SEANCE DU 12 DECEMBRE 2002
RÉORGANISATION DES COULOIRS AÉRIENS
EN ILE-DE-FRANCE
Discussion d'une question orale avec débat
(Ordre du jour réservé)
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 4.
M. Gérard Larcher demande à M. le ministre de l'équipement, des transports, du
logement, du tourisme et de la mer de lui indiquer quel est le bilan pouvant
être actuellement dressé de la réorganisation des couloirs aériens en
Ile-de-France. La période probatoire de ces modifications arrivant à échéance,
il souhaiterait savoir quelle évaluation en est faite. Dans l'hypothèse d'un
renoncement au projet de troisième aéroport, la redéfinition des couloirs
aériens d'une part, et le développement des plates-formes régionales d'autre
part, pourraient-ils constituer une réponse aux attentes des populations
survolées ? Il souhaiterait enfin savoir quelles sont aujourd'hui les
perspectives de retrait de l'exploitation des avions produisant les nuisances
sonores les plus importantes.
La parole est à M. Gérard Larcher, auteur de la question.
M. Gérard Larcher.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la
commission des affaires économiques et du Plan se préoccupe depuis longtemps de
la question des nuisances sonores aéroportuaires. Son rapporteur pour avis,
Jean-François Le Grand, qui a été membre de la mission Douffiagues portant
notamment sur l'éventuelle création d'un troisième aéroport, connaît bien cette
question. Il a rappelé, il y a quelques jours encore, à quel point la
thématique des nuisances sonores pèse de façon croissante sur le développement
du transport aérien.
J'ai souhaité, monsieur le ministre, revenir sur ce dossier, car je suis
profondément convaincu, de longue date, que la question du bruit en général est
une préoccupation majeure de nos concitoyens, comme un sondage très récent l'a
d'ailleurs rappelé.
La nuisance, vous le savez, monsieur le ministre, ne se résume pas à un simple
indice de mesure physique : elle dépend aussi de facteurs psychologiques, en
fonction desquels le malaise physique est plus ou moins bien supporté. Or ce
qui rend la nuisance insupportable, c'est notamment le sentiment d'injustice,
voire de tromperie, ressenti par celui qui en est victime. De ce point de vue,
la mise en oeuvre de la nouvelle circulation aérienne en Ile-de-France est, à
tout le moins, contestable.
Je veux, en cet instant, saluer le travail que notre collègue Alain Gournac
mène depuis plus d'une année pour sensibiliser le ministère des transports à ce
sujet. Votre prédécesseur, M. Gayssot, en présentant cette réforme, a affirmé
qu'elle permettrait de diminuer l'exposition des populations aux bruits.
Aujourd'hui, les gains apparaissent bien maigres au regard des plaintes de plus
en plus pressantes des populations concernées. Le secrétaire d'Etat aux
transports, Dominique Bussereau, estimait dans cette enceinte vendredi dernier
que la réforme avait été menée « dans un simulacre de concertation ». Je ne
souhaite pas polémiquer sur le passé et je me tourne vers l'avenir, donc vers
le Gouvernement : monsieur le ministre, nous confirmez-vous aujourd'hui que
l'objectif global de réduction des nuisances n'est pas atteint ? C'est ce que
beaucoup d'entre nous ressentent sur le terrain, en discutant avec leurs
administrés, leurs voisins ou, tout simplement, en levant les yeux vers le
ciel.
Pouvez-vous nous dire quelle action le Gouvernement envisage pour remédier à
cette situation qui, ayons le courage de le dire, n'est pas satisfaisante ?
Le problème comporte en réalité deux aspects. Tout d'abord, les trajectoires
définies par Eurocontrol et mises en application depuis le 21 mars dernier
paraissent inégalement respectées par les avions. Les chiffres de vos services
ou ceux de l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires,
l'ACNUSA, font fréquemment état d'un taux de 20% de non-respect. Or
l'insuffisante précision des définitions de trajectoires rend difficile la
sanction de leur non-respect.
Vous aviez annoncé, monsieur le ministre, la mise en oeuvre de volumes de
protection environnementale avant la fin de l'année, afin de permettre un
meilleur contrôle et, le cas échéant, de réelles sanctions. Pouvez-vous nous
dire où en est le dossier au regard du respect des trajectoires définies et des
sanctions éventuelles ?
Le second aspect de la question concerne l'amélioration du dispositif. Au-delà
du respect des trajectoires existantes, je souhaite vous demander, monsieur le
ministre, dans quelle mesure les trajectoires peuvent être améliorées. Une
proposition revient constamment : le relèvement des trajectoires d'approche,
sur laquelle mon ami Alain Gournac m'a fourni toutes les explications.
Aujourd'hui, en matière de circulation aérienne en Ile-de-France, on considère
que les avions doivent descendre à 1200 pieds le plus tôt possible pour
atterrir.
Bien entendu, je ne méconnais pas les réalités techniques suivant lesquelles
un avion de ligne ne peut pas aborder sa descente sur l'aéroport avec une pente
de plus de 5%, sauf à remettre en cause la sécurité qui reste évidemment la
priorité absolue du transport aérien.
Sans vouloir abuser de chiffres, cela signifie concrètement que l'interception
de l'axe de descente de l'ILS,
Instrument Landing System
, doit se faire
selon les règles définies par l'Organisation de l'aviation civile international
- l'OACI - à 3000 pieds. Cependant, même avec ces contraintes de vol, des
progrès sont encore possibles. En raison du caractère technique de ces
questions, je ne prendrai ici que quelques exemples significatifs et,
pardonnez-moi, très yvelinois.
S'agissant de l'approche de la piste 7 d'Orly, les avions, lorsqu'ils
survolent Ablis, à la limite des régions Centre et d'Ile-de-France, sont à 3000
pieds. Or cette commune est à 25 milles nautiques de la piste. Avec une pente
de 5%, l'altitude théorique à l'entrée de la région d'Ile-de-France pourrait
être de 7500 pieds.
M. Alain Gournac.
Bien sûr !
M. Gérard Larcher.
Je dis théorique, parce que l'ILS n'est pas certifié pour des altitudes
supérieures à 5 000 pieds. Toutefois, il existe une marge de 1 000 ou 2 000
pieds, qui permettrait un gain extrêmement appréciable, de la région Centre,
particulièrement l'Eure-et-Loir, jusqu'à l'approche d'Orly.
Pour ce qui est de l'arrivée à Roissy en provenance du Sud-Ouest par vent
d'est, les avions amorçent leur descente finale au-dessus du charmant village
de Saint-Léger-en-Yvelines, au-dessus de la forêt de Rambouillet, et survolent
Thoiry à près de 4000 pieds avant de rester en palier à cette altitude sur
trente kilomètres ; je rappelle que Thoiry est à soixante kilomètres de la
piste 2 de Roissy ! Ne pourrait-on imaginer, monsieur le ministre, de
raccourcir ce palier inutilement long, ce qui permettrait d'améliorer la
situation de toutes les communes comprises entre Thoiry et Achères ?
Le dernier exemple frappant est celui de Saint-Arnoult-en-Yvelines, devenu,
depuis la réorganisation de mars dernier, un véritable carrefour à avions. Les
avions charters gros-porteurs qui décollent d'Orly face à l'ouest posent
notamment un problème. En effet, ils sont souvent anciens, à la limite de leurs
capacités techniques et donc particulièrement bruyants.
Ces exemples illustrent le nombre et la variété des situations. A ce titre, le
relèvement des trajectoires doit s'accompagner du retrait des avions les plus
bruyants. Où en sont, monsieur le ministre, les retraits d'exploitation de ces
avions ?
Vos services, monsieur le ministre, ont parfois semblé par le passé réticents
à l'idée du relèvement des trajectoires d'approche. Si l'on en croit les
spécialistes, elle n'est pourtant pas extravagante. Les habitants de l'Essonne
ont bien obtenu le relèvement des trajectoires de la piste 26 d'Orly par vent
d'est. Je crois qu'il s'agit surtout de moderniser notre conception même des
procédures d'approche.
Je voudrais rappeler qu'aux Etats-Unis ont été mis en oeuvre, il y a déjà
longtemps, des profils de descente qui permettent aux avions de ne pas
descendre trop tôt pour voler en palier. Ces profils de descente ont permis de
rendre acceptable le survol fréquent de villes comme Los Angeles ou San
Francisco. Les volumes de protection environnementale ne pourraient-ils pas
évoluer pour devenir de véritables profils d'approche contraignants ?
J'en viens au fond politique de ce dossier, c'est-à-dire à la transparence. Il
est de notre responsabilité d'élus de dire clairement que les avions devront
bien passer quelque part et pas toujours ailleurs que chez nous... Les
riverains survolés doivent obtenir des gages ! Tout ce que les techniques de
navigation aérienne et de construction aéronautique peuvent faire pour réduire
les nuisances doit être mis en oeuvre. Le retrait des avions les plus bruyants,
le relèvement des trajectoires d'approche et la sanction des infractions
permettront d'apaiser nos concitoyens qui sont au bord de perdre toute foi en
la puissance publique sur ce dossier. Or, le Premier ministre l'a dit, il est
important que les citoyens retrouvent confiance en l'Etat, sur ce dossier comme
sur d'autres, qu'il s'agisse de la sécurité ou des nuisances.
Je suis de ceux qui croient que l'on peut convaincre les gens d'accepter une
part de contrainte partagée au nom de l'intérêt général. Encore faut-il que le
fardeau soit justement réparti et qu'il soit inévitable. Je suis convaincu que,
sur ces deux points, l'Etat peut mieux faire.
J'en viens, monsieur le ministre, à la raison pour laquelle j'ai souhaité que
nous abordions ce dossier sous la forme d'une question orale avec débat. Je
crois le débat absolument indispensable sur cette question. Il est évident
qu'il ne peut exister, sur une telle question, de clivage partisan. Nous sommes
tous ici, quels que soient nos choix, confrontés à cette question de société.
Il est essentiel que le Parlement se saisisse du débat et puisse proposer des
solutions plus consensuelles.
J'ai noté, monsieur le ministre, que vous avez confié à la commission des
affaires économiques, de l'environnement et du territoire de l'Assemblée
nationale le soin de mener une réflexion sur la nécessité ou non d'un troisième
aéroport en région parisienne, mais je ne dis pas en Ile-de-France !
(Sourires.)
C'est un sujet sur lequel la commission des affaires économiques du Sénat
s'est exprimée depuis plus de six ans, notamment lors de deux débats sur
l'aménagement et le développement du territoire.
La commission avait alors fait part des très grandes réserves que ce dossier
lui inspirait, tant sur le plan environnemental que sur le plan économique ou
d'aménagement du territoire.
Les conclusions rendues par nos collègues de l'Assemblée nationale permettront
d'ouvrir un débat auquel le Sénat prendra toute sa part. Je me félicite,
monsieur le ministre, que vous ayez décidé d'associer le Parlement aux choix du
Gouvernement en cette matière. En outre, à l'occasion de la discussion des
conclusions de l'audit que le Premier ministre a demandé sur les
infrastructures, je ne doute pas que nous reviendrons sur ces sujets. Je pense
que le débat de ce matin est une étape importante dans le processus de
discussion entre nous. En conclusion, monsieur le ministre, avant de laisser
la place au débat, je voudrais insister sur le fait que la nécessaire
clarification de ce dossier ne sera pas un frein au trafic aérien, mais au
contraire la condition d'un développement harmonieux et sans à-coups. Ce
secteur emploie nombre de nos concitoyens, il génère une activité économique
appréciable, il mérite que soient définies des règles du jeu claires et
acceptées par tous. Je crois sincèrement que nous avons une marge pour
améliorer sensiblement la situation actuelle, qui n'est pas satisfaisante.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac.
Je veux d'abord remercier notre collègue yvelinois Gérard Larcher de nous
permettre d'aborder ce dossier extrêmement important, sur lequel je travaille
depuis 1995.
