Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 701, transmise à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation.
Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, je tiens à appeler votre attention sur les inquiétudes qui se font jour parmi les élus locaux concernant le vide juridique qui entoure la sécurité des matériels forains.
En l'occurrence, les seules dispositions applicables sont l'article L. 221-1 du code de la consommation relatif à l'obligation de sécurité des produits proposés aux consommateurs et à l'exercice des pouvoirs de police du premier magistrat de la commune.
Or si, en théorie, ce dernier peut prendre un arrêté d'expulsion à l'encontre d'un professionnel refusant de produire un certificat de conformité et une preuve de son inscription au registre du commerce, en pratique, il se trouve souvent obligé de s'abstenir de toute procédure.
Pourtant, les services du ministère de l'intérieur ont élaboré un projet de décret qui devait être soumis à une large consultation à la fin de l'année 2002. Or, à ce jour, aucune publication au Journal officiel n'est venue apporter les précisions impatiemment attendues par les maires.
Monsieur le ministre, avec les beaux jours, les fêtes communales vont se multiplier avec le spectre de l'incident éventuel. Soucieuse de rassurer de nombreux maires, en particulier ceux qui gèrent seuls ces situations délicates, je vous serais donc reconnaissante de bien vouloir me préciser les mesures que le Gouvernement envisage de prendre pour apporter à court terme toutes les informations utiles et publier à moyen terme cet acte réglementaire indispensable à l'intervention des commissions de sécurité.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Christian Jacob, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, des professions libérales et de la consommation. Madame la sénatrice, je voudrais tout d'abord vous présenter les excuses de Dominique de Villepin, qui aurait souhaité vous répondre lui-même et qui, ne pouvant être présent ce matin, m'a chargé de vous transmettre les éléments suivants.
Les services du ministère de l'intérieur, en collaboration avec d'autres administrations, ont repris l'initiative d'un projet de décret susceptible de répondre aux attentes dont vous faites état en mettant en place une réglementation homogène. Une large concertation a eu lieu avec les associations d'élus, les professionnels du monde forain et les organisations de contrôle technique. Or la complexité des mesures de contrôle à définir pour les différents types de manèges et d'attractions foraines n'a pas encore permis de valider le dispositif envisagé.
Toutefois, en l'absence d'une réglementation spécifique, de nombreux maires, dans le cadre notamment des autorisations qu'ils accordent pour les manifestations foraines, s'assurent d'ores et déjà que les manèges dont ils autorisent l'installation ont fait l'objet d'un contrôle de sécurité.
En tout état de cause, il revient aux propriétaires et exploitants des manèges forains de faire respecter l'article L. 221-1 du code de la consommation, qui impose aux professionnels une obligation générale de sécurité des produits destinés à l'usage des consommateurs.
En cas de danger grave ou immédiat, l'activité d'un manège peut également, en application des articles L. 221-5 et L. 221-6 du code de la consommation, être suspendue. Tel fut le cas d'un manège appelé « roue enfantine » en 2000 et, plus récemment, en décembre 2004, d'un manège équipé d'une très forte soufflerie.
Enfin, en application des dispositions de l'article L. 221-7 du code de la consommation, des lettres de mise en garde peuvent être adressées aux exploitants forains en cas de doute sur la sécurité des installations afin de demander la mise en conformité de celles-ci avec l'obligation générale de sécurité précitée.
Sur le plan européen, une norme globale a été arrêtée par le comité européen de normalisation. Les éléments relatifs à la sécurité des matériels pourront être repris par les professionnels pour s'assurer de la meilleure sécurité possible de leurs installations.
Tels sont, madame la sénatrice, les éléments de réponse que Dominique de Villepin m'a chargé de vous transmettre. Je vous rappelle qu'un projet de décret susceptible de répondre à vos attentes est en cours d'examen pour mettre en place une réglementation qui soit la plus homogène possible.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, j'ai écouté attentivement les précisions que vous m'avez apportées.
