M. Jean-Jacques Mirassou. Alors, il faut aussi venir en Haute-Garonne !
services publics dans les territoires
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre de l’intérieur, on nous annonce qu’il n’y aura pas de fermetures de classes de primaire en 2012, c’est-à-dire après l’élection présidentielle ! Mais il y en aura 1 500 à la rentrée de 2011, dans quelques mois !
M. Jean-Jacques Mirassou. Absolument !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, comment pouvez-vous souscrire à une telle démagogie ? Vous le savez, ce genre de promesse est facile et ne convainc absolument personne.
M. Roland Courteau. En tout cas, pas les Français !
M. Jean-Pierre Sueur. D’ailleurs, nous nous demandons comment vous allez pouvoir encore supprimer des postes alors que vous en avez déjà tant supprimé chez les conseillers pédagogiques, au sein du corps des remplaçants, chez les aides-éducateurs, dans les RASED, etc. Dès lors, de nombreux acteurs de l’enseignement s’interrogent : ne va-t-on pas prélever dans le secondaire les postes qui seraient économisés avec cette mesure démagogique ?
M. René-Pierre Signé. Ce sont les collèges qui vont payer !
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, nous souhaitons donc vivement que vous nous disiez la vérité sur ce sujet, si toutefois vous le pouvez, parce que nous considérons, et nous ne sommes pas les seuls, que les 16 000 suppressions de postes cette année dans l’éducation nationale – 50 000 depuis 2007 – sont l’expression d’une forme de démagogie, mais aussi une décision grave pour notre système éducatif.
Et je pourrais prendre bien d’autres exemples.
Dans le département de la Seine-Saint-Denis, les avocats sont en grève depuis un mois. Ils protestent contre le manque de crédits pour financer l’aide juridictionnelle et la réforme de la garde à vue. On ne peut payer les frais de justice.
Aujourd'hui, on apprend que de brillants professeurs des hôpitaux donnent leur démission pour protester contre le manque de moyens.
J'en viens au monde rural. Une enquête a été menée par l'Association des petites villes de France, structure pluraliste : 84 % des maires interrogés ont déclaré que l'État ne jouait pas son rôle dans le monde rural.
Dans tous les cantons de ce pays, dans tous les territoires, on constate qu’il y a moins de tribunaux, moins de présence de la gendarmerie, moins de service public des transports, moins de service public financier, bref, moins de service public dans tous les domaines.
M. René-Pierre Signé. Oui !
M. Jean-Pierre Sueur. Il y a aussi moins de médecins.
Ma question est simple. Vous avez créé un bouclier fiscal injuste. Ne pensez-vous pas qu'il serait temps d’installer un « bouclier rural »,…
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Jean-Pierre Sueur. … afin de préserver les services publics qui sont absolument nécessaires à l'armature sociale de notre monde rural ?
Nous n'en sommes même plus à demander une pause de la RGPP : nous constatons les effets délétères de sa mise en place pour l'ensemble du service public et pour l'État républicain. Monsieur le ministre, n’estimez-vous pas qu'il faut changer de cap pour sauvegarder cet État républicain qui est notre bien commun et auquel vous êtes attaché ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Jacqueline Gourault applaudit également.)
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le sénateur, je sais que vous souhaitiez initialement adresser votre question à Bruno Le Maire, qui est en charge de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Je vous prie donc, tout d'abord, de bien vouloir l’excuser : il est retenu par la préparation du G20 sur la stabilisation des prix des matières premières.
En ce qui concerne le bouclier fiscal, je me permets de vous rappeler que le Gouvernement en propose la suppression.
M. Paul Raoult. Au bout de quatre ans !
M. Roland Courteau. Il ne fallait pas le créer !
M. Claude Guéant, ministre. S’agissant de garantir aux habitants de nos zones rurales un accès à des services publics de qualité, le Gouvernement vous rejoint complètement. C'est même l'un des axes majeurs de notre politique d’aménagement du territoire. (Ah ? sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Roland Courteau. On ne s'en aperçoit pas !
M. Claude Guéant, ministre. Cela étant, nous divergeons sur les moyens d’améliorer les services en milieu rural. En effet, et vous venez d'en faire la brillante démonstration, vous souhaitez maintenir les structures déjà en place, c'est-à-dire conserver les services publics du passé. (Exclamations sur les mêmes travées.)
