M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 2 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que l’avis du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 1 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 335 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 168 |
Pour l’adoption | 177 |
Contre | 158 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. François Patriat applaudit également.)
Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié, présenté par Mmes Jouanno et Farreyrol, MM. Lorrain, Gaillard et Duvernois, Mmes Bruguière et Giudicelli et MM. B. Fournier, J.P. Fournier, Pointereau, Grignon, Hérisson, Laufoaulu, Dallier, Revet, Grosdidier, J. Gautier et P. Leroy, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Après l'article 2, il est inséré un article 3 ainsi rédigé :
« Art. 3. - Sont suspendues à compter du 1er janvier 2015 la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu'à trois ans comportant :
« 1° soit une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques de catégorie 2 au sens de la partie 3 de l'annexe VI du règlement CE n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1970/2006 ;
« 2° soit un perturbateur endocrinien présentant de probables effets sérieux pour la santé humaine, identifié dans les conditions fixées à l'article 59 du Règlement (CE) n°1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n°793/93 du Conseil et le règlement (CE) n°1488/94 de la Commission ainsi que la directive 75/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission. »
La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Cet amendement reprend la proposition n° 10 du rapport de la mission commune d'information portant sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique. Il vise à interdire l'ensemble des substances cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques de catégorie 2, ainsi que les perturbateurs endocriniens dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons, aux jeunes enfants et aux femmes enceintes.
Je l’ai déjà dit, il n’est pas acceptable, selon moi, de considérer qu’un dispositif médical est moins dangereux qu’un jouet, en particulier lorsque ce dispositif est justement destiné aux prématurés et aux jeunes enfants.
Madame la ministre, vous nous avez expliqué tout à l’heure qu’il est totalement impossible, à l’heure actuelle, d’utiliser des dispositifs médicaux sans bisphénol A, en l’occurrence sans CMR de catégorie 2, dont l’innocuité ait été vérifiée. Ce serait donc trop tôt.
En rédigeant cet amendement, j’ai pris soin d’en limiter le champ d’application. Il s’agit donc bien des dispositifs médicaux à destination des nourrissons – je pense tout particulièrement aux prématurés – et des femmes enceintes.
J’ai également veillé à en fixer la date d’application au 1er janvier 2015.
Je rappelle qu’une telle disposition a été votée à l’unanimité par la mission commune d’information sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique.
Permettez-moi également de vous rappeler, madame la ministre, les conclusions du rapport de l’OPECST de juillet 2011, rédigé par notre collègue Gilbert Barbier : « Par précaution, il ne paraît pas disproportionné de proposer d’éliminer tout perturbateur endocrinien des produits destinés aux bébés et aux femmes enceintes. » Très honnêtement, pourquoi faire des rapports et les adopter à l’unanimité, si c’est pour s’asseoir ensuite sur leurs préconisations ?
Vous avez refusé d’inscrire dans la loi le principe de santé publique de non-exposition, ou de limitation, aux perturbateurs endocriniens, sans même chercher à en discuter ! Dans ces conditions, comment pouvez-vous encore parler de santé publique ou de santé environnementale ?
Aujourd’hui, vous avez l’occasion de montrer que vous voulez vraiment agir dans ce domaine, pour protéger les publics cibles prioritaires. MM. Milon et Bapt vous l’ont dit, il n’y aurait aucune logique à s’opposer à une telle disposition.
Comment justifier tout à la fois l’interdiction, en 2015, des perturbateurs endocriniens dans les contenants alimentaires et leur maintien dans les dispositifs médicaux destinés aux nourrissons et aux femmes enceintes ? Une telle situation serait surréaliste ! Le principe de précaution serait donc invocable pour l’ensemble du grand public, mais inopérant pour les publics cibles, à savoir les nourrissons et les femmes enceintes, pourtant clairement identifiés par l’ensemble des études !
Nous nous sommes invectivés de manière un peu brutale sur un sujet, qui, normalement, nous rassemble, en évoquant le délai d’un an, peut-être de six mois, pour la mise en application des dispositions prévues par ce texte. Et sur cet autre sujet, clairement identifié comme une priorité par l’ensemble des études, nous ne réussirions pas à trouver un accord !
Permettez-moi, monsieur le président, de présenter dans la foulée l’amendement n° 21 rectifié bis, qui est un amendement de repli, puisqu’il ne concerne que le bisphénol A contenu dans les dispositifs médicaux.
