un permis de construire. Pour ma part, j’attache beaucoup d’importance à cet amendement, que j’ai cosigné, et auquel le Gouvernement oppose des arguments qui ne tiennent pas, me semble-t-il.
S’agissant de l’amendement n° 13 rectifié présenté par M. Mézard et un certain nombre d’autres collègues, je voudrais souligner que, si la fin de la phrase qu’il tend à insérer est retirée, il ne veut plus rien dire.
M. Jean Bizet. Exactement !
M. Philippe Bas. De toute évidence, aucun recours n’est admissible s’il n’y a pas un intérêt à agir direct. Demander à Mme la ministre de prendre par ordonnance des mesures tendant à préciser que l’intérêt à agir doit être direct ou ne rien dire du tout revient exactement au même.
C’est la raison pour laquelle il faut absolument maintenir l’amendement n° 13 rectifié dans sa rédaction initiale.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.
M. Jean Bizet. Je ne reprendrai pas les excellentes explications de mon collègue Philippe Bas. Je m’étonne simplement que M. Mézard et moi-même soyons ainsi traités ; M. Mézard peut-être un peu moins durement, car il est un peu mieux considéré, du moins pour le moment… (Sourires.)
Cela étant, je ne comprends pas comment vous pouvez estimer, madame la ministre, que mon amendement est excessif. Force est de constater qu’un certain nombre d’associations font des recours abusifs en rafale. Si elles doivent au préalable provisionner une certaine somme, comme l’a bien expliqué Philippe Bas, cela aura au moins le mérite de clarifier les choses et de calmer ces excès.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Mme la ministre a bien compris où je voulais en venir. Quant à moi, j’ai bien compris où elle voulait aller. (Sourires.)
S’agit-il d’un glissement progressif vers le plaisir, madame la ministre ? (Exclamations amusées.)
Je crois que, contrairement à ce qui vient d’être dit, le sous-amendement a quand même un intérêt.
M. Jean Bizet. Très limité !
M. Jacques Mézard. Non, cher collègue, car il y aura des ordonnances et, comme Mme la ministre l’a souligné, celles-ci nous seront préalablement présentées. Ensuite, il y aura un projet de loi, qui va nous être soumis à la rentrée. Nous saurions alors nous souvenir d’un mauvais traitement qui nous aurait été infligé sur ce point extrêmement important…
Je vais donc accepter le sous-amendement, sous les réserves prospectives que je viens d’émettre.
Pour rejoindre les explications qui viennent d’être données, madame la ministre, je dirai que, si nous mesurons bien l’intérêt de nombre d’associations et l’importance que vous leur accordez, nous avons aussi tous connu, en tant qu’élus, des comportements tout à fait irresponsables de certaines d’entre elles, qui tendent à tout bloquer, y compris dans des domaines où vous-même souhaiteriez intervenir de manière plus poussée.
Prenons, par exemple, le secteur de l’éolien, des centrales photovoltaïques et des énergies renouvelables, même s’il n’a pas de rapport direct avec le logement. Sur le terrain, nous sommes victimes de recours systématiques d’associations pseudo-environnementales – c’est ainsi que je les appelle. Bien entendu, nous devons respecter le droit d’ester en justice, mais il faut que ceux qui en abusent sachent que ce n’est jamais en toute impunité.
M. Jean-Jacques Mirassou. Je suis d’accord !
M. Jacques Mézard. À mon sens, les textes, que ce soient les ordonnances ou le projet de loi qui interviendra à l’automne, doivent nous permettre d’aller au bout de cette logique. Sinon, certains bloqueront encore de manière tout à fait inacceptable nombre de projets qui sont indispensables pour faire avancer notre pays normalement – pour ne pas dire plus vite, car on sait que, en moyenne, les recours en France peuvent durer jusqu’à huit ans, soit le double de ce qui est observé dans les pays voisins. Cet élément doit aussi nourrir notre réflexion.
La démarche et les propos du Président de la République resteraient lettre morte si nous n’allions pas dans ce sens.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Chevènement, Collin, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall, Vendasi et Collombat, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
impôts
insérer les mots :
ainsi que dans les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique définies par décret pris en application du septième alinéa de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Je suis déjà intervenu dans la discussion générale sur l’absence de référence commune en matière de zonage et, surtout, sur l’absence d’une définition claire de la notion de « zone tendue », qui a souvent obscurci nos débats sur nombre de dispositifs relatifs au logement.
