M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour la clarté des débats, nous avons décidé, sur proposition de la commission spéciale, d’examiner séparément l’amendement de suppression n° 494.
L’amendement n° 494, présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Claude Danglot.
M. Jean-Claude Danglot. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites sur l’article 27 dans les interventions précédentes.
Je voudrais insister particulièrement sur le fait que cet article risque également d’avoir des effets pervers sur l’emploi. Or la question de l’emploi et des salaires ne saurait être dissociée de celle du pouvoir d’achat. En effet, les consommateurs que vous dites vouloir aider sont aussi les travailleurs dont vous refusez d’augmenter les salaires, que vous maintenez dans la précarité en mettant en cause le droit du travail, et que vous voudriez voir travailler jusqu’à 65 heures par semaine – à en croire la dernière directive européenne.
La situation des salariés de ces multinationales du commerce, qui sont parmi les plus mal payés, est extrêmement précaire, la tension sociale étant très forte dans ce secteur. Celle de la majorité des consommateurs qui passent à leurs caisses n’est guère meilleure, et leurs conditions de vie et de salaire ne font que s’aggraver avec votre politique néfaste.
C’est à ce prix que les profits de ces grands groupes peuvent atteindre des sommets, et votre travail, aujourd’hui, par le biais de ce projet de loi, consiste à encore mieux les servir. Cela résume bien votre conception toute particulière de la modernité, que vous ne cessez d’invoquer dans tous vos discours. Casser les services publics, cela ne vous suffit pas, il vous faut vous en prendre à notre système de protection sociale, aux retraites et à la santé. Avec ce projet de loi de modernisation de l’économie, c’est au tour du petit commerce. Quel gâchis !
Alors que chacun constate que les phénomènes de concentration dans le secteur commercial ont atteint des sommets, vous souhaitez les amplifier plus encore. Vous dites pouvoir créer ainsi 50 000 emplois, mais combien allez-vous en détruire ? Sur ce sujet, vous restez silencieux !
À la lecture de l’article 27, je me suis demandé si vous aviez bien analysé les conséquences de ce texte sur notre environnement. Vous allez favoriser les très grandes surfaces à la périphérie des villes, en incitant les consommateurs à effectuer toujours plus de déplacements, ce qui est en contradiction totale avec les velléités du Grenelle de l’environnement.
Dans mon département du Pas-de-Calais, les grandes zones commerciales sont déjà fortement implantées à la périphérie des villes, pour les raisons qui ont été évoquées tout à l’heure par notre collègue Nathalie Goulet.
Les conséquences sont déjà visibles : nous assistons à la désertification commerciale des centres-villes, ce qui rend les trajets des consommateurs de plus en plus longs et coûteux. En ces temps de crise pétrolière, c’est tout de même un comble !
D’ailleurs l’un des industriels influents de notre région, M. Bonduelle, vient de déclarer récemment que le véritable centre-ville du bassin minier, c’est Auchan et sa zone commerciale. C’est tout dire !
Vous allez détruire une grande partie des emplois de ce secteur et précariser toujours plus. Cette modernité, je la refuse ! Je vous demande donc, mes chers collègues, d’adopter cet amendement de suppression, car l’article 27 va à l’encontre d’un aménagement équilibré du territoire.
Mme Odette Terrade. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Le groupe CRC demande la suppression de cet article. Or, si l’on en juge tant par le nombre d’amendements déposés que par la présence de nos collègues en séance, je crois que celui-ci mérite vraiment d’être débattu. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 494.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Je pense avoir expliqué l’objectif que le Gouvernement s’est fixé en proposant l’article 27. Vous comprendrez donc, mesdames, messieurs les sénateurs, que je ne sois pas favorable à sa suppression.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 646 est présenté par M. Détraigne et les membres du groupe Union centriste-UDF.
L'amendement n° 794 est présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer le 1° du I de cet article.
La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l’amendement n° 646.
M. Yves Détraigne. L’article L. 750-1 du code de commerce fixe les principes de l’équipement commercial de la manière suivante : « Les implantations, extensions, transferts d’activités existantes et changements de secteur d’activité d’entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d’aménagement du territoire, de la protection de l’environnement et de la qualité de l’urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu’au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. »
On ne peut qu’être d’accord avec cette dernière phrase ! Cependant, l’article 27 que nous examinons ce soir vise précisément à la supprimer. Il me semble donc impératif, si l’on veut conserver un commerce équilibré sur le territoire, de conserver, parmi les principes de l’équipement commercial, le maintien des activités commerciales dans les zones rurales et de montagne, ainsi que dans les centres-villes. C’est l’objet de l’amendement que je vous propose d’adopter, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l’amendement n° 794.