Cet amendement serait sans doute beaucoup plus facile à appliquer, même s’il est bien moins respectueux des consignes de sécurité sanitaire et de santé environnementale émises par l’ensemble des agences sanitaires.
M. le président. L'amendement n° 21 rectifié bis, présenté par Mmes Jouanno et Farreyrol, MM. Lorrain, Gaillard, Cambon et Duvernois, Mme Bruguière, M. Milon, Mme Giudicelli et MM. B. Fournier, J.P. Fournier, Hérisson, Pointereau, Grignon, P. Leroy, Laufoaulu, Dallier, Grosdidier, Revet et J. Gautier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Après l'article 2, il est inséré un article 3 ainsi rédigé :
« Art. 3. - La fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout dispositif médical comportant du bisphénol A destiné aux femmes enceintes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu'à trois ans sont suspendues à compter du 1er janvier 2015. »
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 20 rectifié et 21 rectifié bis ?
Mme Patricia Schillinger, rapporteur. L’amendement n° 20 rectifié reprend une proposition de la mission commune d’information du Sénat sur les dispositifs médicaux implantables et les interventions à visée esthétique.
Il tend à suspendre, à compter du 1er janvier 2015, la commercialisation de tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourrissons et aux enfants en bas âge et comportant un perturbateur endocrinien ou une substance définie comme cancérogène, mutagène ou reprotoxique.
Son champ est très large, notamment en ce qui concerne les substances visées. M’appuyant sur la même argumentation que celle que j’ai développée à propos de l’amendement n° 25 défendu par Mme Archimbaud, je souhaite toutefois connaître l’avis du Gouvernement en la matière, même si j’opte plutôt pour une demande de retrait.
Il existe en effet un risque sérieux de se priver d’un dispositif médical indispensable au traitement voire à la survie d’un patient.
Quant à l’amendement n° 21 rectifié bis, il tend à suspendre, à compter du 1er janvier 2015, la commercialisation des dispositifs médicaux comportant du bisphénol A et destinés aux femmes enceintes, aux nourrissons et aux enfants jusqu’à trois ans.
Comme je l’ai expliqué tout à l’heure à propos de l’amendement n° 25, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé n’est pas capable d’établir aujourd’hui la liste des dispositifs médicaux concernés par cet amendement.
Face à de telles incertitudes, la commission, qui privilégierait à ce stade une demande de retrait, souhaite entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je souhaite également le retrait de ces deux amendements.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer tout à l’heure dans nos échanges sur l’avenir des dispositifs médicaux, je suis favorable à ce qu’un rapport fasse le point sur cette question dans un délai rapproché.
Cela étant, madame Jouanno, je ne vois pas ce qui vous permet de prétendre que je ne me préoccupe pas de santé publique. Ma présence ici serait donc purement fictive ? Parce que je ne me rallie pas à vos amendements, je ne souhaiterais pas m’engager de façon résolue et forte dans une démarche de santé publique ? Pourtant, si tel était le cas, nous ne serions pas là !
Au demeurant, nous aurions aimé vous entendre tout à l’heure sur la nécessité d’intervenir plus vite pour ce qui concerne les contenants alimentaires. (M. Jean-Pierre Godefroy applaudit.) Cela vous aurait permis d’affirmer la force de votre engagement !
Il n’y a pas, d’un côté, les bons, qui s’intéressent aux dispositifs médicaux et, de l’autre, les « méchants », ceux qui seraient dans la banalité de la vie quotidienne et défendraient un dispositif global et cohérent. Je m’étonne donc des propos que vous avez tenus.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la question des dispositifs médicaux est d’importance majeure, et pas simplement pour ce qui concerne le bisphénol A. C’est un enjeu européen, qu’il sera difficile pour nous de faire aboutir. Nous sommes en effet plus allants, plus favorables que nos partenaires à l’encadrement des dispositifs médicaux, comme en témoigne d’ailleurs le rapport du Sénat. En me rendant dans un certain nombre de pays de l’Union, j’ai pu constater que notre volonté d’adopter une législation plus stricte n’est pas, aujourd’hui, largement partagée. Nous devrons donc faire œuvre de persuasion.
Une telle démarche doit par conséquent être engagée sur la base d’études européennes et nationales. La remise d’un rapport dans un délai relativement bref doit nous permettre d’avancer.
