M. le président. La parole est à M. Michel Teston, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 11 et 23.
M. Michel Teston. Lors de la présentation de cet amendement, j’ai développé des arguments qui nous paraissent de nature à justifier l’abrogation de l’article 1er de la loi du 16 décembre 2010. À l’occasion de cette explication de vote, j’ajouterai trois nouveaux arguments qui ne manqueront pas de vous convaincre, mes chers collègues ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
Tout d’abord, l’abrogation de cet article permettrait d’engager un véritable travail de clarification des compétences des collectivités territoriales, en vue de préciser les domaines d’action dévolus à chaque échelon et de remettre à plat les questions de financement qui n’ont pas été traitées correctement par les divers textes récemment adoptés par le Parlement.
Ensuite, elle permettrait de revenir sur la réforme des collectivités territoriales, ce qui est à nos yeux une absolue nécessité, et d’entamer une réflexion sur ce qui fait défaut à notre organisation territoriale, à savoir une véritable déconcentration. En effet, les préfets, représentants du Gouvernement dans les régions et dans les départements, ne disposent pas de marges de manœuvre, qu’il s’agisse de la prise de décisions ou des moyens budgétaires, et ne sont donc pas, je suis au regret de le dire, de vrais partenaires pour les collectivités territoriales.
Enfin, l’abrogation de l’article 1er de la loi du 16 décembre 2010 nous permettrait d’engager une réflexion sur la question, essentielle à nos yeux, du renouvellement du mode de gouvernance des collectivités territoriales, en essayant de faire une place à la consultation de la population et à la démocratie participative. Nos concitoyens revendiquent, à juste titre, une place plus importante dans le processus de décision politique au quotidien. Cela constituerait à mon sens une évolution positive.
En conséquence, je vous invite, mes chers collègues, à voter la suppression de la création du conseiller territorial. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Les amendements qui nous sont soumis se répartissent en deux catégories : les amendements de suppression et ceux qui visent à améliorer le dispositif.
On nous objecte que ces derniers sont des cavaliers. Or, si ma mémoire est bonne, le tableau de répartition des conseillers territoriaux a également été introduit dans le projet de loi par le biais d’un cavalier. À l’origine, il devait figurer dans une ordonnance. On nous avait alors expliqué en long, en large et en travers pourquoi il ne pouvait en être autrement, en rejetant les arguments de ceux d’entre nous qui estimaient que la création des conseillers territoriaux, leur mode d’élection et leur répartition étaient des problématiques liées, devant être examinées de façon conjointe. Puis, soudain, par la volonté du Gouvernement, le mode de scrutin pour l’élection des conseillers territoriaux et le tableau de répartition ont été mis en débat à l’Assemblée nationale ! Mais il est vrai que le Gouvernement, s’il peut pratiquer la cavalerie, ne saurait recourir à un cavalier…
Les amendements en question sont peut-être hors sujet, comme on nous le dit, mais ils ne sont pas hors des préoccupations de nos concitoyens : l’élaboration des schémas départementaux intéresse aujourd’hui la France et la Navarre.
Je m’étonne que ceux de nos collègues qui ont approuvé le texte se montrent quelque peu déçus de la façon dont les choses se passent maintenant sur le terrain : si le préfet, auquel on a donné les pleins pouvoirs, est ouvert, intelligent, cela ne va pas trop mal, mais s’il a quelque chose à prouver ou à se prouver, s’il est plus ou moins dépendant des grands élus locaux, on constate des situations curieuses. Cela n’a rien de surprenant !
Dans mon département, les intercommunalités sont de taille XXL. Il n’en compte que six, dont une de 560 000 habitants. D’aucuns rêvent même d’une « métropole départementale » ! C’est assez extraordinaire ! Je croyais pourtant qu’on ne pourrait surpasser le département voisin, qui a créé une « métropole rurale », s’étendant de Nice jusqu’au Mercantour… (M. François Trucy sourit.) C’est une première ! Pour ma part, je pensais que les métropoles avaient vocation à tenir compte du fait urbain.