Ce que vous avez déclaré est tout à fait juste, même si, concrètement, au moment de l'installation des forains, cela ne se passe pas tout à fait de cette manière, vous le savez bien, puisque vous êtes vous-même un élu local.
Je vais moi-même devoir, dans les prochains jours, accorder ou non l'autorisation à une fête foraine de s'installer dans ma commune. Je dois dire que je suis personnellement favorable à une telle manifestation, tant il est vrai qu'au-delà d'une fête patronale que l'on pourrait considérer comme non prioritaire, cela permet, compte tenu du peu d'animation dans nos communes, à l'ensemble de la population de se rassembler.
Or je sais qu'en donnant une telle autorisation, je prendrai une lourde responsabilité, car, dans les faits, la situation n'est pas aussi simple que vous le dites, monsieur le ministre.
Par conséquent, nous attendons vraiment la parution de ce décret. Le précédent projet datait de 2002. Monsieur le ministre, je vous le dis solennellement, il y a urgence !
fiscalité applicable aux logements intermédiaires
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la question n° 688, transmise à M. le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, porte-parole du Gouvernement.
M. Jean-Claude Carle. Le logement est l'une des priorités du Gouvernement. Toutes les collectivités doivent participer à cette priorité nationale, afin de répondre aux besoins de nos compatriotes.
Si le déficit en matière de logement social est important, le manque de logements intermédiaires est, lui aussi, patent dans plusieurs zones de notre territoire ; c'est le cas en particulier en Haute-Savoie, département frontalier avec la Suisse.
Ce déficit constitue un frein au développement économique, car nombreux sont ceux qui, s'ils trouvent un emploi dans notre département, éprouvent parfois les plus grandes difficultés pour trouver un logement.
De nombreuses communes accueillent ou souhaitent accueillir ces travailleurs dont les revenus dépassent les seuils leur permettant de prétendre à un logement aidé.
De ce point de vue, les logements intermédiaires sont bien adaptés à cette situation. Plusieurs communes sont prêtes à assurer la maîtrise d'ouvrage de construction ou de rénovation de ce type de logements.
Or contrairement à ce qui se pratique pour les programmes sociaux, ces collectivités ne bénéficient d'aucune aide de l'Etat et celui-ci encaisse la TVA à taux réduit. Cette situation contraint nombre de communes à ne pas pouvoir engager de programmes de logements intermédiaires, et ce malgré la forte demande.
Je voudrais, pour illustrer mon propos, mentionner l'exemple d'une petite commune de mon département, qui a souhaité s'associer à l'effort de l'Etat, en lançant une opération de construction de huit logements.
Pour commencer, elle a dû acquérir le terrain, d'un coût de 150 000 euros, ce qui représente un engagement important pour une commune de 400 habitants. L'investissement lui-même atteindra 750 000 euros, sur lesquels l'Etat percevra une TVA à taux plein, soit près de 150 000 euros, alors qu'il ne participe en aucune manière au projet. La commune, pour sa part, est chargée d'effectuer les investissements, d'assurer la gestion de l'équipement et d'en supporter les charges, directes et induites, sans, je le répète, disposer d'aucune aide. Cette situation me semble donc particulièrement illogique.
Monsieur le ministre, à l'heure de la décentralisation, du respect du principe de subsidiarité auquel nous sommes tous attachés, l'attitude de l'Etat est très mal vécue par nos collectivités et s'apparente à une cruelle injustice.
Certes, les collectivités ont la possibilité de s'adresser au secteur privé pour engager ce type de programmes, mais la réalisation, comme la gestion, leur échappe alors totalement.
Par conséquent, je souhaiterais connaître les mesures que le Gouvernement entend mettre en oeuvre pour favoriser la réalisation de logements intermédiaires et, en particulier, s'il entend permettre aux communes ou EPCI maîtres d'ouvrage de telles opérations de pouvoir récupérer la TVA et, le cas échéant, appliquer le taux réduit de 5,5 %, comme c'est le cas pour les logements sociaux.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Patrick Devedjian, ministre délégué à l'industrie. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur la construction de logements intermédiaires et vous lui soumettez deux pistes de réflexion en matière fiscale pour encourager les collectivités locales à construire sur ce segment.