Mme Éliane Assassi. Du passé ?
M. Claude Guéant, ministre. Pour notre part, nous souhaitons privilégier la qualité du service rendu et, par conséquent, adapter les structures et les services à notre siècle.
Prenons quelques exemples.
Un contrat a été signé entre La Poste et l'État, au titre duquel 17 000 points Poste sont maintenus.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il n'y a plus de service public ! C'est à peine si l’on peut acheter un timbre !
M. Claude Guéant, ministre. J'ajoute que nous avons amélioré les services bancaires délivrés dans les bureaux de poste.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En les supprimant !
M. Claude Guéant, ministre. Cela se traduit par l’installation de distributeurs automatiques de billets, la création de services bancaires adaptés aux entreprises en zone rurale et la mise en place d’un réseau de distribution de téléphonie mobile.
M. Jacques Mahéas. N’importe quoi !
M. Claude Guéant, ministre. En matière de transports, une convention a été signée entre l'État et la SNCF pour conforter les trains d'équilibre du territoire. Elle sanctuarise les 40 lignes auxquelles vous étiez légitimement attachés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout cela est à la charge des collectivités locales ! Il n'y a plus d'État !
M. Claude Guéant, ministre. En outre, le matériel ferroviaire sera totalement remplacé. Pour les usagers, l’amélioration du service est incontestable. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
MM. Jean-Jacques Mirassou et Jean-Pierre Godefroy. Mais non !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mensonges !
M. Claude Guéant, ministre. Je me permets d’attirer votre attention sur le fait que, pour fabriquer un train, il faut plus que quelques jours !
M. Didier Boulaud. On nous cache tout, on ne nous dit rien !
M. René-Pierre Signé. Et les écoles ?
M. Claude Guéant, ministre. Eh bien, s’agissant de l’école, précisément, le Gouvernement est extrêmement attaché au maintien d’un réseau performant au profit des enfants vivant en milieu rural. Je souligne qu’aucune création ou suppression de poste n’est décidée sans faire l'objet de négociations préalables.
Vous avez évoqué des suppressions de postes. C'est vrai qu’il y en a. Mais je rappelle que nous devons nous soumettre à un impératif : l'équilibre de nos finances publiques, François Baroin l’a souligné tout à l'heure. Je suis surpris de la légèreté avec laquelle vous traitez un problème comme celui-là. Le Gouvernement ne souhaite pas que la France se retrouve dans la situation de la Grèce, du Portugal ou de l'Irlande ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Assez de mensonges !
M. Claude Guéant, ministre. Savez-vous que la Grèce emprunte aujourd'hui sur deux ans à 30 % ?
Par ailleurs, à la rentrée prochaine, nous compterons 500 000 élèves de moins et 34 000 professeurs de plus qu'en 1990.
Pour ce qui est de la santé, 250 maisons de santé pluridisciplinaires seront créées d'ici à 2013.
M. Didier Boulaud. Là encore, ce sont les départements qui paieront ! Vous n'avez rien fait !
M. Claude Guéant, ministre. Je pense aussi au haut débit, aux pôles d'excellence rurale et aux finances des collectivités territoriales.
Depuis 2004, la dotation de solidarité rurale a été multipliée par deux, pour atteindre 850 millions d'euros.
Comme le dit le proverbe, ce n'est pas en améliorant la bougie que l'on a inventé l'électricité. La politique du Gouvernement, c'est de préparer les services publics de notre siècle. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Didier Boulaud. Vous, vous n’avez pas inventé l’eau chaude !
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre.
M. Jacques Legendre. Ma question s'adresse à M. le ministre chargé de l'industrie.
Voilà quinze jours, a été rendu public un document interne du groupe PSA qui évoquait la possible fermeture de deux usines, l'une à Aulnay-sous-Bois, l'autre à Hordain, entre Denain et Cambrai.
Cette annonce a suscité une émotion considérable, et la crainte demeure.
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
M. Jacques Legendre. Le Premier ministre a réagi très vite : ses fermes propos étaient bienvenus. Toutefois, il me semble nécessaire et utile de redire ici, au Sénat, pourquoi une éventuelle fermeture de ces usines, en particulier celle d’Hordain, que je connais bien, serait insupportable et inacceptable.
