SEANCE DU 2 DECEMBRE 2002
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Loi de finances pour 2003.
- Suite de la discussion d'un projet de loi (p.
1
).
Economie, finances et industrie
SERVICES FINANCIERS (p.
2
)
M. Bernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Odette Terrade, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques
pour la consommation et la concurrence ; M. Gérard Delfau, Mme Marie-Claude
Beaudeau.
M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Crédits du titre III (p. 3 )
MM. Gérard Delfau, le ministre.
Amendement n° II-38 de la commission. - MM. Jean Arthuis, président de la
commission des finances ; le ministre délégué. - Adoption.
Amendement n° II-39 de la commission. - MM. le président de la commission, le
ministre délégué, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Gérard Delfau, Philippe
Marini, rapporteur général de la commission des finances. - Adoption.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre IV. - Vote réservé (p.
4
)
Crédits du titre V (p.
5
)
Amendement n° II-37 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, le rapporteur
spécial, le président de la commission. - Adoption.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre VI. - Vote réservé (p.
6
)
Article 66 (p.
7
)
Amendements identiques n°s II-11 de M. Josselin de Rohan et II-24 de M. Guy
Fischer. - Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roger Karoutchi, le rapporteur
spécial, le ministre délégué, le rapporteur général. - Retrait de l'amendement
n° II-11 ; rejet de l'amendement n° II-24.
Adoption de l'article.
Article 67 (p. 8 )
Amendement n° II-28 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le ministre
délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Suspension et reprise de la séance
(p.
9
)
Charges communes et comptes spéciaux du Trésor
(p.
10
)
MM. Yves Fréville, rapporteur spécial de la commission des finances pour les
charges communes ; Paul Loridant, rapporteur spécial de la commission des
finances pour les comptes spéciaux du Trésor ; Mme Marie-Claude Beaudeau.
M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
charges communes (p.
11
)
Crédits des titres I et II. - Adoption (p.
12
)
Crédits du titre III (p.
13
)
MM. Jean Arthuis, président de la commission des finances ; le ministre
délégué.
Adoption des crédits.
Crédits des titres IV et VI. - Adoption (p.
14
)
Article 68 (p.
15
)
Amendement n° II-29 de la commission. - MM. Yves Fréville, rapporteur spécial
; le ministre délégué. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 68
bis.
- Adoption (p.
16
)
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR (p.
17
)
Article 42. - Adoption (p.
18
)
Article 43 (p.
19
)
Mme Marie-Claude Beaudeau, M. le ministre délégué.
Amendement n° II-34 du Gouvernement. - MM. le ministre délégué, Paul Loridant,
rapporteur spécial. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles 44 à 47. - Adoption (p.
20
)
Budget annexe des Monnaies et médailles
(p.
21
)
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Crédits figurant à l'article 40. - Adoption (p.
22
)
Crédits figurant à l'article 41 (p.
23
)
Amendement n° II-42 de la commission. - M. Jean Arthuis, président de la
commission des finances ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Bertrand Auban, le
ministre délégué. - Adoption.
Adoption des crédits modifiés.
Suspension et reprise de la séance (p. 24 )
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
Economie, finances et industrie
(suite)
INDUSTRIE (p.
25
)
MM. Jean Clouet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Pierre
Hérisson, en remplacement de M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la
commission des affaires économiques pour l'industrie ; Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour les
technologies de l'information et de La Poste ; Roland Courteau, rapporteur pour
avis de la commission des affaires économiques pour l'énergie ; Pierre-Yvon
Trémel, Mme Odette Terrade, MM. Jean-René Lecerf, Jean Besson, Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
Crédits du titre III (p. 26 )
Mme Odette Terrade.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre IV (p. 27 )
Amendement n° II-40 de la commission. - M. Philippe Marini, rapporteur général
de la commission des finances ; Mme la ministre déléguée, MM. Pierre-Yvon
Trémel, le président de la commission. - Adoption.
Vote des crédits réservé.
Crédits du titre V. - Vote réservé (p.
28
)
Crédits du titre VI (p.
29
)
MM. Roger Rinchet, Jean-Pierre Bel, Jean-Pierre Sueur, Mme la ministre
déléguée.
Vote des crédits réservé.
Article additionnel après l'article 68 bis (p. 30 )
Amendement n° II-31 de M. Pierre Hérisson. - MM. Pierre Hérisson, le rapporteur spécial, Mme la ministre déléguée, M. le président de la commission. - Retrait.
Suspension et reprise de la séance
(p.
31
)
petites et moyennes entreprises, commerce
et artisanat (p.
32
)
MM. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances ; Gérard
Cornu, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Bernard
Dussaut, Christian Gaudin, Mme Odette Terrade, MM. Joseph Ostermann, Aymeri de
Montesquiou, Serge Mathieu, François Marc, Jean-René Lecerf.
M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au
commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
Crédits du titre III. - Vote réservé (p.
33
)
Crédits du titre IV (p.
34
)
Amendement n° II-41 de la commission. - MM. le rapporteur spécial, le
secrétaire d'Etat, Bernard Dussaut, Jean Arthuis, président de la commission
des finances. - Adoption.
Vote des crédits réservé.
Crédits des titres V et VI. - Vote réservé (p.
35
)
Article 64 (p.
36
)
Amendement n° II-15 de M. Jacques Valade. - MM. Jean-René Lecerf, le rapporteur
spécial, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° II-44 du Gouvernement. - MM. le secrétaire d'Etat, le secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 64 (p. 37 )
Amendements n°s II-33 de M. Gérard Cornu et II-45 rectifié du Gouvernement. - MM. Gérard Cornu, le secrétaire d'Etat, le rapporteur spécial. - Retrait de l'amendement n° II-33 ; adoption de l'amendement n° II-45 rectifié insérant un article additionnel.
Article 65. - Adoption (p.
38
)
Suspension et reprise de la séance
(p.
39
)
COMMERCE EXTÉRIEUR (p.
40
)
MM. Marc Massion, rapporteur spécial de la commission des finances ; Michel
Bécot, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Mme
Odette Terrade, MM. Jean Bizet, Aymeri de Montesquiou, Pierre-Yvon Trémel.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Crédits des titres III à VI. - Adoption (p.
41
)
Services du Premier ministre
I. - SERVICES GÉNÉRAUX (p.
42
)
MM. François Marc, rapporteur spécial de la commission des finances ; François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Crédits des titres III à V. - Vote réservé (p.
43
)
II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE (p.
44
)
MM. Michel Moreigne, rapporteur spécial de la commission des finances ; Paul
Girod.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Crédits des titres III et V. - Adoption (p.
45
)
III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL (p.
46
)
M. Claude Lise, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Crédits des titres III et V. - Adoption (p.
47
)
IV. - PLAN (p.
48
)
MM. Claude Haut, rapporteur spécial de la commission des finances ; Jean-Paul
Alduy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques ; Joël
Bourdin, Thierry Foucaud.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Crédits des titres III, IV et VI. - Adoption (p.
49
)
Budget annexe des Journaux officiels
(p.
50
)
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances ; Mme
Marie-Claude Beaudeau.
M. François Loos, ministre délégué au commerce extérieur.
Adoption des crédits figurant aux articles 40 et 41.
3.
Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
(p.
51
).
4.
Ordre du jour
(p.
52
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
LOI DE FINANCES POUR 2003
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2003 (n° 67, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale. [Rapport n° 68 (2002-2003).]
Économie, finances et industrie
SERVICES FINANCIERS
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services financiers.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le budget des services financiers, qui
constituent le « coeur de métier » du ministère de l'économie, des finances et
de l'industrie devrait s'établir pour 2003 à 10,8 milliards d'euros, en hausse
de 1,5 % en valeur.
Les dépenses restent stables en volume et se caractérisent par une diminution
nette des dépenses d'intervention. Au sein des dépenses du titre III,
l'évolution des crédits de personnel serait maîtrisée au profit des autres
dépenses de fonctionnement. Les crédits de paiement dédiés aux investissements
connaîtraient en 2003 une forte croissance, mais les autorisations de programme
seraient diminuées.
Un élément marquant dans ce projet de budget : en 2003, sera enregistrée une
diminution nette des effectifs de 1 350 unités. Cette diminution, qui
s'applique quasi intégralement aux services financiers, représente environ un
tiers des départs à la retraite des agents de Bercy en 2003 et 0,75 % des
effectifs. J'observe que cette diminution, supérieure aux efforts consentis par
les autres ministères, est en grande partie autorisée par les gains de
productivité réalisés au cours des dernières années.
Reconnaissons-le, monsieur le ministre, la présentation budgétaire des crédits
du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie s'est
considérablement améliorée au cours des dernières années et le périmètre du
ministère, après un ample mouvement de rebudgétisation qu'il convient de
saluer, est aujourd'hui stabilisé. Les chiffres soulignent l'ampleur de ces
rebudgétisations : entre 1999 et 2001, les crédits inscrits au budget du
ministère sont passés de 9,2 milliards à 14,1 milliards d'euros. Il reste peu
d'efforts à accomplir, hormis la réforme de la rémunération des conservateurs
des hypothèques, véritable serpent de mer de l'universalité budgétaire. Ni les
emplois ni les rémunérations, je le remarque, ne sont inscrits au « bleu »
2003.
Toujours en ce qui concerne la présentation de ce budget, je me félicite,
monsieur le ministre, du transfert des dépenses de gros équipement informatique
de la section de fonctionnement, où elles n'avaient rien à faire, à la section
d'investissement, comme je l'avais demandé dans mon rapport spécial en 2001.
Cet effort doit maintenant inspirer les autres ministères : une doctrine
commune en matière d'investissements, en particulier informatiques, doit
s'appliquer.
Je regrette, en revanche, la permanence de l'agrégat 31 « administration
générale et dotations communes », le plus important du « bleu », qui regroupe
des crédits de diverses directions, sans grande cohérence. La mise en oeuvre
progressive de la nouvelle loi organique relative aux lois de finances en
soulignera la nécessaire réforme.
Venons-en à la gestion proprement dite du ministère. Convenons que la réforme
de Bercy doit être au centre de votre action, monsieur le ministre. Vous
bénéficiez tout d'abord des acquis engrangés au cours des dernières années, au
nombre desquels il faut ranger surtout la mise en place d'un interlocuteur
fiscal unique - illustré, par exemple, par le lancement au 1er janvier 2002 de
la direction des grandes entreprises - et une action marquante en faveur des
nouvelles technologies et des téléservices.
Après une année 2002 blanche pour la réforme en raison de la période
électorale, des annonces viennent d'être faites en comité technique paritaire.
La plupart de ces mesures prolongent la « réforme-modernisation » menée
précédemment : approfondissement de l'interlocuteur fiscal unique ;
décentralisation des interventions auprès des entreprises ; réforme, assez
timide néanmoins, du pôle PME ; meilleure répartition territoriale des services
; simplification de certaines procédures.
Deux mesures marquent, en revanche, une rupture d'inspiration avec la
politique menée précédemment.
Tout d'abord, le souhait formulé par le ministre de prendre en compte dans les
rémunérations et la carrière des personnels le mérite individuel suscite un
certain scepticisme quant aux modalités de mise en oeuvre. Ne pensez-vous pas,
monsieur le ministre, qu'après la refonte des primes des agents des ministères
- résultat de trois années de négociation - cette annonce constitue pour les
syndicats un noeud de conflit suffisamment important pour remettre en cause
l'ensemble de la réforme de Bercy, autrement plus ambitieuse dans ses objectifs
?
La seconde rupture, plus inquiétante selon moi, concerne l'abandon brusque de
la retenue à la source pour l'imposition sur le revenu.
La France, faut-il le rappeler, est le seul pays développé à ne pas prélever à
la source l'impôt sur le revenu. Il convient aussi de préciser qu'il s'agissait
d'une promesse électorale de l'actuel Président de la République.
Votre proposition, monsieur le ministre, en lieu et place de cette réforme, de
faire progresser le nombre de contribuables mensualisés et de faire avancer la
déclaration préremplie ne me paraît pas à la hauteur des enjeux liés à une
meilleure acceptation de l'impôt par les Français et à une meilleure gestion du
service public de l'impôt. Certes, pour la retenue à la source, il faut un
identifiant fiscal unique. Mais la déclaration préremplie exige aussi, monsieur
le ministre, cet identifiant fiscal unique.
Vous savez également combien la déclaration préremplie mobilise peu les
contribuables. Dans un récent rapport du Conseil des impôts, les résultats d'un
sondage indiquent que, selon un quart des personnes interrogées, ce projet
n'est « pas du tout intéressant ». Le conseil des impôts analyse cette
situation ainsi : « L'adhésion somme toute mesurée à la déclaration préremplie
peut s'expliquer par le fait que les obligations déclaratives n'entraînent,
pour une forte majorité de contribuables, qu'une charge de travail modérée,
dont la suppression n'entraînerait qu'un avantage relativement marginal. » Le
même sondage nous apprend que deux tiers des personnes interrogées ont déclaré
avoir entendu parler du projet de retenue à la source. Ce résultat me paraît
témoigner d'un degré d'information satisfaisant des contribuables sur les
projets de réforme des modalités pratiques de l'imposition sur le revenu.
Quel est l'avantage de la retenue à la source pour les contribuables ? Il me
semble que le calcul de l'impôt sur les revenus de l'année en cours et non plus
sur ceux de l'année précédente favorise une plus grande lisibilité et une
meilleure compréhension de l'impôt. Ainsi, le Conseil des impôts, qui réitère,
cette année encore, son soutien à la retenue à la source, considère que la
suppression du décalage d'un an entre la perception des revenus et leur
imposition constituerait un premier pas vers un système de retenue à la
source.
Cette formule, déjà utilisée pour la perception de l'impôt sur les sociétés,
impliquerait une régularisation en fin d'année ou au début de l'année
suivante.
Au-delà de la retenue à la source, quels doivent être les objectifs de la
réforme de Bercy ? Il s'agit simplement de réduire le taux d'intervention des
administrations fiscales, c'est-à-dire le rapport entre le coût net du
recouvrement de l'impôt et son rendement net. La France enregistre en la
matière de mauvaises performances, dont la cause est à trouver dans la
pluralité des administrations fiscales et le cloisonnement entre celles-ci,
ainsi que je le répète depuis plusieurs années.
