M. le président. L'amendement n° 24, présenté par MM. Gilles et Milon, Mmes Bouchart et Bruguière, M. Cardoux, Mme Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, M. Fontaine, Mmes Giudicelli et Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Lorrain et Pinton, Mme Procaccia, M. Savary et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
sauf pour les couples parents d’enfants scolarisés de moins de 11 ans où le père et la mère exercent une activité professionnelle
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. Cet amendement concerne les couples de parents d’enfants scolarisés de moins de onze ans.
Lorsque ces couples exercent une activité professionnelle, ils ne doivent pas être dissuadés d’embaucher en tant que particuliers employeurs. Comme l’ont dit mes collègues, la mesure prévue par le texte risque d’entraîner, à terme, l’augmentation du travail au noir.
Par ailleurs, le recrutement de personnes à domicile contribue à l’allégement des contraintes pesant sur les collectivités locales et les établissements scolaires en matière de garde d’enfants.
M. le président. L'amendement n° 54, présenté par M. Marseille, Mme Dini, M. Amoudry, Mme Jouanno, MM. Roche et Vanlerenberghe, Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 3
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Les cotisations et contributions sociales visées au premier alinéa du présent article peuvent toutefois être calculées, d’un commun accord entre l’employeur et le salarié, sur une assiette égale, par heure de travail, à une fois la valeur horaire du salaire minimum de croissance applicable au premier jour du trimestre civil considéré :
« 1° Soit lorsque le particulier employeur donne mandat à une association ou entreprise déclarée au titre de l’article L. 7232-1-1 du code du travail et certifiée auprès d’une norme qualité reconnue par l’État aux titres des articles L. 115-27 à L. 115-33 du code de la consommation et de l’article R. 7232-9 du code du travail ;
« 2° Soit lorsque le particulier employeur emploie un salarié exerçant à titre principal une autre activité professionnelle telle que définie à l’article R. 613-3 du code de la sécurité sociale.
« Préalablement à l’embauche du salarié ou de l’intervenant à domicile, l’employeur lui fournit un document d’information, clair et renseigné, et recueille son accord signé sur les conséquences en matière de prestations contributives en espèce, dans le cadre de l’option forfaitaire. »
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 54 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion commune ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. En première lecture, la commission s’en était remise à la sagesse du Sénat sur l’amendement présenté par M. Jean-Pierre Godefroy à l’article 15. Par cohérence, elle maintient cet avis de sagesse, qui vaut évidemment pour les amendements quasi identiques nos 44 et 69.
Sur l’amendement n° 23, la commission a émis un avis défavorable. Je le rappelle une fois de plus, la suppression de l’assiette forfaitaire, telle qu’elle est prévue par l’article 15, ne remet pas en cause les exonérations de cotisations existant en faveur des employeurs dits fragiles, au sens de l’article L. 241–10 du code de la sécurité sociale, parmi lesquelles figurent les personnes âgées. Ce rappel invalide un certain nombre d’arguments qui ont été mis en avant.
La commission est également défavorable à l’amendement n° 24. Nous ne souhaitons pas que réapparaissent de nouvelles niches au sein des dispositions aujourd’hui en discussion.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
La principale mesure d’incitation à l’emploi à domicile, c’est l’avantage fiscal. Or celui-ci n’est absolument pas remis en cause : les particuliers employeurs pourront continuer, dans la limite d’un plafond donné, à bénéficier d’une réduction d’impôt de 50 %.
Dans ces conditions, faut-il réintroduire un dispositif comportant deux options, dont l’une fragilise les droits des salariés ? Honnêtement, je ne crois pas qu’il soit utile de conserver cette « niche dans la niche » et d’établir une différence entre les salariés.
Les salariés concernés sont essentiellement des professeurs qui donnent des cours à domicile. (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Gilbert Barbier. Non !
M. André Reichardt. Pas seulement !
Mme Marisol Touraine, ministre. Je réponds à M. Godefroy, qui a pris cet exemple.
