Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Reiner.
M. Daniel Reiner. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi, qui, pour l’essentiel, vise à transposer deux directives du « paquet défense » a fait et continue de faire l’objet d’un débat parlementaire constructif et plutôt de qualité,…
M. Robert del Picchia. C’est vrai !
M. Daniel Reiner. … tant entre l’Assemblée nationale et le Sénat, lequel a apporté à l’édifice une contribution assez consistante, qu’entre l’opposition et la majorité, qui y ont l’une et l’autre beaucoup travaillé.
Il est vrai que l’enjeu de ce texte est important ou, du moins, pourrait l’être. En tout état de cause, il ne justifiait pas de désaccord entre nous.
Nous avons fait part de nos observations en première lecture, tant en commission que dans l’hémicycle, en particulier s’agissant du maintien d’un contrôle nécessaire sur un marché, celui des armes, qui n’a rien d’ordinaire. Je n’y reviens donc pas, et notre groupe confirmera le vote qu’il a déjà émis sur ce texte.
Les directives du « paquet défense » vont plutôt dans la bonne direction et marquent une amélioration par rapport à la situation présente.
Elles vont simplifier la vie de nos industriels et leur ouvrir, peut-être, – l’avenir le dira – des opportunités de nouveaux marchés : rendez-vous dans quelque temps…
Le problème tient à ce que le « paquet défense » ne comporte pas de clause de préférence communautaire. Or l’émergence d’une authentique base industrielle européenne implique bel et bien l’existence d’une telle clause vis-à-vis des opérateurs économiques de pays tiers au grand marché.
Sans clause de préférence communautaire, il n’y aurait jamais eu de politique agricole commune et, sans politique agricole commune, nous ne serions pas parvenus à faire le marché commun, et donc l’euro. Évidemment, le problème ne se pose pas en ces termes, car agriculture et défense ne peuvent être comparées, mais le fait que nous ayons pu – il est vrai que nous étions alors moins nombreux et plus allants… – nous imposer une telle clause en matière agricole mais que nos contemporains ne réussissent pas à le faire en matière de défense en dit long sur l’essoufflement de la construction européenne !
À cause de cela, nous nous retrouvons dans une situation bien curieuse, avec, d’un côté, une base de défense industrielle américaine solidement protégée et qui s’ouvre uniquement lorsque les autorités américaines l’estiment profitable – je pense au récent épisode des avions ravitailleurs MRTT – et, de l’autre, une base de défense européenne ouverte à tous les vents !
Nous avons bien lu l’exposé des motifs de la directive MPDS : c’est une profession de foi dans les vertus du libre-échange, assortie de l’espoir – mais ce n’est qu’un espoir – de récompense en contrepartie. Permettez-moi cependant d’être sceptique : le libre-échange peut-être, la naïveté, non ! En matière de commerce international, nous croyons plus aux rapports de force et à la réciprocité.
C’est pourquoi, devant cette cécité de nature idéologique, nous en venons à nous demander si, au-delà d’une croyance dans les vertus du libre-échange, la volonté de la Commission, du Conseil et du Parlement européens n’a pas été tout simplement de laisser se construire une base industrielle en direction de l’OTAN plutôt qu’une base industrielle véritablement européenne.
Pour autant, et pour être honnête, il faut reconnaître que les choses sont plus compliquées qu’il n’y paraît. Nous savons tous qu’une clause de préférence communautaire en matière de défense aurait des avantages, car elle permettrait de consolider et de conforter l’industrie nationale en lui apportant la quasi-certitude de bénéficier de programmes d’équipement, mais elle aurait aussi un grand inconvénient, puisqu’elle pourrait conduire à acquérir des armes peut-être moins performantes et sûrement à des prix plus élevés, voire beaucoup plus élevés, que celles qui pourraient être acquises auprès de pays tiers.
La clause de préférence communautaire peut même conduire les autorités d’un État à subventionner de fait ses propres entreprises, surtout si celles-ci sont en situation de monopole. Dans le marché des avions MRTT que je viens d’évoquer, c’est bien parce que les autorités américaines ont refusé de payer à Boeing la rente qui découlait de son monopole qu’elles ont voulu mettre cette entreprise en concurrence avec l’européen EADS. Rien ne les y obligeait, mais, au final, c’est quand même l’entreprise américaine qui a remporté le marché. Le contribuable américain a réalisé grâce à cette « vraie-fausse » mise en concurrence une économie de sept milliards de dollars. Peut-être saura-t-il renvoyer la politesse au contribuable Européen ?...
