Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer, auteur de la question n° 511, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi d’attirer votre attention sur le projet de décret relatif à la création du répertoire national commun de la protection sociale, ou RNCPS, institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
Il aura vocation à regrouper des données d’état civil et d’affiliation, ainsi que les montants et la nature de toutes les prestations servies – en nature et en espèces –, les coordonnées géographiques, téléphoniques et électroniques déclarées par les assurés, allocataires et retraités, et leurs revenus. Il offrira simultanément un service de gestion des échanges informatisés aux organismes de protection sociale et aux administrations fiscales.
La conservation de données sensibles et privées sur une période de cinq ans, renouvelable indéfiniment tant que l’on reste assuré social, est prévue. Le RNCPS concernerait les données centralisées par les organismes contributeurs chargés de la gestion d’un régime obligatoire de sécurité sociale, les caisses assurant le service des congés payés et le pôle emploi.
L’article R. 114-26 précise que le droit d’opposition ne s’appliquerait pas à ce dispositif.
L’article R. 114-28 renvoie à un arrêté à venir pour fixer la liste des très nombreux risques, droits, prestations et organismes présents dans le RNCPS.
Selon la direction de la sécurité sociale, « une soixantaine d’organismes sont concernés par l’alimentation du RNCPS » et « un nombre bien plus important encore de structures y aura accès ». Un certain nombre de nos collègues de la commission des affaires sociales ont entendu ces propos, qui ont été tenus lors d’une audition par la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale. N’est-ce pas, monsieur Vasselle ?
M. Alain Vasselle. Tout à fait !
M. Guy Fischer. Combiné à d’autres dispositifs similaires, ce système contribuerait à amplifier de façon considérable les divers croisements de fichiers de données sociales, fiscales et territoriales, hors de l’assentiment et de la connaissance des assurés sociaux, des familles et des retraités.
Il est clair que nous assistons là à une nouvelle attaque contre les personnes en grande difficulté, c’est-à-dire les personnes précaires, les chômeurs et les smicards. Lors du transfert de la gestion du RMI aux départements, une véritable chasse aux fraudeurs avait déjà été instaurée.
M. Alain Vasselle. Oh !
M. Guy Fischer. Ensuite, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 avait instauré un contrôle systématique du train de vie des allocataires des minima sociaux et fait du numéro d’inscription des personnes au répertoire national d’identification des personnes physiques, ou NIR, la clé d’accès au futur dossier médical personnel, ou DMP.
M. Alain Vasselle. Vous savez bien qu’il y a toujours des tricheurs !
M. Guy Fischer. Je m’étais déjà élevé, à l’époque, contre ces dispositions scandaleuses, fondées sur l’idée que tout allocataire de prestations pourrait être fraudeur parce qu’il est propriétaire de son logement ou de son véhicule. Je prédisais d’ailleurs que ce gouvernement envisageait d’aller plus loin et d’interconnecter tous les fichiers. (M. Alain Vasselle s’exclame.)
C’est quasiment chose faite, et vous parachevez aujourd’hui ce « super-contrôle » informatisé de nos concitoyens. Il s’agit là d’une atteinte inacceptable à la liberté de l’individu, doublée d’un cynisme stigmatisant les plus défavorisés.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, le retrait du projet de décret concernant le RNCPS.
M. Alain Vasselle. Vous êtes tombé dans la caricature !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur le sénateur Guy Fischer, je vous prie, tout d’abord, d’excuser l’absence de mon collègue Brice Hortefeux, qui m’a demandé de me faire son porte-parole auprès de vous.
La création du répertoire national commun de la protection sociale résulte non pas du décret mais de la loi. Plus précisément, il est issu d’un amendement à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007, qui avait été adopté sur l’initiative de votre collègue le député Pierre Morange.
Le décret que vous évoquez est donc préparé par le Gouvernement pour mettre en œuvre cette disposition législative.
Je voudrais rappeler les deux objectifs de la création de ce répertoire.