Pourquoi suis-je venu à m'y intéresser ? Parce que sans aucune concertation
préalable, nous avons subi un beau jour un stockage d'avions au-dessus des
Yvelines pour permettre la descente progressive des avions sur les pistes
d'Orly : c'était, mais nous ne le savions pas encore, la route MOSUD. Alors,
parce qu'il le fallait bien, nous nous sommes battus.
On nous a d'abord dit qu'il était impossible d'interrompre la route MOSUD la
nuit, puis elle a été fermée du soir au matin. Ensuite, on est venu nous parler
d'un réorganisation. Nous avons joué le jeu et, en ce qui me concerne, j'ai
participé à toutes les réunions avec Eurocontrol. Mais c'est à un monologue que
nous avons assisté : après le préfet de région, fort intéressant, tous les
experts s'exprimaient, et, nous, nous nous taisions puisque l'on ne nous
donnait pas la parole.
Monsieur le ministre, c'est ce que j'appelle cela une fausse concertation !
En conclusion, on nous a dit qu'on allait obtenir des améliorations. Je suis
de l'avis de Gérard Larcher : il ne s'agit pas de dire que les avions doivent
passer chez les autres. Nous, nous sommes d'accord pour qu'ils passent
au-dessus de nous, mais qu'ils le fassent sans nuisances, et c'est possible.
Ces promesses d'amélioration, nous avons attendu un mois, deux mois qu'elles
se concrétisent. Quel que soit le sens du vent, nous nous sommes aperçus qu'il
n'y avait pas d'amélioration. Ce fut bien sûr une déception totale pour les
soixante et onze maires qui sont membres de mon comité, aujourd'hui devenu une
association, l'ACRENA, l'association des communes pour la réduction des
nuisances aériennes.
Nous aurions pu admettre que, peut-être, nous nous trompions, mais je
travaille avec l'ACNUSA, l'autorité de contrôle des nuisances sonores, dont je
suis membre et nous avons encore eu une réunion la semaine dernière. Or
l'ACNUSA peut vous confirmer que les altitudes et les couloirs ne sont pas
respectés. J'ai là ses conclusions, monsieur le ministre, je peux vous les
donner, mais vous les avez certainement !
M. Gérard Larcher disait que les chiffres de l'ACNUSA faisaient apparaître un
non-respect de la réglementation dans 20 % des cas. Cher Gérard Larcher, nous
avons parfois constaté des taux de 40 %, voire de 50 %, de non-respect !
Notre association, l'ACRENA, est pour l'avion, nous sommes nous-mêmes pour
l'avion et pour le développement de l'aviation en France, parce que nous
n'ignorons pas qu'elle a des concurrents, mais nous pensons que l'aviation en
France peut se développer dans le respect des populations. Monsieur le
ministre, on parle beaucoup des riverains. J'ai beaucoup de respect pour ces
derniers, mais parlons aussi des « survolés ».
Les Américains, qui ne sont tout de même pas les plus en retard dans ce
domaine, ont élevé l'altitude d'interception de l'axe ILS, solution évoquée par
Gérard Larcher. Comme j'ai pu le constater il y a un mois à Los Angeles, les
avions à l'approche sont les uns derrière les autres, mais il n'y a plus de
nuisances !
Relever le point ILS, donner une culture antibruit à nos pilotes, voilà ce
qu'il faut faire ! Le comité d'experts, comprenant pilotes, anciens pilotes et
contrôleurs aériens, qui était encore hier réuni ici même, nous disait qu'il
est tout à fait possible d'améliorer les choses, à condition, bien sûr, de
travailler sérieusement.
Il faut aller jusqu'à infliger des contraventions. Elles sont prévues par la
loi, mais à ce jour, pas un pilote n'a été verbalisé à ma connaissance et, s'il
y a un exemple, faites-le moi savoir, car le sujet m'intéresse !
Quant aux compagnies, on peut leur infliger des sanctions, mais encore faut-il
qu'elle les paient !
Monsieur le ministre, je reviens à la concertation. Ils n'est plus possible de
prétendre qu'il y a une véritable concertation quand, en face de nous, on s'en
tient au monologue. Il faut que la DGAC, et ADP, pour lesquels j'ai beaucoup de
respect, acceptent de nous écouter et de travailler avec nous.
Tous les jours, à minuit vingt-cinq, un avion nous réveille tous - y compris
d'ailleurs un pilote qui était là hier - mais, si je prends ma plume pour
écrire à ADP, on me répondra : monsieur Gournac, vous vous trompez, c'était
certainement une mobylette qui passait dans la rue !
(Sourires.)
Il est inacceptable que nous ne soyons respectés ni par la DGAC, ni par ADP.
Qu'on nous propose enfin quelque chose de positif !
Nous le répétons : les avions doivent passer et nous sommes favorables au
développement, mais dans le respect des survolés !
Vos services vous diront certainement que M. Alain Gournac s'exprime avec
outrance. Non, monsieur le ministre ! Je vous invite, avec beaucoup de
sympathie, car vous êtes une personnalité que j'estime, à venir voir si M.
Alain Gournac ment ! Les Yvelines, mon département - parce qu'il faut bien
prendre un exemple -, en ont assez !
Il y a eu, monsieur le ministre, une réunion publique dans ma salle des fêtes.
Il aurait fallu l'enregistrer ! La langue de bois !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et les oreilles ouvertes !
M. Alain Gournac.
Les gens m'ont dit que ce n'était vraiment pas la peine de venir à ces
réunions.
Voilà, monsieur le ministre, ce qu'avec beaucoup de respect je voulais vous
dire.
J'ai beaucoup de respect pour la DGAC, pour ADP, pour les pilotes, pour les
aiguilleurs du ciel. Je souhaite que l'on en manifeste autant à l'égard des
victimes des nuisances aériennes.
Enfin, monsieur le ministre, voilà quelques mois j'ai demandé un rendez-vous à
votre cabinet. Je sais que vous êtes très occupé, mais mon association -
puisque nous avons été obligés de transformer en association notre comité, qui
n'était pas respecté - serait heureuse de vous rencontrer afin que l'on puisse
parler. Nous vous ferions des propositions, d'ailleurs homologuées par
l'ACNUSA, dont, je le répète, je suis membre.
Monsieur le ministre, je ne vous ai pas lu un discours académique que l'on
m'aurait préparé ; j'ai été direct, mais je crois que c'est ce que vous aimez !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré.
« Je serai Chateaubriand ou rien. » Vous aurez reconnu Victor Hugo. Je ne me
trompe pas de débat, mais je vous dois une explication. Cette citation, lue par
un des plus grands acteurs de la Comédie-Française à l'occasion d'un spectacle
organisé dans le cadre des cérémonies du bicentenaire de la naissance de Victor
Hugo, dans les jardins de la maison de Chateaubriand, à la Vallée-aux-Loups, a
été brutalement interrompue par un avion survolant le spectacle à basse
altitude.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous, c'est tous les jours comme cela !
M. Denis Badré.
Cela s'est produit à vingt reprises pendant la soirée,...
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Comme chez nous !
M. Denis Badré.
... et, chaque fois, les acteurs étaient interrompus !
Ce n'est pas tolérable ! On ne tolère pas un portable dans une salle de
cinéma, comment admettre que des avions gâchent la soirée non seulement des
spectateurs venus passer une « agréable soirée », mais aussi les 500 000
personnes qui habitent autour de la Vallée-aux-Loups, alors qu'elles espéraient
profiter de quelques instants de repos réparateur, à la fin d'une soirée d'été,
toutes fenêtres ouvertes après une dure journée de travail.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous, on nous dit de fermer nos fenêtres !
M. Denis Badré.
C'est la réalité dans les Yvelines - Gérard Larcher et Alain Gournac le
disaient -, c'est aussi ce que nous vivons dans les Hauts-de-Seine. Nous sommes
en effet voisins.
Ce n'est plus admissible lorsqu'il s'agit de lignes régulières, d'autant qu'on
peut, manifestement, tenter de cerner le problème dans ce cas, mais ce n'est,
hélas ! pas le seul.
Dans un département comme le nôtre, nous subissons aussi les nuisances des
lignes non régulières : le fret et les cargos, qui connaissent encore moins que
les lignes régulières la différence entre le jour et la nuit, les avions
d'affaires qui décollent du Bourget, les avions militaires qui décollent de
Villacoublay, les hélicoptères qui partent d'Issy-les-Moulineaux sans respecter
les horaires ni les contraintes d'altitude.
C'est le « paysage » dans lequel nous vivons, et c'est pourquoi je remercie
tout particulièrement Gérard Larcher d'avoir provoqué notre débat de ce
jour.
Bien sûr, c'est une question passionnelle - vous le savez, monsieur le
ministre, mieux que quiconque, ou en tout cas beaucoup mieux que la plupart -
mais pourquoi est-elle passionnelle ?
Je crois que c'est parce qu'elle touche à la mondialisation. L'augmentation du
trafic aérien comme celle des échanges commerciaux sont des réalités
d'aujourd'hui auxquelles on ne peut pas s'opposer. Je serai d'ailleurs le
dernier à m'y opposer alors que j'ai beaucoup étudié la question de la
mondialisation et les conditions dans lesquelles le développement des relations
doit pouvoir se réaliser, mais, nous sommes nombreux à le dire, la
mondialisation doit être humanisée.
Et nous sommes bien là dans un domaine où la mondialisation doit être
humanisée : mondialisation, oui, augmentation des échanges, oui, mais pas au
prix de la sécurité ou de la santé de survolés passifs !
C'est passionnel aussi parce que nous touchons à l'environnement, à la
sécurité, à la santé, sujets auxquels, tous, nous sommes sensibles.
C'est passionnel encore parce que nous sommes dans un domaine où la
non-décentralisation fait des ravages. Dans un domaine aussi complexe, les
politiques n'osent pas réagir quand les experts - ceux qui savent - ont dit ce
qu'était la vérité et ce qu'était la solution.
Monsieur le ministre, nous attendons des spécialistes qu'ils dialoguent avec
nous, les politiques,...
M. Alain Gournac.
Tout à fait.
M. Denis Badré.
... pour que nous puissions jouer notre rôle. Que ceux qui savent ne nous
disent plus : voilà la solution, il n'y en a pas d'autre et il ne peut y en
avoir d'autre. Qu'ils essaient au contraire d'en imaginer d'autres afin que
nous puissions participer à un débat où des alternatives nous sont présentées,
au lieu d'une solution obligatoire, amendable à l'extrême marge, à condition de
ne pas aller trop loin.
Nous souhaitons participer au débat, nous sommes prêts à essayer de
comprendre, même si nous n'avons pas à la base les mêmes connaissances, la même
expérience, les mêmes capacités que ceux qui savent. C'est important pour
l'avenir.
C'est un sujet sensible du point de vue de la décentralisation, car, dans un
beau pays centralisé comme le nôtre, on conçoit mal qu'un long-courrier décolle
d'ailleurs que de Paris. Pour le long-courrier, la France égale Paris. Ce n'est
pas le cas dans d'autres pays du monde.
C'est un sujet sensible puisque, quand on commence à se dire qu'il faudrait
tout de même essayer, non pas de décentraliser, mais de « desserrer » un peu,
dans le meilleur des cas, on va à 120 kilomètres de Paris, par exemple, à
Chaulnes ou à Beauvilliers, mais on n'y va qu'une fois ! On s'aperçoit en effet
qu'il n'est pas très facile pour des passagers en correspondance d'aller de
Beauvilliers à Roissy parce qu'il faut traverser Paris et qu'à certains moments
de la journée, cela prend trois heures, ce qui signifie qu'on n'aura pas la
correspondance. Alors, on va à Chaulnes et, dans cinq ans, on ira peut-être
ailleurs. On parle de Vatry. On dit que Vatry ne serait pas une mauvaise
solution pour le fret,...
