M. le président. La parole est à M. Paul Girod. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Paul Girod. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé de l'emploi.
Monsieur le secrétaire d’État, jamais, depuis quinze ans, le taux de chômage en France n’avait atteint un niveau aussi bas. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Jean-Claude Carle. Eh oui !
M. Paul Girod. Baissant de manière continue depuis 2006, il s’élève à 7,2 % cette année, soit 1,2 point de moins qu’il y a un an.
M. René-Pierre Signé. Mensonge !
M. Paul Girod. Nos concitoyens ont tendance à penser que cette baisse est insignifiante, mais par rapport aux 8,5 points de départ, cela représente tout de même 14 % de chômeurs en moins ! On ne le dit pas suffisamment, et il faut que chacun en soit conscient.
M. René-Pierre Signé. C’est parce qu’il y a moins de demandes ; c’est la démographie !
M. Paul Girod. Il s’agit peut-être d’un raisonnement de mathématicien, mais c’est la réalité !
Cette embellie profite à tous, des seniors aux moins de vingt-cinq ans,…
M. René-Pierre Signé. C’est faux !
M. Paul Girod. …et les chiffres qui sont actuellement publiés sont incontestables : l’INSEE est indépendante et elle applique les méthodes du Bureau international du travail.
Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on contesterait le fait que le Président de la République et le Gouvernement ont œuvré, en revalorisant le travail, dans le sens de ce que nous souhaitons tous,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Combien d’emplois en plus ?
M. Paul Girod. …quelles que soient les protestations des uns ou des autres.
M. René-Pierre Signé. C’est la démographie !
M. Paul Girod. Monsieur le secrétaire d’État, ma question est simple. Aujourd’hui, le retour au plein-emploi est envisageable. Quelles méthodes entendez-vous appliquer dans les mois à venir pour prolonger vos actions et résoudre enfin ce problème récurrent ? Chacun d’entre nous, sur quelque travée qu’il se trouve, sait, au fond de sa conscience, pourquoi nous en sommes arrivés là. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et sur des travées de l’UC-UDF.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Moins de pouvoir d’achat, moins de service public ; comment allez-vous faire pour continuer !
M. Didier Boulaud. Vive le RSA !
M. René-Pierre Signé. Emplois précaires !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui nous permet de revenir sur ce qui est une très bonne nouvelle – il faut en effet y revenir sans relâche ! –, à savoir les très bonnes performances de notre économie : le taux de chômage, au premier trimestre de 2008, se situe à 7,2 %.
M. Didier Boulaud. Parlez-nous du RSA !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Ce chiffre est hautement symbolique, car c’est le meilleur résultat que la France ait connu depuis 1981,…
M. Éric Doligé. Très bien !
M. René-Pierre Signé. C’est faux ! Ce sont des emplois précaires !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. …année à partir de laquelle elle est entrée dans une période de chômage de masse. Le taux de chômage a reculé de près de deux points en deux ans, ce qui représente 500 000 chômeurs de moins.
M. René-Pierre Signé. Ce n’est pas vrai !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il ne s’agit pas seulement de statistiques : au travers de l’emploi, ce sont des familles qui retrouvent l’espoir ! (Très bien ! sur les travées de l’UMP.)
Au premier trimestre, l’économie française a continué à créer de nombreux emplois. Aujourd’hui même, le chiffre a été révisé à la hausse : près de 70 000 emplois ont été créés dans le secteur marchand de notre économie, contrairement aux prédictions des oiseaux de mauvais augure, qui se repaissent uniquement des mauvaises nouvelles.
M. René-Pierre Signé. Ce sont des emplois à temps partiel !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Certains se déclarent surpris par ces chiffres. D’autres ont cherché à faire croire qu’il s’agissait d’une baisse en trompe-l’oeil.
