M. François Marc. Eh voilà !
M. Serge Dassault. Ce système ne s’appliquerait qu’aux entreprises marchandes.
En 2009 – ce sont des chiffres à retenir –, la totalité des charges sur salaires a représenté une somme de 393 milliards d’euros.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Et les produits financiers une somme de 317 milliards d’euros !
M. Serge Dassault. Le financement des retraites ainsi que l’indemnisation du chômage et des accidents du travail représentent un montant de 176 milliards d’euros. Les charges affectées aux dépenses maladie ou famille, financées par la CSG et la CRDS, se sont, quant à elles, établies à 217 milliards d’euros, hors déficit.
Je vous propose de garder seulement, comme charges sur les salaires, les 176 milliards d’euros acquittés par les entreprises, qui financent les retraites, les indemnisations du chômage et des accidents du travail. Les charges pesant sur les salariés des entreprises seront donc réduites de 55 %, puisque, au lieu de payer 393 milliards d’euros, les entreprises ne s’acquitteront que de 176 milliards d’euros de charges sur salaires.
Mme Catherine Génisson. Et le reste ?
M. Serge Dassault. Vous remarquerez que ces charges, d’un montant de 45 % du salaire, seront toutes patronales, si bien que, désormais, tous les salaires seront nets.
Mme Patricia Schillinger. Oui, mais le reste ?
M. Serge Dassault. Cette opération facilitera les embauches, qui coûteront moins cher, les augmentations de salaire, qui coûteront moins cher, elle réduira les coûts de production et elle permettra d’augmenter les ventes.
Comment payer le reste, me direz-vous ?
M. Jean-Pierre Caffet, rapporteur pour avis. Eh oui !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. On augmente les dividendes ?
M. Serge Dassault. Les 217 milliards d’euros restants seront payés par entreprises elles-mêmes sous forme de frais généraux, comme les loyers ou les factures EDF. Elles le feront à l’aide d’une formule qui favorisera les entreprises de main-d’œuvre, donc le travail, employant de nombreux salariés. Les charges seront ainsi réparties entre les entreprises utilisant beaucoup de main-d’œuvre, qui payeront moins, et celles, comme les entreprises de services, qui réalisent un gros chiffre d’affaires avec peu de personnel, qui payeront plus.
Il en ira de même pour les entreprises qui emploient du personnel étranger ou qui délocalisent, car la formule de réduction des charges ne prendra en compte que le personnel français. Avec cette formule retranchant la masse salariale du chiffre d’affaires, ces entreprises payeront plus de charges. Les entreprises qui délocalisent et celles qui importent seront donc défavorisées.
M. Jean-Pierre Plancade. C’est une révolution que vous nous proposez ! (Sourires.)
M. Serge Dassault. Pour cela, il faudra mettre en place ce que j’appelle un coefficient d’activité, couvrant toutes les entreprises marchandes. Chaque société calculera ses charges en multipliant ce coefficient par son chiffre d’affaires moins sa masse salariale. C’est là qu’intervient l’astuce : plus la masse salariale est importante, moins l’entreprise paie ; moins la masse salariale est importante, plus elle paie. Cela favorise l’activité et encourage la réduction du chômage.
Mes chers collègues, je ne vous livrerai pas aujourd'hui pas la formule complète, car elle est trop compliquée, mais je vous la donnerai plus tard !
M. Ronan Kerdraon. Nous faisons face à une rafale de chiffres ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Serge Dassault. Je tiens tout de même à vous signaler qu’un coefficient de 6,6 permet d’obtenir une somme de 217 milliards d’euros, c’est-à-dire le total de la part payée pour les branches famille et maladie de la sécurité sociale.
Néanmoins, l’intérêt de l’opération vient également de ce qu’il sera possible d’y intégrer le déficit de la sécurité sociale, quel qu’il soit. Si ce déficit se monte à 20 milliards d’euros, votre dépense sera non plus de 217 milliards d’euros, mais de 237 milliards d’euros. Si le déficit est moins élevé, cette somme diminuera.
Cette formule permettra donc de rapporter à l’État 20 milliards d’euros de plus, et partant de réduire le déficit budgétaire.
