M. le président. La parole est à Mme Josette Durrieu.
Mme Josette Durrieu. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, permettez-moi d'avoir moi aussi une pensée pour notre ancien collègue Jacques Pelletier, dans la mesure où ce débat, à une certaine époque, a été initié avec le concours du Conseil de l'Europe ; M. del Picchia l'a évoqué il y a quelques instants. L'occasion m'est donnée ce soir d'en dire quelques mots et, notamment, de remercier cette assemblée de donner à douze sénateurs et sénatrices la possibilité d'y siéger avec vingt-quatre députés et députées
Je le rappelle, le Conseil de l'Europe a été créé en 1949, sur l'initiative de Churchill. Après la Seconde Guerre mondiale, l'objectif était en effet de promouvoir la démocratie, l'état de droit et les droits de l'homme. Aujourd'hui, il compte quarante-sept États et englobe tout le continent : c'est la « grande Europe », à laquelle ne manque que la Biélorussie.
En 1950, aussitôt après sa création, cette assemblée a adopté un texte fondamental : la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il se suffisait à lui-même et ne justifiait pas que l'on y ajoute une charte des droits fondamentaux. Cette convention, tous les États membres du Conseil de l'Europe l'ont adoptée - ils ont été obligés de l'adopter -, le Royaume-Uni et la Pologne n'en ont pas été dispensés, et ce texte fondamental est aujourd'hui ratifié par tous. Depuis, deux cents autres conventions et textes ont été élaborés.
Le Conseil de l'Europe a également créé une instance de contrôle indépendante : la Cour européenne des droits de l'homme, garante exceptionnelle de la protection judiciaire internationale des droits de l'homme ; ses membres, dont je fais partie, élisent les quarante-sept juges qui la composent.
Le Conseil de l'Europe a réalisé l'abolition de la peine de mort sur tout le continent en temps de paix. C'est le seul continent où il n'y a plus d'exécution capitale. En Russie, il n'y a pour le moment qu'un moratoire, mais la peine de mort n'y est pas appliquée. Dans le monde, soixante-huit pays appliquent encore la peine de mort et, malheureusement, parmi eux, se trouvent les États-Unis.
Cependant, on déplore toujours des violations des droits de l'homme partout dans le monde, y compris en Europe, et même en France, avec le drame des femmes battues. Bien sûr, les violations touchent également les zones des « conflits gelés » au sein de cette Europe des Quarante-Sept, en Tchétchénie, en Abkhazie, en Ossétie du Sud, en Transnistrie, au Haut-Karabagh.
Cela étant, je tiens à le souligner, le Conseil de l'Europe s'est honoré d'avoir publié un rapport difficile, porté par Dick Marty, mon collègue suisse, sur les fameux centres de détention secrets de la CIA en Europe, chez nous, très près de la France, mais, je l'espère en tout cas, pas sur notre territoire. Il a dénoncé ces « sites noirs », délocalisés en Europe, dans lesquels des prisonniers clandestins ont été transférés par avions spéciaux, en dehors de toute règle de droit national et international. La Cour suprême américaine s'est honorée en les dénonçant à son tour. Le fait que le président Bush ait reconnu leur existence prouve une chose : la violation des droits de l'homme, c'est partout et c'est toujours ; par conséquent, le combat est extrêmement difficile.
Par ailleurs, si je suis ravie ce soir de pouvoir parler ne serait-ce qu'un tout petit peu du Conseil de l'Europe, ce qui ne m'arrive pas assez souvent, c'est qu'il représente à la fois une conscience morale et le creuset où se forge véritablement la conscience européenne.
En ce qui concerne la Charte des droits fondamentaux, elle existe. Elle figurait dans le traité constitutionnel européen, mais elle ne semble plus intégrée au mini-traité, ce qui est regrettable. Elle n'a pas été imposée au Royaume-Uni et à la Pologne, ce qui est étonnant et également regrettable.
Elle définit six domaines de droits ainsi que les valeurs communes de l'Union : la dignité humaine, les libertés, l'égalité, mais pas la parité - il eût été normal et facile d'inclure dans la Charte ce principe, nouveau en France, mais pas dans la réalité de nombreux pays européens, notamment les pays nordiques, mais elle n'en parle pas ! - ; la solidarité, la citoyenneté et la justice.
Je note, comme vous, que ne figure pas dans la Charte cette valeur fondamentale pour les Français qu'est la laïcité. Je souhaite insister sur ce dernier principe et rappeler que la laïcité, c'est l'humanisme tolérant et résistant.
Le terme « résistance » est essentiel. Il est temps de prendre conscience que nous devons nous en emparer à nouveau. Je rappelle que ce mot figure à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, qui mentionne le « droit de résister à l'oppression ». Or, aujourd'hui, une confusion regrettable est faite entre le terrorisme, qui est une réalité, et la résistance, qui en est une autre.
