M. Jean-Vincent Placé, rapporteur spécial. Exactement !
M. Roger Karoutchi. Je n’en doutais pas, monsieur Placé !
M. Jean-Vincent Placé, rapporteur spécial. Un écologiste qui aime la République ! Vous ne devriez pas plaisanter avec ce sujet, monsieur Karoutchi ! Vous ne représentez pas des quartiers où il manque des policiers et des gendarmes !
M. Roger Karoutchi. Je vous remercie de me laisser parler. Je vous rappelle que vous êtes un rapporteur spécial, non un agitateur ! (M. Jean-Louis Carrère s’exclame.)
Les chiffres sont là, et c’est bien ce qui vous gêne. Entre 1997 et 2002 – ce sont les mêmes organes de statistiques depuis 1972, ces chiffres ne sont donc pas contestables –,…
M. Jean-Louis Carrère. Vous allez encore dire que Vaillant, c’était une catastrophe !
M. Pierre-Yves Collombat. Ces chiffres ne veulent rien dire, on le sait !
M. Roger Karoutchi. … la délinquance a augmenté de plus de 17,5 %,…
M. Pierre-Yves Collombat. Cela n’a aucun sens !
M. Roger Karoutchi. … tandis qu’elle a diminué de 17 % de 2002 à aujourd'hui. Cela ne vous plaît pas, chers collègues, mais peu importe !
Les chiffres seraient en augmentation pour un certain nombre d’actes violents ? Mais lesquels ?
Mme Michèle André. Bref, tout va bien !
M. Roger Karoutchi. Pour les actes de violences intrafamiliales, par exemple ? Oui, c’est vrai.
M. Jean-Louis Carrère. Encore faut-il avoir une famille !
M. Roger Karoutchi. C’est vrai, le nombre des actes de violences intrafamiliales a doublé. Est-ce l’action des forces de sécurité qui est en cause ? Naturellement non ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.)
En vérité, les choses sont claires : un effort considérable a été fait depuis 2002, avec 3,5 milliards d’euros qui ont été consacrés à la modernisation. Cela signifie que l’on a fait en sorte de mettre, à effectifs constants, plus de policiers dans les rues.
M. Jean-Louis Carrère. Et de leur offrir de meilleurs logements !
M. Roger Karoutchi. C’est la réalité !
J’aurais aimé vous entendre dire que les mesures salariales prises en faveur des forces de police – à hauteur de 116 millions d’euros supplémentaires pour l’année prochaine – ont été appliquées. En la matière, le Gouvernement a respecté la totalité de ses engagements.
De la même manière, j’entends dire que la vidéosurveillance ou vidéoprotection – appelez-la comme vous voulez, d’ailleurs ! – n’aurait pas d’impact, et que ce système serait, au contraire, parfois dangereux.
Je vous le dis sincèrement – d’ailleurs, M. Placé le sait parfaitement –, nous avons mis en place dans la région d’Île-de-France un système de vidéoprotection dans bien des transports publics,…
Mme Éliane Assassi, rapporteure pour avis. Ce n’est pas de cela que l’on parle !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous confondez tout !
M. Roger Karoutchi. … car c’était une nécessité.
La vidéosurveillance dans un certain nombre de carrefours, de centres commerciaux, dans les transports, est une nécessité.
M. Jean-Vincent Placé, rapporteur spécial. Personne ne le conteste dans les transports, y compris dans les bus !
M. Jean-Louis Carrère. Chez Mme Bettencourt aussi ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Roger Karoutchi. Vous êtes constamment en train de dire que vous êtes pour la sécurité, mais soit vous faites en sorte que les mesures prises ne soient pas appliquées, soit vous les critiquez.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est votre majorité qui est au gouvernement !
M. Roger Karoutchi. Excusez-moi de vous le dire, madame Borvo Cohen-Seat, mais la police de la France d’aujourd'hui, c’est la police républicaine. Je ne comprends même pas que vous ayez pu dire dans votre intervention que vous étiez favorable à une police républicaine. N’est-ce pas le cas aujourd'hui ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bien sûr que si ! Mais vous remplacez la police par la vidéosurveillance !