Le refus d’une clause de préférence communautaire s’explique par le fait que les États européens ne disposent pas, en général, d’une industrie de défense et qu’ils n’étaient pas prêts à payer plus cher l’acquisition d’armes éventuellement moins performantes. Ils l’étaient d’autant moins que, pour eux, conforter la base industrielle européenne se serait résumé à acheter aux industriels français, britanniques, allemands, italiens, espagnols ou suédois, au nom d’un « intérêt général européen » dont ils ont du mal à percevoir les contours au-delà de leurs propres frontières.
Tel n’est pas le cas des autorités américaines, qui n’ont aucun scrupule à acheter plus cher à leurs propres industriels des armes moins performantes que celles qu’elles pourraient acheter aux industriels européens. Je pense encore, bien sûr, au contrat MRTT.
Par ailleurs, bon nombre d’entreprises européennes, comme le britannique BAE ou l’italien Finmeccanica, se sont beaucoup implantées aux Etats-Unis, à tel point que, par certains aspects de leur chiffre d’affaires, ces entreprises sont presque plus américaines qu’européennes ! Réserver le marché aux entreprises authentiquement européennes eût été, pour certains gouvernements, mettre en péril des stratégies d’implantation outre-Atlantique mises en œuvre depuis de longues années.
C’est afin de limiter les dégâts sur notre propre industrie de défense que le Sénat français a introduit – que nous avons introduit – une clause de préférence communautaire sous la forme d’un principe raisonnablement souple : lorsque nos autorités lanceront un appel d’offres en matière d’armement, cet appel d’offres sera réservé aux industriels européens et ce ne sera que par dérogation à ce principe que nous pourrons ouvrir nos appel d’offres à la concurrence internationale.
Nous avons ainsi choisi de jouer la carte européenne plutôt que la carte atlantiste. Qui en Europe pourrait nous le reprocher ? C’est une manière pour nous de tracer une ligne rouge. La souveraineté, c’est la faculté pour un État de pouvoir ouvrir ses offres quand il le veut, comme il le veut et à qui il veut.
Je vais donner un exemple. Aujourd’hui, parce que l’industrie aéronautique européenne de défense a complètement « raté » – et je pèse le mot ! – la révolution technologique des drones MALE (M. Jacques Gautier applaudit.), nous, Français, pouvons nous placer dans la perspective d’acheter – parce qu’ils seraient moins chers, parce qu’ils sont plus efficaces et dans la mesure où les forces armées de notre pays en ont vraiment besoin – des drones américains, mais nous voulons pouvoir le faire à nos conditions et pour des quantités limitées. De la sorte, le moment venu, les industriels européens, qu’il s’agisse d’EADS, de Dassault ou de BAE, de Safran, de Rolls-Royce, de Thales, pourront produire des systèmes d’armes équivalents, sur lesquels nous garderons la souveraineté. (M. Jacques Gautier applaudit de nouveau.)
M. Josselin de Rohan, rapporteur. Très bien !
M. Daniel Reiner. Tout cela pour dire que le « paquet défense » constitue une avancée, mais qu’il ne permettra pas, à lui seul, de réaliser l’Europe de la défense.
La logique qui le sous-tend devrait permettre de disposer de bases équitables de concurrence entre industriels européens. Considérons cette avancée de façon positive et, autant que possible, tentons d’engranger des gains.
Mais il ne faut pas pour autant nourrir trop d’illusions. Nous sommes loin des objectifs affichés dans l’exposé des motifs des directives de 2009 et de la communication sur une stratégie industrielle commune en matière de défense de 2007.
Pour construire une base industrielle de défense européenne forte et autonome, il faudrait non seulement la régulation des conditions de marché ainsi qu’une clause de préférence communautaire, c’est-à-dire une politique de l’offre, mais aussi une politique de la demande, qui suppose l’harmonisation des besoins et des programmations par les états-majors des pays de l’Union et une harmonisation de l’effort de défense – point important – dans chacun des pays qui la compose. Hélas, nous n’en voyons pas le début du commencement !
L’industrie de la défense américaine dispose d’un marché intérieur non seulement protégé, mais également vaste et profond, ce qui explique sa force. Or la dimension du marché américain des armements est liée tant à l’importance des sommes qui y sont consacrées, qu’à l’uniformisation des besoins au sein d’une même armée.