Un rapide calcul permet de nous apercevoir d’un point très important sur le plan financier : une simple augmentation de 0,6 point du coefficient d’activité rapporte 20 milliards d’euros à l’État. C’est une sorte de TVA, qui n’en est pas une mais qui rapporte beaucoup parce que son assiette est large et son taux faible.
Il suffira donc de faire passer le coefficient d’activité de 6,6 à 7,2 pour obtenir 20 milliards d’euros supplémentaires et équilibrer ainsi le budget de la sécurité sociale, quel qu’il soit.
Voilà, madame la ministre, ce que je voulais vous proposer : la baisse de 55 % des charges sur salaires – ce n’est pas rien, tout de même ! – sans que cela ne coûte un euro à l’État et sans mise en place d’une quelconque TVA sociale – cela, c’est fini, ça ne sert à rien, on n’en parle plus.
Une telle solution permettra d’équilibrer le budget de la sécurité sociale, sans qu’il soit nécessaire d’augmenter les d’impôts. Les charges des entreprises de main-d’œuvre seront moins lourdes et celles des entreprises de services plus élevées, sans aucune conséquence pour le budget de l’État. Le chômage pourra diminuer du fait de l’augmentation du nombre d’embauches, la croissance reprendra grâce à l’amélioration du pouvoir d’achat provoquée par la hausse des salaires, sur lesquels pèseront non plus 100 % de charges, mais seulement 55 %.
Je trouve, madame la ministre, que cette mesure méritait de vous être proposée.
M. Ronan Kerdraon. C’est le pays des merveilles !
M. Serge Dassault. Je présenterai une proposition de loi sur ce sujet, qui est quelque peu complexe. J’espère que vous la défendrez ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali.
Mme Samia Ghali. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 traduit la priorité que constitue le secteur médico-social pour le Gouvernement, et ce malgré un contexte budgétaire difficile.
Ainsi, avec une progression de l’ONDAM médico-social de l’ordre de 4 %, quelque 650 millions d’euros de mesures nouvelles seront consacrés à la prise en charge des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
Cette décision traduit dans les faits et les chiffres les engagements pris par le Président de la République.
Au cours des cinq dernières années, les budgets furent trop souvent guidés par la volonté de faire des effets d’annonce. Par exemple, les objectifs de création de places prévues par le plan solidarité grand âge avaient été gonflés, et la lenteur de leur réalisation avait été insuffisamment prise en compte.
A contrario, le PLFSS pour 2013 donne la priorité aux établissements et services, en finançant un taux de reconduction de leurs moyens de 1,4 %, ce qui est beaucoup par rapport à la quasi-stagnation qu’ils ont subie auparavant.
En outre, un effort important est consacré à la médicalisation des établissements, ce qui devrait permettre de créer, à terme, 7 000 postes de personnels soignants.
Pour autant, les plans de création de places ne sont pas délaissés, puisque les crédits prévus permettront l’ouverture de 3 200 places pour les personnes âgées et de 3 000 places pour les personnes handicapées.
Je ne reviendrai pas sur l’examen des quatre principaux articles rattachés spécifiquement au secteur qui nous occupe, ni sur les deux articles complétés par nos collègues de l’Assemblée nationale. Les éléments afférents ont été abondamment développés par notre excellent rapporteur, Ronan Kerdraon, dont je tiens à saluer ici la qualité des travaux.
M. Ronan Kerdraon. Il le mérite ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Samia Ghali. J’insisterai en revanche sur un point, la mise en chantier du dossier de la dépendance et l’annonce d’un projet de loi sur la prise en charge de la perte d’autonomie, prévu pour le début de l’année 2014 par le Gouvernement.
Promise par Nicolas Sarkozy en 2007, indéfiniment repoussée tout au long du quinquennat, cette réforme avait été définitivement abandonnée en septembre 2011.
Il était urgent d’agir et de rassurer nos anciens et leurs familles, qui sont de plus en plus nombreux à être confrontés à des situations difficiles et douloureuses.
Il nous faut donc rapidement dégager des moyens supplémentaires, afin, d’une part, de réduire le reste à charge des personnes hébergées en établissement et, d’autre part, de remédier aux difficultés des départements pour financer l’allocation personnalisée d’autonomie.