M. Gérard Larcher.
Notre collègue François Gerbaud, lui, est pour Châteauroux-Déols !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ou Chartres !
M. Denis Badré.
... mais les experts disent alors que l'on ne peut pas dissocier le fret du
trafic voyageurs.
Arrêtons de dire
a priori
qu'une solution est impossible. Le sujet est
suffisamment grave pour que l'on n'élude aucune question, aucune suggestion, au
motif que ce serait impossible. Je demande que l'on étudie toutes les
solutions. Que l'on arrête de me dire que le fret ne peut pas être localisé à
Vatry au prétexte que le fret ne peut être dissocié du trafic voyageurs.
Je pense que, dans une certaine mesure, on pourrait le faire, mais il faut que
les experts acceptent un vrai dialogue avec nous sur ce sujet !
Si l'on veut décentraliser, n'allons pas à 120 kilomètres de Paris. Chaulnes
est une solution qui n'en est pas une parce que c'est à la fois trop loin et
pas assez loin de Paris pour que l'on puisse vraiment parler de
décentralisation. Etudions la possibilité de développer Satolas, Nantes, Lille
: pour Lille, faisons-le en concertation avec les Britanniques et les Belges,
pour Satolas, faisons-le en concertation avec les Helvètes !
Si l'on a fait un TGV pour relier Lyon à Roissy, ce n'est peut-être pas
uniquement pour que les Lyonnais puissent prendre un long-courrier à Paris,
c'est peut-être aussi pour que les Parisiens puissent prendre un long-courrier
à Satolas. Pourquoi pas ? Une heure de TGV en plus, ce n'est pas un drame,
comparé aux deux heures de trajet que l'on est prêt à imposer aux voyageurs
pour aller à Beauvilliers.
Sur toutes ces questions, il faut reprendre la réflexion de manière
dépassionnée et ouverte.
Au-delà des problèmes d'infrastructures et de choix des implantations pour les
aéroports, il y a aussi des problèmes de gestion, qui ont déjà été largement
évoqués par Gérard Larcher et Alain Gournac, et sur lesquels je reviendrai dans
un instant.
Quant au bruit des avions, il faut que nos constructeurs intensifient leurs
travaux pour se positionner à l'avenir de façon concurrentielle à travers le
monde.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il faut des crédits pour la recherche !
M. Denis Badré.
De toute façon, dans vingt ans, on exigera des avions moins bruyants. Que nos
constructeurs polarisent leurs recherches sur ce point ! Cela ne sera pas un
mauvais investissement pour eux et, à l'évidence, il sera profitable aux
survolés.
Quant aux couloirs aériens, ce sont des infrastructures de transport comme les
autres. On impose une enquête publique pour la définition du tracé d'un TGV.
Pourquoi n'impose-t-on pas une enquête publique pour les couloirs aériens ? Ils
provoquent les mêmes nuisances et ils ont autant de conséquences sur
l'environnement qu'une ligne de TGV. Les mêmes procédures devraient donc être
retenues.
Il faut raisonner en termes de prospective et prendre dès maintenant en compte
le fait que des redéploiements interviendront entre les différents modes de
transport. Dans ce cadre, le trafic aérien sera amené à se développer : on
parle d'un doublement d'ici à 2015. Il est donc de la responsabilité du
personnel politique d'intégrer dès maintenant cet élément à la réflexion.
En ce qui concerne l'utilisation des couloirs, je demande avant toute chose
que ceux-ci soient respectés. On dit qu'ils ne le sont pas ; je ne veux pas
ajouter foi à des racontars, mais le fait que de telles rumeurs circulent
signifie que les gens sont exaspérés et qu'ils veulent à tout prix démontrer
que le dispositif ne fonctionne pas. En tout état de cause, monsieur le
ministre, je souhaite que vous fassiez respecter strictement les couloirs
aériens et que les accords qui ont pu être conclus soient appliqués.
En outre, il convient également de faire respecter le couvre-feu, monsieur le
ministre. Il n'est pas admissible que les avions de la postale volent
impunément à toute heure du jour et de la nuit à basse altitude ou que les
militaires soient dispensés d'observer le couvre-feu.
Tout cela relève d'une logique d'ensemble, et nous ne pouvons éluder aucun
aspect de ce débat, qu'il s'agisse du choix des infrastructures ou du mode de
gestion des couloirs et des procédures.
Je conclurai mon propos en m'exprimant sur la situation dans les
Hauts-de-Seine, département qui est concerné par la mise en place de nouveaux
couloirs visant à désengorger les phases d'approche encombrées au nord-ouest de
Roissy et à modifier les accès à Orly. L'organisme indépendant Eurocontrol -
European Organization for the Safety of Air Navigation
- a travaillé sur
toutes les questions relatives à Orly ; nous demandons que le même travail soit
accompli, de manière aussi approfondie, pour Roissy et, si possible, pour Le
Bourget et les autres aéroports que j'ai cités tout à l'heure.
Je n'évoque pas ici, naturellement, des solutions extrêmes, parce que nous
sommes réalistes et que nous voulons participer à l'élaboration de vraies
réponses. Gérard Larcher l'a dit, nous ne sommes bien sûr pas opposés par
principe au trafic aérien : il faut que Paris soit desservi, et nous ne sommes
pas des adeptes du NIMBY, le
« not in my backyard ».
Si nous voulons
pouvoir prendre l'avion, il ne faut pas que nous soyons contraints d'effectuer
de trop longs déplacements pour rejoindre un aéroport. Cela étant, nous
souhaitons que tout se passe dans de bonnes conditions.
A cet égard, je rappelle que, en 1945, dans un contexte où prévalaient des
objectifs de sécurité et de défense, on a interdit le survol de Paris. Or cette
interdiction n'est pas toujours respectée, et j'aimerais savoir pourquoi et
dans quelles conditions. Si cette interdiction était décidée aujourd'hui, je
pense d'ailleurs que l'on exclurait également le survol de la petite couronne.
Les attentats du 11 septembre 2001 doivent nous rendre sensibles au fait que
les tours de La Défense abritent de très nombreuses personnes et constituent un
enjeu vital pour le pays. Si l'on a pu prendre, en 1945, une décision aussi
radicale que l'interdiction totale du survol de Paris, nous devons pouvoir
aujourd'hui rouvrir le débat à propos du survol de la petite couronne et de
l'ensemble de la région d'Ile-de-France.
Monsieur le ministre, c'est un peu dans cet esprit que les maires des
Hauts-de-Seine souhaitent que vous veniez les rencontrer. En effet, comme l'ont
souligné les orateurs qui m'ont précédé, l'exaspération monte. Nous avons
confiance en vous, nous attendons que vous engagiez un véritable dialogue,
auquel seraient associés les experts, ceux qui savent et que nous ne demandons
qu'à croire mais avec lesquels nous voulons échanger en vue de bâtir des
solutions qui nous permettront de faire en sorte que la mondialisation, que
nous ne rejetons pas, bien sûr, soit humanisée. Elle ne doit pas être réalisée
au détriment d'un certain nombre de « mondialisés » passifs.
Monsieur le ministre, je sais que vous viendrez à notre rencontre ; nous vous
faisons confiance. Nous souhaitons aborder ce dialogue, comme le débat
d'aujourd'hui, dans l'esprit le plus constructif, celui dans lequel le groupe
de l'Union centriste, auquel j'appartiens, a toujours travaillé avec vous et
souhaite continuer de le faire, afin que nous puissions participer à la
définition de vraies solutions à un vrai problème.
(Applaudissements sur les
travées de l'UMP.)
M. le président.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la question
posée par notre collègue des Yvelines, M. Gérard Larcher, me donne l'occasion
d'exprimer les inquiétudes des populations face à l'accroissement des nuisances
aériennes. Comme lui et comme M. Alain Gournac, je suis, depuis plus de deux
années, très attentive à ce dossier de la réorganisation de la circulation
aérienne en Ile-de-France, et ce à plusieurs titres : tout d'abord, en tant que
maire d'une petite commune de la vallée de la Juine, située au sud du
département de l'Essonne, puis comme conseillère générale, et enfin, bien sûr,
en tant que parlementaire représentant le département de l'Essonne au sein de
la Haute Assemblée.
Dans le cadre de mes mandats, j'ai été sollicitée par les habitants, les
riverains, les associations, mais aussi par mes collègues élus, pour faire
entendre leurs voix.
Aujourd'hui, force est de constater que nous avons peut-être été écoutés, mais
certainement pas entendus, et guère plus hier qu'aujourd'hui ! Je crois utile,
afin que chacun se fasse une idée exacte de cette affaire, de revenir quelques
instants sur l'historique de ce dossier.
A l'été 2000, à la faveur d'une révélation parue dans la presse, les habitants
de l'Ile-de-France ont découvert le projet de la Direction générale de
l'aviation civile, tenu secret jusque-là et élaboré dans l'opacité la plus
totale, d'ouvrir un nouveau couloir de circulation aérienne au sud de la région
parisienne, afin de dégager un espace pour desservir les nouvelles pistes de
l'aéroport de Roissy.
En fait, plus précisément, la DGAC avait décidé d'octroyer à Roissy un couloir
desservant l'aéroport d'Orly, d'où la nécessité pour celui-ci de disposer d'une
nouvelle voie d'accès !
Sommée de s'expliquer, la DGAC a alors révélé son projet : un couloir
sensiblement parallèle à celui « offert » à Roissy, débutant dans les Yvelines,
survolant l'Essonne en son centre, tournant en Seine-et-Marne et débouchant
dans le Val-de-Marne en direction d'Orly.
On comprendra la stupeur des Franciliens, mais aussi leur colère, à l'idée
d'être survolés quotidiennement par plus de 300 avions supplémentaires.
De pétitions en réunions publiques, de campagnes d'information en
manifestations, les populations ont réussi à en savoir davantage, et surtout
elles ont convaincu l'Etat de les entendre
via
une consultation
organisée par la préfecture de région au sein des commissions consultatives de
l'environnement.
Formées petit à petit sur des questions qu'elles ignoraient jusque-là,
soutenues par des associations de défense de l'environnement et du cadre de
vie, relayées par leurs élus, ces populations ont fait part de leurs
inquiétudes et de leurs souhaits légitimes de voir les nuisances sonores et la
pollution réduites au minimum.
Avec amertume, pleines de regrets, elles ont fini par comprendre la nécessité
de cette réorganisation de la circulation aérienne en Ile-de-France, même s'il
est toujours révoltant d'apprendre d'une administration que votre département,
en l'occurrence l'Essonne, a été choisi pour supporter « le gros » du couloir,
car c'est le territoire le plus « vierge » de l'Ile-de-France et le moins
habité ! Je précise cependant au passage que ce point ne serait pas confirmé
par les premières conclusions du rapport de l'ACNUSA présentées la semaine
dernière.
Je tiens à rappeler ici que la création de l'Autorité de contrôle des
nuisances aéroportuaires répond à une volonté politique forte exprimée par le
gouvernement de Lionel Jospin au travers de la loi du 19 juillet 1999. A
l'époque, le gouvernement et le Parlement avaient souhaité que soient
instaurées, avec la création de cette autorité, les conditions nécessaires à la
concertation et à l'arbitrage en ce qui concerne le transport aérien. Ces
conditions sont fondées sur l'écoute, le dialogue, la transparence des
informations et l'impartialité. Pour le bien-être de nos concitoyens, il ne
faudrait pas que ces objectifs soient perdus de vue.
J'en reviens maintenant à la nouvelle réorganisation aérienne en
Ile-de-France, qui fait l'objet de mon intervention. Après plus d'une année de
combat, par solidarité avec ceux qui étaient déjà durement touchés par les
nuisances aéroportuaires, faisant contre mauvaise fortune bon coeur, les
populations se sont senties rassurées : elles ont en effet obtenu de l'Etat des
garanties quant à l'altitude minimale de survol des villes et au respect, par
les compagnies aériennes et les contrôleurs aériens, des trajectoires arrêtées
après la concertation et les études menées par un organisme indépendant,
Eurocontrol.