M. Daniel Raoul. Notre amendement étant identique à celui de notre collègue Yves Détraigne, nous proposons, pour les raisons qu’il a lui-même avancées, de restaurer, en tant que principe fondateur des politiques locales d’urbanisme commercial, la mention relative au « maintien des activités dans les zones rurales et de montagne » – que nous avons d’ailleurs longuement évoquées la nuit dernière – et au « rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine ».
Cet objectif avait été introduit en décembre 2000 dans le code de commerce par la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, qui avait rendu cohérents un certain nombre d’outils d’aménagement sur le territoire. Cette loi avait aussi rendu obligatoire la compatibilité des autorisations d’exploitation commerciale avec les schémas de cohérence territoriale et renforcé les critères liés au « développement durable » devant présider aux décisions des commissions départementales d’équipement commercial, les CDEC.
Que proposez-vous aujourd’hui, monsieur le secrétaire d’État ? La « concurrence loyale », et vous venez d’évoquer ce point. S’agit-il d’une concurrence loyale entre les gros distributeurs et les petits artisans ? En l’occurrence, la question est de savoir non pas si la concurrence peut être loyale, mais bien si les petits peuvent survivre aux gros, et si ces derniers sont autorisés à développer toutes les stratégies pour gagner toujours plus de parts de marché. C’est bien ce qui a été évoqué tout à l’heure par les différents intervenants, y compris par l’ancien Premier ministre M. Raffarin.
Votre proposition, apparemment de nature rédactionnelle, tendant à supprimer la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 750-1 du code de commerce pourrait prêter à sourire si elle ne risquait pas d’avoir des conséquences graves en pratique.
En effet, il ne sera plus possible, si cet article est adopté en l’état, d’invoquer les priorités d’aménagement du territoire dans les décisions de refus d’implantation des CDEC. Certes, de tels refus ne représentent que 25 % des décisions. Mais, par ailleurs, ce principe ne pourra plus servir dans les procédures contentieuses.
L’aménagement du territoire ne doit pas rimer avec concurrence, la péréquation étant alors délaissée au profit de la dérégulation.
Dans nos rangs, nous sommes convaincus, à l’inverse, que le maintien d’activités dans certains territoires exige des dispositifs de régulation et d’aide à l’installation, ainsi que des mécanismes de péréquation.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Daniel Raoul. Pour lutter contre la désertification des zones rurales et de montagne, et afin de préserver l’équilibre précaire de certaines zones sensibles, nous vous proposons de maintenir la mention en question, laquelle, malgré ce que l’on a parfois pu nous objecter, n’est d’ailleurs pas contraire aux dispositions de l’article 15 de la directive 2006-123 du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur.
Cet amendement s’inscrit par ailleurs dans la même logique d’approche territoriale que celle qui a prévalu hier soir, lorsque le Sénat a adopté à l’unanimité l’amendement n° 438. Une cohérence de vote devrait donc prévaloir...
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. À nos yeux, il est intéressant de rétablir la phrase qui permet d’affirmer l’objectif de maintien des activités dans les zones rurales et de montagne, ainsi que dans les centres-villes.
M. Jean-Pierre Raffarin. Merci !
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Nous sommes donc favorables à ces amendements identiques, bien qu’un doute subsiste quant à la référence indirecte aux tests économiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement considère que les amendements identiques nos 646 et 794 sont satisfaits, dans la mesure où l’objectif en question est inscrit dans la première phrase de l’article L. 750-1 du code de commerce. En effet, il y est fait référence aux « exigences d’aménagement du territoire, de la protection de l’environnement et de la qualité de l’urbanisme », ce qui englobe la nécessité de veiller au maintien de l’activité dans les zones particulières que sont les zones rurales, les zones de montagne et les centres-villes.
Par ailleurs, le texte proposé pour l’article L. 752-6 du code de commerce prévoit expressément, dans les critères d’appréciation des projets, « l’animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ».