M. Roger Karoutchi. La police remplit la totalité de ses missions, et elle le fait bien.
M. Jean-Louis Carrère. Même les caméras sont républicaines !
M. Roger Karoutchi. Et alors ? Cela vous choque que des caméras soient utilisées comme mesure de prévention ?
M. Jean-Louis Carrère. On en est tous contents…
M. Roger Karoutchi. Il y a des caméras dans toutes les grandes villes du monde, qu’elles soient de gauche ou de droite !
M. Jean-Louis Carrère. Il y en a plus de gauche maintenant !
M. Roger Karoutchi. L’effort consenti en la matière par le Gouvernement est considérable, et il serait temps et souhaitable que la gauche, dans son ensemble, accepte un vrai débat républicain sur la sécurité. En effet, quoi que l’avenir nous réserve, il faudra bien assurer la sécurité des Français.
M. Jean-Louis Carrère. Tout à fait !
M. Michel Le Scouarnec. L’assurer davantage !
Mme Éliane Assassi, rapporteure pour avis. L’assurer mieux !
M. Roger Karoutchi. Et il faudra continuer de prendre des mesures en la matière. Il est bien de dire au début de son intervention que tout le monde respecte, apprécie, approuve les forces de sécurité. Toutefois, dans le cas présent, il faut aussi affirmer que l’on soutient et respecte les actions de la police nationale et de la gendarmerie.
Mme Éliane Assassi, rapporteure pour avis. Mais on parle du budget et des moyens !
M. Roger Karoutchi. Il faut le dire !
Monsieur le ministre, le dispositif des policiers patrouilleurs que vous avez mis en place il y a quelques mois a fait ses preuves. Attendons de voir la suite, mais il faudra sans doute l’étendre, car les patrouilleurs jouent un rôle essentiel dans les quartiers et les villes où ils exercent.
J’entends dire que nous transférerions les charges vers les collectivités. Pour ma part, je suis de ceux qui considèrent que les missions régaliennes doivent être assurées par l’État,…
M. Roger Karoutchi. … à commencer par la sûreté.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous dites la même chose que moi, alors !
M. Roger Karoutchi. Je vous ferai remarquer que c’est moi qui ai fait créer un chapitre « sécurité » dans le budget de la région d’Île-de-France.
M. Jean-Louis Carrère. Et les maîtres-nageurs ?
M. Roger Karoutchi. Or il n’a jamais été supprimé depuis lors, pas plus par la gauche que par la droite ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Cela vous choque que les régions ou les collectivités fassent construire des antennes de police ?
M. Jean-Louis Carrère. C’est ce que l’on dit ! On dit qu’il faut des moyens !
M. Jean-Vincent Placé, rapporteur spécial. On est obligé de le faire ! C’est cela le problème !
M. Roger Karoutchi. Monsieur Placé, le problème ne se pose pas. La sécurité, c’est une nécessité pour tous. C’est une demande de tous les citoyens.
M. Jean-Louis Carrère. Et les maîtres-nageurs ?
M. Roger Karoutchi. Mes chers collègues, faites un effort ! Retrouvez un peu de sérénité, et soyez consensuels.
Quoi qu’il en soit, monsieur le ministre, vous avez notre soutien plein et entier pour poursuivre et amplifier votre action. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Décidément, « Quand c’est fini, ça recommence », comme dit la chanson ! On supprime, sans allégresse aucune, j’en suis conscient, de nombreux postes. À la fin de l’année 2013, ce sont 12 000 postes qui seront supprimés dans la gendarmerie et dans la police nationale. Certes, je ne nie pas que les effectifs avaient été sérieusement augmentés jusqu’en 2009.
M. Jean-Jacques Hyest. Tout à fait !
M. Jean-Louis Carrère. C’est la vérité, je ne le conteste pas ! Mais il faut dire aussi que la tendance est en train de s’inverser : entre 2009 et 2013, plus de 12 000 postes auront été supprimés.
M. Michel Boutant, rapporteur pour avis. Exactement !
M. Jean-Louis Carrère. Or, dans le même temps, on répète à l’envi, comme vous le faites d’ailleurs, ce que nous apprécions, car nous sommes d’accord avec vous, que la sécurité est l’une des priorités de ce pays. Dès lors, il faut se donner les moyens de la mettre en œuvre.
Alors même que l’on supprime quelque 12 000 postes, on implante 400 radars et on utilise les gendarmes dans les zones rurales pour lutter contre les accidents de la route.
Je ne sais pas si vous connaissez bien les zones rurales, monsieur le ministre, mais je pense que c’est le cas, car vous avez été préfet, et je respecte cette fonction que vous ayez exercée. Toutefois, vous n’avez jamais eu la chance d’être un élu, de vivre avec la population, d’être en communion avec les habitants, de ressentir leurs difficultés et de partager les craintes qu’ils expriment, surtout en ce moment.
