Mme la présidente. L'amendement n° 240, présenté par Mmes Génisson, Demontès, Alquier, Archimbaud et Campion, MM. Carvounas et Cazeau, Mme Claireaux, M. Desessard, Mmes Duriez et Ghali, MM. Godefroy, Jeannerot, Kerdraon, Labazée, Le Menn et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz et Schillinger, MM. Teulade, Vergoz et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
2° La deuxième phrase est supprimée.
La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. Si vous le permettez, madame la présidente, je présenterai également l’amendement n° 241.
Ma première proposition porte sur la contribution employeur et la seconde sur la contribution salariale.
Nous considérons que la justice sociale et l’impératif de responsabilité financière imposent de rechercher de nouvelles sources de financement en mettant à contribution toutes les formes de revenus.
C’est la raison pour laquelle l’amendement n° 240 vise à relever à 20 % la contribution patronale sur les stock-options et sur les attributions d’actions gratuites.
La contribution employeur sur les stock-options et les actions gratuites a été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008. Elle permet de faire contribuer au financement de la protection sociale des éléments de rémunérations accessoires aux salaires qui ne sont pas actuellement soumis à cotisations sociales.
L’article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a relevé de 10 % à 14 % le taux de la contribution patronale sur les stock-options et les attributions d’actions gratuites. Toutefois, ce taux reste fixé à 10 % pour les attributions d’actions gratuites dont la valeur annuelle par salarié est inférieure à la moitié du plafond de la sécurité sociale, soit 17 676 euros pour 2011.
Ce prélèvement est actuellement dérogatoire par rapport aux taux de droit commun de cotisations sociales sur les salaires. Il convient donc de corriger cette injustice en portant le taux de la contribution employeur sur les stock-options et sur les attributions d’actions gratuites à 20 %.
S’agissant de la contribution salariale, l’article 11 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 a relevé de 2,5 % à 8 % le taux de la contribution salariale sur les stock-options et les attributions d’actions gratuites. Cependant, ce taux reste fixé à 2,5 % pour les attributions d’actions gratuites dont la valeur annuelle par salarié est inférieure à la moitié du plafond de la sécurité sociale.
Ce prélèvement est actuellement dérogatoire par rapport aux taux de droit commun de cotisations sociales sur les salaires. Il convient donc de corriger cette injustice en portant le taux de la contribution salariale sur les stock-options et sur les attributions d’actions gratuites à 10 %.
Mme la présidente. L’amendement n° 160 rectifié, présenté par M. Fouché, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du II de l'article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Cet amendement me donne l’occasion de revenir sur le débat relatif au renforcement de la taxation des dirigeants qui s’octroient des indemnités trop importantes.
Dans certaines grandes entreprises, nombreux sont les dirigeants concernés, alors que, parfois, ils n’ont pas fait preuve, pour autant, d’un mérite extraordinaire. Ils sont d’ailleurs les premiers à convenir qu’en cette période de restriction budgétaire il faut mettre à contribution les plus aisés.
Actuellement, le taux de la contribution employeur sur les stock-options et les actions gratuites, créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, est fixé à 14 %. Je propose, par cet amendement, le relèvement du taux de cette contribution à 20 %.
M. Roland Courteau. C’est bien !
M. Alain Fouché. Mon objectif est, d’une part, de moraliser une pratique qui permet à certains dirigeants de percevoir des rémunérations exorbitantes et, d’autre part, de faire contribuer suffisamment et équitablement les stock-options et actions gratuites au financement de notre système social. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme la présidente. L’amendement n° 241, présenté par Mmes Génisson, Demontès, Alquier, Archimbaud et Campion, MM. Carvounas et Cazeau, Mme Claireaux, M. Desessard, Mmes Duriez et Ghali, MM. Godefroy, Jeannerot, Kerdraon, Labazée, Le Menn et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz et Schillinger, MM. Teulade, Vergoz et les membres du groupe socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 137–14 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 56 rectifié tend à relever de façon très significative les contributions patronales et salariales sur les attributions de stock-options. J’observe que des sénateurs de diverses tendances ont exprimé cette préoccupation au travers de plusieurs amendements.
La commission a préféré donner son assentiment à l’amendement n° 240, qui vise à relever significativement, mais de façon plus mesurée que ne le proposent nos collègues du groupe CRC, le taux de la contribution patronale, en le faisant passer de 14 % à 20 %
En outre, cet amendement permet d’aligner le régime des attributions gratuites d’actions sur celui des stock-options.