Rien ne serait jamais plus comme avant, mais du moins le sentiment d'avoir été
écoutés, l'espoir d'avoir été entendus et l'assurance que les engagements
seraient tenus, et par la DGAC et par Aéroports de Paris, permettaient, si
j'ose dire, de mieux faire « passer la pilule ».
Mais quelle n'a pas été la déception après le 21 mars 2002, jour de l'entrée
en vigueur des nouvelles procédures aériennes en Ile-de-France ! Le réveil fut
brutal !
Du jour au lendemain, chacun a eu le sentiment que les belles garanties
obtenues à l'arraché s'envolaient en fumée dans le sillage des premiers avions
empruntant les nouveaux couloirs d'atterrissage pour Orly.
En effet, les avions passaient là où on ne les attendait pas, à des hauteurs
nettement inférieures à celles qui avaient été indiquées par la DGAC. Les
nuisances sonores s'en trouvaient aggravées, les procédures annoncées n'étant
respectées, selon nous, qu'à concurrence de 70 %.
A cela s'ajoutait le sentiment de vivre un véritable cauchemar kafkaïen : aux
interrogations répétées des habitants, des associations et des élus, la maison
de l'environnement d'Orly ou la DGAC apportaient des réponses floues ou
totalement angoissantes. Comment ressentir les choses autrement quand il vous
est répondu que, au jour indiqué, à l'heure précisée et à l'endroit mentionné,
aucun passage d'avion n'a été recensé ? En d'autres termes, quand nos
concitoyens voyaient des avions, ADP et la DGAC rétorquaient que le ciel était
vide.
Ce sera finalement grâce aux réunions de travail organisées par l'ACNUSA que
la vérité, que nous étions nombreux à soupçonner, sera révélée par bribes par
la DGAC.
Non, les avions ne respectaient pas les couloirs ! Non, ils ne volaient pas
aux altitudes annoncées ! Oui, ils survolaient des communes qu'ils n'auraient
pas dû survoler ! Oui, de nouvelles nuisances étaient créées par cette
réorganisation aérienne !
Tout cela fut révélé six mois après la mise en service du nouveau couloir,
tout cela fut décidé au nom de la sécurité, du respect de ce fameux principe de
précaution, un peu trop facilement invoqué, qui amène parfois à dire et à faire
n'importe quoi, au mépris de nos administrés !
Dans ces conditions, il est du devoir des élus de relayer la colère des
populations et d'exiger des explications. En effet, c'est aussi au nom de ce
principe de sécurité que des élus français ont été délibérément tenus dans
l'ignorance par l'administration !
Comment accepter sans broncher d'apprendre, lors d'une réunion organisée à
l'ACNUSA, le 25 juin dernier, soit trois mois après la mise en service du
nouveau couloir « Eurocontrol », que, alors que la DGAC avait donné l'assurance
que les avions survoleraient l'Essonne à 3 300 mètres d'altitude, ceux-ci
volaient en fait à 2 840 mètres ?
Comment ne pas s'estimer délibérément trompé quand on découvre, après coup,
les effets de l'ouverture du nouveau couloir ? Je n'en mentionnerai que deux :
d'une part, les avions décollant en direction du Sud volent plus bas que prévu
car ils sont obligés de passer sous le nouveau couloir d'arrivée ; d'autre
part, le couloir d'arrivée face à l'Est a été abaissé ; alors que des
engagements contraires avaient été pris par l'administration. Dans tous les
cas, les populations et les communes survolées subissent des nuisances sonores
supplémentaires, ainsi qu'une dégradation de leur environnement et de leur
cadre de vie. Et cela, sans aucune compensation !
En effet, tant que des décrets n'auront pas été pris, aucune sanction ne
pourra être appliquée aux contrevenants. Or, si des amendes étaient infligées,
cela permettrait au moins d'abonder un fonds destiné à aider les riverains
contraints de mieux insonoriser leurs maisons. Il est donc urgent que le
Gouvernement intervienne par la prise de décrets que tous les élus, toutes les
associations, tous les riverains des aéroports et toutes les populations
survolées attendent.
Des mesures existent déjà, mais elles ne concernent que les communes
mentionnées dans les plans de gêne sonore et les plans d'exposition au bruit,
élaborés autour des aéroports. Or j'évoque aujourd'hui des localités et des
communes situées à plus de vingt kilomètres d'Orly, pour ce qui concerne le
département de l'Essonne, et qui ne bénéficient d'aucune compensation
financière liée à l'activité aéroportuaire.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré à l'Assemblée nationale, le 24 octobre
dernier, lors de l'examen du projet de budget de votre ministère, que les vols
ne respectant pas des volumes de protection environnementale mis en place
pourront être sanctionnés. Cela constitue, de fait, une avancée. Il est
toutefois dommage et inquiétant que, lors de la réunion de la commission
consultative de l'environnement d'Orly, le lundi 2 décembre dernier, on ait
enregistré seulement quatorze votes en faveur de ces volumes, tandis que l'on
dénombrait treize votes contre et dix abstentions !
Il est également dommage qu'ils ne répondent pas aux mêmes critères techniques
que ceux qui existent à l'étranger. Un alignement représenterait un véritable
progrès pour notre pays et pour tous les riverains des aéroports. En France, en
effet, les avions, amorcent leur descente à soixante kilomètres de l'aéroport,
donc bien avant d'intercepter le point ILS de ce dernier.
M. Gérard Larcher.
Oui !
Mme Claire-Lise Campion.
A l'étranger, ce palier est beaucoup plus proche de l'aéroport, et les
nuisances sonores sont donc moins importantes. Espérons que les recommandations
à venir de l'ACNUSA seront prises en compte sur ce point. En effet, il est
proprement scandaleux et indigne de notre pays, de notre démocratie, que des
élus, des citoyens soient ainsi volontairement maintenus dans l'ignorance et,
pire encore, ignorés.
Il est tout aussi scandaleux que les communes aujourd'hui directement
concernées par la nouvelle organisation de la circulation aérienne en
Ile-de-France ne soient toujours pas autorisées à siéger au sein de la
commission consultative de l'environnement d'Orly, en dépit de mes demandes
réitérées et de celles de mes collègues maires. Il est inacceptable que le
Gouvernement n'entende pas cette demande, somme toute légitime de la part
d'élus de communes survolées.
Que faire, dans ces conditions ? Vous alerter, vous saisir, monsieur le
ministre, comme je l'ai déjà fait à deux reprises sans, hélas ! avoir jusqu'à
présent reçu la moindre réponse. Je m'adresse donc de nouveau à vous, espérant
cette fois être entendue !
Le 24 octobre dernier, vous avez aussi annoncé, s'agissant du secteur aérien,
un plan de développement durable pour les aéroports parisiens, visant à
combattre les nuisances sonores nocturnes et à limiter globalement la gêne
sonore. Pouvez-vous nous confirmer les engagements de l'Etat en ce sens et nous
donner plus d'éléments sur ce projet ? Concrètement, quelles actions allez-vous
engager pour les populations victimes des nuisances aéroportuaires ? Elle ne
peuvent plus aujourd'hui se contenter d'effets d'annonce. Elles n'attendent
plus de belles paroles, elles veulent des actions réelles et concrètes. Il nous
faut des actes !
Vous avez ajouté que le retrait des avions les plus bruyants du chapitre 3
serait mis en place en 2003. Pouvez-vous nous le confirmer, et confirmer
l'engagement de la France d'interdire le survol de notre pays par les avions
les plus bruyants et les plus polluants, ceux qui relèvent du chapitre 2, comme
de nombreux pays l'ont déjà fait ?
En effet, les populations ont besoin de savoir, d'avoir l'assurance que ce qui
a été promis sera tenu. Elles ne peuvent plus se contenter de promesses. Elles
veulent des certitudes. D'autant plus aujourd'hui, alors qu'on leur annonce une
réorganisation du couloir de départ face à l'est d'Orly et que le dossier du
troisième aéroport parisien est de nouveau remis sur le métier, comme nos
collègues viennent de le préciser.
A cet égard, j'évoquerai à nouveau le département de l'Essonne, qui est
directement concerné. En 1996, M. Alain Juppé, alors Premier ministre, avait
retenu le site de Beauvilliers, en Eure-et-Loir, qui n'est situé qu'à quelques
encâblures de l'Essonne, avant que le choix du lieu d'implantation soit remis
en question.
Cet été, vous avez décidé de relancer la consultation, monsieur le ministre,
et d'annuler le choix de Chaulnes, qui avait été retenu en 2002.
Les habitants de l'Essonne, sachez-le, n'accepteront pas d'être, une nouvelle
fois, sacrifiés sur l'autel du développement de l'activité aéroportuaire.
En tant que sénatrice, je vous rappelle mon regret que la mission
d'information parlementaire que vous avez mise en place sur ce sujet n'ait pas
été ouverte aux membres de la Haute Assemblée. Ceux-ci étant les représentants
directs des collectivités locales au sein du Parlement, il m'avait paru
indispensable de ne pas les exclure de cette réflexion, d'autant plus que
certains d'entre eux ont déjà participé à la concertation qui avait été lancée
sur le sujet en 2001.
En tant que membre de la Haute Assemblée, je vous ai écrit, le 26 juillet
dernier, pour vous faire part de ma surprise sur la composition de cette
commission. Je n'ai pas encore reçu de réponse. J'en suis réduite à penser que
le Gouvernement ne prend pas suffisamment en compte notre demande.
Monsieur le ministre, sur toutes ces interrogations, qui sont légitimes et
fondées, les habitants et les élus de mon département, l'Essonne, comme
l'ensemble des autres habitants et élus d'Ile-de-France, attendent des
réponses, mais aussi des actes du Gouvernement. J'espère qu'ils ne seront pas
déçus !
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines
travées de l'UMP.)
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je me félicite de ce débat et je vous remercie, monsieur Gérard Larcher, de
cette question orale avec débat sur la réorganisation des couloirs aériens en
Ile-de-France. Antérieurement, vous aviez déposé une question écrite dans
laquelle vous vous « interrogiez, en particulier, sur la mesure des impacts
environnementaux et leurs effets positifs et négatifs sur les différentes aires
géographiques concernées, ainsi que sur le respect effectif de la remontée des
trajectoires d'arrivée ».
Le texte de votre question orale est moins précis,...
M. Gérard Larcher.
Volontairement !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
... moins expressif, puisque vous souhaitez simplement savoir quelle
évaluation est faite de la réorganisation de ces couloirs aériens.
J'interprète cependant votre propos d'ensemble non pas comme une simple
interrogation, mais plutôt comme une condamnation des couloirs aériens mis en
place depuis mars 2001. Ai-je raison ?
Je voudrais également noter la prise de position récente du secrétaire d'Etat
M. Dominique Bussereau, le vendredi 6 décembre, lors de l'examen du budget
annexe de l'aviation civile, aux termes de laquelle la création de ces couloirs
est une erreur et ils n'ont pas fait l'objet de la concertation préalable
nécessaire et d'études d'impact suffisantes. « Ces couloirs doivent être revus
», a-t-il dit à cette tribune.
Il apparaît également que, depuis leur mise en place, ces couloirs suscitent
de la part des riverains de l'Essonne, des Yvelines, du Val-d'Oise, de
Seine-Saint-Denis et de Seine-et-Marne, une réprobation unanime, qui s'exprime
notamment par des manifestations de rue, que le groupe communiste républicain
et citoyen soutient et auxquelles les élus communistes républicains et citoyens
participent.
Selon nous, le décor est planté. Ces « couloirs » doivent être abandonnés.
