Chapitre V
Dispositions pénales
M. le président. « Art. 21. - Le chapitre Ier du titre Ier du livre V du code pénal est ainsi modifié :
« 1° L'article 511-1 est ainsi rédigé :
« Art. 511-1. - Est puni de vingt ans de réclusion criminelle :
« 1° Le fait de mettre en oeuvre une pratique eugénique tendant à l'organisation de la sélection des personnes ;
« 2° Le fait de procéder à une intervention en vue de faire naître un enfant, ou se développer un embryon humain, qui ne seraient pas directement issus des gamètes d'un homme et d'une femme. » ;
« 1° bis Après l'article 511-1, sont insérés deux articles 511-1-1 et 511-1-2 ainsi rédigés :
« Art. 511-1-1. - Est punie de cinq ans d'emprisonnement toute personne qui a accepté que des cellules ou gamètes lui soient prélevés afin d'être utilisés dans le but de faire naître un enfant non directement issu des gamètes d'un homme et d'une femme.
« Art. 511-1-2. - Dans le cas où le délit prévu à l'article 511-1-1 est commis à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l'article 123-6 et les dispositions de la seconde phrase de l'article 113-8 ne sont pas applicables. » ;
« 2° A l'article 511-16, les mots : "articles L. 2141-4 et L. 2141-5" sont remplacés par les mots : "articles L. 2141-5 et L. 2141-6" ;
« 3° L'article 511-19 est ainsi rédigé :
« Art. 511-19. - Le fait de procéder à une recherche sur l'embryon humain :
« 1° Sans avoir préalablement obtenu le consentement écrit et l'autorisation visés à l'article L. 2151-3 du code de la santé publique, ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue ;
« 2° Sans se conformer aux prescriptions législatives et réglementaires ou à celles fixées par cette autorisation,
« est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende. » ;
« 4° Il est inséré un article 511-19-1 ainsi rédigé :
« Art. 511-19-1. - Le fait, à l'issue d'une interruption de grossesse, de prélever, conserver ou utiliser des tissus ou cellules embryonnaires ou foetaux dans des conditions non conformes à celles prévues par les premier, deuxième, quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 1241-5 du code de la santé publique ou pour des finalités autres que diagnostiques, thérapeutiques ou scientifiques est puni de quatre ans d'emprisonnement et de 60 000 euros d'amende. » ;
« 5° L'article 511-22 est ainsi rédigé :
« Art. 511-22. - Le fait de mettre en oeuvre des activités d'assistance médicale à la procréation sans avoir recueilli l'autorisation prévue par le troisième alinéa de l'article L. 2142-1 du code de la santé publique ou sans se conformer aux prescriptions de cette dernière est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende. » ;
« 6° L'article 511-23 est ainsi rédigé :
« Art. 511-23. - Le fait d'introduire des embryons humains sur le territoire où s'applique le code de la santé publique ou de les sortir de ce territoire sans l'accord préalable du ministre chargé de la santé est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. » ;
« 7° Les articles 511-25 et 511-26 sont ainsi rédigés :
« Art. 511-25. - I. - Le fait d'exercer les activités nécessaires à l'accueil d'un embryon humain dans des conditions fixées à l'article L. 2141-6 du code de la santé publique :
« 1° Sans s'être préalablement assuré qu'a été obtenue l'autorisation judiciaire prévue au deuxième alinéa dudit article ;
« 2° Ou sans avoir pris connaissance des résultats des tests de dépistage des maladies infectieuses exigés au sixième alinéa du même article ;
« 3° Ou en dehors d'un établissement autorisé conformément aux dispositions du septième alinéa du même article,
« est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
« II. - Est puni des mêmes peines le fait de divulguer une information nominative permettant d'identifier à la fois le couple qui a renoncé à l'embryon et le couple qui l'a accueilli.