Si les familles ont les moyens ou souhaitent faire l’effort d’employer des professeurs à domicile, ceux-ci doivent pouvoir bénéficier des droits correspondant à leur rémunération. Compte tenu de l’importance que ces parents attachent à l’éducation de leurs enfants, je ne crois pas que le dispositif que vous proposez, monsieur Godefroy, soit plus incitatif que celui qui est présenté par le Gouvernement, lequel, je le répète, prévoit une déduction forfaitaire de 0,75 euro par heure travaillée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote sur l'amendement n° 14 rectifié.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la ministre, quand le Parlement s’exprime presque unanimement en faveur d’une solution – et celle-ci me paraît à la fois pondérée et fondée, ce que vous ne contestez d’ailleurs pas –, c’est qu’il y a un problème.
L’expérience nous le prouve, si l’on veut voir le travail au noir prospérer, il suffit d’adopter ce que vous nous proposez ! Du reste, pour ma part, je regrette les dispositifs antérieurs, qui ont permis de faire régresser ce fléau.
Je vous demanderai donc simplement, conformément au sens de mon intervention au moment du vote sur l’ensemble de ce texte en première lecture, de ne pas toujours dire « non » au Parlement et d’écouter les arguments de sagesse avancés par les sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. L’établissement d’un rapport sur cette mesure a été prévu. J’espère qu’il récapitulera la masse financière effectivement économisée et le nombre d’emplois détruits. Ainsi, l’an prochain, nous serons nombreux ici pour rétablir les dispositions antérieures !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.
(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. En conséquence, les amendements identiques nos 44 et 69, satisfaits, ainsi que les amendements nos 23 et 24 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 55, présenté par Mme Dini, MM. Marseille, Vanlerenberghe et Amoudry, Mme Jouanno, M. Roche, Mme Létard et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
I.- Alinéa 7, première phrase
Remplacer les mots :
par décret
par les mots :
à 15 %
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 55 est retiré.
Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
5
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme.
La liste des candidats établie par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires suppléants : MM. Jean-Pierre Sueur, Jacques Mézard, Alain Anziani, Mme Éliane Assassi, MM. Jean-Patrick Courtois, Jean-Jacques Hyest et Michel Mercier.
Suppléants : M. Christophe Béchu, Mme Esther Benbassa, MM. Michel Delebarre et Yves Détraigne, Mme Virginie Klès, M. Jean-Yves Leconte et Mme Catherine Troendle.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Questions cribles thématiques
réforme de la politique agricole commune
M. le président. L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la réforme de la politique agricole commune.
L’auteur de la question et le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.
Je vous rappelle que ce débat est retransmis en direct par Public Sénat ainsi que par France 3, et qu’il importe que chacun des orateurs respecte son temps de parole.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Conseil européen s’est réuni les 22 et 23 novembre dernier pour négocier le budget de la politique agricole commune pour les années 2014 à 2020.
Les points principaux de la discussion ont porté sur le montant global de la PAC, sur le plafonnement des aides directes et sur leur dégressivité.
La PAC actuellement en vigueur est particulièrement inéquitable. En France, les 160 plus grandes exploitations accaparent 123 millions d’euros, autant que ce que touchent les 100 000 plus petites fermes.
La convergence des droits à paiement unique au niveau européen risque de nuire bien plus aux petites et moyennes exploitations d’élevage ou de polyculture-élevage qu’aux grandes cultures.
La proposition que vous avez faite, monsieur le ministre, de primer les premiers hectares – ce qui reviendrait, pour la France, à quasiment doubler la prime aux exploitations jusqu’à 50 hectares – semble aller dans le bon sens et pourrait permettre de prendre davantage en compte un certain nombre de critères sociaux et environnementaux dans la répartition de ces aides.
Cependant, depuis le début des années quatre-vingt-dix, le plafonnement et la dégressivité des aides ont toujours été rejetés par le Conseil des ministres de l’agriculture lorsque la Commission les proposait. Actuellement, il semblerait que le Royaume-Uni, l’Allemagne, la République tchèque et la Slovaquie soient les pays qui s’y opposent le plus.
Monsieur le ministre, où en sont, à ce jour, les négociations et pouvez-vous nous assurer que vous trouverez une majorité qualifiée pour suivre votre proposition ?
Par ailleurs, cette dernière n’est pas officiellement chiffrée. Pouvez-vous nous communiquer des simulations claires, de manière à permettre aux agriculteurs de notre pays d’anticiper ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Monsieur le sénateur, je dois d’abord rappeler que les négociations européennes sur la politique agricole sont indissociables des négociations globales sur le budget.