M. Bruno Sido. Erreur !
M. Pierre-Yves Collombat. En effet, mon cher collègue ! On constate, je le redis, des situations tout à fait curieuses !
Je tiens également à attirer l’attention sur la méthode appliquée : dans le cas de mon département, le préfet définit un périmètre regroupant 560 000 habitants, avant de nous dire que nous sommes libres d’en faire ce que nous voulons, par exemple une communauté de communes… Pour qui nous prend-on ?
En outre, avec la suppression des syndicats à vocation multiple, notamment, de nombreuses compétences seront de fait transférées à l’intercommunalité. Ainsi, les structures que l’on nous présentait comme des intercommunalités de projet deviennent en fait de grosses intercommunalités de gestion. Et cela change tout ! Si un périmètre important peut se justifier pour l’exercice de compétences complexes, telles que les transports ou le développement économique, cela n’a pas de sens pour la gestion de l’eau, par exemple.
En conclusion, nos amendements sont peut-être des cavaliers, mais ils traitent de véritables sujets de préoccupation. Monsieur le ministre, il serait bon que vous vous fassiez le relais de nos interrogations auprès des préfets.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 11 et 23.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote sur l’amendement n° 21 rectifié ter.
M. Hervé Maurey. Les précisions que vient d’apporter M. le ministre ayant apaisé mes inquiétudes, je retire les amendements nos 21 rectifié ter, 19 rectifié ter et 20 rectifié ter. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bruno Sido. Quel dommage !
M. Hervé Maurey. La question du seuil de population, notamment, était à mes yeux essentielle, sachant que ce critère est mis en œuvre avec une grande rigueur dans mon département. Or vous avez indiqué très clairement, monsieur le ministre, qu’il ne s’agissait nullement de l’appliquer comme un couperet qui s’abattrait à quelques dizaines d’âmes près. Il était important de le souligner, car le texte est ambigu sur ce point : certains préfets ont considéré que le seuil de population devait s’appliquer de manière stricte, sauf dans les zones de montagne ou en cas de spécificités géographiques.
J’ai également noté avec satisfaction qu’une certaine souplesse en matière de calendrier prévaudrait, notamment en ce qui concerne l’échéance du 31 décembre 2011.
Ces clarifications s’ajoutent aux précisions très importantes que vous aviez apportées cette après-midi, monsieur le ministre, à propos du projet de loi n° 61 : celui-ci comportera des dispositions tendant à permettre le maintien des bureaux des communautés de communes jusqu’en 2014 en cas de fusion, et le Gouvernement ne s’arc-boutera pas sur l’application du mode de scrutin par liste bloquée dès le seuil de 500 habitants, que nous avons toujours jugé beaucoup trop bas. Je me réjouis donc que le Gouvernement se déclare ouvert à un relèvement de ce seuil à 1 000 ou à 1 500 habitants.
Compte tenu de tous ces éléments très positifs, je retire mes trois amendements.
M. le président. Les amendements nos 21 rectifié ter, 19 rectifié ter et 20 rectifié ter sont retirés.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 16 rectifié et 33 rectifié.
M. Daniel Raoul. Monsieur le ministre, échanger avec vous autour d’un bon petit vin des coteaux de l’Aubance sur certains cas spécifiques sera sans doute très agréable, mais je doute de l’efficacité d’une telle méthode… Lors de l’examen du projet de loi n° 61, vous nous objecterez encore que nos amendements sont des cavaliers : quand viendra donc le bon cheval ? (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) Il y a en France au moins soixante-dix situations injustes à régler.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Je voudrais en fait revenir sur les amendements que M. Maurey vient de retirer.
Après le vote de la loi du 16 décembre 2010, les préfets ont déposé leurs schémas départementaux de coopération intercommunale. Il s’agit véritablement là d’une nouvelle donne, qui doit retenir toute notre attention.
J’entends parler de « cavaliers », d’« entonnoir », de « règle d’or »… Bientôt, le Parlement ne pourra plus rien faire !
M. Jean-Marc Todeschini. C’est vrai !
M. Michel Teston. C’est le bon sens !
M. Bruno Sido. Voilà dix ans, les cavaliers étaient nombreux, mais cela ne semblait gêner personne. Puis, on a inventé la règle de l’entonnoir. Bientôt, nous n’aurons plus aucune marge de manœuvre. Je ne voudrais pas aller dans le sens de l’opposition,… (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.)
