Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Jean-Jacques Jégou. Pardonnez-moi de ne pas développer plus avant ce point technique faute de temps ; mais nous aurons l’occasion d’y revenir lors de la discussion des articles.
Sachez seulement que, si les communes qui participent à l’effort d’investissement sont éligibles pour les deux années en question, tout va bien. En revanche, si, pour des raisons quelquefois administratives indépendantes de leur volonté, ce n’est pas le cas, elles ne recevront en 2010 aucun versement au titre du FCTVA. C’est un point à étudier.
Je reste ouvert à la discussion, mais on risquerait de faire prendre des risques inutiles à certaines collectivités qui joueraient le jeu. En effet, comment les collectivités peuvent-elles établir un budget sans l’aide des remboursements du fonds de compensation pour la TVA ? Elles se trouveraient dans une situation difficile !
Nous sommes très partisans de caler les remboursements de ce FCTVA d’une année n sur les investissements de la même année. C’est pourquoi nous soutiendrons vigoureusement l’amendement qui sera proposé par le président de la commission des finances et qui permet, d’un côté, de doper l’investissement sur deux ans – 2009 et 2010 –, et, de l’autre, de régulariser la situation du FCTVA, en le synchronisant dès 2011 avec les investissements des communes. Cela permet d’éviter une éventuelle année blanche et d’instaurer une certaine équité entre les collectivités, les EPCI étant déjà remboursés l’année n.
En conclusion, même si l’on doit s’attendre à ce qu’il soit complété par un nouveau plan, on ne peut que soutenir celui qui nous est ici proposé. Certes, on peut regretter sa modestie, mais, tout le monde en conviendra ici, il faut surtout redonner confiance à notre pays si l’on veut éviter que 2009 ne soit l’année d’une crise sociale majeure. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées de l’UMP et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux dépêches d’agence de presse publiées lundi fixent parfaitement le cadre du débat qui nous préoccupera pendant les deux ou trois jours prochains.
La première précise, à propos de la situation de la banque britannique Royal Bank of Scotland : « Le cours de la banque britannique Royal Bank of Scotland, RBS, a cédé jusqu’à 71,18 % lundi après-midi à la Bourse de Londres, tombant à 10 pence, après qu’elle eut annoncé qu’elle pourrait perdre jusqu’à 28 milliards de livres, 31 milliards d’euros, en 2008. »
Une seconde dépêche, publiée dans l’après midi de lundi dernier, jour noir pour certains, rapporte que le CAC 40 a continué de dévisser, clôturant sous les 3 000 points.
La Commission européenne elle-même a indiqué que le produit intérieur brut de la zone euro devrait reculer de 1,9 % en 2009.
Au troisième trimestre 2008, la zone euro est déjà entrée en récession, laquelle se définit par deux trimestres consécutifs de baisse du PIB. Mais, en 2009, elle devrait connaître la première contraction de son économie sur l’ensemble d’une année depuis sa création, voilà tout juste dix ans, et elle sera de taille !
Bruxelles, un peu avec la foi du charbonnier, anticipe ensuite un léger redressement de la situation, avec une croissance de 0,4 % en 2010.
Toujours selon Bruxelles, toutes les grandes économies de la zone euro devraient être affectées, avec des reculs du PIB de 2,3 % en Allemagne ou de 1,8 % en France cette année.
On notera que cette prévision est parfaitement contradictoire avec le cadrage macroéconomique défini tant dans la loi de finances initiale pour 2009 que dans les deux collectifs, celui du mois de décembre et celui que nous examinons aujourd’hui.
En outre, la Commission prévient : « De grandes incertitudes pèsent encore sur ces prévisions, l’économie mondiale traversant sa crise la plus grave depuis la Première Guerre mondiale. »
La véritable incertitude, serait-on tenté de dire, portera sur l’amélioration de la situation en 2010, la seule certitude étant la chute à court terme de l’activité et les suppressions d’emploi qui iront avec.
Cette récession généralisée devrait s’accompagner d’une hausse du taux de chômage de près de trois points dans la zone euro entre 2008 et 2010. Il devrait atteindre, selon ces pronostics 10,2 % en 2010, dépassant ainsi les 10 % dans la zone euro pour la première fois depuis 1998. Dans certains pays, l’envolée sera spectaculaire. En Espagne, qui bat tous les records, il devrait passer à 18,7 % contre à peine plus de 8 % en 2007. En France, il devrait monter jusqu’à 10,6 %.