S’agissant de la contribution salariale, la commission a choisi d’émettre un avis favorable sur l’amendement n° 241, qui tend à relever le taux de cette contribution de 8 % à 10 %, et à aligner le régime de l’attribution gratuite d’actions sur celui des stock-options.
Je demande donc aux auteurs de l’amendement n° 56 rectifié de bien vouloir le retirer, au profit des amendements nos 240 et 241.
Je demande également à M. Fouché de bien vouloir retirer l’amendement n° 160 rectifié, très proche de l’amendement n° 240, mais qui ne vise pas de fait les attributions gratuites d’actions, même si elles sont mentionnées dans l’objet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Watrin, l’amendement n° 56 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Cet amendement ne nous paraît nullement excessif. Toutefois, nous acceptons de le retirer au profit des amendements nos 240 et 241 qui vont moins loin.
M. Gérard Dériot. Quelle faiblesse ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. L’amendement n° 56 rectifié est retiré.
Monsieur Fouché, l’amendement n° 160 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Fouché. Je me rallie à la position du rapporteur général. L’amendement n° 240 relatif à la contribution employeur est d’ailleurs quasiment identique au mien. Aussi, je le voterai.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Je mets aux voix l’amendement n° 241.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 10.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 58 rectifié est présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 242 est présenté par Mmes Génisson, Demontès, Alquier, Archimbaud et Campion, MM. Carvounas et Cazeau, Mme Claireaux, M. Desessard, Mmes Duriez et Ghali, MM. Godefroy, Jeannerot, Kerdraon, Labazée, Le Menn et J.C. Leroy, Mmes Meunier, Printz et Schillinger, MM. Teulade, Vergoz et les membres du groupe socialiste, apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 137–15 du code de la sécurité sociale est supprimé.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l’amendement n° 58 rectifié.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement vise à inclure les attributions de stock-options et d’actions gratuites dans l’assiette du forfait social. Une proposition de plus concernant les stock-options, direz-vous...
Vous avez raison : le fait que nous déposions plusieurs amendements tendant à taxer ces stock-options et ces attributions d’actions gratuites attestent du caractère dérogatoire de leur régime social et fiscal. Il témoigne également des marges de manœuvre dont nous disposons pour rendre à la fois plus juste et plus efficient le financement de notre système de sécurité sociale.
Croyez bien, mes chers collègues, que si les stock-options étaient soumises aux mêmes taux de prélèvements sociaux que les salaires, nous ne ferions pas ces propositions !
Avec cette série d’amendements, c’est le débat fondamental sur le partage de la richesse que nous entendons ouvrir. Les salariés et les ouvriers que nous rencontrons nous font part, sans cesse, de l’indécente faiblesse de leurs rémunérations, de leur incapacité à boucler les fins de mois et des incidences de cette situation, notamment sur leur état de santé. De leur côté, les heureux bénéficiaires de stock-options semblent ignorer la crise et bénéficient, outre de rémunérations sans commune mesure avec celles que touchent les salariés, d’importants revenus engendrés par ces stock-options et moins taxés que les salaires.
Cette situation n’est pas tenable pour qui souhaite que les efforts soient partagés par tous, et non par les seuls salariés. C’est pourquoi nous proposons, dans un esprit de justice et de cohérence par rapport à l’ensemble des amendements déposés concernant les retraites chapeaux et les stock-options, d’inclure les attributions de stock-options et d’actions gratuites dans l’assiette du forfait social, qui serait portée, si les amendements du rapporteur général étaient adoptés, aux environs de 15 %, contre 11 % à l’heure actuelle.
Et ce d’autant plus que, depuis plusieurs années, la part de richesse créée dans l’entreprise et destinée aux salaires n’a cessé de croître en faveur non de l’investissement, mais du capital et de la rémunération des dividendes.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons, mes chers collègues, à voter en faveur de notre amendement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour présenter l’amendement n° 242.
Mme Catherine Génisson. Au travers du présent amendement, il s’agit toujours de notre exigence de justice sociale et de notre impératif de responsabilité financière. Cet amendement vise à inclure les stock-options et les attributions gratuites d’actions dans l’assiette du forfait social. Ce dernier serait ainsi porté à 20 %.