La marge de manoeuvre existe : le nombre de départs à la retraite, qui va
aller croissant jusqu'en 2010, ouvre des possibilités de redéploiement
d'effectifs et de remise à plat des organigrammes. De telles démarches, alliées
à une politique de formation des agents, pourraient constituer les bases d'une
réforme ambitieuse.
La méthode consiste sans doute aussi à généraliser les contrats «
objectifs-moyens », dont seulement deux ont déjà été signés à la direction des
relations économiques extérieures et à la direction générale des impôts.
Monsieur le ministre, vous disposez de cinq années pour mener à bien la
réforme de Bercy. Les contribuables et les personnels des administrations
fiscales souhaitent, tout autant que moi je pense, que vous puissiez, dans la
concertation, vous acquitter de cette tâche.
M. le président.
La parole est à Mme le rapporteur pour avis.
Mme Odette Terrade,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour la consommation et la concurrence.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le ralentissement de la croissance a rendu plus
éclatante encore cette évidence : la consommation est un élément vital de
l'activité économique, et sans doute le plus solide. Seul le maintien de la
consommation des ménages à un niveau élevé a pu éviter à l'économie nationale,
dans une conjoncture qui voit s'affaisser l'investissement, d'échapper à la
récession.
Or ce pilier de la croissance est aujourd'hui ébranlé : le recul de 1,2 % de
la consommation des ménages au mois de septembre est inquiétant. C'est dans ce
contexte préoccupant que notre Haute Assemblée doit examiner les crédits de la
consommation et de la concurrence.
Je ferai quelques remarques sur les crédits.
Les crédits de la consommation et de la concurrence recouvrent un vaste champ
de politiques publiques importantes pour la vie quotidienne de nos concitoyens.
Il s'agit des crédits de la direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ainsi que des
subventions à l'Institut national de la consommation, l'INC, à l'Agence
française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, et aux organismes de
défense des consommateurs.
Le budget de la concurrence et de la consommation pour 2003 s'élève à 196,18
millions d'euros, contre 191,88 millions d'euros en 2002, soit une augmentation
de 2,2 %, comparable à celle de l'an passé. Toutefois, une analyse plus fine de
cette évolution révèle des éléments préoccupants, en particulier en ce qui
concerne les investissements : les crédits de paiement sont en chute de près de
60 % ! De plus, trente emplois sont supprimés à la DGCCRF, alors que les tâches
de cette direction ne cessent de s'alourdir.
On peut comprendre les lourdes contraintes qui pèsent actuellement sur les
finances de l'Etat, mais l'investissement et l'emploi ne peuvent être des
variables d'ajustement de court terme, sous peine de voir s'étioler les
politiques de la consommation et de la concurrence.
Concernant les subventions, les années passées, j'ai souvent attiré
l'attention de la Haute Assemblée sur la situation de l'INC et sur la nécessité
de sortir cet institut d'une longue crise qui a commencé en 1994 et s'était
manifestée par un déficit en 2000.
La réforme de l'INC commence à porter ses fruits. Il ne faudrait pas briser
cet effort en mesurant le soutien de l'Etat à l'institut. Pourtant, l'INC ne
bénéficiera pour 2003 que d'une subvention de fonctionnement de 3,81 millions
d'euros. En 2002, cette subvention avait été abondée d'une contribution
exceptionnelle de 300 000 euros. Le retour à la seule subvention représentera
donc une diminution de 7,3 % du soutien de l'Etat à l'INC, ce qui n'encouragera
pas son rétablissement.
Au-delà des aspects budgétaires, j'aimerais développer deux points : le
nécessaire soutien au mouvement consumériste, d'une part, et les évolutions du
contrôle des concentrations qui se dessinent au niveau communautaire, d'autre
part.
Concernant le soutien au mouvement consumériste, le secrétaire d'Etat à la
consommation, M. Renaud Dutreil, a fait valoir la nécessité pour la France
d'avoir un mouvement consumériste fort. Je me réjouis que nos vues convergent
sur ce point. Cependant, je déplore l'essoufflement du soutien apporté par
l'Etat à ces associations, dont la subvention, stable depuis plusieurs années,
ne représente que les trois quarts de son niveau de 1990, alors même que l'Etat
leur demande d'être de plus en plus présentes dans de multiples instances.
Vous trouverez en annexe de mon rapport, mes chers collègues, la liste
impressionnante, dressée par l'INC, des organismes consultatifs ou délibératifs
dans lesquels les associations de consommateurs sont appelées à siéger, à
quelque échelon que ce soit : national, régional ou départemental.
Est-ce ici que l'Etat doit tenter de faire des économies, qui seront en tout
état de cause marginales ? Au contraire, ce réseau d'associations nombreuses,
animées essentiellement par des bénévoles, peut démultiplier les efforts des
pouvoirs publics pour la protection et l'éducation du consommateur.
Concernant les évolutions du contrôle des concentrations d'entreprises, en
quelques semaines, la Cour de justice des Communautés européennes a annulé
trois interdictions de concentrations prononcées par la Commission européenne.
Or ces interdictions avaient remis en cause l'ensemble de la stratégie des
entreprises concernées ; pensez seulement aux relations actuelles entre
Schneider et Legrand ! Il est donc essentiel que le contrôle de la concurrence
ne se fasse pas au détriment de l'intérêt économique élémentaire des
entreprises concernées. Mais, surtout, la politique de la concurrence ne doit
jamais perdre de vue l'intérêt du consommateur, qui est le fondement de sa
légitimité.
Lors de l'examen de ce budget en commission, j'ai émis des réserves sur le
montant des crédits alloués pour 2003 à la consommation et à la concurrence,
insistant notamment sur l'insuffisance du soutien à l'INC et sur la suppression
de trente emplois à la DGCCRF. C'est ce qui me conduira, à titre personnel, à
voter contre l'adoption de ces crédits.
Cependant, en dépit de mes réserves, la commission des affaires économiques a
émis un avis favorable sur l'adoption des crédits de la consommation et de la
concurrence pour 2003.
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget
des services financiers, qui représente près des trois quarts de celui du
ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, est à 98 %, comme nous
l'indiquait à l'instant M. le rapporteur spécial, un budget de fonctionnement,
et il est avant tout dédié aux services déconcentrés. Autrement dit, c'est le
budget de l'administration fiscale, dans ses directions nationales et dans ses
implantations territoriales, qui intéresse le citoyen contribuable, mais aussi
les représentants des collectivités locales que nous sommes.
C'est un budget sensible, ne nous y trompons pas. Chacun se souvient de la
réforme Sautter retirée en catastrophe. Pourtant nécessaire, elle avait
cristallisé la mobilisation des agents et des élus locaux dans un même refus.
M. Laurent Fabius lança alors les chantiers de la réforme-modernisation visant
à rationaliser les moyens et à créer l'interlocuteur unique pour l'entreprise
tout en préservant le maillage territorial.
Vous-même, monsieur le ministre, au début du mois d'octobre, avez indiqué que
vous souhaitiez poursuivre la modernisation d'une administration qui est l'un
des rouages essentiels du fonctionnement de l'Etat. « Bercy en mouvement »,
avez-vous dit. Mais j'ai du mal à percevoir de la cohérence ou même de la
détermination dans votre politique. Le seul signal sensible, d'affichage
libéral, c'est la suppression de 1 350 emplois.
Vous avez, en quelques phrases, brutalement abandonné l'objectif de la retenue
à la source de l'impôt sur le revenu sans que l'on sache vraiment la raison de
ce choix. Est-ce à cause de l'hostilité des personnels ? Dans ce cas, nous
devons nous en expliquer avec eux.
Il y a tant à faire en matière de lutte contre la fraude, contre le
blanchiment d'argent sale, comme en matière de coopération internationale ou
d'aide aux communes qui, souvent, ne peuvent s'offrir les prestations d'experts
!
Est-ce alors à cause de l'hostilité des entreprises ? Pourtant, dans la
plupart des pays d'Europe, c'est ce système qui est utilisé.
S'agissant du maillage territorial, Laurent Fabius avait donné un coup d'arrêt
à la fermeture des recettes des impôts et des perceptions.
L'accueil au public avait été sensiblement renforcé : horaires élargis,
disponibilité plus grande des personnels. L'appui aux collectivités locales
avait été érigé en objectif prioritaire. Où en êtes-vous aujourd'hui, monsieur
le ministre ?
Si j'en juge par la situation de mon département, que dis-je, de ma commune,
je constate que l'on reprend, et vous en avez la responsabilité, la vieille
politique de fermeture du service public, mais de façon subreptice, à
l'occasion du départ à la retraite d'un agent de catégorie A ou B, ou en
tentant de profiter de l'éventuelle faiblesse d'une municipalité. Là où il
faudrait tenir compte de critères précis, telles l'évolution démographique, la
distance, les conditions géographiques, les facilités d'accès, là où il
faudrait surtout rouvrir une concertation avec les élus, une réflexion
collective pour redessiner la carte des implantations, vos représentants, à la
tête des services déconcentrés, reviennent à leur vieille pratique de la
décision arbitraire prise de loin, dans le secret d'un bureau. Le résultat ne
se fera pas attendre. Ce sera la révolte des maires et des populations menacées
d'être privées d'un service public dont la proximité permet d'accroître le
rendement de l'impôt, en assure l'équité, et qui a aussi pour fonction, on
oublie de le dire, l'intégration des citoyens à la communauté nationale par la
contribution fiscale.
Monsieur le ministre, nous avons besoin d'éclaircissements sur vos intentions
et surtout de directives précises avant que, de nouveau, le terrain ne
s'enflamme.
En conclusion, j'évoquerai le sort de la Banque de France et de ses personnels
qui, très légitimement, s'inquiètent.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ils ont raison !
M. Gérard Delfau.
A présent que l'euro est devenu la monnaie unique de l'Union européenne et que
la Banque centrale européenne a assuré son emprise sur les institutions
financières des pays membres, comment voyez-vous, monsieur le ministre,
l'avenir de la Banque de France ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très mal !
M. Gérard Delfau.
Quelle est votre position sur la fabrication et sur le recyclage des billets ?
Comment lui permettre de poursuivre sa mission de collecte des résultats sur le
tissu économique, et comment lui donner les moyens d'être un appui auprès des
petites et moyennes entreprises qui ne peuvent pas s'offrir les prestations
d'un expert ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Très bien !
M. Gérard Delfau.
Enfin, comment lui permettre d'assurer intégralement l'ingrate et nécessaire
mission dévolue aux commissions de désendettement ? Monsieur le ministre, nous
avons besoin que vous nous éclairiez sur ce sujet parce que les personnels et
les élus directement concernés s'inquiètent de l'évolution actuelle.
Telles sont, monsieur le ministre, les quelques questions que je souhaitais
vous poser sur le budget des services financiers qui nous semble manquer de
perspectives et nous rappelle de fâcheux précédents.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans le
débat que nous menons depuis une bonne dizaine de jours sur le budget de la
nation, la discussion des crédits des services financiers est, finalement,
relativement exemplaire.
Nous ne reviendrons pas sur l'utilité de ces services, qu'il s'agisse de
l'instruction des dossiers des contribuables, du recouvrement des produits
fiscaux, mais aussi de l'indispensable apport des directions du ministère dans
la connaissance des grands équilibres sociaux et économiques et la perception
de leurs évolutions.
Le réseau dense des administrations financières et leur irrigation de
l'ensemble du territoire national nous permet de connaître de manière précise
les réalités économiques auxquelles nous sommes confrontés, et de disposer
également d'outils de prévision sur le moyen et sur le long terme quant à
l'évolution de la croissance ou des facteurs de production.
Ce n'est pas pour rien que le Conseil des impôts vient de consacrer son
dernier rapport aux relations entre les citoyens et l'administration fiscale.
Ce rapport, s'il fait état de certains blocages, met également en évidence le
fait que les relations existent et que nos administrations financières sont
proches du terrain et du public.
Le maintien de l'essaimage du réseau de ces administrations est donc essentiel
pour les années à venir, comme est essentiel le renforcement de leurs missions
de service public, pour mettre à disposition l'information économique dont,
nous, législateurs, avons en particulier besoin pour décider en toute
conscience des choix budgétaires les plus pertinents.
Ce projet de budget pour 2003 permet-il d'atteindre ces objectifs ?
Arguant une fois de plus des gains de productivité réalisés par les
administrations financières, le Gouvernement procèdera, en 2003, à une
réduction sensible des effectifs des différentes directions du ministère des
finances, touchant tant la DGI que la comptabilité publique ou encore la
DGCCRF.
Cette politique de réduction des effectifs n'est pas nouvelle : cela fait, au
bas mot, quinze ans que, budget après budget, l'on réduit ainsi la « voilure »
de nos administrations fiscales.
On peut toujours nous rétorquer que la suppression de nombre de taxes et
impôts de faible rendement ou que le recours à la télédéclaration et au
télépaiement sont autant de vecteurs d'économies et de simplication des
missions de service public.
En fait, au motif que les outils technologiques seraient de plus en plus
performants, on pourrait sans trop de douleur procéder à ces suppressions de
postes qui seraient sans effets sur les missions de service public.
On peut également constater que la loi de finances rectificative va encore
plus loin dans ce sens en visant à confier de plus en plus de missions de
recouvrement aux centres des impôts, au détriment, si l'on peut dire, de la
direction de la comptabilité publique, ce qui nous conduit à nous
interroger.
Jusqu'où ira-t-on dans le sens de la réduction des effectifs, notamment dans
les années à venir, qui seront marquées par le départ en retraite de plus de 40
% des agents actuellement en poste ?
Que cherche-t-on à promouvoir ? Une direction générale des impôts devenue, à
effectifs réduits, une forme de guichet unique pour l'assiette et le
recouvrement des impôts tandis qu'une direction de la comptabilité publique
pour le moins rabougrie serait recentrée sur quelques missions en direction des
collectivités locales ?
Toujours est-il que l'impression que nous laisse ce projet de budget est celle
d'un lieu d'expérimentation de la gestion des effectifs de la fonction publique
telle que certains la rêvent : non-remplacement des départs en retraite,
renforcement de la productivité apparente et autosatisfaction largement
répandue en termes de « résultats » associés aux objectifs et aux moyens
confiés.