Aujourd'hui, en Europe, deux grandes politiques recouvrent à peu près 80 % du budget européen, à savoir la politique agricole et la politique de cohésion. La France, par la voix du Président de la République, a défendu l'idée qu’il ne fallait pas mettre de côté cette politique de cohésion, en particulier pour défendre notre agriculture.
Tel est le message que notre pays a porté à l'échelle européenne, telle a été notre stratégie. Cette position adoptée par le Président de la République a placé la France au cœur des négociations.
Le débat sur le budget européen s'est engagé sur la base des propositions qu’avait formulées, voilà deux mois, la présidence chypriote du Conseil de l’Union européenne, puis M. Van Rompuy. La négociation initiale portait sur un budget de 963 milliards d'euros, avant que celui-ci ne remonte à 983 milliards d'euros.
Dans ce cadre, la France défend l’idée de la politique agricole. Bien entendu, il s’agit d’un enjeu important pour notre pays, mais là n’est pas l’unique raison : la PAC est également un enjeu majeur pour l'Europe tout entière. Agriculture et alimentation sont et seront des éléments stratégiques pour se préparer au monde de demain.
La France occupe une position particulière dans ce débat, mais elle porte également une ambition pour l'Europe. C'est pourquoi nous avons adopté une attitude extrêmement claire par rapport aux propositions qu'a faites M. Van Rompuy.
S’agissant de la politique agricole en tant que telle, sa réforme devrait s’engager au moment où les perspectives financières seront adoptées dans le cadre du Conseil européen.
Comme vous l’avez souligné, les discussions portent sur trois sujets majeurs.
Le premier d’entre eux est la convergence, aux niveaux européen et national, des taux d’aide à l’hectare, de manière qu’ils soient identiques pour tous et découplés. Cette question, essentielle, est au cœur du débat européen. Au nom de la France, j’ai proposé que l’on puisse primer les premiers hectares plus que les suivants. Une note arrêtant la position de la France en la matière est prête et sera envoyée à l'ensemble des ministres du Conseil européen et aux députés européens. Vous en serez vous-mêmes destinataires, mesdames, messieurs les sénateurs.
Le « verdissement » de la PAC est le deuxième sujet de discussion. La France est un grand pays et pèse aujourd'hui pour que la question de l'environnement soit posée à l'échelle européenne. La politique environnementale doit garder une cohérence d’ensemble et l’on ne peut laisser les pays membres de l’Union faire des choix différents les uns des autres en la matière.
M. Jean-Pierre Sueur. Très bien !
M. Stéphane Le Foll, ministre. Si l'on veut développer une agriculture durable, c'est à l'échelle de l'Europe tout entière qu’il faut agir.
Troisième sujet de discussion : la question du plafonnement. Celle-ci suscite des oppositions extrêmement fortes de la part de certains États membres, notamment l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Espagne. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour la réplique.
M. Joël Labbé. Je vous remercie, monsieur le ministre, de la clarté de votre réponse, clarté au demeurant relative. (Rires sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.) Mais je comprends bien que, à ce stade, vous ne puissiez pas être plus précis…
Vous nous dites que le plafonnement des aides directes suscite des réticences. Pour notre part, nous proposerions de fixer ce plafond à 100 000 euros par exploitation, et non à 300 000 euros, comme l’envisage la Commission. Cette mesure permettrait, dans l’Europe à Vingt-sept, de récupérer entre 5 milliards d’euros et 6,5 milliards d’euros par an sur 40 milliards d’euros, soit plus de 850 millions d’euros pour la France.
Cette marge de manœuvre nous donnerait la possibilité de redistribuer les soutiens publics de manière plus équitable entre les États membres, mais également entre les agriculteurs, tout en facilitant l’émergence de pratiques agricoles moins polluantes et en soutenant l’emploi dans les zones rurales. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le ministre, le dernier sommet européen s’est soldé par un échec des négociations sur les crédits de la PAC. Vous venez de dire que la ligne défendue par la France a été entendue. Les 8 milliards d’euros supplémentaires mis sur la table vendredi constituent certes un petit progrès par rapport à la proposition initiale, mais on est loin du compte ! Je rappelle que le budget de la PAC était de 421 milliards d’euros au cours de la période précédente.
