M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, auteur de la question n° 940, adressée à M. le ministre chargé de l’industrie.
M. Martial Bourquin. Monsieur le secrétaire d’État, en mai dernier, les deux constructeurs français Renault et Peugeot ont annoncé être en mesure de rembourser les six milliards d’euros de prêts bonifiés consentis par l’État en mars 2009.
« C’est une bonne nouvelle qui semble attester de la santé revigorée de la trésorerie des deux constructeurs », me direz-vous. À y regarder de plus près, les annonces des deux constructeurs et leur relative confidentialité soulèvent des interrogations.
Je commencerai par des questions à caractère financier : où en est exactement le remboursement de ce prêt ? À quel taux a-t-il finalement été consenti ? Quand connaîtrons-nous le gain financier, s’il existe, de cette opération ?
Ensuite, monsieur le secrétaire d'État, vous me permettrez de poser la question qui fâche : qu’allez-vous faire de cet argent ?
Une majeure partie aurait été préemptée par le Grand Paris, mais la filière automobile attend quelques dividendes, car, vous le savez, certaines PME, aujourd'hui exsangues, ont besoin de liquidités ou d’accès au crédit. Et le budget de l’État crie famine…
Nous avons besoin d’éclaircissements sur ces questions. En effet, ce n’est pas tous les jours que l’État voit revenir dans son escarcelle 6 milliards d’euros !
Par ailleurs, je vous poserai une question à portée industrielle.
Le remboursement anticipé met fin de facto au pacte automobile, puisque les contreparties étaient adossées à la durée du prêt. Aujourd’hui, qu’en est-il des engagements réels et chiffrés des constructeurs sur le maintien des sites de production en France…
Mme Nathalie Goulet. Très bonne question !
M. Martial Bourquin. … et sur les investissements en faveur de l’environnement ?
Surtout, quid de la mise en œuvre du code de performance et de bonnes pratiques avec les équipementiers et les sous-traitants ?
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Martial Bourquin. Faute de prises de parole publiques sur la question, seuls les faits parlent !
Or, quelques jours après l’annonce de cette sortie anticipée du pacte automobile, la production des sièges avant de la Zoé électrique a été confiée à un équipementier turc, au détriment de l’équipementier français Trèves, donc au détriment aussi du bilan carbone !
Dans le même temps, M. Carlos Ghosn déclarait dans le Financial Times que Renault n’était plus une entreprise française !
Dans ce contexte, n’avez-vous pas l’impression, monsieur le secrétaire d'État, que « le label France » et « l’exemplarité du secteur automobile », prônés par le ministre de l’industrie, sont démentis dans les faits et presque tués dans l’œuf ?
Mme Nathalie Goulet. Très bien ! Il s’agit d’une très bonne question !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le sénateur, Christian Estrosi reçoit en ce moment même les différents acteurs de la filière automobile en présence de René Ricol, commissaire général à l’investissement, pour un échange sur les priorités à définir en matière d’investissements d’avenir, dans le cadre des 750 millions d’euros dédiés aux véhicules du futur. Il m’a donc demandé de vous apporter la réponse suivante.
Depuis la mise en place, en février 2009, du pacte automobile par le Président de la République, la situation de la filière automobile s’est, reconnaissons-le, grandement améliorée, notamment grâce à la mise en œuvre de la prime à la casse. Le marché automobile a ainsi progressé de près de 11 % en 2009 par rapport à 2008 et a augmenté de 5,4 % durant le premier semestre de 2010 par rapport au premier semestre de 2009. Cette performance est d’autant plus importante que l’année 2009 a, elle-même, été une année record.
Contrairement aux craintes exprimées par certains il y a quelques mois, ce bilan montre que nous avons eu raison de ne pas mettre brutalement fin à la prime à la casse, comme ont pu le faire d’autres pays comme l’Allemagne, dont le marché souffre énormément en ce moment.
La production automobile sur notre territoire a pleinement bénéficié de ces mesures : pour les quatre premiers mois de cette année, elle est en progression de près de 40 % par rapport à la même période de 2009. Ces chiffres sont donc très satisfaisants.