M. Michel Teston. Mais si !
M. Daniel Raoul. Encore un effort !
M. Bruno Sido. … mais il faudrait que le Gouvernement sache s’arrêter dans cette voie !
Les amendements que M. Maurey vient de retirer étaient pourtant intéressants. Certes, M. le ministre nous a donné des assurances, mais quand on lit le texte de la loi devant une assemblée de maires, on constate que ceux-ci ne savent plus à quel saint se vouer.
Mme Christiane Demontès. Eh oui !
M. Bruno Sido. Il n’est pas écrit dans la loi que le préfet peut revenir sur le schéma départemental de coopération intercommunale qu’il a proposé.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. Bruno Sido. Je n’apprendrai à personne, dans cette assemblée, qu’une circulaire, aussi explicite soit-elle, n’est pas opposable à la loi. La discussion entre le préfet et les élus pourra bien sûr être féconde, mais que se passera-t-il si un seul citoyen se plaint d’une adaptation à la mise en œuvre de la loi ?
Par ailleurs, avant les élections municipales se tiendront, en septembre, les élections sénatoriales. Or, compte tenu des échéances fixées, la CDCI devra normalement se réunir à la fin du mois de juillet pour discuter du schéma déposé par le préfet. Ceux d’entre nous qui sont rééligibles prendront part à des discussions intéressantes dans les mairies pendant tout l’été, portant sur les suppressions de postes d’enseignants ou la fusion de structures intercommunales…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ça ne va pas vous faire du bien !
M. Daniel Raoul. Vous filez un mauvais coton !
M. Bruno Sido. Cela concerne autant les travées de gauche que celles de droite, mes chers collègues !
Dans mon département, cela fait longtemps que nous nous avons demandé à M. le préfet que la CDCI se réunisse en octobre, et non à la fin du mois de juillet. Comme notre préfet est intelligent, il a accepté. D’ailleurs, je suis persuadé que tous les préfets sont intelligents !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Normalement, oui !
M. Bruno Sido. Le texte est un peu trop rigide. Vous l’avez largement assoupli par vos circulaires, monsieur le ministre, mais cela n’est pas pleinement satisfaisant, car rien ne vaut la loi. Dans cet esprit, je trouve regrettable que l’amendement n° 20 rectifié ter ait été retiré. Bien que ce soit un cavalier, il eût été intéressant d’écrire dans la loi que M. le préfet pourra revenir sur son projet de schéma départemental de coopération intercommunale pour tenir compte des observations des élus et que c’est ce schéma modifié qui sera soumis à la CDCI.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Richert, ministre. Un texte de loi est toujours suivi de décrets et de circulaires d’application destinés à l’expliciter et à apporter des précisions complémentaires. Les circulaires que nous avons prises n’avaient pas d’autre finalité : il s’agissait, comme vous n’avez cessé de le demander, de renforcer la concertation et d’instaurer davantage de flexibilité, notamment en matière de délais. Ceux-ci doivent pouvoir être interprétés avec intelligence lorsque la loi permet d’y déroger si besoin est. Voilà ce que nous avons signifié par écrit aux préfets.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La loi, c’est la loi !
M. Philippe Richert, ministre. Nous n’avons rien fait d’autre, nous n’avons pas changé la loi : il s’agissait simplement de mieux expliciter le contenu de cette dernière et de permettre aux préfets de tenir compte des observations des élus, qui souhaitent davantage de souplesse.
Il n’est nullement question de revenir sur la décentralisation, de donner tous les pouvoirs au préfet, comme j’ai pu l’entendre dire. Il faut bien que le préfet élabore et présente un projet de schéma, afin qu’il y ait une base de discussion.
M. Claude Bérit-Débat. Il le propose !
M. Philippe Richert, ministre. Il propose un projet de schéma, que les élus pourront souhaiter modifier. Nous avons indiqué aux préfets qu’il convenait que la version finale du schéma prenne en compte les résultats de la concertation.