Le présent PLFSS prévoit donc, d’ores et déjà, 700 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées à partir de 2014, prévus par l’article 16.
Soyons clairs, mes chers collègues, la progression des cotisations pour assurer le financement était attendue. Réagissant aux conclusions du rapport parlementaire sur la dépendance rédigé par la députée UMP Valérie Rosso-Debord, qui préconisait la souscription obligatoire à une assurance privée, François Hollande, à l’époque candidat, avait affiché sa position sans détour, lors d’une émission télévisée du 12 février dernier, lorsqu’il déclara : « Il n’y aura pas de contrat d’assurance privée ». Lors de cette interview, il annonça en outre, non sans courage, l’instauration d’une cotisation dépendance pour l’ensemble des Français.
Que prévoit donc l’article 16 ? Au 1er avril 2013, les retraités imposables, dont l’impôt dépasserait 61 euros, seront soumis à un prélèvement de 0,3 %. Tous ne seront donc pas touchés – c’est important de le souligner ! – par cette contribution, contrairement à ce qu’on veut nous faire croire ici ou là.
Concrètement, pour une personne seule percevant une pension de 1 300 euros, le montant prélevé sera de 3,90 euros par mois en 2014. Rapportons cela aux inquiétudes des familles : je crois que c’est tout de même une somme dérisoire, mes chers collègues !
La mesure est bien une mesure solidaire et juste. Globalement, les retraités se disent prêts d’ailleurs à participer à un tel effort de solidarité si l’objectif est clairement défini. Or c’est le cas. Il y a aujourd'hui un gouvernement qui agit !
C’est aussi le sens des dispositions de l’article 41, qui visent à fluidifier les parcours de soin des personnes âgées pour leur permettre de recevoir les bons soins au bon moment et de choisir librement d’aller dans un établissement ou de rester à domicile.
Une telle disposition inaugure la politique de prévention, qui devra être développée et qui permettra de réduire le coût global de la dépendance. Le chantier de la dépendance est engagé. Le Gouvernement agit avec courage et justice. C’est, me semble-t-il, ce qu’attendent aujourd'hui les Français ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai entendu tout à l’heure les déclarations de Mmes Touraine et Bertinotti sur les priorités du projet de loi de financement de la sécurité sociale en matière de famille, mais je demeure frappée par l’indigence du texte sur le sujet. Si je devais qualifier ce budget, j’emploierais volontiers l’adjectif « vide ».
Vide, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale l’est d’un point de vue textuel, puisque seuls deux articles concernent la famille.
Vide, il l’est également d’un point de vue financier. Les 400 millions d’euros de recettes votés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative de cet été ont été intégralement dépensés dans l’éphémère augmentation de l’allocation de rentrée scolaire, déjà été oubliée par tous. En outre, vous n’avez pas cherché à réduire le déficit de la branche, ni à présenter des mesures plus ambitieuses.
J’ai été également très étonnée de découvrir votre position sur la taxe spéciale sur les conventions d’assurance, la TSCA, pour les contrats d’assurance maladie dits « responsables et solidaires » ; vous vous êtes résignés à son maintien alors que vous étiez farouchement opposés au mécanisme. Je le rappelle, l’an dernier, la commission avait déposé un amendement – je salue M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, qui en avait pris l’initiative – tendant à la suppression du dispositif. Ayant toujours été hostile à cette taxe, parce que ce sont les assurés qui, je le répète, paient le surcoût, je vous aurais suivi avec plaisir dans cette voie, même s’il s’agissait d’une des propositions du candidat Hollande. Cependant, pour l’instant, il n’y a rien sur la TSCA !
Je voudrais faire plusieurs remarques concernant les dépenses.
Tout d’abord, le versement en tiers payant du complément mode de garde pour les familles modestes recentre les problématiques d’accueil des jeunes enfants et du choix du mode de garde par leurs parents. J’y suis favorable.
J’en profite pour souligner l’action volontariste du gouvernement de François Fillon, qui aura tenu son engagement d’atteindre 200 000 places d’accueil, dont la moitié en accueil collectif.