Il s’agit, tout d’abord, d’améliorer le service aux usagers. Le monde de la protection sociale étant complexe, il est utile de disposer d’une vue globale de la situation d’un assuré pour l’orienter au mieux vers l’organisme ou le guichet compétent.
Il s’agit, ensuite, d’améliorer les outils dont disposent les organismes de protection sociale pour maîtriser les risques d’erreur et de fraude. C’est un enjeu essentiel auquel, j’en suis sûr, tous les sénateurs, gestionnaires de l’argent public attachés au principe d’égalité, sont sensibles.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. La maîtrise de ces risques doit constituer une préoccupation permanente dans un secteur qui verse, je le rappelle, 550 milliards d’euros de prestations par an.
M. Alain Vasselle. Ce n’est pas rien !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je voudrais également, monsieur Fischer, vous apporter plusieurs précisions.
Il n’est pas exact que les montants des prestations figureront dans ce répertoire, qui ne comprendra que les données relatives à l’état civil ainsi que la qualité de bénéficiaire ou non d’une prestation. De même, je souhaite vous rassurer sur un autre point : les revenus des intéressés ne figureront nullement dans ce répertoire.
J’ajoute que le travail mené conjointement avec la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, nous a permis d’avoir des échanges approfondis avec elle à propos des finalités de ce répertoire et des modalités de sa mise en œuvre. Grâce à la CNIL, dont toutes les préconisations seront respectées, nous avons également pu améliorer le projet de décret.
Me fondant sur mon expérience d’élu local, j’ajoute que nous sommes tous très attentifs à toutes les tricheries possibles, que ne supportent pas nos concitoyens.
M. Guy Fischer. Elles sont marginales !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. Je pense que tout ce qui peut assurer l’équité et la justice va dans le sens voulu par tous les groupes politiques du Sénat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d’État, vous venez, je le déplore, de me confirmer la volonté du Gouvernement d’utiliser les technologies informatiques, de plus en plus puissantes et performantes, au détriment de la liberté des personnes et du respect de leur intimité et de leur vie privée.
Le RNCPS croisera bientôt les innombrables données qui concernent les populations les plus modestes. C’est cette stigmatisation des plus faibles, des chômeurs et des précaires que je dénonce. Ce n’est cependant pas tout : vous préparez un autre mauvais coup (M. Alain Vasselle s’exclame.) avec un décret relatif au traitement automatisé des données à caractère personnel accompagnant la mise en œuvre du revenu de solidarité active, le RSA, mis en place à partir du 1er juin prochain et payé à partir du 1er juillet ; vous savez que nous allons assister à une explosion du nombre d’allocataires du RSA.
Toujours selon votre conception du « chômeur-fraudeur », vous poursuivez la stigmatisation…
M. Guy Fischer. … et la discrimination des plus démunis.
Dès lors, pour percevoir quelques dizaines d’euros supplémentaires, il faudra tout dire de soi, de sa vie, de ses ascendants et descendants, de ses pauvres ressources et de celles de sa famille. Je juge cela particulièrement indigne et je tiens à le souligner solennellement.
Je ferai toujours en sorte de faire entendre la voix des plus pauvres, à l’heure où la France voit apparaître un nouveau concept, qui est aussi une réalité, celui de la pauvreté laborieuse. Or ce sont ces personnes et non pas les bénéficiaires de retraites-chapeaux et autres avantages qui sont l’objet des recherches les plus fouillées.
Rattrapage des retraites minières
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la question n° 501, de M. Jean-Claude Danglot, adressée à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville.
La parole est à M. Guy Fischer, en remplacement de M. Jean-Claude Danglot.
M. Guy Fischer. Je remplace effectivement M. Danglot, qui vient de perdre son père.
M. Jean-Claude Danglot appelle l’attention de M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville sur l’engagement du Président de la République de mettre un terme aux inégalités de traitement qui perdurent entre les retraités des mines partis en retraite avant 1987 et les retraités des mines partis en retraite après 1987.