Vous devez savoir à quel point la gendarmerie est l’un des piliers de la République dans ces zones. Pourquoi supprimer des escadrons ou des brigades et en regrouper d’autres ? Surtout, pourquoi cantonner les gendarmes, complètement cannibalisés par la politique du chiffre, dans des actions de répression des accidents de la route, toute la journée derrière des jumelles, et cela pour des résultats, somme toute, douteux ? Oui, pourquoi, monsieur le ministre ?
Je prendrai l’exemple de ma commune, Hagetmau, située dans le sud des Landes. Depuis que vous avez regroupé les brigades, je ne vois plus les gendarmes, monsieur le ministre ! En effet, ils n’ont plus le temps, car leur manque d’organisation est tel qu’ils se déplacent sans arrêt. Pourtant, vous le savez, la proximité avec les élus et la population est un facteur de responsabilisation, de sécurisation, qui permet d’éviter un certain nombre d’actes délictueux. Mais cela ne se passe plus ainsi !
Monsieur le ministre, en ce moment, au sein de la gendarmerie, la grogne s’intensifie et, surtout, les interrogations sont nombreuses. Je ne reviendrai pas sur les remarques de Gérard Larcher concernant les logements qui se dégradent et pour lesquels on a le sentiment que vous faites des économies ou que vous ne pouvez pas subvenir aux besoins. C’est pourtant l’un des éléments à prendre en compte pour le moral des gendarmes. Et je ne parle pas de la baisse des effectifs et d’une utilisation des moyens tournée vers le tout-répressif.
Monsieur le ministre, je ne suis pas là pour vous dire que je suis opposé à la mise en œuvre d’une politique destinée à diminuer de manière drastique le nombre des accidents de la circulation. Au contraire, j’y suis favorable. Mais laissez-moi vous expliquer pourquoi votre politique du chiffre produit des résultats inverses.
Les gendarmes, parce qu’ils sont obligés de faire ces chiffres, ne se postent pas dans les zones accidentogènes, qu’ils délaissent ! Ils choisissent des lignes droites, sur lesquelles il est aisé de verbaliser les gens.
Faites-moi le plaisir de venir dans les Landes. Je vous emmènerai, dans mon propre véhicule, là où les gendarmes peuvent faire du chiffre, justement. Dans la plupart de ces endroits-là, moi qui ai 66 ans, je n’ai jamais vu d’accident !
Ce ne sont pas là de bonnes méthodes, monsieur le ministre. Le comprenez-vous ? Je vous le dis, une autre politique est possible. Mais encore faut-il se rendre sur le terrain, tenir compte de l’avis des élus locaux, aller à la rencontre des gens, aimer ces Françaises et ces Français pour qui on veut mettre en œuvre une vraie politique de sécurité.
Monsieur le ministre, je comprends que le Gouvernement ait appliqué une politique très dure de révision générale des politiques publiques. Toutefois, je n’en partage ni la brutalité ni la méthode, encore que, comme tous mes collègues, je sois très attaché aux tentatives de redressement des comptes publics et de résorption de la dette. Par conséquent, je n’incriminerai pas tous les aspects de votre politique.
Néanmoins, pourquoi faire sans arrêt référence au bilan du gouvernement Jospin, moquer le ministre de l’intérieur de l’époque et tourner en dérision ses résultats, alors que les vôtres sont quand même pour le moins contrastés ? (M. le ministre proteste.)
Pour ma part, je constate que, depuis 2002, si les atteintes aux biens ont baissé de 28,6 %, les violences contre les personnes ont augmenté de 21,2 %, alors que, vous, monsieur le ministre, vous avez l’habileté de ne citer que les chiffres qui corroborent les messages que vous voulez faire passer ! Je trouve que ce n’est pas très bien.
Laissez-moi vous dire autre chose. Je suis un républicain. Je suis instituteur et, dans ma vie, j’ai fait beaucoup de leçons de morale ! Une chose m’interpelle vraiment : c’est la façon dont vous conduisez la politique de la sécurité dans notre pays, un œil sur les sondages – il est vrai que vous en faites beaucoup ! –, l’autre sur l’extrême droite. Or, monsieur le ministre, quand on se bat pour la sécurité, on le fait sans être tous les jours en campagne électorale pour le candidat Sarkozy !
Monsieur le ministre, je vous demande de revenir aux fondamentaux, de vous occuper vraiment de la sécurité des Français, d’essayer de répondre, en cette période de crise, à leur désarroi, y compris dans les territoires ruraux, et de mettre un terme à cette politique du chiffre qui est en train d’échouer.
