SEANCE DU 9 DECEMBRE 2002
M. le président.
L'amendement n° II-100, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est
ainsi libellé :
« Après l'article 57, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A. - L'article 1467 du code général des impôts est ainsi modifié :
« I. - Le premier alinéa du 1° est ainsi rédigé :
« 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : »
« II. - Au premier alinéa du 2°, après les mots : "cinq salariés" sont insérés
les mots : "et n'étant pas soumis de plein droit ou sur option à l'impôt sur
les sociétés".
« B. - La perte de recettes résultant pour les collectivités locales du A
ci-dessus est compensée, à due concurrence, par le relèvement du prélèvement
sur les recettes de l'Etat institué au I du D de l'article 44 de la loi de
finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998).
« C. - La perte de recettes résultant pour l'Etat des dispositions du B
ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement vise à confirmer une pratique de
l'administration fiscale favorable aux redevables concernés, pratique selon
laquelle les sociétés commerciales employant moins de cinq salariés sont
assujetties à la taxe professionnelle d'après les règles de droit commun, même
si elles exercent une activité libérale.
Dans le rapport de la commission des finances, cette question se trouve
largement commentée. Il y est rappelé que la pratique de l'administration
fiscale a été remise en cause par un arrêt du Conseil d'Etat du 4 juillet
2001.
Cet arrêt est certes loin d'être sans fondements juridiques et économiques. Il
a néanmoins semblé à la commission, après examen des travaux préparatoires à la
loi du 29 juillet 1975 supprimant la patente et instituant une taxe
professionnelle, que l'on pouvait suivre des raisonnements bien différents de
celui du Conseil d'Etat. En effet, le législateur a soumis à un régime
dérogatoire en matière de taxe professionnelle non pas, comme il aurait pu le
faire, l'ensemble des personnes exerçant une activité libérale, mais les seuls
titulaires de bénéfices non commerciaux, ou BNC, employant moins de cinq
salariés, à savoir les personnes assujetties au régime des BNC de moins de cinq
salariés à l'exclusion des personnes qui sont soumises à l'impôt sur les
sociétés.
L'arrêt du Conseil d'Etat nous semble pouvoir avoir des conséquences
relativement inopportunes.
Des dizaines de milliers de contribuables de bonne foi sont dans l'insécurité
juridique, et l'application de la jurisprudence se traduirait pour tous ces
contribuables par un retour en arrière brutal par rapport aux mesures
d'allégement de la taxe professionnelle qui ont été décidées par le précédent
gouvernement puis prolongées et généralisées par le gouvernement actuel.
En second lieu, une telle jurisprudence conduirait à remplacer une distorsion
de concurrence entre les professionnels libéraux selon la forme juridique pour
laquelle ils ont opté par une distorsion de concurrence entre les
professionnels libéraux sur le seul critère du nombre de leurs salariés,
critère sur lequel ils n'ont pas vraiment de prise à court terme.
Enfin, l'application de la jurisprudence du Conseil d'Etat pourrait freiner
encore - et cela nous semble contradictoire avec les intentions du Gouvernement
que M. le ministre vient de réaffirmer - le passage en société des
professionnels libéraux. Or nous savons que c'est un grand enjeu de
compétitivité pour toute une série de professions.
Mes chers collègues, l'amendement n° II-100 tend à confirmer que les sociétés
commerciales sont, quel que soit le nombre de leurs salariés, assujetties à la
taxe professionnelle conformément aux règles de droit commun et même si elles
exercent une activité libérale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je souhaite dire d'emblée que je suis en total accord
avec M. le rapporteur général, et, au nom du Gouvernement, je suis favorable à
sa proposition.
J'ajoute que la précision souhaitée par M. le rapporteur général permet en
effet de consolider la base juridique de la pratique administrative actuelle.
Toute autre solution conduirait à accroître la taxation des professionnels
libéraux, ce qui serait en totale contradiction avec la politique du
Gouvernement, lequel souhaite au contraire alléger les charges qui pèsent sur
les entreprises.
La proposition de M. le rapporteur général est donc cohérente avec d'autres
dispositions fiscales qui vont dans le sens d'une incitation à l'exercice d'une
activité libérale sous la forme d'une société, afin qu'elle soit plus
performante face à la concurrence, notamment celle des groupes étrangers.
De plus, cette mesure n'a pas de coût pour les collectivités locales, puisque
les sociétés concernées sont actuellement imposées conformément au texte
proposé par M. le rapporteur général.
Je suis donc favorable à l'amendement n° II-100, et je lève les deux gages.
M. le président.
Il s'agit donc de l'amendement n° II-100 rectifié.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 57.
L'amendement n° II-68 rectifié, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet,
Lachenaud et Trucy, est ainsi libellé :
« Après l'article 57, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le premier alinéa de l'article 1734
bis
du code général des
impôts est complété
in fine
par les mots : "du seul exercice au titre
duquel l'infraction est mise en évidence". »
« II. - Au second alinéa du même article, les mots : "aucune infraction de
même nature n'a été antérieurement commise par le contribuable au titre des
trois années précédant celle au titre de laquelle l'infraction est commise et
que" sont supprimés. »
La parole est à M. Jean-Philippe Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Les subventions et les abandons de créances consentis entre sociétés du même
groupe doivent être mentionnés sur un état annexé à la déclaration de
résultat.