La laïcité, c'est aussi un humanisme basé sur le respect et, tout d'abord, sur le respect de l'homme universel. Mieux vaut, en effet, affirmer les dimensions communes et universelles, que de souligner les différences et d'affirmer les minorités, visibles ou non.
Les rapports entre les majorités et les minorités changent parfois, comme le prouvent les cas de la Belgique et du Kosovo ; ils peuvent même s'inverser. Mais si l'on défend les droits de l'homme universel, que l'homme fasse partie d'une majorité ou d'une minorité, alors ses droits sont préservés.
La laïcité, c'est également un humanisme basé sur le respect de l'autre, de sa vie, de ses idées, de ses idéologies, du sens qu'il veut donner à son existence et au mystère de son origine.
Je me pose à cet égard une question : les droits de l'homme et les dogmes religieux sont-ils compatibles ?
Je réponds non si je me réfère à l'histoire, matière que j'ai enseignée longtemps, et notamment aux guerres de religion, ou à l'actualité, aux discours de haine et aux guerres de toutes sortes.
Je réponds oui si nous bâtissons un monde et des États tolérants et laïcs, tels que la France et la plupart des pays d'Europe.
Je réponds non si les textes fondateurs des religions, ainsi que les écrits des théologiens et des juristes, prescrivent une morale et des règles de vie et de comportement contraires à ces droits. J'ai une pensée pour les femmes excisées, voilées, lapidées.
Je réponds oui ou non, selon la façon dont les droits de l'homme sont transposés ou interprétés dans le droit canon, la charia ou le Talmud.
Je réponds oui ou non selon que les valeurs inscrites dans la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales se retrouvent ou non intégrées au corpus législatif de ces différentes religions.
Une société laïque a ses valeurs. Elle a aussi ses relais : la famille, l'école, l'État, s'il est démocratique et laïc, les associations et, bien sûr, les communautés religieuses.
Une société laïque a des objectifs et un idéal : former des individus libres et responsables, bâtir la citoyenneté, qui est la forme achevée de la laïcité. Au niveau de l'Europe, il faut encore définir et, surtout, conquérir cette citoyenneté.
Un idéal, pour certains, c'est faire le choix difficile du sol, qui est l'expression d'une « volonté de vivre ensemble » dans un lieu géographique et dans une communauté.
À ce sujet, j'ai une pensée pour le Kosovo, où l'on a fait la guerre pour que l'État ne soit pas monoethnique, et pour les peuples qui s'y sont succédé : les Serbes, hier, et les Albanais, aujourd'hui. L'indépendance est peut-être pour demain, mais dans quelles conditions ?
À la lueur de toutes ces réflexions, je souhaite vous faire part de mes inquiétudes après avoir entendu les discours du Président de la République de Saint-Jean de Latran, du 20 décembre 2007, et de Ryad, du 14 janvier 2008, prononcé devant le Roi d'Arabie Saoudite. Et c'était à l'étranger... Il s'agit de la parole officielle du Président de la République française, du chef de l'État laïc qu'est la France. Un seuil a été franchi ...
La parole du Président de la République est devenue prédication : « Ce sont les religions [...] qui nous ont les premières appris les principes de la morale universelle, l'idée universelle de la dignité humaine ». De la morale, peut-être, mais de la morale universelle, sûrement pas ! Pour ce qui est de la dignité humaine, je ne sais pas...
Je cite toujours le Président de la République : « L'Arabie Saoudite et la France n'ont pas seulement des intérêts communs. Elles ont aussi un idéal commun ». Lequel ?
Je me pose des questions et je vous les pose également, madame la secrétaire d'État.
Va-t-on réformer la loi de 1905 ? Les Français ne le souhaitent pas et les religions ne le demandent pas.
Va-t-on reconfessionnaliser l'espace public ?
À Saint-Jean de Latran, le Président de la République a dit que les religions étaient un plus pour la République : « La désaffection progressive des paroisses rurales, le désert spirituel des banlieues, la disparition des patronages, la pénurie des prêtres, n'ont pas rendu les Français plus heureux. [...] l'instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur [...] parce qu'il lui manquera toujours le sacrifice de sa vie et l'engagement porté par l'espérance ». Autant dire : la Révélation !
La laïcité est le fondement de la République et de la paix religieuse et sociale. On n'y touche pas ! Sauf à vouloir enflammer le débat républicain, sauf à penser que la laïcité est un concept dépassé.
Il y a d'autres combats à mener et d'autres défis à relever, contre l'intégrisme et le fanatisme, ou contre le terrorisme, qui n'exclut pas le droit légitime à la résistance à l'oppression.
J'y insiste : le terrorisme est redoutable, on le combat, mais on ne l'a toujours pas défini, ce qui entraîne une certaine confusion. Selon le côté où l'on se place, le Tchétchène, le Palestinien, le Kurde, sont des terroristes. Et si l'on n'y prend garde, on considérera bientôt que le républicain espagnol résistant au franquisme était aussi un terroriste. Moi-même, fille de résistant français, je pourrais être considérée comme fille de terroriste.