Je vous demande donc, madame Jouanno, de bien vouloir retirer ces deux amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Ce sujet doit pouvoir nous rassembler dans une démarche de travail, d’études et de recherche de produits de substitution, en particulier pour ce qui concerne la stérilisation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur plusieurs travées du CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. Madame Jouanno, les amendements nos 20 rectifié bis et 21 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Mme Chantal Jouanno. Madame la ministre, si vous m’aviez écoutée tout à l'heure, vous auriez compris que la date proposée par la commission pour interdire le bisphénol A dans les contenants alimentaires ne me posait aucun problème. Cela étant, ce débat qui nous a longuement occupés me paraît quelque peu étonnant dans la mesure où l’ensemble des études ont clairement démontré que la priorité des priorités, pardonnez-moi de me répéter, ce sont les publics fragiles, à savoir les nourrissons, les enfants en bas âge, les femmes enceintes et les femmes allaitantes.
Dans ces conditions, je trouve tout de même assez surprenant que l’on envisage des exceptions pour les conserves de cornichons, mais pas pour des dispositifs médicaux indispensables à la survie de nourrissons ! Comment pourrez-vous nous expliquer que les connaissances, en matière de sécurité, sont plus approfondies pour les boîtes de conserve que pour des dispositifs médicaux ou des cathéters destinés à des nourrissons et à des prématurés ?
Vraiment, ce débat est étonnant. On nous renvoie à un rapport, à un autre texte à venir, alors que nous avons ici l’occasion d'inscrire dans la loi un principe approuvé à l'unanimité par la mission commune d'information. Puisqu’il s’agit d’une mesure de suspension, nous pourrons bien entendu toujours, d'ici à 2015, prévoir des exceptions pour certains dispositifs médicaux.
Je maintiens mes deux amendements, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Ayant rédigé, au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, un rapport consacré aux perturbateurs endocriniens, on comprendra aisément que je soutienne l’amendement n° 20 rectifié de Mme Jouanno.
Madame le ministre, il faut distinguer entre les dispositifs médicaux faits de polycarbonates rigides, tels que les couvercles de couveuse, qui contiennent du bisphénol A, et ceux faits de plastiques souples, notamment les tubulures, qui comportent des perturbateurs endocriniens, les phtalates à chaîne courte, sachant que les phtalates à chaîne longue sont éventuellement substituables.
Dans ce domaine, nous disposons d’études épidémiologiques, qui ont démontré que le taux de ces perturbateurs endocriniens dans le sang des nouveau-nés et des prématurés en réanimation était, compte tenu du faible poids de ces enfants, jusqu'à cent fois supérieur à la dose journalière autorisée. Il me semble donc urgent de prendre des mesures.
Retenir la date du 1er janvier 2015 me paraît tout à fait raisonnable, car il existe d’ores et déjà des produits de substitution dépourvus de perturbateurs endocriniens, fabriqués dans notre pays, pour les tubulures souples et les poches destinées notamment à la nutrition parentérale. Tel est l’objet d’un amendement que je présenterai tout à l’heure.
Concernant le bisphénol A, les travaux scientifiques ont également montré qu’il pouvait être présent à forte dose dans le sang des nouveau-nés à la suite de traitements administrés à la mère lors de l’accouchement, ainsi que dans celui des prématurés ou des enfants en bas âge nourris par voie parentérale.
Les amendements de Mme Jouanno me paraissent donc tout à fait justifiés au regard de la santé publique, qui est notre préoccupation à tous. En l’occurrence, il s’agit de protéger des publics particulièrement exposés, à savoir les femmes enceintes et les nourrissons. Cela me semble plus important que les conserves de cornichons de M. Patriat… (Applaudissements sur les travées de l'UCR et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Il me semble que les amendements de Mme Jouanno vont exactement dans le même sens que la proposition de loi. Quelle que soit notre sensibilité politique, notre objectif à tous est la protection des populations les plus fragiles. Je regrette donc que notre collègue ait présenté les choses dans un esprit de clivage : cela n’était pas nécessaire, car Mme la ministre fait la preuve, depuis le début de cette discussion, de sa capacité d'écoute et de sa volonté politique de promouvoir la santé publique.
Cela étant dit, ces amendements me semblent importants, dans la mesure où ils tendent à protéger les nourrissons, les femmes enceintes et les femmes allaitantes, ainsi qu’à étendre l’application du principe de précaution à des matériels dont la possible nocivité a été démontrée.