Je ne suis pas certaine que les agents de nos administrations financières
goûtent tout à fait cette évolution, qui fait d'ailleurs bon poids de la
réalité des missions de service public qu'ils sont censés assumer et assument,
d'ailleurs, de manière générale, avec un professionnalisme reconnu, d'autant
que la question de la fraude fiscale, malgré la publication régulière des
résultats des activités de contrôle, demeure toujours posée, dans des termes
d'ailleurs renouvelés, compte tenu, vous le savez bien, de la sophistication
croissante des outils de fraude et de dissimulation d'opérations, de revenus,
de produits ou de patrimoine.
Plutôt donc que de réduire les effectifs budgétaires, le ministère des
finances devrait mettre en oeuvre des programmes plus ambitieux de formation de
ses fonctionnaires et de renforcement des équipes intervenant sur ces dossiers
délicats.
Telles sont les raisons, rapidement évoquées, pour lesquelles nous rejetterons
sans hésitation les crédits des services financiers pour 2003.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, soucieux de poursuivre la
modernisation de la discussion budgétaire à laquelle j'ai tant attaché
d'importance dans mes précédentes fonctions, je m'efforcerai de prolonger les
propos du rapporteur spécial et du rapporteur pour avis, dont je veux saluer la
qualité de travail, en évitant toute redondance, m'appliquant à répondre à
leurs questions, chacun étant supposé, si je me souviens bien de la règle du
jeu, avoir lu les rapports et entendu les rapporteurs.
Dans son rapport spécial, M. Angels a beaucoup insisté sur la retenue à la
source. Il a été décidé qu'elle ne serait pas mise en oeuvre pendant la
législature, sans que l'on puisse d'ailleurs préjuger l'avenir.
Vous parlez, monsieur Angels, d'une réforme cruciale, dont vous regrettez
l'abandon. Le Conseil des impôts en rappelle le principal intérêt dans son
dernier rapport, à savoir prendre comme assiette le revenu de l'année courante
et non celui de l'année précédente, ce décalage d'un an étant l'inconvénient
majeur du système actuel.
Mais le Conseil des impôts a lui-même précisé qu'il s'agissait d'une modalité
technique parmi d'autres pour atteindre cet objectif. Il rappelle que la
retenue à la source ne suscite qu'un intérêt mitigé de la part des
contribuables et qu'elle recueille l'opposition des entreprises et des
banques.
Dans la plupart des pays européens comparables, l'introduction de la retenue à
la source est très ancienne - elle date de 1920 pour l'Allemagne et de 1944
pour la Grande-Bretagne - et s'est souvent accompagnée d'une importante
simplification du système fiscal. On ne peut pas dire que ce soit le propre du
nôtre. Elle demeure d'une gestion complexe et ne dispense pas les contribuables
de la déclaration, ce que vous avez bien voulu reconnaître.
Donc, la retenue à la source, en tout cas à ce stade, ne permet pas une
simplification de l'impôt sur le revenu. Elle ne dispense pas les salariés de
la déclaration. Pour les non-salariés, en l'état actuel des choses, elle est
inapplicable. S'agissant des entreprises, en particulier les petites et
moyennes entreprises, ce transfert de charges leur paraît lourd, et elles
protestent déjà.
La retenue à la source ne se traduit pas non plus par une économie d'emplois à
Bercy. Le non-remplacement des départs à la retraite, ce qui a d'ailleurs été
regretté dans d'autres interventions, à un niveau significatif dans les
prochaines années, ainsi que la mise en place, en 2005, de la déclaration
préremplie et la généralisation de la mensualisation et des prélèvements à
échéance représenteront une économie d'environ 2 000 emplois.
En tout état de cause, la retenue à la source n'est pas techniquement
réalisable aujourd'hui, pour la raison que vous avez vous-même indiquée,
c'est-à-dire l'absence d'identifiant fiscal sécurisé, qui ne peut être le
numéro INSEE. Il nous faut donc recourir à un identifiant fiscal spécifique, ce
qui demande encore deux années de travaux de certification.
Notre objectif est de disposer en 2004 de cet identifiant fiscal et de mettre
en place en 2005 la déclaration préremplie, couplée à la généralisation de la
mensualisation et du prélèvement à échéance, dont le Conseil des impôts
recommande lui-même de faire le mode de paiement de droit commun.
Nous souhaitons également traiter le problème du décalage entre la perception
des revenus et l'imposition. L'amélioration de la performance du système de
mensualisation devrait permettre, dans un premier temps, de traiter certaines
situations de baisse de revenus d'une année sur l'autre. Un examen attentif de
la faisabilité du passage à l'imposition des revenus courants sera d'ailleurs
prescrit dans le cadre du système actuel de recouvrement de l'impôt.
En tout état de cause, avant la fin de la législature - horizon que nous nous
sommes fixé -, il n'était pas réaliste d'envisager la mise en oeuvre de la
retenue à la source. En revanche, vous pouvez compter sur le Gouvernement, dans
le cadre de la déclaration préremplie et de la mensualisation, pour atteindre
les objectifs que vous visez. Je sais que ce sujet vous tient à coeur, et je
reste à votre disposition pour soutenir votre réflexion.
Vous avez bien voulu évoquer la réforme du ministère, que nous avons dénommée
« Bercy en mouvement ». Il s'agit en effet d'aller plus loin que la «
réforme-modernisation » qui l'a précédée et dont ce projet reprend plusieurs
volets, ainsi que vous l'avez fort justement relevé dans votre rapport. Je ne
suis pas de ceux qui considèrent que rien n'a été fait avant et il ne s'agit
pas de passer sous silence les projets qui ont été lancés par les précédents
gouvernements.
Néanmoins, la « mission 2003 », sur laquelle vous aviez d'ailleurs formulé
vous-même quelques mises en garde, a connu l'échec. La démarche de
modernisation s'était, me semble-t-il, bornée sur bien des points à des
expérimentations.
Aussi était-il temps de prendre plus nettement position, de s'interroger, sans
a priori,
sur l'adaptation des structures et, plus généralement, de
faire entrer le ministère dans une démarche de recherche constante d'efficacité
et de performance.
Comme celle de tout gouvernement, notre volonté est d'améliorer le service
rendu aux contribuables, qu'il s'agisse des particuliers ou des entreprises.
Plusieurs mesures sont prises à cet effet : la mise en place de l'«
interlocuteur unique », dont vous avez parlé ; le transfert du recouvrement de
l'impôt sur les sociétés et de la taxe sur les salaires à la DGI ; la décision
d'accroître de moitié, d'ici à 2005, le nombre d'entreprises qui relèvent de la
direction des grandes entreprises.
Je voudrais insister sur l'ambition que nous nourrissons de passer d'une
culture de procédure au sein du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie à une culture de résultat. Cela peut se faire en mettant à plat des
procédures qui sont critiquées pour leur lourdeur, afin de répondre au mieux
aux attentes des usagers et, d'ailleurs, aux attentes des agents eux-mêmes.
Pour reprendre votre expression, monsieur Angels, l'objectif de diminution des
coûts n'a pas été abandonné en chemin. Bercy est engagé dans une démarche qui
débouchera sur des économies. A titre d'illustration, en administration
centrale, l'élimination des doublons éventuels, la rationalisation des
fonctions de support, une maîtrise des actions immobilières et de la politique
d'achats nous portent à croire que des économies seront obtenues.
S'agissant des agents du ministère, vous vous êtes préoccupé de la
rémunération « au mérite ». Nous sommes parfaitement conscients qu'il n'est pas
possible d'envisager une telle réforme sans le faire avec les agents du
ministère qui ont droit, en effet, à une juste reconnaissance professionnelle.
La réforme passe par des mesures générales, comme les plans de promotion, mais
aussi par la prise en compte de leurs performances individuelles selon des
modalités qui devront être naturellement définies avec eux, et faire l'objet
d'une concertation très approfondie. A titre personnel, un système de
rémunération indifférenciée ne me paraît ni juste ni motivant pour les
agents.
Madame Terrade, s'agissant du financement de l'INC, la subvention est
reconduite au même niveau qu'en 2002, soit 3,81 millions d'euros. Cette
stabilisation des crédits suppose un renforcement dans la rigueur de la gestion
de l'INC, notamment en ce qui concerne les coûts liés aux ventes de sa revue «
60 millions de consommateurs ».
S'agissant des personnels, est inscrite au projet de loi de finances la
suppression de trente emplois, ce qui représente 0,8 % des effectifs
budgétaires. Cet effort nous semble surmontable. Il traduit la nécessité d'une
meilleure offre de services, plus rationnelle et plus efficace. La suppression
des antennes infradépartementales qui a été annoncée par M. Francis Mer
traduit cette nécessité. Des services trop éclatés, trop petits ne sont pas en
mesure, selon nous, d'apporter un service optimal aux consommateurs et aux
entreprises.
M. Gérard Delfau puis Mme Marie-Claude Beaudeau ont attiré notre attention sur
la réduction des effectifs. je veux leur dire que l'adaptation des métiers et
des techniques, les réformes d'organisation interne, ainsi que les
simplifications administratives permettent de ne pas remplacer systématiquement
toutes les personnes qui partent à la retraite.
Le niveau de la productivité des services est assez homogène et les réductions
d'effectifs sont réparties de façon proportionnelle entre les grandes
directions à deux exceptions près : les douanes, où les équipes de surveillance
n'étant pas affectées dès lors qu'elles participent à la mission prioritaire de
sécurité et, d'autre part, l'administration centrale, où, à l'inverse, l'effort
de rationalisation doit être plus rapide.
Mme Marie-Claude Beaudeau s'est préoccupée des relations entre les
contribuables et l'administration fiscale. Je voudrais lui dire que des actions
ont été inscrites dans le programme que nous avons appelé « Pour vous faciliter
l'impôt ». En particulier, une série d'engagements de qualité à l'égard du
contribuable, établis d'ici à mai 2003 pour une mise en oeuvre en 2004, seront
pris en termes d'accueil physique, d'accueil téléphonique, de réponses par
courrier. Précis, mesurables, applicables à tous les services sur l'ensemble du
territoire, ces engagements couvriront les domaines dans lesquels le
contribuable est au contact de nos administrations.
Telles sont, monsieur le président, les principales questions qui ont été
évoquées par l'ensemble des intervenants. J'espère ne pas avoir abusé de mon
temps de parole, et avoir également, parce que tel était l'objet de ma
préoccupation, répondu à leurs questions.
(Applaudissements sur les travées
de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'économie, les finances et
l'industrie seront mis aux voix aujourd'hui même à la fin de l'examen des
crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 23 186 385 euros. »
La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau.
Monsieur le ministre, sans doute pour des raisons de temps, vous n'avez pas
répondu à ma question portant sur l'évolution de l'implantation territoriale
des services de l'administration fiscale.
Votre expérience et votre autorité en la matière, d'abord en tant qu'élu local
et sénateur et maintenant en tant que ministre, font qu'à l'occasion de ce
débat nous ne pouvons pas ne pas avoir un échange sur ce sujet. Comme je vous
l'ai dit en aparté, j'ai appris, par des procédures tout à fait inhabituelles,
qu'il avait été décidé de fermer un certain nombre de perceptions, y compris
dans des communes importantes, dont l'une au moins, que je connais bien, a 4
000 habitants et est aujourd'hui en forte croissance démographique.
Je ne vous interroge pas sur ce cas précis, monsieur le ministre, ce que je
voudrais, c'est que vous me disiez quelle est la philosophie de votre
politique, quelles sont les directives que vous donnez à vos services.
Comment voyez-vous le dialogue avec les élus locaux ? Dans le passé, il y a eu
des moments de tension. Mais avec vous, qui êtes un homme de dialogue et
d'expérience, je souhaiterais que la discusion s'engage désormais sur des bases
équitables fondées sur la compréhension mutuelle avec pour objectif commun le
maintien, voire le développement du service public territorial de
l'administration fiscale et sa modernisation.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur Gérard Delfau, c'est effectivement par manque
de temps que je n'ai pas apporté une réponse précise à votre question.
Les services rendus à nos concitoyens soit par les services des impôts, soit
par les services de la comptabilité publique sont, d'une part, l'accueil des
contribuables et, d'autre part, le traitement des informations concernant les
contribuables.
Vous avez raison d'insister sur la nécessité pour nos services d'être très
proches de nos compatriotes et de leur rendre les services qu'ils sont en droit
d'attendre. Mais l'administration fiscale se doit aussi de traiter
l'information, ce qui peut se faire à des kilomètres sans incidence sur nos
concitoyens.
L'objectif de notre ministère est, d'une part, de rester au plus près de nos
compatriotes pour les services que nous devons leur rendre et, d'autre part, de
bénéficer de l'ensemble des ressources des nouvelles technologies pour traiter,
parfois à distance, les informations qui concourent à l'exercice de nos
activités. Notre objectif est de concilier présence au plus près sur le terrain
et meilleure organisation, en tout cas optimisation du service rendu par nos
personnels.
Je ne crois pas qu'il faille vous inquiéter par avance d'un cas particulier,
plus sensible à vos yeux. Cela dit, je suis prêt à entendre vos préoccupations
à l'occasion d'une rencontre à Bercy.
M. Gérard Delfau.
Merci, monsieur le ministre.
M. le président.
L'amendement n° II-38, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la
commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre III de 1 000 000 euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes
chers collègues, l'amendement que j'ai l'honneur de présenter et que j'ai
déposé avec mon collègue le rapporteur général, Philippe Marini, tire les
conséquences des dispositions que nous avons examinées en première partie du
projet de loi de finances.
Marquant votre volonté de sincérité, monsieur le ministre, vous avez souhaité
indiquer au Sénat que les prévisions de recettes sur lesquelles était fondée la
loi de finances pour 2003 devaient être révisées à la baisse ; la moins-value
étant de l'ordre de 700 millions d'euros. Pour respecter l'équilibre que nous
avons voté, il convient donc de réviser à la baisse les crédits budgétaires.
