SEANCE DU 6 DECEMBRE 2002
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'équipement, les transports, le logement, le tourisme et la mer.
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Marie-Claude Beaudeau,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je rappelle le montant des crédits : 75
millions d'euros, soit une augmentation de 1,6 %, ce qui confirme le
ralentissement de leur croissance par rapport à 2002.
Les moyens des services figurant au titre III, avec 22,45 millions d'euros,
progressent de 1 %.
Les dépenses ordinaires d'intervention, en diminution de 8 %, atteignent 41,47
millions d'euros, pour l'Observatoire national du tourisme, de 20 % pour les
contrats Etat-région et de 50 % pour le développement territorial du
tourisme.
Pour les dotations en capital, dans le chapitre 66-03 intitulé : «
Développement du tourisme », l'augmentation est de 54 % pour les crédits de
paiement et de 0,7 % pour les autorisations de programme. Quant au programme de
consolidation des hébergements de tourisme social, ses dotations en crédits de
paiement augmentent de 71 %, alors que les autorisations de programme chutent
de 10 %.
Comme vous le constatez, ce projet de budget est contrasté ; il manque de
cohérence et présente quelques atouts, mais aussi des insuffisances.
Un tel projet permettra-t-il à la France de conforter sa place de première
destination touristique ? Se rapprochera-t-elle de l'objectif des 90 millions
de touristes annoncé comme possible depuis plusieurs années ? Et, en même
temps, rattrapera-t-elle les deux pays qui la précèdent en termes de recettes
liées au tourisme ?
C'est à ces questions que je voudrais tenter de répondre.
Rien ne s'oppose dans le budget à ce que des avancées s'affirment en 2003 et
nous rapprochent des deux objectifs. Mais, monsieur le secrétaire d'Etat, des
mesures complémentaires doivent être prises, une volonté nouvelle doit
s'affirmer.
Je pense que vous vous trompez, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque vous
déclarez de façon presque affirmative, que, dans vingt ans, la France sera
supplantée par des destinations comme le Japon et la Chine. Je souhaite que
vous ayez tort !
En revanche, je vous rejoins, monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque vous
déclarez devant le Press-Club qu'il faudrait nous orienter vers la création
d'un vrai ministère du tourisme.
Mais, sans attendre, quelques mesures audacieuses pourraient être prises,
comme la relance de l'industrie touristique outre-mer, secteur clé pour le
développement des Antilles, de la Réunion, de la Guyane.
L'activité y est en baisse de 20 % avec encore deux millions de visiteurs et
40 000 emplois. Ne faudrait-il pas revoir votre politique pour atteindre un
doublement de ces chiffres et réfléchir à une modernisation ne se limitant plus
à des notions réductrices telles que le tourisme de sites pour la Réunion, le
tourisme de plages pour les Antilles ou le tourisme d'aventure et de
découvertes pour la Guyane ?
Une loi de programme en faveur de l'outre-mer s'impose et nous souhaitons que
la partie « tourisme » retenue corresponde bien aux besoins et aux
possibilités. La presse fait d'ailleurs état d'un rapport parlementaire en
cours de préparation. Le confirmez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat ?
La chaîne hôtelière Accor voulait quitter les Antilles. Elle y restera,
d'après ce que j'ai compris. J'en conclus que rien n'est fatal et que tout est
lutte.
En métropole et en outre-mer, des recettes supplémentaires et des créations
d'emplois deviennent possibles avec la réduction à 5,5 % de la TVA sur la
restauration sédentaire ou mobile. J'ai déposé un amendement allant en ce sens
dans la première partie de la loi de finances. Vous affirmez aujourd'hui que la
Commission européenne adoptera bientôt cette mesure. Je m'en félicite, car ce
seront des centaines de milliers de repas supplémentaires servis, plusieurs
milliers d'emplois créés et des recettes fiscales supplémentaires pour la
France. Voilà, monsieur le secrétaire d'Etat, une mesure attendue ! Si un
gouvernement la prend, elle se révélera extrêmement positive.
De nouveaux efforts s'imposent pour que beaucoup plus de 60 % de la population
française bénéficie en 2003 du droit aux vacances. La tendance au non-départ en
vacances s'aggrave. Le pourcentage de 40 % ne diminue pas. Il augmente au
contraire parmi les publics concernés que sont les jeunes, les personnes et les
familles en difficultés sociales, les personnes handicapés.
Les moyens consacrés à la bourse solidarité-vacances sont maintenus. Les aides
fournies par l'Agence nationale pour les chèques-vacances sont préservées.
L'ouverture de l'accès aux chèques-vacances des entreprises de moins de vingt
salariés, la réduction de la complexité du dispositif devraient permettre
d'élargir un peu le nombre de bénéficiaires. Il n'en reste pas moins que nous
récoltons là le fruit vénéneux de la réduction des aides publiques, de la
baisse du pouvoir d'achat au cours de ces dix dernières années.
Une autre mesure pourrait être prise, elle porte sur la reconnaissance des
droits des travailleurs saisonniers du tourisme, les salaires, le logement et
les conditions de travail. L'excellent rapport que M. Le Pors a remis à Mme la
ministre de l'emploi et de la solidarité et à Mme la secrétaire d'Etat au
tourisme, en 1999, a offert un certain nombre de solutions. Je vous rappelle
que près de 500 000 personnes exercent un métier dont les horaires sont
excessifs, souvent illégaux au vu de la législation du travail.
Dans le sud de la France, les pénuries deviennent telles que nous devons
aujourd'hui faire appel à de la main-d'oeuvre étrangère.
En 2003, il sera nécessaire d'accomplir des progrès et je veillerai, monsieur
le secrétaire d'Etat, à ce que des mesures soient prises.
Enfin, j'insiste également dans mon rapport écrit sur la double nécessité
d'améliorer la formation aux métiers du tourisme et de ne plus négliger le
tourisme d'affaires. Il représente, en France, 20 % du chiffre global lié au
tourisme et sa croissance a été ininterrompue de 1990 à 2000, progressant à un
rythme régulier de 3 % à 4 %.
Je souhaite également me féliciter de la majoration des crédits de Maison de
la France, qui est le principal bénéficiaire du chapitre avec les contrats de
plan Etat-région. Ces derniers s'élèvent à 28,1 millions d'euros, soit une
croissance de 2,6 % par rapport à l'année 2002.
Ce sont là de bonnes mesures qu'il est possible de mettre en oeuvre, car elles
permettront d'étendre l'activité touristique française sur l'ensemble des
régions et au plus profond du pays.
Je terminerai par une note optimiste concernant certains personnels de Maison
de la France dont nous avons longuement parlé ici. Une solution apparaît, enfin
avec la possible intégration de ces personnels dans la fonction publique
permettrait une augmentation et une plus grande égalité des salaires. Quel que
soit le pays considéré, ces personnels - peu nombreux - disposeront dès alors
d'un niveau de vie plus conforme à la dignité de tous les personnels
représentant la France à l'étranger.
Monsieur le ministre, l'actualité est là, pressante. Elle nous conduit à nous
interroger. Pour l'année 2003, des grandes incertitudes planent sur la venue en
France de nouveaux touristes. Le monde vivra-t-il en paix ?
La pollution entraînée par le naufrage du pétrolier
Prestige
souillera-t-elle nos plages du Sud-Ouest.
Pour un nombre toujours plus grand de nos concitoyens, leur pouvoir d'achat
leur permettra-t-il de partir en vacances ?
Selon moi, le Gouvernement se doit d'engager une politique plus résolue et
plus hardie en faveur du tourisme.
Par conséquent, la majorité de la commission des finances du Sénat vous
propose d'adopter les crédits du projet de loi de finances du secrétariat
autourisme pour 2003.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M.