M. Paul Raoult. Ça, c'est vrai !
M. Jacques Legendre. Sevelnord représente 2 600 emplois. C'est le premier employeur du Cambrésis et l'un des principaux employeurs du Valenciennois, même si les effectifs ont diminué ces dernières années.
M. Jacques Mahéas. Aulnay, c’est 3 600 emplois !
M. Jacques Legendre. Dans une zone cruellement touchée jadis par la disparition de la sidérurgie à Denain, les usines automobiles, en particulier Sevelnord, ont donné un nouvel espoir à une population qui aime le travail industriel.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Elle est récompensée !
M. Jacques Legendre. Nous sommes nombreux ici, sur toutes les travées, à vouloir la réindustrialisation de la France.
M. René-Pierre Signé. Oui !
M. Jacques Legendre. J'ai participé à la mission commune d’information du Sénat sur la réindustrialisation des territoires,...
M. Jean-Jacques Mirassou. Avec moi !
M. Jacques Legendre. ... dont les membres se sont notamment rendus à Cambrai et à Valenciennes, dans ces arrondissements qui relèvent la tête, mais qui ne pourraient supporter un nouveau choc d'une telle gravité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que ferez-vous, alors ?
M. Jacques Legendre. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que le Gouvernement usera de toute son influence sur le groupe PSA qu'il a su aider quand il le fallait pour que soient maintenus dans la durée les sites industriels d’Aulnay-sous-Bois et d’Hordain et que soit décidée la production de nouveaux modèles sur ces sites ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Didier Boulaud. Il y a du boulot !
M. Paul Raoult. Plus que 300 jours à tenir !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, chargé du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout ça ?
M. Didier Guillaume. Il a le temps de tout faire ?
M. René-Pierre Signé. Voilà Zorro !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Monsieur le sénateur, je vous prie d'excuser Éric Besson, ministre chargé de l'industrie, qui anime actuellement au Bourget une réunion avec l'ensemble des industriels de notre filière aéronautique.
M. Didier Boulaud. Il est tout excusé ! Ici, il ne manque pas !
Mme Raymonde Le Texier. Moins on le voit, mieux on se porte !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Au mois de mai dernier, le groupe PSA a annoncé la fin de son partenariat en 2017 avec Fiat pour le site Sevelnord d’Hordain. Aujourd'hui, celui-ci produit, en collaboration avec le constructeur italien, des véhicules utilitaires. Toutefois, sa production est assurée à 80 % par des modèles Peugeot.
Au cours des dernières semaines, plusieurs documents de travail internes au groupe automobile français ont été divulgués. Le président du groupe PSA a aussitôt précisé au Gouvernement qu'il ne s'agissait que de documents de réflexion (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG) qui dataient de 2010 et qui, vous le savez, n’ont été suivis d'aucune décision.
M. David Assouline. Et Aulnay ?
M. Jean-Jacques Mirassou. Et Molex ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On les connaît : ils disent toujours que ce n'est pas vrai !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Qui plus est, le plan de charge de Sevelnord est clairement assuré jusqu'en 2017. Comme nous l'avons annoncé, nous travaillerons de façon approfondie avec PSA pour garantir l'avenir industriel du site après cette date. Cela sera confirmé par le groupe français à ses salariés lors d'un comité central d'entreprise exceptionnel qui se tient cet après-midi même.
M. David Assouline. Et Aulnay ?
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Depuis 2009, PSA a affecté en France la totalité de ses nouveaux modèles. L'entreprise réalise 40 % de sa production sur notre territoire et exporte la moitié de sa production française.
L'État a permis aux deux constructeurs automobiles français de sortir de la crise dans de bonnes conditions.
M. Jean-Marc Todeschini. Ce n’est pas le cas de Molex !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Il leur a apporté 6,2 milliards d'euros de prêts et a délivré 1,4 million de primes à la casse pour un montant de plus de 1 milliard d'euros. L'État n'acceptera pas que, à peine sortis de la crise grâce à son aide, ces constructeurs annoncent la fermeture ou la délocalisation de l'un de leurs sites industriels. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jean-Pierre Godefroy. Vous le dites à chaque fois !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Même après la crise, l'État poursuit son soutien à l'industrie automobile à travers le Fonds de modernisation des équipementiers automobiles : 310 millions d'euros sont investis dans 21 entreprises et les investissements d'avenir représentent 750 millions d'euros pour le véhicule du futur.