Pour toutes ces raisons, messieurs Détraigne et Raoul, je vous demande de bien vouloir retirer vos amendements.
M. le président. L’amendement n° 646 est-il maintenu, monsieur Détraigne ?
M. Yves Détraigne. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 794 est-il maintenu, monsieur Raoul ?
M. Daniel Raoul. Je le maintiens également, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Monsieur le secrétaire d’État, êtes-vous venu pour écouter le Sénat, ou pour lui imposer un texte dont l’adoption est déjà acquise dans votre esprit et dans celui du Gouvernement ?
Au Sénat, nous avons pour habitude d’être les porte-parole et les défenseurs des zones les plus en difficulté, qu’il s’agisse d’ailleurs des zones rurales ou désertifiées ou des quartiers urbains difficiles.
Nous vous demandons, monsieur le secrétaire d’État, d’accepter que ces amendements soient introduits dans le texte de loi. Ce sera de votre part et de la part du Gouvernement un signe fort, qui témoignera de votre volonté d’aboutir à un texte équilibré, et non pas à une concurrence exacerbée au profit des territoires les plus riches et, surtout, de la très grande distribution. (Mme Odette Herviaux applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Nous soutenons ces amendements identiques.
Depuis la loi Royer, le code de commerce pose une exigence particulière, qui semble sage, en matière d’équipements commerciaux : « Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu’au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. »
Les commissions départementales d’équipement commercial délivrent les autorisations en fonction de ce principe et de la conformité des projets aux exigences d’aménagement du territoire, de protection de l’environnement et de qualité de l’urbanisme.
De plus, les équipements commerciaux doivent permettre la modernisation des commerces, afin de les adapter aux besoins et aux attentes des consommateurs.
Le dispositif prévu à l’article 27 du projet de loi met en cause ces objectifs et, par la même occasion, l’équilibre fragile des différentes formes de commerce.
En effet, le 1° du I de cet article supprime l’exigence de maintien des activités et de rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. Ce faisant, il porte un coup fatal au maintien de l’artisanat et au commerce de proximité dans les centres-villes.
Encore une fois, le Gouvernement, pour mener à bien ses politiques de déréglementation au profit de la grande distribution, se cache derrière les dispositions européennes. En effet, la Commission considère, en se fondant notamment sur des considérations de nature économique, que la procédure française n’est pas justifiée ni proportionnée aux objectifs d’intérêt général visés. Cela justifierait, selon vous, la suppression de la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 750-1 du code de commerce.
Nous pensons au contraire que l’objectif en question peut être maintenu dans le respect du droit communautaire, car il répond aux critères de protection de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, qui relèvent de l’intérêt général et qui sont donc de nature à justifier des restrictions aux libertés garanties par le traité européen.
Pour toutes ces raisons, nous soutenons ces amendements identiques. S’ils sont satisfaits, pourquoi soutenir qu’ils sont inutiles ? À la limite, leur adoption pourrait aboutir à une redondance : en quoi serait-ce gênant ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement a demandé le retrait de ces amendements identiques. À défaut, il s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. (Marques d’approbation sur de nombreuses travées.)
M. Gérard Larcher, président de la commission spéciale. C’est un Gouvernement mature !
M. Daniel Raoul. Il est en progrès !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 646 et 794.
(Les amendements sont adoptés à l'unanimité.)
M. le président. L'amendement n° 149, présenté par Mme Lamure, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
3° Le troisième alinéa est supprimé.
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement tend à tirer les conséquences de l’adoption, à l’article 26, d’un amendement proposé par la commission spéciale. Il s'agit d'une mesure de clarification rédactionnelle visant à regrouper dans le même article du projet de loi toutes les modifications apportées à l'article L. 750-1 du code de commerce.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 831 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Elle conditionne son avis à la présentation par le demandeur de l'autorisation, d'engagements comportementaux consistants en des mesures pérennes de formation professionnelle et de promotion sociale des salariés ainsi qu'en une politique d'approvisionnement significatif auprès des producteurs régionaux établis sur une contractualisation des relations commerciales. »
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Cet amendement vise à faire en sorte que les futures commissions départementales d’aménagement commercial, ou CDAC, prennent leurs décisions au regard d’un certain nombre de critères sociaux.