Dans son rapport public de 2012, la Cour des comptes elle-même avait appelé à une réflexion nouvelle sur les priorités géographiques, en relevant que « la politique de concentration des financements sur les zones les plus tendues s’appuyait sur des instruments inadaptés, parfois même contre-productifs ». Pour ma part, je serais tenté d’ajouter : « Sans dimension prospective ».
De ce fait, ainsi que je l’ai souvent dit, on ne tient pas suffisamment compte des besoins dans des zones considérées comme détendues, là où certaines communes doivent aussi maintenir sur place une population en situation précaire, revitaliser les centres anciens et rendre plus attractifs leurs territoires.
M. Philippe Bas. Exactement !
M. Jacques Mézard. En tout état de cause, et c’est l’objet de cet amendement, il faudrait aussi que l’on arrive à s’accorder une fois pour toutes sur la notion de « zone tendue ».
En effet, j’ai étudié les différentes applications techniques et juridiques de cette notion : il y a la définition de la loi dite « MOLLE », c'est-à-dire de la loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, retenue dans le projet de loi initial, qui renvoie aux zones A et B1 de l’annexe à l’arrêté du 29 avril 2009 ; il y a celle du dispositif d’investissement locatif Duflot, qui s’applique aux zones A bis, A et B1 et aux communes de la zone B2 ayant fait l’objet d’un agrément ; il y a celle qui a été retenue par le décret encadrant l’évolution des loyers, qui concerne trente-huit agglomérations ; il y a celle de la dernière loi en faveur du logement social, qui a élargi la notion de zones tendues ; enfin, il y a celle de la taxe sur les logements vacants, qui vise les communes appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants, avec un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, soit vingt-huit agglomérations.
Toutes ces définitions se recouvrent-elles, madame la ministre ? Non !
L’Assemblée nationale a retenu celle qui est utilisée pour la taxe sur les logements vacants. Pourquoi pas ? Néanmoins, je m’interroge sur le bien-fondé de la limite minimale de 50 000 habitants. Il existe, dans de nombreux départements, des zones moins peuplées qui, en raison de contraintes particulières, n’en connaissent pas moins un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel.
Notre amendement vise donc à inclure dans le dispositif les communes de plus de 15 000 habitants en forte croissance démographique qui n’appartiennent pas à une agglomération ou à un EPCI de plus de 50 000 habitants, dans lesquelles la loi du 18 janvier 2013 a imposé une obligation de 20 % de logements sociaux.
Je sais que la commission a donné un avis favorable sur cet amendement, mais, madame la ministre, je vous enjoins de nous faire des propositions, à l’occasion des textes que vous allez prochainement nous présenter, pour atténuer la complexité de ces dispositifs de zones. Nous avons grand besoin d’une simplification en la matière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. La commission a effectivement émis un avis favorable.
Le problème des villes-champignons de 15 000 habitants présentant une forte augmentation de population avait déjà été abordé lors de l’examen de la loi Duflot 1.
Cette mesure nous paraît relever d’une très bonne idée. Néanmoins, nous nous interrogeons concernant le nombre de villes concernées. Mais peut-être Mme la ministre pourra-t-elle nous donner un chiffre précis.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. La démonstration de M. Mézard a été très claire : la question des zonages semble en effet sans solution. L’Assemblée nationale a décidé de se fonder sur le zonage relatif à la taxe sur les logements vacants, dont le décret vient de sortir.
Vous avez raison, monsieur Mézard : il faut clarifier cette question et, en effet, les limites de zone soulèvent différents problèmes.
Le travail en cours au niveau des observatoires du logement doit être mené jusqu’au bout pour que nous disposions de données fiables et comparables. Le pilotage par un comité scientifique de statisticiens nous permettra de disposer de données comparables du nord au sud de la France et d’adapter les dispositifs en fonction de critères et non de zones prédéfinies.
Le Gouvernement a émis un avis favorable.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 20, présenté par M. Calvet et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Supprimer cet alinéa.
L'amendement n° 22, présenté par M. Calvet, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
, et moyennant des mesures compensatoires
La parole est à M. François Calvet, pour présenter ces deux amendements.
M. François Calvet. Par l’amendement n° 20, je propose de revenir sur la suppression de l’obligation de réaliser des places de parking en fonction du nombre de logements, qui est très dangereuse, comme notre collègue Alain Richard l’a dit fort justement.