Cela signifie, monsieur le ministre, qu’en dépit de moult manipulations de la statistique publique vous ne pourrez pas masquer la réalité : notre pays comptera plus ou moins 3 millions de chômeurs à la fin de l’année.
Après la liquidation de milliers d’emplois sous contrat à durée déterminée et celle de milliers de contrats d’intérim à cause de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, dite loi TEPA, nous allons avoir plan social sur plan social dans l’ensemble des secteurs d’activité, de l’industrie aux services en passant par la construction !
Dans ce contexte, l’Union économique et monétaire apparaît gravement atteinte, chaque pays appliquant le bon vieux précepte du « Chacun pour soi, Dieu pour tous », qui consiste à surenchérir en permanence dans l’engagement des deniers publics au soutien de marchés et d’un secteur financier en pleine panade.
C’est vrai pour le Royaume-Uni, qui, certes, n’est pas dans la zone euro, mais dont la devise se dévalue aussi rapidement que fond le pouvoir d’achat des retraités britanniques résidant dans notre Sud-Ouest ; mais c’est aussi vrai pour la France.
À ce propos, où en est-on de la mise en œuvre du plan de refinancement voté lors du collectif d’octobre, et quels résultats peut-on tirer des premiers mois d’activité des deux structures dédiées, créées par l’article 6 de ce collectif budgétaire à 360 milliards d’euros?
En tout cas, la détérioration de la situation d’une banque comme Natixis, peu de temps après la révélation de l’affaire Madoff, montre la gravité du mal dont souffre notre économie.
Le titre Natixis a ainsi perdu près de 85 % de sa valeur en un an, et l’action ne vaut plus aujourd’hui qu’entre 1,15 euro et 1,20 euro...
Et, pendant ce temps, les plans sociaux, par absence de trésorerie disponible, commencent à se multiplier, le phénomène touchant tous les secteurs d’activité.
La cohérence du maintien coûte que coûte d’une parité élevée pour l’euro est directement mise en question par une telle dégradation de la situation économique.
M. Joaquín Almunia a beau repousser les craintes d’un possible « éclatement » de la zone euro, illustrée par l’intensité de la crise et la hausse des déficits, ou marquée par l’abaissement de la notation financière de l’Espagne, après celle de la Grèce, la démonstration est pleinement faite que les choix monétaristes contenus dans le traité établissant une Constitution pour l’Europe et dans le trompeur mini-traité ou traité de Lisbonne ajoutent leurs effets dévastateurs à une situation déjà détériorée.
En ce début d’année 2009, où le débat européen va encore rebondir en fonction de l’attachement des citoyens européens à participer aux élections de juin prochain et du comportement éventuel des électeurs irlandais, que l’on presse d’accepter le texte de Lisbonne, j’invite tous ceux qui soutiennent l’actuelle construction européenne à s’interroger et à procéder à une véritable analyse critique de la situation.
Soyons clairs, et passons de L’Aveuglement à La Lucidité, à l’exemple du grand écrivain portugais José Saramago, pour qui le processus de construction européenne actuelle est en voie d’échec.
Eu égard aux intentions affichées, il ne fait ni la preuve, ni la démonstration de son efficacité sociale et économique, bien au contraire ! Et ce processus de construction que l’on affuble du nom d’Europe n’apparaît de plus en plus que pour ce qu’il est, c’est-à-dire une soumission de l’ensemble de la société à la sacro-sainte économie de marché.
Paradoxe sans doute : c’est à Lisbonne, dans l’un des pays les plus directement vulnérables de l’Europe, que l’on a signé ce traité, présenté comme la version light du TCE et qui n’en est que le copier-coller.
Laissons la parole, pour le coup, à José Saramago, sur le processus mis en œuvre. Selon lui, « Les peuples n’ont pas élu leurs gouvernements pour que ceux-ci les “offrent” au marché. Mais le marché conditionne les gouvernements pour que ceux-ci leur “offrent” leurs peuples. Avec la mondialisation libérale, le marché est l’instrument par excellence de l’unique pouvoir digne de ce nom, le pouvoir économique et financier. Celui-ci n’est pas démocratique puisqu’il n’a pas été élu par le peuple, n’est pas géré par le peuple, et surtout parce qu’il n’a pas pour finalité le bonheur du peuple. »
Cette grande voix de la littérature lusophone et européenne est à mon avis dans le vrai, monsieur le ministre !