Les industriels américains ne sont pas obligés de fabriquer un blindé pour la Pennsylvanie, un autre pour l’Arizona, voire un troisième pour le Vermont, ou encore de concevoir une frégate pour la Floride et une autre pour la Californie. Par ailleurs, l’Oregon et le Texas ne disposent pas d’avions de combat différents. L’Europe, elle, a trois avions de combat différents, sept programmes de frégates et dix-sept programmes de blindés ! La concentration ne se fera pas sous le seul effet des règles du marché.
Or la puissance de l’industrie de défense américaine permet aux États-Unis de s’assurer d’avantages compétitifs à l’exportation et de concurrencer durement et durablement les industriels européens sur les marchés mondiaux.
Comme l’a indiqué Aymeri de Montesquiou, tant que l’Europe ne sera pas capable d’harmoniser, de mettre fin à la segmentation de ses industries de l’armement ou d’organiser une coopération efficace entre ses entreprises de défense, la lutte demeurera inégale.
Le préalable à la réalisation de l’Europe de la défense est donc une volonté politique forte des États membres. Il n’y aura pas d’Europe de la défense sans cette volonté partagée. Le reste est littérature.
De ce point de vue, la coopération franco-britannique dans l’esprit de la déclaration de Saint-Malo, poursuivie par les traités signés à Londres au mois de novembre dernier, doit apparaître comme une étape dans la construction d’une Europe de la défense.
Certes, elle constitue une approche très différente des précédentes. Elle marque même une rupture en ce qu’elle affirme substituer une démarche pragmatique et concrète à une architecture globale et mal assurée, des programmes d’équipement précis et financés à des velléités ou à de bien minces réalisations.
Elle peut être – je le souhaite de tout cœur – le prélude à des coopérations renforcées prévues par le traité de Lisbonne qui, seules, peuvent faire progresser la politique européenne de sécurité et de défense commune, la PESDC, et lui donner un peu de consistance.
En conclusion, je dirai que le « paquet défense » peut représenter une étape nouvelle dans la réalisation d’une véritable base industrielle et technologique de défense européenne. Il ouvre des perspectives, autorise des espoirs. Il peut permettre de déboucher rapidement sur quelques projets mobilisateurs et crédibles. Il y va simplement de la volonté des acteurs.
Nous devons donc continuer à nous battre pour l’Europe de la défense, recoller les morceaux avec nos amis allemands, si vous me permettez cette expression, mes chers collègues, car on ne peut pas tourner le dos à quarante années de traité de l’Élysée comme cela. Il nous faut veiller, comme sur un trésor, à notre coopération avec l’Italie – ce n’est pas si simple –, dont nous oublions toujours qu’elle est notre premier partenaire industriel en matière de défense. Il nous faut panser les plaies de la coopération navale avec les Espagnols et consolider notre partenariat au sein d’EADS. Il nous faut coopérer avec les Néerlandais, qui ont des frégates Aegis dotées du même radar que nos frégates Horizon et qui ont, avec beaucoup de détermination et de résolution, décidé, en y mettant quelques moyens, d’en faire un instrument au service de la défense anti-missile européenne. Nous pouvons agir de même !
Bref, au lieu de donner sans cesse des leçons et de faire la démonstration de l’arrogance française, il nous faut convaincre, persuader, faire des compromis, si nous voulons favoriser la construction d’une authentique Europe de la défense. Une Europe de la défense qui ne se paiera pas de mots, mais qui continuera d’assurer la paix et la prospérité de nos citoyens, de faire respecter nos valeurs dans le monde, que ce soit au Moyen-Orient, en Afrique, ou ailleurs.
Tout cela est long, difficile, ingrat, compliqué, parfois coûteux, mais nécessaire.
Divisés, nous serons vassaux ; ensemble, nous demeurerons souverains. Cette noble et belle ambition justifie tous nos efforts. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Josselin de Rohan, rapporteur. Le présent débat pourrait se résumer ainsi : « oui » à la libéralisation et à l’assouplissement des règles relatives aux transferts et aux marchés publics à l’intérieur de l’espace européen ; « non » au laxisme et à l’ouverture inconditionnelle aux tiers.
Monsieur Fischer, les conséquences pour nos industries d’armement des assouplissements auxquels nous allons consentir en transposant les deux directives vous inquiètent. Mais le statu quo n’a absolument pas empêché, comme l’a très bien démontré Daniel Reiner, la segmentation des marchés et la multiplication des programmes d’armement, leur duplication irrationnelle dans les domaines naval et aéronautique, comme dans celui des véhicules blindés. En l’espèce, si des harmonisations internes avaient été effectuées, bon nombre d’économies auraient pu être réalisées dans nos budgets de défense.