Tout d'abord, je tiens à vous confirmer, si besoin est, que le logement, en particulier le logement social, constitue l'une des priorités du Gouvernement. J'en veux pour preuve l'ambitieux volet logement du plan de cohésion sociale.
C'est ainsi que 560 millions d'euros de dépenses supplémentaires sont programmés pour la construction de logements locatifs sociaux entre 2005 et 2009. Près de 500 000 logements seront ainsi financés en cinq ans, soit un rythme de constructions qui s'établira à 100 000 par an, à comparer aux 53 000 logements sociaux construits annuellement au cours des six dernières années.
M. Raymond Courrière. On verra !
M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Par ailleurs, le Gouvernement travaille à la préparation d'un projet de loi dit « habitat pour tous » afin de faciliter l'accès au logement de nos concitoyens.
S'agissant des mesures fiscales que vous évoquez, je tiens à vous apporter les informations suivantes.
Tout d'abord, le taux réduit ne peut être appliqué, conformément aux dispositions du point 9 de l'annexe H de la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, qu'aux « logements fournis dans le cadre de la politique sociale ». Or sont principalement considérés comme des logements sociaux, au sens de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation, les logements appartenant aux organismes d'habitation à loyer modéré et les autres logements conventionnés dans les conditions définies à l'article L. 351-2, ce qui, par conséquent, exclut les logements intermédiaires.
En revanche, dès lors qu'une commune ou un EPCI prend la position d'un promoteur assurant la livraison d'un immeuble neuf, il peut bénéficier de la déduction de la TVA d'amont dans les conditions de droit commun.
Au-delà de ces éléments, je tiens à vous rassurer sur la volonté du Gouvernement de répondre à la problématique spécifique de la Haute-Savoie.
En matière de logement locatif social, le zonage a été adapté en matière d'aides à la pierre à proximité de l'agglomération de Genève. Soixante-seize communes, dont cinquante-huit situées en Haute-Savoie, ont ainsi été reclassées, par un arrêté du 29 novembre 2004, de zone III en zone II. Grâce à ce reclassement, les bailleurs sociaux bénéficient de conditions d'équilibre locatif plus favorables, et les bénéficiaires d'aides personnelles au logement voient le montant de leur aide augmenter.
En matière de logements intermédiaires en particulier, les plafonds de loyers et de ressources du PLI, le prêt locatif intermédiaire, sont modulés suivant les zones du dispositif d'amortissement fiscal d'aide à l'investissement locatif, plus communément appelé dispositif Robien.
Ces zones A, B et C ont été établies de façon à refléter les tensions s'exerçant sur les marchés immobiliers. En particulier, les communes de l'Ain et de la Haute-Savoie situées à proximité de l'agglomération de Genève ont été classées en zone A, c'est-à-dire dans la même zone que les communes appartenant à l'agglomération de Paris.
Soixante-treize communes sont concernées en Haute-Savoie, communes dans lesquelles les bailleurs peuvent ainsi équilibrer plus facilement les opérations locatives intermédiaires.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Monsieur le ministre, je vous remercie des précisions que vous avez bien voulu m'apporter. Je tiens, à mon tour, à saluer l'effort fait par le Gouvernement en matière de logements sociaux.
Concernant la Haute-Savoie, sa requalification en vue de son alignement sur la région parisienne est une mesure très intéressante.
Bien sûr, monsieur le ministre, je ne m'attendais pas à une réponse très précise sur les deux propositions que j'ai faites, d'abord parce qu'elles se heurtent, vous l'avez dit, à la réglementation européenne et, ensuite, parce qu'elles ne sont pas sans conséquence sur le budget de l'Etat. Cela dit, elles ont au moins le mérite d'être claires et lisibles, ce qui n'est pas toujours le cas de certaines mesures, notamment en matière de politique du logement.
