M. Jean-Michel Baylet. Elle a été créée pour cela !
M. Rémy Pointereau. Des précisions quant aux critères d’éligibilité à la nouvelle dotation et au périmètre exact des actions qu’elle pourra financer seraient sans doute utiles. Certains départements ayant cessé leurs aides aux communes, il conviendrait qu’elle soit répartie de façon équitable entre communes et intercommunalités.
Ma deuxième observation portera sur la péréquation verticale, en particulier la DGF, qui est la dotation engendrant le plus d’inégalités entre collectivités. Les maires ruraux sont inquiets. La dotation forfaitaire de base des communes varie de 64 euros à 128 euros par habitant en fonction de la taille de la commune : nous devons réduire, à terme, cette distorsion qui pénalise la ruralité.
Je formulerai une troisième observation sur la réforme de la taxe professionnelle, dont nous discuterons surtout lors de l’examen des articles non rattachés, en particulier de l’article 59.
L’année 2011 constitue un tournant pour les finances locales. Maire d’une commune rurale et président de l’association des maires de mon département, j’attire en particulier l’attention sur la part de l’impôt forfaitaire sur les entreprises de réseaux, l’IFER, attribuée aux communes au titre de la production d’énergie d’origine éolienne. Nous avons déjà eu un débat sur cette question l’an passé. Le relèvement de cette part à 5 euros par kilowatt, contre 2,913 euros l’année dernière, proposé dans le projet de loi de finances est une petite avancée. Mais cela est encore nettement insuffisant, puisqu’il faudrait que cette part atteigne au minimum 8 euros par kilowatt pour compenser les pertes de recettes par rapport à l’ancienne taxe professionnelle. Les simulations effectuées le montrent bien, et de nombreux maires s’interrogent, à l’approche de la préparation de leur budget pour 2011, sur la réalité de leurs ressources.
Avant la réforme de la taxe professionnelle, les recettes fiscales par éolienne étaient, en moyenne, de l’ordre de 30 000 euros, à répartir entre communes, communautés de communes et département. Depuis, ces recettes ont chuté au-dessous de 10 000 euros par éolienne. Des communes ayant anticipé l’implantation d’éoliennes sur leur territoire se trouvent aujourd’hui pénalisées au regard des prévisions. J’ai donc déposé plusieurs amendements, que je présenterai à l’article 59, visant, d’une part, à relever la part de l’IFER dévolue aux communes à 8 euros par kilowatt, et, d’autre part, à modifier la répartition du produit de cet impôt au profit des communes, afin que celles-ci perçoivent 50 % de celui-ci, les communautés de communes 40 % et les départements 10 %. En effet, les départements ne peuvent prétendre à une part aussi élevée que prévu initialement, à savoir 30 %, dans la mesure où toutes les démarches sont réalisées par le bloc communal et que les nuisances éventuelles sont plus locales que départementales.
En ce qui concerne les départements, l’annonce faite il y a quelques mois par le Gouvernement, à la suite du rapport Jamet, d’une aide aux départements en situation d’urgence financière est très positive. Le contrat de stabilité proposé, aux termes duquel les départements pourront recevoir une avance, voire une dotation, en contrepartie d’un programme de stabilisation de leurs dépenses, me paraît relever du bon sens. J’avais écrit au Premier ministre pour demander que le Cher, qui compte parmi les dix départements les plus en difficulté, puisse bénéficier de ce soutien. J’ai noté avec satisfaction que le Gouvernement traduirait cette démarche dans le prochain projet de loi de finances rectificative.
Telles sont, monsieur le ministre, les interrogations que je souhaitais vous soumettre.
Pour conclure, je tiens à vous renouveler mes félicitations pour votre nomination et à vous assurer de toute ma confiance. Nous ne doutons pas que vous saurez soutenir les collectivités territoriales dans leur ensemble, rétablir des équilibres parfois fragiles sur certaines parties de notre territoire en confortant la ruralité, corriger des inégalités et remédier aux pertes de recettes dues à la trop grande faiblesse de bases de calcul retenues dans la loi de finances de 2010.
M. Jean-Louis Carrère. Votez-lui un bon budget, alors !
M. Rémy Pointereau. Cela permettra, j’en suis sûr, un aménagement du territoire plus équilibré et plus harmonieux. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup de choses ayant déjà été dites, je me bornerai à formuler quelques remarques.