La garde à domicile demeure le mode de garde le plus répandu, en raison, d’une part, de la souplesse qu’il offre sur l’ensemble du territoire et, d’autre part, de la flexibilité de ses horaires, plus importante qu’en accueil collectif. Toutefois, c’est aussi le mode le plus coûteux pour les parents. À cet égard, je crains les conséquences du tour de vis donné à la niche « nounou ». (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)
En effet, le projet de loi table naïvement sur l’hypothèse que les familles vont conserver leurs modes de garde et les mêmes modalités de paiement. Or il n’en sera rien. En touchant au crédit d’impôt, vous allez démolir le vecteur fiscal qui a permis de lutter en partie contre le travail dissimulé. Il est donc réaliste de prévoir un retour aux pratiques de fraude et de travail non déclaré, qui étaient si répandues avant l’adoption de la loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
De nombreux parents qui ont déjà énormément de difficultés pour trouver une nounou qui accepte d’être déclarée – car telle la réalité en région parisienne, dans mon département et dans ma commune ! – vont revenir au système D, en déclarant moins d’heures ou en optant pour un tarif plus faible.
En Espagne, où le même dispositif a été voté récemment, le volume mensuel d’heures de travail déclarées des nourrices a diminué de 30 %. Cette mesure aura pour conséquence immédiate de faire basculer dans l’illégalité plusieurs milliers de salariés, ainsi que les entreprises spécialisées les employant, et de diminuer les rentrées fiscales. C’est le contraire de l’objectif visé !
En outre, je crains que cela ne touche de plein fouet les femmes, plus encore les femmes seules, car le surenchérissement du coût incitera celles qui perçoivent les salaires les plus modestes à rester chez elles, les éloignant ainsi un peu plus de l’emploi.
À mon avis, vous roulez à contresens, et à grande vitesse. C’est dangereux. Vous allez provoquer un accident démographique en remettant en cause un élément important de la politique familiale.
Un dernier point a attiré toute mon attention et m’a d’autant plus surprise qu’il n’a pas sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, me semble-t-il. Je parle du congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Plusieurs ministres l’ont évoqué pour s’en féliciter.
Or une telle transformation, adoptée par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, me paraît prématurée. Le conseil des ministres vient d’adopter votre projet de mariage entre personnes de même sexe ; le texte devrait être débattu dans quelques mois au Parlement. Non seulement cela constituerait un cadre juridique plus approprié que le PLFSS, mais, en plus, vous n’anticiperiez ainsi pas sur des dispositions souhaitées par une minorité de personnes et que vous voulez opposer à toutes les familles.
Et je n’évoque pas les aspects juridiques d’une telle disposition. En reconnaissant le rôle du ou de la partenaire de la mère en matière de congé, vous niez totalement le père naturel de l’enfant, qui peut, lui aussi, vouloir contribuer à l’accueil de ce dernier. Qui arbitrera ce conflit ? Quels en seront les recours ? Telles sont les raisons pour lesquels, avec mes collègues, nous souhaitons la suppression de cet article.
Enfin, et même si ce point ne relève pas formellement de la branche famille, je souhaite terminer mon intervention sur la contraception des mineures. La limite minimale à quinze ans me paraît incompréhensible. Préférez-vous qu’une jeune fille âgée de quatorze ans et quelques mois soit obligée de subir une IVG plutôt que de rembourser ses contraceptifs ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Nos collègues médecins devraient vous confirmer qu’ils ont déjà dû prendre très souvent en charge des jeunes filles de moins de quinze ans. J’avais déposé un amendement visant à répondre à ce problème, mais le couperet de l’article 40 de la Constitution est tombé, tel celui d’une guillotine.
L’âge de quinze ans a peut-être été choisi parce que c’était auparavant l’âge minimal pour se marier. Toutefois, ce n’est plus le cas aujourd'hui. Et il me paraît très dangereux de limiter les mesures relatives à la contraception des mineures aux jeunes filles de plus de quinze ans.
Contrairement à ce que vous avez déclaré cet après-midi, votre projet de budget pour la branche famille ne traduit absolument pas votre volonté d’aider les familles et de continuer à les inciter à avoir des enfants, ces enfants qui, jusqu’à présent, étaient notre richesse ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je centrerai essentiellement mon propos sur la branche vieillesse. Je tiens d'ailleurs à souligner ici l’excellent travail de Mme la rapporteur Christiane Demontès.
