M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens d’abord à dire combien je regrette que le temps qui nous est imparti pour évoquer les crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles» soit aussi restreint. Dans ces conditions, je m’intéresserai à la situation de la presse, mes collègues Claudine Lepage et David Assouline ayant déjà évoqué la situation des médias.
En vérité, la situation de la presse n’est guère plus florissante que celle des médias. Du reste, c’est en grande partie pour cette raison que le Gouvernement a décidé de reconduire sa mesure d’accompagnement exceptionnelle du secteur pour la troisième année consécutive.
En trois ans, cette mesure, prise dans le prolongement des états généraux de la presse écrite, aura permis au secteur de bénéficier de près de 900 millions d’euros d’aides directes, sans compter les aides indirectes. Cette année, ce sont 305 millions d’euros d’aides directes qui vont venir soutenir le secteur. Ainsi, 198 millions d’euros seront consacrés aux aides à la diffusion, 12 millions d’euros aux aides au pluralisme et 94 millions d’euros à la modernisation. Pour autant, les transformations structurelles qui attendent la presse à l’heure d’Internet restent à mener. Or ces aides n’ont, en fin de compte, pas véritablement permis de favoriser le développement de la presse. Elles ont surtout permis à beaucoup d’entreprises d’éviter des difficultés graves, voire le dépôt de bilan.
Dans ces conditions, une première question s’impose : alors que nous arrivons à la dernière année du plan d’aide prévu par le Gouvernement, quelle sera la situation à partir de l’année prochaine ?
Au reste, ce plan d’aide ne fait que montrer l’état de fragilité dans lequel se trouve désormais la presse française.
Cette fragilité tient avant tout aux difficultés qu’éprouvent les acteurs du secteur à préserver le tirage de leurs titres. Deux chiffres illustrent cette situation : les cinq premiers quotidiens régionaux vendent environ 2 millions de numéros par jour, tandis que les cinq premiers quotidiens nationaux n’en vendent que 1,3 million. Non seulement les ventes sont donc plutôt faibles, mais elles enregistrent une décroissance.
Pour y remédier, les journaux se lancent dans une politique de concentration, et chacun de nous peut l’observer dans son département. C’est ainsi que de grands groupes maîtrisent l’offre sur des portions entières du territoire, tout en contrôlant, souvent, des titres nationaux.
Néanmoins, cette stratégie ne garantit en rien l’avenir de la presse, d’autant qu’elle n’empêche pas la chute du lectorat. D’autres voies doivent donc être explorées.
De ce point de vue, je ne partage pas les conclusions du rapport Cardoso, lequel invite notamment à poursuivre le mouvement de concentration. Ce rapport propose en effet de moderniser le secteur, ce qui, dans l’état actuel des choses, ne manquera pas d’entraîner la disparition des journaux à faible tirage en réduisant les aides à la distribution.
Non seulement cette stratégie n’est pas forcément la plus efficace, mais elle renvoie aussi au problème du pluralisme et de la liberté éditoriale. La concentration du capital de la presse au bénéfice de groupes dont ce n’est souvent pas le cœur de métier soulève des interrogations en termes de liberté d’expression et de respect du pluralisme.
Nous avons déjà pu en discuter à l’occasion de l’examen de la proposition de loi de David Assouline visant à limiter la concentration dans les médias, mais que le Sénat a rejetée. Bien entendu, le problème n’est nullement réglé aujourd’hui, et nous pouvons le constater quotidiennement.
La presse, en France, doit donc relever un défi économique, mais elle doit en outre relever un défi tout aussi essentiel : conserver sa singularité et sa liberté. Or cela n’a rien d’évident ! Nous l’avons vu avec le projet de réorganisation de l’AFP, l’autonomie des organes de presse reste menacée. La précarité, très forte dans ce secteur, représente également une menace pour l’indépendance journalistique. Mais c’est surtout l’autonomie des journalistes, chaque jour plus réduite, vis-à-vis des groupes propriétaires de leurs journaux qui peut susciter des craintes à cet égard.
