M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, je m’exprime sans notes, avec la sincérité d’un élu local qui essaie de s’adapter aux textes proposés.
Les lois sont bavardes. Pourquoi préciser dans un projet de loi que la priorité est donnée à certaines catégories de jeunes ? Cela va de soi ! Si vous inscrivez cette priorité dans la loi, cela aura des conséquences. Je représente un territoire rural, divisé en bassins de vie relativement larges. À l’intérieur de ceux-ci, certains cantons sont classés en ZRR, tandis que d’autres ne le sont pas. Il nous faudra donc expliquer – car il y aura évidemment un problème de crédits, ne nous faisons aucune illusion – que certains jeunes du territoire seront considérés comme prioritaires, alors que d’autres attendront.
Puisque nous sommes d'accord pour estimer que certains jeunes méritent plus que d’autres d’être aidés, pourquoi le dire dans la loi ? Il va de soi que, lorsque l’on ouvre un guichet, tous ceux qui se présentent n’ont pas droit aux dispositifs proposés. On fixe un certain nombre de critères, l’ancienneté, la qualification, l’âge ou le milieu social, par exemple. Pourquoi voulez-vous inscrire dans la loi des critères géographiques ?
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que votre intervention était surprenante – je ne dirais pas déplacée. Ce n’est pas la peine de sortir de vos gonds…
M. Jean-Claude Lenoir. … pour insinuer que nous n’avons rien compris ou que nous lisons des papiers écrits à l’avance. Non, monsieur le ministre, je ne lis pas de papier, je suis un élu local et je vous dis exactement ce que je pense.
Les amendements proposés – certains ont malheureusement été retirés, alors qu’ils étaient de bon sens et avaient été déposés par des membres d’un groupe appartenant à la majorité sénatoriale – tendant tous à rappeler que, comme vous l’avez déclaré vous-même, tous les jeunes sont concernés par le dispositif. Pourquoi donc flécher des priorités ?
Je m’adresse à la majorité sénatoriale : il faut faire preuve d’un peu de bon sens, de pragmatisme, et voter les amendements en discussion. (Mme Catherine Procaccia applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Vergoz, pour explication de vote.
M. Michel Vergoz. Il est très difficile, pour nous autres Domiens, de ne pas prendre la parole alors que, depuis le début de la semaine, nous entendons certains de nos collègues se déclarer outrés de l’existence d’un ciblage territorial. L’un de nos collègues a même dénoncé un « générateur d’iniquités » ; vous l’avez rappelé, monsieur Marseille, avant d’ajouter qu’il ne fallait pas discriminer.
Madame Procaccia, je pensais que nous avions obtenu toutes les réponses que nous désirions mardi 18 septembre, lors de l’audition des ministres par la commission des affaires sociales, au sein de laquelle vous siégez. Mais je constate que vous jouez la montre, en revenant sans cesse sur ce sujet. (M. Jean-Claude Lenoir proteste.)
Je voudrais être clair. Je tiens d'abord à saluer le rapporteur et le Gouvernement, qui ont pris en compte les réalités ultramarines, c'est-à-dire les spécificités de ces territoires. Je vous regarde dans les yeux, chers collègues : il est temps de rappeler le fondement de cette prise en compte des spécificités des outre-mer.
Il sera dit dans cet hémicycle, comme à l’Assemblée nationale, que nous disposons d’outils législatifs qui ne datent pas d’hier, puisqu’ils remontent à la Constitution de 1958, dont l’article 73 dispose – tendez un peu l’oreille, madame Procaccia – que la République peut prendre en compte les particularités de ses départements et régions d’outre-mer.
D'autre part, la cour de justice des Communautés européennes a affirmé en 1978, dans son arrêt Hansen, que les départements d’outre-mer faisaient partie intégrante de la République française. Il a ensuite fallu attendre le traité d’Amsterdam, en 1997, pour qu’un pas décisif soit accompli, pour qu’il soit enfin affirmé au plus niveau européen que nous pouvons bénéficier de mesures d’adaptation compte tenu de nos particularités.
Ce débat est donc derrière nous ! Cessez de nous montrer du doigt ! Je me sens culpabilisé dans cet hémicycle. C'est pourquoi nous répéterons, chaque fois que ce sera nécessaire, que nous ne demandons la charité à personne. La République a prévu des outils législatifs permettant des adaptations du droit commun et même des dérogations dans les outre-mer.