Nous devons revendiquer le droit à la résistance à l'oppression. Je vous assure que ce mot est aujourd'hui tabou. Il faut que nous nous en emparions à nouveau afin de le redéfinir.
D'autres combats sont à mener, contre l'ignorance, l'obscurantisme, le racisme et l'antisémitisme.
Sartre disait que le Juif n'existait pas et que c'était l'antisémitisme qui le créait. Soit ! Mais qui crée l'antisémitisme ? Et qui est l'antisémite ? Celui qui profane ? Celui qui injurie ?
Nous devons faire attention à l'instrumentalisation et à l'amplification, car tout cela est en marche.
Israël a le droit d'exister, nous devons le proclamer. Israël a droit à la sécurité, nous devons le répéter. Il n'en reste pas moins que le conflit israélo-palestinien est le noeud de tous les problèmes.
Les Palestiniens existent, eux aussi. Mais la Cisjordanie est occupée injustement et illégalement. Il y a 12 000 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes et 1 200 000 prisonniers à Gaza. Prisonniers de qui ? Du Hamas, sûrement, mais aussi d'Israël !
Nous devons combattre ces injustices, le « deux poids, deux mesures » de la politique que nous pratiquons dans de trop nombreux endroits du monde. Cette politique, qui représente souvent une humiliation quotidienne, ne peut générer que revanche et vengeance.
Le dernier enjeu, c'est l'Europe. Il faut faire l'Europe ? Non, il faut finir l'Europe, c'est-à-dire faire ce que l'on ne veut pas faire : l'Europe de la défense et l'Europe politique.
Le veut-on ? Y est-on prêt ? Je crains que non, ni ici ni ailleurs. Le simple fait que l'on ait renoncé aux symboles, y compris au drapeau, en dit long sur un certain nombre d'intentions, qui ne sont pas encore des affirmations.
Quelle laïcité pour l'Europe du XXIe siècle ?
Il faut aller vite pour pouvoir vivre dans cette Europe ! L'Europe implose dans le bouillonnement de ses minorités exigeantes. Bâtissons une Europe qui représente l'Union des peuples, une communauté de valeurs et un destin commun. Faisons rêver la jeunesse d'Europe ! (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, « Pourquoi l'homme, justement l'homme, prétend-il avoir des droits ? Selon certains, il n'y a à cela aucune autre raison que le fait qu'étant nous-mêmes des hommes, nous revendiquons pour nous-mêmes, sans justification spéciale, un statut privilégié » : telle est la question que se posait la célèbre philosophe Jeanne Hersch, grande spécialiste des droits de l'homme.
Et elle répondait : « L'homme représente, dans le monde où il vit, une formidable exception. Il est, à ce qu'il semble, le seul à avoir ?une conscience de lui-même?, le seul à dire ?je? et à décider de ses actes, donc à les assumer et à s'en reconnaître responsable.
« Et c'est cette possibilité, unique en ce monde, dont chaque homme, chaque femme, chaque enfant, se doit d'approfondir en lui le sens et la portée. Car sur elle reposent les lois, les droits et la paix, en même temps que la distinction entre le bien et le mal. Et qu'étant responsable, l'homme peut aussi être et se juger coupable. »
Ces propos de Jeanne Hersch expliquent assez bien pourquoi la Déclaration des droits de l'homme doit être universelle, en se fondant non sur des règles particulières, mais sur la condition de sens de toute règle : la liberté responsable de chaque être humain.
Ce règne et cette exigence des droits de l'homme impliquent que, dans les sociétés humaines, le règne du droit remplace le règne de la force. Mais ce règne du droit lui-même, qui permet aux hommes de vivre leur vie quotidienne sans porter d'arme, ne peut renoncer à l'appui d'une police, donc à un recours possible à la force.
Nous le savons, mes chers collègues, la Déclaration universelle des droits de l'homme est l'une des premières grandes réalisations de l'Organisation des Nations unies. Mais il a fallu attendre trente ans après sa ratification par les États et l'entrée en vigueur des pactes internationaux et d'un protocole pour qu'elle soit appliquée.
La mise en vigueur des droits de l'homme suscite également des réflexions.
Si nous nous devons d'être pour le refus de la force et pour la défense des droits de l'homme, ces deux engagements ne peuvent cependant pas toujours être absolus, en tout cas pas les deux à la fois. Car les droits de l'homme ont besoin de la force pour s'imposer et être défendus, comme nous le constatons, malheureusement, dans le monde d'aujourd'hui. Nous sommes donc contraints d'assigner à ces droits certaines limites.