Depuis 1980, la part des salaires dans la valeur ajoutée permettant de mesurer l’ensemble des revenus générés par l’activité productive créée par les entreprises a baissé, alors même que la rémunération du capital, c’est-à-dire le profit, a augmenté. Aujourd’hui, la part des salaires est de 65 %, soit le même taux qu’entre 1960 et 1975, alors qu’elle était de 75 % entre 1975 et 1985, soit une perte de dix points. Parallèlement, la part des dividendes a gagné 10 points entre 1993 et 2007. Il est donc normal que la richesse créée par tous contribue à la rémunération différée de tous.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces deux amendements identiques ont pour objet d’ajouter le taux du forfait social à celui qui est prévu spécifiquement pour les stock-options et les attributions gratuites d’actions.
Que résulterait-il de l’adoption de ces amendements ?
Avant nos votes, en additionnant le taux de 6 % du forfait social et celui de 14 % applicable aux stock-options, nous aurions obtenu un taux de 20 %.
Après nos votes, en ajoutant le taux de 11 % du forfait social et celui de 20 % de la contribution spécifique, nous obtenons un taux de 31 %.
Je tiens à souligner que ces deux modes d’imposition, le forfait social et la contribution spécifique, répondent aujourd’hui à des logiques différentes. Est-il souhaitable d’aller aussi loin que le suggèrent les auteurs de ces deux amendements en provoquant cet effet cumulatif ? Je n’en suis pas certain.
Je souhaite donc le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Pasquet, l’amendement n° 58 rectifié est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. J’ai bien entendu les propos du rapporteur général, qui connaît notre position sur ce sujet. Pour notre part, nous poursuivons la logique qui est la nôtre. Aussi, nous maintenons cet amendement.
Mme la présidente. Madame Génisson, l’amendement n° 242 est-il maintenu ?
Mme Catherine Génisson. J’accepte de répondre à la sollicitation du rapporteur général : je retire cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 59 rectifié, présenté par Mmes Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 137–26 du code de la sécurité sociale, il est inséré une division ainsi rédigée :
« Section 12
« Contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs de marchés financiers
« Art. L. 137-27. – Il est institué, au profit des régimes obligatoires d’assurance maladie et d’assurance vieillesse une contribution de 40 %, à la charge de l’employeur, sur la part de rémunération variable dont le montant excède le plafond annuel défini par l’article L. 241–3 versée, sous quelque forme que ce soit, aux salariés des prestataires de services visés au Livre V du code monétaire et financier. »
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Cet amendement tend à instaurer une contribution patronale sur la part variable de rémunération des opérateurs des marchés financiers, ou, plus simplement, à instaurer à la charge des employeurs une contribution de l’ordre de 40 % sur les bonus que perçoivent ceux qu’il est convenu d’appeler les traders.
Avec la crise et l’affaire de la Société générale, notamment, nous aurions pu croire réglée la question des bonus versés aux traders, tant la presse s’était fait l’écho d’un système totalement inopérant, dans lequel les personnes qui prenaient les risques les plus inconsidérés, qui mettaient en péril des pans entiers de l’économie, percevaient des rémunérations considérables.
Hélas, tel n’est pas le cas ! J’en veux pour preuve la constitution discrète par BNP Paribas d’une provision de 1 milliard d’euros pour le versement de bonus à ses opérateurs.
De façon générale, les bonus versés aux traders n’ont guère diminué et les grandes banques telles que la Société générale, le Crédit agricole et Natixis, pour ne citer qu’elles, ont versé, en 2010, à leurs traders des bonus équivalant à ceux de l’année 2009. Ainsi, au Crédit agricole, le bonus moyen versé en 2010 a été de 150 000 euros ; il est de 291 000 euros par collaborateur chez BNP Paribas.
C’est la démonstration que les banques n’ont tiré aucune leçon de la crise qu’elles ont contribué à créer.
La situation est telle que Michel Camdessus, en qualité de contrôleur des rémunérations des professionnels des marchés, a remis à Mme Lagarde, du temps où elle était encore ministre, un rapport dans lequel il dénonce « un système de rémunérations hors norme ».
Notre amendement, s’il est adopté, permettra donc de mettre un terme à ce scandale puisque nous proposons d’instaurer une cotisation patronale de 40 % sur ces éléments, afin, chacun l’aura compris, de rendre dissuasif le recours à de tels bonus.
Par ailleurs, madame la ministre, je voudrais profiter de l’occasion que m’offre la présentation de cet amendement pour vous interroger.