Depuis jeudi matin, le rapporteur général, les rapporteurs spéciaux et
moi-même essayons de convaincre les ministres et le Sénat de l'opportunité de
réduire quelques lignes de crédits.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Ils sont réticents !
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Ce matin, j'ai conscience que M.
le ministre du budget et de la réforme budgétaire, mon prédécesseur en tant que
président de la commission des finances, se souvient de la difficulté de cet
exercice, mais aussi de sa nécessité. Je pense donc que nous allons pouvoir
nous comprendre.
Monsieur le ministre, nous souhaitons que votre ministère participe, lui
aussi, à cet effort de compression des crédits. On ne peut pas annoncer - et
c'est un geste sans précédent de la part d'un gouvernement - que les hypothèses
de recettes sont révisées à la baisse sans en tirer les conséquences sur les
dépenses.
Examinant votre budget, nous avons pensé que deux chapitres pouvaient faire
l'objet de réductions. S'agissant de l'administration centrale, nous avons
estimé que le chapitre 34-98, article 12, pouvait être réduit de 500 000 euros.
La progression prévue était de l'ordre de 12 % ; il nous semble qu'un effort de
500 000 euros peut être consenti. Pour la direction de la communication, dont
les crédits devaient progresser de 13 %, nous vous demandons également une
réduction de 500 000 euros.
Au total, la contribution que nous vous demandons de consentir représente
moins de 0,01 % de l'ensemble des crédits du titre III.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président de la commission des finances,
j'ai deux raisons d'accueillir votre amendement avec intérêt et aussi, je le
dis sans ambages, favorablement.
La première raison, c'est que je suis de ceux qui pensent que, comme un
ménage, lorsque l'Etat connaît des déconvenues en matière de ressources, il
doit faire le maximum pour optimiser ses dépenses et faire des économies, tout
en maintenant le plus haut niveau de service possible à ses compatriotes. Ce
serait faire injure à tous ceux qui servent l'Etat que de les croire incapables
d'effectuer des gains de productivité, mais aussi des économies, au motif qu'il
faut épargner nos compatriotes qui, eux aussi, subissent des difficultés liées
au ralentissement de l'économie.
La deuxième raison est que c'est le Parlement qui donne l'autorisation. Tout
au long du mois de juillet, je me suis épuisé à l'expliquer à mes collègues qui
pensent que c'est le ministre du budget qui la donne.
Pour ma part, je me présente respectueusement devant le Parlement pour lui
dire que, puisqu'il a placé sa confiance dans le ministère des finances pour
réaliser des économies, il ne sera pas déçu : nous les ferons.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l'amendement n° II-38.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-38.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le groupe CRC vote contre.
M. Roland Courteau.
Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
L'amendement II-39, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la
commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre III de 3 500 000 euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Cet amendement s'inscrit dans la
même logique que celle qui nous avait amenés à souhaiter une réduction des
crédits de l'administration centrale et de la communication au titre III.
Il s'agit maintenant des fonds mis à la disposition du budget annexe des
Monnaies et médailles. Il s'agit incontestablement d'un établissement de
qualité : il a à son actif des réussites indéniables, notamment la frappe des
pièces d'euros. Nous pensons néanmoins qu'il a lui aussi des obligations de
progression en termes de compétitivité. Aussi est-ce un appel à la
modernisation qui lui est lancé.
Sur les 30 millions d'euros de subventions qui apparaissent dans le projet de
loi de finances, nous souhaitons réduire ses crédits de 3 500 000 euros.
Monsieur le ministre, j'ai entendu la réponse que vous venez d'apporter. En
effet, les droits du Parlement doivent être soulignés : pour tout ministre,
quel qu'il soit, la discussion ne s'arrête pas aux arbitrages estivaux de
Matignon, l'examen du projet de loi de finances par le Parlement est un moment
extrêmement exigeant et un arbitrage intervient aussi devant le Parlement,
surtout lorsque les prévisions de recettes font l'objet d'une correction.
Tel est l'objet de cet amendement de la commission des finances.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert
ministre délégué.
C'est simplement parce qu'il s'agit d'une subvention
que l'amendement n° II-39 de la commission des finances vient en discussion en
cet instant, mais je répondrai tout à l'heure à votre question, madame
Beaudeau. Ce n'est pas un oubli de ma part, cela s'inscrit dans une logique de
déroulement de la discussion.
S'agissant de l'amendement n° II-39, je ne reviens pas sur ce que j'ai dit à
l'occasion de l'amendement n° II-38.
Cela dit, je tiens à rendre hommage au directeur des Monnaies et médailles, M.
Dov Zerah. Il a entendu l'appel que vous avez lancé avec cet amendement. Je
considère en effet que son service peut apporter sa contribution à l'effort que
vous souhaitez voir accomplir par tous les ministères, sans exception, pour
aider à contenir les déficits publics. C'est ce qui m'autorise aujourd'hui à
émettre un avis favorable sur l'amendement n° II-39.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, contre l'amendement.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Nous dirons tout à l'heure, lors de la discussion du budget annexe des
Monnaies et médailles, ce que nous avons à dire sur le fonctionnement de cette
direction. Mais j'indique d'ores et déjà que la subvention de 30 millions
d'euros qui est proposée pour 2003 est, à notre avis, notablement insuffisante
pour faire face à la crise que traversent les Monnaies et médailles.
Si je me souviens bien, les prévisions de dépenses ont été divisées par deux
par rapport à 2002.
Les achats diminuent de 76,5 %. Pour l'établissement monétaire de Pessac, les
achats baissent de 89 %. Par ailleurs, les recettes qui sont divisées par trois
atteignent 66 millions d'euros.
Monsieur le président de la commission des finances, la situation est déjà
inquiétante et vous l'aggravez encore en proposant une réduction des crédits
destinés à la subvention du budget annexe des Monnaies et médailles en raison
de l'équilibre voté par le Sénat.
Avec cette réduction de 1,5 million d'euros en charges et autant en
traitements externes, de 0,2 million d'euros de primes et indemnités et de 0,3
million d'euros pour les prestations et cotisations sociales, certains vont
finir par penser que, si la commission des finances voulait saboter la
politique du Gouvernement, elle ne s'y prendrait pas de meilleure façon !
Pour notre part, nous ne souhaitons pas aggraver la situation des Monnaies et
médailles. Mais vous, avec cet amendement, justifié par un plan de
réorganisation, trop timide certes, de l'établissement, vous allez ruiner
l'espoir des organisations syndicales qui croient en une possibilité de
renouveau des Monnaies et médailles.
C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas l'amendement de suppression
des crédits.
M. le président.
La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau.
Je voudrais demander à M. le ministre s'il peut nous dire, sur ce sujet
précis, qui est moins vaste que le précédent, quelle est la politique du
Gouvernement.
En effet l'explication donnée pour la diminution de la subvention concernant
l'établissement des Monnaies et médailles est d'ordre général. Mais que veut le
Gouvernement pour ce secteur important du ministère de l'économie et des
finances ? Tel est le fond du problème et, sur ce point précis, la Haute
Assemblée n'est pas encore éclairée.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Je voudrais brièvement répondre, en
particulier, aux préoccupations exprimées par Mme Beaudeau.
L'administration des Monnaies et médailles fait l'objet d'un budget annexe. Il
s'agit, en réalité, d'une gestion proche de ce que serait une gestion à
caractère industriel et commercial et la responsabilité de cette administration
et de son directeur est une responsabilité globale.
Lorsqu'on examine les perspectives d'activité sur 2003, on peut penser que,
selon le contexte économique, selon les programmes de fabrication, en
particulier pour des Etats étrangers, des facteurs de souplesse permettront de
piloter cet établissement.
Notre conviction est que la réduction de crédits de 3,5 millions d'euros est
tout à fait tenable à l'intérieur de cette gestion globale. C'est sans doute en
fonction de cela, et après avoir examiné l'ensemble des données de sa gestion,
que le directeur des Monnaies et médailles a fait connaître à M. le ministre
l'avis que ce dernier a bien voulu formuler.
Les craintes qui ont été exprimées sont donc, à ce stade, excessives, et
l'amendement de la commission est, en revanche, tout à fait raisonnable.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Nous examinerons tout à l'heure
le budget annexe des Monnaies et médailles. Il me paraît donc difficile d'en
entamer la discussion.
L'amendement n° II-39 est appelé maintenant parce qu'il porte sur une
réduction des crédits du titre III des services financiers. Si nous avons pris
cette initiative avec le rapporteur général, c'est parce que nous avons
conscience que les Monnaies et médailles représentent un trésor de
professionnalisme et que le contexte difficile auquel est confronté ce grand
établissement nécessite un surcroît de compétitivité. L'économie que nous
proposons est donc, en quelque sorte, une mesure d'encouragement à la
compétitivité.
Cet établissement, comme tous les autres, doit se remettre en cause et
rechercher des gains de productivité avant de faire appel à la générosité du
budget.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Pour éviter toute frustration, je veux indiquer par
avance qu'il n'y a aucun risque. Si l'amendement était adopté et que l'examen
du budget annexe des Monnaies et médailles aboutissait à une décision inverse,
il y aurait coordination. Ne vous inquiétez donc pas, l'amendement ne peut, en
toute logique, venir en discussion que maintenant, mais le débat aura lieu et
je m'engage à y répondre tout à l'heure.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-39.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
Titre IV : 315 347 872 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 410 384 000 euros ;
Crédits de paiement : 175 967 000 euros. »
L'amendement n° II-37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Majorer les autorisations de programme du titre V de 15 000 000 euros. »
La parole est à M. le ministre.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
L'application Accord, qui commence à être bien connue
et qui fonctionne sur la base d'un progiciel de gestion intégrée, permet
d'exécuter et de suivre la dépense publique, et constitue un outil commun aux
différents acteurs de la dépense.
A l'heure actuelle, huit ministères sont déjà raccordés, dont le ministère de
l'intérieur, qui a joué un rôle pilote dans la mise en place de cette nouvelle
application, laquelle a ouvert de réelles possibilités de simplification des
procédures et d'amélioration de la dépense publique.
Dans une semaine, huit nouveaux ministères seront raccordés, dont le ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie. Ils traiteront avec la nouvelle
application les premières opérations de la gestion 2003. La décision de ces
huit nouveaux raccordements a été confirmée le 14 novembre dernier, après un
audit qui a été mené par un cabinet extérieur, qui a souligné la conformité de
l'application Accord aux besoins fonctionnels de l'administration et qui a
validé les orientations du pilotage du projet défini par le service à
compétence nationale Accord.
Il convient maintenant de prévoir, dans le cadre du raccordement en 2004 des
trois derniers ministères, à savoir ceux de la défense, des affaires étrangères
et de l'agriculture, des expérimentations dans la perspective de l'application
de la loi organique et de l'extension du projet Accord aux services
déconcentrés de l'Etat.
A cet effet, monsieur le président, l'ouverture d'un montant de 15 millions
d'euros en autorisations de programme est demandée sur le chapitre 57-92 du
budget de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial.
Monsieur le président, je suis bien gêné pour donner
un avis ; je m'exprimerai donc à titre personnel, car cet amendement du
Gouvernement n'a pas été examiné par la commission.
La majoration de crédits en faveur du système informatisé de gestion de la
dépense permettant la mise en oeuvre de la nouvelle loi organique relative aux
lois de finances et une meilleure coordination de la gestion des crédits entre
le ministère des finances et les autres ministères ne peut, bien entendu, que
recueillir mon assentiment personnel et, je le pense, celui de la commission
des finances en général, car il s'agit d'une mesure que je réclamais dans mon
rapport.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
M. Angels exprime un sentiment
personnel que chacun partage.
Monsieur le ministre, si nous voulons que vive la loi organique à laquelle
vous avez tant apporté et que l'exécutif comme le Parlement fassent preuve de
transparence, de sincérité, et disposent des instruments de bonne gestion de
réforme de l'Etat, il faut réformer le système d'informations comptables,
budgétaires, financières.
Pour que vous en ayez les moyens, monsieur le ministre, nous sommes conscients
que le programme Accord est un élément essentiel dans ce dispositif. Il ne
saurait être question de vous priver des moyens dont nous avons besoin, vous
comme nous, pour faire vivre cette réforme fondamentale.
Les contraintes budgétaires étant vives pour l'élaboration de ce projet de loi
de finances, il serait bon, monsieur le ministre, que vous gagiez la demande de
crédits...
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est même indispensable !
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
... par la réalisation
d'économies dans d'autres secteurs de votre ministère.
M. Paul Loridant.
C'est un juste retour des choses !
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Telles est la nuance que je
voulais apporter à l'observation enthousiaste de M. le rapporteur spécial, qui
n'est pas allé jusqu'au bout, à mon avis, en exprimant le sentiment de la
commission des finances.
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial.
Je parlais à titre personnel !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Monsieur le président de la commission des finances,
nous allons examiner la possibilité de gager ces autorisations de programme sur
l'ensemble de celles du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, afin de proposer à la Haute Assemblée un tel gage lors de la
seconde délibération.
A la vérité, si nous n'avons pas prévu spontanément de gager ces crédits,
c'est tout simplement parce que l'ouverture d'autorisations de programme ne
pèse pas sur l'équilibre budgétaire. Néanmoins, le souci exprimé par la
commission des finances me conduisant à considérer que cet effort est justifié,
nous veillerons donc à vous donner satisfaction.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-37.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 730 741 000 euros ;
« Crédits de paiement : 537 978 000 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 66 et 67, qui sont rattachés pour leur
examen aux crédits affectés aux services financiers.
Article 66
M. le président.
« Art. 66. - L'article L. 412-1 du code des assurances est ainsi rédigé :
«
Art. L. 412-1
. - I. - Les frais de toute nature résultant du
fonctionnement de l'Ecole nationale d'assurances sont couverts au moyen de
versements directs ou indirects, émanant des entreprises d'assurance, de leurs
organismes professionnels ainsi que des fédérations et syndicats nationaux
groupant les entreprises, les agents et les courtiers d'assurances. Le
Conservatoire national des arts et métiers reçoit ces versements pour le compte
de l'Ecole nationale d'assurances.
« II. - Ces versements viennent en déduction de ceux qui sont dus au titre de
la taxe d'apprentissage ou de la taxe de formation continue, en proportion des
parts respectives de la formation initiale, de la formation continue et de
l'apprentissage dans les activités de l'Ecole nationale d'assurances que
financent ces versements.