Nous en avons d’ailleurs l’illustration patente tous les jours, dans la politique menée par ce gouvernement et concertée, pour certains aspects – nous avons dit à quel point ils étaient limités –, au niveau européen.
Pour ne citer qu’un exemple, M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances à l’Assemblée nationale, envisage de consacrer, au travers d’un paquet de mesures diverses portant sur le RSA ou la prime pour l’emploi, un milliard d’euros – j’insiste sur ce montant ! – au pouvoir d’achat des ménages, quelques mois après avoir voté, sans sourciller plus que cela, 360 milliards d’euros pour sauver les banques ! Comment ne pas trouver cela indécent ?
Comment ne pas remarquer, dans les deux textes que nous avons à examiner, que la crise économique grave que nous traversons et qui dévalue à vitesse grand V les discours ronflants de la campagne présidentielle, sert de prétexte à mettre en œuvre, encore une fois, des mesures ne concernant que quelques intérêts très déterminés ?
Nous avons fait l’expérience, depuis le printemps 2007, de la vassalisation des politiques publiques au service d’intérêts privés et nous ne cessons de dénoncer ces procédés dans cet hémicycle.
La loi de modernisation de l’économie, que la tornade de la récession économique semble devoir éparpiller au vent, ne contenait-elle pas de nombreuses mesures favorables à quelques grands groupes du bâtiment comme Bouygues, quelques opérateurs de téléphonie comme Free ou Numéricâble, quelques acteurs de l’audiovisuel comme Lagardère ou Bolloré ?
Les créations d’emplois promises par la loi semblent, quant à elles, se faire attendre !
Au contraire, 206 postes vont être supprimés à Radio France Internationale, qui a d’ailleurs été regroupée de force avec France 24 et TV5 au motif de constituer une seule structure pour l’audiovisuel extérieur de la France !
Dans le cadre de la « loi Albanel » sur la réforme de l’audiovisuel public, nous venons de constater à quel point le travail législatif pouvait se trouver soumis à la seule loi du marché et mis au service des intérêts très particuliers de grands groupes privés !
La même remarque vaut d’ailleurs pour l’un des points saillants de la loi de modernisation de l’économie : l’ouverture à la concurrence du livret A, et la distribution de ce produit d’épargne par tous les établissements de crédit, à commencer par ceux qui avaient porté plainte contre le prétendu scandaleux monopole de la Poste et des caisses d’épargne devant la Commission européenne.
À peine votée la loi de modernisation de l’économie, Paribas, ING Direct ou Crédit Agricole ont mené une intense campagne publicitaire pour attirer le chaland, se répandant en offres alléchantes, avec des taux de rémunération garantis supérieurs à 5 %, c’est-à-dire au-delà du taux du livret A !
Cette campagne publicitaire omettait bien entendu de parler du problème posé par la fiscalité pesant sur l’épargne en question et consommant 27 % du taux de rémunération claironné par les messages les plus alléchants.
Je ne sais pas si l’affaire a provoqué l’ouverture d’un grand nombre de livrets A sur les réseaux bancaires banalisés. Dans un entretien accordé lundi à la presse économique, le patron de la Banque Postale évoque la migration de moins de 3 000 livrets A de la Poste vers d’autres opérateurs.
Toujours est-il que, un mois après l’ouverture de la chasse à l’épargnant, voici que l’on procède à la révision à la baisse du taux de rémunération, ramenant brusquement ce dernier de 4 % à 2,5 % !
Pourtant, vous chercherez toujours, monsieur le ministre, à justifier cette mesure, et vous aurez au besoin le soutien de Mme Boutin, dont le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, déclaré d’urgence, n’a pas encore été examiné par l’Assemblée nationale quatre mois ou presque après son passage ici !
Mais la vérité commande de le dire, au-delà de la prétendue divergence entre Matignon et l’Élysée sur le nouveau taux, c’est une pure escroquerie qui est ici mise en œuvre. On a bel et bien, à la demande expresse de quelques établissements financiers, ouvert à la concurrence la distribution du livret A. Cela visait à ce que la clientèle soit attirée autant que possible par les autres réseaux.