Nous restons donc très vigilants sur l'engagement industriel de PSA à Hordain.
M. Paul Raoult. On a dit la même chose pour la sidérurgie en Lorraine !
M. Didier Boulaud. Et Gandrange ?
M. David Assouline. Et Aulnay ?
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Nous agissons plus largement pour renforcer durablement notre filière automobile, car c'est l'intérêt de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – Mme Valérie Létard applaudit également.)
industrie nucléaire
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Plus de trois mois après le tremblement de terre et le tsunami qui ont ravagé le nord-est du Japon, la situation reste plus que critique à Fukushima. Des dizaines de milliers de familles ont été évacuées, une radioactivité importante continue de s’échapper des centrales endommagées. Jusqu’à quand ? Personne n’ose hasarder une réponse. De plus, les installations de pompage et de décontamination de l’eau hautement radioactive contenue dans les enceintes des réacteurs n’ont pu fonctionner que quelques heures. Une seule chose est sûre : l’accident est au moins aussi grave que celui de Tchernobyl.
Quelques jours après ces événements terribles, qui venaient de frapper un pays considéré comme l’un des plus exigeants en matière de sécurité nucléaire, un pays avec lequel nos propres autorités de sûreté entretenaient des liens étroits de coopération, et alors que les experts indépendants à travers le monde et les sites Internet spécialisés considéraient comme probable la fonte des cœurs de plusieurs réacteurs, on dénonçait ici les écologistes, accusés de vouloir « instrumentaliser » ce drame, on jugeait inutile de « sonner le tocsin ».
Et pourtant ! Deux mois et demi plus tard, à quelques heures d’une visite d’experts de l’Agence internationale de l’énergie atomique, l’AIEA, le patron de TEPCO devait finalement avouer que les cœurs de trois réacteurs avaient fondu dès les premiers jours de l’accident.
Ce qui me préoccupe en cet instant, c’est bien sûr la politique énergétique de mon pays et la probabilité presque certaine d’un accident majeur, en France ou en Europe, bien établie par Bernard Laponche et Benjamin Dessus, dont je vous encourage à lire les écrits. Mais c'est aussi l'idée que, une fois de plus, on nous ait, on vous ait menti, une idée qui vient fatalement à l'esprit dès que l'on examine la séquence des événements.
Le 24 mars dernier, Nicolas Sarkozy fut le premier chef d’État se rendre au Japon – ce qui fut salué à juste titre –, accompagné de la ministre de l’écologie et de la fine fleur des experts nucléaires français : Bernard Bigot, administrateur général du Commissariat à l’énergie atomique, Jacques Repussard, directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, Philippe Jamet, commissaire de l’Autorité de sûreté nucléaire, sans oublier, bien sûr, les équipes d’AREVA.
Qu’a dit Naoto Kan au président Sarkozy ? La vérité ? Si c’est le cas, comment se fait-il que nous n’en ayons rien su ? Se serait-il moqué de nous ? Si ce n’est pas le cas, se serait on moquait de lui ? A-t-il demandé et reçu des excuses ?
Pour tirer les leçons de cette séquence de demi-vérités et de grossiers mensonges, d’omissions et de dissimulations, il faut répondre à la question : qui a menti ? TEPCO a-t-il menti au gouvernement japonais ? Le Premier ministre japonais a-t-il menti au Président français ? Les autorités de sûreté et les entreprises japonaises ont-elles menti à leurs homologues français ? Ou bien tous ont-ils menti, convaincus qu’ils étaient que la vérité pouvait avoir des conséquences dramatiques pour l'industrie nucléaire mondiale ?
La transparence n’est pas une option ! Elle est une exigence prioritaire des peuples, ici comme en Italie, en Suisse ou en Allemagne, ici comme au Japon. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, je vous prie à mon tour de bien vouloir excuser Éric Besson ; cela a été rappelé, il est actuellement au Bourget pour défendre le développement de l'industrie aéronautique de notre pays. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Je vous répondrai sans me limiter à la question que vous posez sur le déplacement du Président de la République au Japon et sur le choix du nucléaire, que vous contestez. Il s’agit là de l’un de vos engagements politiques et non de ceux qui construisent la ligne de ce Gouvernement.