C’est dans ce cadre que les deux producteurs automobiles ont fait savoir – on peut le comprendre ! – qu’ils envisageaient de rembourser par anticipation une partie des prêts accordés par l’État en mars 2009, au plus fort de la crise automobile.
Christian Estrosi a eu l’occasion d’indiquer que le Gouvernement était d’accord sur le principe d’un remboursement partiel par anticipation et que les discussions étaient ouvertes afin d’en préciser les modalités, si une telle demande était officiellement formulée.
En tout état de cause, pour répondre aux craintes légitimes que vous avez exprimées, je puis vous assurer que les engagements que PSA et Renault ont pris dans le cadre de ces prêts ne seront en aucun cas remis en cause. Nous y serons particulièrement attentifs, s’agissant notamment de l’amélioration des relations entre donneurs d’ordres et sous-traitants.
Des efforts ont déjà été réalisés avec la conclusion d’un code de performance et de bonnes pratiques et la mise en place de la plateforme de la filière automobile. Ces efforts doivent être poursuivis et amplifiés. Si tel n’était pas le cas, les entreprises pourront faire appel au médiateur de la sous-traitance qui vient d’être nommé en la personne de Jean-Claude Volot.
En effet, l’amélioration du contexte ne doit pas faire oublier les difficultés que rencontrent certaines entreprises, notamment dans le tissu des sous-traitants. L’exemple d’EAK est là pour nous le rappeler.
Je puis vous assurer, monsieur le sénateur, que la mobilisation du Gouvernement en faveur de la filière automobile ne se démentira pas.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Je tiens à vous remercier, monsieur le secrétaire d’État, de vos réponses. Mais, entre les paroles de Christian Estrosi et les actes …
En effet, cet élan constaté dans les ventes d’automobiles pose un vrai problème s’il ne profite pas à nos territoires et aggrave le déficit du commerce extérieur.
Dans un tout autre domaine, mais dans le même esprit, je citerai un exemple tout récent. J’apprends en effet que La Poste, entreprise 100 % publique, vient d’acheter 3 000 scooters taïwanais, et non pas des scooters produits par le groupe PSA.
Vous rendez-vous compte, monsieur le secrétaire d’État, que l’entreprise Peugeot Motocycles va se trouver au bord du gouffre à cause de cette commande publique qui ne s’est pas concrétisée, pour quelques dizaines d’euros !
Nous devons nous préoccuper de nos territoires et de nos PME, surtout des équipementiers, qui connaissent de très graves difficultés. Sait-on assez que, quand on achète aujourd'hui une Clio, la probabilité est forte qu’elle ait été fabriquée à l’étranger ?
Voilà dix ou quinze ans, lorsque l’industrie automobile connaissait un regain d’activité, cela avait des répercussions sur l’ensemble de l’emploi. Aujourd'hui, même lorsque les grands constructeurs français gagnent en volume, cela ne profite pas toujours à l’emploi.
Je sais bien qu’il existe une différence entre PSA et Renault, mais je constate que la politique pratiquée par l’entreprise Renault, dont l’État détient une partie du capital, est aujourd’hui complètement aberrante. Ce constructeur ne se conduit pas comme une grande entreprise nationale ! Pis encore, son propre PDG déclare que Renault n’est plus une entreprise française ! Voilà qui est d’une gravité sans nom, même si ledit PDG a tenté de se reprendre ensuite dans la presse étrangère.
Monsieur le secrétaire d'État, la construction automobile est l’un des fleurons de l’industrie française, et de tels agissements ont des répercussions dans nos territoires, car ce sont des milliers de personnes qui se retrouvent au chômage. C’est ce qui nous préoccupe aujourd’hui !
délocalisation de l'entreprise produits céramiques de touraine
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, auteur de la question n° 942, adressée à M. le ministre chargé de l'industrie.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le secrétaire d'État, de graves menaces pèsent sur l’entreprise Produits Céramiques de Touraine située à Selles-sur-Cher et que vous connaissez. (M. Hervé Novelli, secrétaire d'État, acquiesce.) Je souhaitais donc attirer l’attention du ministre chargé de l’industrie sur la situation.
Le sud du département du Loir-et-Cher a beaucoup souffert, ces dernières années, de nombreuses fermetures de sites industriels. Je rappelle pour mémoire la fermeture de l’usine de Matra, à Romorantin et, concernant l’industrie de l’armement, celle d’un site de GIAT-Industries, à Salbris.