En effet, l’accord de 2001, qui n’a pas été signé par deux syndicats de salariés, induit une discrimination entre les retraités et veuves de mineurs résultant de la mise en place d’un rattrapage différencié selon l’année de départ en retraite. Par exemple, la revalorisation des pensions va de 0 % pour ceux partis en retraite avant 1987, soit 80 % des pensionnés, à 17 % pour ceux partis en 2001, et 25,5 % pour ceux partis en 2008. Les écarts entre les pensions résultant de ce système s’accroissent tous les ans.
Les veuves de mineurs sont encore plus touchées. Le montant de la pension de réversion étant de 54 % du montant de la pension de retraite, elles subissent encore plus ce système injuste. La plupart d’entre elles vivent désormais avec des revenus inférieurs au seuil de pauvreté.
M. Danglot demande donc à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville de bien vouloir lui faire connaître les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour rétablir l’équité entre les retraités des mines et, c’est moi qui l’ajoute, pour tenir les promesses du Président de la République.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Je vous prie, monsieur Fischer, de bien vouloir transmettre toutes nos amicales condoléances à M. Danglot.
Mon collègue Brice Hortefeux m’a prié de bien vouloir répondre en son nom à cette question des retraites des assurés relevant du régime des mines, auquel M. Danglot est très attaché.
Il s’agit d’un régime spécial dans lequel les pensions sont calculées sur une base forfaitaire en multipliant le nombre de trimestres par la valeur du trimestre. Cette situation a progressivement conduit, à partir de 1987, année depuis laquelle les pensions sont indexées sur les prix, à un décalage entre les prestations servies par ce régime et celles du régime général.
Il s’agissait de corriger ce décalage. Un accord a été conclu par l’État avec trois organisations syndicales représentatives des mineurs en 2002. Il prévoit plusieurs mesures en faveur des assurés du régime minier et de leurs ayants droit. Cet accord a visé à offrir à chaque génération une amélioration de ses conditions de liquidation pour tenir compte de l’amélioration de sa carrière.
Toutefois, ce dispositif n’a pas été suffisamment expliqué ni compris ; je pense que cela explique la question de M. Danglot.
Aussi, comme le Gouvernement l’a écrit à M. le sénateur Danglot, nous avons décidé de réexaminer la situation des retraités du régime des mines. Je rappelle d’ailleurs que, comme vous le savez, dans cette attente, le régime des mines n’a pas été concerné, en 2008, par la réforme de régimes spéciaux de retraite. Il est resté à l’extérieur du champ de celle-ci.
Une première phase de concertation s’est déroulée au cours de l’été 2008. Elle a permis d’identifier plus précisément les positions et les propositions des uns et des autres et d’échanger informellement sur les mesures susceptibles d’améliorer le pouvoir d’achat des retraités les plus modestes et les plus âgés, tout en tenant compte de la situation financière du régime.
Ces premières discussions se prolongent dans le cadre d’un groupe de travail qui réunit l’ensemble des acteurs et des administrations concernées. Ce groupe s’est réuni pour la première fois le 9 mars dernier. Il a tenu, depuis lors, plusieurs réunions techniques.
Nous souhaitons que ces concertations s’achèvent au cours de ce printemps sur un consensus réunissant un nombre suffisant d’organisations syndicales. Brice Hortefeux m’a prié de souligner l’esprit de responsabilité dont témoignent toutes ces organisations dans le cadre des discussions en cours.
Ses propositions vont maintenant être mises sur la table. Le Gouvernement en tiendra informé la Haute Assemblée, particulièrement M. le sénateur Danglot.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d’État, les organisations syndicales ont été reçues en 2008 par l’ensemble des groupes politiques de l’Assemblée nationale, qui ont reconnu la discrimination dont faisaient l’objet les mineurs retraités selon la date de leur départ à la retraite et l’injustice de cette situation. Depuis lors, de très nombreux parlementaires de toutes tendances sont intervenus à ce sujet.
Par la suite, la Président de la République a adressé une lettre aux syndicats les informant qu’il comprenait leur demande et qu’il s’investirait personnellement pour tenter de résoudre ce problème.