« III. - Le présent article entrera en vigueur à compter de la promulgation
d'un arrêté ministériel relatif à l'extension d'un avenant à la Convention
collective nationale des sociétés d'assurance portant financement de l'Ecole
nationale d'assurances, et, à défaut d'un tel avenant, à compter du 1er janvier
2004. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° II-11 est présenté par M. de Rohan et les membres du groupe du
Rassemblement pour la République.
L'amendement n° II-24 est présenté par M. Fischer et les membres du groupe
communiste républicain et citoyen.
Ces amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour défendre l'amendement n°
II-24.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Les dispositions de l'article 66 du présent projet de loi prévoient la
suppression d'une contribution fiscale acquittée par les sociétés d'assurance
pour assurer le fonctionnement de l'Ecole nationale d'assurances, l'ENAss, et
son remplacement par le principe d'une affectation de la taxe sur la formation
professionnelle continue et de la taxe d'apprentissage.
En clair, nous passerions d'une obligation fiscale originale à une forme de
banalisation du financement de l'Ecole, alors même qu'il est probable que
l'imputation sur les taxes finançant la formation professionnelle risque fort
de ne pas suffire à retrouver autant de moyens pour le financement de
l'établissement.
Dans ce contexte, les organisations syndicales de la profession nous ont fait
part de leur inquiétude quant au devenir de l'ENAss, établissement qui a permis
de former nombre de salariés du secteur depuis plus de cinquante ans.
On peut d'ailleurs se demander ce qui motive, aujourd'hui, la discussion sur
cet article 66, à moins qu'il ne s'agisse des mêmes orientations que celles qui
ont conduit le Sénat à débattre d'une proposition de loi relative à la
responsabilité civile médicale ou, lors de l'examen de la première partie du
projet de loi de finances, de l'exonération des contrats complémentaires santé
vendus par les compagnies d'assurances.
Dans les faits, tout laisse penser que l'ENAss va progressivement manquer des
moyens financiers nécessaires à l'accomplissement de ses missions de formation
initiale.
Vous comprendrez donc aisément, monsieur le ministre, que nous ne puissions
que proposer à notre assemblée de supprimer cet article 66.
M. le président.
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l'amendement n° II-11.
M. Roger Karoutchi.
Si cet amendement est identique à celui de Mme Beaudeau, notre argumentation
ne porte pas exactement sur les mêmes éléments.
L'ENAss, qui est une vieille école, assure la formation en matière d'assurance
depuis 1946 ; elle est reconnue, et dépend aujourd'hui du Conservatoire
national des arts et métiers, le CNAM.
Le financement de cette école est un peu compliqué. Il est en réalité calculé
par le Trésor public, puisque la fameuse taxe modulaire représente aujourd'hui
80 % de ses ressources.
Cet article 66 a suscité, à l'Assemblée nationale, un vrai débat sur le fait
de savoir s'il y avait eu concertation ou non, et accord ou non de la
profession. Visiblement, le Conseil national des assurances comme la direction
de l'Ecole ne sont pas d'accord sur un certain nombre d'éléments prévus.
Certes, il peut toujours être avancé que, bien entendu, l'appartenance de
l'ENAss à l'enseignement supérieur public n'est pas remise en cause, encore
que, dans la mesure où cet article 66 ne prévoit pas un financement public
pérenne, on peut s'inquiéter de son devenir.
La question, monsieur le ministre, est la suivante : dans le débat à
l'Assemblée nationale, vous avez accepté l'idée de reporter, si je puis dire,
la réforme au 1er janvier 2004 jusqu'à ce que soit trouvé un accord. En
réalité, la concertation n'a pas avancé et nous ne sommes absolument pas
certains de parvenir à un accord avant le 1er janvier 2004.
Dans ces conditions, ne vaudrait-il pas mieux supprimer l'article 66 du projet
de loi de finances ; ne pas remettre en cause dans l'immédiat le statut de
l'Ecole et ouvrir, avec l'Ecole, le Conseil national des assurances et la
Fédération française des sociétés d'assurances, la FFSA, des négociations au
terme desquelles, une fois un accord acté entre l'ensemble des partenaires, la
réforme de l'école serait menée à bien ?
En clair, nous ne disons pas « non » d'office à une réforme de cette école, au
contraire,...
M. Paul Loridant.
Il y a eu un manque de dialogue !
M. Roger Karoutchi.
... mais nous nous demandons si les différentes mesures nécessaires ont bien
été prises avant que la réforme n'ait lieu.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial.
Ce sujet, qui a été largement débattu au sein de la
commission des finances, doit être replacé dans son contexte.
Il s'agit d'une taxe de deux millions d'euros environ. On ne peut pas dire
tout et son contraire, c'est-à-dire qu'on ne peut pas vouloir, d'un côté, que
l'Etat soit efficace et réduire l'écart entre le coût et la productivité d'une
collecte, et, de l'autre, adopter une formule à géométrie variable !
Il faudrait aussi améliorer la collecte de cette taxe qui deviendrait une
contribution.
Je regrette que la concertation ait été trop rapide, donc insuffisante. Mais
il semble que la solution adoptée à l'Assemblée nationale permette de modifier
sensiblement le texte initial et qu'un accord soit intervenu au sein du groupe
de travail constitué par nos collègues MM. de Courson et Bertrand.
Si cela est exact, le problème pourrait être réglé - je réponds ainsi à M.
Karoutchi et à Mme Beaudeau - et l'école serait désormais financée par le biais
de versements directs ou indirects émanant des professionnels des assurances,
versements qui viendraient en déduction de ceux qui sont dus par ces
professionnels au titre de la taxe d'apprentissage ou de la taxe de formation
continue.
Nous avons confirmation de l'appartenance de l'Ecole nationale d'assurances à
l'enseignement supérieur public, et de son rattachement au Conservatoire
national des arts et métiers, qui perçoit pour elle les versements des
professionnels. Mais là aussi, monsieur le ministre, je voudrais avoir
confirmation que ce dispositif entrera en vigueur à compter de la promulgation
d'un arrêté ministériel portant extension d'un avenant à la convention
collective nationale des sociétés d'assurance et donc sous réserve d'un accord
entre professionnels de l'assurance qui doit intervenir au plus tard le 1er
janvier 2004.
Si notre lecture est la bonne, il est bien évident que la commission des
finances demandera le maintien de cet article et le rejet des amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je vais m'efforcer de donner, à la fois aux auteurs des
amendements et à M. le rapporteur spécial, Bernard Angels, une explication
justifiant le retrait de cet amendement.
Tout d'abord, je vous confirme que le Gouvernement partage, bien entendu, la
préoccupation exprimée par Mme Beaudeau, puis par M. Roger Karoutchi au nom de
M. Josselin de Rohan.
Lors de l'examen du projet à l'Assemblée nationale, le texte de compromis qui
a été adopté, à la suite de très nombreuses concertations menées par le député
M. Xavier Bertrand, a permis d'apporter une clarification répondant aux
diverses préoccupations exprimées. En effet, il rend la concertation possible
et organise les délais nécessaires. Je lui confirme d'ailleurs ceux qu'il a
indiqués tout à l'heure. Cela devrait être de nature à apaiser les dernières
inquiétudes qui pourraient subsister.
J'ajoute que la réforme du mode de financement de l'école répond à une demande
de la profession - j'y insiste - et fait l'objet de nombreux soutiens. Par
ailleurs, je tiens à rassurer M. Josselin de Rohan, qui se préoccupe de cette
question : l'Ecole nationale d'assurances n'est en rien remise en cause,
puisque son existence même est confirmée dans la loi. Son rattachement au
Conservatoire national des arts et métiers est également confirmé.
La profession de l'assurance souhaite s'impliquer davantage dans la gestion de
l'école, pour renforcer encore son dynamisme et permettre l'adéquation des
formations offertes aux attentes des entreprises. Le texte de l'article 66,
renvoie à la concertation et à un avenant à la convention collective nationale
des sociétés d'assurance la définition des moyens de l'école qui seront, en
tout état de cause, pris en charge par la profession, comme elle s'y est
engagée.
Cette réforme va donc dans le sens de la modernisation et de la
responsabilisation des acteurs du secteur, tout en allégeant les charges de
gestion administrative. La rédaction de l'article 66, issue des travaux de
l'Assemblée nationale, permet véritablement d'engager cette réforme de manière
progressive. C'est pourquoi je demande aux auteurs de bien vouloir retirer les
amendements n°s II-11 et II-24. A défaut, je serais obligé d'en demander le
rejet.
M. le président.
Monsieur Karoutchi, l'amendement n° II-11 est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi.
Après avoir entendu les explications de M. le ministre, nous retirons notre
amendement, mais nous resterons très attentifs aux évolutions de ce dossier.
M. le président.
L'amendement n° II-11 est retiré.
Madame Beaudeau, l'amendement n° II-24 est-il maintenu ?
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Malgré les explications de M. le ministre, l'absence de concertation est
évidente et je ne suis pas sûre que les délais mentionnés permettront d'engager
cette concertation, qui est pourtant réclamée par tout le monde.
Par conséquent, je maintiens cet amendement, monsieur le président.
M le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je veux indiquer que ceux qui voteront pour
l'amendement présenté par Mme Beaudeau voteront contre la volonté de l'ensemble
de la profession.
(Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je souhaite m'exprimer contre cet amendement.
Tout d'abord, le statut de l'Ecole nationale d'assurances n'est aucunement en
cause, pas plus que son rattachement au Conservatoire national des arts et
métiers.
Ensuite, je rappelle que la solution qui fait l'objet de l'actuel article 66 a
été mise au point par nos collègues de l'Assemblée nationale d'une manière
qu'il convient de saluer. En effet, nous avons été sollicités, les uns et les
autres, par la direction et par le président du conseil d'administration de
cette école, ainsi que par divers groupements. Cette question a suscité quelque
émoi dans le milieu concerné.
C'est avec beaucoup de rigueur et d'honnêteté, me semble-t-il, qu'en
particulier nos collègues Xavier Bertrand et Charles de Courson ont réuni un
groupe de travail et ont trouvé un compromis au terme duquel, il convient de le
rappeler, aucune mesure ne sera prise avant l'intervention d'un arrêté
ministériel. Or, comme M. le ministre vient de nous le confirmer, celui-ci ne
sera pris que dès lors que les concertations nécessaires se seront déroulées et
que les professionnels de l'assurance seront parvenus à un accord.
Nos collègues de l'Assemblée nationale, saisis du problème, ont donc souhaité
engager un processus de négociation « assisté », si j'ose m'exprimer ainsi. Et
pour être raisonnablement certains de déboucher sur une solution, ils ont mis
en place un cadre de négociation. A présent, il convient que les parties
concernées se rapprochent et que la solution adéquate soit trouvée.
Cette solution me paraît raisonnable et progressive et les craintes exprimées
par Mme Beaudeau me semblent superfétatoires, en tout cas excessives.
A l'évidence, nous observerons avec grand intérêt l'évolution de ce problème
et la commission des finances y sera très attentive. L'Ecole nationale
d'assurances est, en effet, une belle institution. C'est un outil qui
fonctionne bien et il ne s'agit certainement pas de porter atteinte à ce
fonctionnement. Cette école est proche des professionnels, mais elle fait
partie de l'enseignement supérieur public. Rattachée au Conservatoire national
des arts et métiers, elle a une réputation d'excellence et une fonction
économique à remplir.
Nous sommes persuadés que, dans un cadre renouvelé, les bonnes relations
contractuelles avec la profession de l'assurance pourront se poursuivre dans
l'intérêt à la fois du secteur, des élèves et du rayonnement de notre pays. Car
le rôle de l'Ecole nationale d'assurances est loin d'être négligeable, je le
répète, par rapport à tout ce qui existe dans les pays européens. Soyons donc
fiers de ce patrimoine, qui doit trouver les moyens d'assurer sa pérennité.
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le rapporteur général, je trouve que, ce matin, on met la charrue
devant les boeufs. Puisqu'il s'agit d'une école qui a fait ses preuves et dont
l'autorité est reconnue, vous avez raison, il faut la conserver !
Je propose donc que l'on engage la concertation avant de procéder à une
réforme.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est le cas !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-24
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 66.
(L'article 66 est adopté.)
Article 67
M. le président.
« Art. 67. - Au septième alinéa de l'article L. 431-14 du code des assurances
et au troisième alinéa de l'article 1635
bis
AB du code général des
impôts, les taux : "8,5 %" et "25,5 %" sont respectivement remplacés par les
taux : "4 %" et "12,5 %". »
L'amendement n° II-28, présenté par M. Angels, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« A. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Cette disposition est applicable aux primes et, en cas de paiement
fractionné, aux fractions de primes échues à compter du 1er janvier 2003. »
« B. - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
I. -. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bernard Angels,
rapporteur spécial.
C'est un amendement de précision. Il s'agit de rendre
applicable la baisse du taux de la contribution au titre de l'assurance
construction, qui passera de 25,5 % à 12,5 %, aux primes et, en cas de paiement
fractionné, aux fractions de primes échues à compter du 1er janvier 2003.
En effet, si cette disposition est facilement applicable aux nouveaux
contrats, des problèmes peuvent se poser aux termes des dispositions du code
général des impôts et, pour les échéances qui seront fractionnées, c'est
l'ancien taux de 25,5 % qui risque d'être retenu au lieu de celui de 12,5 %.
Cet amendement a pour objet d'éviter tout malentendu ultérieur.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
C'est un amendement de précision qui est utile, et le
Gouvernement y est favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-28.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 67, modifié.
(L'article 67 est adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les services financiers.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures vingt-cinq, est reprise à onze heures
trente.)
M. le président. La séance est reprise.
CHARGES COMMUNES
ET COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les charges communes et les comptes spéciaux du Trésor.
La parole est à M. Yves Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les charges communes.
Vous me
demandez, monsieur le président, de tenir la cadence de 200 millions d'euros à
la seconde ! Le budget des charges communes est, en effet, un budget «
mastodonte » de près de 120 milliards d'euros.