Premièrement, en gelant les dotations aux collectivités locales pendant trois ans, l’État appelle celles-ci à participer à la lutte contre les déficits publics. Bien sûr, on ne peut pas y être opposé. Néanmoins, comme cela a été rappelé tout à l’heure, cette participation doit demeurer à la mesure de nos responsabilités, sachant que les collectivités locales ne sont à l’origine que de 10 % de l’endettement global de la France.
Je voudrais relayer ici l’angoisse des élus. Ce gel fait suite à la réforme de la taxe professionnelle, qui correspond à une recentralisation fiscale : l’État dispose désormais de deux leviers d’action sur les recettes des collectivités locales. Celles-ci craignent donc de ne plus pouvoir assumer leurs missions.
Monsieur le ministre, malgré les paroles rassurantes de Mme Lagarde, les Français savent que la situation n’est pas bonne et que les temps à venir vont être durs. Or si les collectivités locales n’ont plus les moyens de mettre en œuvre un certain nombre de politiques de proximité, la situation deviendra de plus en plus insupportable pour nos concitoyens. Il faut que le Gouvernement en prenne conscience avant qu’il ne soit trop tard.
Deuxièmement, je regrette que le Gouvernement ait obtenu la suppression, par le biais d’une seconde délibération à l’Assemblée nationale, de plusieurs dispositions favorables aux collectivités territoriales. Monsieur le président du Sénat, monsieur le ministre, nous espérons que, dans cette assemblée qui représente les collectivités territoriales, le Gouvernement saura faire preuve d’un peu plus d’habileté. Nous espérons surtout que nos collègues ne se laisseront pas aller à voter une seconde délibération qui viserait à annuler des décisions que nous aurions prises auparavant.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Louis Carrère. Ils l’ont déjà fait !
Mme Jacqueline Gourault. Troisièmement, si la dotation de garantie diminue globalement de 130 millions d’euros, soit de 2,54 %, elle connaît une évolution différenciée selon les communes. Nous souhaiterions donc que le Gouvernement procède à des simulations plus précises des effets de la baisse de la dotation de garantie.
Quatrièmement, comme l’a déjà relevé mon collègue Rémy Pointereau, la fusion de la DGE et de la DDR suscite une grande inquiétude. Nous espérons qu’aucune commune n’y perdra. En outre, nous souhaiterions que la commission d’élus conserve le rôle essentiel qu’elle jouait jusqu’à présent.
Pour terminer, je voudrais évoquer, à la demande de plusieurs de mes collègues, les élections aux chambres départementales de coopération intercommunale, les CDCI, même si ce sujet est un peu à la marge de notre débat.
Mme Nathalie Goulet. Pas tant que cela !
Mme Jacqueline Gourault. La loi portant réforme des collectivités territoriales prévoit l’élection d’une commission départementale de la coopération intercommunale dans chaque département. Nous souhaiterions que le décret correspondant paraisse le plus rapidement possible, en tout cas avant que ne s’engage la campagne des élections cantonales, qui pourraient perturber quelque peu les élections aux CDCI. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Georges Patient.
M. Georges Patient. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » s’élèvent pour 2011 à 2,55 milliards d’euros en autorisations d’engagement et à 2,51 milliards d’euros en crédits de paiement. Cette enveloppe ne représente que 2,6 % du montant total des relations financières entre l’État et les collectivités territoriales, qui dépasse 98 milliards d’euros.
Cette mission retrace les crédits affectés aux collectivités locales au titre de la dotation générale de décentralisation, des dotations d’investissement et d’autres aides spécifiques de l’État aux collectivités qui sont intégrées dans le périmètre des dotations concernées par le gel en valeur pour les trois prochaines années, conformément à la règle d’évolution « zéro valeur » posée par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.
L’article 20 du projet de loi de finances gèle les dotations de fonctionnement, telles que la dotation générale de décentralisation, et l’article 21 gèle quant à lui les dotations d’investissement, telle la dotation globale d’équipement.
Cette stagnation des dotations aura des effets négatifs sur les capacités d’intervention des collectivités. D’ores et déjà, la note de conjoncture publiée le mercredi 17 novembre par Dexia Crédit Local annonce un recul de 2,1 % des investissements publics locaux en 2010. Cette baisse se poursuivra l’année prochaine, puisque le projet de loi de finances pour 2011 prévoit une diminution de 3,1 % du montant du Fonds de compensation pour la TVA.