M. René-Pierre Signé. Eh oui !
M. Jacques Mahéas. Elle est conjoncturelle !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Regardons, là encore, la réalité. Cette amélioration de l’emploi n’a pas été achetée au prix d’une plus grande précarité. Le nombre de CDI est resté parfaitement stable en 2007, à 86 %. Nous sommes très vigilants, Christine Lagarde et moi-même, et nous surveillons ces indicateurs. (M. René-Pierre Signé s’exclame.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Surveillez les chiffres !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Bien entendu, cela ne suffit pas, parce que, derrière ces bons résultats, il y a la réalité : certains de nos compatriotes peuvent se trouver confrontés à des difficultés. Notre volonté est donc non pas de nous contenter d’une gestion conjoncturelle des chiffres de l’emploi,…
M. Jacques Mahéas. C’est pourtant ce qui se passe !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. … mais d’aller plus loin, afin de mettre en place les nouvelles bases du marché de l’emploi de demain : favoriser l’emploi des seniors ; faire en sorte que tous ceux qui, sur le terrain, en ont besoin – qu’il s’agisse de PME ou de ceux de nos compatriotes qui peuvent être les plus fragilisés – puissent bénéficier d’une formation professionnelle ; mieux définir les droits et devoirs des demandeurs d’emploi – ce sera l’objet d’un projet de loi qui sera soumis en première lecture au Sénat, et je m’en réjouis ; améliorer profondément le service public de l’emploi.
M. Didier Boulaud. Et le RSA ?
M. René-Pierre Signé. Et la fonction publique ?
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il est vrai que notre pays traverse une période difficile, due à un environnement défavorable : crise internationale, hausse des prix du pétrole. Cependant, lorsqu’on a le courage d’entreprendre des réformes, les résultats sont au rendez-vous. La baisse du chômage en est une très bonne illustration ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées de l’UC-UDF et du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
Mon collègue Didier Boulaud a déjà interrogé le Gouvernement sur le Livre blanc de la défense. En particulier, il souhaitait savoir si, après un débat au Parlement, pour lequel chaque groupe politique se verra imparti un temps de parole de quinze minutes – ce qui est dérisoire, s’agissant d’un tel document ! – …
M. Gérard Longuet. C’est insuffisant !
M. Jean-Louis Carrère. …nous allions voter sur ce texte ou simplement en rester au stade de l’information.
Je vous repose la question, monsieur le secrétaire d’État, en espérant, cette fois, obtenir une réponse positive.
Nous comprenons que notre système de défense et de sécurité doive évoluer de façon telle que la sécurité de notre pays soit assurée ; c’est une évidence, et nous y sommes très attachés.
Nous savons qu’il faut consacrer des moyens à la modernisation des équipements, à l’amélioration de la condition militaire, et garantir le caractère opérationnel de nos forces et de nos techniques.
Mais la démarche que vous avez entreprise nous fait douter de votre capacité à mener à bien cette évolution. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Nous aurions préféré être associés à l’élaboration d’une stratégie de défense européenne, avant que ne soient posées les questions budgétaires, en d’autres termes, que la charrue ne soit pas mise avant les bœufs.
Votre méthode consiste à imposer une révision générale des politiques publiques également en matière de défense, que nous découvrons par voie de presse, d’ailleurs, et qui entraîne la fermeture – la « restructuration », comme vous dites – d’un grand nombre de sites, de régiments, de bases et d’écoles militaires. La gendarmerie aussi sera gravement touchée.
À l’évidence, vous cherchez à réaliser des économies à tout prix et à dissimuler des manques substantiels dans l’exécution de la loi de programmation militaire.
Votre méthode, de surcroît, traduit un manque de concertation, de consultation. Vous essayez – pardonnez-moi l’expression ! – de « noyer le poisson » en recevant ou en faisant recevoir par vos services, ici ou là, des élus inquiets et mécontents.
On murmure même que votre méthode consisterait à satisfaire vos amis et à punir des villes qui n’auraient pas bien voté aux élections municipales. (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. François Autain. Ce serait bien le premier à le faire !
Mme Catherine Tasca. Qui ferait cela ?
M. Jean-Louis Carrère. Mais tout cela doit être faux, qu’il s’agisse de l’école de gendarmerie du Mans, des sites de l’Est, de Château-Chinon, de Bergerac ou d’ailleurs ! (M. Josselin de Rohan s’exclame.)