L’activité de production de céramiques est implantée depuis plus d’un siècle dans le Loir-et-Cher, en raison notamment de la présence de zones argileuses. Chacun ici connaît les céramiques de Selles, très utilisées pour les équipements sanitaires.
C’est à Selles-sur-Cher que, en 1919, PCT a vu le jour, initialement une entreprise familiale, respectueuse de ses salariés. Mais, depuis l’an 2000, c’est le groupe finlandais Sanitec qui en a repris les rênes, avec, pour conséquence, la perte de près de 200 emplois en dix ans, et le transfert progressif d’une partie du matériel de production à l’étranger.
Aujourd’hui, l’entreprise est confrontée à une délocalisation totale, avec un transfert de la production en Italie et en Pologne et, par conséquent, le licenciement des 118 salariés restants.
Pourtant, selon les représentants des salariés, les carnets de commandes sont pleins et les budgets équilibrés.
De plus, les salariés et leurs représentants sont traités de façon désinvolte et irrespectueuse : on propose le reclassement en Pologne ou en Italie, et pour des salaires absolument dérisoires ; on transmet tardivement aux représentants des documents, et en anglais...
Ayant notamment participé, en avril dernier, à une réunion organisée par la mairie de Selles-sur-Cher, qui soutient ces salariés, ainsi que la direction locale, je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'État, ce que vous pouvez faire, ce que vous comptez faire pour empêcher cette délocalisation et obtenir le maintien de ces 118 emplois directs et des dizaines d’emplois qui seraient indirectement touchés si le site fermait.
Je sais que l’État ne peut pas tout faire, mais cet exemple est emblématique. Une telle situation mériterait que l’État se penche un peu plus sur cette question des délocalisations.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser Christian Estrosi, qui ne peut être présent ce matin pour les raisons que j’ai exposées précédemment et qui m’a chargé de vous répondre.
Votre question est fort légitime, et la situation que vous décrivez est effectivement très préoccupante.
Je puis vous assurer que le Gouvernement agit quotidiennement pour répondre aux inquiétudes des salariés menacés par les délocalisations. Le devenir de ces salariés doit être abordé de façon républicaine, au-delà des clivages partisans, ce qui est le cas dans le Loir-et-Cher. Je pense en particulier à la mobilisation, à vos côtés, de Maurice Leroy, président du conseil général, et de Patrice Martin-Lalande, député de la circonscription.
La situation de l’entreprise Produits Céramiques de Touraine et celle de ses 118 salariés méritent toute notre attention.
Nous nous sommes pleinement mobilisés sur ce dossier. Le cabinet de Christian Estrosi a rencontré, le 3 juin dernier, une délégation des salariés ainsi que le maire de Selles-sur-Cher, M. Joël Graslin, à la sous-préfecture de Blois. Une nouvelle rencontre sera organisée après le 13 juillet prochain, car nous connaîtrons alors la décision du tribunal de grande instance quant au motif économique des licenciements.
En attendant cette décision, et afin de permettre au territoire de rebondir le plus rapidement possible, l’entreprise PCT a été assujettie, le 5 mai dernier, à l’obligation de revitalisation. Les services locaux de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, la DIRECCTE, suivent de très près les discussions menées actuellement, dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi, entre les représentants des salariés et l’entreprise.
Si la situation du bassin d’emploi le justifie, une demande d’attribution du Fonds national de revitalisation des territoires pourrait être examinée.
Ce dispositif est un outil extrêmement précieux contre les délocalisations, et le Gouvernement l’a mis au point pour inciter les entreprises à investir et à s’implanter dans nos territoires.
Je pense également à la suppression de la taxe professionnelle, qui s’est traduite par le reversement de 2 milliards d’euros à l’industrie, et au crédit d’impôt recherche, dont plus de 80 % des bénéficiaires sont des PME et des ETI, ou entreprises de taille intermédiaire.
La mise en œuvre des états généraux de l’industrie nous permettra d’aller plus loin avec, en particulier, le dispositif de soutien à la réindustrialisation doté de 200 millions d’euros pour les PME, les PMI et les ETI qui réinvestissent en France et créent des emplois.