Évidemment, comme tout a une raison en ce monde, le but de l’opération est connu : inviter les épargnants soudain refroidis par la baisse du taux à engager leur épargne sur d’autres produits. Et pourquoi pas à la Bourse ? En effet, si le CAC 40 diminue et la valorisation des titres se réduit, les dividendes ne semblent pas devoir s’orienter à la baisse, bien au contraire !
Nous attendons de voir ce qui va être fait, derrière les rodomontades du Président de la République en la matière, pour que bonus, dividendes et autres accessoires de rémunération tendant à devenir le principal de celle-ci cessent d’être distribués dans les plus grandes entreprises, notamment dans celles qui vont procéder cette année à quelques plans sociaux.
Rien dans ce collectif budgétaire comme dans ce plan de relance ne traduit de rupture profonde concernant les choix politiques et économiques à l’œuvre depuis trop longtemps dans notre pays. Ces choix résonnent avec les aspects pris, sur le sol français, par la crise économique dont nous commençons à voir les effets.
La crise semble fournir le prétexte et l’habillage nécessaire pour aller encore plus loin dans la soumission de la loi aux intérêts privés, au mépris de l’intérêt général.
J’ai écouté Mme et MM. les ministres, ainsi que Mme et MM. les rapporteurs. Or, je n’ai rien entendu concernant les ménages, aucune mesure visant à traiter les causes profondes de la crise, aucune remise en cause des critères de gestion et de financement qui sont à la source de la financiarisation et de cette crise !
Considérant que vous allez en rajouter à la crise, que la première urgence est de sécuriser les salaires et les emplois face à des actionnaires qui veulent faire payer la crise au monde du travail, que les profits des dividendes versés aux actionnaires ne sont pas mis à contribution, que les salaires et le pouvoir d’achat populaire qui seraient un efficace soutien à la demande ne sont pas pris en compte dans ce plan, que rien n’est fait s’agissant de la santé comme du logement, qui nécessitent pourtant une intervention, que vous continuez à faire des cadeaux à l’image du paquet fiscal que vous refusez d’annuler, nous nous opposerons sans la moindre équivoque à ces deux lois à la fois inutiles et néfastes pour la grande majorité des habitants de notre pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier.
M. Albéric de Montgolfier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici aujourd’hui en train de discuter d’un troisième collectif budgétaire en quatre mois, conséquence d’une crise économique et financière exceptionnelle !
Le nouveau chiffre du déficit prévisionnel en 2009 que vous avez annoncé hier, monsieur le ministre, est désormais de 4,4 % du PIB.
Face à l’ampleur de la crise, le Gouvernement mène une thérapie de choc. Ont ainsi été déjà engagés 320 milliards d’euros pour la garantie d’État des prêts interbancaires, 40 milliards d’euros pour la recapitalisation des banques, 22 milliards d’euros pour le plan de soutien aux PME et 20 milliards d’euros pour la création d’un fond stratégique d’investissement.
À travers le plan de relance économique annoncé par le Président de la République lors de son discours de Douai, dont le volet fiscal a été adopté le mois dernier et dont le volet budgétaire nous est présenté ici, ce sont 26 milliards d’euros supplémentaires.
Cette somme va permettre d’encourager et de soutenir massivement les investissements des forces vives économiques, à savoir les entreprises mais aussi les collectivités territoriales qui, comme nous le savons bien au sein de la Haute Assemblée, réalisent les trois quarts des investissements publics en France.
Aussi, l’idée d’avancer d’un an le remboursement du fonds de compensation pour la TVA, le FCTVA, soumise à la condition que les collectivités réalisent un plus grand nombre d’investissements en 2009, me semble être une voie efficace de relance.
La commission des finances du Sénat a proposé l’extension à 2008 de la période de référence 2005-2007. L’Assemblée nationale avait exclu l’année 2008 de la période de référence, le niveau réel des investissements d’une année ne pouvant être constaté qu’au travers des comptes administratifs ; or les comptes de 2008 n’étaient pas alors encore tous disponibles, et l’année 2008 semblait être une année d’augmentation des investissements.
Cela étant, la commission des finances a estimé qu’une majorité de comptes seraient disponibles dans un délai suffisamment rapproché et que l’année 2008 serait sans doute une année de diminution des investissements.
Cela mérite des éclaircissements. En effet, je note ici une différence entre l’avis de la commission et celui du Gouvernement, lequel semble prévoir un pic d’investissements en 2008, équivalent à celui de 2007, bien que l’année 2008 fût une année électorale.