Il en est ainsi, par exemple, du droit à la vie : comme s'il y avait un droit à n'être menacé par rien et à ne jamais mourir ! Le droit à la santé n'a de sens que si on se limite à proclamer le droit à des conditions de vie saines et, en cas de maladie, le droit aux soins médicaux.
La proclamation des droits de l'homme et les tribunaux internationaux sont des instruments de plus en plus respectés et craints, au bénéfice de la défense des citoyens. Et pourtant, dans notre monde, en ce début 2008, les droits de l'homme, loin d'être respectés, sont violés pratiquement sur toute la planète.
Sans être exhaustive, la liste énumérée par notre collègue M. Othily est déjà très significative.
Alors, devons-nous désespérer ? Eh bien, non ! Car il est vrai que, lentement, trop lentement certes, malgré les effroyables rechutes encore constatées un peu partout, malgré la violence qui se développe, la cause des droits de l'homme s'est tout de même renforcée, parce qu'elle est mue par un espoir indestructible.
Voilà pourquoi, aujourd'hui, nous en débattons dans cet hémicycle, comme nous suivons l'application des traités internationaux.
J'ai fait un inventaire des instruments internationaux ; c'est assez surprenant : on compte 106 textes, sauf erreur ou omission, bien sûr. C'est dire la complexité du suivi ! Il est tout aussi difficile d'apprécier le rôle, également compliqué, du secrétariat d'État aux droits de l'homme, auquel incombent de véritables travaux d'Hercule.
Devraient alors être déterminées les actions prioritaires. Mais, comme dans le domaine des droits de l'homme, elles sont toutes prioritaires, et c'est un problème de plus pour votre secrétariat d'État.
Huit ans après les huit objectifs du Millénaire, adoptés en l'an 2000, près d'un milliard de personnes vivent encore avec moins de 1 dollar par jour. Chaque année, 6 millions d'enfants meurent de malnutrition avant l'âge de cinq ans. Dans les pays très pauvres, moins de la moitié des enfants vont à l'école primaire, et moins de 20 % à l'école secondaire. On est loin de la réalisation universelle des droits de l'homme ! Non seulement les traités ne sont pas respectés, mais les objectifs internationaux ne sont pas atteints.
Alors, que faire, sinon suivre, observer, surveiller, réagir ? La France, patrie des droits de l'homme, le fait au travers de votre secrétariat d'État. Mais il est vrai qu'il s'agit de suivre, voire de précéder toute l'actualité, toutes les tensions et crises pour éviter de nouvelles violations des droits de l'homme. C'est une mission de tous les instants, et une mission universelle.
Mais pour défendre son engagement à faire respecter les droits de l'homme, la France a aussi des atouts et des réseaux en dehors des Nations unies et du Conseil de l'Europe. C'est le cas, par exemple, de la francophonie.
À l'occasion du lancement, le 10 décembre dernier, de l'année de la célébration du soixantième anniversaire de la Déclaration des droits de l'homme, Abdou Diouf, secrétaire général de la francophonie, et Louise Arbour, Haut commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, ont appelé conjointement les États membres de l'OIF - qui regroupe cinquante-cinq États et dix observateurs - à la ratification généralisée des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et à leur pleine mise en oeuvre.
À ce sujet, le centre de recherche sur les droits de l'homme et le droit humanitaire de l'université Panthéon-Assas de Paris II publie de nombreuses informations et tient à jour une véritable fiche technique sur tous les pays de la francophonie. Pour la France, on peut y voir, par exemple, que l'on attend certains rapports sur le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ou des conventions, comme celle sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ou les protocoles sur les conflits armés ou la vente des enfants.
Peut-être, madame la secrétaire d'État, pourrez-vous nous en dire plus sur les raisons de ce retard. Pourquoi, par exemple, la France n'a-t-elle pas encore ratifié la convention-cadre pour la protection des minorités nationales ?
Mes chers collègues, notre Parlement, Assemblée nationale et Sénat, participe activement aux travaux de l'OIF, mais il participe aussi à l'Union interparlementaire. Les Parlements peuvent et doivent jouer leur rôle dans ce domaine. La défense et la promotion des droits de l'homme sont parmi les buts principaux de l'Union interparlementaire, créée, je vous le rappelle, par la France et la Grande-Bretagne en 1889.
L'article 1er des statuts de l'UIP définit le respect des droits de la personne comme un facteur essentiel de la démocratie et du développement.
Le Parlement, rappelle l'UIP, est l'institution de l'État qui représente le peuple et par laquelle celui-ci participe à la direction des affaires publiques. Comme tel, il lui incombe donc spécialement de promouvoir et de faire respecter les droits de l'homme. C'est aussi l'un des objectifs du Parlement.
D'ailleurs, le comité des droits de l'homme des parlementaires de l'UIP, créé en 1976, a établi sa réputation dans le monde entier et fait aujourd'hui autorité comme mécanisme spécialement conçu pour défendre les parlementaires victimes de violation de leurs droits fondamentaux. Il est très actif, car on en déplore encore beaucoup.
