M. Guy Fischer. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Autain, je veux vous rassurer. Je rappellerai – peut-être est-ce un peu cruel de ma part… – que c’est la gauche qui a ouvert, et ce de façon illimitée, le capital des laboratoires d’analyses à des non-biologistes. Nous avons par la suite limité cette ouverture à 25 % du capital. Heureusement que nous sommes là pour réparer un certain nombre de vos erreurs ! (M. Gérard Dériot applaudit. – M. François Autain rit.) À l’époque, vous n’étiez pas les défenseurs de la biologie médicale. Nous allons donc conserver cette limitation.
C’est d’ailleurs grâce aux arguments que j’ai présentés devant les instances européennes que j’ai réussi à repousser la libéralisation du capital des officines de pharmacie. (M. Gérard Dériot acquiesce.)
Les défenseurs de la détention du capital par les professionnels siègent du côté droit de l’hémicycle. Si des doutes peuvent parfois exister, tel n’est pas le cas sur ce point !
Je reviendrai maintenant sur les systèmes de qualité, en raison d’une certaine confusion dans votre propos, monsieur Autain. Vous évoquez la Haute Autorité de santé à tout moment, même s’agissant de domaines dans lesquels elle n’intervient absolument pas !
Les systèmes de qualité actuellement obligatoires pour les laboratoires publics et privés de biologie médicale figurent dans le guide de bonne exécution des analyses, le GBEA. Ce guide, novateur voilà quinze ans, l’est nettement moins maintenant. Il ne garantit absolument pas une qualité suffisante et ne prévoit pas de modalités de surveillance externes autres que l’inspection. Il est déclaratif. De plus, un laboratoire est inspecté tous les quinze à quarante ans. Le GBEA ne peut plus constituer un système de preuve de la qualité.
Le contrôle national de qualité effectué par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, consiste, pour les laboratoires, en un envoi d’échantillons biologiques pour dosage. Également novateur en son temps, il est utile mais insuffisant en termes de contrôle externe de la qualité.
Les autres systèmes de suivi de la qualité – la certification, les systèmes d’assurance qualité – sont vérifiés par des organismes certificateurs, mais les parties techniques ne sont pas contrôlées. L’actuelle certification n’est pas reconnue internationalement et ne permet pas un monitoring permanent de la qualité prouvée.
Par ailleurs, l’association de professionnels Bio Qualité, créée en 2002, prépare à l’accréditation. Cette démarche intéressante apporte un soutien méthodologique à cette dernière.
Le système, sans doute intéressant voilà une vingtaine d’années, n’est plus aujourd’hui suffisant. D’ailleurs, la mission menée par Michel Ballereau l’a bien démontré. Nous vous proposons donc un système qui tend à placer au premier plan la qualité de la biologie médicale, avec un maillage territorial de qualité.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 763, présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le troisième alinéa (2°) de cet article :
2° De manière à garantir et à améliorer la qualité des examens de biologie médicale, mettre en place obligatoirement un système d'assurance qualité librement choisi et sous le contrôle de la Haute Autorité de santé ;
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. La biologie médicale française est depuis toujours à la pointe de la qualité. Les biologistes ont mis au point le contrôle de qualité des analyses dans les années soixante-dix. Le guide de bonne exécution des analyses existe depuis 1994. La profession a volontairement mis en place Bio Qualité, un système d’assurance qualité très élaboré. De plus, un contrôle de qualité national obligatoire vient compléter ce dispositif déjà tout à fait satisfaisant.
En ce domaine, la biologie médicale est la plus avancée de toutes les professions de santé en France. Elle n’a rien à envier à qui que ce soit.
L’immense majorité des laboratoires de biologie médicale fait actuellement un travail de qualité irréprochable. La biologie française est unanimement reconnue comme étant l’une des meilleures en Europe.
Les pouvoirs publics ont les moyens légaux de contrôler le respect de cette qualité et de sanctionner un laboratoire en cas de faute. C’est leur mission, et ils doivent l’assumer.