Je suis heureux qu’un gouvernement – notre gouvernement – ait agi en amont, en prévoyant non pas une loi spécifique pour les outre-mer, mais une prise en compte de leurs spécificités dans la loi de la République. Monsieur le ministre, cela nous honore et c’est un changement par rapport à ce que nous avons vécu ces dernières années !
J’aimerais emporter votre adhésion, madame Procaccia. Je ne prendrai pour seul exemple qu’une triste spécificité de ces territoires dans lesquels vous êtes la bienvenue, dans lesquels vous êtes chez vous : les outre-mer. Car, oui, dans ces territoires, le chômage des jeunes de quinze à vingt-cinq ans atteint 60 %, contre 22,7 % en métropole.
Mme Catherine Procaccia. Ce n’est pas le cas dans tous les départements !
M. Michel Vergoz. Et je vous épargne les taux d’exclusion et le nombre de bénéficiaires du RSA…
Mes chers collègues, j’estime que ce projet de loi constitue une avancée. Le Gouvernement ne tend pas la main aux outre-mer, mais fait simplement son devoir. M. le ministre l’a répété mille fois, madame Procaccia, le cœur de cible, ce sont nos 500 000 jeunes sans qualification, et nous savons où ils se trouvent. Nous irons donc à leur rencontre. Vous savez mieux que moi qu’il n’y aura pas d’emploi pour tout le monde. Il ne sera pas facile de choisir les bénéficiaires, alors entreprenons ce travail ensemble.
Je terminerai en anticipant : notre responsabilité sera de mettre en œuvre un pilotage local sans anicroches, et c’est un enjeu majeur. Ce ne sera pas chose aisée dans la mesure où 80 % des contrats aidés ont été « grillés », si je puis dire, juste avant la campagne présidentielle… Madame Procaccia, dans votre région comme dans la mienne, c’est le même grand chantier qu’il nous faut ouvrir ensemble ; je souhaite que nous réussissions, car il y va de l’intérêt de notre jeunesse. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je ne comptais pas m’exprimer, madame la présidente,…
Mme la présidente. Vous n’y êtes en rien obligé, mon cher collègue… (Rires.)
M. Jean Desessard. … et je vais donc à mon tour parler sans notes.
Lors de son intervention, M. Lenoir m’a regardé comme s’il souhaitait susciter mon adhésion.
M. Jean-Claude Lenoir. Vous êtes le maillon faible de la majorité sénatoriale ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Autant vous le dire tout de suite, cher collègue : je n’ai pas vocation à me dissocier systématiquement de mes amis socialistes. (Rires et applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste.) Je vais vous montrer que c’est par conviction que j’adhère au présent projet de loi.
Certes, j’ai déclaré tout à l'heure que l’on ne pouvait pas résoudre le problème du chômage en l’abordant uniquement par catégories, puisque tout le monde est touché. Quelles que soient les caractéristiques de ceux qui le connaissent, le chômage est toujours intolérable.
Qu’il s’agisse d’un homme ou d’une femme, d’un tout jeune ou d’un quinquagénaire qui doit nourrir sa famille, quels que soient ses diplômes et quelle que soit sa localisation sur le territoire, le chômage pour lui, pour elle, est également intolérable.
Quelles sont les fonctions des contrats d’avenir ? La première est de favoriser l’emploi, par deux moyens : d'une part, des personnes seront embauchées ; d'autre part, le secteur associatif sera vitalisé, ce qui permettra de lancer des projets pérennes.
Ces contrats constituent également – c’est leur deuxième fonction – un moyen de s’adresser à un public ayant connu l’échec scolaire, difficilement intégrable et à l’employabilité limitée. Il faut que ces jeunes acquièrent des compétences et jouissent d’une certaine reconnaissance en se sentant utiles dans un métier. Il est donc important de cibler un public particulier.
Enfin, la troisième fonction des contrats d’avenir est de contribuer au mieux être et au mieux vivre ensemble. Peut-on accepter que certains quartiers comportent 50 % de jeunes désœuvrés, en échec scolaire et sans perspective d’avenir ? Ce sont autant de foyers de tensions sociales extrêmement importantes, ce sont des lieux d’incivilités où bientôt il ne fera plus bon vivre si l’on ne change rien.