Alors, comme le demandait M. Karoutchi précédemment, vous pourrez obtenir notre soutien. Je prends à cette tribune non pas le pari, car ce n’est pas dans ma nature, mais l’engagement, si vous changez de politique, si vous renoncez à la logique du chiffre, de vous l’apporter, à vous qui êtes si prompt, quelquefois, à nous donner des leçons, même si le ton en est courtois.
Que pensez-vous de ce que vous êtes en train de faire autour de Nicolas Sarkozy, de cette campagne électorale menée grâce aux avions, aux voitures, aux moyens de la République ? (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Gérard Larcher, rapporteur pour avis. Ce n’est pas le sujet !
M. Roger Karoutchi. Que signifient ces propos ?
M. Jean-Louis Carrère. Pensez-vous que ce sont là de bonnes méthodes ? Je vous le dis sincèrement, monsieur le ministre : lorsqu’on est un républicain, on l’est pour tout ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Charles Revet. Ce que vous dites est scandaleux !
M. le président. La parole est à M. Pierre Charon. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Vincent Placé, rapporteur spécial. Faites donner la garde impériale !
M. Pierre Charon. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur spécial, mes chers collègues, avant tout, je tiens à saluer le remarquable travail de notre éminent collègue Gérard Larcher, rapporteur pour avis pour le budget de la gendarmerie, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
Dans un contexte très contraint de réduction des déficits, ce rapport budgétaire est le reflet de l’attention et de l’attachement que nous portons à nos gendarmes.
M. Charles Revet. C’est mérité !
M. Pierre Charon. Ce rapport illustre également notre volonté absolue de préserver les conditions de travail de la gendarmerie et de la police.
Comme l’a rappelé Gérard Larcher, conserver le statut militaire de la gendarmerie est une nécessité.
M. Jean-Jacques Hyest. Absolument !
M. Pierre Charon. Disposer de deux forces de police, l’une à statut civil, l’autre à statut militaire, constitue un atout pour l’État républicain, notamment en cas de crise grave. C’est aussi une garantie pour l’indépendance de l’autorité judiciaire, grâce au libre choix du service enquêteur par les magistrats.
Enfin, c’est grâce au statut militaire et au maillage du territoire par les brigades territoriales que la gendarmerie assure le maintien de l’ordre public et la sécurité sur 95 % du territoire, correspondant à 50 % de la population, notamment en zone rurale et périurbaine.
C’est ce statut qui permet la disponibilité des gendarmes et leur proximité avec les élus locaux et la population. Cet ancrage territorial est l’une des clés de la cohésion nationale.
Je souhaiterais porter à la connaissance de la Haute Assemblée les résultats d’un sondage (Encore ! sur les travées du groupe socialiste-EELV.) publié le mois dernier par l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire, l’IRSEM, sur la question de la confiance des jeunes Français dans les institutions.
Il ressort de cette enquête que l’armée est l’institution dans laquelle les jeunes Français ont le plus confiance, avec 85 % de réponses positives.
M. Jean-Louis Carrère. C’est bien !
M. Gaëtan Gorce. C’est moins vrai du chef des armées ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Pierre Charon. Ce chiffre doit nous faire mesurer l’importance de la présence des forces de gendarmerie auprès de la population et notre obligation de préserver son statut militaire, parce que celui-ci incarne le respect, l’ordre, et la tranquillité.
Par ailleurs, je me réjouis de constater que nos collègues de la nouvelle majorité sénatoriale défendent avec vigueur aujourd’hui le statut militaire des gendarmes.
M. Jean-Louis Carrère. Vous n’étiez pas là, mais cela ne date pas d’hier !
M. Pierre Charon. Le temps n’est pas si lointain où certains d’entre eux militaient pour la reconnaissance d’associations professionnelles au sein des armées... Or, s’il est une chose qui est incompatible avec le statut militaire, c’est bien le droit syndical.
M. Alain Richard. Monsieur Charon, ne dites pas de bêtises sur ce sujet !
M. Pierre Charon. Aussi, vous comprendrez ma surprise à la lecture des propositions formulées par le député Jean-Jacques Urvoas, secrétaire national chargé de la sécurité pour le parti socialiste, et publiées par la formidable fondation Terra Nova, la pythie du parti !