Je rappelle que, en commission, nous nous en sommes remis sur ce point à la sagesse du Gouvernement, faute de disposer de toutes les données scientifiques nécessaires. Dans la mesure où il s’agit non pas d’une interdiction, mais d’une suspension, toutes les possibilités resteront ouvertes pour l’avenir. Je suis donc favorable à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Ayant été vice-présidente de la mission commune d’information, je soutiens, à l’instar, je pense, de tous les membres de mon groupe, les amendements qu’a déposés Mme Jouanno. D'ici à 2015, nous pourrons de toute façon rectifier le tir, dans le cas, assez peu probable, où les produits en cause se révéleraient finalement inoffensifs sur la base du rapport qui nous sera présenté.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. Je suis pris entre deux feux…
En tant que rapporteur de la mission commune d’information sur les dispositifs médicaux implantables, je suis à l’origine de la proposition n° 10. J'entends donc Mme Jouanno, qui a repris cette proposition, mais j'entends aussi Mme la ministre, qui nous explique qu’il est quelque peu difficile de prendre les mesures en question, s’agissant de dispositifs dont la certification relève de l’échelon européen et qui, pour la plupart d'entre eux, hormis les tubulures, n’ont pas de substituts à ce jour.
Dans ces conditions, j’avoue que je suis très ennuyé. Je pensais que Mme Jouanno ou Mme la ministre ferait un geste, mais je ne vois rien venir ! (Sourires.) Peut-être pourrait-on prévoir la remise d’un rapport d’ici à six mois…
Mme Sylvie Goy-Chavent. Encore un rapport !
M. Bernard Cazeau. Ma chère collègue, il faut bien formuler des propositions ! Sinon, si vous préférez passer tout de suite au vote, alors allez-y, et qu’on n’en parle plus ! À quoi cela mènera-t-il ? De toute façon, il sera nécessaire de faire un bilan et de recenser les solutions de rechange. Il en existe, mais elles sont peu nombreuses. En tout état de cause, le Gouvernement peut agir, même si la certification des dispositifs en question relève de l’échelon européen. Voilà ce que je propose.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. J’observerai d’abord qu’il est bien difficile, pour des parlementaires, d’élaborer un texte de loi cohérent sur un sujet aussi technique. Nous le savons tous. C'est d’ailleurs la raison pour laquelle le groupe écologiste a déposé une proposition de loi, qui sera examinée la semaine prochaine, relative à l'indépendance de l'expertise.
Néanmoins, il est très important d’adresser un signal à la société en matière de protection de la santé publique ; cela fait partie de notre mission.
Sur le fond, nous soutenons l’amendement n° 20 rectifié, même si sa rédaction mériterait certainement d’être précisée quant aux dispositifs médicaux visés. Sur la forme, j’estime que, sur de tels sujets, nous devons être capables de nous entendre. Le débat parlementaire doit être le moyen d’enrichir la loi, et non pas d’exprimer des clivages politiciens. À cet égard, je regrette que Mme Jouanno ait interpellé le Gouvernement sur un tel ton, en affirmant, avec des trémolos dans la voix, que ne pas approuver ses amendements reviendrait à refuser de protéger les publics fragiles. C’est un peu facile, et cela ne sied pas à un débat aussi complexe et technique. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Il n’existe pas, me semble-t-il, de désaccord sur le fait que la question des dispositifs médicaux est clairement posée.
Je suis étonnée que certains, qui considéraient que, s’agissant des contenants alimentaires, il fallait donner du temps au temps, soient prêts à adopter une échéance plus proche pour les dispositifs médicaux, alors même que nous ne disposons pas de produits de substitution. (M. Gilbert Barbier le conteste.)
Mme Marisol Touraine, ministre. Je suis surprise de les entendre maintenant exprimer, à propos des dispositifs médicaux, des certitudes contraires à celles qu’ils avaient tout à l’heure concernant l’industrie agroalimentaire. En effet, il leur paraissait alors évident que l’industrie agroalimentaire ne pourrait pas s’adapter dans les délais prévus, en dépit du fait que la réflexion est engagée depuis des années et que les industriels ont su faire face à l’interdiction des biberons contenant du bisphénol A. En revanche, pour les dispositifs médicaux, ils considèrent comme allant de soi que les entreprises seront en mesure de faire évoluer leur production d’ici à 2015 et de trouver des substituts, alors même que rien ne permet de penser que l’on saura par exemple stériliser des produits flexibles sans bisphénol A destinés à assurer l’alimentation ou l’oxygénation des nourrissons…
Cette divergence d’appréciation me semble assez étonnante. Pour autant, cela ne signifie pas que le débat sur les dispositifs médicaux ne doit pas être engagé. Toutefois, je ne pense pas qu’il pourra être tranché d’ici au 1er janvier 2015. C’est une question de réalisme, sachant que vous venez de voter le report de l’échéance pour les contenants alimentaires et que nous ne disposons encore d’aucune étude sur le sujet.