Oui, il faut s’attaquer au problème du chômage pour toutes les catégories, mais il est également urgent de cibler un public sans formation ; c’est une nécessité. C’est donc en accord total avec le Gouvernement que je voterai contre l’amendement de Catherine Procaccia. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Il faut revenir à l’origine de ce projet de loi.
Le point de départ est un constat : le chômage a augmenté comme jamais dans notre pays, les jeunes au chômage n’ont jamais été aussi nombreux et ceux qui habitent dans les quartiers difficiles n’ont jamais été aussi en difficulté.
Face à cette situation, le Gouvernement et la majorité veulent prendre le taureau par les cornes. L’idée est simple : il s’agit de remettre les jeunes sur le chemin de la République, de la sociabilité, de l’emploi. Or nous savons bien que ces jeunes – nous les connaissons tous, qu’ils habitent dans la Drôme, l’Orne ou les Yvelines – ne peuvent pas immédiatement trouver un emploi dans le secteur marchand ; c’est impossible parce qu’ils sont cassés, ayant été complètement exclus.
Il faut donc trouver un moyen de résoudre ce problème. Le système des emplois d’avenir est simple : il s’agit de remettre le pied à l’étrier à tous les jeunes sans formation, avec une spécificité pour les départements et régions d’outre-mer. Pour ce faire, nous devons leur trouver un emploi dans le secteur non marchand, emploi associé à une formation. C’est le cas dans notre dispositif.
Pourquoi regardons-nous d'abord dans certains quartiers ? Cela me semble évident. D'ailleurs, si vous avez créé les ZUS et l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, et mis en œuvre la politique de la ville, c’est bien parce qu’il y a un problème ! Durant la précédente mandature, vous n’avez pas cessé, certes sans grand succès, de mettre en exergue la politique de la ville. Ce n’est pas nous qui avons évoqué la discrimination positive, une expression que je rejette, d’ailleurs : c’est vous !
Nous voyons bien, mes chers collègues – appelons un chat un chat –, que, s’il y a des jeunes en difficulté dans les cantons ruraux de la Drôme, ils sont beaucoup moins nombreux que dans certains territoires urbains. Je pense à ces barres d’immeubles où aucun jeune ne travaille et à ces quartiers où le chômage des jeunes atteint 60 %.
Ce projet de loi est équilibré. D’une part, nous traiterons le problème de ces ghettos en embauchant prioritairement des jeunes issus des quartiers en difficulté, là où la détresse est terrible, ainsi que les actualités nous le rappellent quotidiennement, et, d'autre part, comme il ne faut pas faire de discrimination ni de ségrégation – M. le ministre l’a bien dit lors de la discussion générale –, nous agirons également en faveur des jeunes des zones rurales et des petites villes, car on y rencontre la même désespérance.
Je le répète, il y a tout de même beaucoup plus de jeunes en difficulté dans les zones urbaines que dans les zones rurales, et c'est la raison pour laquelle nous soutenons le Gouvernement dans sa volonté de s’occuper en priorité des quartiers difficiles, afin de les « désengorger », tout en aidant les jeunes sur l’ensemble de notre territoire. Telle est la philosophie du projet de loi.
De plus, la plupart des jeunes des quartiers difficiles sortent du système scolaire sans formation ; ils doivent donc être privilégiés. Nous pouvons tous, me semble-t-il, partager ce point de vue.
La priorité doit être accordée aux résidents des zones urbaines sensibles, des zones difficiles, qui connaissent la plus grande détresse. Parallèlement, les jeunes des départements ruraux doivent aussi avoir voix au chapitre.
Si nous parvenons à leur remettre le pied à l’étrier, ces 150 000 jeunes retrouveront alors espoir.
Aujourd’hui, non seulement les jeunes ne vont pas voter, mais encore ils nous reprochent, à nous, les vieux,…
M. Jean-Claude Lenoir. Parlez pour vous !
M. Didier Guillaume. … de ne nous occuper que de nous, et pas d’eux. Il faut changer tout cela ! Les jeunes ont été trop souvent laissés au bord de la route, montrés du doigt, stigmatisés pour peu qu’ils vivent dans des quartiers différents, qu’ils portent des noms différents.
À nous de faire en sorte que la République s’occupe de tous ses enfants. Tel est l’enjeu des emplois d’avenir. C’est l’une des pièces de la mécanique que le Gouvernement met en mouvement. Viendront ultérieurement les contrats de génération. Et nous espérons également que la situation progressera grâce au redressement productif.