Jean Arthuis applaudit également.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Charles Ginésy,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'examen des crédits consacrés au tourisme dans le projet de loi de finances
s'inscrit, cette année, dans un contexte doublement particulier : la saison
touristique 2001-2002 a été affectée par les odieux attentats du 11 septembre
2001 et les élections du printemps ont donné au Président de la République une
nouvelle majorité parlementaire, dont l'ambition ne se trouve qu'en partie
révélée par ce projet de budget.
La France a plutôt bien résisté aux conséquences du 11 septembre, dans un
marché mondial en nette contraction. L'année 2001 a connu des résultats globaux
satisfaisants et stables par rapport à l'année 2000. Les principaux secteurs et
régions touchés ont un lien fort avec le tourisme « long-courrier ».
L'économie du tourisme a connu des modifications d'ordre structurel : les
clientèles américaine et japonaise ont été moins nombreuses, les Français ont
privilégié les vacances dans l'Hexagone, l'hébergement en secteur marchand a
stagné dans le secteur de l'hôtellerie, et les séjours ont été plus courts. Les
35 heures semblent avoir fractionné les vacances des Français.
Pour contrecarrer les effets du 11 septembre, une campagne mondiale de
promotion de la destination « France » a été réalisée à partir du mois de
février 2002 par Maison de la France, en priorité en direction des grands pays
européens, vivier de touristes, ainsi qu'aux Etats-Unis, au Canada et au Japon.
Cette campagne a reçu de l'Etat une dotation exceptionnelle de près de 5
millions d'euros.
D'une manière générale, il serait souhaitable, me semble-t-il qu'une telle
dotation « de campagne » soit pérennisée pendant quelque temps, afin de
garantir l'efficacité de cette promotion : chacun sait en effet qu'en marketing
la durée et la répétition sont essentielles pour faire passer le message.
La promotion de la destination « France » est d'ailleurs l'un des trois axes
prioritaires que vous avez retenus, monsieur le secrétaire d'Etat.
Dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses publiques, la commission des
affaires économiques et du Plan est satisfaite que ce projet de budget ait été
protégé et que ses crédits atteignent 75 millions d'euros. On ne peut ignorer
que le tourisme concourt à près de 90 % du résultat net de la balance des
paiements, avec un solde de près de 15 milliards d'euros.
Globalement, la commission des affaires économiques et du Plan a approuvé les
priorités budgétaires de votre projet de budget pour 2003 et les moyens qui ont
été affectés au tourisme.
Il est nécessaire de renforcer l'attractivité du territoire « France », afin
d'exploiter davantage et mieux son potentiel économique. Il convient de
favoriser l'aménagement du territoire et le développement local, par le biais
des contrats de plan Etat-région et du programme de consolidation des
hébergements de tourisme social. Pour ces derniers, le secrétariat d'Etat au
tourisme a obtenu une progression de 60 % des crédits de paiement en 2003, soit
une augmentation de 4,2 millions d'euros. Plusieurs membres de la commission
jugent nécessaire de favoriser le tourisme rural et de participer au
développement des zones situées à l'écart des grands flux touristiques.
Le troisième axe prioritaire de votre secrétariat d'Etat concerne le domaine
social. Les actions visant à développer l'accès aux vacances des personnes
handicapées, des jeunes et des personnes en difficulté sociale seront
confortées, et notre commission en est satisfaite.
Elle a également manifesté son intérêt pour votre programme de travail
législatif très complet, auquel nous espérons être étroitement associés.
Notre commission a néanmoins exprimé plusieurs préoccupations.
La première concerne la situation aux Antilles, qui appelle des mesures de
soutien de la part des pouvoirs publics. Avec Mme Girardin, vous proposerez
bientôt aux acteurs locaux des pistes pour favoriser le développement de la
Guadeloupe et de la Martinique.
Notre deuxième préoccupation touche au secteur de la montagne. Les
statistiques montrent une désaffection de cette destination touristique en
raison d'une offre encore insuffisamment adaptée à la demande. Il convient
d'aider davantage les professionnels pour le tourisme d'hiver et pour le
tourisme d'été, en particulier dans le domaine de l'hébergement.
Dans cet esprit, je souscris pleinement aux excellentes propositions de la
mission commune d'information chargée de dresser un bilan de la politique de la
montagne.
La troisième préoccupation concerne l'extension du taux réduit de TVA à la
restauration. Je suis convaincu que le Gouvernement saura obtenir l'accord de
nos partenaires européens lors des négociations de 2003 - il est impératif
qu'il y parvienne - et que cette question soit enfin réglée en 2004.
La dernière préoccupation, enfin, est relative à l'emploi. On peut se réjouir
des premières réformes intervenues cet été et cet automne tendant à aider les
entreprises à recruter des jeunes non qualifiés et à assouplir la législation
relative au temps de travail. Toutefois, le secteur du tourisme doit faire
l'objet d'une attention soutenue pour bénéficier d'une main-d'oeuvre qualifiée
et susciter des vocations nouvelles de la part des jeunes.
Compte tenu de ces différentes observations, et des orientations
incontestablement positives du budget du secrétariat d'Etat au tourisme, la
commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption de
ses crédits pour 2003.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union
centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République : 12 minutes ;
Groupe socialiste : 10 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 7 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants : 5 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 5 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des
présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minues.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
crédits demandés au titre du tourisme pour 2003 s'élèvent à 75 millions
d'euros, soit une augmentation de 1,6 % par rapport à 2002. Cette augmentation
est faible comparée aux années précédentes, mais le contexte budgétaire nous
oblige à plus de rigueur dans la définition des priorités de la politique de la
France.
La France est la destination préférée des touristes, devant l'Espagne et les
Etats-Unis. A cet égard, elle doit conserver cette place privilégiée qui est
une source de richesses importante pour notre économie.
Paris est, bien entendu, la première concernée par cet engouement touristique,
mais le tourisme touche également d'autres zones de notre territoire, comme la
mer, la montagne, la campagne, ainsi que nos territoires d'outre-mer.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous revenez de la Réunion, où j'ai eu le
plaisir de vous accueillir. Vous avez pu ainsi répertorier, dans le domaine du
tourisme, toutes les potentialités de notre département, mais aussi tous les
problèmes qui y sont liés. Je ne vais donc pas vous les détailler à nouveau. Je
ferai toutefois remarquer que Cilaos, qui est la deuxième destination des
touristes après notre volcan, n'était pas inscrit dans le programme de vos
déplacements, et je le déplore. En effet, vous auriez pu vous rendre compte,
monsieur le secrétaire d'Etat, que la route qui mène à ce village a la
particularité d'être à la fois un atout, en raison de son caractère
pittoresque, et un handicap à cause des risques, surtout en période cyclonique,
d'où la nécessité de la sécuriser davantage. Mais vous reviendrez et je me
ferai le plaisir de vous accueillir à nouveau.
M. Jean-François Le Grand.
Avec du vin de Cilaos !
(Sourires.)
Mme Anne-Marie Payet.
La politique décidée et menée au niveau de l'Etat est particulièrement
importante, car elle concerne le dynamisme de nombreux bassins de vie et le
maintien d'un grand nombre d'emplois.
Outre cette politique menée au niveau de l'Etat, le tourisme est un secteur
d'activité dont la gestion est aujourd'hui fortement décentralisée. Grâce aux
contrats de plan Etat-région, la région est la collectivité locale principale
en matière de tourisme.
Par les contrats de plan, les partenaires régionaux et locaux favorisent le
développement local et jouent un rôle essentiel dans la diversification et
l'adaptation de l'offre touristique. Cinq priorités peuvent ainsi être dégagées
: l'amélioration de la qualité et de la commercialisation des hébergements
touristiques ; l'organisation et la mise en oeuvre d'un dispositif d'évaluation
stratégique de l'économie touristique ; l'adaptation des entreprises
touristiques aux évolutions du marché ; l'accès du plus grand nombre au
tourisme et aux loisirs ; et, enfin, le renforcement par le tourisme de
l'attractivité des territoires en intégrant le concept de développement
durable.