Mme Dominique Voynet. Ce n’est pas la question !
M. François Baroin, ministre. La France ne remettra pas en cause sa politique nucléaire pour de très nombreuses raisons. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Raymonde Le Texier. Ce n’est pas la question !
M. Jean-Marc Todeschini. La question, c’est celle de la transparence !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Répondez à la question, pour une fois !
M. François Baroin, ministre. La première est que le nucléaire nous a assuré l'indépendance. Vous le savez, en additionnant production nucléaire et production hydraulique, nous satisfaisons 90 % de nos besoins en électricité ; c'est un élément important.
Pour autant, le développement des énergies renouvelables dans les dix à quinze années à venir fait partie d'une stratégie globale.
M. Jean-Pierre Michel. Blablabla !
M. François Baroin, ministre. J'en viens à la transparence en matière de sécurité nucléaire.
Quatre jours après le drame de Fukushima, le Premier ministre français a saisi l'Autorité de sûreté nucléaire ainsi que le Haut Comité pour la transparence et l’information sur la sécurité nucléaire, afin qu’ait lieu une revue objective et détaillée de la réalité des dispositifs de sécurité sur les centrales nucléaires établies sur notre territoire.
L’Autorité de sûreté nucléaire dira d’ici la fin de l’année quels éléments qu’il conviendra de prendre compte pour garantir encore mieux la sécurité de nos installations. Je rappelle que les standards français de sécurité sont parmi les plus exigeants en la matière.
Cependant, nous n’avons pas attendu les résultats des travaux de cette autorité administrative indépendante puisque, dans le cadre de la visite décennale de la centrale de Fessenheim, il a été décidé de réaliser des travaux d’amélioration et de renforcement de la sûreté sur le réacteur n° 1. Autrement dit, le Gouvernement n’attend pas les résultats prévus pour la fin de l’année et investit dès à présent pour garantir la durée de vie de cette centrale.
M. Paul Raoult. Enfumage !
M. David Assouline. Répondez donc à la question !
M. François Baroin, ministre. Voilà le choix stratégique français. Voilà les modalités et les priorités affirmées en matière de sûreté nucléaire. Pour le reste, je vous laisse le soin de poursuivre vos idées. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. David Assouline. Le reste, c’est ça la question !
M. le président. La parole est à Mlle Sophie Joissains. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mlle Sophie Joissains. Le projet que je vais exposer tient au cœur de nombre de parlementaires des Bouches-du-Rhône : Jean-Claude Gaudin, Maryse Joissains, Richard Mallié, moi-même et bien d’autres,…
M. Jean-Marc Todeschini. Tous UMP !
M. Didier Boulaud. Donc tous « populaires » ! De plus en plus, même !
Mlle Sophie Joissains. … ainsi qu’au maire de la commune de Gardanne, M. Meï, et à l’ensemble de la population et des élus du bassin minier des Bouches-du-Rhône.
Je souhaite d’abord faire un bref historique.
Prévue par Charbonnages de France pour produire de l’électricité à partir de son propre charbon, la centrale thermique de Gardanne-Meyreuil a été construite dans les années cinquante et son histoire a connu de nombreux rebondissements.
En 1995, la mise en œuvre du lit fluidisé à charbon de 250 mégawatts par la Société nationale d’électricité et de thermique, la SNET, est une véritable innovation technologique.
En 1999, le Gouvernement annonce la création d’un nouveau groupe devant les organisations syndicales, le maire de Gardanne, le président du conseil général et celui du conseil régional.
En 2001, Charbonnages de France vend 30 % de ses parts au groupe espagnol ENDESA.
C’est en 2003, soit deux ans avant l’échéance prévue, que la mine de Gardanne est fermée.
En 2004, la SNET est privatisée. Le projet de central à cycles combinés à gaz, pour lequel tout a été mis en œuvre par les autorités publiques locales, ne verra jamais le jour.