À cet effet, des groupes de travail ont été mis en place. La dernière réunion, qui a eu lieu le 6 avril, n’a débouché, à ma connaissance, sur aucune proposition concrète.
Par conséquent, il s’avère que le traitement de ce problème dépasse une dimension purement technique et qu’il conviendrait donc de confirmer une volonté politique, afin de respecter les positions des parlementaires et du Président de la République, pour que cesse rapidement cette discrimination, reconnue par tous les interlocuteurs du dossier.
mise en œuvre du plan licence et de l'autonomie des universités
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, auteur de la question n° 489, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le secrétaire d'État, l’université connaît deux grands chantiers : la mise en place du plan licence et le passage à l’autonomie.
Elle est confrontée aussi à l’une des crises les plus graves qu’on ait connues depuis des décennies. Cette crise, les Français voient bien qu’elle s’enlise par la faute du Gouvernement.
Cette situation n’est plus acceptable. Dans certaines universités, on entre dans la quinzième semaine de grève et la délivrance des diplômes est compromise. Le Gouvernement a beau jeu de prétendre que les enseignants-chercheurs préfèrent refuser l’évaluation et pénaliser les étudiants plutôt que d’accepter les diktats auxquels ils sont soumis.
La réalité, c’est que vous préférez jouer le pourrissement plutôt que d’admettre l’inanité de réforme !
Monsieur le secrétaire d’État, le Gouvernement avançait que l’autonomie allait s’accompagner d’un effort financier massif de l’ordre de plusieurs centaines de millions d’euros en direction des universités. Au final, selon les premières études réalisées, ce ne sont que 175 millions d’euros qui vont finir effectivement dans le budget de fonctionnement des universités au titre du plan licence et pour le passage à l’autonomie.
Ces 175 millions d’euros sont répartis de manière très inégale et surprenante. On est tellement loin des sommes promises que la Conférence des présidents d’université, qui avait soutenu cette réforme, la dénonce maintenant avec force.
Comme si cela ne suffisait pas, vous vous attaquez aussi au statut des enseignants-chercheurs. Avec le système d’évaluation que vous proposez, vous voulez ainsi faire entrer l’université dans l’ère des managers, comme si elle était une entreprise comme les autres !
Le pire, c’est que vous ne savez même pas comment réaliser efficacement cette évaluation. Le décret qui est paru en catimini pendant les vacances sur le statut des universitaires l’atteste : c’est un tel embrouillamini que personne n’y comprend plus rien ! Il en est de même de la modulation des heures, dont les conditions de répartition sont si obscures qu’on ne sait pas quand les heures modulées commencent ni quand elles sont payées. La seule chose à peu près claire, c’est que ce sont bien les présidents d’université, ces nouveaux managers, qui auront le dernier mot dans la plupart des cas.
Mais ces derniers font face aujourd’hui à une véritable fronde, comme à Caen, à Paris ou même à Bordeaux. Et si certains jouent le jeu du délitement en menaçant les universitaires de sanctions financières, comme à Lille II, beaucoup expriment leur crainte devant la bombe à retardement qui menace désormais d’exploser à chaque instant.
Monsieur le secrétaire d’État, quand admettrez-vous que cette réforme ne correspond ni aux besoins des étudiants ni à ceux des universitaires ? Que comptez-vous faire pour mettre fin à un conflit qui dure maintenant depuis trop longtemps, à un conflit qui pénalise les étudiants et les chercheurs, à un conflit qui, pour tout dire, est indigne de l’université française ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. Monsieur le sénateur, vous parlez d’indignité ; encore faudrait-il savoir à qui elle incombe réellement !
Je vous prie d’excuser Valérie Pécresse, qui en ce moment accompagne le Président de la République à Nancy.
Vous interrogez le Gouvernement sur les conditions financières de réalisation du plan « Réussir en licence » et du passage à l’autonomie des universités.
Pour 2009, des moyens importants ont été attribués aux universités. Au total, elles disposeront de 300 millions d’euros de moyens nouveaux en 2009, contre simplement 78 millions d’euros en 2008 et 58 millions d’euros en 2007. C’est une augmentation de 17 % des moyens que l’État consacre au budget des universités.