« Art. 511-26. - La tentative des délits prévus par les articles 511-2, 511-3, 511-4, 511-5, 511-6, 511-9, 511-15, 511-16 et 511-19 est punie des mêmes peines. »
L'amendement n° 127, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Avant le premier alinéa de cet article, ajouter un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le titre Ier du livre II du code pénal est ainsi modifié :
« 1° Le titre premier du livre II est intitulé : "Des crimes contre l'humanité et contre l'espèce humaine".
« 2° Avant le chapitre premier : "Du génocide", il est inséré une nouvelle division intitulée : "Sous-titre premier : des crimes contre l'humanité".
« 3° Aux articles 213-1, 213-4 et 213-5, le mot : "titre" est remplacé par les mots : "sous-titre".
« 4° Après l'article 213-5, sont insérées les dispositions suivantes :
« Sous-titre II : Des crimes contre l'espèce humaine
« Chapitre premier : Des crimes d'eugénisme et de clonage reproductif
« Art. 214-1. - Le fait de mettre en oeuvre une pratique eugénique tendant à l'organisation de la sélection des personnes est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 7 500 000 euros d'amende.
« Art. 214-2. - Le fait de procéder à une intervention ayant pour but de faire naître un enfant génétiquement identique à une autre personne vivante ou décédée est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 7 500 000 euros d'amende.
« Art. 214-3. - Les infractions prévues par les articles 214-1 et 214-2 sont punies de la réclusion criminelle à perpétuité et de 7 500 000 euros d'amende lorsqu'elles sont commises en bande organisée.
« Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.
« Art. 214-4. - La participation à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de l'un des crimes définis par les articles 214-1 et 214-2 est punie de la réclusion criminelle à perpétuité et de 4 500 000 euros d'amende.
« Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues par le présent article.
« Chapitre II : Dispositions communes
« Art. 215. - Les personnes physiques coupables des infractions prévues par le présent sous-titre encourent également les peines suivantes :
« 1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille, selon les modalités prévues à l'article 131-26 ;
« 2° L'interdiction d'exercer une fonction publique, selon les modalités prévues par l'article 131-27 ;
« 3° L'interdiction de séjour, selon les modalités prévues par l'article 131-31 ;
« 4° La confiscation de tout ou partie de leurs biens, meubles ou immeubles, divis ou indivis ;
« 5° La confiscation du matériel qui a servi à commettre l'infraction.
« Art. 215-2. - L'interdiction du territoire français peut être prononcée, dans les conditions prévues par l'article 131-30, soit à titre définitif, soit pour une durée de dix ans au plus, à l'encontre de tout étranger coupable de l'une des infractions prévues au présent sous-titre.
« Les dispositions des sept derniers alinéas de l'article 131-30 ne sont pas applicables.
« Art. 215-3. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement des infractions définies au présent sous-titre, dans les conditions prévues par l'article 121-2.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, selon les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39 ;
« 3° La confiscation de tout ou partie de leurs biens, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
« Art. 215-4. - L'action publique relative aux crimes par le présent sous-titre se prescrit par trente ans.
« En outre, pour le crime de clonage reproductif prévu par l'article 214-2, le délai de prescription de l'action publique ne commence à courir, lorsque le clonage a conduit à la naissance d'un enfant, qu'à partir de la majorité de cet enfant.
« II. - En conséquence, faire précéder le premier alinéa de cet article de la mention : "II. -". »
Le sous-amendement n° 223, présenté par Mme Borvo, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet amendement pour les articles 214-1 et 214-2 du code pénal, remplacer par deux fois les mots : "vingt ans" par les mots : "trente ans". »
La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 127.
M. Jean-François Mattei, ministre. Ce débat avait déjà mobilisé l'Assemblée nationale au mois de janvier dernier. J'avais, à titre personnel, défendu la création d'une nouvelle incrimination de crime contre « l'humanité de l'homme », pour exprimer le fait qu'il s'agissait bien d'un crime contre l'humanité. Mais la notion de crime contre l'humanité a une connotation massive, collective, alors que je souhaitais souligner que ce crime visait l'humanité de l'homme, dans sa dignité, sa singularité et son unicité. Je me suis donc rangé à l'idée que cette formulation pouvait créer une confusion.