Autrement dit, derrière l’apparence d’un budget à première vue satisfaisant, aucune réponse concrète n’est apportée aux défis qui attendent la presse écrite. Or c’est bien sur ces points qu’une direction doit être indiquée. On ne peut se contenter de considérer que la concentration des titres réglera à elle seule tous les problèmes du secteur. Le croire, c’est se tromper économiquement et tourner le dos aux valeurs du journalisme. C’est pourquoi je ne voterai pas ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, dans le domaine des industries culturelles, des médias et de la communication, nous vivons une « révolution » qui ne dit pas vraiment son nom. Chacun le sent, chacun le mesure tous les jours. Mondialisation et tournant numérique sont aujourd’hui les deux mutations majeures de la création et des pratiques culturelles.
Face à la crise, les industries culturelles, et plus généralement toutes les activités de la culture et des médias, ont montré leur solidité, pour devenir des pôles de résistance et inventer de nouvelles formes de croissance. Il faut cependant aller plus loin pour adapter, voire réinventer, nos modes de régulation et d’intervention.
Nos industries culturelles et nos médias sont aujourd’hui placés devant le défi de la concurrence mondiale. Ils sont également confrontés aux enjeux technologiques liés au développement de la numérisation et de la circulation des contenus et des œuvres sur Internet. C’est un chantier considérable ; ce doit être aujourd’hui un terrain d’action prioritaire du ministère de la culture et de la communication, en vue de construire l’économie de la culture de demain.
Dans ce contexte, la hausse de 2,8 % des crédits prévus pour les médias, le livre et les industries culturelles, qui s’élèvent à 4,7 milliards d’euros, y compris les ressources de l’ex-redevance, permet, ce me semble, de répondre à ces défis.
C’est toute l’ambition du programme Presse, livre et industries culturelles, dont le montant global s’élève à 700 millions d’euros. Le budget pour 2011 vise à favoriser l’épanouissement de nos médias et de nos productions culturelles dans le cadre d’une offre diversifiée et pluraliste.
Dans le sillage des états généraux de la presse de 2009, j’ai décidé de confirmer l’aide exceptionnelle en faveur de la presse. En dédiant à ce secteur 420,5 millions d’euros, l’État confirme les engagements contractuels qu’il a pris vis-à-vis de lui. Il n’y a aucun désengagement. Nous entendons accompagner les mutations d’un secteur profondément touché par la crise. Il s’agit de garantir, toujours, le pluralisme des idées, la vitalité du débat démocratique dans notre pays, mais aussi la qualité des contenus et la spécificité du métier de journaliste.
Le budget 2011 confirme l’engagement en faveur de l’innovation et de l’investissement, notamment grâce au fonds d’aide aux services de presse en ligne qui, comme il a été dit, produit des effets notables. Je rappelle qu’il est doté du même montant que celui qui est affecté au développement industriel et au plan massif d’aide au développement du portage.
J’entends également donner suite aux propositions du rapport Cardoso afin de promouvoir des entreprises d’information fortes et indépendantes, capables d’enrichir durablement le débat public. Mais il ne s’agit pas que les gros mangent les méchants… Les petits, voulais-je dire !
Mme Nathalie Goulet, MM. Claude Bérit-Débat et David Assouline. On peut être petit et méchant ! (Rires.)
M. Frédéric Mitterrand, ministre. Quel lapsus ! Si les gros pouvaient manger les méchants, tout serait tellement plus simple ! (Nouveaux rires.)
Dans cette perspective, monsieur Assouline, monsieur Bérit-Débat, j’ai décidé de réunir très prochainement les représentants des familles de presse, afin qu’ils débattent des propositions faites dans ce rapport, avant de déterminer mes principales priorités d’action.
Je suis notamment favorable à ce que les aides fassent l’objet d’une contractualisation.
Des pistes devront être également recherchées afin d’améliorer la transparence des dispositifs de soutien.
Mais il ne faut pas s’y tromper, nos priorités resteront, après le rapport Cardoso, les mêmes qu’avant celui-ci : garantir la liberté de la presse et assurer sa transition vers un modèle pérenne.
Je suis extrêmement attentif aux mécanismes de contrôle et d’évaluation des aides. En complément des dispositifs déjà existants – commissions paritaires, commissions de contrôle –, les conventions pourraient notamment prévoir des indicateurs améliorant l’évaluation par l’administration des projets que l’État contribue à financer. C’est en effet la garantie d’une aide vraiment efficace. En d’autres termes, améliorer l’évaluation, c’est servir l’ambition qui consiste à faire de l’État non plus un simple bailleur mais aussi un stratège dans l’économie nouvelle de l’information et des médias.