C'est également un budget protéiforme, qui respire : il se gonfle de 24
milliards d'euros de crédits de pensions une fois le vote de la loi de finances
acquis, et il s'allège dans l'article d'équilibre de 62 milliards d'euros de
dégrèvement d'impôts.
C'est aussi un budget innovant, puisqu'il sert de banc d'essai pour la mise au
point du premier programme de dépenses prévu par la loi organique relative aux
lois de finances.
C'est enfin un budget quelque peu hétéroclite, dont le taux de croissance de
2,2 % n'a guère de signification.
Par conséquence, monsieur le ministre, je m'en tiendrai à deux séries de
questions qui tiennent essentiellement, d'une part, à la charge de la dette et,
d'autre part, à certaines interventions de l'Etat : les dégrèvements d'impôts
locaux et les primes d'épargne logement, notamment.
Mes premières observations porteront sur la charge de la dette : celle-ci
atteint 38 milliards d'euros pour une dette de 770 milliards d'euros au 30
septembre 2002. Et cette somme correspond uniquement aux intérêts de la dette !
Car nous n'amortissons pas la dette venant à échéance ; nous la refinançons sur
un marché financier désormais européen. Les émissions de l'Etat atteindront,
cette année, 111 milliards d'euros : 68 milliards d'euros au titre du
refinancement de la dette passée et 43 milliards d'euros s'agissant du besoin
supplémentaire engendré par le déficit budgétaire prévu pour 2003.
Je vous poserai une première question, monsieur le ministre, au sujet de
l'interprétation de l'article 34 de la nouvelle loi organique, qui prévoit le
vote par le Parlement d'un plafond à l'augmentation de la dette à long et moyen
terme.
En 2002, profitant des bas taux d'intérêt - et vous avez sans doute eu raison
- vous avez prévu d'émettre 25 milliards d'euros de bons du Trésor à taux fixe,
les BTF, supplémentaires, ce qui dépasse sans doute largement les besoins de la
trésorerie. Ce serait, si l'on était sous l'empire de la nouvelle loi, une
façon de contourner le plafond voté.
Je pense qu'en ce domaine un code de bonne conduite serait nécessaire et que
le tableau de financement devrait isoler, pour le moins, la part de BTF non
requise pour de simples besoins de trésorerie.
Il faudrait aussi préciser votre interprétation du « plafond ». Bien entendu,
celui-ci doit être ajusté non seulement dans le cas d'une rectification du
déficit dans un collectif budgétaire, mais également lorsque l'Etat prend de
nouveaux engagements hors budget : je pense, notamment, à la reprise de la
dette de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, même si
j'espère que les engagements de ce type ne se renouvelleront pas.
Mais qu'adviendrait-il si, après le vote du collectif budgétaire de fin
d'année, des besoins supplémentaires de financement apparaissaient ? Il
faudrait simplement mettre en jeu la responsabilité politique du Gouvernement
en approuvant l'ajustement du plafond dans la loi de règlement, plutôt que de
se donner un « pied de pilote » lors de l'approbation initiale de ce
plafond.
Ma deuxième question concerne la charge nette de la dette.
Depuis 1995, celle-ci s'accroît moins vite que le stock de la dette. Elle
progresserait de 3,9 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2002.
Cette prévision me semble tout à fait solide pour les annuités de la dette à
long et moyen terme, qui correspondent à des emprunts émis, pour l'essentiel,
en 2002. Elle est sans doute un peu pessimiste - et tant mieux, d'ailleurs -
pour les emprunts à court terme, car le taux d'intérêt du consensus qui avait
été arrêté en août pour les BTF à 3,9 % est supérieur aux taux actuels. Une
bonne surprise n'est donc pas à exclure !
Ce serait d'autant plus utile que la croissance de la charge de la dette tend
à s'accélérer de nouveau en raison à la fois d'un effet volume plus défavorable
du fait du creusement du déficit budgétaire et d'un effet taux négatif qui
s'affaiblit. Cet effet taux est dû à l'amortissement des emprunts qui avaient
été contractés voilà une dizaine d'années à des taux supérieurs de plusieurs
points aux taux actuels de refinancement. Bien entendu, cet effet taux va
disparaître prochainement.
En outre, l'Agence France-Trésor développe une politique de gestion active et
innovante de la trésorerie et de la dette dans un souci de transparence à
l'égard du Parlement, que je me plais à souligner.
Je n'évoquerai pas le problème délicat du choix des indicateurs de performance
en matière de gestion de la dette. Je m'en tiendrai à l'objectif de réduction
progressive de la durée moyenne de la dette. C'est un changement de politique
assez considérable, monsieur le ministre, par rapport à la pratique antérieure.
En effet, de 1985 à 1995, l'objectif inverse était visé, à juste titre
d'ailleurs : tant que l'euro n'avait pas été érigé en monnaie européenne, cette
politique était tout à fait rationnelle, car la politique monétaire avait pour
premier objectif la défense de la parité franc-mark, au prix de hausses parfois
très fortes des taux à court terme.
Nous n'avons plus à faire face aux crises de change que nous avons connues, en
particulier au début des années quatre-vingt-dix. Il est donc tout à fait
posssible de conduire une politique qui permette de profiter, de façon
prudente, de l'écart de taux favorable entre les taux à court terme,
relativement bas lorsque la courbe des taux est normale, et les taux à long
terme, qui sont plus élevés.
Il faut reconnaître que des risques subsistent et que des difficultés
apparaissent : nous en avons eu l'exemple cette année, puisque le programme de
swaps
, c'est-à-dire d'échange de taux longs contre des taux courts mis
en application voilà deux ou trois ans, a dû être suspendu.
Il me semble opportun, monsieur le ministre, que vous nous expliquiez dans
quelles circonstances - par précaution, sans doute - vous mettez fin à cette
politique de raccourcissement de la durée de la dette. Cela doit-il être
considéré comme un arrêt provisoire ou bien allez-vous persévérer dans cette
voie tant que des dangers subsisteront sur le plan financier international ?
Telles sont les questions que je voulais vous poser, monsieur le ministre, sur
la charge de la dette.
Je souhaite en venir maintenant à des interventions de l'Etat qui me semblent
poser problème. Il s'agit, d'abord, des dégrèvements d'impôts locaux. A la
différence des remboursements d'impôts d'Etat, qui viennent très justement en
déduction du montant des recettes de l'Etat dans l'article d'équilibre, vous
continuez à déduire les dégrèvements d'impôts locaux du montant des recettes de
l'Etat, bien qu'ils soient désormais parfaitement isolés sur le plan comptable
au sein du chapitre 15-01 des charges communes.
Permettez-moi de vous dire - et cette opinion est partagée à la fois par le
Premier président de la Cour des comptes et par le rapporteur spécial de
l'Assemblée nationale - que ces dégrèvements d'impôts locaux ne s'imputent pas
sur des impôts d'Etat et qu'il serait donc logique de les inclure dans le
calcul du taux de croissance des dépenses de fonctionnement.
Ces dégrèvements, mes chers collègues, sont des subventions implicites et
invisibles aux collectivités locales qui allègent le poids de l'impôt local de
certains contribuables. Leur montant atteint 9,6 milliards d'euros en 2003, la
même somme qu'en 2001. Cependant, cette stabilité globale dissimule une
évolution bien différenciée.
Ainsi, les dégrèvements de taxe d'habitation ont augmenté très brutalement de
60 % en trois ans. Vous trouverez dans mon rapport écrit une analyse fouillée
de ces dégrèvements de taxe d'habitation qui démontre - c'est une première, je
crois - que ces dégrèvements profitent non seulement aux communes les plus
dépensières, ce qui était prévisible, mais également plus spécifiquement aux
grandes villes, avec des écarts extraordinaires. Cela fera, sans doute, l'objet
de débats, mais je pense qu'il faudra intégrer ces dégrèvements de taxe
d'habitation dans la réflexion d'ensemble du Parlement sur les mécanismes de
péréquation, parce que ces dépenses ont manifestement un effet largement
contre-péréquateur.
Pour l'heure, je m'en tiendrai aux dégrèvements de taxe professionnelle, dont
le principal est le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée. Ces
dégrèvements s'élèvent encore, malgré une légère décrue depuis 1999, à 6,4
milliards d'euros. Je suis étonné qu'ils n'aient pas diminué plus. En effet, le
plafonnement en fonction de la valeur ajoutée était un dispositif de crise. Il
avait explosé lors de la récession de 1992-1993, lorsque l'affaissement des
bénéfices avait réduit la valeur ajoutée des entreprises. Il était tout à fait
normal que la taxe professionnelle, dont le poids relatif s'accroissait - car
il ne dépendait pas des bénéfices des entreprises -, soit prise en charge
partiellement par l'Etat en fonction de la valeur ajoutée. Or cette cause a
disparu, mais le poids de ces dégrèvements n'a pas vraiment diminué avec le
retour à la prospérité.
J'espérais que la suppression progressive de la part « salaires » aurait
entraîné, elle aussi, une baisse forte des dégrèvements. Or la réduction de
près de 400 millions d'euros figurant dans le fascicule des voies et moyens,
sans être négligeable, ne me paraît pas plus à la hauteur de ce que l'on était
en droit d'attendre après la suppression de la part « salaires ».
En pratique, donc, ce sont les entreprises ayant beaucoup d'outillages et peu
de charges de salaires qui continuent à bénéficier de ces dégrèvements de taxe
professionnelle.
Je pose la question : ce dégrèvement est-il bien calibré ? Sachant qu'en
moyenne la taxe professionnelle est égale à 3,2 % de la valeur ajoutée, un
plafonnement à 3,5 % est-il encore justifié ?
M. Roger Rinchet.
Bonne question !
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
J'en viens aux primes d'épargne logement. Elles
figurent au chapitre 44-91 des charges communes pour la somme - considérable -
de 1,5 milliard d'euros, soit une augmentation de près de 50 % en cinq ans.
Actuellement, les plans d'épargne logement constituent un placement financier
extraordinairement intéressant, dont l'Etat paie, au titre des primes, deux
septièmes de la charge d'intérêts. Or les dépôts consacrés à l'épargne logement
ne donnent lieu à prêts qu'à hauteur de 10 % de leur masse. Certes, le Trésor
contrôle l'utilisation des 90 % restants d'une autre manière, en accord avec
les banques, pour les réinvestir dans le circuit de financement du logement.
Cependant, on est tout de même en droit, mes chers collègues, de s'interroger
sur un mécanisme qui conduit l'Etat, c'est-à-dire le contribuable, à financer
une mode d'épargne qui ne joue pas le rôle que lui a assigné le Parlement,
c'est-à-dire sa mobilisation sous forme de prêts spécifiques d'épargne
logement. Loin de moi l'idée de remettre en cause les droits acquis et les
contrats déjà signés, monsieur le ministre,...
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Non, en effet !
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
... mais je pense que nous devons réfléchir à une
réorganisation de l'épargne logement pour la rendre plus efficace.
Monsieur le ministre, ce budget des charges communes - budget mastodonte -
doit encore faire l'objet de clarifications, s'agissant des retraites de la
fonction publique.
La situation est, en effet, sur les plans comptable et budgétaire, absolument
aberrante. Du côté des dépenses, nous avons des crédits de pensions - 32
milliards d'euros ! - ventilés à hauteur de 26 milliards d'euros dans une
douzaine de fascicules ministériels, sur des bases, d'ailleurs, assez
curieuses. Ainsi, les retraites des professeurs de l'enseignement supérieur -
j'y suis sensible - relèvent de la section scolaire et les effectifs de
pensionnés de chaque ministère ne sont pas les effectifs réels, mais ceux de
2001 !
Toujours dans les dépenses, on trouve 6 milliards d'euros dans le budget des
charges communes, couvrant, outre les pensions concernant La Poste et France
Télécom, toutes sortes d'ajustements. Voilà donc une première difficulté de
consolidation des dépenses.
Du côté des recettes, il en est de même. Il faut aller chercher dans les
recettes non fiscales les quelque 5 milliards d'euros de contributions en
atténuation de dépenses de France Télécom, de La Poste et de l'établissement
chargé de gérer la soulte de France Télécom, isoler ensuite les 4,5 milliards
de retenues pour pensions pour arriver à mesurer ce qu'est la participation
réelle de l'Etat dans le système de répartition. Personnellement, en prenant
les chiffres très globalement, j'arrive à une participation de l'Etat
supérieure à 80 %, France Télécom et La Poste bien entendu exclus.
Cela me conduit à vous faire une suggestion, monsieur le ministre : il
faudrait très rapidement préfigurer, au sein des charges communes, le futur
compte spécial prévu par la loi organique en matière de pensions de manière que
les citoyens et les parlementaires soient informés et puissent débattre de la
réforme des retraites de la fonction publique sur des données chiffrées
précises.
Sous réserve de ces observations, j'émets, au nom de la commission des
finances, un avis très favorable à l'adoption du budget des charges communes.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Paul Loridant, rapporteur spécial.
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation, pour les comptes spéciaux du Trésor.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je
commencerai mon intervention par une remarque générale concernant l'avenir des
comptes spéciaux du Trésor au regard de la nouvelle loi organique relative aux
lois de finances.
En ce qui concerne les comptes d'affectation spéciale, l'article 21 de la loi
organique relative aux lois de finances introduit deux restrictions, au
demeurant utiles, par rapport au régime actuel. D'une part, les recettes des
comptes d'affectation spéciale doivent être « en relation directe avec les
dépenses concernées ». Certains comptes ne pourront donc plus percevoir la
totalité des recettes qui leur sont aujourd'hui affectées. D'autre part, les
recettes des comptes d'affectation spéciale ne pourront être complétées par des
versements du budget général que dans la limite de 10 % des crédits initiaux de
chaque compte, contre 20 % aujourd'hui. J'ai recensé, sans me pencher sur le
cas des comptes de commerce, au moins cinq comptes dont le fonctionnement
pourrait être fortement affecté par la mise en oeuvre de la nouvelle loi
organique.
Par ailleurs, je tiens à le dire solennellement devant vous, monsieur le
ministre, je considère qu'un certain nombre de comptes spéciaux souffrent de
dysfonctionnements importants, à commencer par un volume anormalement élevé de
reports de crédits.