M. Aymeri de Montesquiou. Certes !
M. Josselin de Rohan, rapporteur. C’est la raison pour laquelle tout ce qui favorisera l’harmonisation des règles d’acquisition au sein de marchés publics de défense harmonisés est important. Dans le cadre des transferts intracommunautaires, qui ont lieu par conséquent à l’intérieur du marché unique européen, nous devons pouvoir importer des pièces détachées sans aucune contrainte administrative exagérée.
Daniel Reiner a également fait remarquer que nous devons favoriser les coopérations renforcées au sein de l’Union européenne ; je partage son sentiment. Les dispositions prévues par le traité franco-britannique ne doivent pas y faire obstacle. Au contraire, ce que nous accomplirons ensemble, France et Grande-Bretagne, doit être un exemple pour les autres États membres. Nos deux pays sont d’ailleurs tout à fait prêts à voir s’agréger à eux d’autres États qui voudraient partager une expérience dans le domaine de la défense.
Dans leur lettre adressée au Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, les ministres des affaires étrangères français, polonais et allemand ont demandé que la Commission mette sur pied un programme de coopération dans le domaine de la défense.
C’est clair : nous sommes partisans d’édifier une base industrielle et technologique de défense européenne qui soit compétitive par rapport au principal de nos concurrents que sont les États-Unis.
En revanche, nous sommes opposés à la libéralisation inconditionnelle, vers laquelle certains membres de la Commission européenne voudraient nous pousser, au nom de la sainte concurrence, parce que la réciprocité n’existe pas dans d’autres pays, particulièrement de l’autre côté de l’Atlantique, où le buy american act interdit toute importation de matériel militaire. De surcroît, d’autres dispositions prohibent toute exportation américaine ou toute joint venture sans autorisation du Congrès, ce qui signifie que le marché américain est totalement protégé.
Nous sommes opposés à une ouverture inconditionnelle de notre marché à des importations en provenance d’un pays qui pratique lui-même la fermeture. Nous avons introduit une disposition – garantie minimale – qui, si elle est appliquée loyalement, nous permettra de nous garantir contre les faux-nez extérieurs, c’est-à-dire contre des entreprises apparemment européennes qui, en réalité, sont administrées intégralement par un conseil d’administration américain et qui importeraient des produits américains. L’administration française est bien déterminée à appliquer cette clause, monsieur le ministre.
Nous pouvons donc voter sans état d’âme le projet de loi équilibré que nous examinons ce jour.
Si nous voulons une réelle politique de défense européenne, elle devra s’appuyer essentiellement sur une base industrielle d’armement et de défense européenne, faute de quoi elle sera très difficile à mettre en œuvre. Mais cela relève d’une décision politique. Il faut que les vingt-sept pays membres de l’Union européenne soient enfin capables de comprendre que personne ne peut les défendre à leur place.
M. Daniel Reiner. Absolument !
M. Josselin de Rohan, rapporteur. Nous ne pouvons pas éternellement nous reposer sur un tiers, fût-il extrêmement puissant, pour assurer notre sécurité.
Je suis convaincu qu’un jour nous serons contraints d’assurer nous-mêmes notre défense, tout simplement parce que les États-Unis n’accepteront plus de financer éternellement les dépenses de pays qui se refusent à consacrer un centime à leur défense, d’un continent qui ne veut pas comprendre qu’il doit enfin assumer ses charges. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, en application de l’article 48, alinéa 5, du règlement, à partir de la deuxième lecture au Sénat des projets de loi, la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n’ont pas encore adopté un texte identique.
En conséquence, sont irrecevables les amendements remettant en cause les articles adoptés conformes ou les articles additionnels sans relation directe avec les dispositions restant en discussion.
Chapitre Ier
Dispositions relatives au contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et de matériels assimilés et à la transposition de la directive 2009/43/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, simplifiant les conditions des transferts de produits liés à la défense dans la Communauté
Article 1er
(Non modifié)
I. – (Non modifié)
II. – Le chapitre V du titre III du livre III de la deuxième partie du code de la défense est ainsi rédigé :
« CHAPITRE V
« Importations et exportations - Transferts au sein de l’Union européenne
« SECTION 1
« Importations et exportations des matériels de guerre et matériels assimilés hors du territoire de l’Union européenne
« SOUS-SECTION 1
« Autorisations d’importation et dérogations
« Art. L. 2335-1. – I. – L’importation sans autorisation préalable des matériels des 1re, 2e, 3e, 4e, 5e et 6e catégories mentionnés à l’article L. 2331-1 provenant des États non membres de l’Union européenne est prohibée.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à cette prohibition et les conditions dans lesquelles une autorisation d’importation peut être délivrée.
