M. Éric Woerth, ministre. Parallèlement, nous devrons poursuivre l’action de recentrage de l’assurance maladie sur les dépenses les plus utiles sur le plan médical.
Je suis convaincu qu’avec les réformes de structures fortes que nous avons engagées, car il ne s’agit pas d’un vœu pieux ni d’un propos de tribune, nous avons la capacité de diminuer l’ONDAM en dessous de 3 % pendant plusieurs années.
M. François Autain. C’est facile à dire !
M. Éric Woerth, ministre. Nous aborderons également, cher Xavier Darcos, la question des retraites grâce au « rendez-vous 2010 » annoncé par le Président de la République.
Nous devrons apporter aux Français la solution de long terme qu’ils attendent.
M. Guy Fischer. Cela va saigner !
M. Éric Woerth, ministre. L’ensemble des thèmes seront mis sur la table.
Ce sera un moment important pour l’avenir du système français de protection sociale, et nous aurons besoin de vos idées, mesdames, messieurs les sénateurs, ainsi que de votre soutien, dont je ne doute pas, pour mener à bien cette réforme en 2010.
La dégradation des comptes ne doit pas masquer les efforts que nous accomplissons pour tenir les dépenses et pour consolider les recettes de la sécurité sociale.
La politique que nous conduisons pose des acquis solides sur lesquels nous nous appuierons pour redresser la situation dans les années à venir, car cela prendra des années.
Après 2010, quand la situation économique, nous l’espérons tous, sera plus favorable, quand l’action des gouvernements permettra au monde de sortir de la crise que nous traversons et quand l’action du Gouvernement permettra à la France de sortir plus vite que les autres de cette crise, bref quand la situation sera rétablie, nous apporterons des solutions pérennes à la dette et aux déficits.
M. Jacky Le Menn. Lesquelles !
M. Guy Fischer. C’est évident !
M. Éric Woerth, ministre. Mais j’espère que nous nous entendrons sur l’essentiel.
Pour ma part, je suis convaincu que la voie que nous vous proposons est praticable.
C’est un chemin difficile. Il nous faudra une grande rigueur pour continuer à réformer et à préparer l’avenir. Il nous faudra également assumer les mauvais chiffres du présent, mais nous devrons garder à l’esprit que la priorité du moment est de sortir de la crise, je l’ai souligné à plusieurs reprises, et je souhaite que ce point soit acté.
Ce n’est qu’en sortant de la crise que nous résoudrons les problèmes de déficit ; ce n’est pas par des mesures ponctuelles qui la retarderaient et qui, au fond, accroîtraient durablement la dette.
M. Guy Fischer. Vous pratiquez la méthode Coué !
M. Éric Woerth, ministre. Pas du tout !
Soyons attentifs à ne pas inverser en 2010 les priorités. C’est en nous en tenant fermement à cette ligne de conduite que nous garantirons la pérennité de notre système de sécurité sociale, auquel le Gouvernement, le Parlement et les Français sont particulièrement attachés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le volet maladie du projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous vous présentons aujourd’hui s’inscrit dans un contexte particulier, marqué par trois éléments.
Le premier élément est, bien entendu, la crise économique.
La dégradation du déficit de la branche maladie est due, comme l’a excellemment montré Éric Woerth, à l’effet de la crise sur les recettes alors que les dépenses, elles, sont maîtrisées.
Depuis quelques années, la croissance des dépenses d’assurance maladie a ralenti pour s’établir aujourd’hui à un niveau plus soutenable : après 4 % en 2007, 3,5 % en 2008, nous arrivons à 3,4 % en 2009, taux très proche de 1’ONDAM voté puisque le dépassement sera cette année d’environ 300 millions d’euros. Voilà qui tranche singulièrement avec les années précédentes.
Ces bons résultats prouvent que les nouveaux outils de maîtrise des dépenses créés depuis 2007 portent leurs fruits et que nous devons continuer à les faire vivre.
Je pense, ici, aux référentiels médico-économiques de la Haute Autorité de santé, aux nouveaux cas de mise sous accord préalable, au dispositif de régulation des dépenses de médicaments onéreux à l’hôpital ou, encore, aux contrats d’amélioration des pratiques individuelles qui sont déjà plus de 11 500, ce qui est un véritable succès !