La région constitue un échelon d'autant plus déterminant pour la mise en
oeuvre d'une véritable politique d'aménagement touristique que la loi du 27
février 2002 relative à la démocratie de proximité renforce les compétences des
régions dans le domaine du tourisme.
Selon la loi du 23 décembre 1992 portant répartition de compétences dans le
domaine du tourisme, les différentes collectivités ont des compétences
concurrentes en la matière. Toutefois, les régions disposent d'un privilège de
compétence en matière de planification touristique.
Ainsi deux compétences d'Etat sont transférées à la région. Il s'agit, d'une
part, d'assurer le recueil, le traitement et la diffusion des données relatives
à l'activité touristique dans la région et, d'autre part, de coordonner les
initiatives publiques et privées dans les domaines du développement, de la
promotion et de l'information touristique.
De nombreux organismes ont également compétence en matière de politique
touristique. Les moyens sont distribués à différents échelons. Il est donc
parfois difficile d'identifier l'acteur idoine pour un sujet bien déterminé.
La région est la collectivité locale compétente en matière de tourisme, mais
l'échelon départemental, avec les comités départementaux de tourisme, constitue
également un acteur important de l'aménagement touristique. En conséquence, il
me semble nécessaire, monsieur le secrétaire d'Etat, de clarifier les rôles,
d'instaurer davantage de cohérence dans la mise en oeuvre des politiques
touristiques et de donner à chacun un rôle clairement identifié. Cela est pour
moi particulièrement important compte tenu de l'actualité.
Le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de
la République prévoit de constitutionnaliser la notion de « communauté chef de
file » lorsque plusieurs échelons territoriaux sont concernés par un même
sujet. Cette notion de chef de file s'appliquera sans aucun doute en matière
touristique. N'est-ce pas également l'occasion de redéfinir le rôle de chacun
en matière de tourisme ?
Cette nécessité de clarifier l'organisation de l'aménagement touristique est
importante car elle permettra, sans aucun doute, de dynamiser notre politique
touristique, d'utiliser aux mieux les moyens qui y sont affectés et de cibler
plus précisément les attentes et les besoins.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Evelyne Didier.
Mme Evelyne Didier.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etart, mes chers collègues,
tout d'abord, je voudrais rappeler un certain nombre de faits quant à la
situation générale de l'activité touristique.
Si le projet de budget du tourisme, avec ses 75,04 millions d'euros, ne
représente que 0,39 % du budget du ministère, l'industrie touristique contribue
de façon importante à l'activité économique de la nation : il demeure le
premier poste de la balance des paiements avec plus de 13 milliards d'euros
d'excédent, ce qui représente 7 % du produit intérieur brut. C'est l'équivalent
de l'industrie manufacturière, ce qui me conduit à dire que le tourisme est un
peu « le pétrole » de la France puisque ce que nous gagnons ici est proche de
ce que nous dépensons en matière énergétique.
Pour autant, cela ne peut nous faire oublier certaines caractéristiques de la
situation de ce secteur. J'en citerai deux : l'emploi et la fiscalité.
S'agissant de l'emploi, nous savons pertinemment que le tourisme est un
secteur encore marqué par la précarité, même si l'action des ministres qui vous
ont précédé a permis de modifier certaines contraintes imposées aux salariés.
Je pense notamment aux mesures fiscales relatives à la taxe de séjour que nous
avons votées dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2002 et que
payaient les employés saisonniers.
Cela dit, le secteur touristique, parce qu'il continue de proposer des emplois
mal rémunérés et à fortes contraintes, présente aujourd'hui un déficit de
recrutement qu'il faudra bien examiner sérieusement.
En matière fiscale, l'abaissement de la TVA, si cette demande de la profession
est retenue, sera-t-elle destinée à permettre une évolution positive de la
situation des salariés ? La plus extrême vigilance devra être apportée sur les
contreparties sociales d'une telle réduction de TVA, si elle devait
intervenir.
Revenons maintenant aux données propres au projet de budget. Nous constatons
la stagnation des crédits ouverts, avec une augmentation de 1,6 % proche de
l'inflation, en rupture avec la progression dynamique enregistrée dans les lois
de finances précédentes.
La régulation budgétaire intervenue en 2002, avec le gel des crédits, qui a
aussi touché de nombreux autres domaines, pèsera sur les capacités de l'Etat à
faire face, dans l'avenir, à ses engagements, notamment dans le cadre des
contrats de plan Etat-région. En effet, la forte régression des crédits
affectés, dans le chapitre « Développement de l'économie touristique », à la
ligne consacrée aux moyens d'intervention ne peut que nous inquiéter.
J'ai noté les baisses suivantes : 8,1 % pour l'observation économique, 29 %
pour les interventions stratégiques, 20 % pour les contrats de plan Etat-région
et 50 % pour le développement territorial du tourisme.
Par ailleurs, nous pouvons aussi souligner la réduction des crédits du titre
IV, notamment de ceux qui sont destinés au développement de l'activité des
comités et offices du tourisme régionaux et départementaux et au secteur
associatif d'une manière générale, secteur qui se trouve de ce fait
fragilisé.
Les moyens des services ne sont pas mieux lotis, puisque la dotation pour
charges de personnel est en baisse, comme si l'on prévoyait de ne plus pourvoir
certains postes aujourd'hui vacants.
S'agissant du programme de consolidation des hébergements de tourisme social,
la chute de 10 % des autorisations de programme est inquiétante pour
l'avenir.
Enfin, vous le savez, 40 % des Français ne partent pas en vacances. Le droit
aux vacances a pourtant été consacré par l'article 140 de la loi d'orientation
relative à la lutte contre les exclusions. Si nous pouvons nous féliciter du
dispositif des chèques-vacances, il peut encore être amélioré et nous
présenterons un certain nombre d'amendements allant dans ce sens lors de la
discussion des articles non rattachés.
Enfin, nous ne pouvons qu'insister sur la nécessité de développer l'action en
faveur du droit aux vacances pour les publics prioritaires. Si nous notons le
maintien de la subvention aux bourses solidarité vacances, nous demandons que
des efforts supplémentaires soient faits rapidement pour que les familles, les
jeunes exclus du droit aux vacances voient enfin ce droit reconnu et qu'un plus
grand nombre d'entre eux puisse en bénéficier.
Le défi du droit aux vacances reste à relever et l'on peut estimer, après cinq
ans d'efforts, que nous devons agir encore pour qu'il devienne effectif.
Au terme de ces quelques remarques, je ne peux que vous indiquer notre refus
de voter les crédits du budget dévolu au tourisme.
(Applaudissements sur les
travées du groupe CRC.)
M. Jean-François Le Grand.
Dommage !
M. le président.
La parole est à M. Paul Dubrule.
M. Paul Dubrule.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je
ne reviendrai pas sur les deux excellents rapports de nos collègues, Mme
Beaudeau et M. Ginesy. J'insisterai seulement sur quelques points qui me
tiennent à coeur.
Tout d'abord, dans un esprit de continuité par rapport à l'année dernière, je
répéterai que ce petit budget me convient, car il est stable en euros constants
et n'a pas de raison d'être augmenté. Le tourisme rapporte 15 milliards
d'euros, alors que les crédits du ministère du tourisme atteignent 75 millions
d'euros. Vous avez, monsieur le ministre, le meilleur rendement ministériel
!
Mais ne nous laissons pas abuser par les chiffres, car l'investissement pour
le développement du tourisme est infiniment plus important et provient de deux
sources distinctes.
La première est transversale, Mme Beaudeau l'a déjà souligné, onze ministères
investissant au total 1,3 milliard d'euros dans le secteur du tourisme, soit 18
fois le budget du ministère du tourisme.