Cette idée grandit. La presse à grand tirage fait état de cette nécessité.
Aujourd'hui, nous voudrions vous faire part de nos raisons de nous opposer,
nous aussi, aux couloirs aériens. Nous considérons ces couloirs comme étant des
éléments d'un ensemble beaucoup plus important : l'évolution du trafic aérien
sur le plan national et francilien.
Au cours de l'année 2001, malgré le passage à vide de septembre 2000, le
trafic a progressé en France, beaucoup plus d'ailleurs pour le fret que pour
les passagers. L'ensemble des liaisons a progressé et continue à progresser en
Ile-de-France, mais aussi en province. A Bordeaux, en octobre 2002, le nombre
de passagers s'est accru de 8,4 % par rapport à 2000.
A Roissy, le nombre de passagers a augmenté de près de 2 % par rapport à 2001,
au cours des mois de juin et juillet, avec un peu plus de neuf millions de
passagers. Pour Limoges, le trafic a bondi de 1 % sur les dix premiers mois de
l'année. On pourrait citer d'autres plates-formes. Aéroports de Paris n'échappe
pas à cette évolution, même si 2001 n'a pas été une très bonne année pour
Orly.
Sur le plan francilien, c'est surtout le fret qui progresse - 7 % - conduisant
bientôt à un monopole dans ce domaine, monopole contraire au développement des
activités économiques sur le plan national et à toute idée de décentralisation
et d'aménagement des régions et du territoire. Un aéroport comme celui de
Vatry, neuf et construit avec des fonds publics, pourrait satisfaire le besoin
de fret supplémentaire de l'Ile-de-France.
Au cours de la prochaine décennie, selon Aéroports de Paris, la progression
moyenne annuelle s'élèvera à 2 % pour les passagers et à 7 % pour le fret.
L'aéroport d'Orly a atteint son niveau de saturation. L'aéroport de Roissy est
près d'atteindre le sien, avec 55 millions de passagers.
Pour un gouvernement ayant aussi à gérer la France de demain, quelle est la
réponse possible ? Accroître le trafic à Orly et à Roissy ou créer un nouvel
aéroport, décentraliser et répartir le trafic ?
Il n'est pas d'autre solution. La meilleure preuve en est que je défends un
troisième aéroport et que M. Le Grand, lors du débat sur la navigation
aérienne, a prétendu que l'on peut accroître de beaucoup le trafic de Roissy,
allant peut-être jusqu'à rêver à de nouvelles pistes, en théorie possibles, et
pour Orly à envisager un trafic au-delà de 250 000 mouvements annuels, et même
peut-être le retour aux vols « nocturnes ».
Monsieur le ministre, vous avez été dans cette voie de façon beaucoup plus
nuancée, j'en conviens, mais de façon certaine, puisque vous affirmez que l'on
peut encore accueillir un trafic supplémentaire. Je vous le dis : si vous vous
obstinez dans cette voie, vous ne défendez pas le progrès en matière de
développement de l'aviation civile, vous le compromettez. Pourquoi ?
Développer le trafic d'Aéroports de Paris, c'est, bien entendu, développer les
nuisances, c'est un signe nouveau et reconnu. Le colloque auquel vous avez
participé le 21 novembre dernier, organisé notamment par Avenir et transports,
a démontré les enjeux et les bienfaits de la décentralisation du système
aéroportuaire. A Cannes, lors du 11e colloque Airlines Forum, l'idée d'une
mutation profonde du transport aérien a été largement débattue.
Je vous le dis, monsieur le ministre, le transport aérien ne se développera
qu'en réconciliant l'avion en haut et la vie des populations riveraines en
bas.
Je décrirai non pas le problème du bruit - il est connu - mais le problème,
plus émergent, de la pollution, avec des taux parfois impressionnnants de
dioxyde d'azote ou de carbone, qui, combiné avec le problème de la circulation
automobile, devient inquiétant. Airparif publie désormais ces taux et je vous y
renvoie, mais je suis sûre que vous les connaissez. Cette situation touche la
santé publique. Les études épidémiologiques que l'on commence à mener font état
d'une apparition de maladies allergiques, d'emphysème, notamment d'asthme,
d'angoisse, voire de dérèglements psychologiques.
Dans mon département, le Val-d'Oise, un de vos amis politiques, le docteur
Enjalbert, maire de Saint-Prix et conseiller général, a publié des études
probantes et inquiétantes qui vont dans le même sens.
Choisir le développement du trafic aérien d'Aéroports de Paris, c'est aussi
compliquer la circulation routière qui, dans le secteur de Roissy et d'Orly,
conduit à un embouteillage permanent que s'efforcent d'ailleurs de contourner
parfois les véhicules ministériels équipés d'un gyrophare.
(Sourires.)
Une heure et demie entre Sarcelles, où j'habite, et le Sénat, c'est le temps du
trajet quotidien par l'autoroute A1, que vous connaissez bien, monsieur le
ministre. Il n'y a pas si longtemps, la durée était de trois quarts d'heure.
Choisir le développement de Roissy et d'Orly, c'est aussi développer les
contraintes d'urbanisme, de réhabilitation, notamment des parties plus
anciennes des villes et des villages, et de la plupart des bourgs anciens de la
Plaine de France. M. Pons, alors ministre, s'en était ému et avait décidé de
mettre en place une « mission Roissy » sur le devenir de ces bourgs, soit une
bonne quinzaine dans mon département.
Une étude remarquable a été conduite, mais elle est restée sans lendemain car
aucune suite ne lui a été donnée par des financements appropriés.
Si l'extension du trafic a lieu, des plans d'exposition au bruit, PEB, de plus
en plus envahissants compromettront l'équilibre de régions entières.
Comment pourrons-nous alors répondre aux besoins croissants d'insonorisation
de l'habitat alors que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie, l'ADEME, voit ses crédits diminués de 10 % pour l'année 2003 ?
Actuellement, des villes comme Garges-lès-Gonesse et Sarcelles sont toujours
en dehors du plan de gêne sonore, alors qu'elles sont situées en pleine zone de
nuisance.
Ne parlons pas de risques accrus en pleine zone urbanisée en termes de
sécurité aérienne. Malheureusement, l'actualité nous démontre que l'accident se
produit. Pour ma part, j'ai compté au moins cinq accidents graves, autour de
Roissy, du bombardier américain B-52 au Concorde plus récemment.
Vous pourriez penser et me dire, mes chers collègues, que je suis hors sujet.
Non, je suis au coeur du sujet. Pourquoi ?
Le couloir aérien, puisqu'il faut l'appeler par son nom, est né du refus du
troisième aéroport et des contraintes nouvelles de l'accroissement du
trafic.
Pour permettre à un plus grand nombre d'avions d'atterrir et de décoller, il
faut de nouvelles trajectoires, d'où la théorie des couloirs mis en place.
C'est la théorie du parallélisme qui fait, par exemple, qu'une nouvelle piste
parallèle à celle de Roissy a été construite pour suppléer cette transversale.
C'est la théorie de l'utilisation d'espaces jusqu'alors vierges ou peu touchés
par les circulations aériennes, comme la partie sud des Yvelines, Rambouillet,
Dourdan, Etampes,Marcoussis, Brétigny et même Corbeil, dont mes collègues
viennent de parler. C'est aussi la théorie du renforcement.
Lors d'une réunion de concertation, n'a-t-on pas entendu un responsable
d'Aéroports de Paris dire à un élu : « Votre commune est moins peuplée, c'est
normal que plus d'avions vous survolent. »
Les effets se font sentir en Seine-Saint-Denis, dans la vallée de Montmorency,
dans la Plaine de France, du fait de l'abandon de Creil comme pôle d'entrée des
mouvements, pour la façade ouest. Et tout cela, je vous le dis, monsieur le
ministre, même si vous n'en n'êtes pas responsable, sans aucune concertation
!
Le quadrillage du ciel francilien est en marche, avec les couloirs. Mais le
couloir n'est déjà plus suffisant. Ainsi, les volumes de protection de
l'environnement, les fameux VPE, sont venus l'enrichir. Les avions devront
rester à l'intérieur des volumes, sous-ensembles des couloirs, tant au
décollage qu'à l'atterrissage. Tout vol sera contrôlé et, s'il s'éloigne à
l'extérieur des limites fixées, il pourra faire l'objet d'une saisine de la
Commission nationale de prévention des nuisances en vue d'une éventuelle
sanction. Un arrêté ministériel pour Roissy et pour Orly est en préparation -
peut-être est-il paru ? -, afin de créer de tels volumes au départ. Un esprit
naïf ou peu averti pourrait considérer qu'il s'agit là d'une mesure de
protection de l'environnement. Dans les faits, mes chers collègues, il s'agit
de permettre au plus grand nombre d'avions possible de se poser et de
décoller.
Monsieur le ministre, vous avez déclaré le 25 juillet dernier : « Les nouveaux
couloirs doivent respecter les volumes de protection environnementale. Il faut
les définir avec précision puis les imposer aux exploitants. La procédure
respect des couloirs avec sanctions sera mise en place dès cet automne. »
Ainsi, les VPE calés dans les couloirs conduiront à une occupation potentielle
et opérationnelle des mouvements d'avions rationalisée, contrôlée, dans un
système fermé et efficace. Un véritable quadrillage est donc mis en place.
Résumons-nous : les couloirs aériens en mars, les volumes de protection de
l'environnement annoncés en juillet, les décrets sur ces volumes maintenant.
Ainsi, le nombre de mouvements pourra augmenter, avec la possibilité de
concentrer les nuisances ou l'absence de nuisances dans des régions
déterminées, voire sélectionnées.
Que restait-il pour parfaire un tel dispositif ? Un ciel contrôlé et au-delà
de nos frontières, en Europe. C'est chose faite ! Depuis le 6 décembre - et M.
le secrétaire d'Etat aux transports et à la mer l'a annoncé en « avant-première
» à la tribune du Sénat -, le ciel européen est né. Qu'a-t-il été décidé ? Les
ministres des transports des Quinze ont approuvé - et je cite un communiqué
l'annonçant - le projet de « ciel unique européen destiné à mettre fin à la
diversité des systèmes de contrôle aérien sur le Vieux Continent en réalisant
un espace aérien d'ici à deux ans ».
J'attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu'un délai de
deux ans est mis en place pour aboutir - et je cite un compte rendu du
Monde
- « à créer des capacités supplémentaires au sein de l'espace
aérien européen afin de faire face à l'augmentation du trafic ». Et le compte
rendu précise que « l'idée originelle était de réduire la fragmentation du ciel
et de son contrôle organisé par chacun des Etats : en Europe occidentale, au
total, soixante-treize centres de contrôles, trente-cinq systèmes différents
prennent un appareil en charge à l'entrée de chaque zone pour l'accompagner à
la suivante ».
Monsieur le ministre, chaque Etat gardera, paraît-il, le droit d'initiative en
la matière. Pouvez-vous nous le confirmer ? Il est vrai que la France a fait
reculer la Commission sur le choix des prestataires de services de circulation
aérienne, y compris sur leurs moyens propres de communication, de navigation,
de surveillance ou de météorologie. La détermination des blocs fonctionnels
d'espaces aériens relèvera des seuls Etats concernés par ces espaces. Chacun a
bien compris que les deux ans prévus pourraient être utilisés pour lever de
nouvelles difficultés. Si je comprends bien, monsieur le ministre, l'Etat devra
mettre à profit ces deux ans pour savoir s'il redistribue ou non une partie de
l'espace qu'il réserve aux militaires. L'heure sera-t-elle aussi à l'abandon de
notre potentiel aérien national ?
Le transfert de notre système de contrôle public, qui a fait ses preuves,
sera-t-il, lui aussi, privatisé, comme le sera Air France - c'est une certitude
- ou - on en parlera - Aéroports de Paris ?