Cela étant, même si nous assumons la part conjoncturelle du déficit, qui joue un rôle d’amortisseur social, la crise nous invite à davantage d’ambition dans la détermination de l’ONDAM, dont le taux d’évolution globale sera proposé à un niveau un peu inférieur à celui de l’an dernier, soit 3 %, au lieu de 3,3 % pour 2009.
Ce taux de 3 %, compatible avec la croissance à long terme en valeur de l’économie, représente un effort important au regard de la récession de 2,25 % en 2009 et de la prévision de croissance pour 2010.
Le deuxième élément de contexte à bien garder à l’esprit est la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires qu’Éric Woerth vient d’évoquer.
Grâce à ce texte, nous disposerons au cours de l’année 2010 d’une organisation plus cohérente et d’une gouvernance plus performante de notre système de santé.
La modernisation du pilotage de l’hôpital permettra d’optimiser sa gestion.
M. Bernard Cazeau. On verra !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La création des agences régionales de santé, dont le financement est prévu à l’article 34 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, permettra de décloisonner les différents secteurs de l’offre de soins et de mieux articuler les moyens entre l’hôpital, l’ambulatoire et le médico-social.
Dans ce contexte, il était indispensable, d’une part, de prévoir une évolution équilibrée des dépenses d’assurance maladie consacrées aux soins de ville et à l’hôpital, avec un même taux de 2,8% – c’est un concept auquel je suis profondément attachée – et, d’autre part, d’assurer au fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins une dotation suffisante de 228 millions d’euros.
Le troisième élément de contexte est, bien sûr, le risque de pandémie grippale.
Nous avons fait le choix d’une politique de prévention grâce à une large campagne de vaccination gratuite, qui permettra d’éviter que de nombreuses personnes ne soient malades.
Cette campagne a un coût. Nous avons demandé à l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS, de commander 94 millions de vaccins, ce qui nous oblige à réviser à la hausse les dotations de l’État et de l’assurance maladie à cet établissement pour l’année 2009.
À cet égard, je salue le geste des complémentaires de santé, qui se sont engagées à apporter leur contribution à ce dispositif à hauteur d’environ 300 millions d’euros.
M. Guy Fischer. Le couteau sous la gorge !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Afin d’éviter toute ambiguïté sur la finalité de cette contribution, le Gouvernement déposera un amendement au projet de loi de finances pour 2010 afin de l’affecter à EPRUS plutôt qu’à l’assurance maladie.
En tout état de cause, en raison de leur caractère exceptionnel, de même que cette contribution sera exceptionnelle, les dépenses liées à la grippe ne seront pas comptabilisées dans l’appréciation du seuil de déclenchement d’alerte au-delà duquel, comme vous le savez, des mesures d’économies doivent être prises en cours d’année.
En outre, grâce à un amendement gouvernemental, le présent projet de loi tendra à préciser que les professionnels de santé réquisitionnés pour la vaccination seront pris en charge sur le fonds national d’assurance maladie, hors ONDAM.
Malgré la grippe, malgré la crise et l’ampleur de nos déficits publics et sociaux, nous ne devons pas dévier de notre objectif.
Nous souhaitons poursuivre la politique engagée depuis 2007 et continuer à relever le défi de tenir les dépenses sans dégrader la qualité des soins et en préservant le principe fondamental d’un taux de remboursement d’autant plus élevé que les pathologies sont graves, lourdes et coûteuses et que les thérapeutiques sont chères, prouvées et efficaces.
Concrètement, ainsi que les caisses nationales d’assurance maladie nous l’ont proposé au début du mois de juillet dernier, tous les acteurs du système de soins devront poursuivre les efforts engagés depuis trois ans.
Il s’agit de continuer à adapter le système d’assurance maladie en l’ajustant au plus près des progrès médicaux, des marges d’efficience et des évolutions sociales.
Permettez-moi de vous présenter les principales mesures de ce volet maladie, qui a été enrichi de plusieurs articles adoptés par voie d’amendements, le plus souvent d’origine parlementaire, à l’Assemblée nationale.
En ce qui concerne les soins de ville, nous exigerons un niveau plus ambitieux de maîtrise médicalisée, soit 595 millions d’euros au lieu de 525 millions d’euros.