Le redressement de la situation financière de la branche vieillesse s’inscrit parfaitement dans la stratégie globale des finances publiques que le Gouvernement a décidé de mettre en œuvre.
Le budget qui nous est proposé aujourd’hui pour la branche vieillesse est responsable : le déficit de la branche retraite, tous régimes de base confondus, sera ramené à 5,4 milliards d’euros, contre 7,1 milliards d’euros en 2012. De même, le déficit du Fonds de solidarité vieillesse s’élèvera à 2,6 milliards d’euros, contre 4,1 milliards d’euros l’année précédente. On ne peut que s’en féliciter. Ainsi, le Gouvernement a pris la pleine mesure de la gravité de la situation, en adoptant des mesures de justice tout en réduisant les déficits.
Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale prend en compte les difficultés financières croissantes que connaissent certains régimes de retraite de base autres que le régime général. Plus d’un milliard d’euros de recettes supplémentaires bénéficiera à la branche vieillesse du régime des exploitants agricoles, à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérables et au régime de retraite spécial des industries électriques et gazières.
Dès sa prise de fonctions, le Gouvernement a montré sa volonté de rétablir la justice sociale. En effet, au mois de juillet dernier, il a élargi aux personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans la possibilité de partir à la retraite dès 60 ans lorsqu’elles ont cotisé une carrière complète. Il s’agit d’une mesure d’équité pour les assurés ayant cotisé la durée nécessaire.
D’autres dispositions mettent fin à des injustices. Je pense à l’attribution de points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles contraints de cesser leurs activités pour infirmité ou maladie grave, ainsi qu’aux nouvelles règles relatives aux pensions de réversion pour les professions médicales et le régime des marins.
Permettez-moi de m’attarder sur la mesure essentielle qui concerne les exploitants agricoles. Aujourd’hui, les non-salariés agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave et bénéficiaires soit d’une pension d’invalidité, soit d’une rente d’incapacité, soit de l’allocation adulte handicapé, l’AAH, ne s’ouvrent des droits qu’à la retraite forfaitaire. Ils n’ont aucun droit à la retraite proportionnelle, qui constitue pourtant, avec la pension forfaitaire, la retraite de base des non-salariés agricoles.
Conformément à l’engagement pris par le Président de la République, l’article 60 prévoit d’attribuer des points gratuits de retraite proportionnelle aux exploitants agricoles ayant dû cesser leur activité en raison d’une maladie ou d’une infirmité grave.
Les périodes d’interruption de l’activité feront l’objet d’une validation au titre de la retraite proportionnelle des agriculteurs et de l’attribution d’un nombre minimal de points gratuits.
Les non-salariés concernés sont les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole, ainsi que les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux, qui bénéficient de la retraite proportionnelle. Selon l’étude d’impact, le nombre forfaitaire de points de retraite proportionnelle sera de vingt-trois pour les chefs d’exploitation et de seize pour les collaborateurs d’exploitation et les aides familiaux. Ces points seront même attribués pour les périodes d’invalidité antérieures à la publication de la loi.
Une telle mesure de justice sociale prouve la volonté du Gouvernement de prendre en compte la condition sociale de nos agriculteurs et de protéger certains salariés lors de leur retraite. Je vous en remercie, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Je souhaiterais également évoquer un problème qui me tient particulièrement à cœur : celui de l’allocation équivalent retraite, l’AER. À mon avis, ce dispositif, qui était essentiel, doit être revu. L’allocation, qui repose sur la solidarité nationale, répondait à une urgence sociale, celle que vivent des dizaines de milliers de personnes sans revenu ayant commencé leur carrière professionnelle très tôt, disposant des trimestres de cotisation requis, souvent au chômage depuis plusieurs années, mais n’ayant pas atteint l’âge de 60 ans pour partir en retraite. Le dispositif a, je le rappelle, permis à des milliers de chômeurs de ne pas sombrer dans la précarité.
Lors du vote du projet de loi de finances pour 2008, la majorité de droite décidait la fin de l’AER pour le 1er janvier 2009 sous prétexte d’économies et surtout au nom du fameux « travailler plus pour gagner plus ». Le calcul était simple : ces anciens allocataires allaient vite retrouver un travail et ne coûteraient ainsi plus rien à la collectivité nationale.