A cette époque, mon amendement avait été rejeté. Depuis, vous le savez, des annonces, probablement mensongères, mais néanmoins inquiétantes, émanant d'organisations sectaires ou de savants quelque peu marginaux - c'est le moins qu'on puisse dire -, nous conduisent à frapper très fort.
Le Gouvernement vous propose donc de rédiger comme suit l'intitulé du titre premier du livre II du code pénal : « Des crimes contre l'humanité et contre l'espèce humaine », et d'inclure, entre les crimes contre l'humanité et les crimes contre la personne, une nouvelle incrimination pour « crimes contre l'espèce humaine ». Elle serait évidemment porteuse de tout ce que cela présuppose, et la peine que vous souhaitez porter à trente ans, ce qui me paraît d'ailleurs raisonnable dans la mesure où la période de sûreté, qui représente la moitié de la peine maximale, sera de quinze ans, puisqu'elle me paraît plus adaptée.
Je tiens quand même à la peine d'amende parce qu'on sait bien qu'au coeur des préoccupations des organisations sectaires, notamment, figure avant tout une préoccupation commerciale.
Enfin, à partir du moment où l'on considère que le clonage reproductif est un crime, l'extraterritorialité s'applique naturellement. Surtout, la création de cette répression pénale s'accompagne d'un délai de prescription de trente ans après l'âge de la majorité, par analogie avec les dispositions qui s'appliquent au viol et à l'inceste où le délai de prescription ne commence à courir qu'à partir de la majorité de l'enfant. Ainsi, lorsqu'un enfant découvrira à sa majorité l'origine de sa naissance, il pourra se retourner contre celui qui l'a créé dans de telles conditions. Je souhaite que celui qui serait éventuellement cloné dispose encore de trente ans, après sa majorité, pour poursuivre le cloneur qui lui aurait donné ainsi la vie.
Telles sont les motivations qui nous conduisent aujourd'hui à vous proposer ce dispositif, mesdames, messieurs les sénateurs. Nous avons bien le sentiment que c'est un moment fort ; une incrimination de cette nature n'est pas créée à chaque session du Parlement ! Mais la gravité du clonage reproductif, au regard des menaces qu'il comporte pour l'homme dans sa dignité, me paraît véritablement mériter cette nouvelle incrimination.
Enfin, je remercie Dominique Perben d'avoir travaillé avec nous en parfaite harmonie.
Voilà donc la proposition qui vous est faite par le Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter le sous-amendement n° 223.
Mme Nicola Borvo. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Nous sommes favorables au sous-amendement n° 223.
L'amendement n° 127 du Gouvernement ainsi que ceux qui suivent visent à créer une nouvelle incrimination pour crime contre l'espèce humaine. La commission y est bien évidemment favorable. J'ajoute que la référence à l'expression « espèce humaine » et la peine de trente ans prévue recueillent tout à fait notre assentiment.
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 223.
M. Bernard Cazeau. Nous sommes favorables à l'amendement n° 127 ainsi qu'au sous-amendement n° 223.
Ainsi que nous l'avons déjà dit, il y a deux jours, dans la discussion générale, et nous le répétons une dernière fois, nous sommes d'accord pour créer une incrimination de crime contre l'espèce humaine et pour le sanctionner d'une peine de trente ans.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le ministre, vous avez fait le choix de nous proposer la création d'une nouvelle catégorie de crime : le crime contre l'espèce humaine, dont sera désormais qualifiée la pratique du clonage d'un être humain.