Or, au regard du cycle électoral et des investissements, une année d’élection correspond généralement à une année de moindres investissements, le temps notamment que la nouvelle équipe se mette en place et que se définissent les futures priorités en matière d’investissement.
J’ai par ailleurs déposé un amendement dont l’objet est de ne pas sanctionner des collectivités pour des investissements qui n’auraient pas pu être réalisés du fait d’une carence ou d’un retard de l’État ou d’autres collectivités au titre de ses financements.
Ainsi, par exemple, de nombreuses communes ne peuvent réaliser des travaux d’investissement sur le patrimoine protégé en raison des retards de versements des directions régionales des affaires culturelles, les DRAC. Il conviendrait de ne pas pénaliser davantage les collectivités qui ont souhaité investir.
Si le plan de relance est concentré sur l’investissement, c’est qu’il s’agit de ne pas léguer à nos enfants un actif net dégradé. Il est plus acceptable de s’endetter dans la mesure où cet endettement est le résultat d’investissements dans des logements ou de grandes infrastructures dont le profit sera légué aux générations futures.
Le groupe UMP partage avec le Gouvernement cette vision de la relance économique, s’opposant ainsi à ceux qui se font le chantre de la relance par la consommation et le pouvoir d’achat.
Certes, derrière des concepts économiques se cachent des réalités humaines, des personnes se retrouvant au chômage, des personnes actives et pourtant en situation précaire, pour des raisons de logement par exemple.
Mais le Gouvernement a déjà pris des mesures de soutien du pouvoir d’achat avant le plan de relance.
Je tiens à le rappeler ici, les prélèvements obligatoires ont diminué de 10 milliards d’euros en 2008 et en 2009, et les prestations sociales ont été revalorisées d’un montant quasi équivalent – 9 milliards d’euros –, et ce sans même prendre en compte le RSA.
Il convient à ce titre de rappeler l’effort budgétaire exceptionnel pour les bénéficiaires du RSA qui permettra de soutenir le pouvoir d’achat des personnes les plus démunies.
L’idée d’une relance par la consommation est donc un faux débat. Le plan de relance qui nous est proposé par le Gouvernement met l’accent sur l’investissement qui stimule la demande, c’est-à-dire l’emploi, partant le pouvoir d’achat et donc la consommation : c’est un cercle vertueux !
Il ne faut pas se focaliser sur la seule consommation, car elle ne permet pas d’investir pour l’avenir. Au-delà des dogmatismes idéologiques, l’approche pragmatique doit primer.
À cet égard, il faut se souvenir des précédents plans de relance fondés sur la consommation, celui de 1975 et celui de 1981, qui n’avaient pas eu les effets escomptés. Celui de 1980 avait d’ailleurs contraint M. Fabius à un plan de rigueur.
De plus, comme cela a été rappelé tout à l’heure, la consommation en France a mieux résisté que chez nos partenaires, notamment britanniques et espagnols. Le secteur de l’automobile en est l’illustration, avec une baisse très contenue sur 2008 alors que nos voisins ibériques, par exemple, enregistraient un recul de près de 25 %.
En outre, le poids de nos dépenses publiques dans notre système social a joué un rôle de stabilisateur dans cette crise, en préservant la capacité des ménages à disposer de leurs revenus pour d’autres dépenses.
De surcroît, notre commerce extérieur étant très déficitaire depuis plusieurs années, une relance de la consommation ne pourrait qu’aggraver son solde et celui de la balance des paiements. Ce n’est à l’évidence pas souhaitable.
Le plan de relance s’inscrit ainsi parfaitement dans le cadre concerté et coordonné défini au plan européen et repose sur des mesures rapides, temporaires et ciblées : il vient à temps grâce à une mise en place extrêmement prompte ; il a une durée limitée, l’année 2009 ; il est parfaitement ciblé sur l’investissement public et les entreprises, mais également sur des secteurs particulièrement sensibles en période de crise, comme le logement et l’automobile.
Sur le plan formel, il est proposé de créer une nouvelle mission dans le budget général, pour une durée limitée de deux ans, avec trois programmes assez vastes, sous votre responsabilité, monsieur le ministre chargé de la mise en œuvre du plan de la relance : un premier programme exceptionnel d’investissement public concerne les secteurs de la défense, des transports, de l’enseignement supérieur, de la recherche et du patrimoine ; un deuxième programme consiste en un soutien exceptionnel aux entreprises et à l’emploi ; enfin, un troisième programme sera mené en faveur du logement et de la solidarité.