Vous appelez à ne pas dramatiser cet échec. Sans doute vaut-il mieux qu’un mauvais accord, mais, en attendant, les agriculteurs ne savent toujours pas de quoi leur avenir sera fait.
Les éleveurs, en particulier, sont très inquiets. Le secteur laitier est appelé à une grande mutation avec la suppression des quotas en 2015. Les producteurs de lait sont aujourd’hui loin de vivre dignement de leur travail. Ce secteur et celui des bovins à viande apparaissent comme les plus fragilisés par le projet de réforme de la PAC.
D’abord, la convergence des paiements directs entre agriculteurs leur est défavorable. Vous avez émis l’idée de doubler la prime aux cinquante premiers hectares. Cette proposition progresse-t-elle auprès de vos collègues européens ? Les éleveurs laitiers, quant à eux, avancent l’idée d’une aide dédiée à la vache laitière.
Certaines aides seront-elles encore couplées demain, comme la prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes ? Sans cette incitation, le cheptel allaitant pourrait être fortement réduit.
Ensuite, des craintes se font également jour quant au « verdissement » de la PAC. Le gel de 7 % des surfaces serait une catastrophe pour les petites exploitations disposant de faibles surfaces pour l’alimentation animale. Des exonérations sont-elles prévues ?
Enfin, la discussion autour du deuxième pilier est, pour les éleveurs, en particulier ceux qui sont situés en zone de montagne, capitale.
Monsieur le ministre, l’élevage, c’est la richesse de nos territoires ruraux ; le maintien de cette activité suppose des mesures spécifiques dans la PAC à venir, notamment pour réguler les marchés. Que pouvez-vous dire aujourd’hui, au sujet des négociations, qui serait de nature à rassurer les éleveurs, lesquels voient par ailleurs les crédits du plan de modernisation des bâtiments d’élevage fondre en 2013 dans le projet de loi de finances ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)
MM. Jean-Pierre Sueur et Jean-Claude Frécon. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur le sénateur, je ne peux pas vous laisser dire que l'échec des négociations est un élément de dramatisation. Rappelez-vous les discussions sur les perspectives financières précédentes : elles ont duré plus d'un an ! Même si, c’est un fait, nous ne sommes parvenus à un compromis, nous avons connu des crises bien plus importantes que celle que nous vivons actuellement.
Si vous avez dans l’idée que cette première réunion sur les perspectives financières devait déboucher sur un accord, alors, évidemment, vous en tirerez la conclusion qu’elle a été un échec. Certes, ces négociations n’ont pas abouti à un accord, mais n’oubliez pas qu’elles portent sur les perspectives financières de l'Europe pour les sept prochaines années ! Il ne faut pas tromper : elles prendront du temps.
S’agissant de la question financière, nous avons obtenu 8 milliards d'euros supplémentaires. Même si c’est insuffisant, c’est un progrès, et nous n’en resterons pas là, bien entendu.
Monsieur le sénateur, pareillement, vous faites une erreur lorsque vous évoquez la situation de l’élevage. Par définition, la convergence des aides du premier pilier telle qu’elle est proposée aujourd'hui a plutôt pour objet de favoriser les zones d'élevage et d'herbage, puisque cela fait partie du paquet « verdissement ». Par ailleurs, dans la mesure où cette convergence consiste à fixer un taux moyen pour l'ensemble des aides distribuées sur tout le territoire national, les éleveurs dont le taux d’aide à l’hectare est aujourd’hui inférieur à ce taux moyen verront celui-ci augmenter. Aussi, permettez-moi de corriger vos propos.
Alors, que faut-il faire ? La question se pose non pas seulement pour l'élevage allaitant, mais pour l'ensemble de l'élevage, en particulier la polyculture-élevage. Là, les risques sont importants. C’est pourquoi, afin de protéger la filière et d’y protéger l’emploi – c’est un enjeu majeur –, j’ai proposé, d’une part, de primer les premiers hectares, d’autre part – et j’invite chacun à bien mesurer la portée de cette annonce –, de maintenir les aides couplées : il est hors de question de changer quoi que ce soit s’agissant du couplage des aides.