En effet, il était important de distinguer cet acte de ceux que l'on peut qualifier de « crimes contre l'humanité », qui correspondent, vous l'avez dit, à une destruction organisée et en masse d'êtres humains, dans le cadre d'un conflit. Cette notion de crime contre l'humanité comprend aussi l'atteinte à la singularité de chaque individu et l'atteinte à l'appartenance à la communauté. Vous avez donc raison, cette formulation ne peut s'appliquer au clonage reproductif.
Il est également difficile de considérer ce clonage comme relevant d'un crime contre les personnes, tel le meurtre. Je ferai de nouveau appel à la notion de viol, qui a été évoquée : nous sommes dans une situation de viol, mais de viol à l'état le plus primitif. Nous sommes confrontés à une appropriation de l'être et de son futur, nous sommes confrontés à une véritable prise de possession d'un corps. La sanction de trente ans qui nous est proposée nous donne donc entière satisfaction, et je crois que l'on devrait, en ce domaine, davantage s'inspirer de la notion de viol et des dispositions pénales qui s'appliquent à ce crime.
Il s'agit bien d'une atteinte toute particulière, car elle concerne la spécificité de l'homme par rapport aux autres êtres vivants. Cloner un être humain consisterait à créer un être sans reproduction sexuée. Il faut rappeler qu'au tout début de notre évolution la reproduction était asexuée. Depuis des millions d'années, la nature a progressivement évolué vers une reproduction sexuée des êtres vivants, et l'être humain est bien le résultat de la fécondation d'un ovule féminin par un spermatozoïde masculin, secrétés par des organes humains. Quand nous lions, par ailleurs, que le droit à la reproduction asexuée va enfin être acquis, je crois que nous marchons complètement sur la tête !
Evoquer l'atteinte au genre humaine me paraît pas être une bonne formule, même si nous pouvons l'apprécier. Le clonage reproductif est au-delà d'une agression symbolique, culturelle ou psychologique. Cloner un être humain sous prétexte que nous connaissons de mieux en mieux notre patrimoine génétique aboutirait à des manipulations aux conséquences imprévisibles et incalculables.
Et il existe encore des courants de pensée utilitariste selon lesquels le clonage sera envisageable le jour où il ne présentera plus de risques. Accepter la notion de risques est dangereux, car cela suppose que, lorsque les risques auront été évacués, aucun obstacle n'empêchera plus le clonage reproductif.
Donc, cloner un être humain, en dehors des risques de malformations génétiques que cela pourrait comporter, aboutirait à créer une catégorie d'êtres à part, à qui il faudrait garantir une place dans notre société déjà peu encline à tolérer la différence. Ces clones seraient en quelque sorte des victimes, qui auraient leur dignité et que nous serions amenés à recevoir dans la communauté humaine.
Cloner un être humain aurait aussi pour effet de créer un être sans filiation clairement établie - cela a été longuement développé - à la recherche d'une identité propre, privé de son libre arbitre, sans autonomie réelle vis-à-vis de l'être humain dont il est lui-même le clone.
Cloner un être humain serait, en conséquence, un crime contre la nature, que notre société ne peut accepter.
Différentes formulations ont été envisagées : crime contre la dignité humaine, crime contre l'humanité de l'homme, mais la notion de crime contre l'espèce humaine me semble la plus appropriée.
L'approche biologique n'est pas, en soi, une approche intellectuellement inférieure à d'autres. Nous nous trouvons véritablement dans un contexte où l'espèce est physiquement atteinte. C'est la raison pour laquelle cette approche nous semble la meilleure.
Il va de soi que notre volonté n'est aucunement de freiner - nous avons eu l'occasion de le dire - ni la recherche scientifique ni les progrès en thérapies cellulaires, thérapies géniques, etc. L'homme doit continuer à aller de l'avant et à progresser dans la connaissance.
Pour autant, monsieur le ministre, que penser des transferts du noyau d'un ovocyte de femme stérile dans celui, énuclé, d'une femme fertile, sans expérimentation animale préalable ? Que penser encore de l'implantation de noyaux de cellules humaines dans des ovules de vaches, et de leur culture, voire de leur gestation, pour un meilleur rendement de l'espèce, ainsi que cela se pratique aux Etats-Unis ?