En 2008, le groupe allemand E.ON rachète les parts d’ENDESA et annonce, dès 2009, l’arrêt des investissements sur les groupes existants, abandonne le groupe gaz et projette des réductions d’emplois.
En effet, les émissions de CO2 devenant payantes dès le 1er janvier 2013, l’entreprise estime que les cinq tranches de charbon gérées sur le territoire français ne seront plus rentables à partir de cette date et que leur maintien en service contribuerait à rompre l’équilibre économique de l’entreprise.
Aujourd’hui, E.ON annonce 535 suppressions d’emplois en France.
M. David Assouline. Encore !
Mlle Sophie Joissains. D’après E.ON, Provence 4, du fait de son ancienneté et de la technologie utilisée, qui est celle des lits fluidisés circulants, n’est plus en mesure de répondre aux besoins de flexibilité et de fiabilité imposés par le marché, ainsi qu’aux nouvelles contraintes environnementales qui entreront en vigueur au 1er janvier 2016, en application de la directive IED.
La fermeture de la tranche 4 de la centrale de Gardanne entraînerait la suppression d’une centaine de postes.
En parallèle, E.ON étudie des investissements importants sur la centrale de Provence, avec la conversion de la tranche Provence 4 LFC en chaudière biomasse, dans le cadre de l’appel d’offres de la Commission de régulation de l’énergie.
Ce projet permettrait, tout d’abord, de répondre aux objectifs du Grenelle de l’environnement. La loi Grenelle 1 prévoit que la part d’énergie renouvelable dans la consommation finale d’énergie doit atteindre 23 % en 2020.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et la question ? On n’est pas là pour assister à un cours !
Mlle Sophie Joissains. En 2007, la consommation finale en énergie renouvelable était de 4,3 % en Provence, contre 7,2% pour l’ensemble du pays.
Il est urgent de passer des intentions aux actes et de participer au développement de la production d’énergie renouvelable dans le département des Bouches-du-Rhône. (La question ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Ensuite, il est important de réduire de façon notable la pollution des Bouches-du-Rhône. Cette centrale électrique au charbon, en pleine Provence, rejette le quart des émissions totales de CO2 des Bouches-du-Rhône, soit 3 millions de tonnes par an.
Le passage de la tranche 4 du charbon à la biomasse devrait ainsi…
M. René-Pierre Signé. On déborde !
M. Jean-Luc Fichet. D’une minute, maintenant !
Mlle Sophie Joissains. La pollution des Bouches-du-Rhône ne vous intéresse pas ?...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est incroyable ! Si tout le monde fait comme vous, il n’y aura plus de questions d’actualité !
Mlle Sophie Joissains. Le passage de la tranche 4 du charbon à la biomasse devrait ainsi permettre une économie de 500 000 tonnes de CO2 par an dans les Bouches-du-Rhône.
Notre bilan carbone n’est pas bon et va à l’encontre des objectifs du plan climat-énergie national. (Manifestations renouvelées d’impatience sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue !
Mlle Sophie Joissains. J’ai bientôt fini, monsieur le président !
M. Paul Raoult. C’est incroyable !
Mlle Sophie Joissains. En outre, ce projet permettrait de consolider la filière bois en Provence. Dans le cadre de ce projet, la question de la ressource a été étudiée en lien avec l’Office national des forêts. Il prévoit de recourir en priorité à la biomasse forestière de Provence-Alpes-Côte d’azur et des régions voisines, dans la limite des ressources disponibles et une fois les usages traditionnels satisfaits.
M. le président. Maintenant, il faut vraiment conclure. Vous avez dépassé votre temps de deux minutes !
Mlle Sophie Joissains. Je conclus.
Le bassin minier de Provence est emblématique de l’histoire de l’industrialisation provençale. (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est plus possible !
M. Jean-Marc Todeschini. On se croirait à une séance de questions orales !
Mlle Sophie Joissains. Lorsque la dernière mine a été fermée, en 2003, une page difficile s’est tournée pour les mineurs, leurs familles et toute une population qui vivait de la mine depuis plusieurs générations.
E.ON s’est engagé à maintenir plus de 80 emplois sur le site de Gardanne !
Monsieur le ministre, je vous demande de soutenir le projet de biomasse à Gardanne. (Applaudissements sur quelques travées de l’UMP.)