Plus grave encore sera l’incidence de la réduction des concours financiers de l’État sur les départements-régions d’outre-mer, qui, en raison de compétences plus larges que celles des collectivités métropolitaines, ont des charges nécessairement plus élevées. Les dépenses de fonctionnement par habitant des collectivités territoriales des DOM sont en effet largement supérieures à la moyenne de celles des collectivités françaises : l’écart est de 82 % pour les régions, de 88 % pour les départements et de 17 % pour les communes !
Outre l’effet des charges de personnel, ce déséquilibre résulte également du poids des dépenses sociales dans les budgets des collectivités territoriales d’outre-mer. Cela induit nécessairement une situation particulièrement tendue, notamment pour les finances départementales. En raison de l’importance de ces dépenses sociales, la sous-compensation pèse plus lourd en valeur absolue dans les budgets départementaux d’outre-mer que dans ceux de métropole.
Les DOM présentent également des spécificités historiques qui justifient un effort accru en matière d’investissement : infrastructures de transports, équipements scolaires, logement social. En raison de besoins importants, les dépenses d’investissement des collectivités territoriales devraient logiquement être supérieures à celles des collectivités métropolitaines. Or tel n’est pas le cas : elles sont plus faibles en raison du poids des dépenses de fonctionnement, qui obère la capacité d’investissement ; cela engendre de nombreuses insatisfactions locales. En l’état actuel des choses, elles assurent pourtant à elles seules plus de 70 % des investissements publics, qui sont de loin le premier moteur de l’activité économique des départements d’outre-mer.
Sans cesse, nous alertons sur cette situation et réclamons une meilleure adaptation des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales des départements d’outre-mer, voire l’attribution d’une dotation de rattrapage. Les réponses qui nous sont faites reposent exclusivement sur la responsabilisation des élus et l’accentuation de la pression fiscale directe et indirecte sur une population dont le quart seulement est assujetti au paiement de l’impôt sur le revenu, puisque les départements d’outre-mer bénéficieraient déjà d’importantes dotations de l’État, en raison de règles de droit commun qui leur seraient plus favorables.
Si la hausse de la dotation globale de fonctionnement des collectivités territoriales des DOM est certes supérieure à celle de la DGF des collectivités métropolitaines, cela résulte d’une croissance démographique plus forte. Il est normal que les dotations de l’État prennent en compte cet élément, puisqu’une part importante de la DGF est déterminée par le nombre d’habitants.
La mission sénatoriale qui s’était rendue dans les DOM en 2009 avait pris la pleine mesure de la situation, en identifiant de réels problèmes. Dans son rapport, qui a été largement diffusé, elle a émis plus de quinze propositions visant à améliorer la situation financière des collectivités locales. Le Gouvernement a paru les entendre, mais à ce jour il n’y a pas donné suite. Je reprends certaines de ces propositions au travers d’amendements qui, je l’espère, seront adoptés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Paul Virapoullé applaudit également.)
(M. Roland du Luart remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Roland du Luart
vice-président
M. le président. La parole est à M. Benoît Huré.
M. Benoît Huré. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits pour 2011 de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » me conduit à formuler les quelques remarques suivantes.
Alors qu’une crise économique et financière sans précédent accable le monde et la France, je constate avec satisfaction que le Gouvernement démontre, au travers de ce projet de budget, qu’il continue malgré tout à soutenir fortement les collectivités territoriales, dont plus de 60 % des recettes proviennent de l’État. On note, en particulier, une augmentation des crédits de la dotation de développement rural et de la dotation de solidarité urbaine, ce qui témoigne d’une grande attention portée à la situation des territoires fragiles.
Ce projet de budget s’inscrit en outre dans l’actualité de la réforme territoriale, à laquelle le Sénat a apporté une contribution déterminante, largement inspirée par son enracinement dans les réalités territoriales.
Si l’évolution du bloc communal et intercommunal se trouve confortée, la possibilité de mieux travailler ensemble offerte aux départements et aux régions renforcera les rôles nécessaires et complémentaires de ces deux institutions, tout en répondant à la nécessité incontestée de simplifier et de clarifier le mode d’élection des représentants des territoires.
La suppression de la taxe professionnelle est compensée et les modalités de la répartition de l’impôt économique nouveau qui lui succède reflètent une volonté, qui devra être encore réaffirmée à l’avenir, de renforcer la péréquation entre territoires.