Je souscris à votre remarque selon laquelle les scientifiques ont pu regretter d'avoir fait certaines découvertes qui ont eu sur l'humanité des conséquences qui n'avaient pas été anticipées.
Notre société a acquis une certaine maturité et un certain recul par rapport et grâce à son histoire. Cette maturité et cette réflexion nous autorisent aujourd'hui à interdire le clonage humain au nom de la responsabilité et de la prudence.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je voterai bien entendu l'amendement n° 127, mais permettez-moi de m'interroger sur le délai de prescription.
Monsieur le ministre, vous avez prévu que ce délai serait de trente ans, à compter du moment où les personnes clonées atteindraient l'âge de dix-huit-ans. Dix-huit plus trente font donc quarante-huit ans. Pourquoi prévoir trente ans et non pas l'imprescriptibilité ?
A partir du moment où il y a eu crime, pourquoi celui qui ne le découvrirait qu'à l'âge de quarante-neuf ans ne pourrait-il pas accéder à ce droit que l'on accorderait à un autre qui, lui, aurait pu recueillir l'information suffisamment tôt ? Je m'interroge sur la durée de ce délai. Je comprends qu'il faille en prévoir un mais je me demande si l'on a bien conscience de la gravité de la situation.
M. le président. La parole est à M. Bernard Seillier, pour explication de vote.
M. Bernard Seillier. L'amendement n° 127 a pour objet de pénaliser les atteintes les plus graves à la dignité de la personne humaine, donc à l'humanité. J'ai eu l'occasion de m'exprimer dans cet hémicycle sur cette exigence de respect de la dignité de la personne humaine. Les différences d'appréciation tiennent finalement surtout à la position du curseur sur l'échelle des atteintes à la personne humaine et à l'humanité.
Personne ne s'étonnera donc que, s'agissant de la pénalisation des crimes et des comportements qui sont ici visés, j'y apporte mon entière et franche approbation.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 223.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l'amendement n° 127.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 204, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Remplacer le 1° et le 1° bis de cet article par quatre alinéas ainsi rédigés :
« 1° a) L'article 511-1 est ainsi rédigé :
« Art. 511-1. - Est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende le fait, pour quiconque, de se prêter à un prélèvement de cellules ou de gamètes, dans le but de faire naître un enfant génétiquement identique à toute autre personne, vivante ou décédée. »
« b) Après l'article 511-1, est inséré un article 511-1-1 ainsi rédigé :
« Art. 511-1-1. - Dans le cas où le délit prévu à l'article 511-1 est commis à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l'article 113-6 et les dispositions de la seconde phrase de l'article 113-8 ne sont pas applicables. »
L'amendement n° 182 rectifié, présenté par M. Fischer, Mme Demessine, M. Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article 511-1 du code pénal, remplacer les mots : "vingt ans" par les mots : "trente ans". »
L'amendement n° 168, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le dernier alinéa (2°) du texte proposé par le 1° de cet article pour l'article 511-1 du code pénal :
« 2° Le fait de procéder à un clonage humain par scission d'embryon ou par transfert nucléaire à des fins reproductive, thérapeutique ou de recherche. »
L'amendement n° 169, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
« Après les mots : "dans le but de", rédiger comme suit la fin du 1° bis de cet article pour l'article 511-1-1 du code pénal : "procéder à un clonage humain par scission d'embryon ou par transfert nucléaire à des fins reproductive, thérapeutique ou de recherche". »
La parole est à M. le ministre, pour défendre l'amendement n° 204.
M. Jean-François Mattei, ministre. L'Assemblée nationale a introduit en première lecture le délit permettant de punir les « clients » du clonage, c'est-à-dire toute personne qui accepte que des gamètes ou cellules lui soient prélevés en vue d'un clonage reproductif.