« II. – Aucun des matériels des 1re ou 4e catégories mentionnés au même article L. 2331-1 dont l’importation en France est prohibée ne peut figurer dans une vente publique à moins d’avoir été au préalable rendu impropre à son usage normal.
« III. – Aucun importateur des matériels appartenant aux quatre premières catégories mentionnées audit article L. 2331-1 ne peut obtenir une autorisation d’importation s’il n’est pas déjà titulaire de l’autorisation prévue au I de l’article L. 2332-1.
« Les personnes non titulaires de cette autorisation peuvent, à titre exceptionnel, demander à bénéficier d’une autorisation d’importation des matériels des quatre premières catégories dans des conditions définies par décret en Conseil d’État.
« IV. – L’autorité administrative peut à tout moment, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, suspendre, modifier, abroger ou retirer les autorisations d’importation qu’elle a délivrées, pour des raisons de respect des engagements internationaux de la France, de protection des intérêts essentiels de sécurité, d’ordre public ou de sécurité publique, ou pour non-respect des conditions spécifiées dans l’autorisation.
« SOUS-SECTION 2
« Autorisations d’exportation et dérogations
« Art. L. 2335-2. – L’exportation sans autorisation préalable de matériels de guerre et matériels assimilés vers des États non membres de l’Union européenne est prohibée.
« L’autorité administrative définit la liste de ces matériels de guerre et matériels assimilés soumis à autorisation préalable, ainsi que les dérogations à cette autorisation.
« Art. L. 2335-3. – I. – L’autorisation préalable d’exportation, dénommée licence d’exportation, est accordée par l’autorité administrative, sous l’une des formes suivantes :
« 1° Des arrêtés dénommés “licences générales d’exportation”, comportant des listes de matériels et autorisant directement tout exportateur établi en France remplissant certaines conditions définies par l’autorité administrative à expédier ces matériels vers une ou plusieurs catégories de destinataires situés dans un État non membre de l’Union européenne ;
« 2° Des licences globales d’exportation, faisant l’objet d’une notification, autorisant, à sa demande, un exportateur établi en France à expédier des matériels de guerre et matériels assimilés spécifiques à un ou plusieurs destinataires identifiés, situés dans un État non membre de l’Union européenne, pour une durée déterminée, sans limite de quantité ni de montant ;
« 3° Des licences individuelles d’exportation, faisant l’objet d’une notification, autorisant, à sa demande, un exportateur établi en France à expédier, en une ou plusieurs fois, un ou plusieurs matériels de guerre et matériels assimilés à un destinataire situé dans un État non membre de l’Union européenne.
« Les licences d’exportation peuvent comporter des conditions ou des restrictions concernant l’utilisation finale de ces matériels.
« II. – Les licences générales d’exportation autorisent tout exportateur établi en France à effectuer des exportations de matériels de guerre et matériels assimilés, y compris toutes les opérations commerciales préalables.
« III. – Les licences globales et les licences individuelles d’exportation autorisent un exportateur établi en France à procéder à l’exportation de matériels de guerre et matériels assimilés, y compris toutes les opérations commerciales préalables.
« IV. – Les opérations préalables mentionnées aux II et III comprennent la communication d’informations dans le cadre de la négociation d’un contrat, l’acceptation d’une commande ou la signature d’un contrat.
« À la demande de l’exportateur ou lorsque l’autorité administrative l’estime nécessaire, compte tenu de l’opération d’exportation, l’autorisation peut être limitée à la communication d’informations dans le cadre de la négociation d’un contrat, à l’acceptation d’une commande ou à la signature d’un contrat.
« V. – Aucun exportateur des matériels appartenant aux quatre premières catégories mentionnées à l’article L. 2331-1 ne peut utiliser une licence générale d’exportation ou obtenir une licence globale ou individuelle d’exportation s’il n’est pas déjà titulaire de l’autorisation prévue au I de l’article L. 2332-1.
« Les personnes non titulaires de cette autorisation peuvent, à titre exceptionnel, demander à bénéficier d’une licence générale, globale ou individuelle d’exportation des matériels des quatre premières catégories.
« VI. – Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 2335-4. – L’autorité administrative peut à tout moment, dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État, suspendre, modifier, abroger ou retirer les licences d’exportation qu’elle a délivrées, pour des raisons de respect des engagements internationaux de la France, de protection des intérêts essentiels de sécurité, d’ordre public ou de sécurité publique ou pour non-respect des conditions spécifiées dans la licence.