En l’espèce, il s’agit d’une mesure d’urgence destinée à permettre à nos jeunes de retrouver leur dignité en accédant à l’emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 rectifié et 30 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote sur l'amendement n° 90 rectifié. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Catherine Procaccia. Mes chers collègues, j’ai le droit de m’exprimer !
M. Jean-Claude Lenoir. Une telle attitude n’est pas tolérable !
Mme la présidente. Vous avez la parole, ma chère collègue, et vous seule.
Mme Catherine Procaccia. Je tiens à soutenir cet amendement, qui va dans le sens de ceux que nous avons défendus.
J’ai entendu dire tout à l’heure - était-ce M. le rapporteur ou M. le ministre ? - que l’on était en train de stigmatiser les jeunes qui avaient habité dans certains territoires. Je trouve cela scandaleux ! Il est tout aussi stigmatisant de n’être embauché que précisément parce que l’on habite dans tel territoire. L’argument ne me semble donc pas bon.
Je voterai cet amendement.
M. Jean-Claude Lenoir. Quel dommage !
Mme la présidente. Madame Procaccia, l’amendement n° 6 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. J’ai bien compris que tout le territoire serait concerné, mais avec certaines priorités, que, pour ma part, je ne souhaite pas voir retenir en l’état. Si les jeunes ont des difficultés, ce sont tous les jeunes qui sont concernés.
L’amendement que j’ai présenté serait satisfait, me dit-on pour que je le retire. Ce ne serait le cas que si certaines précisions étaient apportées. Je n’ai qu’une confiance moyenne en l’application que peuvent faire les administrations, quelles qu’elles soient – missions locales pour l’emploi ou autres –, de textes imprécis. Si ce n’est pas écrit dans la loi, ce ne sera pas forcément appliqué.
Pour cette raison, je maintiens mon amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 18, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. - L'emploi d'avenir s'adresse enfin aux demandeurs d'emploi âgés de plus de 50 ans sans emploi depuis au moins trois ans.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° 1 rectifié quater est présenté par MM. Jarlier, Dubois, Zocchetto et Détraigne, Mme Létard, M. Marseille et les membres du groupe de l'Union Centriste et Républicaine.
L'amendement n° 2 est présenté par M. Kaltenbach.
L'amendement n° 43 est présenté par Mme Lienemann.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Après les mots :
but non lucratif
insérer les mots :
et les organismes d’habitations à loyer modéré visés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation
La parole est à M. Hervé Marseille, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié quater.
M. Hervé Marseille. Cet amendement a pour objet d’ouvrir aux organismes d’HLM le dispositif des emplois d’avenir.
Depuis 1998, les organismes d’HLM interviennent dans la mise en œuvre des programmes d’emplois aidés. Ils l’ont d’ailleurs fait avec un succès remarqué dans le cadre du programme « Nouveaux services - emplois-jeunes » de 1998.
Le public visé par les contrats d’avenir concerne prioritairement les jeunes des zones urbaines sensibles où les bailleurs sociaux sont des acteurs très actifs, aux côtés des collectivités locales, dans la mise en œuvre des politiques de développement social.
En qualité d’employeurs assurant une mission d’intérêt général, les organismes d'HLM peuvent et souhaitent contribuer à la mise en œuvre de ce programme d’insertion, tant parce que ces jeunes habitent souvent leur patrimoine que parce qu’ils peuvent leur offrir des emplois ouvrant sur de véritables parcours professionnels.
Il est donc nécessaire de permettre à l’ensemble des organismes d’HLM, qui font tous le même métier, de contribuer à la mise en œuvre de ce programme quel que soit leur statut – office public de l’habitat, entreprises sociales pour l’habitat, sociétés coopératives – et ce dans les mêmes conditions. Or, si le texte actuel est adapté aux offices publics, il ne convient pas nécessairement aux sociétés anonymes d’HLM, organismes de droit privé assurant une mission d’intérêt général et n’appartenant pas au secteur marchand.
Aussi le présent amendement vise-t-il à ouvrir les contrats d'avenir à tous les organismes dans des conditions identiques.
Mme la présidente. L’amendement n° 2 n’est pas soutenu, non plus que l’amendement n° 43.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1 rectifié quater ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les organismes d’HLM peuvent employer des jeunes au titre des emplois d’avenir.
Il semble a priori satisfait, puisque les sociétés d’HLM font partie des organismes privés à but non lucratif.