En revanche, j’éprouve une vive inquiétude, à l’horizon des mois et même des semaines à venir, pour certains conseils généraux. En effet, les départements, outre les missions classiques qui échoient à toutes les autres collectivités, ont le devoir de mettre en œuvre les politiques de solidarité, les charges liées à la prise en charge de la dépendance et au RMI-RSA étant en train d’exploser.
Le Premier ministre, en décembre dernier, a lui-même reconnu la gravité de la situation ; il a nommé un expert, M. Pierre Jamet, dont les conclusions sont claires.
Même si, à compter de 2012, les perspectives budgétaires des conseils généraux reposent sur des fondamentaux plus solides, grâce à la mise en œuvre du financement par la nation de la dépendance au titre du « cinquième risque », il n’en reste pas moins que certains départements, dont celui des Ardennes, où se conjuguent les effets d’une démographie vieillissante et d’une situation économique difficile, ne pourront pas attendre cette échéance, l’équation budgétaire de 2011 étant quasiment impossible à résoudre.
Les 150 millions d’euros de dotation exceptionnelle récemment dégagés par le Gouvernement en faveur de quelques dizaines de départements n’apportent qu’une partie de la réponse pour certains conseils généraux se comptant sur les doigts d’une main, dont celui des Ardennes. Pour ceux-ci, les conclusions de la mission d’appui constituée sur l’initiative du Premier ministre attestent la nécessité de verser en urgence une dotation de secours spécifique.
Monsieur le ministre, je fais confiance à l’ancien sénateur et président de conseil général que vous êtes pour relayer cet appel pressant auprès du Premier ministre. Je vous renouvelle mes félicitations et mes encouragements pour la responsabilité ministérielle qui vient de vous être confiée. Je voterai les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Philippe Richert, ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, chargé des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite aborder devant vous en toute transparence ce dossier complexe. Quelles que soient nos responsabilités, ce n’est qu’ainsi que nous pourrons avancer ensemble, pour le bien de la nation.
La discussion des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et des articles rattachés constitue l’un des trois moments du débat sur les finances locales que ménage l’examen du projet de loi de finances. En effet, la semaine dernière, vous avez déjà adopté la première partie du projet de loi de finances et son volet relatif aux prélèvements sur recettes de l’État au profit des collectivités territoriales, et j’aurai le plaisir, en fin de semaine ou en début de semaine prochaine, de vous retrouver pour examiner les articles relatifs à la clause de rendez-vous de la réforme de la taxe professionnelle.
L’importance de ces débats et des articles associés résulte de deux orientations majeures de ce projet de loi de finances : l’application concrète de la réforme de la taxe professionnelle pour les collectivités territoriales, d’une part, la mise en œuvre du gel des concours financiers et la poursuite de l’effort de péréquation, d’autre part.
Avant de présenter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », je voudrais exposer brièvement ces orientations, en ayant bien conscience des difficultés auxquelles nous sommes tous confrontés au sein de nos collectivités territoriales.
En ce qui concerne tout d’abord la clause de rendez-vous de la taxe professionnelle, ce projet de loi de finances répond de manière concrète, comme le Gouvernement s’y était engagé, à une attente forte des parlementaires et des élus locaux.
Cette clause de rendez-vous permet d’établir une première évaluation de la réforme. Les collectivités territoriales, je tiens à le redire ici, n’ont pas été asphyxiées par la suppression de la taxe professionnelle. D’ailleurs, le montant de la compensation-relais de la taxe professionnelle perçue cette année marque une sensible augmentation – à hauteur de 3,7 % – par rapport au produit de la taxe professionnelle perçue l’an dernier. Ce ne sont pas des chiffres arbitraires, c’est la réalité ! Cela représente, quoi que l’on puisse dire, 1,1 milliard d’euros de ressources supplémentaires pour les collectivités locales.
Certes, la territorialisation des nouvelles ressources continue de faire débat. À mon sens, elle légitime les outils de péréquation qui doivent être progressivement mis en œuvre : pour les échelons régional et départemental, un mécanisme de péréquation assis sur la croissance de la cotisation sur la valeur ajoutée, la CVAE ; pour le seul niveau départemental, le mécanisme relatif aux droits de mutation à titre onéreux, les DMTO, introduit l’an dernier sur l’initiative du député Marc Laffineur ; enfin, pour l’échelon communal, l’examen de ce projet de loi de finances permet d’ouvrir le débat sur l’instauration, dès 2012, d’un nouveau dispositif de péréquation des ressources communales et intercommunales selon les modalités décrites à l’article 63.