Monsieur le secrétaire d’État, ma question sera très simple : quand allez-vous mettre un terme à l’opacité qui entoure le véritable déménagement du territoire que vous préparez en secret ?
M. Jean-Louis Carrère. Ce n’est certainement pas la nomination de deux députés – et non pas des sénateurs… – …
M. François Autain. Cela, ce n’est pas bien !
M. Jean-Louis Carrère. …pour surveiller l’exécution conforme de ces projets qui va apaiser nos inquiétudes.
Allez-vous donner une réponse spécifique aux élus qui demandent de la transparence, mais aussi, si nécessaire, un plan d’accompagnement permettant de compenser les préjudices économiques et financiers de ces fermetures ?
Enfin, pouvez-vous nous donner l’inventaire des sites qui fermeront et des mesures d’accompagnement envisagées ? Le temps presse ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes aimé !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Merci de l’avoir reconnu ! (Sourires.)
Monsieur Carrère, avec la passion et la fougue qui vous caractérisent, vous venez de montrer votre intérêt pour le sujet, mais peut-être avec un peu d’excès.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oh non !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Juste un peu !
M. Jean-Claude Mallet, président de la commission du Livre blanc sur la défense et la sécurité, est venu, à plusieurs reprises, devant les commissions concernées de l’Assemblée nationale et du Sénat, monsieur Carrère.
M. Jean-Louis Carrère. J’y étais !
M. Dominique Braye. Alors, il ne faut pas mentir !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Il y a eu un débat, y compris lors de la première ébauche du document.
Le 26 juin, une discussion aura lieu à l’Assemblée nationale et au Sénat, et chaque groupe dira ce qu’il pense.
M. Jean-Louis Carrère. Quinze minutes par groupe !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. C’est un Livre blanc ; il ne s’agit pas d’un projet de loi ! Par conséquent, vous pourrez vous exprimer.
Par la suite, à l’occasion de la nécessaire réorganisation de notre défense nationale – permettez-moi de rappeler que, dans le programme des candidats socialistes, y compris dans celui de Ségolène Royal, était également envisagée une réorganisation de notre défense nationale, pour la rendre plus opérationnelle –…
M. Jean-Louis Carrère. Mais transparente !
M. René-Pierre Signé. Elle n’a pas parlé de supprimer des sites !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. …seront formulées un certain nombre de propositions. Hervé Morin veille à ce que, grâce à cette réorganisation, notre défense nationale soit plus opérationnelle.
M. René-Pierre Signé. Il n’est pas là !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Il n’est pas là parce qu’il est à Bruxelles pour défendre les intérêts de la France ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur des travées de l’UC-UDF.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas garanti !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. À cette fin, il a reçu une centaine de parlementaires de gauche comme de droite, et même, monsieur Carrère, voilà quelques semaines, le premier secrétaire du parti socialiste, à sa demande, et, hier, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, à sa demande également, pour parler de ces problèmes.
M. René-Pierre Signé. Il ne les écoute pas !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Il n’y a donc aucune volonté politicienne en la matière. Il s’agit simplement de défendre l’intérêt des Français, de faire en sorte que leur sécurité soit mieux assurée, grâce à une réorganisation claire et nette de l’ensemble de nos bases, et de mettre en place un accompagnement pour le personnel de la défense nationale comme pour les collectivités territoriales concernées. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
pacte européen sur l'immigration
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Ma question s’adresse à M. Brice Hortefeux, ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire.
M. René-Pierre Signé. Que de charges !
M. Robert del Picchia. Vivant à l’étranger, voyageant beaucoup dans les pays européens et suivant de près la politique et l’actualité de ces pays, j’ai pu constater qu’une chose leur est commune : le douloureux problème de l’immigration, qui préoccupe et parfois inquiète nos amis européens, et d’ailleurs aussi nos compatriotes.