Sur le fond, la commission des affaires sociales est évidemment favorable à la participation des organismes d’HLM au dispositif des emplois d’avenir. Néanmoins, elle souhaite interroger le Gouvernement afin qu’il confirme cette analyse juridique.
Je vous fais remarquer, mes chers collègues, qu’ultérieurement nous examinerons un amendement n° 42, qui vise à étendre encore un peu plus le dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Sapin, ministre. Tout comme la commission, le Gouvernement considère que les organismes d’HLM sont concernés par le dispositif.
Je vois bien qu’il y a une réelle différence entre les organismes à caractère public – ceux-là le sont à l’évidence – et ceux qui seraient de statut privé, mais il s’agit ici d’organismes sans but lucratif. En effet, lorsque des organismes du type société anonyme réintègrent leurs bénéfices dans leur capital afin de réaliser ultérieurement des opérations de construction, ils ne cherchent pas à gagner de l’argent et sont donc, pour le Gouvernement, concernés.
Je comprends néanmoins la nécessité de lever une ambiguïté en tant que de besoin.
L’amendement n° 42, que nous allons examiner plus tard et dont l’objet est un peu plus large, concerne notamment les sociétés d’économie mixte, les SEM. Aussi, madame la présidente, je demande la réserve du vote de l’amendement n° 1 rectifié quater jusqu’à l’issue de l’examen de l’amendement n° 42. M. Marseille pouvant alors comparer ce dernier avec son propre amendement, il s’apercevra que l’amendement n° 42 lui donnera satisfaction en introduisant une précision plus large que celle qu’il propose lui-même.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je suis satisfait que cette proposition soit retenue. Cependant, il semblerait que les logements HLM ne soient pas également répartis sur le territoire, et je m’en inquiète. Les villes de Neuilly-sur-Seine ou de Saint-Maur-des-Fossés auront peut-être plus de difficultés que d’autres pour recourir aux contrats d’avenir… (Sourires sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve du vote de l’amendement n° 1 rectifié quater jusqu’à l’issue de l’examen de l’amendement n° 42 ?
M. Claude Jeannerot, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Il n’y a pas d’opposition ?...
La réserve est ordonnée.
Je suis maintenant saisie de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les employeurs du secteur marchand ;
La parole est à M. Serge Dassault.
M. Serge Dassault. Monsieur le ministre, chers collègues de la majorité, contrairement à ce que vous pouvez croire, je partage votre point de vue : il est urgent de mettre fin au chômage des jeunes. D’ailleurs, dans ma commune, Corbeil-Essonnes, je mets tout en œuvre en ce sens. À cette fin, j’ai créé une mission locale qui permet chaque année à 500 jeunes de retrouver du travail en leur assurant une formation, un suivi. Annuellement, plus de 700 à 800 jeunes ont recours à cette mission parce qu’ils sortent du collège, du lycée, voire de l’université sans rien savoir faire.
D’ailleurs, même si ce n’est pas le sujet aujourd’hui, je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous puissiez convaincre votre collègue chargé de l’éducation nationale de modifier la formation des jeunes, de changer le dispositif du collège unique et de revenir sur cette idée de donner à tous le même enseignement.
Les enfants n’ont pas tous les aptitudes nécessaires et l’enseignement n’est lui-même pas adapté face à ces différences, ce qui explique que certains n’écoutent pas les professeurs et ne vont même plus en cours, tout cela pour sortir du système scolaire en ne sachant strictement rien faire. Et on nous les envoie après pour trouver du travail… Que de temps perdu ! Si ces jeunes avaient été plus tôt orientés vers l’entreprise et mis au travail, on n’aurait pas à s’en occuper et le taux de chômage serait moins élevé.
En réalité, c’est un problème de gouvernement. Il faudrait que le ministre chargé de l’éducation nationale s’occupe aussi de ce problème et ne laisse pas 150 000 jeunes quitter chaque année le système scolaire sans aucune formation professionnelle. Et cela fait dix ans que cela dure ! Et cela ne fait que s’aggraver chaque année ! Et tout le monde s’en moque ! Rien n’est fait, alors qu’il est indispensable de changer la formation élémentaire peut-être même dès le primaire, monsieur le ministre.