En ce qui concerne la date de réunion de la CDCI, il importe de tenir compte des échéances des uns et des autres, notamment des élections sénatoriales, pour que les discussions puissent se dérouler le plus sereinement possible. (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) L’objectif est d’organiser l’intercommunalité pour les vingt ou trente années à venir, de définir des orientations qui permettront de la rendre plus efficace et de moderniser notre pays. Nos voisins ont souvent pris beaucoup d’avance sur nous à cet égard. Voilà ce que nous voulons : il ne s’agit pas de prendre des mesures ponctuelles, pour le court terme.
Les circulaires et les décrets d’application que j’ai pris ne contredisent nullement le texte de loi ; ils visent uniquement à expliciter celui-ci, afin que les préfets puissent mieux tenir compte, avec davantage de sécurité, de la réflexion menée par les élus. J’ai déjà organisé dans cet esprit une quinzaine de réunions avec diverses associations d’élus de collectivités de toute taille. À Saint-Flour, par exemple, j’ai écouté les élus et je leur apporté les explications que je viens de vous donner.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. J’aimerais que l’on puisse discuter de tout à n’importe quel moment et revenir toujours sur les mêmes choses, mais je vous rappelle tout de même, mes chers collègues, que nous n’appliquons pas l’article 40 de la Constitution ; le Conseil constitutionnel nous l’a fait savoir assez vite. Il en est de même pour l’entonnoir : on discute en deuxième lecture exactement du même texte qu’en première lecture.
Étant parlementaire depuis quelques années de plus que beaucoup d’entre vous,…
M. Bruno Sido. Certes !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. … je puis vous dire qu’il n’en allait pas ainsi à mes débuts à l’Assemblée nationale : quelle que soit la majorité, la règle était que le débat portait sur les seules dispositions restant en discussion. On ne recommençait pas une deuxième lecture comme la première lecture, c’était ainsi !
J’ajoute, mes chers collègues, que le Conseil constitutionnel – on l’a vu à propos de nombre de textes – censure les cavaliers, c’est-à-dire les amendements ou les dispositions n’ayant pas de lien, même indirect, avec le texte en discussion. D’ailleurs, sa plus belle victime est souvent le Gouvernement, et celui-ci ne peut s’en prendre qu’à lui-même…
Pour certains d’entre nous, la présente discussion représente une troisième lecture, parce qu’on a déjà débattu de toutes ces questions. Ayant siégé durant tout l’examen du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, j’ai en mémoire l’ensemble des débats que nous avons eus alors.
Quant au calendrier, qui l’a fixé ? Pour notre part, nous n’étions pas du tout dans cet état d’esprit,…
M. Bruno Sido. C’est très bien !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. … mais on nous a dit qu’il fallait absolument le caler de manière que les élections municipales ne soient pas trop proches, et nous avons donc dû resserrer les délais. Ce n’était pas la position du Gouvernement, ni celle de la commission des lois. J’ai obtenu deux mois supplémentaires en commission mixte paritaire, mais c’est à peu près tout. Il faut tout de même rappeler cela pour remettre les choses à leur place !
J’ajoute qu’une circulaire n’est pas contraire à la loi ; cela ne fait l’objet d’aucun litige. Il est tout à fait possible de donner un peu de souplesse, et cela devrait permettre dans un certain nombre de cas, me semble-t-il, de renouer le dialogue. Il est vrai que tous les préfets sont intelligents, mais ils le sont parfois trop pour comprendre les élus locaux, si vous voyez ce que je veux dire… (Sourires.) Cela étant, les préfets obéissent au ministre : quand j’ai eu quelques soucis, comme tout le monde, concernant la CDCI, le mien a très vite compris lorsque je lui ai montré la circulaire du ministre chargé des collectivités territoriales !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. Je voudrais appuyer la demande de dérogation au principe de la continuité territoriale formulée par mes collègues André Lardeux et Daniel Raoul. En effet, la commune du Maine-et-Loire visée se trouve dans une situation tout à fait ubuesque, puisqu’on entend l’obliger à quitter contre son gré une communauté de communes pour rejoindre une communauté d’agglomération qui ne veut pas d’elle !