À Paris ou dans les autres grandes villes, l’exonération de l’obligation de réaliser des places de parking en sous-sol des immeubles de bureaux ne soulève pas exactement les mêmes problèmes, car il y a moins de voitures qui circulent du fait d’une meilleure desserte par les transports en commun. En revanche, dans les villes moyennes, dispenser le promoteur de réaliser les parkings risque de faire peser une charge sur la collectivité parce que c’est finalement elle qui devra les réaliser.
L’amendement n° 22 est un amendement de repli, qui tend à maintenir les mesures compensatoires, c’est-à-dire la possibilité de percevoir la taxe pour non-réalisation de places de stationnement.
L’une ou l’autre de ces mesures doit être appliquée. Sans cela, nos communes seront obligées de supporter la dépense.
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Bérit-Débat, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après les mots :
dans lesquelles
insérer les mots :
, compte tenu de la qualité de la desserte en transports collectifs ou de la densité urbaine,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 20 et 22.
M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. Je rappelle à M. Calvet qu’il avait retiré ces deux amendements en commission. En conséquence, la commission n’a pas émis d’avis. Je confirme que, à titre personnel, j’y suis défavorable, d’autant que j’ai ensuite été amené à faire des propositions pour préciser et encadrer le texte écrit nuitamment à l’Assemblée nationale.
Je vous invite donc, monsieur Calvet, à retirer de nouveau ces amendements.
L’amendement n° 30 vise justement à préciser les conditions de dérogation aux obligations en matière de création d’aires de stationnement, de manière que soient prises en compte la qualité de la desserte par les transports collectifs ou la densité urbaine.
Ces précisions permettent de répondre à des questions posées par certains membres de la commission lors de sa dernière réunion.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Cet avis me permettra également de répondre à l’intervention de M. Richard.
Aujourd’hui, il n’est pas possible de transformer en logements un immeuble de bureaux, alors même qu’il est enchâssé dans des habitations, parce que le PLU prévoit deux places de parking par logement créé. Il faudrait donc creuser un parking sous-terrain, ce qui impliquerait des coûts totalement incompatibles avec la réalisation de l’opération.
Un élu qui souhaiterait malgré tout délivrer le permis de construire se verrait opposer une seule réponse : « Révisez votre PLU et rendez-vous dans deux ans ! »
Nous avons identifié cette situation en plusieurs endroits.
Ce qu’il est prévu de faire figurer dans les ordonnances permettra de lever cette difficulté, étant entendu que le dispositif ne s’applique que si les élus le souhaitent. Nous aurons le temps, au moment de la rédaction des ordonnances, de définir les critères selon lesquels il est possible à l’élu de déroger au PLU sans engager sa révision.
C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 20 et 22 et favorable à l’amendement n° 30, qui précise l’orientation donnée par le législateur à l’ordonnance.
Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, on ne peut ignorer que 5 millions de mètres carrés de bureaux sont actuellement vacants. Quant aux besoins en parkings, ils sont très variables, et il ne s’agit pas de décider que, dans telle ou telle zone, il n’y aura plus du tout d’obligation de réaliser des parkings. Il s’agit de prendre en compte certaines situations. Par exemple, je vous invite à visiter différents quartiers de Paris : sur de nombreux immeubles, on voit des affiches annonçant : « Places de parking à louer ». Cela montre tout simplement que des habitants n’ont pas de véhicule et n’ont donc pas l’usage de ces parkings.
Autre exemple : nous avons besoin, notamment en Île-de-France et en Rhône-Alpes, de logements étudiants. Aujourd’hui, dans certaines communes, il est obligatoire, pour chaque studio d’étudiant, de réaliser une place de parking, alors même que l’immense majorité des étudiants ne disposent pas d’une voiture ! Aussi, pour réaliser une résidence étudiante, malgré toute sa bonne volonté, un élu obtiendra comme seule réponse de l’administration : « Révisez votre PLU ! »
Il est nécessaire de mettre en place cette disposition. Ainsi, sans obligation, l’élu pourra, s’il le souhaite et après avoir étudié la situation, délivrer des permis de construire.
Une étude d’impact spécifique sera réalisée pour l’ordonnance. Elle prendra en compte les éléments évoqués par M. Richard, mais sous une forme allégée puisque nous sommes dans le cadre d’une étude d’impact pour un projet de loi d’habitation et non pour les ordonnances elles-mêmes avec des dispositions précises.