Cependant, dans la continuité des efforts déjà fournis depuis de nombreuses années par la profession de manière à garantir et à améliorer la qualité des examens, il est utile que les laboratoires de biologie médicale continuent leur démarche.
Pour autant, l’instauration d’un système d’assurance qualité unique lié exclusivement à une accréditation est extrêmement difficile à mettre en place pour tous les laboratoires de biologie médicale ; il aboutit à des excès de procédures inutiles, le plus souvent de nature purement industrielle, et peu adaptées au domaine médical.
Par ailleurs, une accréditation n’apporte aucune garantie supplémentaire quant à l’exactitude des résultats des analyses médicales par rapport à d’autres systèmes d’assurance qualité.
De plus, l’accréditation globale des laboratoires de biologie médicale est totalement inabordable financièrement en coûts directs et indirects. Elle mettrait en très sérieuse difficulté une grande partie des laboratoires.
Enfin, le fait qu’un seul organisme soit habilité à délivrer une accréditation – en France, le COFRAC – qui entend faire appliquer la norme européenne 15189 place l’organisme dans une situation de monopole qui paraît abusive.
L’accréditation doit rester une démarche volontaire, comme partout en Europe.
Une concurrence entre les différents systèmes d’assurance qualité mis actuellement à la disposition des laboratoires de biologie médicale est saine, source de progrès et d’émulation. Elle doit pouvoir s’exercer pour des raisons financières évidentes et de choix personnel, dans la mesure où le système d’assurance qualité choisi par le laboratoire de biologie médicale est contrôlé par la Haute Autorité de santé.
C’est pourquoi le libre choix du système d’assurance qualité est indispensable et s’impose. Je vous rappelle que c’est d’ailleurs le cas dans les autres pays européens.
M. le président. L'amendement n° 184, présenté par M. Beaumont, est ainsi libellé :
Compléter le troisième alinéa (2°) de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Les examens de biologie médicale sont effectués sous la responsabilité des directeurs et directeurs-adjoints de laboratoire, titulaires de l'un des titres ou diplômes permettant l'exercice de la médecine, de la pharmacie ou de l'art vétérinaire, inscrits au tableau professionnel dont ils relèvent et ayant reçu une formation spécialisée dont la nature et les modalités sont fixées par décret.
La parole est à M. René Beaumont.
M. René Beaumont. Ayant assisté à l’essentiel des débats sur le présent projet de loi, je veux tout d’abord souligner la volonté de concertation préalable et d’information du Parlement, ainsi que la patience dont fait preuve Mme la ministre depuis le début de ce débat.
Tout comme M. Barbier, je constate que, après les médecins et les dentistes, c’est au tour des vétérinaires de se voir imposer une réforme « à l’insu de leur plein gré », selon la formule consacrée. (Sourires.)
Madame la ministre, je souhaite vous rappeler très cordialement que je n’ai eu connaissance d’aucune concertation, d’aucune information précise, à l’exception d’une convocation adressée au président de l’Ordre pour lui présenter les mesures envisagées.
Tout à l’heure, j’ai été tenté de voter certains amendements tendant à ne pas autoriser la réforme de la biologie médicale par ordonnance. Le sujet est trop grave, trop important et concerne un trop grand nombre de professionnels !
M. Guy Fischer. Vous auriez dû le faire !
M. René Beaumont. J’ajoute qu’il n’est pas judicieux de « glisser » subrepticement un amendement gouvernemental dans une discussion de commission. Employer une telle méthode pour faire évoluer la biologie médicale ne me paraît pas sain.
À mes yeux, la biologie médicale ne peut être qu’unique. Il n’existe qu’une seule biologie, la biologie animale, l’homme étant lui-même un animal, certes privilégié. Depuis toujours, les vétérinaires, les pharmaciens, les médecins ont été associés aux travaux des laboratoires de biologie médicale. Indépendamment de l’étude très précise réalisée par un conseiller de Mme la ministre que je connais fort bien et que j’apprécie, aucun texte ne prévoit d’évincer brutalement et systématiquement les vétérinaires du système.
La médecine humaine et la médecine vétérinaire ont toujours fort bien coexisté jusqu’à présent. J’en apporterai la preuve par quelques exemples pris à travers les âges.