Une directive européenne encadrant les bonus des banquiers prévoit que les parts fixe et variable de la rémunération totale doivent être « équilibrées ». Or il semblerait que la Commission européenne considère que la transposition par la France de cette directive n’est pas conforme à son esprit puisque le mot « équilibré », qui permet d’éviter de nombreux abus, aurait été remplacé par l’expression « un rapport approprié entre les composantes fixe et variable ».
Cette transposition ainsi rédigée vide donc la directive de son sens.
Nous ne sommes d’ailleurs pas les seuls à l’affirmer. Jean-Paul Gauzès, député européen UMP et porte-parole du groupe du Parti populaire européen sur les questions économiques, a déclaré ceci : « En l’état, la transposition française ne veut rien dire. Dans l’esprit du législateur européen, la part du variable devait rester en deçà du fixe dans la majorité des cas. »
Tout cela mérite des éclaircissements et j’aimerais savoir, madame la ministre, ce qu’il advient réellement de l’encadrement, en France, de la part variable de rémunération des traders.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 336, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 59 rect.
Alinéa 6
Remplacer le taux :
40 %
par le taux :
20 %
La parole est à M. le rapporteur général, pour défendre le sous-amendement n° 336 et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 59 rectifié.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 59 rectifié vise à instaurer une nouvelle contribution patronale au taux de 40 % sur la part variable de rémunération des opérateurs de marchés financiers pour le montant qui excède le plafond annuel de la sécurité sociale.
Bien entendu, personne ne conteste que les rémunérations et bonus des traders doivent être taxés. Toujours est-il qu’ils sont déjà soumis aux cotisations sociales de droit commun, auxquelles s’ajouterait la contribution que les auteurs de cet amendement proposent de créer. La commission ayant considéré comme trop élevé ce taux de 40 %, elle propose, par son sous-amendement, de ramener celui-ci à 20 %.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Monsieur Billout, je ferai part à mes services de la question que vous m’avez posée au sujet de la transcription de la directive visant à encadrer les bonus. S’il apparaît qu’elle n’a pas été correctement transposée, nous prendrons les mesures nécessaires pour ce faire.
J’en viens maintenant à la question des bonus.
Anticipant les normes prudentielles de Bâle III, nous avons demandé aux banques françaises de se recapitaliser, afin qu’elles disposent de plus de fonds propres et qu’elles soient donc mieux armées pour faire face à leurs risques. Dès juin prochain, les fonds propres des banques devront atteindre 9 %.
Nous avons demandé que cette recapitalisation soit assurée par des fonds privés. Cela signifie que les banques devront trouver par-devers elles les fonds nécessaires à leur recapitalisation. (M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.) Cette année, elles seront donc contraintes de diminuer les dividendes et les bonus versés, voire de les supprimer purement et simplement.
J’ajoute, monsieur le sénateur, mais vous le savez puisque c’est le résultat du travail de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte définitif sur le projet de loi de finances rectificative visant à sauver la banque Dexia, que la représentation nationale a unanimement décidé que toute banque qui serait aidée par de l’argent public ne pourrait plus verser de bonus.
Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 59 rectifié. Il ne peut être question de toujours taxer et retaxer (M. Éric Doligé s’exclame.) quand les taxes sont déjà suffisamment nombreuses.
Mme la présidente. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 59 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
L'amendement n° 161, présenté par M. Fouché, est ainsi libellé :
Après l'article 10
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 137–26 du code de la sécurité sociale, il est inséré une section 12 et un article L. 137–27 ainsi rédigés :
« Section 12
« Contribution patronale sur les nouvelles technologies se substituant aux travailleurs
« Art L. 137–27. - Lorsque l'employeur procède à un licenciement pour motif économique résultant de l'introduction dans l'entreprise de nouvelles technologies se substituant aux travailleurs, il est tenu de s'acquitter d'une cotisation sociale au titre de l'assurance vieillesse au cours des trois années à compter de la date du licenciement.
« Le montant de cette cotisation est équivalent au deux tiers du montant global des cotisations sociales dont l'employeur aurait dû s'acquitter pour chacun des employés remplacés.
« Les modalités de règlement sont déterminées par décret. »
La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Cet amendement, que j’ai déjà défendu dans le passé, porte sur l’instauration d’une contribution patronale sur les nouvelles technologies se substituant aux travailleurs. Il vise à faire participer les entreprises à l’effort de solidarité demandé aux Français afin de rééquilibrer les finances sociales.
Actuellement, un employeur qui remplace ses salariés par un outil de production automatisé – par exemple une caisse automatique – ne paie plus de cotisations sociales.