Nous proposons que la sanction de ce délit, qui prendra place dans le livre II du code pénal, soit portée à dix ans d'emprisonnement au lieu de cinq, l'amende encourue étant, elle, doublée.
Par ailleurs, nous avons voulu donner à ce délit, ce qui est une exception aux règles du code pénal, un caractère d'extraterritorialité. Ainsi, ceux ou celles de nos concitoyens qui iraient solliciter un clonage auprès d'un cloneur à l'étranger tomberaient à leur retour en France sous le coup de la loi.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour défendre l'amendement n° 182 rectifié.
Mme Nicole Borvo. Cet amendement concordant avec celui que j'ai defendu précédemment, je ne développerai pas à nouveau notre argumentation.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour défendre les amendements n°s 168 et 169.
M. Gilbert Barbier. Compte tenu de ce qui a été voté précédemment, ces deux amendement n'ont plus d'objet et je les retire.
M. le président. Les amendements n°s 168 et 169 sont retirés.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 204 et 182 rectifié ?
M. Francis Giraud, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement n° 204.
Elle est en revanche défavorable à l'amendement n° 182 rectifié.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 182 rectifié ?
M. Jean-François Mattei, ministre. Je comprends très bien la logique qui a guidé Mme Borvo et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Je voudrais cependant que l'on marque la différence entre la personne qui détient une connaissance, un pouvoir scientifique qu'elle met en oeuvre et celle qui peut, c'est vrai, être abusée. Il faut dissocier le cas de cette dernière du cas du scientifique, du médecin ou du biologiste qui, sciemment, applique une technique.
Il y a un écart, et c'est la raison pour laquelle nous sommes restés dans le domaine du crime pour le cloneur et dans le domaine du délit, avec extraterritorialité, pour la personne qui s'y prête.
Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 182 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 204.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 182 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° 128, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après le 2° de cet article insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° Le premier alinéa de l'article 511-17 est ainsi rédigé :
« Le fait de procéder à la conception in vitro ou à la constitution par clonage d'embryons humains à des fins industrielles ou commerciales est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Cet amendement introduit dans le code pénal la précision apportée à l'article L. 2151-2-1 relative à l'interdiction de la constitution par clonage d'embryons humains à des fins industrielles et commerciales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 128.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 129, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après le 2° de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° L'article 511-18 est ainsi rédigé :
« Art. 511-18. - Le fait de procéder à la conception in vitro ou à la constitution par clonage d'embryons humains à des fins de recherche est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Cet amendement a le même objet que le précédent, mais est concerné cette fois le clonage d'embryons humains à des fins de recherche.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 129.
(L'amendement est adopté.).
M. le président. L'amendement n° 130, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après le 2° de cet article, insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° Après l'article 511-18, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. 511-18-1. - Le fait de procéder à la constitution par clonage d'embryons humains à des fins thérapeutiques est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende. »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. C'est encore le même objet, l'amendement visant ici le clonage d'embryons humains à des fins thérapeutiques.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 130.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 170, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le 3° de cet article pour l'article 511-19 du code pénal :
« Art. 511-19. - Le fait de procéder à une recherche sur l'embryon humain, en dehors des dispositions de l'article L. 2131-4 du code de la santé publique, est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 EUR d'amende. » ;
L'amendement n° 60, présenté par M. Giraud, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le 3° de cet article pour l'article 511-19 du code pénal, après les mots : "procéder à", insérer les mots : "une étude ou" ».
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour défendre l'amendement n° 170.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement n'a plus lieu d'être et je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 170 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 60.
M. Francis Giraud, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement est adopté.) M. le président. L'amendement n° 61, présenté par M. Giraud, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Après les mots : "est puni" rédiger comme suit la fin du texte proposé par le 4° de cet article pour l'article 511-19-1 du code pénal : "de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende".»