Quant à l'argument d'une sécurité accrue, la catastrophe survenue au-dessus du
lac de Constance, où deux avions se sont heurtés, devrait nous inciter à plus
de prudence.
Alors, mes chers collègues, ciel unique européen, couloirs aériens, volumes de
protection de l'environnement : le système est en place pour une
supersaturation du ciel francilien. Plus que jamais, nous préférons le
troisième aéroport dans le Bassin parisien et le développement des aéroports de
province. A ce sujet, monsieur le ministre, pouvez-vous répondre à une question
que nous nous posons tous : existe-t-il vraiment des possibilités de
développement de nos aéroports de province et si oui, lesquelles ?
Selon nous, la solution du troisième aéroport est plus sûre, plus nationale et
plus conforme à l'idée généreuse de décentralisation pour un développement de
l'économie et des transports, pour plus de démocratie dans la décision. Elle
constituera un progrès pour une aviation civile française qui conservera ses
contrôles, ses contrôleurs de qualité et son ciel, avec un devenir pour chaque
aéroport français.
Le débat, pour lequel je vous renouvelle mes remerciements, monsieur Gérard
Larcher, était nécessaire, mais il ne fait que s'ouvrir. J'espère que le
Gouvernement aura un peu plus d'ambition pour les ailes françaises, mais aussi
pour la vie des populations riveraines
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille.
Je me réjouis de cette occasion de parler du problème du survol de nos
populations, car l'activité aérienne, qui ne cesse de croître, génère de très
nombreuses nuisances, notamment dans le département dont je suis l'élu,
l'Essonne, et sur le territoire duquel se trouvent les pistes de l'aéroport
d'Orly. Longtemps, on n'a raisonné, en matière de circulation aérienne, qu'en
termes de sécurité - ce qui est bien sûr la moindre des choses, notamment pour
les populations survolées - et d'augmentation constante du trafic pour faire
face à une demande toujours plus importante. Aucun cas n'était fait des
nuisances subies par les populations concernées.
Sans rien nier de l'importance des deux premiers facteurs, en particulier la
nécessité d'assurer une sécurité optimale, on ne peut omettre, aujourd'hui, le
respect de l'environnement, qui doit être une exigence forte.
Tout à l'heure, ma collègue Mme Campion a rappelé comment avait été connu le
projet de tracé du nouveau couloir aérien au-dessus du centre de l'Essonne, qui
nous a tous mobilisés voilà maintenant plus de deux ans : ce sont effectivement
des indiscrétions parues dans la presse qui nous l'ont appris.
Ce projet n'avait fait l'objet d'aucune concertation ni explication et il a
fallu la mobilisation des habitants, qui ont participé aux manifestations que
l'Union des maires de l'Essonne, que je préside, a organisées, pour qu'enfin le
précédent gouvernement entrouvre la porte de la concertation. Je n'irai pas
jusqu'à dire que la transparence fut de mise néanmoins des réunions ont conduit
à confier à Eurocontrol une étude qui a abouti, quelques mois plus tard, à la
mise en service d'un nouveau couloir aérien au-dessus du département de
l'Essonne pour lequel nous avions reçu des assurances quant à l'altitude à
laquelle évolueraient les avions. Aujourd'hui, bien qu'aucun dispositif de
contrôle vraiment convaincant n'ait été mis en place, on constate - et les
populations s'en plaignent constamment - que les nuisances sont bien
supérieures à ce qui avait été annoncé à l'époque. En particulier, comme cela a
été très bien expliqué tout à l'heure, les avions doivent, au décollage, passer
sous ce nouveau couloir d'atterrissage. Quant au secteur dont je suis l'élu
local, la corne nord-est du département de l'Essonne, il est actuellement
survolé à basse altitude par les avions qui décollent d'Orly face à l'Est, et
dont une grande partie ne respecte pas la trajectoire imposée.
De plus, nous sommes confrontés au problème des avions vétustes et bruyants
relevant du chapitre 2, en particulier les gros porteurs qui, après avoir
décollé vers l'est, font un virage au-dessus de nos communes - je rappelle que
ce secteur compte 170 000 habitants - pour mettre le cap sur les Antilles.
Après avoir décollé d'Orly et pris un peu de hauteur, ils perdent de l'altitude
pendant leur virage, et c'est à ce moment qu'ils font un bruit infernal. Cela
se produit donc une première fois dans un sens, et une deuxième fois dans
l'autre sens !
Dans ces conditions, nous souhaitons que le respect de l'environnement et la
recherche d'un niveau de nuisances le plus réduit possible pour les populations
entrent à part entière dans les missions de la DGAC : les administrations
travaillent dans un cadre qui leur est fixé par le Gouvernement. Le précédent
ministre des transports, par la voix de M. Gayssot, s'était trop souvent
retranché derrière la DGAC. Ce n'était ni juste ni élégant : si la mission de
la direction générale est l'augmentation constante du trafic, sans autre
considération, elle la remplira ; mais s'il entre dans ses tâches de tenir
compte des populations survolées, alors elle devra s'y plier, et elle s'y
pliera.
Un certain nombre de solutions sont envisageables ; d'autres orateurs les
ayant évoquées avant moi, je serai bref.
En premier lieu, il convient de veiller au respect des acquis. Ainsi, il est
nécessaire de faire respecter strictement le couvre-feu de l'aéroport d'Orly,
entre vingt-trois heures et six heures du matin. Ce point ne nous paraît pas
négociable. En second lieu, il convient de maintenir tout aussi rigoureusement
la limitation du nombre de mouvements annuels à Orly.
Mais on ne peut pas se contenter de ces mesures. Il faut absolument poursuivre
la réflexion sur l'amélioration des trajectoires, comme le Gouvernement s'y est
engagé, de façon que le nombre des personnes touchées par ces nuisances soit le
plus faible possible et que les avions, aussi bien au décollage - cela suppose
qu'ils ne tournent pas trop vite ! - qu'à l'atterrissage, volent le plus haut
possible.
Il est également nécessaire de respecter les trajectoires aussi bien en
altitude que sur les zones survolées, ce qui n'est pas le cas actuellement. Il
est aussi indispensable de se doter d'outils de contrôle permettant aux élus et
aux populations d'avoir des renseignements rapides et objectifs. Il faudra
enfin sanctionner véritablement les écarts de trajectoire : Alain Gournac
soulignait que tel n'était pas encore le cas. Je me demande d'ailleurs dans
quelle mesure il ne faudrait pas que les sanctions soient prononcées par
l'autorité judiciaire - c'est son rôle -, et non par les autorités
aéroportuaires, qui, dans cette affaire, sont à la fois juge et partie.
M. François Gerbaud.
Tout à fait !
M. Laurent Béteille.
Rappelons encore qu'un certain nombre d'aéroports, notamment celui d'Orly,
sont des aéroports urbains. Les pistes d'Orly sont situées sur la commune
d'Athis-Mons et sont entourées de communes urbaines. Il faudra bien en tirer un
jour les conséquences et, en particulier, se décider le plus rapidement
possible à ne plus autoriser les avions les plus bruyants à atterrir et à
décoller de l'aéroport d'Orly.
Telles sont les quelques mesures qui, si elles ne peuvent être prises
immédiatement - et nous le comprenons bien -, nous semblent devoir être
étudiées. Nous attendons beaucoup de vous dans ce domaine, monsieur le
ministre, parce que les populations en ont assez de subir toujours les
nuisances sans le moindre espoir d'amélioration.
(Applaudissements sur les
travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Gilles de Robien,
ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la
mer.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, sachez tout
le plaisir qui est le mien de venir une nouvelle fois « plancher » devant vous
pour évoquer la politique du Gouvernement en matière de nuisances aériennes. A
l'examen des cartes des couloirs aériens, qui vous intèresseront certainement
et qui pourront vous être remises au terme de notre débat, je constate que tous
les élus que vous êtes sont effectivement soumis à une très forte pression et
je comprends à quel point vous êtes sensibles à ces problèmes.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
M. Gilles de Robien,
ministre.
Je vous exposerai donc la problématique ; je rappellerai d'où
nous venons, quelles mesures ont été prises par mon prédécesseur, quelle
approche j'ai adopté à mon arrivée au ministère, quelle est la méthode, quels
sont aujourd'hui les résultats et les perspectives.
Le nouveau dispositif de circulation aérienne mis en oeuvre le 21 mars dernier
en Ile-de-France répondait d'abord à des impératifs de sécurité et de
régularité des vols. Il était indispensable pour pouvoir tirer le meilleur
usage du potentiel des quatre pistes de Roissy-Charles-de-Gaulle et répondre
ainsi, sur le moyen terme, à la demande croissante de mobilité qu'expriment nos
concitoyens. Il devait enfin permettre de réduire significativement, à
l'échelle de la région, le nombre de personnes survolées. Le débat
d'aujourd'hui, que nous devons à l'initiative de M. Gérard Larcher, est donc
d'une grande utilité.
L'Etat, qui est le garant de l'intérêt général, se devait bien évidemment de
prendre en compte la préoccupation environnementale, qui est toujours plus
forte, à l'échelle de la région d'Ile-de-France tout entière. En privilégiant
autant que faire se peut le survol des zones moins urbanisées, avec notamment
le basculement de la trajectoire d'arrivée sur Orly du nord vers le sud de la
plate-forme, le nouveau dispositif a été conçu de façon à réduire globalement
de un million le nombre de personnes survolées par des avions évoluant en
dessous de 3 000 mètres.
Ce nouveau dispositif fonctionne depuis maintenant huit mois, ce qui a permis
aux services de contrôle aérien de pleinement se l'approprier. Quel bilan
peut-on en tirer ?
On constate d'abord une réduction substantielle des retards à
Roissy-Charles-de-Gaulle : le retard moyen par vol du fait de l'engorgement des
secteurs de contrôle situés au nord-ouest de Roissy a été divisé par six. Je le
précise, même si ce n'est pas l'objet principal de la question orale qui m'est
posée.
Il convient ensuite de faire le point de la maîtrise des nuisances sonores.
J'observe en premier lieu que les conditions d'un suivi rigoureux et
transparent des engagements souscrits à l'issue du processus de concertation
sont aujourd'hui réunies, et l'Autorité de contrôle des nuisances sonores
aéroportuaires - l'ACNUSA - dont le travail a été salué par Mme Campion, a
veillé à ce que Aéroports de Paris puisse rendre compte de leur respect.
Mme Campion a évoqué ces engagements ; permettez-moi de les rappeler : par
vent d'ouest, 2 500 mètres à Réau, interception de l'axe ILS à 4 000 pieds, 3
000 mètres à Livry-Gargan, contournement de Meaux ; par vent d'est, 2 000
mètres à Thoiry, 1 200 mètres à Issy-les-Moulineaux.
Les six points de contrôle définis par l'ACNUSA, qui portent pour l'essentiel
sur des altitudes de survol, visent à garantir aux populations survolées la
prise en compte de la dimension environnementale par la communauté
aéronautique, pilotes et services de contrôle aérien. L'indicateur de
performance environnementale ainsi établi s'élève à près de 80 % sur les
premiers mois, ce qui ne signifie nullement, je tiens à le préciser, que les 20
% restants concernent des survols non réglementaires. On peut cependant y
trouver, dans la perspective de la maîtrise des nuisances sonores, une petite
marge d'amélioration des conditions de survol.
S'agissant de l'objectif de réduction du nombre de personnes survolées en
Ile-de-France, je vous informe que les premières analyses effectuées par
Aéroports de Paris sur la base des données relatives aux trajectoires réelles
des avions corroborent les estimations faites avant le 21 mars dernier. Même si
l'ensemble de ces données doit être consolidé dans les prochains mois, je puis
d'ores et déjà confirmer que c'est bien l'intérêt général qui a prévalu, et
telle est bien la mission de l'Etat.