L’effort devra porter sur les indemnités journalières, qui représentent près de 8 milliards d’euros et sont en progression de 7 % en 2009.
La diffusion de référentiels, l’amélioration de la procédure de mise sous entente préalable et la généralisation de la contre-visite de l’employeur devraient ralentir ces dépenses.
En ce qui concerne la question des affections de longue durée, les ALD, notre approche reste médicale, conformément aux avis et aux recommandations de la Haute Autorité de santé, notamment ceux de décembre 2007 et de juin 2009 : au-delà du renforcement de la prévention et de l’éducation thérapeutique, le plan « Cancer II » prévoit la possibilité, pour les personnes guéries du cancer, de sortir plus vite du statut d’ALD tout en continuant à bénéficier d’une prise en charge à 100 % pour les examens de suivi.
Notre objectif est bien de favoriser la réinsertion sociale de ces personnes.
En ce qui concerne les soins de ville, nous proposons également de poursuivre l’ajustement des tarifs et des prix.
La radiologie et la biologie présentent des marges importantes par rapport aux tarifs de la sécurité sociale, qui seront donc réduits d’un montant global de 240 millions d’euros.
Comme chaque année, des diminutions de prix seront opérées sur les médicaments, y compris sur les génériques, ainsi que sur les dispositifs médicaux.
Ces économies, s’ajoutant à celles résultant de la générication du Plavix, devraient limiter l’évolution des remboursements à 2,2 %, qui sera sécurisée par un abaissement du taux K à 1 %, justifié par le ralentissement économique et l’absence de nouveaux médicaments innovants et onéreux.
Afin de favoriser l’essor des génériques, l’Assemblée nationale a, en outre, adopté deux amendements sur lesquels nous reviendrons lors de la discussion : l’un vise à inciter les médecins à prescrire dans le répertoire des génériques ; l’autre vise à permettre aux fabricants de génériques de reprendre la couleur, la saveur ou la présentation d’un princeps, même si ce dernier est déposé sous forme de marque ou de dessin, ce qui n’était pas possible jusqu’ici.
Enfin, en reprenant, tout en la modifiant, la proposition de la Mutualité sociale agricole sur les médicaments à 35 %, nous prévoyons de passer à 15 % les médicaments à service médical rendu faible dans toutes leurs indications, ainsi que les médicaments restés à 35 % alors que le service médical qu’ils rendaient a été jugé insuffisant. Les personnes exonérées du ticket modérateur, par exemple en ALD, ne seraient évidemment pas concernées par cette mesure, qui devrait permettre de réaliser 145 millions d’euros d’économies.
Le taux de remboursement ne dépendra toujours que d’un seul critère, exclusivement médical, l’efficacité du médicament. Nous aurons désormais quatre taux de remboursement : 100 % pour les médicaments irremplaçables et très coûteux, 65 % lorsque le service médical rendu est important – c’est le cas des analgésiques tels que l’aspirine ou le paracétamol –, 35 % lorsqu’il est modéré et 15 % lorsqu’il est faible. Je rappelle que, chaque année, des médicaments présentant un intérêt thérapeutique très élevé sont admis au remboursement, pour un montant global d’environ un milliard d’euros. Je pense, par exemple, à Varnoline, pilule de troisième génération remboursée à 65 % – enfin ! – ou à Revlimid, médicament très onéreux qui permet de soigner une maladie grave, le myélome multiple.
Comme je l’ai dit au début de mon intervention, le taux de progression de l’ONDAM sera également de 2,8 % pour les établissements de santé. Ce taux permettra de continuer à assurer le développement d’une offre hospitalière de soins adaptée aux besoins de la population. Il permettra de financer les plans de santé publique, qui représentent un apport essentiel sur des enjeux aussi importants que la lutte contre le cancer et la maladie d’Alzheimer, les soins palliatifs ou les soins aux détenus.
Ce taux de 2,8 % permettra aussi d’augmenter la dotation de l’assurance maladie au Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés, le FMESPP, et de financer la deuxième tranche du plan Hôpital 2012, dont l’objectif est de soutenir les projets d’investissement répondant à des critères d’efficience. Tout en favorisant les recompositions de l’offre et le développement des systèmes d’information, ce plan participe plus largement à la relance de notre économie, par son effet de levier sur de nombreux secteurs d’activité.