C’est la raison pour laquelle j’estime que nous devons mettre en place un groupe de travail chargé d’élaborer un rapport, en lien avec les instances européennes, les entreprises, les organismes de recherche et les administrations concernés, afin d’établir une liste précise des dispositifs médicaux en cause et d’évaluer le risque.
S’il existait d’ores et déjà des produits de substitution, la question ne se poserait pas, mais aujourd’hui, on ne sait pas comment procéder autrement : le principe de réalité s’impose à nous. La prochaine étape est en effet de mettre en place des substituts, je n’en disconviens pas, mais il faut se donner les moyens de la franchir correctement. Sinon, le Parlement se sera borné à poser des principes inapplicables !
Le rapport de la mission commune d’information ne mentionne d’ailleurs aucune date butoir ; il fixe seulement un principe et un objectif. Je vous appelle donc, encore une fois, à créer un groupe de travail rassemblant des parlementaires, des industriels et des chercheurs, d’autant que nous avions pris l’engagement, lors de la conférence environnementale, qu’une structure de réflexion serait mise en place dans le cadre du Plan national santé-environnement, pour qu’elle rende ses conclusions d’ici à l’été prochain.
Très sincèrement, il me semble préférable de s’engager dans une telle démarche, plutôt que de s’en remettre à la navette parlementaire pour aboutir à l’adoption de mesures qui ne pourront de toute façon être mises en œuvre dans les délais impartis. Il convient d’élaborer un calendrier précis, diversifié en fonction des dispositifs médicaux, pour donner le temps de trouver des substituts. Menons ce travail d’évaluation et de proposition dans un esprit de responsabilité, de rassemblement et de consensus.
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, le groupe socialiste demande une suspension de séance de dix minutes.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante, est reprise à dix-neuf heures.)
Mme Chantal Jouanno. Il est possible que je mette trop de conviction à défendre mes amendements ! Toujours est-il que j’ai trouvé extrêmement éclairants les travaux de la mission commune d’information.
Par cohérence avec l’amendement n° 2 rectifié de M. Barbier, je souhaite modifier mon amendement n° 20 rectifié afin de reporter l’échéance au 1er juillet 2015.
En outre, pour répondre aux inquiétudes exprimées quant à l’existence de produits de substitution, je propose de prévoir qu’un avis préalable de l’ANSM devra être recueilli. Faisons tous un pas les uns vers les autres…
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marisol Touraine, ministre. Recueillir un avis préalable de l’ANSM est un élément utile. Je propose en outre que les modalités d’application soient déterminées par décret, afin de pouvoir, le cas échéant, préciser les calendriers et prévoir la conduite d’études lorsqu’il n’y a pas de dispositifs de substitution disponibles. Cela me semblerait plus réaliste. Néanmoins, je réaffirme mon très grand scepticisme quant à la possibilité de donner une portée autre que déclaratoire à un tel amendement, compte tenu de l’échéance retenue…
M. le président. Madame Jouanno, que pensez-vous de la rectification complémentaire suggérée par Mme la ministre ?
Mme Chantal Jouanno. J’y suis favorable et je rectifie mon amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 20 rectifié bis, présenté par Mmes Jouanno et Farreyrol, MM. Lorrain, Gaillard et Duvernois, Mmes Bruguière et Giudicelli et MM. B. Fournier, J. P. Fournier, Pointereau, Grignon, Hérisson, Laufoaulu, Dallier, Revet, Grosdidier, J. Gautier et P. Leroy, et ainsi libellé :
Après l'alinéa 7
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Après l'article 2, il est inséré un article 3 ainsi rédigé :
« Art. 3. - Sont suspendues à compter du 1er juillet 2015 après avis de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et dans des conditions fixées par décret la fabrication, l'importation, l'exportation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de tout dispositif médical destiné aux femmes enceintes, aux femmes allaitantes, aux nourrissons ou aux enfants jusqu'à trois ans comportant :
« 1° soit une des substances définies comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques de catégorie 2 au sens de la Partie 3 de l'Annexe VI du Règlement CE n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n°1970/2006 ;
« 2° soit un perturbateur endocrinien présentant de probables effets sérieux pour la santé humaine, identifié dans les conditions fixées à l'article 59 du Règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) n° 793/93 du Conseil et le règlement (CE) n° 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 75/769/CEE du Conseil et les directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission. »
Je le mets aux voix.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 21 rectifié bis n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.