Pour autant, j'ai bien conscience que ce résultat masque de fortes disparités
locales ; et c'est la raison pour laquelle j'ai commencé mon propos en
rappelant, si tant est que c'était nécessaire, de quel lieu chacun des orateurs
était l'élu. Dans certains cas, les conditions de survol se sont dégradées. Je
veillerai à ce que mes services engagent les réflexions et les actions
nécessaires pour soulager les populations concernées, dans la limite, bien sûr,
de ce qu'exigent la sécurité et le maintien de l'activité de transport
aérien.
Ces résultats - somme toute positifs, il faut le reconnaître, tant en ce qui
concerne les conditions d'écoulement du trafic que la réduction du nombre de
personnes survolées - ne permettent pas de suivre ceux qui voudraient - parce
qu'il y en a encore - que l'on fasse marche arrière. Ce ne serait pas
raisonnable.
Dès lors, quelle est la méthode du Gouvernement ?
Sans vouloir justifier le travail de mes prédécesseurs - mais en le saluant,
parce qu'il faut être objectif -, je rappelle que le processus de concertation
est allé au-delà des obligations qui résultaient des seuls textes législatifs
et réglementaires applicables, notamment, aux commissions consultatives de
l'environnement - les CCE - et à l'Autorité de contrôle des nuisances sonores
aéroportuaires.
La mise en oeuvre, à l'échelle de la région d'Ile-de-France, d'un comité de
pilotage et, corrélativement, la constitution sous l'égide des préfets de
groupes départementaux de concertation dans chacun des départements de la
petite et de la grande couronne, réunissant les élus et les associations, ainsi
que le recours à l'expertise d'Eurocontrol - organisme international, comme
vous le savez, indépendant de la DGAC - ont permis la prise en compte des avis
et des projets alternatifs, dans la transparence et dans l'impartialité
nécessaires.
La saisine des organismes institutionnels - commissions consultatives de
l'environnement et ACNUSA - est venue parachever ce processus de concertation
très élargie.
Quelle est mon approche aujourd'hui ?
Dès mon arrivée au ministère - car j'ai évidemment été immédiatement sollicité
sur ce sujet -, j'ai tenu à faire le point. Je me suis attaché à être à
l'écoute - j'ai passé probablement des dizaines d'heures, sinon une centaine
d'heures, certains en sont témoins ici - des inquiétudes réelles, des
préoccupations réelles, des récriminations suscitées par la mise en place du
nouveau dispositif.
J'ai consulté de très nombreux élus de toute l'Ile-de-France, des dizaines
d'associations de riverains et des professionnels de l'aéronautique. Les
mesures que j'ai pu annoncer dès le 25 juillet sont le fruit de cette large
consultation et vont bien au-delà des seuls aspects liés à la circulation
aérienne. Elles constituent en elles-mêmes, notamment pour ce qui est de la
visualisation des trajectoires sur Internet ou de la mise en oeuvre des volumes
de protection environnementale - les VPE -, la base d'une concertation pérenne
avec les Franciliens et leurs représentants.
Sachez également que - au-delà des groupes de suivi institués par l'ACNUSA, au
sein desquels mes services ont fait un effort de transparence et d'information
objective que, je crois, les différents acteurs ont salué - je veillerai à ce
que les CCE, qui sont placées sous l'autorité du préfet de région et qui
réunissent à parts égales les professionnels, les élus et les associations de
riverains, puissent constituer un lieu privilégié de concertation.
Monsieur Badré, le processus d'enquête publique obligatoire pour toute
modification significative des procédures de décollage et d'atterrissage attend
pour voir le jour qu'un décret, qui interviendra très prochainement, définisse
les modalités de sa mise en oeuvre. Ce processus concrétisera la démarche de
concertation engagée avec les populations concernées pour les modalités
relatives à la circulation aérienne ; et vous avez raison, monsieur le sénateur
: toutes les variantes, y compris celles qui sont proposées par les
associations, doivent être et seront étudiées. Cela fait partie de la règle du
jeu.
Il est manifeste qu'il convient, dans un souci de transparence, d'apporter à
l'ensemble des populations franciliennes concernées des réponses justifiées et
appropriées. La carence d'information ou le défaut de concertation ne peuvent
qu'exacerber les craintes qui s'expriment. Il nous faut donc aller au-delà de
ce qui a été fait jusqu'à présent dans ce domaine, et les mesures que j'ai
annoncées visent précisément à faire de chaque citoyen d'Ile-de-France un
riverain bien informé sur l'organisation de la circulation aérienne dans sa
région ; pour ce faire, les pouvoirs publics doivent être en mesure d'attester
que les avions sont bien là où ils ont annoncé qu'ils seraient.
« Les avions ne sont pas là où ils devraient être ! », « Ils sont bien trop
bas ! » : combien de fois a-t-on entendu ces propos au cours des concertations
? Combien de fois a-t-on lu dans les journaux ces commentaires souvent
désabusés et inquiets, parfois révoltés, des populations survolées ?
La toute première revendication des riverains est donc de disposer d'une
information objective et incontestable sur les conditions dans lesquelles ils
sont survolés. De ce point de vue, les données globales des trajectoires radar
réelles présentées par Aéroports de Paris constituent un progrès substantiel et
méritent sans doute une diffusion plus large qu'auparavant.
Pour autant, il est possible et souhaitable d'aller plus loin. Aussi avais-je
décidé de diffuser d'ici à la fin de l'année sur Internet - et, pour des
raisons de sûreté, en temps différé - les trajectoires de chacun des vols à
destination ou au départ des aéroports parisiens, sur un fond cartographique,
afin de permettre à chacun de visualiser clairement les trajectoires
suivies.
Ce dispositif est prêt sur le plan technique. Néanmoins, compte tenu des
circonstances actuelles et de l'évolution de la situation internationale, les
services spécialisés demandent que, pour des raisons de sûreté, la diffusion de
ces informations soit différée. Je conserve bien sûr la volonté de mettre en
oeuvre ce dispositif ; tout dépendra de l'évolution que connaîtra l'analyse de
la situation internationale. Il s'agit là, en effet, d'un outil indispensable
pour instaurer un dialogue serein et constructif avec les populations survolées
et pour restaurer la confiance.
Les volumes de protection environnementale viendront alors parachever le
triptyque information-contrôle-sanction, et je vous confirme ma volonté, pour
assurer son caractère pérenne et transparent, d'inscrire la nécessaire maîtrise
des nuisances sonores dans un dispositif contraignant de nature réglementaire.
Ainsi, avant la fin de l'année, des volumes de protection environnementale
dans lesquels devront s'inscrire tous les vols, sauf si des raisons de sécurité
s'y opposent, seront définis par arrêté pour les procédures de décollage et
d'atterrissage à proximité des aéroports parisiens. En cas de non-respect de
ces dispositions, des sanctions seront appliquées.
A l'évidence, cette mesure environnementale, comme les autres du reste, n'a de
sens que si elle est appliquée de façon stricte. Nous disposons pour cela d'un
système de sanctions administratives efficace comportant l'avis de la
Commission nationale de prévention des nuisances sonores et placé sous l'égide
de l'ACNUSA. Je vous confirme que, dans ce cadre, tous les manquements
constatés seront sanctionnés rigoureusement. Certaines sanctions se montent
d'ailleurs - peut-être le savez-vous déjà - à 10 000 euros. Dès l'année 2001,
le montant total des sanctions prononcées s'est élevé à plusieurs millions de
francs ; cependant elles sont contestées, justement parce qu'aucun arrêté
n'avait été pris par mon prédécesseur.
Les premiers arrêtés relatifs aux départs initiaux et à l'approche finale ont
été présentés aux commissions consultatives de l'environnement des aéroports de
Roissy et d'Orly - qui ont toutes deux émis un avis favorable - et seront
publiés avant la fin de l'année.
L'ACNUSA vient de me faire savoir qu'elle n'était pas favorable à l'adoption
des arrêtés qui lui ont été soumis : j'ai l'intention de faire expertiser les
raisons qui la conduisent à prendre une telle position. Ma détermination reste
toutefois entière : il est nécessaire d'adopter ces textes le plus rapidement
possible. Ils constitueront une première étape et seront complétés par une
seconde série d'arrêtés, plus complexes à mettre en oeuvre.
Tout cela atteste bien - vous en conviendrez, monsieur Gournac - la volonté du
Gouvernement d'ouvrir le monde complexe de la navigation aérienne aux
non-initiés et de débattre ouvertement de l'ensemble des aspects du dossier.
Au-delà de ces mesures, je suis bien entendu ouvert à ce que des discussions
techniques et un dialogue renforcé s'établissent entre la direction générale de
l'aviation civile, Aéroports de Paris et les élus pour analyser la situation et
rechercher des solutions. C'est dans ce cadre technique que pourraient
notamment être examinées les questions que vous soulevez, relatives aux
procédures d'attente, au relèvement des trajectoires, aux hauteurs
d'interception des ILS ou aux conditions de survol de secteurs particuliers de
la région parisienne comme celui de la boucle de Montesson, d'Ablis et de
Thoiry. Les contraintes techniques de construction du système de circulation
aérienne, notamment celles qui permettent d'assurer la sécurité de l'écoulement
du trafic, doivent être mieux expliquées et analysées.
De façon plus globale, pour maîtriser efficacement les nuisances sonores, il
convient d'agir simultanément sur plusieurs leviers, car seul un dispositif
d'ensemble permet d'obtenir un effet durable. C'est d'ailleurs l'esprit de
l'approche équilibrée que les instances internationales - l'OACI et l'Union
européenne - ont établie comme principe de base pour la réduction des nuisances
sonores, auquel la France s'associe.
En fonction de l'objectif environnemental fixé pour un aéroport et du contexte
propre à celui-ci, les leviers disponibles seront principalement : la réduction
du bruit à la source, la maîtrise de l'urbanisation, les restrictions
d'exploitation de l'aéroport, les incitations économiques, ainsi que, bien
évidemment, les procédures de navigation aérienne.
Bien que ce sujet ne soit pas directement lié aux nouveaux couloirs, je tiens
à dire à M. Béteille qu'effectivement une modification des départs d'Orly face
à l'est a été étudiée à la demande des élus du Val d'Yerres. L'étude menée dans
le cadre de la CCE d'Orly n'a pas permis de dégager un consensus.
J'ai indiqué, monsieur Béteille, que j'étais prêt à examiner toute autre
proposition : cette invitation s'adresse à vous-même, ainsi qu'à celles et ceux
qui sont concernés par ce problème.
Au-delà des mesures relatives à la circulation aérienne que je viens
d'évoquer, j'ai tenu à traiter globalement la situation environnementale des
plates-formes parisiennes et à clarifier leurs perspectives d'avenir en tenant
compte de la demande du développement du transport et de la qualité de la vie
des riverains.
Concernant d'abord l'aéroport de Roissy, j'ai décidé de plafonner l'activité
future de l'aéroport suivant un critère de bruit réel mesuré au sol, et non pas
en fonction du nombre de voyageurs.
Ce nouveau dispositif, beaucoup plus objectif - vous demandiez de
l'objectivité et de la transparence : en voilà ! -, sera formalisé à la fin de
l'année et les stations de mesures objectives au sol commenceront d'être
installées dans les prochaines semaines.
J'ai également souhaité, à court terme, prendre des mesures pour réduire les
nuisances nocturnes. J'ai décidé, à titre conservatoire, par un arrêté en date
du 17 octobre dernier, de geler le nombre des créneaux attribuables entre zéro
et cinq heures jusqu'à la fin de la saison aéronautique d'été 2003, en
attendant une mesure définitive de limitation de l'activité nocturne qui sera
mise au point très prochainement.