« SOUS-SECTION 3
« Obligations des exportateurs et des importateurs
« Art. L. 2335-5. – Les exportateurs de matériels de guerre et matériels assimilés informent le ministre de la défense, dans un délai fixé par voie réglementaire, de leur intention d’utiliser une licence générale d’exportation pour la première fois.
« Les exportateurs de matériels de guerre et matériels assimilés informent les destinataires des conditions dont est assortie la licence d’exportation ainsi que, le cas échéant, des restrictions dont elle fait l’objet concernant l’utilisation finale de ces matériels ou leur réexportation. Ces conditions et restrictions doivent être reproduites dans le contrat ou dans tout acte liant les parties.
« Art. L. 2335-6. – Les exportateurs de matériels de guerre et matériels assimilés tiennent, dans des conditions déterminées par l’autorité administrative, un registre des exportations qu’ils ont effectuées.
« Le registre des exportations, ainsi que l’ensemble des documents commerciaux nécessaires à leur réalisation, sont conservés pendant dix ans à compter de la fin de l’année civile au cours de laquelle l’exportation a eu lieu.
« Les exportateurs sont également tenus de transmettre à l’administration un compte rendu des prises de commande et des exportations effectuées. Les importateurs sont tenus de transmettre à l’administration un compte rendu des importations effectuées. L’autorité administrative définit le contenu de ce document, la périodicité de sa transmission et la liste des catégories de matériels concernées par cette obligation.
« L’autorité administrative définit en outre les obligations spécifiques qui s’appliquent aux exportateurs sollicitant une licence globale d’exportation.
« Sans préjudice des compétences du ministre chargé des douanes, le ministre de la défense exerce le contrôle du respect des obligations définies à la présente sous-section.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 2335-7. – Lors du dépôt d’une demande de licence d’exportation, les exportateurs de matériels de guerre et matériels assimilés qu’ils ont reçus au titre d’une licence de transfert publiée ou notifiée par un autre État membre de l’Union européenne et faisant l’objet de restrictions à l’exportation déclarent à l’autorité administrative qu’ils ont respecté ces restrictions ou, le cas échéant, qu’ils ont obtenu l’accord de cet État membre. Les modalités de cette déclaration sont fixées par l’autorité administrative.
« SECTION 2
« Transferts de produits liés à la défense au sein de l’Union européenne
« SOUS-SECTION 1
« Définitions
« Art. L. 2335-8. – On entend par “transfert” toute transmission ou tout mouvement de produits liés à la défense d’un fournisseur situé en France vers un destinataire situé dans un autre État membre de l’Union européenne ou d’un fournisseur situé dans un autre État membre vers un destinataire situé en France.
« On entend par “fournisseur” la personne physique ou morale établie en France responsable d’un transfert.
« On entend par “destinataire” la personne physique ou morale établie en France ou sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne et qui est responsable de la réception d’un transfert.
« On entend par “licence de transfert” une autorisation publiée ou notifiée par l’autorité administrative et permettant à un fournisseur établi en France de transférer des produits liés à la défense à un destinataire situé dans un État membre de l’Union européenne.
« SOUS-SECTION 2
« Autorisations de transfert et dérogations
« Art. L. 2335-9. – Le transfert de produits liés à la défense effectué depuis la France vers les autres États membres de l’Union européenne est soumis à autorisation préalable mentionnée à l’article L. 2335-10.
« L’autorité administrative définit la liste des produits liés à la défense soumis à autorisation préalable conformément à l’annexe à la directive 2009/43/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, simplifiant les conditions des transferts de produits liés à la défense dans la Communauté.
« Art. L. 2335-10. – I. – L’autorisation préalable de transfert, dénommée licence de transfert, est accordée par l’autorité administrative en tenant compte notamment de la sensibilité de l’opération ou de la catégorie d’opérations, sous l’une des formes suivantes :
« 1° Des arrêtés dénommés “licences générales de transfert”, comportant des listes de produits autorisant directement tout fournisseur établi en France à effectuer le transfert de ces produits vers une ou plusieurs catégories de destinataires situés dans un autre État membre de l’Union européenne ;
« 2° Des licences globales de transfert, faisant l’objet d’une notification, autorisant, à sa demande, un fournisseur établi en France à effectuer des transferts de produits liés à la défense spécifiques à un ou plusieurs destinataires identifiés, situés dans un autre État membre de l’Union européenne, pour une durée déterminée sans limite de quantité ni de montant ;
« 3° Des licences individuelles de transfert, faisant l’objet d’une notification, autorisant, à la demande d’un fournisseur établi en France, à transférer, en une ou plusieurs fois, un ou plusieurs produits liés à la défense à un destinataire situé dans un autre État membre de l’Union européenne.