La deuxième est verticale ; il s'agit d'une décentralisation avant la lettre.
Je pense aux comités régionaux et départementaux du tourisme, aux milliers
d'offices de tourisme, sans oublier l'Agence française d'ingénierie
touristique, l'AFIT, l'Observatoire national du tourisme, l'ONT, et, bien sûr,
la Maison de la France, initiative exemplaire de l'un de vos prédécesseurs, M.
Jean-Jacques Descamps.
Une consolidation des chiffres s'impose, qui permettrait de prendre la juste
mesure de l'investissement en faveur du tourisme dans notre pays et du réel
poids de ce poste dans le budget de la nation. Mais, à ce jour - j'ai interrogé
les spécialistes - personne ne connaît les chiffres.
De plus, et du fait de cet éparpillement, on constate trop souvent, lors des
grandes manifestations de promotion du tourisme français, une dizaine, voire
une vingtaine de représentants français, sans coordination au niveau
national.
Les moyens mis en place sont donc importants et votre ministère joue un rôle
de coordination à la fois interministériel et territorial, qui justifierait,
pour son efficacité, comme je l'ai déjà mentionné à plusieurs occasions, un
rattachement aux services du Premier ministre.
Je souhaite maintenant insister sur quelques points particuliers, comme la
baisse de la TVA sur la restauration promise par le précédent gouvernement. Je
note avec satisfaction que le dossier sera défendu à Bruxelles et qu'il est
soutenu au plus haut niveau du Gouvernement, ce qui n'avait jamais été fait
dans le passé.
L'application acrobatique des 35 heures dans le secteur du tourisme est
catastrophique. Tout le monde souffre : hôtels, restaurants, musées et, d'une
manière générale, la qualité de l'accueil. Dans ce domaine, les grandes
entreprises souffrent peut-être moins que l'hôtellerie familiale, pour qui
cette dernière contrainte est de trop. La fermeture de ces établissements est à
craindre et c'est grave, car le maillage de l'accueil, de l'hébergement en
France est familial. Une commune qui perd son hôtel ou son restaurant perd de
sa vie sociale. C'est en effet un équipement « structurant », comme disent les
experts.
Si la sécurité des biens et des personnes dans les métiers du tourisme est
fondamentale, il est une autre mission que l'Etat doit assurer : c'est la
formation à laquelle doivent s'associer, bien sûr, les entreprises privées. Il
n'y a pas de secret : le personnel est de qualité si on lui donne une formation
de qualité. C'est notre rôle primordial, nous ne devons pas l'oublier.
Il sera intéressant, à cet égard, de connaître les résultats de la mission sur
la formation aux métiers du tourisme que vous allez confier à un
parlementaire.
Les années 2003 et 2004 seront déterminantes pour l'organisation de ce
secteur, lors de la mise en oeuvre des textes sur la décentralisation.
Les nouvelles compétences données aux régions ne pourront que fédérer les
actions souvent éparses, voire contradictoires, menées sur le territoire. Une
meilleure utilisation des crédits, non seulement ceux qui sont dédiés au
tourisme, mais aussi ceux de la culture, des transports, de l'environnement,
contribuera à rendre l'offre touristique plus performante et à améliorer la
répartition des touristes sur le territoire.
Enfin, le tourisme, c'est aussi le développement durable, ce qui exige d'aller
au-delà d'une saison, d'une année, de quelques dizaines d'années. Il s'agit
d'exploiter des sites, mais aussi de les préserver, d'en profiter tout en
faisant en sorte que les générations futures puissent également en profiter.
C'est avant tout un état d'esprit, et je souhaite qu'il soit pris en compte
dans les actions que votre département ministériel entreprendra ou qu'il
cautionnera.
Monsieur le secrétaire d'Etat, considérez qu'il ne s'agit pas pour moi de vous
présenter une liste de revendications, mais d'avancer des propositions qui ne
sont motivées que par l'attention que porte cette assemblée au fleuron de notre
économie.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et
des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Raoult.
M. Paul Raoult.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
moment où nous débattions, l'année passée, du budget du tourisme, nous ne
mesurions pas encore les effets qu'auraient les attentats de septembre 2001 sur
le tourisme mondial et les flux en France.
Selon les informations qui nous sont données par les obervatoires économiques,
la France n'a connu qu'un ralentissement de son taux de progression de
fréquentation, notamment de la part des clientèles nord-américaine et
japonaise.
Malgré ce choc international, la bonne tenue du tourisme en France démontre à
quel point les efforts accomplis par le précédent gouvernement, durant cinq
années, ont été déterminants pour soutenir l'activité économique touristique et
la faire reconnaître comme telle.
Les crédits qui nous sont soumis aujourd'hui sont quasi stables par rapport à
2002 - ils progressent de 0,4 % -, alors qu'un gros effort de rattrapage avait
été consenti pour compenser le recul marqué de 1993 à 1997.
Rappelons rapidement les enjeux.
L'activité touristique représente un peu plus de 752 000 emplois salariés et
188 000 emplois non salariés ; elle concerne plus de 206 300 entreprises
réparties sur l'ensemble du territoire français.
Le tourisme est un des vecteurs de valorisation de la culture et du
savoir-faire de notre pays.
Cette activité génère environ un million d'emplois directs et autant d'emplois
indirects.
Toujours première destination touristique au monde en 2001, la France
présentait une balance des paiements excédentaire de 15,107 milliards d'euros,
ce qui est tout proche de son chiffre record de l'année 2000, où l'on
enregistrait 15,415 milliards d'euros. Le montant des dépenses touristiques est
estimé à 97,1 milliards d'euros.
Pour donner plus de perspective à ces chiffres, il faut bien intégrer que le
potentiel de développement de cette économie est encore très fort et que le
soutien de l'Etat ne doit pas être relâché.
En effet, nous devons rester conscients de ce que, d'une part, les Français
qui partent en vacances, choisissent de plus en plus volontiers des
destinations à l'étranger et que, d'autre part, ils partent de moins en moins
en vacances, tant en hiver qu'en été, et de manière plus fractionnée. De plus,
40 % environ de nos concitoyens ne partent jamais en vacances.
Je crois qu'il était important de rappeler ces éléments qui montrent quel
levier le tourisme constitue pour l'économie française, et les efforts qu'il
faut continuer à déployer.
Le projet de budget pour le tourisme 2003 qui nous est proposé est donc quasi
stable par rapport à celui de 2002. Les crédits de fonctionnement du ministère
s'élèvent à 22,45 millions d'euros, dotation équivalente à celle de 2002.
Toutefois, les dépenses de personnel sont en légère baisse, tandis que les
moyens de fonctionnement des services sont en augmentation, sur les crédits
d'études, de 5,4 %.
Avec une prévision de 41,47 millions d'euros en faveur de la politique de
développement de l'économie touristique, monsieur le secrétaire d'Etat, vous
proposez une diminution qui s'applique à tous les postes du chapitre 44-01 du
projet de budget. Seule la ligne de crédit destinée à la promotion en France et
à l'étranger - Maison de la France - échappe à cette règle et voit son budget
porté à 28 millions d'euros, soit une hausse de 2,4 %, ce que nous saluons.
Une diminution est également forte sur l'article 30, article budgétaire dédié
à la réalisation de nouveaux programmes de rénovation des hébergements de
tourisme social. Les autorisations de programme sont en baisse de 10 % par
rapport à la programmation de 2002.
Enfin, s'agissant du chapitre 66-03 qui concerne les crédits d'investissement
liés aux contrats de plan Etat-région, il est légèrement augmenté, à hauteur de
2,4 %.
Au-delà de ces chiffres, ce projet de budget sur le tourisme est décevant. Il
porte sur un volume trop faible au regard des résultats et des progressions
enregistrées au cours des dernières années.