D'autres mesures concernent les vols dans cette même tranche horaire :
l'interdiction des avions qui provoquent des niveaux de bruit trop élevés ;
l'alourdissement de la taxe générale sur les activités polluantes - la TGAP -
que le Sénat vient d'adopter voilà deux jours, ce dont je le remercie - madame
Beaudeau, il s'agit d'une disposition que mon prédécesseur n'avait pas osé
demander et qui va se révéler extrêmement utile ; l'optimisation de
l'utilisation des pistes ; l'interdiction des décollages de nuit non
programmés, et l'adaptation des trajectoires.
En outre, j'ai obtenu, messieurs Gournac et Badré, qu'Air France supprime la
quasi-totalité de ses vols, surtout de fret, entre zéro heure et cinq heures et
que La Poste réduise de 30 % ses vols postaux dans la même tranche horaire, ce
qui n'est pas facile, m'a-t-on dit.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Et Fedex !
M. Gilles de Robien,
ministre.
J'ai reçu Fedex trois fois, madame !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il faut le faire payer !
M. Gilles de Robien,
ministre.
Il paie déjà pas mal !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Il n'a pas payé la taxe professionnelle depuis 1995.
M. Gilles de Robien,
ministre.
Madame, je vous rappellerai que Fedex paie beaucoup en termes
d'emplois puisque 3 000 personnes y sont employées. C'est aussi une façon de
payer qui est positive, mesdames, messieurs les sénateurs !
(Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac.
Vous avez raison !
M. Gilles de Robien,
ministre.
Parallèlement, au-delà du retrait des avions relevant du
chapitre 2, effectif depuis le 1er avril de cette année, le retrait total des
avions les plus bruyants du chapitre 3 sera réalisé d'ici à cinq ans sur la
plate-forme de Roissy, madame Campion.
L'ensemble de ces mesures de restriction est en cours de mise au point et sera
formalisé dès le début de l'année 2003 après concertation avec toutes les
parties concernées et consultations - l'une est intervenue le 25 novembre
dernier, l'autre aura lieu en janvier prochain - de la commission consultative
de l'environnement de Roissy.
C'est donc avec plaisir, monsieur Badré, que je viendrai dans les
Hauts-de-Seine, si vous le souhaitez toujours, pour présenter ces mesures, mais
aussi pour en évaluer les effets, qui seront, je l'espère bien, positifs.
M. Denis Badré.
Merci !
M. Gilles de Robien,
ministre.
Pour assurer le développement durable des aéroports, il est
également nécessaire de renforcer les mesures de maîtrise de l'urbanisation
autour des plates-formes. J'ai, le 25 juillet, annoncé des mesures allant dans
ce sens, notamment la révision du plan d'exposition au bruit de l'aéroport de
Roissy. La démarche et son calendrier ont d'ores et déjà été présentés à la
commission consultative de l'environnement de Roissy.
Concernant l'aéroport d'Orly, j'ai eu l'occasion de confirmer à plusieurs
reprises que les conditions d'exploitation de cette plate-forme ne seraient pas
remises en cause. Ce n'est pas la peine de faire courir de fausses nouvelles.
Le couvre-feu est donc maintenu et le nombre de créneaux horaires attribuables
reste limité à 250 000 par an. Ce couvre-feu est d'ailleurs très bien respecté,
à l'exception de quelques dérogations par mois, tout au plus.
Monsieur Larcher, vous m'avez interrogé sur la desserte du Grand Bassin
parisien et donc sur la création d'un éventuel aéroport destiné à l'assurer.
Le débat organisé l'année dernière a ouvert de nombreuses questions. La
plupart de ces questions n'ont pas reçu de réponse satisfaisante sur les
perspectives ni sur les conditions de développement du transport aérien et des
aéroports. Le Président de la République ayant manifesté, si j'ose dire, son
irritation à propos de la mauvaise concertation qui s'est déroulée, j'ai donc
souhaité une remise à plat de ce dossier.
Conformément au voeu exprimé, la commission des affaires économiques, de
l'environnement et du territoire de l'Assemblée nationale a créé une mission
d'information sur l'« avenir du transport aérien français et de la politique
aéroportuaire ». Cette mission d'information débat actuellement de
l'opportunité d'une nouvelle plate-forme aéroportuaire, étant entendu que la
recherche et le choix éventuels d'un site resteront de la responsabilité du
Gouvernement. Celui-ci se prononcera donc après le dépôt des conclusions de la
mission.
Cette démarche prendra bien entendu en compte les aspects liés au transport de
fret, monsieur Badré.
Elle intégrera également, bien sûr, les aéroports de province et, comme le
suggère Mme Beaudeau, Vatry compris. En tout état de cause, ces aéroports ont
un rôle important à jouer, même avec la nouvelle configuration du transport
aérien, les nouvelles compagnies et les bas coûts : un rôle de plus en plus
importants, dans l'aménagement et dans la desserte internationale de notre
territoire. Les gestionnaires de ces aéroports, les chambres de commerce, dont
il faut souligner le dynamisme, mettent en oeuvre des programmes
d'investissement ambitieux.
La garantie de l'Etat apportée au financement de ces programmes leur permet
d'adopter la vision à long terme que nécessite le développement de ces
infrastructures.
La politique du Gouvernement en faveur des aéroports de province s'articule,
de fait, autour de quatre axes majeurs : l'ouverture des droits de trafic pour
permettre un accès élargi aux aéroports de province ; la préservation des
possibilités d'extension des plates-formes avec, d'une part, l'adoption de
plans d'exposition au bruit élargis et, d'autre part, des avant-projets de plan
de masse - APPM - permettant la réservation des emprises futures comme à Lyon -
Saint-Exupéry ; l'identification et l'étude de nouveaux sites aéroportuaires
lorsque les perspectives de croissance risquent de se révéler incompatibles
avec la configuration physique ou environnementale des sites existants - c'est
le cas de Nantes, où, en plein accord avec les collectivités locales, l'Etat
soumettra très prochainement au débat public le projet de création de
l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes ; enfin, le développement de
l'intermodalité en promouvant une meilleure connexion entre les réseaux
ferroviaires et les plates-formes aéroportuaires.
Au demeurant, le développement des aéroports de province ne saurait se passer
d'une implication accrue des collectivités locales dans l'ensemble des dossiers
aéroportuaires. Le Gouvernement entend que, le moment venu, la question de la
décentralisation du secteur aéroportuaire soit examinée avec les collectivités
concernées. Nous aurons certainement l'occasion d'en reparler prochainement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en terminant je
remercie M. Larcher de m'avoir permis de m'exprimer pour la première fois sur
les nuisances aériennes et leurs conséquences. Sachez que je suis à votre
disposition pour revenir faire le point sur cette importante question chaque
fois que vous le souhaiterez.
(Applaudissements sur les travées de l'UMP et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Gérard Larcher.
M. Gérard Larcher.
Monsieur le ministre, je pense que ce débat a été utile à tous, et pas
seulement à ceux qui représentent les populations survolées, puisque, si nous
avons parlé des riverains - et c'est important -, nous devons aussi parler des
populations survolées.
Je dois dire que ce n'est qu'un premier débat, même si la discussion sur ce
thème est engagée depuis longtemps. Le problème est en effet posé depuis qu'est
évoquée la troisième plate-forme aéroportuaire dans le Bassin parisien, depuis
la mission Douffiagues et le rapport que Jean François-Poncet et moi-même avons
remis en 1995 sur l'aménagement et le développement du territoire.
J'ose espérer que le Gouvernement saura poursuivre le débat dans une véritable
concertation, et non pas dans un jeu fermé sur des conclusions connues à
l'avance. En effet, on ne pourra pas parler d'aménagement et d'équilibre du
territoire sans faire jouer un vrai rôle aux aéroports en région.
Sans doute avons-nous laissé passer un certain nombre d'opportunités. C'est
ainsi que l'aéroport de Lyon-Satolas - Saint-Exupéry aurait sans doute pu
profiter de la fin d'activité de la plate-forme
hub
de Genève pour
atteindre une fréquentation proportionnelle à la place qu'occupe la région
Rhône-Alpes dans notre pays.
J'ai bien noté, monsieur le ministre, que, si vous considérez l'objectif de
réduction globale des nuisances comme atteint, vous reconnaissez tout de même
que des problèmes demeurent, et je ne voudrais pas que ces problèmes soient
passés par pertes et profits pour de simples motifs quantitatifs.
J'ai bien noté que vous restiez ouvert à la concertation. Mais la
concertation, cela signifie aussi l'acceptation par la DGAC, notamment, de la
discussion d'un certain nombre de règles.
M. Alain Gournac.
Eh oui !
M. Gérard Larcher.
Est-il légitime - j'ai cité l'exemple de Thoiry - qu'à 60 kilomètres de Roissy
on ne puisse pas imaginer un relèvement du plafond ILS ? C'est un sujet qui
fait l'objet d'un consensus de la part de nos collègues sur quelque travée
qu'ils siègent.
Je souhaiterais, monsieur le ministre, que, sur ce sujet, vous acceptiez que
nous allions au fond des choses sans être obligés d'écouter passivement les
ingénieurs et techniciens nous abreuver de certitudes physiques et
mathématiques, pour avoir simplement, au bout du compte, une fois mis
knock
out,
la possibilité de prendre la parole pendant quelques minutes.
Vous nous avez affirmé que l'information objective serait particulièrement
développée. Il est vrai que les cartes radar, lorsqu'elles nous sont un peu
expliquées, sont très intéressantes.
(Mme Marie-Claude Beaudeau
s'esclaffe.)
Il faudrait également - ce qui n'est pas toujours le cas - que
nous puissions disposer des résultats des études réalisées par les stations de
mesure, et ce de manière suivie.
J'ai bien noté que les engagements pris sur le volume de protections
environnementales seraient tenus dans les semaines à venir.
J'ai bien noté également - c'est le signe que les problèmes demeuraient - que
vous avez obtenu la réduction horaire des vols de fret. J'ai rappelé dans
quelles conditions les vols de fret s'effectuaient, souvent avec des avions
très bruyants. Je suis toutefois un peu inquiet de l'étalement sur cinq ans du
retrait des avions les plus bruyants.
Certes, nous savons qu'un certain nombre de compagnies, sur le plan mondial,
rencontrent des difficultés. Nous ne sommes pas sans savoir que la deuxième
compagnie américaine vient de déposer son bilan et que sa pérennité n'est pas
assurée, que le développement du transport aérien est aujourd'hui, comme le
disait Denis Badré, l'enjeu de combats permanents liés à la mondialisation.
Toutefois, je souhaite vraiment qu'au niveau européen comme au niveau national
le combat pour la qualité de la vie des populations survolées et des riverains
soit pris en compte et que la seule logique prépondérante ne soit pas celle des
capitaux.
C'est un point tout à fait essentiel.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est
intéressant que les préoccupations qui se sont manifestées ce matin aient été
portées au débat.
J'ai parfaitement compris que le Gouvernement ne remettrait pas en cause les
couloirs aériens. C'est d'ailleurs un point de divergence entre Mme Beaudeau et
nous.
Mais je souhaite, monsieur le ministre, que vous acceptiez une vraie
concertation, car rien ne serait pire, je le répète, que de voir les uns et les
autres arriver avec leurs certitudes et repartir avec les mêmes certitudes. La
concertation n'aurait alors aucun sens.
En tout cas, toutes ces questions seront à nouveau à l'ordre du jour lors du
débat que nous aurons sur les conclusions de l'audit que le Gouvernement a
demandé. Ce sera, j'en suis sûr, mes chers collègues, un très beau débat où la
diversité du territoire s'exprimera par la voie de nos collègues. Ce sera
également un débat essentiel car si, en tant que membres de la représentation
nationale, nous avons le devoir de porter les préoccupations de nos concitoyens
devant le Parlement en préservant l'intérêt général, celui-ci ne doit pas
s'exercer au détriment des populations survolées.
(Applaudissements sur les
travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président.
En application de l'article 83 du règlement, je constate que le débat est
clos.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze
heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)