Je conclurai mon propos en évoquant le plafonnement. Là encore, ne vous y trompez pas, monsieur le sénateur : ce n'est pas parce qu'on plafonne qu’on fait du verdissement ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Mazars, pour la réplique.
M. Stéphane Mazars. Je peux moi aussi témoigner, après mon collègue Gilbert Barbier, de l’inquiétude des agriculteurs en général, et en particulier de ceux dont l’activité principale est l’élevage, a fortiori en zone de montagne, comme dans mon département de l’Aveyron.
Nous sommes toutefois convaincus par les intentions affichées par le chef de l’État et le Gouvernement, qui, dans la négociation du budget de l’Union européenne, ont clairement fait de la défense de la PAC un enjeu prioritaire.
Il est vrai que, si une réduction des dépenses s’impose aussi au niveau européen, les agriculteurs français ne doivent pas être la variable d’ajustement de la négociation budgétaire entre les Vingt-sept.
Monsieur le ministre, votre réponse à mon collègue Gilbert Barbier s’inscrit dans le droit fil de cette ambition dont témoigne le Gouvernement en faveur de nos territoires, de nos territoires de montagne, notamment, et de ces acteurs indispensables que sont les agriculteurs.
Parmi les orientations de cette nouvelle PAC, je souligne la possibilité qui serait donnée aux États membres d’élaborer des sous-programmes bénéficiant de taux d’aide supérieurs afin de répondre aux besoins cruciaux des jeunes agriculteurs pour assurer leur installation, des petits exploitants, des zones de montagne et des circuits d’approvisionnement courts.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet. Je voudrais revenir sur le débat relatif au cadre financier pluriannuel pour souligner – je le dis très clairement – la maladresse dont a fait preuve la France dans ces négociations. En cherchant à obtenir le maintien à la fois des crédits de la politique agricole commune, des fonds de cohésion et des fonds de compétitivité, et ce dans un contexte de modération budgétaire, je crains malheureusement que, à vouloir courir quatre lièvres à la fois, si vous me permettez cette expression, monsieur le ministre, vous n’en attrapiez aucun.
Si mon analyse est exacte, les crédits de la PAC diminueront d’un montant compris entre 22 milliards d’euros et 25 milliards d'euros.
Première question : quel est le montant en deçà duquel vous considérerez qu’on agite devant vous un chiffon rouge, ce qui vous conduira à rompre les négociations, sachant que les décisions doivent être prises à l’unanimité ?
J’évoquerai à présent la filière laitière.
La France a été à l’initiative du paquet « lait », qui a prévu la contractualisation et le regroupement des producteurs. Le commissaire Cioloş rappelait d’ailleurs récemment l’influence de notre pays sur ce sujet, mais pour s’étonner presque aussitôt de constater le peu de progrès accomplis à cet égard en France, notamment.
Je comprends la révolte des producteurs laitiers, dont la presse a dernièrement rendu compte. Il reste que ceux qui réclament des tarifs administrés se trompent : l’Europe ne reviendra pas sur les quotas laitiers ou sur les prix de référence ; on peut parfois le regretter, mais c’est ainsi. Il faut donc chercher d’autres remèdes, d’autres pistes, notamment celle du rééquilibrage des relations entre les producteurs-éleveurs et les industriels distributeurs. À mes yeux, l’avenir de la filière laitière se joue en ce moment même.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour favoriser le regroupement des producteurs ? Que compte faire le Gouvernement pour s’impliquer davantage sur ce dossier, afin de ne pas laisser la main à l’Autorité de la concurrence ? On le constate, celle-ci reste très crispée sur ces questions, alors que, de l’autre côté du Rhin, plusieurs pays ont déjà résolu les difficultés qu’ils éprouvaient dans leurs relations avec elle.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre. Monsieur le sénateur, en premier lieu, je tiens à vous dire que la stratégie précédente, qui consistait à proposer à l’Europe que la France réduise sa contribution au budget de 200 milliards d’euros tout en défendant le maintien du budget de la PAC, était, pour le coup,…
M. Jean-Pierre Sueur. Maladroite !
M. Stéphane Le Foll, ministre. … sans doute, en tout cas nous conduisait à un isolement complet sur cette question, au sein de l’Europe. Cette stratégie aurait fait payer deux fois tout le monde !
M. Jean-Pierre Sueur. Bien sûr !