« Les licences de transfert peuvent comporter des conditions ou des restrictions concernant l’utilisation finale de ces produits ou leur exportation hors du territoire de l’Union européenne.
« II. – Les licences générales de transfert autorisent tout fournisseur à effectuer des transferts de produits liés à la défense, y compris toutes les opérations commerciales préalables.
« III. – Les licences globales et les licences individuelles de transfert autorisent un fournisseur à procéder au transfert de produits liés à la défense, y compris toutes les opérations commerciales préalables.
« IV. – Les opérations préalables mentionnées aux II et III comprennent la communication d’informations dans le cadre de la négociation d’un contrat, l’acceptation d’une commande ou la signature d’un contrat.
« À la demande du fournisseur, ou lorsque l’autorité administrative l’estime nécessaire compte tenu de la nature des informations en cause, l’autorisation peut être limitée à la communication de certaines informations dans le cadre de la négociation d’un contrat, à l’acceptation d’une commande ou à la signature d’un contrat.
« V. – Les licences de transfert publiées ou notifiées par un État membre de l’Union européenne autorisent l’entrée ou le passage par le territoire national, sous réserve de l’application de dispositions nécessitées par les exigences de la protection de la sécurité publique, de l’ordre public ou de la sécurité des transports.
« VI. – Aucun fournisseur des matériels appartenant aux quatre premières catégories mentionnées à l’article L. 2331-1 ne peut utiliser une licence générale de transfert ou obtenir une licence globale ou individuelle de transfert s’il n’est pas déjà titulaire de l’autorisation prévue au I de l’article L. 2332-1.
« Les personnes non titulaires de cette autorisation peuvent, à titre exceptionnel, demander à bénéficier d’une licence générale, globale ou individuelle de transfert des matériels des quatre premières catégories.
« VII. – Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 2335-11. – L’autorité administrative peut accorder des dérogations à l’obligation d’autorisation préalable mentionnée à l’article L. 2335-10 lorsque :
« 1° Le fournisseur ou le destinataire est une institution publique au sens de l’article 4 de la directive 2009/43/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, précitée ou fait partie des forces armées ;
« 2° Les livraisons sont effectuées par l’Union européenne, l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, l’Agence internationale de l’énergie atomique ou d’autres organisations intergouvernementales aux fins d’exécution de leurs missions ;
« 3° Le transfert est nécessaire pour la mise en œuvre d’un programme de coopération en matière d’armements entre États membres de l’Union européenne ;
« 4° Le transfert est lié à l’aide humanitaire en cas de catastrophe ou réalisé en tant que don dans le contexte d’une situation d’urgence ;
« 5° Le transfert est nécessaire dans le cadre d’opérations de réparation, d’entretien, d’exposition ou de démonstration.
« Art. L. 2335-12. – L’autorité administrative peut à tout moment, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, suspendre, modifier, abroger ou retirer les licences de transfert qu’elle a délivrées, pour des raisons de respect des engagements internationaux de la France, de protection des intérêts essentiels de sécurité, d’ordre public ou de sécurité publique ou pour non-respect des conditions spécifiées dans la licence.
« SOUS-SECTION 3
« Obligations des fournisseurs et des destinataires
« Art. L. 2335-13. – Les fournisseurs de produits liés à la défense informent le ministre de la défense, dans un délai fixé par voie réglementaire, de leur intention d’utiliser une licence générale de transfert pour la première fois. L’autorité administrative peut exiger des informations supplémentaires sur les produits dont le transfert est envisagé.
« Les fournisseurs de produits liés à la défense informent les destinataires des conditions dont est assortie la licence de transfert ainsi que, le cas échéant, des restrictions dont elle fait l’objet concernant l’utilisation finale de ces produits ou leur exportation hors du territoire de l’Union européenne. Ces conditions et restrictions doivent être reproduites dans le contrat ou dans tout acte liant les parties.
« Art. L. 2335-14. – Les fournisseurs de produits liés à la défense tiennent, dans des conditions déterminées par l’autorité administrative, un registre des transferts qu’ils ont effectués.
« Le registre des transferts, ainsi que l’ensemble des documents commerciaux nécessaires à leur réalisation, sont conservés pendant dix ans à compter de la fin de l’année civile au cours de laquelle le transfert a eu lieu.