À quoi sont destinés ces crédits ? Pour 67 millions d’euros en 2009, et 730 millions d’euros en cumulé pour la période 2008-2011, ces crédits serviront à aider toutes les universités à « booster » la réussite des étudiants de licence, dont on sait qu’ils sont les plus fragiles, en particulier ceux qui ont besoin d’être mieux orientés et plus accompagnés.
Ces crédits serviront également à mettre en œuvre un nouveau système d’allocation des moyens, qui repose sur un financement équitable valorisant tant la réalité de l’activité des universités que leurs performances.
Ils serviront aussi à rénover leurs bâtiments, ce qui n’est pas du luxe. Ainsi, 150 millions d’euros transitent directement par leur budget pour la mise en sécurité de leurs locaux. C’est trois fois plus qu’en 2008 ! Cela s’ajoute aux moyens directement financés par l’État via les contrats de projet État-région, à l’opération « campus » et aux projets « campus », qui sont prometteurs et innovants.
Enfin, ces crédits serviront à accompagner les universités qui passent aux compétences élargies. Ainsi, 5 millions d’euros en 2008 et 16 millions d’euros en 2009 leur ont été spécifiquement dédiés pour les accompagner dans cette évolution importante, afin de leur permettre de former les personnels particulièrement engagés dans ce processus et de rétribuer le travail de ceux-ci.
Quant aux 18 universités qui sont passées à l’autonomie, elles ont vu leurs crédits augmenter de 96 millions d’euros en 2009, ce qui représente une progression moyenne de 15,5 %, contre 12,6 % pour la moyenne des universités. Elles ont ainsi capté 33 % des moyens nouveaux des universités.
Monsieur le sénateur, je suis élu d’un département sur le territoire duquel se trouve l’université de La Rochelle, qui est devenue autonome. Je puis vous dire que ses professeurs sont à la fois d’excellents enseignants, mais aussi d’excellents managers. Cette université poursuit son développement et tout le monde travaille à ce qu’elle réussisse son passage à l’autonomie. D’ailleurs, les examens se dérouleront normalement.
Le Gouvernement souhaite que, partout ailleurs, le défi de l’autonomie soit relevé. Il donne les moyens pour ce faire. Ainsi, ce n’est pas à lui qu’il faut poser la question de l’échec, mais c’est à ceux qui ne relèvent pas ce défi.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur le secrétaire d'État, votre réponse ne me satisfait pas. Même si certaines décisions ont quelque peu changé le paysage universitaire, tout n’est pas revenu dans l’ordre. Et il est quelque peu cavalier, voire irresponsable, d’en attribuer la responsabilité aux étudiants et aux universitaires.
Étudions de près les chiffres. Le Gouvernement avait annoncé un effort sans précédent de près d’un milliard d’euros par an en faveur de l’université. En réalité, les chiffres sont les suivants : 175 millions d’euros pour le budget de fonctionnement des universités, 68 millions d’euros pour le plan licence et 107 millions d’euros pour le passage à l’autonomie.
Plus encore, la très forte disparité entre ces chiffres surprend. Ainsi, personne ne comprend pourquoi la dotation de l’université Lyon II progresse de 27 %, tandis que celle de l’université Montpellier II ne progresse que de 0,5 %. Il s’ensuit un certain nombre d’inégalités.
Enfin, monsieur le secrétaire d'État, au-delà des chiffres, il existe un vrai mécontentement à la fois des chercheurs et des présidents d’université. Vouloir que le monde de l’université et le monde de l’entreprise se rapprochent en faisant désormais de l’évaluation l’alpha et l’oméga de la mesure du travail, cela me semble excessif. Comment peut-on sortir de cette crise, alors que certains s’inquiètent de leurs examens, de la validité de leur diplôme ? Bref, la responsabilité de cette situation incombe bien au Gouvernement, et non aux étudiants.