À cet égard, je suis également très attentif à la situation de l’Agence France-Presse et au projet porté notamment par son président, M. Emmanuel Hoog, en contact avec les parlementaires et les agents de cet organisme.
De la même manière, la politique du livre est dotée d’un budget de 253 millions d’euros, afin de préserver les secteurs traditionnels, notamment la librairie indépendante, qui doit à tout prix être protégée et valorisée dans le contexte de la révolution numérique que nous connaissons. Il s’agit là d’un objectif majeur.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture, et M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. Frédéric Mitterrand, ministre. Cela doit se faire tout en développant les nouveaux accès et les nouveaux usages liés à l’ère numérique : ce n’est pas contradictoire.
Chacun le sait, la lecture reste un mode d’accès privilégié à la culture : c’est pourquoi l’action en faveur du développement de la lecture est essentielle, comme l’a si justement souligné M. Nachbar. J’ai lancé, au mois de mars dernier, quatorze propositions pour le développement de la lecture en direction des principaux partenaires : collectivités territoriales, associations. J’ai eu l’occasion d’évoquer assez longuement la question de l’édition et du tournant numérique à l’occasion du récent Forum d’Avignon, auquel Jack Ralite a fait allusion avec bienveillance ce matin, lors de l’examen des crédits de la mission « Culture ».
Dans le domaine de l’écrit, au regard de la stratégie de numérisation lancée par Google, l’objectif est de faire une proposition nationale, légale et concertée. Ce projet est inscrit dans le cadre des investissements d’avenir, en lien avec la Bibliothèque nationale de France.
À cet égard, mes récentes rencontres avec le commissaire général à l’investissement, M. Ricol, permettront d’accélérer le processus de mise en œuvre.
Dans ce domaine, je fais partie des convaincus : le livre numérique est aujourd’hui la « nouvelle frontière » de l’édition, il sera demain un horizon partagé.
Dans cette perspective, le projet de budget pour 2011 réaffirme le rôle du Centre national du livre : il permettra aux éditeurs, quelle que soit leur taille, de bénéficier d’une nouvelle politique numérique et poursuivra son action vis-à-vis des libraires traditionnels et des libraires en ligne.
S’agissant de la taxe CNL sur laquelle vous attirez mon attention, monsieur Lagauche, les objectifs de rendement devraient être bel et bien atteints si la dynamique actuelle perdure. Il n’est donc pas envisagé d’en modifier l’assiette.
Le soutien à la librairie, vecteur essentiel de la diversité éditoriale, repose également sur la création du label « Librairie indépendante de référence » : 406 librairies ont jusqu’à présent été labellisées et constituent autant de lieux de contacts et de rencontres entre auteurs.
Enfin, je veux réaffirmer mon attachement au prix unique du livre, loi de régulation fondamentale, qui a permis de préserver dans notre pays la diversité éditoriale et les libraires, qui la font vivre. Sur votre initiative, monsieur Legendre, le Sénat a récemment adopté une proposition de loi relative au prix du livre numérique, ce dont je me félicite particulièrement. Comme l’a rappelé Françoise Férat, l’alignement du taux de la TVA à 5,5 % est enfin à l’ordre du jour.
Dans le domaine du numérique, il me semble que le dogme de la gratuité a perdu de son lustre. Dans une sorte d’emballement sur l’économie de l’immatériel, on avait un temps imaginé un horizon où la gratuité régnerait sur l’ensemble de ce qu’on appelle les « contenus » culturels, tant pour leur production que pour leur consommation. Installée et dotée d’un budget de 12 millions d’euros, la HADOPI est désormais en ordre de marche. Elle repose sur un dispositif incitatif et pédagogique, sur une réponse graduée à travers des messages adressés aux internautes.
Je le répète encore une fois : il s’agit non pas de « surveiller et punir », mais bien de contrôler et garantir. Les crédits alloués permettront à la Haute Autorité de favoriser le développement de l’offre légale, de garantir la protection des œuvres contre le téléchargement illégal, mais aussi d’observer les usages licites et illicites. En effet, je crois que la pédagogie passe aussi par l’incitation et l’acculturation à la légalité : telle est l’ambition de la « carte musique » destinée aux jeunes âgés de 12 à 25 ans, disponible depuis quelques semaines. Les problèmes techniques mineurs constatés lors de son lancement sont tous résolus.