En effet, ce budget est caractérisé par une baisse des moyens d'engagement, je
veux parler du soutien que l'Etat compte apporter au programme de tourisme
associatif. Lancé en 2002, un nouveau plan pluriannuel n'avait pu se réaliser
pour des raisons administratives. Ces dernières sont, depuis, réglées, le
projet de rénover trois cent cinquante établissements d'ici à 2006 n'a plus
d'obstacle aujourd'hui, si ce n'est le coup de frein surprenant de 10 % sur le
chapitre budgétaire correspondant.
Ce programme d'aide à la pierre constitue une nécessité pour adapter les
centres aux nouvelles exigences des touristes, tout en maintenant des prix de
journées et de séjour acceptables pour les familles et les groupes concernés
par ce type d'accueil.
Une simple reconduction des dotations en faveur des bourses solidarité
vacances, d'un montant de 1,22 million d'euros, ainsi que des actions pour
améliorer l'accès aux personnes handicapées, semble, pour notre groupe,
insuffisante compte tenu du retard cumulé depuis plusieurs décennies et de la
demande bien légitime que le Gouvernement doit entendre pour que les vacances
soient un droit pour tous les Français.
Ma deuxième remarque concerne le soutien aux interventions stratégiques. La
diminution de 23 % des crédits est totalement inadaptée. Nous mettions
précédemment l'accent sur l'intérêt majeur que représentent les centres de
ressources et la capacité d'expertise et de suivi de la politique nationale des
centres de ressources et des délégations régionales. L'Etat est ici totalement
dans son champ de compétences pour donner les moyens d'anticiper et d'impulser
une véritable politique touristique par rapport à un marché international en
pleine mutation.
Seuls les crédits alloués en faveur de Maison de la France, dont je salue le
travail en faveur de l'image touristique de notre pays, enregistrent une légère
augmentation qui reste toutefois insuffisante au regard des financements
apportés notamment par les régions.
Il en est de même des crédits de fonctionnement qui, apparemment, progressent
de 5,4 %, alors que les crédits d'intervention subissent une baisse de 6,8 %.
L'augmentation de postes comme celui des dépenses de personnel ou des moyens de
fonctionnement n'est qu'un artifice de présentation, puisqu'il s'agit, en
réalité, d'ajustements de situations réelles, de transferts de chapitres, de
réductions des crédits destinés aux rémunérations des agents publics en poste à
l'étranger, ou encore de transformations d'emplois dans les services
déconcentrés.
Ma troisième remarque porte sur l'évolution des crédits d'investissement
consacrés aux contrats de plan Etat-régions. Elle ne repose que sur
l'inscription effective des crédits sur lesquels l'Etat s'est engagé en
contrepartie de dotations des régions et des collectivités locales. Nous sommes
actuellement dans la phase active de ces contrats. L'Etat ne pourrait expliquer
une autre position.
Enfin, pour conclure cette intervention, je souhaite attirer l'attention de
nos collègues sur trois sujets qui me tiennent à coeur.
Premièrement, il me semble déterminant de poursuivre le travail engagé par le
précédent gouvernement sur la clarification des champs de compétences. Le
tourisme est une activité économique en tant que telle, particulièrement
adaptée à notre volonté d'aménagement du territoire et à la valorisation des
richesses de nos pays. Son effet est particulièrement important sur le
développement du tourisme rural.
Deuxièmement, il est nécessaire de développer et d'organiser la formation aux
métiers du tourisme. Ils constituent souvent de véritables professions, parfois
des vocations, souvent hautement qualifiées, en constante évolution, car le
marché change et les exigences font progresser ce secteur.
Troisièmement - et ce point est un peu personnel -, il convient d'aider les
fédérations dans leur travail de classement et de labellisation de
l'hébergement, en particulier Gîtes de France et Clévacances. C'est un travail
remarquable qui est accompli par les fédérations qu'il nous faut mieux aider
pour garantir l'excellence de tous nos hébergements.
Je ne trouve pas, monsieur le secrétaire d'Etat, dans ce budget pour 2003,
l'annonce d'un soutien fort de l'Etat, alors que nous sommes là au coeur de nos
préoccupations, dans une logique de structuration, de qualification d'une
partie de l'économie française et de solidarité entre les régions.
Ce projet de budget pour 2003 est donc décevant du fait de la modestie de son
volume - il représente 0,3 % du budget du ministère de l'équipement - et au
regard des efforts déployés et des progressions enregistrées au cours des
dernières années.
Il est inadapté, car il est trop faible eu égard à l'importance des enjeux
économiques du secteur touristique en France, notamment dans nos régions. Les
moyens d'engagement, les aides aux interventions stratégiques sont marquées
d'un coup de frein dont on pressent déjà les effets.
Aussi, monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste est au regret de
devoir voter contre les crédits du tourisme pour 2003.
M. le président.
La parole est à M. Jean-François Le Grand.
M. Jean-François Le Grand.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
après cette vision panoramique du tourisme et du budget du tourisme, je
souhaite simplement formuler quelques observations en tant que président du
conseil général d'un département à la fois littoral et rural et à fort
potentiel touristique.
L'observation au ras de la plage ou au ras du terrain
(Sourires)
montre qu'il existe des possibilités d'amélioration de l'activité touristique,
en recourant à des mesures qui sont relativement simples, qui ne coûtent pas
d'argent et qui permettraient d'activer un secteur terriblement important en
termes de créations d'emplois.
Monsieur le secrétaire d'Etat, ayant déjà eu l'occasion de vous faire part de
ces observations et, notamment, de huit mesures dont je m'étais permis de
dresser la liste, je me contente de les citer très rapidement pour qu'elles
soient actées.
Ma première observation concerne les entreprises touristiques. Dans des
départements comme le nôtre, il s'agit de micro-entreprises qui ont besoin
d'une simplification administrative, mais aussi d'aides économiques de
proximité relevant plutôt des départements que des régions, car l'éloignement
des centres de décision au regard des mesures d'accompagnement rend l'accès à
ces dispositifs difficile.
Ma deuxième observation a trait à la formation dans le domaine touristique. Le
secteur a besoin de plans de formation initiale qui soient parfaitement adaptés
aux différentes spécificités des métiers du tourisme. Il n'y a pas un métier du
tourisme mais des métiers complètement différents selon les endroits. Ces
formations initiales répondent à un besoin soit de ceux qui en manquent
a
priori,
soit de ceux qui veulent faire évoluer leur propre parcours
personnel. Il importe, selon moi, de faciliter une telle démarche. De même, à
l'échelon régional comme à l'échelon national, il serait nécessaire
d'harmoniser ces différentes formations.
La troisième observation concerne l'action de l'Etat : nous avons besoin, en
la matière, de transversalité et de coordination. Je vous avais suggéré de
mettre en place une cellule de coordination ; cela a été repris par un certain
nombre de mes collègues qui ont appelé de leurs voeux une « coordination » des
différents ministères ou des différents services qui agissent dans le domaine
du tourisme.
En effet, c'est un véritable parcours psychédélique pour quelqu'un qui ne
connaît pas forcément les rouages et les arcanes de l'administration et qui
souhaite monter des dossiers de ce genre. D'où la nécessité de transversalité,
de coordination et de simplification.
Ma quatrième observation concerne l'amélioration de la relation entre l'Etat
et les collectivités territoriales, à travers, notamment, un schéma national
d'aménagement et de développement touristique. Si vous aviez ce schéma,
monsieur le secrétaire d'Etat, vous pourriez l'offrir à la contractualisation
dans le cadre des contrats de plan Etat-région et les régions et les
départements pourraient en faire leurs choux gras, ce qui amplifierait l'effet
des mesures ou des financements que vous mettez en place.
La cinquième observation concerne les mesures organisationnelles, mais je n'en
dirai presque rien, car il en a déjà été question.
J'évoquerai rapidement, sixième observation, l'encadrement des entreprises et
des structures, qui nécessite également une simplification.