En outre, si ces propositions ont effectivement des conséquences sur les finances de l'Etat, le manque à gagner, notamment en matière de TVA, pourrait être largement comblé par le développement économique, car celui-ci est créateur d'emplois.
mise en oeuvre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, auteur de la question n° 698, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la secrétaire d'Etat, ma question porte sur l'application de l'article 33 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, qui dispose : « Les assurés sociaux élevant un enfant ouvrant droit, en vertu des premier et deuxième alinéas de l'article L. 541-1, à l'allocation d'éducation spéciale et à son complément bénéficient, sans préjudice, le cas échéant, de l'article L. 351-4, d'une majoration de leur durée d'assurance d'un trimestre par période d'éducation de trente mois dans la limite de huit trimestres. »
Comme vous le savez, madame la secrétaire d'Etat, cette formulation a été modifiée par la loi du 11 février 2005 qui a substitué à l'expression « allocation d'éducation spéciale » la formulation « allocation d'éducation de l'enfant handicapé ».
Ma question est la suivante : alors que ce dispositif est applicable en l'état à toutes les personnes concernées dont les pensions ont pris effet à compter du 1er septembre 2003, à ce jour, soit près de deux ans plus tard, les caisses régionales d'assurance maladie ne l'ont toujours pas mis en oeuvre.
C'est pourquoi, madame la secrétaire d'Etat, je souhaiterais que vous m'indiquiez les raisons de cette situation très pénalisante pour les intéressés, les délais dans lesquels vous comptez y mettre fin et les conditions dans lesquelles les assurés, notamment ceux dont les pensions ont été liquidées depuis le 1er septembre 2003 sans que cette majoration soit prise en compte, pourront être rétablis dans leurs droits.
Mme la présidente. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous attirez mon attention sur la mise en oeuvre de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, portée, comme vous l'avez dit, par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
L'article 33 de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a effectivement amélioré les droits à la retraite des parents ayant élevé un enfant handicapé ouvrant droit à l'allocation d'éducation spéciale et à son complément. Ces assurés sociaux bénéficient désormais d'une majoration de leur durée d'assurance d'un trimestre par période d'éducation de trente mois, dans la limite de huit trimestres.
Cette mesure est entrée en vigueur en même temps que la loi, sans qu'il soit besoin d'un texte réglementaire. Du fait des règles relatives à l'entrée en jouissance des pensions, elle s'applique aux pensions ayant pris effet après le 31 août 2003.
Les dispositions nécessaires à l'application de cette mesure ont été précisées aux caisses nationales par une lettre ministérielle en date du 25 janvier 2005, qui a été diffusée par la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés, la CNAVTS, auprès des caisses régionales par une circulaire du 23 février 2005.
Cette circulaire est accessible sur le site Internet de la CNAVTS, qui prépare d'ailleurs, pour les caisses régionales, des instructions complémentaires sur les adaptations informatiques que la mise en oeuvre de cette mesure implique.
Monsieur le sénateur, j'ai donc le plaisir de vous annoncer que les parents d'enfants handicapés dont la pension aura pris effet après le 31 août 2003 et avant le 31 décembre 2005 pourront naturellement demander la « reliquidation » de cette pension avec rattrapage des sommes non perçues, sans que le délai de prescription de deux ans applicable aux dettes de prestations leur soit opposé.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. La loi portant réforme des retraites a suscité, vous le savez, l'attente légitime de tous les parents d'enfants handicapés, qui ont bien compris qu'ils avaient droit à cette majoration de leurs droits à retraite. Mais lorsque ces personnes se sont rendues au siège des caisses régionales d'assurance maladie, les CRAM, on leur a répondu que les caisses n'avaient pas reçu les instructions permettant d'appliquer cette disposition, pourtant inscrite dans la loi.
Madame la secrétaire d'Etat, il est très important que vous ayez annoncé aujourd'hui devant le Sénat l'application rétroactive de cette mesure à toutes les personnes concernées ayant liquidé leur retraite depuis le 31 août 2003. (Mme la secrétaire d'Etat fait un signe d'approbation.) Elles y seront certainement très sensibles.