Pour les comptes 902-00 « fonds national de l'eau », 902-32 « fonds de
modernisation de la presse quotidienne » et 902-17 « fonds national pour le
développement du sport », les ratios entre les reports et les crédits sont, en
2002, respectivement de 136 %, 224 % et 64 % ! La situation de ces trois
comptes présente un caractère d'autant plus inadmissible que ces reports ne
cessent d'augmenter depuis 1999 et que, par ailleurs, les crédits votés en loi
de finances initiale ne cessent eux-mêmes également de croître, ce qui sera
toujours le cas en 2003.
Que traduisent ces reports ? Un taux de consommation des crédits
particulièrement faible. La solution de ce problème, répété et amplifié depuis
de nombreuses années, ne peut qu'emprunter deux voies : soit la réduction des
dotations votées en loi de finances initiale, soit l'annulation des crédits de
reports. Or ces deux voies sont, monsieur le ministre, de la responsabilité
exclusive du Gouvernement.
Un autre dysfonctionnement vient du regroupement ; au sein du compte 902-32,
géré par le ministère de la culture, de crédits sans aucune cohérence, au point
que je l'ai baptisé « le compte fricassée du ministère de la culture » ! Le
mélange des genres pratiqué par ce compte - entraides à la presse et soutien à
l'expression radiophonique locale - me paraît contestable.
Le choix d'un compte d'affectation spéciale à part entière, consacré au
soutien de l'expression radiophonique locale, aurait été beaucoup plus
justifié, à cette réserve près que les fonds recueillis par la taxe affectée
sont limités. Une budgétisation totale de la taxe paraît, en définitive,
s'imposer et c'est, d'ailleurs, la logique qui a prévalu pour d'autres taxes
affectées, comme la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, qui finançait le
FISAC - le fonds d'intervention pour la sauvegarde, la transmission et la
restructuration des activités commerciales et artisanales - désormais intégrée
au budget général.
Ma dernière question sur le fonctionnement des comptes spéciaux du Trésor
concerne l'avenir que vous réservez, monsieur le ministre, au compte
d'affectation spéciale 902-33. Il s'agit du fonds de provisionnement des
charges de retraite, financé par les redevances perçues pour l'utilisation des
fréquences UMTS. Ce compte est, de fait, mort-né, puisque les recettes, liées
aux déboires du dossier UMTS, plusieurs fois diminuées, n'ont jamais été à la
hauteur des besoins. En 2003, en 2004 et en 2005, aucune recette ne serait
constatée sur ce compte. Dans ces conditions, ne vaudrait-il pas mieux fermer
ce compte dès maintenant ?
Venons-en maintenant au compte qui, politiquement, est le plus important des
comptes spéciaux du Trésor : le compte 902-24, dit de privatisation.
Je constate que l'effet de ciseau, déjà constaté l'an passé, entre les besoins
de dotations en capital pour les entreprises publiques et les recettes issues
des privatisations, s'est accentué au point que le Gouvernement est tenté de
recourir à des solutions extrabudgétaires pour recapitaliser certaines
entreprises publiques. Cette solution est le symptôme de la crise grave
traversée non seulement par le compte 902-24 - qui n'est qu'un simple compte !
- mais aussi, et surtout, par l'Etat actionnaire.
Contrairement à ce qui pourrait apparaître ici ou là, ce compte n'est pas
vraiment le compte d'un Etat-investisseur. Il est un compte de restructuration,
de cantonnement d'actifs dévalorisés et de désendettement : les principaux
bénéficiaires en sont ainsi GIAT Industries, Charbonnages de France, Bull, la
structure de cantonnement du Crédit lyonnais et Réseau ferré de France.
Les actifs de valeur de l'Etat sont cédés pour permettre la poursuite
d'activité d'entreprises qui ne pourront jamais être mises sur le marché et qui
même, pour certaines, seront, à terme, fermées.
Que constate-t-on en 2002 ? Après les années fastes de 1997 et 1998, les
recettes qu'il est désormais possible de tirer des privatisations sont de plus
en plus limitées. Les besoins en dotations en capital sont, eux, toujours aussi
importants. Dès lors, on assiste, pour ces entreprises, à un report des
dotations en capital d'année en année.
Prenons l'exemple de 2001, année où les recettes ont été deux fois moins
importantes que prévu. Les dotations en capital destinées à Réseau ferré de
France et à l'EPFR, l'établissement public de financement et de restructuration
- la structure de défaisance du Crédit lyonnais - ont été repoussées en 2002.
Compte tenu de la conjoncture actuelle, les dotations de 2002 destinées à ces
mêmes établissements, soit, au total, 3,2 milliards d'euros, ont été encore
repoussées en 2003.
Dans le projet de loi de finances pour 2003, vous présentez, monsieur le
ministre, une prévision de recettes optimiste de 8 milliards d'euros, et vous
annoncez la recapitalisation de France Télécom, dont le coût, évalué à 9
milliards d'euros, n'est pas inscrit au budget. Vous pourriez retenir, monsieur
le ministre, la solution de créer un établissement public s'endettant en lieu
et place de l'Etat, et recapitalisant à sa place l'entreprise publique France
Télécom, ce qui expliquerait que les dépenses ne soient pas inscrites dans la
loi de finances initiale. Cependant, le choix d'une telle structure me paraît
critiquable. Il n'est évidemment pas conforme aux principes d'universalité et
de sincérité du budget de l'Etat : en clair, il s'agit d'une débudgétisation,
et elle ne sera de toute façon vraisemblablement pas neutre au regard des
critères dits de Maastricht.
Le choix de l'établissement public permettra, certes, de ne pas peser, en
apparence, sur le « déficit maastrichtien », mais aura, en revanche, de lourdes
conséquences sur la dette des administations publiques. L'établissement public
qui sera créé risque fort, en effet, d'être classé en organisme divers
d'administration centrale, ou ODAC, et d'entrer à ce titre dans la définition
de la dette publique. Celle-ci, déjà proche des 60 % du produit intérieur brut,
pourrait alors dangereusement frôler cette limite, voire la dépasser.
Reconnaissez, monsieur le ministre, que le recours à un établissement public
pour recapitaliser France Télécom avec la garantie implicite de l'Etat, cet
établissement public faisant lui-même un emprunt auprès de la Caisse des dépôts
et consignations, constitue un hors-bilan éminemment critiquable.
Il faut évidemment reconnaître que, en l'état, le compte 902-24 ne disposera
pas des recettes nécessaires à une recapitalisation de France Télécom.
Cependant, pourquoi la dotation en capital à France Télécom devrait-elle être
traitée différemment des autres dotations en capital ? Faut-il, dès lors, créer
un grand établissement public s'endettant pour recapitaliser l'ensemble des
entreprises publiques de l'Etat à la place de ce dernier, en complément des
cessions d'actifs publics qui seront réalisés ? Je ne le crois pas.
Une solution conforme à l'orthodoxie budgétaire s'impose. Elle passe par
l'affectation de nouvelles recettes à ce compte 902-24 « en relation directe
avec les dépenses concernées », conformément à l'article 21 de la nouvelle loi
organique du 1er août 2001.
Ce sont sans doute les dividendes des entreprises publiques, EDF, la Caisse
des dépôts et consignations, la Banque de France, notamment, voire les
versements exceptionnels d'établissements publics qui pourraient, le plus
légitimement, financer les besoins réels du compte 902-24. Ne serait-il pas
légitime que le dividende de France Télécom finance une part de la
recapitalisation des entreprises publiques ? Ce ne serait d'ailleurs pas la
première fois que des dividendes seraient versés sur le compte 902-24 : tel fut
déjà le cas pour Thomson SA récemment.
Certes, une telle solution aurait un effet sur le déficit budgétaire. Elle
n'en serait pas moins conforme à l'« opération vérité » que souhaite lancer le
Gouvernement sur la situation de ces entreprises publiques. Elle permettrait
d'avoir une vision plus consolidée de ce que rapportent réellement les
entreprises publiques, en cessions de titres et en dividendes, et de ce
qu'elles coûtent en dotations en capital.
C'est ainsi, également, que le rôle de l'Etat se rapprocherait de celui d'un
investisseur plus traditionnel, qui choisit de réinvestir ou de répartir ses
dividendes. Pour l'heure, les dividendes perçus par l'Etat ont été bien peu
réinvestis. Ils ont été intégrés dans les recettes du budget général.
En résumé, l'Etat, avec ses entreprises publiques souvent sous-capitalisées,
est devenu un bien piètre actionnaire !
Telles sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les principales
observations qu'appellent ces comptes spéciaux du Trésor. Vous renvoyant pour
plus d'informations à mon rapport écrit, je vous invite, au nom de la
commission des finances, et en dépit des critiques que je viens d'émettre, à
adopter ces crédits.
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget
des charges communes est, cette année encore, le plus important du budget
général, puisqu'il représente 120 milliards d'euros environ de dépenses.
Bien entendu, c'est le service de la dette qui prime, avec la prise en charge
des dégrèvements et atténuations de recettes fiscales.
Mon intervention portera non pas sur le titre I, mais plutôt sur les lignes
budgétaires qui figurent aux titres III et IV.
Ainsi sont inscrits dans les crédits du titre III près de 2,3 milliards
d'euros de dépenses au titre de la compensation entre régimes sociaux.
Quant au titre IV, il comporte des lignes budgétaires aussi diverses que la
dotation de l'Etat au fonds national de péréquation, la prise en charge des
dépenses d'indemnisation des victimes de la marée noire de l'
Erika,
les
dotations aux fonds de secours aux victimes de calamités ou encore le
financement d'un certain nombre de prestations sociales, notamment
agricoles.
Apparaissent également dans ce chapitre les dépenses de l'Etat au titre du
fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, ou des victimes de la
transmission du sida par voie sanguine.
Cette situation appelle plusieurs observations.
Au-delà des sommes en jeu, nous nous interrogeons sur la portée de ces
orientations, tant au regard du principe même de la sincérité budgétaire que
sur leur signification en termes d'exécution.
Dès lors que certaines dépenses sont inscrites dans les charges communes, la
réalité de leur engagement peut être mise en cause.
Même si nous pouvons concéder le caractère éminemment prévisionnel, voire
accidentel de la mobilisation de certains des crédits concernés, il n'en
demeure pas moins que le fait d'inscrire dans les charges communes des dépenses
qui devraient normalement être imputées aux ministères concernés sur des
ressources stables constitue une anomalie budgétaire.
Nous trouvons contestable le fait que l'Etat assume ses responsabilités quant
au financement de l'allocation aux adultes handicapés des exploitants agricoles
ou de la caisse de retraite des mines au travers des charges communes en lieu
et place, par exemple, des crédits du BAPSA, sous forme de subvention, ou de
ceux du ministère des affaires sociales, tandis qu'il n'oublie pas de
solliciter tant le régime général de la sécurité sociale que la caisse
nationale de retraite des agents des collectivités locales pour ce faire.
Nous devons relever que les deux derniers collectifs ont prévu, dans un autre
cadre, de ponctionner largement les caisse des sociétés mutualistes agricoles,
ce qui illustre une fois encore une conception pour le moins déroutante des
finances publiques.
Décidément, de telles orientations ne peuvent pas être partagées par notre
groupe.
On fait trop facilement appel aux crédits des charges communes quand on ne
sait pas faire face aux besoins sociaux ; on s'étonne d'ailleurs, encore
aujourd'hui, de certains retards constatés - je pense à l'indemnisation des
victimes de l'amiante - qui n'ont pas uniquement à voir avec la lourdeur des
procédures d'instruction des dossiers.
Vous l'avez compris, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne
voterons pas les crédits du budget des charges communes.
(Applaudissements
sur les travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
Qu'il me soit
permis, tout d'abord, de féliciter les rapporteurs spéciaux pour la qualité de
leurs rapports et de la présentation qu'ils en ont faite. Nous sommes supposés
les avoir lus ; aussi me permettrai-je de répondre immédiatement aux
questions.
Ce débat relatif aux charges communes et aux comptes spéciaux du Trésor me
donne l'occasion de relever en préambule quelques points communs.
En premier lieu, il convient de souligner l'importance considérable des masses
financières qui sont en cause ; je ne les rappelle pas puisque M. Yves Fréville
en a donné un aperçu tout à l'heure.
En deuxième lieu, il s'agit, pour la plus grande partie, de crédits de
constatation. Ces masses si importantes peuvent toutefois être infléchies,
puisque la charge de la dette, notamment, peut faire l'objet d'une gestion
avisée et surtout limitée, espérons-le, à moyen terme par la maîtrise de la
dépense. Il n'empêche que les dépenses dont nous débattons ne sont pas, pour
l'essentiel, discrétionnaires.
En troisième lieu, il faut noter l'ampleur des changements qui vont résulter
de la mise en oeuvre de la loi organique, comme l'a dit M. Paul Loridant.
J'en viens maintenant plus particulièrement aux questions qui ont été
formulées par M. Yves Fréville, rapporteur spécial, concernant le budget des
charges communes.
Il a insisté sur les remboursements et dégrèvements d'impôts, sujet qui lui
tient à coeur et sur lequel il est particulièrement compétent.
Tout d'abord, comme vous le savez, monsieur le rapporteur spécial, nous en
avons déjà débattu à l'occasion du vote sur la loi de règlement de 2001. Vous
estimez que les dégrèvements sont, en réalité, représentatifs de subventions
aux collectivités locales. Vous préféreriez donc qu'ils soient retracés en
dépenses nettes au sein du budget, au lieu d'être traités, comme les autres
dégrèvements, en dépenses en atténuation de recettes.
Il s'agit, en fait, non pas d'un débat juridique, mais plutôt d'un débat
d'opportunité qui peut se résumer ainsi : le Gouvernement doit-il intégrer dans
sa norme de dépenses le coût des dégrèvements sur les impôts locaux ?