J'en viens à deux observations, les deux dernières, sur les mesures fiscales
et les aides publiques aux stations touristiques.
Monsieur le secrétaire d'Etat, s'agissant de micro-entreprises à un seul
salarié, ne pourrait-on pas mettre en place une sorte de fiscalité progressive
au fur et à mesure que l'entreprise se développerait ? Ne pourrait-il pas y
avoir une adaptation de la fiscalité à la réalité de l'entreprise ? L'imposer
dès le premier jour et la première année est souvent facteur d'échec ou
d'abandon. Cette formule nous permettrait de résoudre un certain nombre de
problèmes.
Enfin, parce que les stations touristiques vieillissent, ne pourrait-on pas
mettre en place une sorte de fonds national destiné à leur donner les moyens de
se rénover, de se redynamiser ? Certaines d'entre elles ont accumulé des
retards, je sais bien que ce n'est pas la faute de l'Etat ni celle des
gouvernements, cela relève d'autres responsabilités. Cela étant, ces stations
touristiques, qui sont parfois mal en point, mériteraient d'être aidées. Cela
contribuerait à développer l'essentiel de l'économie touristique.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Léon Bertrand,
secrétaire d'Etat au tourisme.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, je tiens tout d'abord à souligner la qualité du travail effectué
par les deux rapporteurs, Mme Marie-Claude Beaudeau, rapporteur spécial, et M.
Charles Ginésy, rapporteur pour avis.
J'ai apprécié la précision et l'exhaustivité remarquables des documents
présentés. Pour ma première présentation du budget du tourisme devant le Sénat,
ces rapports constituent pour moi un apport précieux.
A travers les interventions des orateurs, j'ai perçu également le très grand
intérêt que votre assemblée porte à la première industrie nationale. Je
répondrai aux uns et aux autres dans la deuxième partie de mon intervention.
Je souhaite d'abord mettre en perspective les priorités sur lesquelles est
construit notre budget pour 2003, en répondant, notamment, aux questions
soulevées par les rapporteurs.
Madame la rapporteur spécial, monsieur le rapporteur pour avis, le contexte
international, comme vous l'avez souligné dans vos différents rapports, est
très difficile. Il convient de rappeler que les événements dramatiques du 11
septembre 2001 et, plus récemment, ceux de Bali et du Kenya ont profondément
affecté le tourisme mondial.
Alors que les déplacements touristiques internationaux connaissaient une
croissance de 5 % par an jusqu'en 2001, le bilan de cette année affichait une
baisse de 1,3 % dans le monde.
Dans ce contexte difficile, la France est restée néanmoins très attractive en
accueillant, en 2001, plus de 76,5 millions de touristes étrangers qui ont
apporté en France 33,9 milliards d'euros, donnant ainsi un solde positif de 15
milliards d'euros au poste « voyages » des échanges extérieurs.
Il faut, à ce propos, souligner que ce résultat met le tourisme au premier
rang des secteurs économiques de notre pays. Beaucoup d'entre vous l'ont
souligné. Cela ne doit pas nous faire oublier que le tourisme reste un secteur
fragile, sensible aux événements et soumis à une concurrence mondiale offensive
qui interdit de relâcher nos efforts.
Mesdames, messieurs les sénateurs, dans le contexte actuel de maîtrise des
dépenses publiques, l'ensemble des moyens de paiement du tourisme - 75 millions
d'euros - croît légèrement, alors que celui des moyens d'engagement reste
pratiquement stable.
De plus, le soutien budgétaire à la politique du tourisme ne se limite pas à
la seule section « tourisme ». D'autres crédits sont, par ailleurs, mis en
oeuvre par plusieurs départements ministériels.
A ce sujet, Mme Beaudeau et M. Ginésy demandent la création d'une annexe
informative spécifique au tourisme. Il s'agit, certes, d'une possibilité, mais
la perspective de la loi organique relative aux lois de finances contredit
cette idée. Pour répondre à leur préoccupation, j'ai demandé à mes services,
sans attendre, une analyse des crédits mis en oeuvre en 2002 par les différents
ministères en faveur du tourisme.
Il s'agit cependant, avant tout, de mieux utiliser les crédits mis à notre
disposition, avec un souci d'efficacité, de transparence et une exigence de
vérité.
L'un des axes majeurs du secrétaire d'Etat au tourisme est de contribuer au
développement de l'action internationale par une vigoureuse promotion de la
France à l'étranger et le renforcement de l'attractivité du territoire « France
». Le but est d'inciter les touristes étrangers à choisir la France comme
destination et à prolonger leurs séjours, ce qui répond à la préoccupation de
M. Ginésy.
Le tourisme est donc le premier poste excédentaire de la balance des paiements
: il représente 7 % du PIB. Si la France est la première destination
touristique du monde, elle ne tient que le troisième rang mondial au niveau des
recettes.
Le potentiel économique existe donc et doit être mieux exploré.
Portée à 28,1 millions d'euros, soit une augmentation de 2,6 %, la subvention
de l'Etat au groupement d'intérêt économique Maison de la France assure
pratiquement la moitié du budget du GIE, financé, parallèlement, par les
professionnels membres du groupement.
Maison de la France a notamment en charge la gestion de la campagne « Bonjour
» ainsi que celle des campagnes qui confortent l'image touristique de la
destination France, notamment avec la campagne « J'aime la France ».
L'augmentation de la subvention en 2003 doit permettre de dynamiser notre
représentation à l'étranger et d'intensifier les campagnes de promotion de
notre pays dans le contexte délicat de l'après 11-septembre.
Par ailleurs, en ce qui concerne le statut de certains personnels de Maison de
la France évoqué par les deux rapporteurs, je me suis engagé à étudier cette
question sur le fond et les premières démarches concernant un aspect de ce
problème ont déjà été engagées.
Mme Beaudeau a également souhaité attirer l'attention du Gouvernement sur
l'évolution du tourisme d'affaires, notamment à Paris. Je suis sensible à cette
remarque. C'est la raison pour laquelle j'ai accordé des moyens supplémentaires
à Maison de la France, qui prendra désormais en compte cette nouvelle
donnée.
La recherche de l'augmentation des flux du tourisme international doit être
nécessairement précédée d'études d'impact indispensables à la définition des
cibles. Ces études devront être affinées en complément de celles déjà
réalisées.
En augmentation de 28 % par rapport à celle de l'année dernière, la dotation
pour les études atteindra 2,6 millions d'euros en 2003. Elle permettra de
poursuivre la rénovation de l'enquête aux frontières. Cette enquête fournit une
grande part des données transmises à Eurostat, dans le cadre de la directive
européenne sur les statistiques du tourisme.
Un dispositif permanent d'observation des flux de touristes non résidents sera
ainsi mis en place, à terme.
Corrélativement, l'innovation technologique dans le secteur touristique doit
être soutenue et accompagnée par l'Etat pour rendre cohérente et homogène
l'offre des acteurs nationaux. Cette dernière pourra ainsi proposer des
services et des produits touristiques personnalisés en ligne. Je souhaite
accélérer le développement de l'outil de mise en ligne sur Internet de l'offre
touristique française, dont une déclinaison, au niveau européen, est en cours
de mise en oeuvre. Je pense en particulier au serveur national de réservation,
Resinfrance, et au site Internet franceguide.com.
La valorisation du produit touristique constitue, au même titre que la
promotion à l'étranger, un enjeu majeur de la politique du tourisme. Sa mise en
oeuvre est confiée à l'Agence française d'ingénierie touristique, l'AFIT.
Ses moyens sont globalement maintenus à un bon niveau, afin de lui permettre
de développer son savoir-faire. L'un des objectifs qui lui seront fixés sera de
développer de nouveaux partenariats et de rechercher ainsi de nouveaux
financements.
Les moyens octroyés à l'association Observatoire national du tourisme sont
également globalement maintenus.