L'UIP s'est aussi penchée, dans ses nombreux rapports, sur la problématique de la protection des droits de l'homme lors de réconciliations au lendemain de conflits. C'est un domaine où la protection des droits de l'homme est, bien sûr, primordiale.
Comme l'écrivait Joseph Maïla : « Se réconcilier n'est pas seulement surmonter les raisons de se faire la guerre, c'est surtout inventer les conditions pour se parler. C'est aussi, face à une histoire de tumulte et de haine, trouver le bon équilibre de la mémoire : suffisamment oublier pour ne plus se combattre, suffisamment se souvenir pour ne pas recommencer ».
Je citerai deux exemples de ce processus de réconciliation : la réconciliation réussie de l'Allemagne avec la France et ses voisins après 1945, et la réconciliation, toujours en attente, celle-là, entre Israël et la Palestine.
Le processus de réconciliation suppose aussi le pardon réciproque et donc, de chaque côté, l'oubli des fautes et des crimes. Malheureusement, on en est encore loin !
La réconciliation passe-t-elle par la sanction ou l'absence de sanction ?
Mes chers collègues, les termes « amnistie » et « amnésie » dérivent tous deux du grec : amnêstia, de amnêstos, qui signifie oublié ; et amnêsia veut dire oubli.
La communauté internationale, notamment l'ONU, a choisi clairement de ne pas sacrifier la justice à la réconciliation et de faire de la justice un outil de réconciliation.
Sur le thème de la réconciliation après les conflits bafouant les droits de l'homme, le théorème de Joseph Maïla « s'en souvenir assez pour ne pas recommencer, mais oublier assez pour ne pas se venger doit être applicable et appliqué ; ce n'est pas toujours le cas !
Le soutien à la réconciliation a aussi ses limites sur le terrain, celles des droits de l'homme. La réconciliation, oui, mais à condition de ne pas oublier les droits de l'homme.
C'est pourquoi notre paix actuelle n'est pas la paix véritable, loin de là, si l'on considère la réalité, celle de l'actualité. La paix ne peut être visée aujourd'hui qu'à l'abri de la force, avec ténacité et patience, au travers d'une extension et d'une progression des droits de l'homme partout où cela est possible.
Bernanos a écrit, dans Les grands cimetières sous la lune, que « les hommes de ce temps ont la tripe sensible et le coeur dur ». Cette phrase fait mal, parce qu'elle est malheureusement vraie.
Considérant les droits de l'homme aujourd'hui, on devrait donc exclure « optimisme » et « triomphalisme ». Mais y renoncer, mes chers collègues, ce serait tout simplement renoncer à l'humanité. C'est exactement le contraire que nous voulons toutes et tous ici, ce soir, de toutes nos forces. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le président, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je m'associe évidemment à l'hommage qui a été rendu à notre regretté collègue Jacques Pelletier.
Dans le monde, des personnes sont empêchées de s'exprimer, empêchées d'agir, d'être libres, de faire valoir leurs droits. Elles subissent la répression, jusqu'à la mort. Des mineurs sont exécutés, des femmes lapidées, des homosexuels pendus.
En 2007, la France et l'ONU ont su donner un signe positif en interdisant la peine de mort « en toutes circonstances » pour l'une, en appelant à un moratoire mondial sur les exécutions pour l'autre. J'ai alors émis le voeu qu'à l'occasion des jeux Olympiques de 2008 la Chine et les Etats-Unis s'engagent sur un moratoire.
Mais, aujourd'hui, je suis indignée par la souffrance terrible du peuple de Gaza, assiégé, prisonnier sur son propre territoire, manquant de tout, images tragiques du peuple palestinien humilié.
Je suis indignée par la tragédie du peuple du Kenya, où les mutilations et les tueries ont déjà fait plus de 1000 morts, où plus de 255 000 personnes ont dû fuir. Je suis indignée par le drame vécu par le peuple du Tchad où, encore une fois, des innocents sont victimes des exactions des uns et des autres pour le pouvoir.
Ce n'est pas pour rien si, sur le plan international, des peuples nous demandent aujourd'hui des comptes en matière de génocides, de colonialisme.
Au Rwanda, où l'indicible s'est produit, on exige la fin de l'impunité, la reconnaissance des responsabilités, de toutes les responsabilités. Nous voudrions voir notre pays plus actif pour faire prévaloir la paix, le respect des peuples, le respect de chaque personne.
Promouvoir le respect des traités internationaux concernant les droits de l'homme, ce serait, pour le Gouvernement français, accepter enfin d'inscrire dans son projet de loi portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale la compétence universelle et l'imprescriptibilité des crimes de guerre, qui sont précisément des instruments de lutte contre l'impunité et donc de respect des droits des individus et des peuples ; ce serait lever sans attendre la réserve de l'article 124.