Tout le monde est favorable à la péréquation, à condition que l’effort repose d’abord sur les autres. Je n’ai cessé de le constater depuis bientôt trente ans que j’exerce des responsabilités.
Le Gouvernement souhaite établir une feuille de route pour les travaux que nous aurons à conduire en 2011, en étroite concertation avec le Comité des finances locales, monsieur le rapporteur spécial. Nous aurons l’occasion de débattre de ces différents mécanismes dans les tout prochains jours. Enfin, nous avons dû adapter les instruments de mesure des écarts de richesse aux nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales. Étant donné les évolutions intervenues, il était nécessaire de trouver de nouvelles bases.
Cette mesure est indispensable pour la répartition des dotations de péréquation. C’est l’objet de l’article 86 du projet de loi de finances, rattaché à la mission « Relations avec les collectivités territoriales », qui prévoit de conserver en 2011, pour la part de potentiel fiscal assise sur la seule taxe professionnelle, les données utilisées pour le calcul du potentiel fiscal en 2010, c'est-à-dire en fait les données de 2009.
Ce choix a été fait pour ne pas perturber trop gravement la répartition des dotations de péréquation au moment où se mettent en place les nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales. Naturellement, l’an prochain, un nouveau potentiel fiscal prendra en compte les nouvelles ressources fiscales des collectivités territoriales.
J’en viens maintenant à la stabilisation en valeur, pour la période 2011-2013, des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales.
Cette décision a été prise lors de la deuxième conférence des déficits publics. Elle s’inscrit dans le cadre des conclusions du rapport Carrez-Thénault et vise à appliquer aux concours financiers de l’État la même règle d’évolution que celle que l’État fixe pour ses propres dépenses.
L’effort de maîtrise des finances publiques concerne en effet l’ensemble des dépenses publiques, d’autant que le contribuable final est toujours le même. Bien entendu, les dettes des collectivités ne sont cependant pas du même niveau que celles de l’État ; personne ne saurait prétendre le contraire.
Pour mémoire, je souhaite rappeler que le gel ne porte que sur une enveloppe de 50,4 milliards d’euros, alors que l’effort financier global de l’État en faveur des collectivités territoriales est nettement supérieur, puisqu’il atteint 77 milliards d’euros en comptant les concours financiers et les dégrèvements législatifs d’impôts locaux, et en réalité 99 milliards d’euros en ajoutant la fiscalité transférée en compensation des transferts de compétences. Cela représente tout de même le premier poste de ce projet de budget, loin devant, par exemple, celui de l’éducation nationale, qui s’élève à 61,7 milliards d’euros.
De surcroît, ce gel s’accompagne de plusieurs engagements forts.
Premièrement, la stabilisation des concours financiers de l’État ne concernera pas toutes les dotations. En effet, conformément aux préconisations de MM. Carrez et Thénault, le Fonds de compensation pour la TVA n’est pas inclus dans le périmètre du gel. Les dotations aux collectivités territoriales ne seront donc pas pénalisées par la croissance des investissements que celles-ci pourraient engager. Le produit des amendes de police est également exclu du périmètre du gel.
Deuxièmement, les effets de la réforme de la taxe professionnelle, notamment la création de la nouvelle dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle, ne pèseront pas sur les autres concours financiers de l’État.
Troisièmement, les dotations de péréquation vont continuer à progresser. Cela témoigne de notre souhait de renforcer l’équité entre les territoires ; j’y reviendrai tout à l’heure lors de l’examen des amendements.
Ainsi, l’article 80 précise que la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale augmentera de 77 millions d’euros, monsieur Sueur. La dotation de solidarité rurale croîtra, quant à elle, de 50 millions d’euros. Cela représente une augmentation de 6,2 % pour chacune de ces deux dotations. Elle sera certes gagée par la baisse d’autres composantes de l’enveloppe gelée, notamment de certaines parts de DGF.