Dans ce cadre, vous savez l'importance que j'attache au développement de
l'outil statistique, et c'est pourquoi je vous informe que j'ai demandé à M.
Francis Mer de mettre en place une mission générale d'étude sur l'observation
statistique en France. Celle-ci visera à proposer une rationalisation des
structures existantes.
Ma deuxième priorité budgétaire pour 2003 sera d'amplifier une politique
dynamique de l'aménagement des structures touristiques, dans le cadre d'un
développement durable qui s'inscrira dans une offre touristique diversifiée. Il
s'agit de restructurer cette offre, en partenariat avec les collectivités
locales.
Le développement territorial du tourisme en investissement - inscrit au titre
VI - comprend, d'une part, les contrats de plan Etat-région, pour lesquels 206
millions d'euros seront mobilisés entre les années 2000 et 2006, et, d'autre
part, le programme de consolidation des hébergements de tourisme social, qui
prévoit des crédits d'un montant de 27,44 millions d'euros sur la période
allant de 2001 à 2006.
Ainsi, en 2003, la progression des crédits de paiement pour ces programmes
sera particulièrement forte, - 4,15 millions d'euros - soit une augmentation de
59,7 %.
Par ailleurs, l'aménagement des structures touristiques doit également
concerner l'outre-mer. C'est pour cette raison que je prépare, en liaison avec
Mme la ministre de l'outre-mer, un plan d'urgence pour le tourisme dans les
départements et territoires d'outre-mer.
Un meilleur accueil des touristes passe nécessairement par une amélioration de
l'offre touristique. Je souhaiterais, dans cette optique, évoquer notamment les
questions de formation, de classement des villes touristiques et la baisse du
taux de la TVA dans le secteur de la restauration traditionnelle, questions
évoquées notamment par M. Ginésy.
S'agissant de la formation, une mission parlementaire - comme je l'ai indiqué
précédemment devant les différentes commissions - a été confiée à un élu.
Ainsi, Mme Arlette Franco sera chargée de dresser un bilan du dispositif
existant et devra proposer une évolution de la réglementation actuelle qui
tienne compte des besoins réels des professionnels du tourisme. Bien entendu,
la recommandation de M. Ginésy tendant à la coordination en matière de travail
saisonnier sera respectée.
Pour répondre aux préoccupations de Mme Beaudeau concernant le statut et
l'hébergement des saisonniers, et comme je l'ai dit à l'Assemblée nationale,
j'ai lu le très intéressant rapport de M. Anicet Le Pors. Il me semble
nécessaire d'élargir la réflexion qu'il a menée en tenant compte également des
attentes des entreprises de tourisme à l'endroit des saisonniers.
Le régime des stations classées est fondé sur des textes anciens qui sont
maintenant codifiés, et il convient, après de nombreuses études, de préparer et
de mettre en place - en coordination avec les associations d'élus, les
professionnels et les administrations concernées - une réelle réforme du régime
de ces stations.
De même, j'ai pris des dispositions pour que la codification à droit constant
des textes relatif au tourisme soit achevée dans le courant de l'année 2003.
Par ailleurs, l'application du taux réduit de TVA dans le secteur de la
restauration traditionnelle doit dynamiser à la fois l'emploi, à l'image de la
baisse de la TVA appliquée aux travaux immobiliers, et l'attractivité de
l'offre, tout en favorisant l'aménagement du territoire dans le cadre d'un
tourisme durable. Cette réglementation est en cours de négociation avec les
autres pays européens.
En ce qui concerne la décentralisation, le Gouvernement a engagé un grand
débat national. Je souhaite que les missions confiées aux délégations
régionales au tourisme soient redéfinies, et qu'elles soient maintenues dans le
domaine des missions régaliennes de l'Etat.
La troisième priorité du secrétariat d'Etat au tourisme est de favoriser
l'accès aux vacances pour tous, ce qui conduit à consacrer à cette action 9 %
du budget total.
En plus du programme de consolidation de l'équipement du tourisme social, les
interventions dans le domaine social seront très présentes dans le budget du
tourisme pour 2003.
Les actions pour développer l'accès aux vacances sont confortées. Elles seront
conduites en fonction de trois axes principaux : l'accès au tourisme des
personnes handicapées, l'accès au tourisme des jeunes et l'accès au tourisme
des personnes en difficulté sociale.
L'année 2003 sera l'année européenne pour les personnes handicapées.
La mise en oeuvre du label « Tourisme et handicap » doit s'achever afin
d'inciter à l'élaboration d'une large gamme de produits spécifiques.
Dans le domaine du tourisme des jeunes, il sera donné suite aux analyses et
préconisations du rapport du Conseil économique et social et du rapport du
Conseil national du tourisme.
Pour les personnes en difficulté sociale, la volonté est de structurer la
Bourse solidarité vacances pour répondre aux attentes tant des opérateurs de
tourisme que des organismes sociaux pour la réalisation des objectifs
quantitatifs de départ de ces personnes.
Comme l'a souligné M. Ginésy, le régime d'attribution des chèques-vacances est
aujourd'hui trop restrictif. Un amendement est proposé pour simplifier le
mécanisme destiné aux très petites entreprises de moins de dix salariés.
Sur la situation aux Antilles, je me suis déjà longuement exprimé : je ne
reviendrai donc pas sur ce sujet d'importance.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, ce que je voulais dire en guise de
présentation globale de mon budget. J'aimerais répondre à présent aux questions
qui m'ont été posées par M. le rapporteur spécial et par M. le rapporteur pour
avis.
Tout d'abord, madame Beaudeau, vous avez évoqué la mission parlementaire
conduite par M. Patrick Ollier qui, en ce moment même, prend contact avec les
différents acteurs du terrain aux Antilles, aussi bien les élus que les
responsables syndicaux ou les professionnels. Les premières conclusions du
rapport de cette mission me seront certainement remises avant mon départ aux
Antilles, qui est prévu entre le 18 et le 22 décembre prochains.
Certains sénateurs se sont interrogés sur la TVA. De ce qui n'était qu'un
sujet de réflexion et de débat, nous sommes désormais passés à une situation
concrète, puisque la Commission européenne notamment son président, Romano
Prodi, a accepté le principe d'ouvrir un chantier. Par conséquent, des
discussions vont débuter dès le mois de janvier 2003 afin d'aboutir, nous
l'espérons, à un taux de TVA de 5,5 % à compter du mois de janvier 2004. Il
existe tout de même quelques résistances, notamment de la part des Allemands et
des Danois ; je me rends d'ailleurs le 10 décembre à Bruxelles, où j'ai
l'intention de rencontrer mes homologues et de tenter de les convaincre.
Monsieur Ginésy, vous avez évoqué le maintien de Maison de la France. Nous
sommes tous d'accord sur l'intérêt d'un tel organisme : si nous voulons que
notre pays reste la première destination touristique, il y a en effet un énorme
travail de promotion à réaliser. C'est la raison pour laquelle nous avons
privilégié les moyens mis à la disposition de Maison de la France.
Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur pour avis, le problème des Antilles
ainsi que celui des montagnes.
Je me rends vendredi prochain en Haute-Savoie, sur l'initiative des élus et
des responsables de ce département. Ce sera pour moi l'occasion de montrer
l'intérêt que je porte à la relance de ce territoire qui rencontre depuis deux
ou trois ans des difficultés.
Nous aurons donc l'occasion d'étudier la situation dans le détail, car il est
sans doute nécessaire de définir une nouvelle politique. Nous savons bien que
la moyenne montagne souffre de retards ou parfois de manque d'enneigement. Une
réflexion gagnerait à être menée avec l'AFIT pour trouver d'autres produits
touristiques et que ces régions ne soient pas laissées pour compte.
J'en viens maintenant aux questions qui m'ont été posées par les orateurs.