Ce taux de 2,8 % permettra, enfin, de financer la première étape d’un processus de revalorisation salariale des professions paramédicales qui se prolongera dans les années à venir. Les quotas des internes en médecine continueront également d’augmenter pour former les professionnels médicaux de demain.
Mais ce taux exigera aussi de poursuivre les efforts d’amélioration de la performance des établissements de santé.
Tout d’abord, si nous avons décidé, afin de prendre le temps des études préalables nécessaires, de repousser de 2012 à 2018 la date d’achèvement de la convergence intersectorielle entre les tarifs du secteur public et ceux du secteur privé, nous prévoyons aussi d’expérimenter une nouvelle approche de la convergence, ciblée sur certains séjours se prêtant à un rapprochement plus rapide des tarifs, notamment en chirurgie ambulatoire.
Ensuite, afin d’améliorer en profondeur et durablement la performance du secteur hospitalier, cinquante établissements mettront en œuvre des projets de transformation hospitalière qui, coordonnés par la nouvelle Agence nationale pour la performance hospitalière, porteront sur leurs modalités d’organisation et de fonctionnement. Des retours d’expérience seront systématiquement organisés pour permettre une diffusion des résultats au-delà des établissements pilotes.
Enfin, dans l’objectif de ralentir la progression particulièrement forte des dépenses de transport sanitaire – nous connaissons tous des exemples d’abus ou de mésusage ! –, nous proposerons un nouveau mécanisme de régulation, qui incitera les établissements de santé à réfléchir à une meilleure organisation de la prescription de transports sanitaires. Ce type de mécanisme, qui prend la forme d’une contractualisation entre l’établissement, l’agence régionale de santé et l’assurance maladie, a été adopté avec succès l’an dernier pour la liste des médicaments particulièrement coûteux à l’hôpital. Son efficacité a donc été démontrée. Un mécanisme analogue pour les médicaments consommés en ville mais prescrits à l’hôpital a, en outre, été adopté par amendement à l’Assemblée nationale, ce qui répondra, me semble-t-il, aux préoccupations exprimées par certains d’entre vous lors de mon audition en octobre dernier.
Par ailleurs, dans un souci d’ajustement des tarifs, le forfait journalier hospitalier, créé en 1983 pour participer aux frais d’hébergement à l’hôpital, et n’ayant pas augmenté depuis trois ans, passera de 16 euros à 18 euros en médecine, chirurgie et obstétrique et soins de suite et de réadaptation, et de 12 euros à 13,5 euros en psychiatrie.
M. Guy Fischer. Une hausse de 12,5 % ! C’est du jamais vu !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les patients les plus modestes, bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire, la CMUC, ou de l’aide médicale d’État, l’AME, ainsi que les femmes enceintes et les victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, sont exonérés de ce forfait journalier hospitalier qui, pour les autres patients, peut être pris en charge par les assurances complémentaires santé. Représentant une économie d’environ 160 millions d’euros, cette mesure ne modifiera donc guère le niveau du reste à charge des ménages à l’hôpital : à 3 %, il reste le plus bas du monde !
M. François Autain. C’est déjà beaucoup !
M. Guy Fischer. Pendant ce temps, on laisse le capital tranquille !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Enfin, en tant que ministre des sports, mais aussi de la santé, soucieuse de supprimer toutes les niches sociales n’ayant pas démontré leur efficacité, je tiens à rappeler que c’est avec mon plein soutien que l’Assemblée nationale a, par amendement, avancé au 1er janvier 2010, la fin du droit à l’image collective des sportifs.
Cela dit, et nous y reviendrons au cours de la discussion, je ne suis pas hostile à ce que cette date soit repoussée, monsieur le rapporteur général, au 1er juillet 2010, afin de tenir compte du calendrier budgétaire des clubs sportifs.
M. Guy Fischer. Encore un recul !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous le voyez, dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 – projet qui, fait exceptionnel, a reçu l’avis favorable de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, l’UNCAM ! –, je ne vous annonce ni de grands plans, ni de grands soirs, simplement la continuité, contre vents et marées, de notre politique, qui s’apparente à un marathon.