M. Jean-Pierre Sueur. Mais non, cela n’a rien à voir ! C’est un club de réflexion qui n’engage pas le parti socialiste !
M. Pierre Charon. Celui-ci propose, tout simplement, de supprimer les échelons intermédiaires, ce qui conduirait à une remise en cause de la chaîne hiérarchique et, à terme, à la disparition du statut militaire et à une fusion entre la police et la gendarmerie. (M. Jean-Pierre Sueur s’exclame.)
Monsieur Sueur, calmez-vous un peu ! Ce serait d'ailleurs au président de vous le dire...
Il s’en explique ainsi : « Le Gouvernement ne peut s’enfermer définitivement dans une position de dépendance à l’égard d’une hiérarchie trop rigide : ne serait-ce pas l’occasion d’opérer une mutation majeure en introduisant au sein de la gendarmerie une culture du management qui viendrait contrebalancer celle, traditionnelle, du commandement ? ».
Pardonnez-moi, chers collègues, mais la culture du commandement dans l’armée tient non pas du folklore, mais de la nature même de l’organisation militaire ! (M. Gaëtan Gorce s’exclame.)
Il est fondamental de préserver la structure verticale de la gendarmerie, qui fait non seulement sa spécificité, mais aussi son efficacité et sa force. Si l’on supprime la tête, les échelons intermédiaires, et qu’il ne reste que les brigades, il n’y a plus de chaîne de commandement et il n’y a plus de gendarmerie. N’est-ce pas là une étrange manière de défendre le statut militaire des gendarmes ?
Par ailleurs, ce rapport propose une fusion de la direction générale de la police nationale, la DGPN, et de la direction générale de la gendarmerie nationale, la DGGN, ce qui revient à mettre un civil à la tête de la gendarmerie et de la police.
Cette solution, adoptée en Espagne en 2006, se révèle un échec complet. Elle est remise en cause en ce moment même par les experts du Parti populaire, qui travaillent à séparer à nouveau la direction de la police et de la Guardia civil. Peut-être serait-il sage de profiter des expériences de nos voisins ?
Dans leur très instructif rapport, nos collègues Anne-Marie Escoffier et Alain Moyne-Bressand confirment que le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur n’a pas entraîné la disparition du statut militaire de la gendarmerie ni la fin du dualisme policier.
M. Jean-Louis Carrère. On le savait !
M. Pierre Charon. Au contraire, la loi du 3 août 2009 a consacré le statut militaire de la gendarmerie et ses missions. Cette réforme a seulement permis la mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie et le renforcement de leur coopération en matière de lutte contre la criminalité, au service de la sécurité des Français.
M. Jean-Louis Carrère. Pas la mutualisation, la réduction des moyens !
M. Pierre Charon. Ce n’est pas ce que nous a dit M. Frédéric Péchenard, lorsque nous l’avons entendu !
Avant de conclure, je voudrais rendre un hommage appuyé au travail et à la mission qu’accomplissent les gendarmes au quotidien, tant sur le territoire national qu’à des milliers de kilomètres. Que ce soit en Guyane, dans le cadre de l’opération Harpie – opération de lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane –, ou en Afghanistan, leur professionnalisme et leur courage sont des exemples pour la société civile.
Bien évidemment, je voterai les crédits de la mission « Sécurité », soucieux que la gendarmerie soit respectée dans la spécificité de son organisation et soutenue dans son action sur le plan matériel, pour qu’elle puisse continuer à illustrer avec le même mérite sa devise traditionnelle : « Pour la patrie, l’honneur et le droit. » (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2012, à l’occasion du vote des crédits de la mission « Sécurité », je voudrais, comme les collègues qui se sont exprimés avant moi, rendre hommage au travail quotidien exercé avec dévouement et professionnalisme par les policiers, les gendarmes ainsi que l’ensemble des militaires qui sont en opérations extérieures.
Leur mission est, en effet, très difficile, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, souvent en partenariat avec les élus, les services d’urgence et les sapeurs-pompiers. Combattre la délinquance constitue réellement une priorité du Gouvernement ; nous en avons largement débattu lors de l’examen de la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite « LOPPSI 2 ».
En termes de masse financière, la mission « Sécurité » atteint 17,1 milliards d’euros, avec une progression de 1,5 %. Grâce aux efforts permanents de modernisation et de mutualisation des moyens humains et techniques, gendarmerie et police peuvent poursuivre une coopération utile et efficace.
Je mettrai constamment en évidence l’aspect humain, par respect et reconnaissance à l’égard des hommes et des femmes qui risquent leur vie au quotidien pour sauver celle des autres ; cet aspect a été souligné par nos collègues. Les Journées nationales du souvenir, organisées tant par la gendarmerie que par la police, sont l’occasion de rappeler la mémoire de ceux qui ont donné leur vie.