Dans le domaine des industries musicales, il nous faut être encore plus volontaristes. Le ministère de la culture et de la communication a soutenu, lors des débats sur le budget 2011, la revalorisation du crédit d’impôt en faveur de la production phonographique. Cette mesure n’a pas été retenue. Pour autant, je continuerai à défendre cette revalorisation avec insistance. Je demeure en effet convaincu que, tout en représentant une dépense fiscale modeste – environ 4 millions d’euros en 2009 –, ce crédit d’impôt est indispensable au développement des labels indépendants, qui sont les plus fragilisés par la crise du secteur.
En ce qui concerne le cinéma, enfin, et je réponds plus particulièrement à M. Ivan Renar, j’ai personnellement conduit une bataille pour préserver les financements de la filière économique du cinéma, dans le cadre de la discussion budgétaire sur les niches fiscales. L’arbitrage du Président de la République traduit une exigence forte : la préservation du système français de financement de la création cinématographique et audiovisuelle, qui est partie prenante de l’exception culturelle française en Europe.
Madame Morin-Desailly, je mesure les craintes que vous exprimez concernant les accords des fournisseurs d’accès à Internet avec les sociétés d’auteurs. Il s’agit d’une négociation entre les deux parties ; je veillerai personnellement à ce que la discussion garantisse la rémunération des créateurs. La modification du taux de la TVA ne doit pas conduire à une réduction des assiettes ou des taux de rémunération prévus dans les accords entre les FAI et les sociétés d’auteurs : cela tombe sous le sens.
Je souligne d’ailleurs que les soutiens mis en œuvre par le Centre national du cinéma et de l’image animée sont en progression en 2011. Les moyens alloués au fonds de soutien atteindront 730 millions d’euros.
La numérisation des salles de cinéma constitue un autre chantier stratégique et prioritaire. Un effort financier sans précédent, de 125 millions d'euros sur trois ans, sera consenti par les pouvoirs publics dans le cadre du plan de modernisation de notre parc en faveur de l’équipement des petites salles et des circuits itinérants. L’aide au numérique s’ajoutera, bien sûr, au maintien des dispositifs d’aide à l’exploitation existants. C’est l’expression d’une volonté politique forte, qui reconnaît le rôle du cinéma dans l’offre culturelle de notre pays et dans le « bien vivre ensemble ».
Je voudrais finir la présentation des crédits de la mission « Médias » en soulignant le soutien renouvelé en faveur de l’audiovisuel public.
Son budget progresse de 3,4 % en 2011, pour atteindre près de 4 milliards d’euros, en additionnant le budget général et les ressources de la contribution à l’audiovisuel public, l’ex-redevance.
Madame Laborde, vous avez exprimé des inquiétudes à propos du groupe France Télévisions. Je suis en mesure de vous rassurer : le projet de loi de finances prévoit un montant global de ressources publiques de 2,5 milliards d'euros, dont 2,1 milliards d'euros issus de l’ex-redevance auxquels s’ajoute une dotation de 0,4 milliard d’euros qui est issue du budget général et complète ainsi le financement des missions de service public du groupe.
Il s’agit d’une dotation révisée, eu égard au plan d’affaires 2009-2012, du fait du dynamisme des recettes commerciales. Toutefois, elle ne remet nullement en cause l’objectif d’un résultat équilibré en 2011, non plus que les ambitions éditoriales et technologiques du groupe, notamment le haut niveau d’investissements dans le domaine de la création audiovisuelle et cinématographique française et européenne.
Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de dresser devant vous un bref bilan de la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision. Je sais que l’attention de l’opinion s’est concentrée sur la disparition progressive de la publicité. Le bilan de cette suppression après vingt heures est très positif : elle a été appliquée par les professionnels,...
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Tout à fait !
M. Frédéric Mitterrand, ministre. ... mais elle a surtout été bien accueillie par les téléspectateurs.
M. Jacques Legendre, président de la commission de la culture. Oui !
M. Frédéric Mitterrand, ministre. Madame Morin-Desailly, l’extension de cette mesure dépend aujourd’hui de la décision que le Parlement prendra dans sa grande sagesse, compte tenu des contraintes imposées par le budget triennal de l’État.
Sachez que le Gouvernement aborde cette question sereinement, avec pragmatisme, sans dogmatisme. En effet, indépendamment de la question du moratoire, d’importants changements ont d’ores et déjà vu le jour. Un virage éditorial a été amorcé, favorisant une offre culturelle plus dense et plus créative. La création d’une entreprise unique a, par ailleurs, permis de conjuguer les forces et de mutualiser les compétences.