Vous l'admettrez, le délai entre la promulgation de la loi le 21 août 2003 et l'envoi de la lettre aux caisses nationales le 25 janvier 2005, qui a précédé la circulaire du 23 février 2005, a été un peu long. C'est le problème de l'application des lois. Madame la secrétaire d'Etat, vous venez de préciser que des instructions complémentaires sont en préparation. J'exprime ici le voeu qu'elles soient délivrées très rapidement afin que, dans les prochains jours, les personnes concernées puissent obtenir la prise en compte de leurs droits par les CRAM. (Mme la secrétaire d'Etat opine.) Je vous en remercie par avance.
création d'officines de pharmacie en milieu rural
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Mouly, auteur de la question n° 704, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
M. Georges Mouly. Une personne pharmacien de mon département a reçu l'autorisation de créer une officine de pharmacie, en application des dispositions de la loi du 27 juillet 1999. Cette autorisation, délivrée par le préfet de la Corrèze en 2001, a été annulée par le tribunal administratif de Limoges en 2003 à la suite d'un recours déposé par les pharmaciens d'une commune voisine de plus de 2 500 habitants. Ce jugement a été déféré devant la Cour d'appel de Bordeaux par le ministre de la santé lui-même : cette juridiction a rejeté le sursis à exécution mais n'a pas jugé sur le fond de la légalité de l'arrêté mis en cause.
J'ai mis l'accent à plusieurs reprises sur les incohérences d'une telle situation. En effet, la loi du 27 juillet 1999 a eu le mérite de donner un cadre clair et sans ambiguïté au délicat problème des créations d'officine de pharmacie, recueillant la satisfaction globale, au point que le Gouvernement a précisé qu'« il n'est pas envisagé de revoir à court terme la législation applicable dans les communes de moins de 2 500 habitants ».
En réponse à une question orale posée en 2004, le ministre d'alors insistait d'ailleurs sur les bienfaits de cette loi, qui a permis « un maillage satisfaisant des officines de pharmacie sur le territoire national en intervenant à deux niveaux, d'une part, en permettant de dresser un état des lieux de la desserte des communes de moins de 2 500 habitants, et, d'autre part, en supprimant - ce n'est pas négligeable - la voie dérogatoire de création d'officines de pharmacie, source de multiples et douloureux contentieux ».
Ce même ministre ajoutait : « La France dispose donc d'un maillage national de qualité, dans un cadre juridique sécurisé », précisant que « l'exemple de cette pharmacienne illustre l'une des dernières difficultés nées de la réglementation précédente ». Sur ce point, j'ai fait part de mon incompréhension, car l'arrêté du préfet du 27 septembre 2001 relève bien de la nouvelle réglementation, issue de la loi de 1999, et non de la loi précédente.
Depuis, en attente d'une décision se faisant attendre, cette pharmacienne, qui avait constitué sa clientèle en quelques mois, a été contrainte de fermer son officine, avec toutes les conséquences humaines, psychologiques et financières que l'on peut imaginer. Cette fermeture n'a évidemment pas favorisé l'aménagement du territoire et la « bonne santé » du milieu rural !
Il est aussi incompréhensible que le « maillage satisfaisant » permis par la loi du 1999 soit aujourd'hui remis en cause par le nombre croissant des recours contre les pharmacies autorisées dans ce cadre : l'arrêt du tribunal administratif de Limoges, actuellement contesté, ferait jurisprudence - c'est un comble ! -, alors qu'il est fondé sur le motif exclusif d'une erreur d'appréciation du préfet.
On est très loin du cadre juridique sécurisé pour ces pharmacies qui, pour certaines d'entre elles, fonctionnent depuis plusieurs années et répondent donc a priori à des besoins avérés.