Madame Anne-Marie Payet, sachez combien nous avons été heureux, mon équipe et
moi-même, d'être accueillis aussi chaleureusement à la Réunion. Il est vrai que
je n'ai pas eu le temps de me rendre à Cilaos. Je connais cependant cette
région pour avoir eu l'occasion, en 1993, de m'y rendre en tant que rapporteur
du budget. Je vous promets, bien entendu, de m'y rendre dès que je le
pourrai.
Vous avez évoqué le secteur du tourisme qui, il est vrai, est largement
décentralisé, ainsi que la nécessaire clarification des rôles entre les
différents acteurs qui, sur le terrain, mènent des opérations en vue de
diversifier le produit.
A l'occasion d'une réunion très intéressante à laquelle j'ai assisté la
semaine dernière à Saint-Pierre, j'ai pu constater un foisonnement de projets
grâce à la vigueur, à l'énergie et au génie local. Les hommes et les femmes y
sont déterminés, remplis d'audace et animés de beaucoup de créativité et
d'imagination. A mon sens, le tout doit pouvoir « respirer », mais nous sentons
bien que la présence d'un « facilitateur », d'un régulateur s'impose.
Précisément, le débat sur la décentralisation devrait nous permettre de
conforter le rôle des DRT, les délégués régionaux du tourisme. Sans animateur
sur le terrain, les règles du jeu que doivent jouer les uns et les autres
risquent de ne pas être comprises clairement.
Vous avez également évoqué le problème du développement durable. Je me suis
rendu à Mayotte la semaine dernière, connue pour son lagon qui est l'un des
plus beaux du monde. C'est là tout l'enjeu entre l'exploitation d'un produit
touristique et sa préservation, ce qui signifie que, dans toutes les actions
que nous mènerons en matière de tourisme, le développement durable sera
toujours présent.
Mme Evelyne Didier a évoqué les marges de manoeuvre que nous espérons dégager
lorsque la TVA sera à 5,5 %. Nous en avons déjà discuté avec les professionnels
et nous sommes d'accord sur ce que nous appelons les « trois tiers » : un tiers
de cette marge serait destinée à rendre les prix plus attractifs pour la
clientèle ; un autre tiers permettrait d'améliorer les équipements, voire
d'apporter des réponses en matière de formation ; le dernier tiers viserait à
rendre les salaires plus intéressants, aussi bien pour les salariés que pour
les patrons. Nous souhaitons voir ces engagements se concrétiser. La discussion
est en cours avec les professionnels.
Vous avez souligné, madame le sénateur, que ce budget était maigre. Il était
difficile de faire autrement dans le contexte économique que traverse la
France. En tout cas, je puis vous assurer que les moyens de paiement sont plus
importants que les moyens d'engagement. Le fonctionnement du ministère devra
être apprécié non pas en termes d'affichage mais en termes d'exécution. Je
veillerai à ce que les crédits qui sont inscrits dans mon budget soient
réellement consommés. C'est ainsi que nous pourrons mesurer le travail
accompli.
Des efforts restent nécessaires pour encourager le tourisme social. Une porte
a été ouverte par mes prédécesseurs et je salue leur travail. Sachez que je
poursuivrai dans la même direction, car le tourisme doit s'adresser à tous les
publics. A cet égard, les crédits consacrés à l'hébergement social, connaissent
une hausse importante. Je puis donc vous rassurer : les engagements en faveur
du tourisme social seront maintenus.
La déclaration de M. Paul Dubrule, selon laquelle ce budget a le meilleur
rendement ministériel et qu'il souhaitait que le secrétariat d'Etat au tourisme
soit rattaché aux services du Premier ministre, me va droit au coeur. Pourquoi
pas !
(Sourires.)
Elle souligne à quel point ce secteur connaît une
forte reconnaissance que nous souhaitons tous la plus large possible.
Par ailleurs, j'ai sollicité M. Francis Mer pour que l'INSEE nous fournisse de
vraies statistiques. Lorsque nous disposerons de données fiables, nous serons
confortés dans nos exigences, car le poids de l'économie du tourisme au sein de
l'économie française sera mieux cerné.
S'agissant des 35 heures, des discussions ont été engagées avec François
Fillon et un décret est en préparation qui devrait, d'ici à la fin du mois,
clarifier la situation. Les 35 heures, il est vrai, ne peuvent pas être
appliquées sans discernement à des restaurateurs ou à des hôteliers. Un
assouplissement est donc nécessaire dans ce domaine et nous y travaillons.
En ce qui concerne la formation, je le répète, Mme Arlette Franco est chargée
de faire un état des lieux qui nous permettra de définir quelques orientations
avant le mois de mai. Pour que les jeunes soient intéressés par le secteur du
tourisme, il faut valoriser les métiers concernés en créant des formations qui
soient sanctionnées par des diplômes reconnus par les pouvoirs publics. Cela
permettra de rendre ces métiers plus attractifs. Ces formations, par voie de
conséquence, seront le gage de la qualité des professionnels dont nous avons
besoin pour être concurrentiels.
Vous avez naturellement évoqué le développement durable, qui est pour nous une
priorité.
Jean-François Le Grand a, quant à lui, cité huit mesures. Monsieur le
sénateur, vos propositions sont pour moi un sujet d'inspiration. Je m'efforce
depuis quelque temps de lire tous les documents qui me sont transmis. La
plupart du temps, il s'agit de propositions très intéressantes qui alimentent
ma réflexion.
Vous proposez notamment de réfléchir à l'adaptation de la fiscalité aux
petites entreprises. Cette idée me paraît tout à fait neuve et intéressante.
Des dispositifs similaires sont appliqués en outre-mer. Je suis prêt à étudier
avec vous des propositions que nous pourrions soumettre au ministre de
l'économie.
Monsieur Raoult, vous avez parlé d'un petit budget. Nous nous efforcerons
d'utiliser avec efficacité le peu dont nous disposons et d'en tirer le meilleur
parti. C'est en tout cas l'esprit dont je suis animé.
Je rappelle également que nous allons poursuivre le programme d'hébergement
social et le plan patrimoine qui avaient été engagés par mes prédécesseurs. Le
financement est prévu.
Vous avez en outre évoqué les vacances pour tous les Français. Comme vous
l'avez souligné, l'intervention financière en faveur des bourses solidarité
vacances est pratiquement inchangée. Nous allons donc poursuivre des efforts en
ce sens.
Vous avez surtout traité des question de classement, de label. L'axe principal
de la politique que je souhaite développer dans les années qui viennent
s'appuiera sur ce que j'appelle le « plan qualité France. ». Si nous voulons
être concurrentiels, il faut vendre la qualité et, pour que la qualité soit
garantie, il faut des classements, des certifications, des labels. J'en fais un
point d'honneur et, par conséquent, je crois que vous pouvez, de ce côté, être
tranquilles.
J'espère, mesdames, messieurs les sénateurs, être autant que possible parvenu
à apaiser toutes vos inquiétudes. J'ai en tout cas tenté de répondre à
toutes vos préoccupations.
Pour terminer mon propos, je dirai que, s'il est modeste, le budget de
tourisme ne correspond pas seulement à ce que nous entrevoyons. C'est pourquoi
il a été question tout à l'heure de rendement ministériel. Il faut aussi mettre
dans la balance la synergie qui doit exister entre les professionnels de ce
secteur et les pouvoirs publics, que nous représentons. C'est le sens de la
politique que je souhaite mener à la tête de mon secrétariat d'Etat, car je
crois que là est la clé de la réussite.
(Applaudissements sur les travées du
RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'équipement, les transports, le logement, le tourisme et la
mer.
Je vous rappelle que le Sénat a déjà examiné aujourd'hui même les crédits
affectés aux services communs, à l'urbanisme et au logement, aux transports
terrestres, à l'aviation et l'aéronautique civiles et à la mer.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 47 805 492 000 euros. »