Au-delà de la réunion juridique, le nouveau président-directeur général du groupe France Télévisions entend désormais proposer une organisation moins centralisée et renforcer l’identité éditoriale des chaînes : il s’agit non pas d’une remise en cause de la loi, mais bien d’un aménagement au service de la qualité et de la diversité, fort bien accueilli par les producteurs et les créateurs, qui s’y retrouvent bien mieux que dans l’organisation précédente.
Dans le cadre de cette ambition modernisatrice, plus de 100 millions d'euros seront consacrés au passage à la TNT en vue de l’extinction progressive de la diffusion analogique des chaînes de télévision à la fin de l’année 2011. C’est une véritable « révolution de l’image », équivalente au passage à la couleur, une révolution que mon ministère entend accompagner fortement, sans négliger les Français les plus modestes et les plus fragiles ; je pense notamment aux personnes âgées et aux foyers isolés. J’ai moi-même suivi le processus d’installation de la télévision numérique terrestre dans plusieurs régions.
Je porte également une attention particulière à l’outre-mer, de manière à y protéger les chaînes privées locales, qui jouent un rôle considérable dans le lien social. À cette fin, un fonds d’aide spécial a été institué.
Les dotations pour 2011 destinées aux organismes de l’audiovisuel public autres que France Télévisions – l’INA, Radio France, Arte et Audiovisuel extérieur de la France –- sont en progression. Elles permettent de financer leurs orientations stratégiques tout en respectant les contrats d’objectifs et de moyens signés avec l’État.
En ce qui concerne Audiovisuel extérieur de la France, vous l’avez souligné, monsieur Kergueris, les synergies commencent à porter leurs fruits. J’en veux pour preuve le lancement de France 24 en langue arabe, 24 heures sur 24, qui s’est appuyé sur l’expertise de radio Monte Carlo Doualiya, dont on a rappelé que le grand retour est programmé. Autre illustration de cette stratégie concertée : RFI déménagera à la fin de l’année 2011 pour se rapprocher de France 24.
Je souhaite également rassurer tous ceux d’entre vous qui m’ont interrogé sur le contrat d’objectifs et de moyens d’Audiovisuel extérieur de la France : celui-ci devrait être finalisé et transmis au Parlement avant la fin de cette année.
Monsieur Duvernois, s’agissant de l’exercice conjoint de la tutelle de l’audiovisuel extérieur de la France entre le ministère de la culture et de la communication et le ministère des affaires étrangères, croyez bien que la Rue de Valois pèse de tout son poids et joue tout son rôle dans cette cotutelle.
Je n’oublie pas la place très particulière que les radios associatives occupent dans le paysage radiophonique français. Le Fonds de soutien à l’expression radiophonique locale, dont les aides profitent à plus de 600 radios, bénéficiera de 29 millions d’euros, soit 2 millions d’euros de plus qu’en 2009.
Mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il s’agisse de la lecture, de la musique ou des médias, c’est bien à une véritable révolution des pratiques culturelles que l’on assiste aujourd’hui. L’individualisation et l’atomisation des pratiques en ligne du lecteur, de l’auditeur, du spectateur, sa solitude, son manque de repères parfois, s’accompagnent également d’une liberté nouvelle, celle de pouvoir accéder à des contenus de tous horizons, venus du monde entier.
Pour agir dans un environnement aussi instable, aussi mouvant, à l’évolution aussi rapide, la politique du ministère de la culture et de la communication doit éviter tout dogmatisme : nous devons faire du sur-mesure, nous devons agir au cas par cas, nous devons écouter.
Cette transformation en profondeur de nos modes d’action en est encore à ses débuts. II s’agit de faire en sorte que nous puissions mieux nous approprier notre futur, en préservant et en valorisant notre patrimoine, en favorisant toujours plus la création artistique et nos médias dans un contexte concurrentiel sur lequel il faut anticiper. Pour cela, il faut être capable de faire preuve d’ambition et il faut savoir se donner les moyens de se projeter dans vingt ou trente ans.
Comme le disait récemment l’historien Pascal Ory, le « pessimisme culturel est éternel » : ce n’est pas lui qui m’anime au ministère de la culture et de la communication, bien au contraire. Pour servir notre création, nos médias et nos industries culturelles, l’heure est aujourd’hui à la prospective, à l’écoute et à l’inventivité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)