Malheureusement, la crise est passée par là en 2008 et elle a été particulièrement violente pour les plus de 55 ans. Nombre d’entre eux ont été incités à partir en pleine tourmente, pensant sauver une entreprise ou libérer une place pour les plus jeunes, confortés dans l’idée que l’AER allait les aider à passer le cap douloureux d’un chômage de longue durée.
Hélas, ces personnes ont vite découvert avec effroi qu’elles pouvaient tout juste prétendre à l’Allocation spécifique de solidarité, l’ASS. Ainsi, dans l’attente de leur retraite, la moitié des seniors concernés n’ont perçu que 50 % des 960 euros de revenu maximum prévus par l’AER.
Devant l’ampleur de la contestation, mais aussi face à la réalité économique, le gouvernement Fillon a finalement prorogé l’AER à deux reprises, en 2009 et en 2010. L’allocation transitoire de solidarité, l’ATS, a été mise place au 1er janvier 2012 ; elle est en théorie destinée à résoudre les difficultés de ces chômeurs en fin de droit.
Preuve est faite, jour après jour, que ce dispositif manque sa cible, puisque, comme par hasard, moins de 10 % des allocataires potentiels en sont bénéficiaires.
Aujourd’hui, nous devons agir vite, et je fais confiance au Gouvernement pour qu’il trouve une solution.
Ce PLFSS doit être l’occasion de réparer une faute magistrale de la droite. Il doit aussi permettre de rappeler à nos concitoyens qu’ils peuvent compter sur la solidarité nationale.
Par ailleurs, je me réjouis de la décision du Gouvernement d’entreprendre, en 2013, une réforme globale du système des retraites. Celle-ci permettra non seulement de remettre à plat ces dispositifs, mais aussi de combler les déséquilibres et les inégalités.
Il faudra, par exemple, revenir sur la prise en compte de la pénibilité dans le droit à la retraite. Il s’agit là d’un enjeu d’équité de grande importance.
On constate de fortes inégalités d’espérance de vie entre catégories socioprofessionnelles. Or les critères de mise en œuvre de la retraite pour pénibilité se sont révélés trop restrictifs. Le nombre de demandes de retraite pour pénibilité se situe d’ailleurs bien en deçà des prévisions établies en 2010.
De plus, la situation de la branche vieillesse risque fortement de se dégrader à l’horizon 2017, en l’absence de mesures structurelles nouvelles décidées en 2013.
Une réforme globale des retraites est donc très attendue. L’issue de la concertation prévue au premier semestre de 2013 sur le fondement des projections démographiques et financières établies à la fin de 2012 par le Conseil d’orientation des retraites, le COR, permettra de prendre de nouvelles mesures.
Pour finir, ces dernières années, nous avons vu les déficits s’accumuler sans qu’apparaissent des réponses à la hauteur des problèmes.
Après cinq PLFSS de régression, nous passons enfin à un PLFSS de protection, tout en redressant les comptes sociaux.
Le PLFSS présenté par le Gouvernement réduit les injustices faites à certains salariés au moment de leur départ à la retraite, aux familles vulnérables, aux Français en situation difficile et aux femmes.
Face au contexte financier particulièrement difficile et à l’inquiétude grandissante des Français, l’ambition du PLFSS porte sur la protection, le redressement et la modernisation. Il répond aux attentes sociales de justice et de proximité des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon intervention portera sur le secteur médico-social et sur la politique de la famille, mon confrère Alain Milon ayant déjà développé les arguments de notre groupe sur les dispositions du volet sanitaire.
Le secteur médico-social intéresse des chapitres particulièrement importants de ce PLFSS : plus de 13 milliards d’euros seront notamment consacrés aux établissements pour personnes âgées et personnes handicapées. L’ONDAM médico-social progressera d’ailleurs en 2013 de 4 %, donc plus vite que l’ONDAM global.
En période de disette budgétaire – le mot est faible –, cela intrigue. Ce gouvernement semblerait faire mieux que les précédents, sans propositions nouvelles sur la dépendance. À y regarder de plus près, toutefois, l’affaire est plus subtile que cela. (Marques d’ironie sur les travées du groupe socialiste.)