évolution et usage des crédits du conservatoire de la forêt méditerranéenne
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 507, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Pierre-Yves Collombat. Monsieur le ministre, ma question porte sur l’évolution des crédits alloués au Conservatoire de la forêt méditerranéenne, le CFM, et sur l’usage qui en est fait.
Je vous avais déjà interrogé à ce sujet lors de la discussion budgétaire, comme je l’avais fait avec vos prédécesseurs. Jusqu’à présent, je n’ai obtenu qu’une réponse rhétorique. J’espère donc qu’il en ira différemment ce matin.
Pour son premier exercice, en 1987, le CFM disposait d’un budget de 100 millions de francs, alimenté par des ressources propres : une taxe nouvelle sur les briquets et une hausse de la fiscalité sur les tabacs. Ces 100 millions de francs de 1987 représentent 22,8 millions d’euros en 2009, soit presque trois fois plus que les 8 millions d’euros budgétisés cette année. En conclusion, les deux tiers de ces fonds servent à autre chose qu’à la préservation de la forêt méditerranéenne.
Il s’agit là d’un premier détournement.
Second détournement : l’essentiel des ressources résiduelles a été affecté à un autre objet que celui qui était assigné au CFM lors de sa création, à savoir financer, en partenariat avec les collectivités locales, dans quinze départements du sud de la France, les travaux de défense des forêts contre l’incendie, DFCI, – pistes, pare-feux, coupures agricoles, etc. –, leur entretien, et préfinancer l’exécution d’office du débroussaillement obligatoire, qui relève de la responsabilité des maires.
Comme l’observait déjà la Cour des comptes dans son rapport de l’année 2000, ces ressources servent aujourd’hui à financer tout autre chose : le carburant de la surveillance aérienne, des patrouilles et des guets, l’achat de véhicules ou des constructions. Entre 2003 et 2007, pour 90 %, ces crédits ont financé des missions à la charge de l’État et, pour 10 %, des opérations concernant directement les collectivités.
Or la plupart des communes forestières, qui sont des communes rurales, n’ont les moyens ni de préfinancer le débroussaillement d’office ni de faire face aux obligations découlant des plans de protection des risques d’incendies de forêts, les PPRIF, qui leur sont imposés.
Lors de la discussion budgétaire, j’avais évoqué l’exemple de la commune varoise de Collobrières, que je connais bien, située au cœur du massif des Maures, et qui compte un peu plus de 1 700 habitants. À Collobrières, le simple entretien des pare-feu et des pistes de DFCI coûterait 300 000 euros par an, soit 15,5 % du budget de fonctionnement de la commune. Je vous laisse deviner le coût des investissements imposés par les PPRIF aux 17 communes varoises concernées par cette obligation !
J’ai donc deux questions à vous poser, monsieur le ministre.
Premièrement, estimez-vous légal ce détournement massif de deux tiers des ressources attribuées en propre au CFM lors de sa création vers d’autres missions que la protection de la forêt méditerranéenne ?
Deuxièmement, s’agissant des crédits résiduels, qui relèvent de votre responsabilité directe, envisagez-vous de les réorienter, conformément à la vocation du CFM, vers le financement d’opérations menées en partenariat avec les communes, notamment pour leur permettre de faire face aux obligations découlant des PPRIF qui leur sont imposés ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Barnier, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, je vous remercie d’aborder de nouveau ce sujet.
Comme vous l’avez rappelé, le CFM a été créé en 1987. Dans la mesure où je ne suis en fonctions que depuis deux ans, il serait sans doute injuste de me rendre seul fautif d’une évolution budgétaire que vous avez qualifiée de détournement et aux termes de laquelle les fonds initialement prévus ont été consacrés à d’autres actions que celles en faveur desquelles ils étaient destinés. Depuis 1987, de nombreux gouvernements, de droite et de gauche, se sont succédé, et chacun doit sans doute assumer une part de responsabilité dans cette situation. Néanmoins, je prends note de vos propos, qui m’offrent l’occasion de revenir sur un certain nombre de points.
À la suite de votre première interpellation du 3 décembre dernier, je vous avais écrit en mars, comme je m’y étais engagé, pour vous apporter quelques précisions, que je suis heureux de compléter aujourd’hui.