Tout le monde se souvient que, pour lutter contre la tuberculose, a été inventé le célèbre vaccin du BCG, le vaccin bilié de Calmette et …
M. René Beaumont. Et qui était Guérin ?
M. Paul Blanc. Un vétérinaire !
M. René Beaumont. Effectivement ! Gardons cela à l’esprit !
Plus récemment, alors que j’étais étudiant à l’École vétérinaire, ont été étudiés les systèmes d’intervention sur le cerveau humain. La stéréotaxie du cerveau a d’abord été pratiquée sur les animaux, notamment sur le chien, à la faculté de médecine de Lyon. J’en ai quelques souvenirs émus.
Plus récemment encore a été découverte l’encéphalopathie spongiforme bovine : il s’agit de la maladie de la vache folle, mais c’est aussi la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
M. François Autain. Absolument !
M. René Beaumont. Pourquoi dénombre-t-on en France seulement quarante-deux victimes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, alors que la Grande-Bretagne en compte quelques centaines ? Tout simplement parce que les services vétérinaires français ont coopéré avec l’ensemble des services de protection sanitaire, en particulier avec les services médicaux, afin que cette épidémie ne se propage pas sur l’ensemble du territoire.
Séparer aujourd’hui la biologie médicale humaine de la biologie médicale vétérinaire, alors que les risques sanitaires évoluent, reviendrait à commettre une grossière erreur.
À l’heure actuelle, le risque sanitaire provient systématiquement de zoonoses. Pour les non-initiés, il s’agit de maladies portées à la fois par les animaux et les hommes, et souvent transmises par les premiers aux seconds. C’est d’actualité. Citons les canards porteurs du virus H5N1 ou encore les cochons porteurs du virus H1N1. Le monde animal est présent partout.
La biologie est donc unique et ne peut être divisée.
Interdire aux vétérinaires d’accéder au diplôme d’études spécialisées de biologie médicale priverait ces professionnels d’un diplôme difficile, délivré aujourd’hui à l’issue de huit années d’études au minimum.
De ce fait, nous aurions bien du mal à trouver des vétérinaires biologistes pour assurer une autre de leurs missions, qui paraît évidente aujourd'hui, qui a toujours été naturelle pour eux et qu’ils ont assumée avec beaucoup de succès en France : le contrôle sanitaire des aliments d’origine animale consommés par l’homme.
En effet, ce sont bien des vétérinaires qui contrôlent ces aliments. Ils ont besoin de formation et, si on les en prive, ils seront absolument incapables dans quelques années d’assumer cette mission !
Si vous m’affirmez, madame la ministre, que vous avez décidé de prendre cette mesure, par voie d’ordonnance, précisément pour priver les vétérinaires du contrôle des denrées alimentaires d’origine animale…
M. René Beaumont. … et pour confier cette mission aux médecins ou aux pharmaciens, je vous comprendrai mieux, mais je serai encore plus hostile à votre proposition.
Je sais bien que telle n’est pas votre motivation. Dans ce cas, vous avez besoin des vétérinaires, et il vous faut donc les conserver. Il n’y a que cela à faire !
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. René Beaumont. Aujourd'hui, de nombreux laboratoires d’analyses de biologie médicale sont spécialisés dans une branche de leur activité, à savoir le contrôle des aliments, et ils ont raison. Ils auront besoin de vétérinaires !
Dès lors, pourquoi voulez-vous priver les vétérinaires de cette formation ? J’ai l’impression qu’il s'agit d’un oukase tombé sans raison sur cette profession, qui pourtant ne demandait rien et avait jusqu’à présent assuré parfaitement ses missions !