Je me félicite de la souplesse de gestion qui prévaudra, avec la possibilité soit d’une gestion directe, soit d’une délégation de gestion, soit de transferts de crédits sur des programmes ministériels.
Je me réjouis également de la mise en œuvre de la traçabilité des dépenses, que nous pourrons désormais contrôler.
L’intégralité de ces crédits devra être consacrée à la mise en œuvre effective du plan, et non au financement de dépenses récurrentes. Conformément à la LOLF, une batterie d’objectifs et d’indicateurs simples fondés sur la rapidité d’exécution et sur l’impact sur l’emploi permettra d’apprécier les résultats de ce plan de relance.
Pour que l’action du Gouvernement soit efficace, il faut non seulement décider des mesures, mais également – c’est une condition tout aussi importante – assurer leur mise en œuvre rapide : autrement dit, les investissements ainsi encouragés ne doivent pas seulement être décidés dans leur principe, mais doivent effectivement voir le jour.
Pour cela, il est nécessaire de desserrer le carcan réglementaire, qui ralentit souvent à l’excès les procédures : je pense notamment aux seuils de marchés publics, à la loi sur l’eau, à la déclaration d’utilité publique et à l’archéologie préventive. Dans tous ces domaines, le fardeau doit être allégé.
Ainsi, en ce qui concerne l’archéologie préventive, sujet que nous, élus locaux, connaissons bien, le groupe UMP n’est pas favorable à une augmentation de la redevance et se félicite des propositions tendant à accroître les crédits et à raccourcir les délais.
En matière de concessions autoroutières, j’ai déposé un amendement, de même que mon collègue Jacques Gautier, visant à accroître d’un an leur durée en échange de l’engagement pris par les sociétés concessionnaires de réaliser des travaux d’aménagement. Ce type de mesures permet de soutenir l’activité et d’améliorer les infrastructures, sans surcoût pour les finances publiques. Il faudra aller encore plus loin en élargissant les périmètres des concessions pour réaliser des tronçons d’autoroutes ou des liaisons entre autoroutes qui sont tant attendus par certains territoires.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Albéric de Montgolfier. Cela suppose d’engager avec la Commission européenne une négociation, qui sera sans doute serrée, sur l’adossement, comme l’ont fait déjà certains de nos voisins.
C’est dans ces conditions que le projet de loi d’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés complète très judicieusement le projet de loi de finances rectificative pour 2009. Dans ce collectif, je le rappelle, la totalité des autorisations d’engagement interviendront en 2009.
Pour toutes ces raisons, le groupe UMP aborde la discussion de ces deux textes dans un esprit constructif et positif, et vous proposera, sur certains points, d’aller encore plus loin dans cette volonté de relance. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, madame, monsieur les rapporteurs, c’est dans un environnement particulièrement difficile que nous sommes amenés à nous prononcer cette semaine sur deux textes en discussion commune susceptibles d’orienter la croissance tout au long de l’année 2009.
Il convient tout d’abord, à mon avis, de relativiser le terme « croissance ». L’environnement est incontestablement difficile sur le plan international, puisque cette crise peut, par certains côtés – ses conséquences extrêmement redoutables sur l’emploi et sur les faillites d’entreprises notamment –, être comparée à celle de 1929.
Même si certains ne s’expriment guère sur ce sujet, cette crise offre l’occasion de remettre en cause une forme de capitalisme spéculatif dans laquelle l’économie virtuelle, parée voilà encore quelques mois de toutes les vertus et considérée comme la forme suprême de l’intelligence économique, prime sur l’économie réelle.
L’examen des deux textes aurait donc pu permettre de débattre de mesures visant à remédier au déséquilibre induit par la primauté du système financier, en proposant une aide soutenue aux populations fragilisées, notamment les chômeurs et les travailleurs précaires.
Monsieur le ministre, vous auriez pu également saisir l’occasion de cette crise pour relancer le pouvoir d’achat. Mais vous avez balayé cette idée d’un revers de main, estimant qu’une telle relance présentait certains dangers. Vous avez soulevé des prétextes fallacieux et transformé vos arguties en arguments. Nous avons même relevé certaines incohérences : ainsi, vous avez annoncé un plan de relance automobile, ce que nous ne saurions vous reprocher ; mais reconnaissez qu’il relève de la consommation et non de l’investissement !