En précisant que la commission « conditionne son avis à la présentation, par le demandeur de l’autorisation, d’engagements comportementaux consistant en des mesures pérennes de formation professionnelle et de promotion sociale des salariés ainsi qu’en une politique d’approvisionnement significatif auprès des producteurs régionaux établis sur une contractualisation des relations commerciales », selon les termes de notre amendement, la loi affirmerait clairement l’objectif de « mieux-disant social » dans le secteur du commerce et de la distribution.
Aujourd’hui, les demandes soumises aux actuelles CDEC sont strictement économiques : zones de chalandise, marché théorique, chiffres d’affaires attendus, etc. Aucune pièce spécifiquement sociale n’est à porter à la connaissance de la CDEC.
L’étude d’impact qui doit être produite est certes orientée en fonction des critères décrits à l’article L. 752-6 du code de commerce, mais ceux-ci ignorent complètement les critères sociaux. Le quatrième critère évoque seulement la question de l’emploi en termes quantitatifs.
Or, en libéralisant les implantations de grandes surfaces et en favorisant la multiplication des magasins de maxi-discount, vous choisissez la guerre par les prix et, donc, la concurrence vers le bas, avec une pression à la baisse sur les salaires, une pression sur le temps de travail pour dégager de nouvelles marges et pouvoir adapter les prix.
Tout cela aura évidemment des conséquences avec une pression accrue sur les conditions de travail, qui sont déjà très mauvaises.
Grande première cette année, les salariés de la distribution ont lancé une série de mouvements sociaux très suivis pour dénoncer leurs conditions de travail quotidiennes, et leurs grèves, que nous avons vues – car nous les voyons, nous, les mouvements sociaux dans notre pays ! –, ne nous ont pas paru insignifiantes.
Quant au respect des petits commerces et des producteurs locaux, ce point est tout juste évoqué dans quelques-uns de ces critères.
Or, pour ne donner qu’un seul exemple vécu par une part croissante de la population urbaine dans notre pays, la promotion des circuits courts de distribution contribue, elle aussi, à la baisse des prix au consommateur, grâce à l’économie réalisée en matière de transports, d’énergie et sur les marges des divers intermédiaires qui parasitent les réseaux d’approvisionnement de la grande distribution. Les Parisiens ayant fait le choix de s’approvisionner dans des magasins en ligne directe avec les producteurs le savent : ils paient moins cher leurs légumes achetés à des producteurs locaux. Et c’est tant mieux, car ils mangent mieux !
La philosophie de nos propositions est finalement très simple : il s’agit de mettre en place un dispositif intégré à l’urbanisme de droit commun, qui permette d’approuver les choix d’implantation quand ils respectent les principes à la fois du développement durable et d’un développement respectueux de la diversité économique locale.
Aujourd’hui, six centrales d’achat se partagent 85 % du marché en France. Comment préserver les producteurs locaux, sinon en incitant fortement les distributeurs à réserver une part de leur offre, notamment alimentaire, à des produits en circuits courts ?
Certes, l’outil que constitue le SCOT n’est pas encore tout à fait au point sur tous les territoires, ce qui justifie certainement une période transitoire. Mais il n’en reste pas moins l’outil unique et incontournable d’expression des orientations stratégiques pour les élus et le pivot du fonctionnement d’un dispositif rénové et efficace de régulation des implantations commerciales dans notre pays.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Cet amendement va très clairement à l’encontre du droit européen, et M. Repentin le sait bien. D’ailleurs, s’il relit le rapport, il verra très précisément pourquoi les implantations commerciales ne peuvent pas être soumises à des conditions relatives au tissu économique local.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Outre la difficulté de mettre en œuvre de tels critères d’engagements sociaux et comportementaux, comme l’a très bien dit Mme le rapporteur, cet amendement serait contraire au droit communautaire, dans la mesure où les critères sociaux sont assimilés à des tests économiques et que nous proposons précisément de supprimer ces tests dans le cadre des nouvelles dispositions relatives aux commissions de développement et d’aménagement commercial.
Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 795 rectifié, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 2° du III de cet article :
2° Après le c du 1° du même II, il est inséré un d) ainsi rédigé :
« d) le président du syndicat mixte de schéma de cohérence territoriale auquel adhère la commune d'implantation, le cas échéant, ou son représentant. »
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Il s’agit d’un amendement de bon sens, qui vise à compléter au 2° du III de l’article 27 la composition de la commission départementale d’aménagement commercial.