Ce nouveau dispositif aura pour objectif d’accompagner les projets d’investissements productifs à fort potentiel de création d’activité et d’emploi via une avance remboursable, dans le respect des règles communautaires. Il s’adresse principalement aux entreprises industrielles de moins de 5 000 personnes ou appartenant à un groupe de moins de 5 000 personnes ayant un projet d’investissement en France et qui s’engageront à créer des emplois.
Madame le sénateur, vous avez à juste raison mentionné la nécessaire lutte contre les délocalisations, et je partage votre avis sur ce point. Mais, lutter contre les délocalisations, c’est aussi lutter contre les propositions de reclassement indécentes qui sont faites aux salariés.
Le Gouvernement a ainsi soutenu la proposition de loi du groupe Nouveau Centre, adoptée par le Parlement, qui interdit les propositions de reclassement à l’étranger pour des salaires indécents. Vous vous souvenez de cette proposition de loi, qui a mis fin à un dispositif adopté voilà quelques années, sous un gouvernement d’une autre couleur politique.
C’était l’une des réponses à apporter, nous l’avons fait.
Tels sont, madame le sénateur, les éléments que je souhaitais vous indiquer. Ne doutez pas de la détermination du Gouvernement. Plus particulièrement concerné par le territoire sur lequel l’entreprise PCT est implantée, je veillerai à ce que la situation ne s’aggrave pas.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault.
Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Tout ce qui concerne la Touraine, bien entendu, vous touche de près, même s’il s’agit, comme ici, de la Touraine de Loir-et-Cher. (Sourires.)
Je voulais simplement redire la grande inquiétude de tous les élus et, surtout, de tous les salariés de cette entreprise. Comme vous l’avez vous-même souligné, il faut vraiment se battre pour maintenir cette production.
C’est d’autant plus vrai qu’il est un autre aspect de la question que je n’ai pas abordé tout à l’heure : comme bien souvent, ceux qui ont fondé le site de Selles-sur-Cher n’ont pas pris la précaution de lier l’appellation au territoire, si bien que cette production pourrait, effectivement, se faire ailleurs tout en gardant son nom. C’est là un inconvénient supplémentaire.
Monsieur le secrétaire d’État, je vais bien sûr saisir la mission commune d'information sur la désindustrialisation des territoires, qui a été créée au Sénat, de façon que ce sujet soit pris à bras-le-corps par l’ensemble des élus. En outre, je vous remercie de me faire savoir quand M. Estrosi recevra les représentants de l’entreprise.
position de la france au regard de la représentation en france de la prétendue « république du haut-karabagh »
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 956, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et européennes.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, je sais que M. Lellouche n’est pas là ce matin pour me répondre, et j’ai la prétention de vous faire voyager loin du Loir-et-Cher, puisque je vous emmène maintenant dans le Caucase…
Le Caucase, c’est loin, mais l’Azerbaïdjan et l’Arménie, que, monsieur le président, vous aimez tant, sont des pays amis de la France.
M. le président. C’est vrai !
Mme Nathalie Goulet. Oui, vous nous avez emmenés sur des chemins malaisés et sablonneux, mais enfin !…
Ce sont donc des pays amis de la France, et ils sont en guerre.
La France copréside le groupe de Minsk, mais le conflit perdure.
Rappelons la situation. Depuis 1991, l’Arménie occupe différents territoires azerbaïdjanais, le Haut-Karabagh et ses pourtours : Zanguelan, Goradiz, Agdam, et le Conseil de sécurité a adopté plusieurs résolutions dénonçant cet état de fait.
Le Haut-Karabagh est un territoire azerbaïdjanais occupé. Le Conseil de sécurité et l’assemblée générale des Nations unies l’ont répété à différentes reprises et exigent « le retrait immédiat, complet et inconditionnel de toutes les forces arméniennes des territoires occupés de la République d’Azerbaïdjan » ; considèrent qu’il faut « assurer aux communautés arménienne et azerbaïdjanaise de la région du Haut-Karabakh » des conditions de vie normale, nous sommes tous d’accord ; réaffirment enfin, et c’est important, « qu’aucun État ne doit reconnaître comme licite la situation créée par l’occupation de territoires de la République d’Azerbaïdjan ni prêter aide ou assistance pour perpétuer la situation ainsi créée ».