Aujourd'hui, il est quasiment impossible d'ouvrir une nouvelle pharmacie en milieu rural à la suite des lois de 1999 et 2002. Mais les habitudes sont tenaces et l'acharnement mis à entraver toute initiative semble bien relever - je pèse mes mots ! - d'une culture d'un autre temps. L'arrêt du tribunal administratif de Limoges ferait référence, alors que, en tout état de cause, l'appréciation des besoins tout comme les critères relatifs à la distance sont exclus de la loi de 1999. Le ministre de la santé a d'ailleurs repris cette argumentation dans son mémoire du 23 janvier 2004 en indiquant : « Ce jugement repose sur une erreur de droit, car il prononce l'annulation de l'arrêté préfectoral du 27 septembre au motif exclusif d'une erreur d'appréciation qu'aurait commise le préfet. ».
Ma question est la suivante : quelle va être l'attitude du ministre de la santé et du Gouvernement face à ces nouveaux contentieux, qui sont de plus en plus nombreux ? Quelles mesures peut-on envisager pour permettre l'application effective des dispositions de la loi du 27 juillet 1999 et donner la possibilité aux officines qui en ont bénéficié de fonctionner normalement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous interrogez Philippe Douste-Blazy sur la création d'officines de pharmacie en milieu rural.
Bien que les dispositions de la loi du 27 juillet 1999 continuent à générer un nombre relativement important de recours hiérarchiques et contentieux contre les arrêtés préfectoraux autorisant les créations et transferts d'officines de pharmacie, il n'en reste pas moins que la suppression de la création des officines par voie dérogatoire a contribué à diminuer significativement leur nombre global.
Les contentieux actuels naissent principalement de l'application des dispositions de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, qui prévoient que toute création d'officine doit, comme tout transfert, répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartier d'accueil de ces officines.
Le préfet a la faculté, si la demande ne lui paraît pas répondre aux dispositions précitées, d'imposer un autre secteur au demandeur ou de fixer une distance minimale par rapport à l'officine la plus proche.
Cette condition de réponse optimale aux besoins est parfois d'application délicate, selon le cas d'espèce, pour le préfet comme pour les services du ministère de la santé, en cas de recours hiérarchique, en l'absence, à ce jour, d'une jurisprudence homogène sur ce point ; ce critère peut effectivement s'avérer bloquant pour les créations puisqu'il s'ajoute à la condition imposée en matière de quotas de population.
Toutefois, le réseau des officines permet actuellement d'assurer une bonne couverture du territoire, y compris dans les zones rurales, et le Gouvernement, qui demeure très attaché au maintien des pharmacies de proximité, n'envisage pas de modifier à court terme les dispositions de l'article L. 5125-3, qui donnent globalement satisfaction à la profession.
Voilà, monsieur le sénateur, la seule réponse que je puis apporter à la question que vous posez.
Mme la présidente. La parole est à M. Georges Mouly.
M. Georges Mouly. Madame la secrétaire d'Etat, vous l'avez bien compris, ma question tenait à une incompréhension face à une situation quelque peu paradoxale, liée au fait que la loi n'est pas toujours respectée. Je vous remercie de votre réponse, que je relirai soigneusement.
aides à la création de maisons médicales
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Juilhard, auteur de la question n° 702, adressée à M. le ministre des solidarités, de la santé et de la famille.
M. Jean-Marc Juilhard. Madame la secrétaire d'Etat, je souhaite attirer à nouveau l'attention du Gouvernement sur la situation des professions de santé sur les territoires ainsi que sur leur organisation et leur présence efficiente pour tous nos concitoyens.
En 2003 et en 2004, le ministre de la santé et vous-même avez eu le courage de mener à bien la réforme de l'assurance maladie. Ce texte a permis d'aborder la situation de la médecine et, plus largement, des professionnels de santé sur les territoires. De nombreux départements se caractérisent par un vieillissement de leur population, mais aussi par un vieillissement des médecins, et donc, à terme, un risque de diminution de leur nombre.
En outre, la loi relative au développement des territoires ruraux, qui a été récemment adoptée, apporte un certain nombre de réponses à ce constat préoccupant. Des incitations, notamment financières, faciliteront l'installation de médecins en zones rurales.
Madame la secrétaire d'Etat, ma question porte sur la présence et l'organisation des professionnels et des services de santé sur les territoires. Le rural dit « profond » n'est pas seul concerné. Les zones urbaines ou périurbaines sont également confrontées à cette question.