Vous avez indiqué, monsieur le ministre, qu’une telle dérogation ne pouvait être accordée dans le cadre de l’examen du présent projet de loi, tandis que M. le rapporteur nous a laissé assez peu d’espoir pour les textes à venir. Cependant, vous avez affirmé comprendre la situation, et j’espère donc qu’une solution pourra être trouvée rapidement.
M. le président. La parole est à M. Joël Bourdin, pour explication de vote.
M. Joël Bourdin. Je souhaiterais obtenir quelques précisions de votre part, monsieur le ministre, sur la latitude laissée au préfet pour l’application du schéma départemental de coopération intercommunale.
Pour le moment, les préfets ont présenté leur projet devant la CDCI. Les communes et les EPCI concernés sont en train de délibérer ou vont le faire.
Vous nous dites, monsieur le ministre, que les préfets pourront revenir sur leur projet initial. (M. le ministre acquiesce.)
M. Bruno Sido. Heureusement !
M. Joël Bourdin. J’en suis ravi ! Toutefois, ce n’est pas écrit dans le texte.
Le préfet pourrait revoir sa copie, non pas en procédant à des ajouts, sans doute, mais en retranchant certains éléments, pour tenir compte des observations des élus. S’il en était ainsi, cela signifierait que la CDCI pourrait être réunie à plusieurs reprises par le préfet, d’abord pour proposer des ajustements, puis pour voter formellement le schéma à la majorité des deux tiers. Il s’agirait en quelque sorte d’une démarche progressive. Ai-je bien compris ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, vous affirmez que les préfets peuvent revenir sur leur décision : nous ne demandons qu’à vous croire !
Vous nous assurez également que les circulaires que vous rédigez à leur intention préconisent une certaine souplesse. Mais, comme on vient de le dire, cela n’est pas écrit dans la loi. Vos instructions pourront être suivies par certains préfets, mais peut-être pas par d’autres.
La majorité a voté la loi ; peut-être n’aurait-elle pas dû le faire, mais en tout état de cause les élus, sur le terrain, quelle que soit leur sensibilité politique, se trouvent aujourd’hui confrontés à sa mise en pratique et sont amenés à constater que tout ne se passe pas aussi bien qu’annoncé. Il ne suffit pas de se réunir autour d’une bonne table pour se mettre d’accord…
En tant que parlementaires, nous avons toute latitude pour modifier la loi si cela est nécessaire, en l’occurrence pour y inscrire un délai plus long. Cela est d’autant plus nécessaire que les mois d’été ne sont guère propices à une large concertation…
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. M. Hyest a estimé que certains d’entre nous semblaient considérer ce débat comme une troisième lecture. S’il en est ainsi, cela signifie très clairement que le texte initial a été bâclé et voté dans la précipitation.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il a tout de même donné lieu à cinq semaines de discussion !
M. Jean-Jacques Mirassou. C’est la raison pour laquelle il ne satisfait pas les élus locaux, que personne n’a pris la précaution de consulter sur la nécessité de modifier les schémas départementaux de coopération intercommunale, alors qu’ils sont pourtant les premiers concernés. Le Gouvernement veut le bonheur des élus locaux malgré eux…
Actuellement, le piège se referme. Vous promettez davantage de souplesse, monsieur le ministre, mais il n’en reste pas moins que les propositions présentées par les préfets aux CDCI correspondent à une commande gouvernementale et sont marquées par de nombreuses arrière-pensées.
Monsieur le ministre, ce n’est pas en invoquant des décrets et des circulaires que vous sortirez de ce piège. La meilleure manière de clarifier la situation consisterait à donner de véritables assurances aux élus locaux concernés, en inscrivant dans la loi des délais plus longs, tant pour l’achèvement des travaux de la CDCI que pour la mise en application dans les territoires de la réforme de l’intercommunalité. Cela impose, certes, d’avoir l’humilité intellectuelle de revenir sur un texte qui, je le répète, a été bâclé et voté dans la précipitation.
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je voudrais tout d’abord remercier le Gouvernement d’avoir annexé le tableau de répartition des conseillers territoriaux au projet de loi, le Parlement de l’avoir quelque peu modifié et le Conseil constitutionnel de nous avoir donné l’occasion aujourd'hui de revenir sur ce dossier.