Or, le 23 mai dernier, à l’invitation du président de la République fantôme du Haut-Karabagh, des parlementaires français se sont rendus dans cette République qui n’existe pas.
Cette République, qui n’a aucune existence légale, a pourtant une ambassade en France, un ambassadeur, un gouvernement… Tout cela est très intéressant ! Simplement, comme l’a réaffirmé Pierre Lellouche ici même, le 4 mai dernier, ainsi que le Conseil de sécurité et l’assemblée générale des Nations unies, ces territoires sont occupés.
Ma question est donc la suivante : quelles sont les conditions de l’installation en France de cette « ambassade » ? Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour que la France ne s’exprime que d’une seule voix dans ce conflit extrêmement délicat ?
Les Azerbaïdjanais ne sont pas des Turcs et n’ont rien à voir avec le génocide arménien, sur lequel, monsieur le président, nous nous sommes tous exprimés.
La France copréside le groupe de Minsk, ce qui emporte pour elle l’obligation d’avoir un comportement exemplaire dans un conflit complexe ayant pour cadre une région qui est extrêmement prompte à s’enflammer.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Madame le sénateur, vous avez raison, les presses arménienne et azerbaïdjanaise se sont fait l’écho d’un déplacement au Haut-Karabakh de parlementaires français à l’invitation des soi-disant autorités de ce territoire. Vous l’avez parfaitement indiqué, tout cela n’a pas beaucoup de sens.
Cette visite, du reste, n’a pas manqué de susciter, comme c’était normal, des réactions négatives en Azerbaïdjan à l’occasion de votre récent déplacement dans ce pays, salué par la presse locale et sans doute aussi internationale.
La décision prise par vos collègues de l’Assemblée nationale de se rendre dans ce territoire n’engage qu’eux-mêmes. La position de la France à cet égard est sans ambiguïté : la France, pas plus qu’aucun autre État, pas même l’Arménie, ne reconnaît l’indépendance du Haut-Karabakh. La France soutient la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Azerbaïdjan dans ses frontières internationalement reconnues. Cette position a, du reste, été régulièrement rappelée par le Gouvernement à la représentation nationale.
Fidèle à cette position de principe, la France, comme c’est naturel, n’entretient aucune relation avec les autorités de facto du Haut-Karabakh. Cette entité autoproclamée ne dispose d’aucune représentation accréditée auprès du Gouvernement français. Seul le coprésident français du groupe de Minsk, dans le cadre de son mandat partagé avec ses homologues américain et russe, groupe reconnu par les autorités de l’Azerbaïdjan, est autorisé à se rendre au Haut-Karabakh et à y rencontrer les autorités de facto.
Telle est, madame le sénateur, la position sans ambiguïté du Gouvernement à cet égard.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Le Président de la République nous a indiqué qu’il ferait un déplacement en Azerbaïdjan, et on l’attend. Ce conflit n’a que trop duré.
Notre assemblée, sous l’égide du président Poncelet, avait organisé des réunions entre les présidents des parlements de ces pays en guerre ; je pense que ce travail devrait se poursuivre. Nous avons devant nous une grande marge d’amélioration et de progression dans la diplomatie parlementaire s’agissant de cette partie du Caucase, encore une fois, amie de la France.
Vous le savez, la diaspora arménienne est extrêmement puissante. À nous de savoir distinguer entre, d’une part, le génocide de 1915, sur lequel le Parlement aurait peut-être dû laisser les historiens s’exprimer, mais la loi est la loi, et je la respecte totalement ; d’autre part, ce conflit ouvert qui, aujourd’hui, est vraiment exacerbé. J’ai visité les camps de réfugiés azéris, rassemblés à quelques kilomètres de chez eux : ceux de Tulkarem ou de Gaza n’ont rien à leur envier !
La situation est vraiment extrêmement difficile, et je pense que nous avons un rôle positif à jouer, dans le sens de l’apaisement et de la négociation.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut aussi comprendre le désarroi des autorités azerbaïdjanaises, qui n’ont pas à leur service une diaspora puissante, agissante, efficace, servie, en plus, par des chanteurs mondialement connus…