L’année 2009 aura été une année de quasi-respect de l’ONDAM, avec le meilleur résultat de maîtrise des dépenses depuis 1999. Je m’engage à tout mettre en œuvre pour que, l’an prochain, nous puissions également constater le respect de l’ONDAM que nous vous proposons aujourd’hui.
Ce n’est qu’en avançant ainsi, régulièrement, que nous parviendrons à contenir à la source les dépenses, à réduire les déficits, sans remettre en cause les bases de notre système de santé et d’assurance maladie fondé sur la solidarité. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. Guy Fischer. C’est faux ! Les assurés paieront plus !
M. le président. La parole est à M. Xavier Darcos, ministre.
M. Xavier Darcos, ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 que nous avons l’honneur de vous présenter a fait l’objet d’une discussion assez longue, mais constructive, devant l’Assemblée nationale.
Je ne doute pas que nos débats devant la Haute Assemblée permettront de l’enrichir encore, et je veux d’ores et déjà saluer le travail réalisé par la commission des finances et la commission des affaires sociales, par leurs présidents respectifs, Jean Arthuis et Muguette Dini, par vos rapporteurs, Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales, Sylvie Desmarescaux, rapporteur pour le secteur médico-social, Gérard Dériot, rapporteur pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles, André Lardeux, rapporteur pour la branche famille, Dominique Leclerc, rapporteur pour l’assurance vieillesse, ainsi que Jean-Jacques Jégou, rapporteur pour avis de la commission des finances.
Je tiens à signaler que ma collègue Nora Berra, qui devait intervenir dans la discussion générale, a dû rejoindre le Conseil des ministres. J’évoquerai donc à sa place les sujets qui la concernent.
Mme Annie David. La secrétaire d’État assiste au conseil des ministres et on nous empêche de participer à la réunion de notre groupe !
M. Xavier Darcos, ministre. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale a deux ambitions. Il vise d’abord à renforcer notre dispositif de protection sociale : comme le Président de la République l’a clairement dit devant le Congrès à Versailles, il s’agit d’un des amortisseurs les plus fiables face à la crise exceptionnelle que nous traversons. Au-delà de ce contexte, les mesures que nous proposons pour les différentes branches répondent aux attentes prioritaires des Français en termes de solidarité et de justice sociale : la prise en charge de la dépendance des personnes âgées et des personnes handicapées, le maintien des atouts de notre politique familiale, l’équité en matière de retraites et la prévention des risques professionnels.
Mais la solidarité doit aller de pair avec le maintien de notre détermination à agir pour garantir la pérennité de notre modèle social. C’est pourquoi ce projet de loi de financement de la sécurité sociale maintient le cap des réformes que nous avons engagées, sous l’autorité du Président de la République et du Premier ministre, pour revaloriser le travail, répondre aux besoins sociaux de demain et assurer la pérennité de notre système de protection sociale à long terme, compte tenu du vieillissement de la population et de la diminution de nos recettes fiscales.
Avant d’entamer avec vous cette discussion générale, je voudrais donc prolonger le propos d’Éric Woerth et de Roselyne Bachelot-Narquin, en vous présentant les différentes mesures de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale qui traduisent les priorités du ministère dont j’ai la charge.
En ce qui concerne la branche retraites, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2010 consolide nos mécanismes de solidarité et poursuit l’action que mène le Gouvernement pour revaloriser le travail.
Tout d’abord, nous avons voulu agir pour sauvegarder le dispositif de majoration de durée d’assurance des mères de famille. Le Gouvernement est très attaché à cet élément fondamental de notre politique familiale. Je tiens d’ailleurs à remercier Michèle André, présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, et Jacqueline Panis, rapporteur de cette délégation, de leur contribution sur ce sujet.
Comme vous le savez, l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 19 février dernier nous avait placés face à nos responsabilités. Que serait-il advenu si nous avions refusé de faire évoluer le dispositif ? Nous n’aurions pas seulement dû nous résoudre à la disparition du principe même d’une compensation attribuée aux mères de famille, mais nous aurions aussi fait peser sur les générations futures une charge financière inenvisageable.