Madame la ministre, je souhaite donc que vous puissiez surseoir à cette décision et entamer de véritables discussions avec le monde vétérinaire, pour trouver une solution équitable, car celle-là ne l’est pas !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 763, je rappellerai que le texte proposé par le projet d’ordonnance pour l’article L. 6221-1 du code de la santé publique prévoit un système d’accréditation sous l’égide de la Haute Autorité de santé, tandis que les dispositions prévues pour l’article L. 6221-2 du même code instituent des contrôles extérieurs sous l’égide de l’AFSSAPS, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
Ce dispositif est suffisant. Il garantit la qualité des examens de biologie médicale. Par ailleurs, les professionnels peuvent recourir à l’assurance de leur choix. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
S'agissant de l’amendement n° 184, j’essaierai, monsieur Beaumont, de présenter l’avis de la commission, qui ne vous satisfera d'ailleurs guère, avec moins de passion que vous n’en avez mis à défendre votre proposition…
Comme vous l’avez souligné, cet amendement tend à maintenir la possibilité pour les vétérinaires de se spécialiser en biologie médicale.
Il est vrai qu’interdire cette spécialisation revient à se priver d’un apport de compétences utiles, surtout à une époque où de nombreux virus risquent de se transmettre de l’animal à l’homme, et vous avez d'ailleurs fait allusion à quelques maladies célèbres.
Toutefois, les vétérinaires ne sont pas reconnus comme les membres d’une profession médicale. Par conséquent, s’ils peuvent avoir la responsabilité d’un laboratoire de biologie médicale, cette mission, pour la Commission européenne, est une simple prestation de service.
M. Alain Milon, rapporteur. La possibilité de spécialisation des vétérinaires reste en effet une spécificité française.
Monsieur Beaumont, pour permettre le succès de la réforme au regard du droit communautaire, la commission des affaires sociales vous demande de retirer cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable, à regret d'ailleurs, et bien entendu sous réserve de l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. S'agissant de l’amendement n° 763, tout d'abord, j’ai trouvé assez curieuse l’argumentation qui voudrait qu’on libéralise, en quelque sorte, les organismes d’accréditation.
En effet, si nous vous suivions, monsieur Le Menn, et si nous laissions se développer une espèce de foire aux organismes d’accréditation, qui accréditerait alors les organismes accréditeurs ?
Il est évident, en quelque sorte par définition, qu’une procédure d’accréditation fait appel à un organisme public indépendant, qui la garantit !
Dans le domaine de la biologie médicale, vous jouez véritablement à fronts renversés en ce qui concerne la qualité exigée. Après avoir vanté les mérites de l’ouverture du capital des laboratoires d’analyses, voilà que vous prônez la libéralisation des mécanismes d’accréditation. Franchement, je ne vous comprends plus !
Bien sûr, le rôle de la Haute Autorité de santé sera essentiel dans le système d’assurance qualité des laboratoires. La mise en œuvre de l’accréditation se fera en lien étroit avec cette instance, qui travaillera avec le COFRAC, le Comité français d’accréditation, c'est-à-dire l’organisme public chargé de cette mission, afin non seulement de garantir la cohérence des procédures suivies avec la politique nationale de santé, mais aussi d’élaborer le manuel d’accréditation, encore appelé « Document d’exigences spécifiques pour l’accréditation des laboratoires de biologie médicale ».
Naturellement, nous ne pouvons imaginer un processus d’accréditation qui ne serait pas sous l’emprise de la puissance publique. Et ce n’est pas vous, monsieur Le Menn, qui affirmerez le contraire !
Je suis donc résolument défavorable à cet amendement.
J’en viens à l’amendement n° 184, et je répondrai à M. Beaumont de façon un peu plus approfondie.
Je le répète, le projet de réforme proposé est un processus de médicalisation de la biologie médicale.
Le biologiste médical est évidemment responsable de la qualité de toutes les étapes de l’examen, du prélèvement jusqu’au compte rendu du résultat validé et interprété en fonction des éléments pertinents que le clinicien lui aura communiqués.
Ce n’est pas un professionnel de santé « hors sol », si j’ose dire ! C’est un spécialiste qui noue un véritable contact avec le malade, qui lui parle, qui évoque sa pathologie, qui fait partie d’une équipe soignante. D'ailleurs, ce qui a manqué à la biologie médicale, c’est peut-être justement ce processus la rapprochant des professionnels de santé.