Je précise toutefois que, s’agissant de l’écrêtement du complément de garantie, celui-ci ne sera plus appliqué de manière uniforme comme les années précédentes, mais en fonction du potentiel fiscal des communes. C’est une vraie mesure de redistribution, particulièrement protectrice pour les petites communes, les communes les plus fragiles. J’ajoute qu’un amendement adopté à l’Assemblée nationale a permis de dégager une ressource de 149 millions d’euros, qui soulagera les contraintes au sein du financement de la péréquation.
Enfin, je voudrais rappeler l’engagement très fort du Président de la République de réduire le poids des normes pesant sur les collectivités territoriales. Un moratoire sur les normes nouvelles est d’ores et déjà en vigueur depuis le 6 juillet dernier, et un travail s’engage sur le stock de normes existantes, en liaison avec les trois associations d’élus nationales.
Je voudrais à présent présenter brièvement les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ». Leur montant est modeste au regard de l’effort global de l’État au profit des collectivités territoriales, puisqu’il se décompose pour 2011 en 2,626 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et en 2,58 milliards d’euros de crédits de paiement.
Je vais vous prouver que, même pour cette mission budgétaire, l’immobilisme n’est pas de mise.
Tout d’abord, l’article 82 du projet de loi de finances prévoit de fusionner la dotation globale d’équipement et la dotation de développement rural, pour créer une nouvelle dotation d’équipement des territoires ruraux. Elle sera dotée de 615 millions d’euros ; il n’y a donc pas de diminution. Son fonctionnement permettra d’améliorer et de simplifier la gestion des crédits déconcentrés à l’échelon des préfectures, d’élargir le champ des projets éligibles, et donc de mieux répondre aux besoins des territoires ruraux, notamment pour le montage de projets, conformément aux attentes exprimées par les collectivités territoriales lors des assises des territoires ruraux.
Par ailleurs, quelques dotations sont abondées afin de répondre à des besoins spécifiques. C’est le cas de la dotation spéciale de construction et d’équipement des établissements scolaires de Mayotte, ou encore du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées, qui progressent respectivement de 5 millions d’euros et de 10 millions d’euros.
Enfin, la dotation de développement urbain est reconduite sur l’ensemble de la période 2011-2013, et l’État continuera ainsi d’apporter son soutien aux projets des communes les plus défavorisées dans le domaine économique et social.
Telles sont les principales orientations dont je voulais vous faire part avant de répondre de façon plus spécifique aux orateurs. Leurs questions ont été tellement nombreuses que je vais essayer de les regrouper par thèmes.
Nous savons tous que la situation est difficile, dans notre pays et ailleurs. Tous les jours ou presque, des informations nous parviennent sur la fragilité de la situation de certains de nos partenaires. Dans ces conditions, il est normal que l’État consente des efforts, et il est aussi normal que les collectivités y participent. Il ne saurait en être autrement : nous ne serions pas responsables si nous tenions un autre langage. Cela étant, il faut évidemment tenir compte de la situation spécifique des collectivités territoriales.
En ce qui concerne la taxe professionnelle, nous reviendrons sur ce sujet en fin de semaine ou au début de la semaine prochaine. Aux orateurs ayant affirmé que la suppression de la taxe professionnelle avait entraîné une forte dégradation de la situation des collectivités, je ferai observer que s’il est tout à fait exact que celles-ci ne disposent plus des mêmes marges de manœuvre qu’auparavant, il n’en demeure pas moins que le montant de la contribution apportée par l’État aux collectivités territoriales a été supérieur de 1,1 milliard d’euros en 2010 par rapport à 2009. Nous sommes donc allés au-delà de la garantie qui avait été donnée de maintenir son niveau. Lors du congrès de l’Association des maires de France, j’ai entendu un intervenant affirmer que sa commune avait vu sa dotation baisser de 50 % : cela n’est pas possible !
Cela ne veut pas dire que tout est simple et que les collectivités territoriales n’ont pas perdu une partie de leurs marges de manœuvre financières, mais la réalité est que le montant de la dotation est supérieur en 2010 de 1,1 milliard d’euros à ce qu’il a été l’année précédente.
En ce qui concerne les départements, il est clair, monsieur Poncelet, qu’ils subissent un véritable effet de ciseaux, entre la croissance des dépenses, notamment dans le domaine social, en particulier pour financer la prise en charge de la dépendance, et l’évolution difficile des ressources, liée notamment à une chute des recettes tirées des droits de mutation.
Une première réponse à cette situation sera d’accompagner les départements les plus fragiles grâce à deux dotations.