Cette perte pour les caisses de retraite est accentuée en raison de la prise en charge de l’employé licencié par notre système de solidarité.
Nous voyons bien le problème que pose cette absence de cotisation : le système qui finance l’allocation chômage n’est plus financé par les cotisations salariales.
Bien entendu, il n’est pas question de « casser » les machines ni les emplois techniques que celles-ci procurent. Cet amendement vise seulement à taxer les entreprises lorsque la mise en place de machines, que ce soit dans un supermarché, à un péage d’autoroute ou ailleurs, entraîne des licenciements.
En réalité, il a pour objet de limiter l’impact sur les salariés de l’installation d’outils de production automatisés. La contribution sociale qu’il tend à instaurer inciterait notamment l’entreprise à replacer le travailleur au sein de son équipe à l’issue d’une formation.
Mes chers collègues, cet amendement me paraît être une solution équilibrée pour maintenir la base salariale cotisante en cas de remplacement de salariés par des machines, et ce dans certains cas. L’entreprise palliera ainsi la perte de financement pour nos régimes de retraite.
Comme je l’avais rappelé l’année dernière, un dispositif similaire avait déjà été examiné lors de l’examen du texte qui est devenu la loi portant réforme des retraites. Le ministre de l’époque m’avait alors indiqué que cet amendement était intéressant, mais qu’il avait davantage sa place dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
C’est donc pour cette raison que je le présente aujourd’hui.
M. Alain Néri. Très bien !
M. Jean-Jacques Mirassou. Bon argument !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à instaurer une contribution patronale sur les nouvelles technologies se substituant aux travailleurs.
Cette idée est tout à fait séduisante et devrait certainement être incluse dans une réflexion plus générale sur le financement de la protection sociale.
Cependant, le dispositif proposé par l’auteur de l’amendement demeure assez flou et paraît particulièrement complexe à mettre en œuvre. Aussi, mon cher collègue, je suis au regret de vous demander de bien vouloir le retirer ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
Cela étant, il s’agit d’un amendement d’appel et nous ne devrons pas nous en tenir à cet avis négatif.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Une fois n’est pas coutume : même avis que le rapporteur général, mot pour mot !
Mme la présidente. Monsieur Fouché, l'amendement n° 161 est-il maintenu ?
M. Alain Fouché. Il est bien précisé dans ma proposition que l’employeur devra s’acquitter de cette contribution dans le cas seulement où il procède à un licenciement. Aussi, même s’il s’agit d’un amendement d’appel, celui-ci me paraît intéressant. C’est pourquoi je le maintiens.
M. Roland Courteau. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Notre collègue Alain Fouché aborde, à travers son amendement, un sujet dont nous débattons régulièrement et qui est très important pour nous, à savoir la question de la participation sociale des machines au financement de la sécurité sociale.
L’idée de notre collègue est de considérer que, à partir du moment où un salarié est remplacé par une machine, celle-ci doit en quelque sorte cotiser puisque l’employeur réalise de ce fait une économie substantielle en n’acquittant plus de cotisations.
Pourtant, paradoxalement, la valeur ajoutée ne diminue pas lorsqu’un salarié est remplacé par une machine ; elle a même tendance à croître considérablement puisque la productivité diminue rarement avec l’apparition des machines.
À l’inverse, la part du salaire et des cotisations sociales diminue de fait avec le remplacement de l’humain par la machine, ce qui laisse la part destinée à la rémunération du capital augmenter. Comme celle-ci est notoirement nettement moins taxée que le travail, les grands gagnants sont les actionnaires, le grand perdant étant la sécurité sociale, qui non seulement voit ses ressources diminuer, mais encore doit délivrer des prestations sociales telles que les allocations chômage, ce qu’elle ne faisait pas auparavant.
Depuis le début de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, nous ne cessons de dire que le Gouvernement n’a pas pris les mesures nécessaires pour maintenir l’emploi, singulièrement l’emploi industriel. Cette disposition pourrait y contribuer, même si, pour nous, il faut sanctionner activement, par une modulation du taux des cotisations sociales, les entreprises qui pratiquent une politique défavorable aux salariés et à l’investissement.
Pour autant, la proposition que sous-tend cet amendement de soumettre à cotisations sociales non plus exclusivement les salaires, mais la valeur ajoutée elle-même mérite d’être étudiée.
C’est pourquoi nous voterons cette amendement, tout en espérant qu’il suscitera en commission mixte paritaire et éventuellement à l’Assemblée nationale un débat qui nous semble utile.