Dès lors que je veux médicaliser la biologie médicale, je ne puis la confier à un professionnel qui ne connaît pas la médecine humaine, pas plus d'ailleurs que le médecin ne connaît l’art de soigner les animaux. Mesdames, messieurs les sénateurs, chacun son métier, et les vaches seront bien gardées, si vous me permettez cette expression ! (Sourires.)
C’est pourquoi il est nécessaire de réserver le titre de biologiste médical aux professionnels de santé, c'est-à-dire aux docteurs en médecine et en pharmacie spécialisés en biologie médicale ou, le cas échéant, aux personnes possédant des qualifications professionnelles reconnues comme équivalentes, selon une procédure définie, et dont la formation concerne la prise en charge de patients humains.
La formation des vétérinaires est de très haut niveau – loin de moi l’idée de remettre en cause leurs compétences, d’établir une hiérarchie et d’affirmer que les uns seraient supérieurs ou inférieurs aux autres –, mais elle est axée sur la prise en charge d’une diversité importante d’espèces animales, à l’exception de l’homme. Rien dans les études vétérinaires ne concerne la connaissance de l’homme, et cette formation n’est donc pas de nature à remplir l’objectif visé ici.
Comme l’a souligné M. le rapporteur, il ne s’agit pas d’une profession de santé au sens du code de la santé publique. La vocation d’un vétérinaire n’est pas de prendre en charge des patients humains, même si, en matière de recherche, il peut y avoir des croisements, que vous avez très justement soulignés, monsieur Beaumont, car des travaux vétérinaires ont parfois des implications en médecine humaine.
De même, la vocation d’un médecin ou d’un pharmacien n’est pas de prendre en charge des animaux, et celle d’un vétérinaire n’est pas de s’occuper de patients ! Si la compétence en biologie médicale est essentielle en biologie médicale humaine, elle doit être associée à des connaissances en médecine humaine ou en pharmacie.
Ces arguments ont été utilisés par M. le rapporteur, mais j’oserai affirmer qu’ils ne sont pas essentiels.
En réalité, si, dans le cadre de la réforme de la biologie, nous autorisons les vétérinaires à exercer la profession de biologiste médical, nous fragiliserons considérablement cette dernière. En effet, les instances européennes affirmeront qu’il s’agit non pas d’une profession de santé, mais d’une prestation de service, et nous devrons alors lui appliquer la directive dite « Bolkestein », ce que nous voulons précisément éviter. Si nous accédons à votre demande, monsieur Beaumont, nous affaiblirons notre argumentation juridique !
Il paraît donc nécessaire, dans le cadre d’une biologie médicale centrée sur le patient humain, de mettre fin à des procédures dérogatoires d’exception, du reste très limitées, qui donnent aux vétérinaires diplômés un accès au titre de biologiste médical.
Bien entendu – je veux vous rassurer –, les vétérinaires exerçant actuellement les fonctions de directeur ou de directeur adjoint de laboratoire pourront continuer à le faire. Ces professionnels ne sont pas menacés.
Il en sera de même pour ceux qui sont entrés effectivement en spécialisation de biologie médicale avant la date de promulgation du texte portant la réforme. Il n’y aura pas de mesure rétroactive dans ce domaine.
En outre, ce qui est fermé aux vétérinaires, c’est non pas l’accès au diplôme d’études spécialisées de biologie médicale, mais la possibilité pour eux d’obtenir le titre de biologiste médical humain, ce qui est bien le moins !
Les vétérinaires pourront travailler dans les laboratoires de biologie vétérinaire, par exemple départementaux, ou dans les laboratoires de biologie médicale humaine ; dans ce dernier cas, ils ne pourront cependant pas valider, interpréter et signer des résultats d’examen de biologie médicale humaine, car celle-ci est une profession médicale, liée à la santé, alors que le métier de vétérinaire n’a pas cette qualification !
En outre, je le répète, le rôle très important que les vétérinaires jouent dans la recherche n’est absolument pas remis en cause.
Monsieur Beaumont, au bénéfice de ces explications, de cette plaidoirie pourrais-je même dire (Sourires.), je vous serais très reconnaissante de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à M. René Beaumont, pour explication de vote sur l'amendement n° 184.