Votre proposition initiale consiste à supprimer la présence des présidents de la chambre de commerce et de la chambre de métiers, ce qui a au moins le mérite de nous mettre en conformité, si j’ose dire, avec les observations faites par Bruxelles.
Mais vous avez ajouté, monsieur le secrétaire d'État, le représentant du département et un adjoint au maire. Avec votre solution, l’intercommunalité, qui est compétente en matière d’aménagement, de transport et de développement économique devient sous-représentée, avec un seul représentant pour deux représentants de la commune d’implantation du projet.
Quant au président du syndicat mixte chargé du SCOT, il ne figure même pas parmi les membres de la CDEC, et ce alors que le SCOT est la structure même de mise en œuvre du projet d’aménagement durable du bassin de vie et que c’est à cette échelle que sont faits les principaux choix d’orientation de développement.
Cet amendement vise donc à corriger ce que nous considérons presque comme une erreur et à restituer aux élus du SCOT leur place légitime.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Sur le fond, cet amendement, si j’ai bien compris, s’efforce de donner plus de poids à l’intercommunalité du SCOT. La commission est donc plutôt favorable dans l’esprit.
Cependant, l’amendement ne prévoit pas de solution de repli s’il n’y a pas de syndicat mixte chargé du SCOT et les mots « le cas échéant » signifient que, dans cette hypothèse, la CDAC comprendrait un membre en moins.
Par conséquent, devant cette sorte de flou qui entoure votre amendement, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les raisons invoquées par Mme le rapporteur.
D’abord, l’amendement ne prévoit pas de formule de remplacement dans l’hypothèse où il n’existe pas de SCOT. Ensuite, il aurait pour effet de porter le nombre des représentants intercommunaux au sein de la CDAC à trois sur cinq.
M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. À la suite de la remarque fondée de Mme le rapporteur, je modifie l’amendement en ajoutant les mots « ou, à défaut, le maire adjoint de la commune support ».
Si nous avions débattu de la composition des CDAC après l’examen des dispositions relatives au renforcement des SCOT et sur lesquelles, j’en suis sûr, nous aboutirons à un accord, il nous serait apparu incongru à tous qu’un représentant du SCOT ne figure pas dans la CDAC, qui aura à déterminer si oui ou non l’implantation est légitime sur le territoire.
Aujourd'hui, sont présents au sein des CDEC, qui s’appelleront demain CDAC, les élus qui ont un intérêt direct à l’implantation de la surface qui fait la demande : le maire de la commune support, le président de l’EPCI qui a une compétence économique ou, à défaut, le conseiller général, et le maire de la commune la plus importante au sein du périmètre, en dehors de la commune support.
Or nous nous apprêtons à adopter une disposition visant à rendre le dispositif visible et compréhensible par le biais d’un document opposable qui est le SCOT.
Ne vous paraîtrait-il pas incongru, je le répète, que les élus porteurs du territoire, qui ont déterminé les besoins en matière commerciale, n’aient pas leur mot à dire pour s’assurer que la CDAC applique réellement les dispositions du document servant de base pour accepter ou refuser l’implantation ?
Si, donc, nous avions discuté de la composition des CDAC après la disposition relative au SCOT, nous aurions tous jugé naturel de considérer que, à partir du moment où l’on se réfère au SCOT, son président, ou le représentant de ce dernier, siège au sein de la CDAC.
Cela me semble de bon sens, mais je peux comprendre que, comme nous débattons d’un dispositif qui est à construire, nous n’ayons pas eu vraiment le temps d’y réfléchir collectivement.
C’est en tout cas une suggestion que je vous fais.
M. le président. Je suis donc saisi de l'amendement n° 795 rectifié bis, présenté par M. Repentin, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 2° du III de cet article :
2° Après le c du 1° du même II, il est inséré un d) ainsi rédigé :
« d) le président du syndicat mixte de schéma de cohérence territoriale auquel adhère la commune d'implantation, le cas échéant, ou son représentant, ou à défaut le maire-adjoint de la commune support. »
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Lamure, rapporteur. Je ne suis pas d’accord sur la rédaction de votre proposition, car elle laisse penser qu’il s’agit de remplacer le président du conseil général. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. S’il s’agit de remplacer le président du conseil général, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Pourquoi ?