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Giraud, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir la peine de deux ans d'emprisonnement applicable au fait de prélever ou de conserver des tissus ou cellules à l'issue d'une IVG dans des conditions non conformes à la loi, peine que l'Assemblée nationale a portée à quatre ans, ce qui paraît excessif compte tenu de la nature du délit.
En outre, le code pénal ne prévoit jamais de peine de quatre ans d'emprisonnement : on n'y trouve que des peines de un an, de trois ans, de cinq ans, de sept ans ou de dix ans.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Mattei, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 131, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après le 4° de cet article, insérer six alinéas ainsi rédigés :
« Art. 511-19-2 - Est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende :
« 1° le fait de conserver des cellules souches embryonnaires sans avoir obtenu l'autorisation mentionnée à l'article L. 2151-3-2 du code de la santé publique ou alors que cette autorisation est retirée ou suspendue ;
« 2° le fait de conserver des cellules souches embryonnaires sans se conformer aux règles mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 2151-3-2 du même code ;
« 3° le fait de céder des cellules souches embryonnaires à des organismes non titulaires de l'autorisation délivrée en application de l'article L. 2151-3 ou de l'article L. 2151-3-2 du même code ;
« 4° le fait d'avoir cédé des cellules souches embryonnaires sans en avoir informé préalablement l'Agence de la biomédecine.»
La parole est à M. le ministre. M. Jean-François Mattei, ministre. Il s'agit de la sanction pénale applicable en cas d'infraction aux dispositions relatives à l'autorisation de conserver à des fins scientifiques les cellules souches embryonnaires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 131.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 132, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le 6° de cet article pour l'article 511-23 du code pénal remplacer les mots : "Du ministre chargé de la santé" par les mots : "De l'Agence de la biomédecine". »
La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Il s'agit d'un amendement de cohérence.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Francis Giraud, rapporteur. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Yves Fréville, pour explication de vote.
M. Yves Fréville. Monsieur le ministre, je ne suis pas compétent dans ces matières, et je vous prie de m'excuser si j'interviens néanmoins, mais je constate que l'incrimination de l'article 511-23 porte sur l'importation en France d'embryons ; or l'importation d'une catégorie beaucoup plus large, puisqu'il s'agissait des tissus et cellules embryonnaires, a été autorisée tout à l'heure. Cela signifie-t-il que l'incrimination et donc la sanction ne concernent que les embryons stricto sensu ?
A cette question, vous me permettrez d'ajouter une remarque : nous avons voté tout à l'heure l'autorisation préalable pour l'importation. Or, au sens économique mais aussi au sens juridique du terme, puisque cela figure dans le code des impôts, il n'y a d'importation qu'extracommunautaire.
Il va sans doute de soi, et nos débats, je crois, en feront foi, que nous ne visions pas seulement l'importation au sens juridique du terme, mais également les échanges intracommunautaires. Cela méritait toutefois d'être précisé.
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je n'ai vu nulle part que pourraient être sanctionnées d'éventuelles exportations françaises de cellules ou d'embryons. Or, on peut très bien imaginer que des scientifiques, « bloqués » dans leurs recherches en France, décident d'exporter des cellules vers un pays où tout est permis pour y faire ce qui leur est interdit ici.
Je voudrais donc m'assurer qu'une sanction a bien été prévue à l'encontre de ceux qui seraient tentés d'exporter des cellules ou des embryons pour procéder à des recherches ailleurs qu'en France ou en Europe.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-François Mattei, ministre. Monsieur Vasselle, nous avons voté, au cours de l'examen du texte, une disposition spécifique sur ce que l'on a qualifié, de manière d'ailleurs un peu maladroite mais personne n'a trouvé mieux, le « déplacement d'embryon », lequel sera soumis à autorisation de l'Agence. A l'évidence, le mot « déplacement » vaut dans les deux sens, vers l'intérieur comme vers l'extérieur, et, si une exportation n'a pas été autorisée, il y aura bien sûr sanction.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 132.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)