M. René Beaumont. Madame la ministre, comme vous vous en doutez, j’ai écouté avec beaucoup d’attention vos arguments.
J’ai constaté un progrès évident, que j’avais évoqué et souhaité : l’accès des vétérinaires au DES sera maintenu.
M. René Beaumont. C’est tout à fait nécessaire, et même indispensable, car nous avons besoin d’équipes pluralistes, en matière de recherche, en particulier, mais aussi d’analyse des aliments d’origine animale.
Toutefois, je conteste, comme d’autres l’ont fait avant moi, que cette réforme de la biologie médicale soit réalisée par voie d’ordonnance, parce qu’elle aurait mérité une tout autre réflexion du Parlement.
Si vous souhaitez simplement priver le vétérinaire du titre de directeur de laboratoire de biologie médicale, je suis d'accord. Si vous visez aussi le directeur adjoint, je suis alors moins favorable. Pourriez-vous préciser ce point ? Dans ce cas, je retirerai peut-être mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le directeur adjoint est lui aussi un professionnel de santé, qui valide les examens et fait donc partie de l’équipe soignante ; je m’exprime ici sous le contrôle de ceux qui ont cumulé les fonctions de biologiste médical et de directeur adjoint de laboratoire et qui les connaissent donc bien. (M. le président de la commission des affaires sociales acquiesce.)
M. le président. Monsieur Beaumont, l'amendement n° 184 est-il maintenu ?
M. René Beaumont. Madame la ministre, je n’ai pas bien saisi votre explication.
J’ai cru comprendre que vous autorisiez les vétérinaires à exercer les fonctions de directeur adjoint de laboratoire. Si tel est le cas, je retire mon amendement, sinon, je le maintiens.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les vétérinaires pourront travailler dans un laboratoire, mais sans exercer les fonctions de directeur ou de directeur adjoint, c'est-à-dire qu’ils ne feront pas partie de l’équipe soignante.
M. René Beaumont. J’ai maintenant très bien compris ! Les vétérinaires n’ayant pas vocation à être les laborantins des autres, je maintiens cet amendement, monsieur le président !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 764, présenté par MM. Le Menn et Cazeau, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mme Demontès, M. Desessard, Mme Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le sixième alinéa (5°) de cet article :
5° Garantir l'autorité du médecin biologiste ou du pharmacien biologiste sur l'activité du laboratoire de biologie médicale ; éviter les conflits d'intérêts en interdisant toute détention directe ou indirecte de tout ou partie du capital social d'une société exploitant un laboratoire à toute personne physique ou morale exerçant sous quelque forme que ce soit les professions ou activités visées à l'article 12 du décret n° 92-545 du 17 juin 1992.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Dans un souci de précision plus que d’opposition, cet amendement vise à rappeler quelle peut être la nature des conflits d’intérêts mentionnés à l’article 20 du projet de loi, afin de les éviter.
Il convient en effet de ne pas mettre en péril l’exercice des professionnels, dans le respect de leur indépendance et de leurs règles déontologiques propres.
L’article 12 du décret 92-545 du 17 juin 1992 définit très clairement les activités qui sont frappées d’incompatibilité avec la détention directe ou indirecte de parts ou d’actions représentant tout ou partie du capital social d’une société exploitant un laboratoire. Il s'agit soit d’une autre profession de santé, soit d’une activité de fournisseur, distributeur ou fabricant de matériel ou de réactifs d’analyses de biologie médicale.
Sont également exclus les entreprises d’assurance et de capitalisation, tous les organismes de prévoyance, de retraite et de protection sociale obligatoires ou facultatifs, ainsi que les établissements de santé, sociaux et médico-sociaux de droit privé.
Ce décret poursuit une même visée que le projet de loi que nous examinons actuellement ; il faut donc incontestablement le mettre en lien avec ce texte.
Nous entendons, à travers le présent amendement, que soit garantie l’autorité du médecin biologiste ou du pharmacien biologiste sur l’activité du laboratoire de biologie médicale.