Les pays européens souhaitent trouver des solutions pour mener une politique commune de gestion des flux migratoires, car, pour eux comme pour nous, un immigré clandestin est un immigré illégal non pas seulement dans le pays où il arrive, mais également dans toute l’Union européenne, puisqu’il n’y a pas de frontières.
On le sait, en matière d’immigration, les politiques de régularisations massives n’ont jamais été la bonne solution. M. Jospin a régularisé, en 1997, 80 000 personnes. Malheureusement, – je dis « malheureusement », parce que nous aurions aimé que cela fût un succès – cela se révéla être une fausse bonne idée, et se solda par un appel d’air et une augmentation sensible des arrivées.
M. Jean-Louis Carrère. C’est un expert qui vous parle !
M. Robert del Picchia. L’Italie a régularisé 700 000 personnes en 2002, l’Espagne, 600 000 en 2005, avec les résultats que l’on connaît.
D’ailleurs, tant M. Zapatero que M. Prodi ont dit et répété qu’ils ne voulaient surtout pas recommencer la mauvaise expérience.
M. Jean-Pierre Bel. Ce n’est pas exactement cela !
M. Paul Raoult. Il dit des choses qui ne sont pas correctes ! Ce n’est pas vrai !
M. Jean-Louis Carrère. Il ne comprend pas l’espagnol !
M. Didier Boulaud. Il ne parle que l’autrichien !
M. Jean-Louis Carrère. Il ne connaît que la langue de Goethe !
M. Robert del Picchia. Je peux continuer ? Merci pour la démocratie !
Monsieur le ministre, je connais vos déplacements, vos entretiens avec vos collègues européens, mais aussi avec les responsables des pays africains. Tout cela implique des négociations difficiles, la recherche de solutions à la fois efficaces, bien sûr respectueuses des droits, et en même temps humaines.
C’est un exercice délicat, chacun le reconnaît. Nous sommes convaincus que ce travail très difficile se soldera par de bons résultats. D’ailleurs, ces derniers commencent à se faire sentir, et je tiens à vous dire ici ouvertement, monsieur le ministre, en séance publique : vous avez le plein soutien du groupe UMP du Sénat. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Un sénateur de l’UMP. On confirme !
M. Paul Raoult. De la majorité de droite du Sénat !
M. Jean-Pierre Bel. De la majorité inamovible !
M. Robert del Picchia. Monsieur le ministre, nous sommes à la veille de la présidence française de l’Union européenne et nous en attendons beaucoup. Les questions d’immigration et d’asile seront l’une des priorités, car il y a urgence.
En quoi consiste votre pacte européen de l’immigration ? Quel calendrier avez-vous prévu ? Comment réagissent les partenaires européens ? Je n’entrerai pas dans les détails techniques, faute de temps.
Depuis trente ans, on parle d’intégration, mais rien n’a été fait sur l’immigration. Or, comme le disait le Président Nicolas Sarkozy,…
M. Robert del Picchia. …il ne peut y avoir de bonne politique d’intégration sans une véritable politique d’immigration. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Monsieur le sénateur, vous avez parfaitement raison,…
M. René-Pierre Signé. Il ne va pas dire le contraire !
M. Brice Hortefeux, ministre. …car il est vrai que la politique des flux migratoires ne peut plus se concevoir dans le strict espace de l’Hexagone.
M. René-Pierre Signé. Ça c’est sûr !
M. Brice Hortefeux, ministre. La réalité est très simple : aujourd’hui, en Europe, cinq pays concentrent 80 % des flux migratoires – l’Italie, la France, la Grande-Bretagne, l’Espagne et l’Allemagne– mais tous les pays sont concernés.
M. Jacques Mahéas. Même la Pologne !
M. Brice Hortefeux, ministre. Cela se vérifie notamment pour la Tchéquie, en Europe centrale, ainsi que pour Chypre, pour prendre un exemple en Europe du Sud : ce pays compte la proportion de population immigrée et de demandeurs d’asile la plus importante d’Europe.
Chacun a bien conscience que, dans un espace de libre circulation, une décision prise par un État a immédiatement des conséquences sur ses voisins.