Mais l’urgence est aussi à la résorption des déficits. Dois-je vous le rappeler, mes chers collègues, nous avons pour fonction de gérer le budget, lequel est aujourd’hui en faillite ; il n’est donc plus possible d’augmenter les dépenses. Or, généralement, les mesures qui nous sont soumises, indépendamment de leur finalité positive et de leur intelligence, conduiront à une hausse des dépenses de l’ordre de 2 à 3 milliards d’euros. En l’espèce, le financement des emplois d’avenir serait compensé par les économies réalisées en matière d’heures supplémentaires. Mais il aurait fallu dédier ces économies à la réduction du déficit budgétaire.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous étiez d’accord pour supprimer l’exonération des heures supplémentaires ?
M. Serge Dassault. Si l’objectif des 3 % de déficit n’est pas respecté et si, corrélativement, la note de notre pays est dégradée et les taux d’intérêt auxquels nous empruntons sont relevés, toutes les dispositions adoptées ne serviront à rien. L’urgence est de parvenir à l’équilibre budgétaire et à la réduction des dépenses. Le Gouvernement en a décidé autrement et préfère dépenser pour les emplois d’avenir ce qu’il pourrait affecter à la réduction des déficits. Soit ! Mais je regrette que nous n’ayons pas de philosophie commune sur ces questions, mes chers collègues.
M. David Assouline. Il faudrait acheter des Rafale ?...
M. Serge Dassault. Pour rendre plus efficace le présent projet de loi, je propose d’étendre le dispositif des emplois d’avenir au secteur marchand. Il s’agit d’une simple ouverture, comme en matière de contrats aidés, et non d’une obligation. Si, grâce à cette disposition, plus de jeunes trouvent du travail, pourquoi s’en priver ?
Je propose donc simplement d’accroître l’efficacité de ce projet de loi, pour faire en sorte qu’encore plus de jeunes travaillent. Car le problème est bien là !
Pourquoi ne leur laissez-vous pas cette possibilité ? Je sais que cette proposition a été rejetée à l’Assemblée nationale, où des députés l’avaient défendue. Toutefois, entre nous, pourquoi ne pas étendre ce dispositif aux emplois marchands, pour augmenter son efficacité, comme vous cherchez tous à le faire, pour que la réussite de la formation professionnelle soit maximale ?
Cette mesure ne vous coûterait rien. Il est possible qu’elle n’ait aucun effet, mais il est possible aussi qu’elle serve à quelque chose et que ceux qui en auront bénéficié trouvent du travail. Or, comme vous l’avez souligné, monsieur le ministre, notre objectif à tous est que le maximum de jeunes retrouvent du travail. Non seulement je suis d'accord avec vous sur ce point, mais je vous propose d’augmenter encore l’efficacité de ce dispositif avec cet amendement ! (M. Jean-Claude Lenoir applaudit.)
Mme la présidente. L'amendement n° 28 rectifié ter, présenté par MM. Marseille et Amoudry, Mme Dini, MM. Roche, Vanlerenberghe, Pozzo di Borgo, Zocchetto et les membres du groupe de l'Union Centriste et Républicaine, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 14 :
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Les employeurs relevant des articles L. 2143-6 et L. 5422-13 et des 3° et 4° de l'article L. 5424-1.
La parole est à M. Hervé Marseille.
M. Hervé Marseille. L’objet de cet amendement est d’ouvrir le dispositif des emplois d’avenir autant aux PME qu’au secteur non marchand.
En effet, comme nous l’avons expliqué au cours de la discussion générale, à nos yeux, la principale limite du dispositif proposé est son ciblage sur le secteur non marchand. Alors que l’heure et l’urgence sont à la réduction des effectifs de la fonction publique, il est proposé de résorber le chômage des jeunes en créant de l’emploi public et parapublic ! Cette incohérence est évidemment d’autant plus problématique que ni le secteur public ni le secteur associatif ne seront en mesure de pérenniser ces emplois, alors que le secteur marchand, en particulier les PME, le pourrait.
Même les emplois d’avenir qui ne déboucheraient pas, dans les PME, sur des emplois pérennes seraient bien plus profitables pour leurs jeunes bénéficiaires, car le secteur marchand est bien davantage indiqué que le secteur non marchand pour former au monde du travail.
L’objet de cet amendement est donc de réorienter le dispositif vers les PME. Les emplois d’avenir compléteraient ainsi de manière pertinente les futurs contrats de génération, ces derniers étant certainement mieux adaptés pour les grandes entreprises.