Mon intervention portera plus particulièrement sur le programme 152, « Gendarmerie nationale », notamment en ce qui concerne les territoires ruraux.
Représentant un département de 285 000 habitants, les Ardennes, je rappellerai, à mon tour, notre attachement à tous, élus locaux et habitants, à la répartition territoriale et au statut militaire de la gendarmerie, comme l’a fort justement rappelé Gérard Larcher.
En effet, pour nos petites communes, les gendarmes sont des interlocuteurs de proximité qu’il convient de soutenir. Tout repose sur un climat de confiance entre nos gendarmes et l’ensemble des élus. Cela est souvent rappelé lors des cérémonies de sainte Geneviève, la patronne des gendarmes, qui ont lieu actuellement.
La mise en place des communautés de brigades a permis quelques progrès, notamment grâce à leur présence sur le terrain conjointement avec les brigades motorisées, lesquelles accomplissent un travail considérable pour lutter contre l’insécurité routière, qui est aussi une priorité gouvernementale.
Toutefois, comme l’ont affirmé un certain nombre de collègues avec conviction et passion, les petites brigades doivent, malgré les contraintes légitimes de la RGPP, être maintenues, voire renforcées. Elles couvrent en effet de nombreuses petites communes réparties sur de grands espaces et sont indispensables aux élus locaux et aux habitants.
Pour les maires de petites communes, dont je fais partie, les gendarmes, comme les sapeurs-pompiers, font partie des interlocuteurs de proximité. On le rappelle souvent lors des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD.
Je forme donc de nouveau le vœu, monsieur le ministre, en toute sincérité, que des effectifs suffisants puissent être maintenus dans les petites brigades afin de conserver cette proximité de terrain, afin de lutter contre la délinquance et défendre les personnes les plus fragiles. J’y associe aussi le travail accompli par les personnels retraités, réservistes de la gendarmerie, pour l’aide apportée aux actifs.
En conclusion, la protection et la sécurité de nos concitoyens, en particulier des plus fragiles, doivent incontestablement rester une priorité ; c'est pourquoi, avec mes collègues du groupe UMP, je voterai les crédits de la mission « Sécurité ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le président, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier tous ceux qui, sur les diverses travées de la Haute Assemblée, ont tenu à rendre hommage au dévouement et aux qualités professionnelles de nos policiers et de nos gendarmes.
M. Gérard Larcher a eu raison de souligner que les gendarmes étaient engagés non seulement sur le territoire métropolitain, mais aussi sur des théâtres extrêmement dangereux à l’extérieur, notamment en Afghanistan.
Malheureusement, des faits tragiques illustrent de temps à autre la capacité de dévouement de ces policiers et de ces gendarmes, et je souhaiterais que nous ayons bien à l’esprit, nous et nos concitoyens, et pas seulement à l’occasion de ces événements tragiques, tout ce qu’ils font pour la sécurité quotidienne des Français.
Je voudrais répondre aux orateurs qui se sont exprimés sur les travées socialistes que nous sommes tout aussi républicains qu’eux et que ni la majorité présidentielle ni le Gouvernement n’ont de leçons de républicanisme à recevoir !
M. Gérard Larcher, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean-Louis Carrère. Nous siphonnons tout de même un peu moins l’extrême droite !
M. Claude Guéant, ministre. Nous connaissons les principes de la République et nous y sommes attachés, notre action quotidienne est là pour le démontrer. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Je suis surpris que certains contestent encore la nécessité pour notre pays de faire des efforts pour maîtriser ses finances publiques. Dans l’état de menace que représente aujourd'hui la situation monétaire et financière, non seulement européenne mais aussi mondiale, ces observations me laissent perplexes.
M. Jean-Louis Carrère. Vous avez fait 75 milliards d’euros de cadeaux fiscaux aux plus riches !
M. Claude Guéant, ministre. Nous avons un besoin incontestable, absolu, de maîtrise de nos finances publiques, et cela entraîne forcément des conséquences.
M. Pierre-Yves Collombat. Et la relance économique ?
M. Claude Guéant, ministre. La relance économique, monsieur Collombat, j’imagine que vous préconisez de la faire avec de la dépense publique, c'est-à-dire avec un creusement de la dette.
M. Pierre-Yves Collombat. Non, par la monétarisation de la dette ! C’est le seul moyen de nous en sortir. Même le Président de la République l’a dit.