Il me semble que c’est l’une des premières fois que nous retravaillons ainsi un texte que nous avions déjà voté, mais les difficultés rencontrées sur le terrain appelaient des explications supplémentaires. Les amendements déposés et vos réponses, monsieur le ministre, nous ont permis d’obtenir des éclaircissements sur tous les points posant problème. Nous serons désormais en mesure de trouver des solutions avec le préfet dans nos territoires. Je tiens à vous en remercier.
La tenue du présent débat est d’autant plus appréciable que, à l’époque où M. Joxe était au banc du Gouvernement, on ne discutait pas ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Je m’en souviens très bien, mes chers collègues : les débats ne se déroulaient pas dans l’esprit d’ouverture et de souplesse qui règne aujourd’hui grâce à M. le ministre ! Les indications qui nous ont été données nous permettront d’envisager des aménagements avec le préfet, par exemple pour des intercommunalités dont la population serait un peu inférieure au seuil de 5 000 habitants, quitte à nous retourner vers le ministère si la discussion n’aboutit pas.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il s’agit d’arrangements entre amis ! La loi, c’est la loi !
M. Éric Doligé. Les amendements de M. Maurey, que nous étions disposés à soutenir, ont obtenu des réponses satisfaisantes. Si nécessaire, nous y reviendrons une quatrième fois. Je rappellerai tout de même que c’est nous qui avons imposé le seuil de 500 habitants, alors que l’on nous avait recommandé de ne pas le fixer aussi bas. Nous avons commis une autre erreur concernant les délais, en les contraignant à l’excès.
Il me semble que nous pouvons maintenant clore le débat et retourner dans nos territoires pour mettre en application le dispositif, sans plus rencontrer de difficultés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. S’il est sympathique de proposer d’assouplir les dispositions législatives, cela me laisse tout de même un peu perplexe. En effet, quand des délais, des seuils de population, des critères de continuité territoriale sont fixés dans la loi, comment peut-on dire que l’on pourra y passer outre ? Je ne vois pas comment, juridiquement, on peut modifier la loi sur le fondement de simples promesses verbales !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il y a une circulaire !
M. Jean Louis Masson. D’ailleurs, si cela était possible, ce serait grave, car cela signifierait que notre vote peut être remis en question et n’a guère de poids…
Il me semble très difficile d’affirmer qu’une disposition de la loi pourra être contournée en fonction des remarques des élus. Il est certes sympathique de dire qu’on écoutera tout le monde, mais est-on pour autant plus avancé ? Si une disposition de la loi n’est pas respectée, n’importe qui pourra ensuite former un recours. Je suis donc toujours étonné quand on nous annonce qu’il sera fait preuve de compréhension dans l’application d’une loi.
De surcroît, il est tout de même assez choquant d’entendre dire que ce que nous avons voté pourra être remis en question selon les circonstances rencontrées sur le terrain. C’est aussi un problème de respect de la hiérarchie des normes juridiques et de respect du Parlement.
Par ailleurs, alors que l’on nous indique que les situations particulières seront examinées avec compréhension, que les seuils pourront être assouplis, je constate que, dans mon département, au contraire, on en rajoute sur les dispositions de la loi. Par exemple, en Moselle, s’agissant du seuil de 5 000 habitants, chiffre minimal de population pour une intercommunalité, on ne se montre pas du tout conciliant : on ne nous dit pas que, avec 4 990 habitants, cela peut passer ; on nous dit au contraire que, en dessous de 20 000 habitants, ce n’est pas possible !
M. Jean-Marc Todeschini. Je confirme !
M. Jean Louis Masson. De qui se moque-t-on ? Alors que le seuil a été fixé à 5 000 habitants au terme d’un long débat et que vous nous assurez, monsieur le ministre, qu’il sera appliqué avec souplesse, nous nous entendons dire, sur le terrain, que le vote du Parlement n’a aucune importance et qu’il est hors de question qu’une intercommunalité regroupe moins de 20 000 habitants ! On se demande parfois à quoi sert le Parlement ! Monsieur le ministre, qu’avez-vous à répondre sur ce cas concret ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.