Plus généralement, le fond du problème, c'est que près de la moitié de la population mondiale est humiliée, car elle subit la pauvreté, les inégalités, l'exode et le refus des pays riches - dont la France et l'Union européenne - de mener de véritables politiques de coopération et de développement permettant aux peuples de sortir de la misère et des dominations.
Pourtant, en 2002, Mme Mary Robinson, alors Haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, disait : « Je suis toujours plus en colère quand je vois l'état du monde : le fossé inacceptable entre riches et pauvres, les inégalités de toutes sortes, en matière d'éducation, de santé, qui constituent autant de germes de conflit ».
Mme Louise .Arbour, qui lui a succédé, ne dit pas autre chose quand elle met en cause « la détermination des gouvernements à s'acquitter de leurs obligations ».
Fin 2008, nous célébrerons le soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Ses initiateurs ont eu le courage, au sortir de l'une des plus terribles catastrophes que le monde ait connues, l'holocauste, d'affirmer des droits fondamentaux pour les individus, pour les peuples, et d'en consacrer l'universalité. Il est de notre responsabilité de poursuivre ce chemin ; cela se prouve par des actes quotidiens.
L'année 2008, c'est aussi celle où la France accédera à la présidence de l'Union européenne. Le ministre de la défense tenait, le 31 janvier, des propos inquiétants dans Paris-Match concernant les « capitales européennes » : « tous sont conscients que 450 millions d'habitants représentant 25 % de la production mondiale doivent pouvoir défendre leurs intérêts et assurer leur sécurité ». Qu'est-ce à dire ?
C'est précisément au nom de leur sécurité que les Etats-Unis ont mis à mal des droits et des libertés. Mme la garde des sceaux soulignait ici même, il y a une semaine, que c'était l'émotion suscitée par la tragédie du 11 septembre qui avait permis le mandat d'arrêt européen.
Mais elle « oubliait », ce faisant, les « sites noirs de la CIA » externalisés par les Etats-Unis, y compris en Europe, pour se soustraire à l'interdiction de la détention arbitraire et de la torture qu'ils sont censés respecter. Elle « oubliait » la guerre en Irak et Guantanamo, que de plus en plus d'Américains eux-mêmes condamnent.
Il faut dire que, sur toutes ces graves atteintes aux droits de l'homme, nous n'avons pas beaucoup entendu la France et l'Union européenne.
Voilà où mènent la priorité donnée à la « logique des victimes » et l'instrumentalisation de leur souffrance !
C'est aussi au nom de la lutte contre le terrorisme que la France a intégré dans le droit commun des mesures dites exceptionnelles : réduction des droits de la défense, extension des écoutes téléphoniques, fichage généralisé, développement de la vidéosurveillance.
Avec les Vingt-Sept, elle a approuvé le transfert aux autorités américaines des fichiers des données passagers par les compagnies aériennes, au mépris des critiques émises par le Parlement européen.
Les pays occidentaux se sont érigés en seuls garants des droits des personnes ; ils en ont même fait une base idéologique pour leurs interventions, y compris par la guerre.
Or, on ne peut pas imposer la démocratie et les droits humains avec des bombes, pas plus qu'avec des contrats industriels ou commerciaux. Comme l'exprime le président de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, la CNCDH, M. Joël Thoraval, « le respect des droits essentiels, la démocratie, n'ont pas de meilleur émissaire qu'eux-mêmes ».
Quand la France et l'Europe fondent leur politique à l'égard des étrangers sur une logique sécuritaire, on ne peut pas dire qu'elles y contribuent.
Ainsi, promouvoir le respect des traités internationaux concernant les droits de l'homme, ce serait, pour notre pays, ratifier enfin la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
Évidemment, il y a un grand décalage entre le contenu de cette convention et le sort que la France fait subir aux travailleurs migrants : chasse aux sans-papiers, recul du droit d'asile, lois discriminantes avec l'immigration « choisie », les contrôles ADN ou les quotas envisagés par le Président de la République...
Quand au traité de Lisbonne, il confirme l'Europe comme un espace policier et judiciaire, une forteresse fermée aux étrangers.
D'ores et déjà, la « politique du chiffre » menée en France a, on le sait, des conséquences de plus en plus inhumaines.
Peu d'entre nous, hélas ! se donnent la peine de visiter des centres de rétention avant de voter des lois aggravant les reconduites aux frontières.
Quant au contrôleur général des lieux privatifs de liberté, nous ne savons toujours rien sur sa nomination.
Nous étions quelques parlementaires, le 19 janvier dernier, lors de la journée européenne contre l'enfermement des sans-papiers, au centre de rétention du Mesnil-Amelot.
Parmi leurs revendications, les détenus - car ce sont des détenus - inscrivent des demandes évidentes, comme une visite médicale préalable à l'admission en centre de rétention, des informations sur leur situation, des aliments qui ne soient pas en instance de péremption...