J’ai donc mené des consultations avec les partenaires sociaux et, grâce à un consensus, j’ai pu faire évoluer ce dispositif de majoration selon les principes suivants : la durée globale de majoration de durée d’assurance est maintenue à deux ans ; cette majoration comprendra deux parts de quatre trimestres chacune, la première au titre de la grossesse et de la maternité – la mère de famille en bénéficiant systématiquement –, et la seconde, au titre de l’éducation de l’enfant. Pour les enfants qui sont déjà nés, cette seconde part bénéficiera systématiquement à la mère, sauf si le père démontre explicitement, avant la fin de l’année 2010, qu’il a élevé seul son enfant, ce qui devrait être assez rare. Pour les enfants nés après le vote de la loi, cette deuxième part sera accordée, dans le silence du couple, à la mère, mais pourra éventuellement faire l’objet d’une répartition au sein du couple en cas d’accord entre les parents. Nous avons également affirmé le principe d’une majoration d’une durée globale de deux ans en cas d’adoption, alors que celle-ci n’est pas toujours acquise aujourd’hui.
S’agissant de l’articulation de la majoration de durée d’assurance avec le dispositif destiné aux « carrières longues », l’Assemblée nationale a adopté les amendements présentés par Denis Jacquat, qui établissent, me semble-t-il, un bon équilibre. Elle a en outre adopté un amendement qui prévoit, en cas de décès de l’un des deux parents, que le parent survivant se voit attribuer les trimestres de majoration de durée d’assurance dont aurait bénéficié le parent décédé. Cette mesure d’équité et de bon sens enrichit le texte du Gouvernement.
Parce que nous voulons valoriser le travail, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale poursuit par ailleurs la mobilisation en faveur de l’emploi des seniors. Vous le savez, les mesures que le Parlement a adoptées l’an dernier ont permis de franchir une étape décisive afin que les seniors ne soient plus discriminés, sous un prétexte ou sous un autre, et que cesse ce formidable gâchis de compétences et d’expériences.
Poursuivant cette politique volontariste, nous instaurons cette année une mesure nouvelle en faveur des invalides dits « de première catégorie », c’est-à-dire ceux que leur niveau d’incapacité n’empêche pas de poursuivre une activité professionnelle. Jusqu’à présent, en raison de l’interruption du versement de la pension d’invalidité à 60 ans, ces derniers étaient contraints de cesser leur activité professionnelle aussi dès l’âge de 60 ans. Il fallait remédier à cette situation : nous le faisons en permettant désormais à ceux qui le souhaitent de percevoir leur pension d’invalidité jusqu’à 65 ans.
M. Guy Fischer. Quant aux bien-portants, ils pourront travailler jusqu’à 70 ans !
M. Xavier Darcos, ministre. En outre, l’Assemblée nationale a adopté un amendement qui permettra de financer les régimes d’avantage social vieillesse, ou ASV, par une cotisation proportionnelle aux revenus plutôt que par une cotisation forfaitaire, afin de supprimer les freins au cumul emploi-retraite pour les professions concernées, notamment les médecins libéraux. Cette mesure constitue, comme vous le savez, une évolution tout à fait souhaitable, compte tenu des problèmes de démographie médicale que nous connaissons sur certaines parties de notre territoire, en particulier dans les départements ruraux.
Par ailleurs, afin d’améliorer l’équité entre retraités, nous avons décidé de doubler les prélèvements sur les « retraites chapeaux », dans un esprit de normalisation et de moralisation de ce dispositif. Cette mesure d’équité est destinée à rétablir l’égalité entre les différents régimes de retraite supplémentaire. Les évolutions apportées par l’Assemblée nationale, sur l’initiative du rapporteur Yves Bur, ont permis d’aller plus loin : désormais, ces régimes devront, comme les autres régimes de retraite supplémentaire, être gérés par des organismes extérieurs aux entreprises. Cette obligation contribuera à améliorer la transparence de ces régimes.
J’en viens maintenant au deuxième grand volet du PLFSS, dans le cadre de mon action ministérielle : la branche accidents du travail-maladies professionnelles, ou AT-MP. Le PLFSS renforce l’incitation des entreprises à améliorer la prévention des risques professionnels.
La prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles est une nécessité si nous voulons que, dans notre société, le progrès économique ne s’oppose pas au progrès social. J’y vois même la condition de la réhabilitation de la valeur travail, souhaitée par le Président de la République, car une société qui veut travailler plus est une société qui doit travailler mieux.