C’est pourquoi nous avons pris l’initiative de proposer ce pacte européen sur l’immigration et l’asile. Je ne vais pas le détailler, faute de temps, mais c’est assez simple.
Ce pacte est, tout d’abord, positif, en ce sens que nous proposons d’organiser l’immigration légale en tenant compte, bien sûr, des besoins et des attentes de la population, afin de réussir l’intégration.
Vous avez cité M. Zapatero, et vous avez eu raison, monsieur del Picchia, parce que ce dernier, voilà quelques jours à peine, a appelé l’Europe à lutter contre l’immigration irrégulière ; ce sont ses propres mots !
M. René-Pierre Signé. Pas exactement !
M. Dominique Braye. C’est un socialiste !
M. Brice Hortefeux, ministre. Il faut lutter contre l’immigration illégale en écartant pour l’avenir les régularisations générales. C’est un principe sur lequel il y a unanimité en Europe.
Ensuite, il faut renforcer la protection de nos frontières et bâtir une politique de l’asile, ce qui est très difficile, compte tenu des différences de traditions d’un pays à l’autre. Celles-ci ne sont pas les mêmes en Europe de l’Ouest, en Europe du Sud, ou encore en Europe centrale. Néanmoins, nous avancerons pas à pas, afin d’élaborer des critères communs s’agissant du statut des réfugiés.
Enfin – et je suis sûr que cela vous intéresse tout particulièrement, monsieur Bel ! –, il faut construire des partenariats avec les pays d’origine. M’étant moi-même rendu depuis le mois de janvier dans la quasi-totalité d’entre eux, j’ai pu y percevoir deux réalités très fortes : d’une part, l’attente est très concrète et très pressante ; d’autre part, les principes que nous avons fixés font l’objet d’un accord unanime.
M. Jean-Louis Carrère. Sur l’Union pour la Méditerranée ?
M. Brice Hortefeux, ministre. Je dis bien un accord unanime, mesdames, messieurs les sénateurs. Et la raison en est simple : ce que nous voulons, ce n’est ni une Europe barricadée ni une Europe passoire ; c’est une Europe terre d’équilibre ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.
Madame la ministre, vous avez récemment déclaré : « Il n’y a pas de carte hospitalière, puisque nous gardons l’ensemble des hôpitaux ». Vous avez ajouté qu’il n’y aurait aucune obligation de regroupement d’hôpitaux, précisant : « Ce que je ferai […] c’est un certain nombre d’incitations financières ».
Déjà, en avril dernier, à la suite de la remise du rapport de notre collègue Gérard Larcher, le Président de la République avait, lui aussi, pris soin d’éviter les mots qui fâchent.
Cependant, si « carte hospitalière » et « fermeture d’établissements » disparaissent du lexique, c’est bien d’une nouvelle répartition géographique des activités hospitalières qu’il s’agit aujourd’hui.
La carte hospitalière n’est pas la carte judiciaire, nous dit-on, ce serait même l’« anti-carte judiciaire ». Mais, ne nous y trompons pas, l’absence de fermeture d’hôpital – sauf sans doute à Carhaix, comme cela a été évoqué ces derniers jours – ne signifie pas pour autant l’absence de fermeture de services.
Si le concept de « communauté hospitalière de territoire » peut être acceptable - schématiquement, il y aurait un hôpital de référence, concentrant les services qui nécessitent un plateau technique lourd, comme la chirurgie, et les hôpitaux de proximité, mais réorientés vers d’autres missions ; si proximité ne doit évidemment pas rimer avec risques pour les patients, et nous ne pouvons qu’être en accord avec vous lorsque vous déclarez vouloir agir au nom de « l’excellence et la sécurité » sanitaires, proximité doit aussi pouvoir rimer avec qualité, tout autant qu’avec égalité territoriale d’accès aux soins.
M. Alain Vasselle. À quel prix ?
Mme Michèle André. Ne le nions pas, le risque existe bel et bien d’aggraver les déserts médicaux ou de conforter le monopole des cliniques privées, deux réalités d'ores et déjà très présentes dans notre pays.