« Les fournisseurs et les destinataires sont également tenus de transmettre à l’administration un compte rendu des prises de commande et des transferts effectués et reçus. L’autorité administrative définit le contenu de ce document, la périodicité de sa transmission et la liste des catégories de produits concernées par cette obligation.
« Sans préjudice des compétences du ministre chargé des douanes, le ministre de la défense exerce le contrôle du respect des obligations définies à la présente sous-section.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. Celui-ci fixe, en particulier, les informations qui doivent figurer dans le registre mentionné au premier alinéa du présent article.
« Art. L. 2335-15. – Lorsque le transfert d’un produit en provenance d’un autre État membre de l’Union européenne est conditionné par cet État à la production d’une déclaration d’utilisation, le destinataire atteste que le produit lié à la défense qu’il acquiert doit être intégré dans ses propres produits et qu’il ne peut être ni transféré, ni exporté en l’état à partir du territoire français, sauf dans un but d’entretien ou de réparation.
« SOUS-SECTION 4
« Certification
« Art. L. 2335-16. – Les entreprises souhaitant être destinataires de produits liés à la défense transférés au titre des licences générales des autres États membres de l’Union européenne sollicitent, auprès de l’autorité administrative, une certification attestant de leur fiabilité, notamment de leur capacité à appliquer les restrictions mentionnées au dernier alinéa du I de l’article L. 2335-10.
« Les critères de certification sont définis par décret en Conseil d’État.
« SOUS-SECTION 5
« Transferts soumis à une procédure spécifique
« Art. L. 2335-17. – I. – Pour le contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes, de munitions et de leurs éléments, le transfert de certaines armes, munitions et leurs éléments acquis à titre personnel figurant sur une liste fixée par décret en Conseil d’État, ainsi que des armes, munitions et leurs éléments non considérés comme matériels de guerre figurant sur la même liste, est soumis à une autorisation préalable spécifique.
« Des dérogations à cette autorisation préalable peuvent être établies par l’autorité administrative.
« II. – L’autorité administrative peut à tout moment suspendre, modifier, abroger ou retirer les autorisations préalables qu’elle a délivrées pour des raisons de respect des engagements internationaux de la France, de protection des intérêts essentiels de sécurité, d’ordre public ou de sécurité publique ou pour non-respect des conditions spécifiées dans l’autorisation préalable.
« III. – Les conditions d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 2335-18. – I. – Est soumis à une autorisation préalable le transfert effectué depuis la France vers les autres États membres de l’Union européenne des matériels suivants :
« 1° Les satellites de détection ou d’observation, leurs équipements d’observation et de prises de vue, ainsi que leurs stations au sol d’exploitation, conçus ou modifiés pour un usage militaire ou auxquels leurs caractéristiques confèrent des capacités militaires ;
« 2° Les véhicules spatiaux, les autres satellites, leurs stations au sol d’exploitation, leurs équipements spécialement conçus ou modifiés pour un usage militaire ;
« 3° Les moteurs et systèmes de propulsion spécialement conçus ou modifiés pour les matériels mentionnés aux 1° et 2° ;
« 4° Les fusées et les lanceurs spatiaux à capacité balistique militaire, leurs équipements et composants ainsi que les moyens spécialisés de production, d’essai et de lancement ;
« 5° Les parties, composants, accessoires et matériels spécifiques d’environnement, y compris les équipements de maintenance, des matériels mentionnés aux 1° à 3° ;
« 6° Les outillages spécialisés de fabrication des matériels mentionnés aux 1° à 4°.
« L’autorisation est refusée lorsque le transfert est de nature à compromettre les intérêts essentiels de la sécurité.
« II. – Les articles L. 2335-12 à L. 2335-15 sont applicables aux transferts régis par le I du présent article.
« III. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions et la procédure de délivrance de cette autorisation, ainsi que les éventuelles dérogations à cette obligation d’autorisation.
« SOUS-SECTION 6
« Dispositions communes
« Art. L. 2335-19. – Les contestations en douane portant sur la prohibition d’importation, d’exportation ou de transfert prévue au présent chapitre peuvent être soumises à un comité siégeant auprès du ministre de la défense et tranchées par lui. L’organisation et le fonctionnement de ce comité sont déterminés par décret. »
III. – Le second alinéa de l’article L. 2332-10 du même code est ainsi rédigé :
« Les prescriptions relatives à l’importation ou l’exportation hors du territoire de l’Union européenne ou au transfert au sein de l’Union européenne, y compris celles qui concernent l’acceptation des commandes en vue de l’exportation ou du transfert, sont définies au chapitre V du présent titre. ».