À cette occasion, je vous ai confirmé que, en dépit de la diminution globale des crédits qui lui sont consacrés, la dotation réservée en 2009 aux actions de DFCI en zone méditerranéenne a été maintenue à un niveau à peu près équivalent à ce qu’elle était en 2008, soit 8,9 millions d’euros contre 9,1 millions d’euros.
Le Conservatoire de la forêt méditerranéenne est un instrument financier particulier qui a été mis en place en 1987, lorsque le ministère de l’agriculture et de la pêche a dégagé des moyens financiers supplémentaires pour la prévention des incendies de forêts à la suite des très graves incendies de l’été 1986.
Le CFM est venu compléter la gamme des outils de financement dont disposait déjà le ministère en matière de prévention des incendies de forêts : les contrats de projets État-région, la convention-cadre avec l’Office national des forêts ou les conventions annuelles avec les départements dotés d’unités de forestiers-sapeurs.
Les capacités d’expertise que nous avons accumulées à la suite de ces grands incendies sont également mises à contribution dans le cadre des actions de coopération menées à l’étranger, par exemple en Grèce, où je me suis rendu voilà deux ans, après les dramatiques incendies qui ont touché ce pays.
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi organique de 2001 relative aux lois de finances, les crédits du CFM relevaient d’une ligne budgétaire spécifique du ministère. Depuis, la programmation de ces crédits est déléguée par le ministère au préfet de la zone de défense sud, qui est chargé de l’harmonisation et de la coordination des politiques de prévention et de lutte contre l’incendie dans les quinze départements méditerranéens. Monsieur Collombat, ces crédits, désormais inclus dans le budget opérationnel de programme déconcentré « Forêt », ont été, comme je vous l’avais indiqué, maintenus en 2009 à un niveau équivalent à celui de 2008.
Vous m’interrogez aujourd’hui sur leur utilisation. À cet égard, plusieurs points méritent d’être confirmés devant la Haute Assemblée.
Les priorités de la programmation annuelle du Conservatoire sont fixées après avis du Conseil d’orientation de la forêt méditerranéenne, qui est présidé par le préfet de la zone de défense sud et qui rassemble l’ensemble des intervenants dans la prévention des incendies de forêts, notamment les collectivités territoriales et les services des autres ministères.
Ces dépenses doivent toutefois être éligibles à la liste arrêtée par circulaire du 2 juillet 2007 : prévision et connaissance de l’aléa ; stratégie, coordination et harmonisation ; surveillance ; équipements de défense des forêts contre les incendies ; traitement des causes ; prévention des dommages ; information et formation ; recherche et expérimentation.
En matière d’équipements de défense des forêts contre les incendies, le Conservatoire de la forêt méditerranéenne participe aux investissements, mais le financement de l’entretien incombe aux maîtres d’ouvrage.
En ce qui concerne la prévention des dommages, le Conservatoire ne finance pas les travaux de prévention rendus obligatoires. Il apporte son expertise ou son concours aux préfets, mais son rôle s’exerce dans les limites des dispositions du code forestier, qui stipule que le maire est chargé du contrôle des débroussaillements obligatoires.
Enfin, les mesures de prévention décidées dans le cadre des plans de prévention des incendies de forêts concernant les zones urbanisées sont quant à elles éligibles au Fonds de prévention des risques naturels majeurs, géré par le ministère de l’écologie, qui est responsable de la mise en œuvre de ces plans.
Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments complémentaires que je pouvais vous apporter. J’espère qu’ils répondront, au moins partiellement, à vos interrogations et qu’ils vous rassureront quant à la mobilisation du ministère de l’agriculture et de la pêche en faveur de la prévention des incendies de forêts dans la zone méditerranéenne. Cette mobilisation demeure entière. Nous travaillons non pas de façon isolée, mais avec d’autres administrations, les collectivités locales, qui sont en première ligne sur le terrain, et de nombreuses associations, ainsi que les sapeurs-pompiers, volontaires ou professionnels.