Si nous pouvons comprendre la nécessité d’évolutions, toute réorganisation doit s’accompagner d’un dialogue, tant avec les élus locaux qu’avec les personnels hospitaliers, et s’effectuer dans l’intérêt réel des populations.
Il serait dommage que, après la carte judiciaire et la carte militaire, vous nous disiez, comme l’un de vos collègues l’a fait récemment dans cet hémicycle, que l’aménagement du territoire n’est pas votre souci.
Comprenez bien, madame la ministre, que la réforme de l’État amorcée en la matière, qui s’accompagne d’un désengagement et de la remise en cause sans précédent des services publics, nous préoccupe.
On cherche à nous rassurer. Soit ! Mais ce qui se profile inquiète bon nombre de nos concitoyens, surtout les personnes les plus âgées dans les zones rurales désertifiées, et laisse sceptique quant aux résultats escomptés.
Madame la ministre, ma question est double.
D’une part, comment comptez-vous favoriser les regroupements d’hôpitaux, sachant que la possibilité existe depuis longtemps déjà, mais qu’elle a suscité bien des réticences, les plus petits établissements craignant sans doute d’avoir tout à y perdre ?
D’autre part, sachant que la plus grande partie des crédits du plan de modernisation Hôpital 2012 ont d’ores et déjà été attribués – encore sont-ils pour le moins incertains, dans la mesure où ils reposent sur un principe de cofinancement par l’État et par les hôpitaux eux-mêmes, lesquels sont, comme chacun sait, au bord de l’asphyxie - quels nouveaux crédits comptez-vous mobiliser, dans quels délais, et avec quelle méthode de concertation ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Catherine Tasca. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Madame André, l’hôpital public est le vaisseau amiral de notre système de santé. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. René-Pierre Signé. En tout cas, ce n’est sûrement pas un porte-avions !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le bateau coule !
M. François Autain. Il est désarmé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Accueillant, toutes hospitalisations confondues, un Français sur quatre chaque année, l’hôpital public montre des fragilités et va subir de lourdes évolutions, avec notamment l’allongement de la durée de la vie et les énormes avancées technologiques attendues, évolutions que nous allons devoir anticiper.
À ce sujet, l’un de vos collègues, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Gérard Larcher, que je suis heureuse de saluer aujourd'hui (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées de l’UMP), a remis au Président de la République un remarquable rapport, dont nous allons tirer tous les enseignements dans le cadre du projet de loi « Santé, patients et territoires » que j’aurai l’occasion de venir présenter devant vous à l’automne.
Ce texte permettra de répondre aux défis de l’hôpital public.
M. François Autain. On verra bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le premier des défis, vous l’avez excellemment souligné, madame la sénatrice, c’est l’organisation territoriale de l’hospitalisation.
M. René-Pierre Signé. Avec vous, c’est la désorganisation territoriale !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le nouvel outil dont nous disposerons, c’est-à-dire la communauté hospitalière de territoire, nous permettra de donner une réponse graduée dans l’offre hospitalière. Nous ne fermerons aucun hôpital !
L’hôpital de proximité doit aussi être un hôpital d’excellence. Il a vocation à accueillir les urgences, mais aussi la médecine de soins courants et les longs séjours, et pas seulement pour les personnes âgées, même s’il est très important d’assurer pour ces dernières un accueil de proximité. C’est tout ce que l’on appelle les soins post-aigus.
Il faut des hôpitaux techniques, pour la chirurgie, l’obstétrique, l’endoscopie, pour tous les actes invasifs. Il faut évidemment des hôpitaux d’excellence – je pense en particulier aux CHU - et quelques centres de pointe pour pratiquer des actes extrêmement spécialisés. C’est cela qui permet la bonne organisation du territoire.
Mesdames, messieurs les sénateurs, assurer des soins qui ne seraient pas de qualité, telle est la vraie menace qui pèse sur l’hôpital de proximité. Or, vous le savez très bien, pour garantir la qualité, il faut effectuer un certain nombre d’actes.