Le non-respect de cette obligation est sanctionné par une amende égale à 5 %
des sommes omises, limitée à 1 % en cas de première infraction au titre des
trois années précédentes, si les sommes sont réellement déductibles.
Il est proposé de préciser que l'amende ne s'applique qu'au titre d'un seul
exercice et de limiter son montant à 1 % dans tous les cas où les sommes omises
sont réellement déductibles.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement, par lequel MM. Roland du Luart,
Jean-Philippe Lachenaud et leurs collègues souhaitent aménager le régime de
sanctions en cas de non-respect de certaines obligations déclaratives, vise
très opportunément, à remédier à une iniquité résultant de la rédaction
actuelle du code général des impôts.
Cette dernière conduit aujourd'hui à ce que certaines entreprises de bonne foi
soient, à la suite d'un contrôle, sanctionnées trois fois au titre de trois
exercices consécutifs pour avoir omis de reporter, dans une annexe déclarative,
des sommes au demeurant fiscalement déductibles, ce qui est ressenti par les
contribuables dont il s'agit comme une véritable « persécution ».
Le Sénat, je le rappelle, avait d'ailleurs, sur l'initiative de notre
commission, adopté un amendement similaire lors de l'examen du projet de
finances pour 2001.
Pour l'ensemble de ces raisons, la commission est favorable à cet
amendement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je soutiendrai de toutes mes forces des initiatives de
cette nature, qui visent à simplifier et à améliorer la qualité des relations
entre l'administration fiscale et les usagers. C'est pourquoi le Gouvernement
est très favorable à cette mesure.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-68 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 57.
L'amendement n° II-69 rectifié, présenté par MM. du Luart, Bourdin, Clouet,
Lachenaud et Trucy, est ainsi libellé :
« Après l'article 57, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après le premier alinéa de l'article L. 190 du livre des procédures
fiscales, il est inséré un alinéa additionnel ainsi rédigé :
« Relèvent de la même juridiction les réclamations qui tendent à obtenir la
réparation d'erreurs commises par l'administration dans la détermination d'un
résultat déficitaire, même lorsque ces dernières n'entraînent pas la mise en
recouvrement d'une imposition supplémentaire. Les réclamations peuvent être
présentées à compter de la réception de la réponse aux observations du
contribuable mentionné à l'article L. 57 ou, en cas de saisine de la commission
départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, à
compter de la notification de l'avis rendu par cette commission. »
La parole est à M. Jean-Philippe Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Cet amendement est également inspiré par la vie des entreprises, leur
quotidienneté, la masse de documents et d'annexes qui doivent être fournis au
moment du dépôt de la déclaration relative à l'impôt sur les sociétés, et les
sanctions trop sévères infligées aux contribuables de bonne foi.
Les entreprises vérifiées faisant l'objet de redressements réduisant leur
déficit sans l'annuler ne peuvent actuellement exercer un recours contentieux
que lorsqu'elles sont redevenues bénéficiaires. Dans cet amendement, il est
donc proposé d'ouvrir aux entreprises la possibilité de déposer une réclamation
dès réception de la réponse aux observations du contribuable, quelle que soit
leur situation économique ultérieure. Cette disposition nous paraît être une
mesure d'équité.
Tel est l'objet de cet amendement, dont la rédaction pourrait peut-être être
simplifiée ou améliorée.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission y est d'autant plus favorable qu'un
amendement de même nature a été adopté à l'occasion de l'examen du projet de
loi de finances pour 2001, sur l'initiative de la commission des finances.
L'article L. 190 du livre des procédures fiscales comporte des effets pervers.
Comme l'a dit M. Lachenaud, il fait obligation à une entreprise de redevenir
bénéficiaire pour pouvoir contester le redressement dont elle a fait l'objet,
ce qui aboutit à réduire son déficit fiscal sans pour autant l'annuler
complètement.
Il en résulte une grande insécurité juridique et une source d'incertitude
économique, puisque cette société ne pourra pas calculer de manière
incontestable, tant que sa situation fiscale ne sera pas mise au net, le
montant des déficits imputables ou reportables en avant, et que cela aura, dans
certains cas, un impact significatif sur sa situation « bilantielle »,
c'est-à-dire la situation de son actif et de son passif.
Pour toutes ces raisons, la commission des finances est tout à fait favorable
à l'initiative des auteurs de l'amendement n° II-69 rectifié.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Il a le même avis que celui de M. le rapporteur général
et le même avis que celui que j'ai émis tout à l'heure : continuons dans ce
sens !
Nous parlons très souvent de l'attractivité du site France. Mais toutes les
enquêtes révèlent, à propos des prélèvements obligatoires, qu'entrent en ligne
de compte non seulement leur poids, mais aussi la complexité du système. Toute
mesure concourant à alléger le système fiscal français est donc bienvenue, et
le Gouvernement est très favorable à celle qui nous est proposée : en effet
elle est, de nature à conforter l'équilibre des relations entre
l'administration et les entreprises, comme l'a dit d'ailleurs tout à l'heure
Jean-Philippe Lachenaud, et constitue une simplification attendue par les
contribuables. C'est pourquoi le Gouvernement y est très favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-69 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 57.
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