Mais c'est bien la question de fond qu'il faut se poser.
Les centres de rétention sont des prisons contrôlées par la police ; certains sont entourés de barbelés. Des femmes et des hommes y sont détenus, de plus en plus nombreux, avec 1 500 places aujourd'hui contre 786 en 2002, et de plus en plus longtemps : la durée de la rétention est passée de sept jours en 1981 à trente-deux jours en 2003, durée qui, si nous laissons passer une prochaine directive européenne, pourrait passer à dix-huit mois !
En 2006, 201 enfants ont été enfermés en centre de rétention, au mépris de la Convention internationale des droits de l'enfant.
Des hommes détenus au centre de rétention de Vincennes ont été jusqu'à la grève de la faim ; certains se mutilent ou tentent de se suicider pour échapper à un traitement humiliant pour tout être humain : chambres non chauffées, eau froide, nourriture immangeable, brimades
À propos de ce centre, où 250 détenus sont en attente d'une possible expulsion, le comité européen pour la prévention de la torture écrit dans son dernier rapport: que « la délégation a pu constater de visu le niveau d'infestation -tiques, puces, moustiques... - de certaines chambres » !
Dans ces prisons, on enferme des personnes considérées comme sans papiers, sous entendu sans papiers « valables » pour rester sur le territoire.
Est-il bien conforme aux droits universels de l'homme, au droit inaliénable de circuler à l'heure où l'on se plaît à nous dire que le monde est un village, d'être emprisonné sans avoir commis ni crime ni délit grave ?
La France ne livre pas au monde une bien belle image en ne résistant pas à cette effrayante conception de la sécurité.
Ainsi, promouvoir le respect des traités internationaux concernant les droits de l'homme, ce serait pour la France ratifier les textes internationaux positifs en matière de droits ; ce serait les appliquer elle-même et ne plus être montrée du doigt par des instances internationales, ne plus nourrir de rancoeurs.
Madame la secrétaire d'État, vous m'avez déjà répondu, quand je vous ai sollicitée, que votre fonction était de vous occuper des droits de l'homme dans le monde et non pas en France où ils étaient, selon vous - je vous cite approximativement -, acquis.
Permettez-moi de vous dire que, non seulement la France, si elle veut jouer un rôle, doit être en tête pour se plier aux règles internationales qui existent déjà, mais elle doit, sur son propre territoire, montrer l'exemple, montrer que l'on ne peut pas transiger, au nom, certes, de réalités qui souvent sont le fait des États, sur le rapport entre sécurité, prévention du terrorisme et violation des droits élémentaires des êtres humains. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je veux d'abord associer notre collègue Alima Boumediene-Thiery, qui n'a pu être présente ce soir, mais dont l'engagement pour la défense de la cause palestinienne et des droits de l'homme est connu de tous ici.
Vous l'aurez compris, et ce ne sera pas une surprise eu égard à une lourde hérédité familiale, je vais vous parler de la Palestine.
Le droit à la dignité est le premier droit de l'homme.
La liste est bien longue des errances françaises et des lâchetés internationales sur cette terre sainte.
Nous étions quelques-uns à penser que l'affaire du tramway de Jérusalem, dont je parlerai dans quelques minutes, avait marqué un point d'orgue, mais non ! Vous avez aimé le mur, vous avez aimé le tramway, vous allez adorer la suite, dans le silence - un silence assourdissant - et dans le recueillement...
La situation humanitaire à Gaza est désastreuse et l'image sans cesse transmise de ces Palestiniens, hommes, femmes et enfants, allant rechercher des denrées en Égypte est ou, plutôt, devrait être révoltante et insupportable au pays des droits de l'homme.
On sait tous le rôle que joue l'humiliation dans l'histoire, et quelques-uns l'ont rappelé ce soir. Que dire de ce peuple humilié et que penser de la reprise des attentats-suicides ? Quelle autre alternative donnons-nous à ce peuple qui n'a rien à perdre ? Et ce n'est pas M. Gouteyron, qui préside le groupe d'amitié France-Liban et connaît aussi les problèmes de la population palestinienne au Liban, qui me contredira !
Que dire de la construction du mur ? Humiliation et silence...
Cette construction, déclarée illégale par la Cour internationale de justice le 9 juillet 2004 et par la Cour suprême de justice israélienne le 14 décembre 2006, est une atteinte déplorable au droit des Palestiniens à circuler librement. Sa construction, violant les droits de propriétés des Palestiniens, est doublée d'une intensification du nombre de check points.
Que dire du tramway de Jérusalem, dont on a déjà un peu parlé ici, si ce n'est qu'il s'agit du triomphe du fait accompli ?