Des projets de maisons médicales voient le jour sur ces différents types de territoires. Dans le Puy-de-Dôme, par exemple, un projet est en cours de définition sur le canton de Saint Amant-Tallende, plus largement sur la communauté de communes Les Cheires. Il est porté par une douzaine de professionnels, parmi lesquels des médecins, des kinésithérapeutes, des infirmiers et des dentistes. Conseiller général de ce secteur, je participe avec les professionnels à l'élaboration de ce projet.
Madame la secrétaire d'Etat, j'aimerais connaître les intentions gouvernementales pour ce type de projets. Comment et avec quels moyens peut-on inciter à la création de maisons médicales et accompagner de tels projets ? Plus précisément, pouvez-vous nous informer sur la situation et le devenir du fonds d'aide à la qualité des soins de ville, le FAQSV ?
Enfin, dans le contexte de la décentralisation, des collectivités telles que les régions et les départements, les communautés de communes et les communes pourront-elles aussi mettre en place des dispositifs destinés à faciliter la création de maisons médicales ?
Mme la présidente. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Marie-Anne Montchamp, secrétaire d'Etat aux personnes handicapées. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est très attaché à l'égal accès aux soins sur l'ensemble du territoire. Il considère comme une priorité le maintien et le développement de l'activité des professions de santé dans les zones qui sont déficitaires ou qui risquent de le devenir.
Il n'y a pas de réponse unique à ce difficile problème. Le Gouvernement est convaincu qu'il ne peut être réglé que par des actions et des initiatives multiples, touchant à la rémunération des professionnels, à leurs conditions de vie et aux conditions d'exercice de leur art.
A cet égard, la création de maisons médicales, qui permettent de regrouper plusieurs professionnels de qualification diverse, de faciliter la coordination des soins et d'alléger les charges de structure, est une réponse pertinente.
Le fonds d'aide à la qualité des soins de ville a pleinement vocation à financer le développement de ce type de structures. Je vous invite par conséquent à le solliciter en ce sens, par l'intermédiaire des unions régionales des caisses d'assurance maladie, les URCAM, qui le gèrent à l'échelon régional.
Je rappelle que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 a abondé ce fonds de 60 millions d'euros, pour le porter à un peu plus de 103 millions d'euros. Je rappelle également que l'existence du fonds a été prolongée jusqu'au 31 décembre 2007, ce qui laisse une réelle marge de manoeuvre. Nous réfléchissons par ailleurs à rendre sa création pérenne.
Concernant votre dernière question, qui porte sur les possibilités d'aide ouvertes aux collectivités locales, la loi du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux prévoit bien explicitement, en son article 108, la possibilité pour les collectivités locales de financer des maisons médicales.
Enfin, le ministre de la santé, Philippe Douste-Blazy, et le secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, Xavier Bertrand, présenteront, avant la fin du présent semestre, un plan d'ensemble relatif à la démographie des professions de santé, qui sera soumis à une large concertation, tout particulièrement avec les élus.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marc Juilhard.
M. Jean-Marc Juilhard. Madame la secrétaire d'Etat, je vous remercie des précisions que m'avez apportées sur un sujet qui intéresse l'ensemble des Français.
Vous avez notamment évoqué le FAQSV et plus précisément les URCAM qui, si elles ne gèrent pas ce fonds, tout au moins y donnent accès. Toutefois, jusqu'à présent, les URCAM étaient bloquées sur ce point en raison d'un arrêt provisoire du FAQSV. Vous venez de nous indiquer que ce fonds a été abondé et que son existence sera prolongée jusqu'en 2007. C'est un élément important, que nous pourrons transmettre aux médecins.
Permettez-moi d'ajouter un autre point que je n'ai pas évoqué dans ma question : les médecins, les kinésithérapeutes ou les autres professionnels de santé n'ont pas réellement la formation juridique qui les aiderait à constituer des maisons médicales. Il ne serait pas inintéressant de le noter, afin de réfléchir aux possibilités de leur en proposer une.
Mme la présidente. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)