Rappelons que deux entreprises françaises, Alstom et Connex, ont remporté un appel d'offres pour un projet de tramway à Jérusalem ; seul petit bémol, l'itinéraire du tramway passe - léger détail ! - par des territoires occupés ! Il relie Jérusalem-Ouest à deux colonies juives de Jérusalem-Est, que Paris estime, jusqu'à preuve du contraire, « illégales ». Voila comment la France participe à une opération de plus de confiscation de Jérusalem-Est !
L'association France Palestine Solidarité, à laquelle s'est associée l'OLP, a engagé une procédure judiciaire contre les deux sociétés. Interrogé le 22 octobre dernier, le porte-parole du quai d'Orsay - votre ministère, madame la secrétaire d'État - a déclaré : « La question que vous évoquez relève des autorités judiciaires. Je rappelle cependant, comme nous l'avons déjà fait à plusieurs reprises, que la participation française à la construction du tramway de Jérusalem est le fait d'entreprises privées qui n'agissent en aucun cas pour le compte de l'État. Comme vous le savez, nous avons fait part de nos préoccupations aux dirigeants des entreprises concernées [...]. Cette situation qui est de nature commerciale ne reflète en aucun cas une évolution de la position française sur Jérusalem. »
Quelle magnifique réponse, mais, madame la secrétaire d'État, c'est mensonge et langue de bois !
En effet, le contrat pour le tramway a été signé, le 17 juillet 2005, en présence de l'ambassadeur de France, M. Gérard Araud, et dans les bureaux du premier ministre Ariel Sharon. Le bulletin de l'ambassade de France saluait « la "cérémonie officielle" de signature ». Ce n'est donc pas une affaire d'entreprises privées : c'est bien un contrat dans lequel la politique française est intervenue. Sinon, pourquoi l'ambassadeur aurait-il été présent à sa signature ? Je crois qu'il n'y a pas là de quoi être très fier !
Viennent ensuite les violations des règles fondamentales établies par des conventions internationales, des droits de la défense à la présomption d'innocence, en passant par les conditions de détentions : inventaire à la Prévert impossible à ignorer, sauf par qui ne veut ni voir ni entendre !
On citera, pêle-mêle, un rapport, intitulé Poursuites d'arrière-cour, de l'organisation israélienne Yesh Din - dont le nom hébreu fait référence à un droit en même temps qu'à un jugement - ou le très récent rapport du Haut Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme du 29 janvier 2007 sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés, condamnant, pour la deuxième ou la troisième fois, la « punition collective » infligée aux Palestiniens par la fermeture de la bande de Gaza.
Nous connaissons tous ici les outils dont on peut disposer pour tenter d'infléchir la politique d'un État : sanctions unilatérales ou pas, mesures de rétorsion, représailles sur les plans politique, diplomatique, commercial, économique ou financier.
Nous connaissons tous les difficultés politiques de la mise en oeuvre de telles procédures : les obstacles, on le sait, sont non pas juridiques, mais politiques.
Et qu'en est-il du fameux devoir d'ingérence ?
Pourquoi ne pas appliquer des sanctions ? Parce qu'il n'y a aucune volonté politique. Parce que chacun est las de ce conflit qui dure depuis si longtemps. Parce que de grandes embrassades sur le perron de l'Élysée ne font pas une politique. Parce que ce que n'a pas pu faire le « docteur Chirac », comme l'appelait Yasser Arafat, ce n'est pas Nicolas Sarkozy qui le fera, eu égard à notre alignement, désormais évident, sur la politique américaine.
Chaque occasion manquée, chaque humiliation de plus poussent, madame la secrétaire d'État, une nouvelle génération dans la voie du terrorisme.
Je vous le dis avec beaucoup d'inquiétude, moi qui ai partagé la vie et le combat d'un militant pour cette cause, le sénateur Daniel Goulet, fondateur de l'association parlementaire pour la coopération euro-arabe et des groupes d'amitié France-Palestine, ici et à l'Assemblée nationale : sans une paix juste et durable, la situation devient non seulement dramatique, mais totalement incontrôlable
À l'heure où le quai d'Orsay s'apprête à célébrer en grande pompe le soixantième anniversaire non pas seulement de la Déclaration universelle des droits de l'homme, mais aussi de la création de l'État d'Israël en prévoyant une grande exposition dans ses locaux, j'ai le regret de vous dire que le président Ahmadinedjan a raison lorsqu'il prétend que notre pays soutient la politique de l'État sioniste : c'est vrai, c'est lamentablement vrai, c'est lâchement vrai.
Madame la secrétaire d'État, vous avez dit non au Président Khadafi ; les membres du groupe d'information internationale France-Territoires palestiniens au Sénat, notamment sa présidente Monique Cerisier-ben Guiga, et Alima Boumediene-Thiery, vous demandent de dire non à tant d'injustices, qui sont autant de ferments et de justifications pour les terroristes de demain et d'éléments de fragilisation de notre sécurité intérieure. (M. Georges Othily applaudit.)