En l'état, ma réponse est négative. Ce qui caractérise les dégrèvements sur
les impôts locaux, c'est l'automaticité de leur évolution en fonction de trois
paramètres : l'évolution des taux des impôts locaux, celle des bases et, enfin,
le nombre de contribuables concernés par le dégrèvement accordé par le
législateur. Pour pouvoir traiter les dégrèvements en dépenses, il faudrait
donc les transformer en compensations, indépendantes notamment des taux votés
par les collectivités locales.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
C'est le cas.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Or, ce débat nous ramène à celui de l'autonomie fiscale
des collectivités territoriales. Monsieur le rapporteur spécial, vous avez
accompli - votre rapport écrit le prouve - un très important travail d'analyse
de la répartition des dégrèvements de taxe d'habitation. Il en ressort que
l'importance des dégrèvements est corrélée à la fois au niveau des taux et à la
taille de la commune. Vous relevez que ces deux paramètres ne sont pas corrélés
à la répartition de la dotation de solidarité urbaine et vous en déduisez que
les dégrèvements de taxe d'habitation ne participent pas suffisamment à la
politique de péréquation.
Comme vous pouvez l'imaginer, monsieur Fréville, je me dois d'être prudent
dans mes éléments de réponse. Une étude approfondie me semble nécessaire, même
si, d'ores et déjà, je vous rejoins sur deux points. D'une part, nous devons
fonder en priorité la péréquation sur des données de richesse et non sur
l'effort fiscal de la commune. D'autre part, il est préférable d'augmenter le
pouvoir fiscal des collectivités territoriales en leur laissant le soin de
décider d'une partie de la politique d'allégements fiscaux.
Les échanges que nous avons eus mardi dernier sur les finances locales ont
ouvert des voies qu'il nous faut défricher ensemble dès les prochains mois.
J'en viens à l'autre grande composante du budget des charges communes, la
charge de la dette.
Première observation : elle est effectivement en forte progression de plus
d'un milliard d'euros, ce qui contraste avec les années antérieures.
Comme vous l'avez dit, la diffusion de la baisse des taux est quasi achevée.
Nous supporterons donc pendant toute la durée de la législature une charge de
la dette en augmentation.
Deuxième observation : je vous confirme que les calculs relatifs à la charge
de la dette ont été effectués selon des hypothèses prudentes, au vu des taux
d'intérêt actuels. Tout en sachant que les consensus évoluent parfois au fil de
l'évolution de l'économie, le niveau des taux en 2003, sur lequel s'accordent
les économistes, est inférieur à ces chiffres.
Troisième observation : nous avons veillé à continuer d'améliorer
l'information du Parlement en présentant sous forme de programme les crédits de
la dette. Nous avons poursuivi l'initiative heureuse qui avait été prise l'an
dernier par le précédent gouvernement.
Nous avons apporté cette année deux innovations : d'une part, une présentation
pluriannuelle jusqu'en 2006 du tableau de financement de l'Etat ; d'autre part,
une double présentation, en optique de caisse et de droits constatés, de la
charge budgétaire de la dette en 2003.
Enfin, nous avons modifié la présentation de l'article d'équilibre, afin
d'améliorer l'information du Parlement :
nous faisons désormais apparaître les dépenses nettes de l'Etat, déduction
faite des recettes d'ordre liées à la dette, ainsi que les prélèvements sur
recettes, ce qui représente une amélioration importante.
Quatrième observation : je rappellerai brièvement quels sont nos objectifs
pour gérer la dette au mieux des intérêts du contribuable.
Le premier est la réduction de la durée moyenne de la dette négociable par la
constitution d'un portefeuille de contrats d'échanges de taux appelés
swaps,
vous en avez parlé.
La durée moyenne envisagée était de cinq ans et six mois pour la fin de
l'année 2002. Or du fait de la très forte « volatilité » des marchés à partir
de juillet 2002 et de leur faible niveau, nous avons décidé - telle est la
réponse que je voulais vous apporter - de suspendre temporairement la stratégie
de
swaps
pour la reprendre lorsque les conditions seront plus
favorables. Cette mesure a été prise sur la base des limites fixées à l'Agence
France Trésor pour la conduite de ses opérations de
swaps
au
quotidien.
La stratégie de réduction de la durée de vie moyenne de la dette conserve
néanmoins toute sa valeur. Il ne s'agit donc que d'une suspension. Notre
objectif est de réduire de six mois supplémentaires la durée de vie moyenne de
la dette d'ici à la fin de l'année 2003.
Notre deuxième objectif est la diminution du montant du compte de l'Etat à la
Banque de France en fin de journée, en vue de parvenir aussi vite que possible
à une trésorerie « zéro ».
Notre troisième objectif est le placement des excédents ponctuels de
trésorerie au meilleur prix.
Notre quatrième et dernier objectif est d'émettre aux meilleures conditions.
C'est ainsi que nous avons récemment opéré une émission d'obligations
assimilables du Trésor, OAT, à trente ans avec des conditions de taux
favorables. Le montant est de 4 milliards d'euros ; toutefois, ce titre a fait
l'objet de 6 milliards d'euros de demandes, ce qui constitue un succès.
Je développerai davantage mon propos sur le sens qu'il convient de donner au
plafond d'endettement qui sera voté par le Parlement à compter de 2006. Ce vote
renforcera la gouvernance conjointe du Parlement et du Gouvernement sur
l'importante question de la dette. L'interprétation proposée cet été aux
commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale, qui l'ont
d'ailleurs, me semble-t-il, accueillie favorablement, est que cette disposition
vise la fixation d'un plafond pour la variation nette du stock des OAT et des
BTAN - bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel - du 1er janvier au 31
décembre de l'année considérée.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
Tout à fait.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Cette interprétation a été retenue par le Gouvernement
dans son programme d'aide des trésoreries associé à ce projet de loi de
finances.
Il nous semble utile d'insister sur la nécessaire prudence qui devra présider
à la fixation, au plus tard dans le projet de loi de finances pour 2006, d'un
plafond de variation nette, en raison notamment de la sensibilité des émissions
d'OAT et de BTAN à l'évolution des marchés. Par exemple, une augmentation
brutale des taux à court terme comparable à celle du début des années
quatre-vingt-dix inciterait rationnellement à un recours relatif accru en cours
d'année au financement de long et moyen terme dans la politique d'émission de
l'Etat.
Une marge de manoeuvre de 7 milliards d'euros apparaît de ce fait
a
priori
nécessaire au Gouvernement, marge qui reste par ailleurs
relativement limitée puisqu'elle correspond à 1 % ou 2 % du stock de dettes
négociables à plus d'un an.
Vous avez en outre, monsieur le rapporteur spécial, proposé une interprétation
au terme de laquelle la loi de règlement permettrait d'élever rétrospectivement
le niveau du plafond. En ce cas, la marge de manoeuvre de 5 milliards d'euros
sollicitée à ce stade par le Gouvernement pourrait être sensiblement réduite,
voire supprimée.
Je vous propose de poursuivre ce débat dans les prochains mois, en liaison
avec les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, afin
que nous trouvions la solution la plus appropriée à la bonne information du
Parlement.
L'élévation du stock de bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté, les
BTF, n'est-elle pas le signe que le plafond de dettes peut être contourné ?
Telle était également votre question. L'élévation de plus de 50 % du stock de
BTF en 2002 est à relier à une demande des marchés de lignes de BTF plus
importantes qui permettent une plus grande liquidité. Cette demande permet à
l'Etat de bénéficier de taux plus favorables, ce qui l'a conduit à émettre
davantage sur des titres courts. Cette montée en puissance devrait se
poursuivre l'année prochaine, ce qui est par ailleurs tout à fait cohérent avec
l'objectif de réduction de la durée de vie moyenne de la dette négociable de
l'Etat.
L'accroissement du stock de BTF ne saurait toutefois être pérenne, car
fortement dépendant de la demande des marchés. En outre, le BTF reste
essentiellement un instrument de couverture des creux de trésorerie
infra-annuels. Dans ces conditions, le plafond d'endettement à moyen et long
terme me semble conserver toute sa validité.
En ce qui concerne l'épargne logement, vous avez estimé que l'Etat devait
cesser de financer la prime allouée aux titulaires d'un plan d'épargne logement
qui ne sollicitent pas d'emprunt. Vous proposez de limiter cette réforme aux
nouveaux entrants dans le dispositif, ce qui est l'expression du bon sens.
Votre proposition rejoint la préoccupation du Gouvernement d'éviter de
continuer à subventionner des opérations de placement et d'aider uniquement les
souscripteurs d'un emprunt. Nous vous présenterons donc une réforme en ce sens
dans le prochain projet de loi de finances.
J'en viens à présent aux questions qui ont été évoquées par M. Paul
Loridant.
Vous avez insisté à juste raison, monsieur le rapporteur spécial, sur les
reports de crédits de certains comptes spéciaux. Nous en avons débattu lors de
la première partie de la loi de finances et j'estime avec vous que la
budgétisation des actions qui sont retracées par les comptes spéciaux permet
d'éviter des reports de crédits de paiement trop importants. Le budget général,
contrairement aux comptes spéciaux, n'est pas tenu de respecter la double
égalité : autorisations d'engagement et crédits de paiement, d'une part ;
autorisations d'engagement et ressources encaissées sur le compte, d'autre
part.
Vous avez dit que cela relevait de la responsabilité du Gouvernement, mais je
veux dire de cette tribune que je compte sur le soutien du Parlement pour
budgétiser, dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux
lois de finances, certaines actions aujourd'hui financées dans le cadre de
comptes spéciaux.
Comme vous l'indiquez dans votre rapport, l'importance des reports
justifierait une réduction des dotations en loi de finances initiale ou
l'annulation des crédits. Dans les deux cas, le soutien du Parlement ne sera
pas inutile, ces mesures ne rencontrant pas toujours, vous l'imaginez,
l'enthousiasme des gestionnaires.
Comme vous m'y invitez, je souhaite vous entretenir de notre politique à
l'égard du secteur public. Je citerai quelques chiffres pour mieux mesurer les
enjeux.
Les entreprises publiques représentent 200 milliards d'euros de chiffre
d'affaires, 50 milliards d'euros de fonds propres, 150 milliards d'euros de
dette, emploient 1,2 million de personnes et ont réalisé en 2001, avant les
pertes enregistrées par France Télécom, un résultat net approximativement
nul.
Elles représentent donc un enjeu très important pour les finances publiques,
notamment pour le « bilan » de l'Etat.
Quelle est, tout d'abord, la situation des entreprises dont l'Etat est
actionnaire ? Chaque entreprise a une situation propre. Nous ne pouvons pas
comparer la SNCF, La Poste ou Thomson. En raisonnant en système, nous ferions
de lourdes erreurs de jugement. Je citerai trois exemples très différents.
France Télécom est aujourd'hui dans une situation financière difficile, malgré
de très bonnes performances opérationnelles. Cette situation est liée, d'une
part, au secteur des télécommunications et, d'autre part, à des investissements
hasardeux et mal menés au plus haut de la bulle financière.
L'Etat actionnaire devra soutenir le redressement de France Télécom. Le
renforcement des fonds propres de l'entreprise est indispensable à son
rétablissement financier. Cela passera notamment, le moment venu, lorsque les
conditions pour le faire seront réunies, y compris à l'égard des actionnaires
individuels et salariés, par une recapitalisation.
Vous m'avez, monsieur le rapporteur spécial, interrogé sur les modalités
concrètes de ce soutien et sur leur traduction budgétaire. Vous avez d'ailleurs
émis un jugement de valeur sur cette dernière. Il s'agira d'une opération de
nature patrimoniale, ce qui signifie qu'elle concernera le bilan de l'Etat et
non pas son compte de résultat, à savoir le budget et son déficit. Le
contribuable français n'aura donc pas à supporter l'apport en capital qui sera
opéré au profit de France Télécom.
Pour le reste, il va de soi que les détails de l'apport de l'Etat ne sont pas
dissociables du plan de développement de l'entreprise. Celui-ci sera annoncé
mercredi prochain par le président de l'entreprise récemment nommé M. Thierry
Breton. S'agissant d'une entreprise cotée, vous comprendez aisément que le
détail des annonces doive être effectué globalement.
D'autres entreprises, dont l'Etat est actionnaire, se portent parfois mieux
que leurs concurrentes.
Air France a ainsi mieux résisté que d'autres à la crise du transport aérien,
grâce à la flexibilité de ses vols et à sa répartition géographique ; Renault
est renforcé par le succès de son alliance avec Nissan ; Thalès est conforté
par le succès de sa stratégie multidomestique ; EADS bénéficie désormais de
l'intégration industrielle d'Airbus.
Des enjeux de modernisation immenses subsistent pour les entreprises qui se
trouvent au coeur du secteur public et dont la situation financière demeure
fragile, voire préoccupante ; La Poste devra faire face à l'ouverture
progressive du courrier à la concurrence ; la SNCF, dont les résultats
financiers se dégradent, doit faire face à l'enjeu majeur de la réorganisation
du fret ferroviaire.
Le soutien de l'Etat à ces entreprises est très substantiel. Il doit
accompagner les efforts de leurs dirigeants et de leurs salariés pour les
rendre plus performantes au moment où elles seront confrontées à la
concurrence.
Cette brève présentation de la situation du secteur public me conduit à
évoquer la politique du Gouvernement à l'égard des participations de l'Etat.
Il ne peut pas y avoir de doctrine générale applicable indistinctement. C'est
la situation propre à chaque entreprise qui doit conduire l'Etat à choisir sa
stratégie d'actionnaire pour cette entreprise. Plutôt que de doctrine, on peut
donc parler de méthode.
Tout d'abord, la priorité est d'avoir des entreprises publiques bien gérées,
performantes et profitables. L'objectif du Gouvernement est que l'intervention
de l'actionnaire, à chacune de ces étapes, contribue à la performance de
l'entreprise.
Ensuite, l'Etat n'a pas vocation à rester actionnaire des entreprises du
secteur concurrentiel qui ne présentent pas un caractère stratégique.
Enfin, le Gouvernement a d'ores et déjà annoncé deux évolutions importantes :
l'ouverture du capital de l'EDF et de GDF et la privatisation d'Air France. De
telles évolutions ne se conçoivent qu'avec une étroite concertation entre
l'Etat, les dirigeants des entreprises et les salariés. Elles supposent
également un lourd travail de préparation, juridique, technique et financier,
qui est en cours.
Il n'aura enfin pas échappé à la sagacité de M. Loridant, qui m'a interpellé à
ce sujet, que l'Etat vient de céder sa participation résiduelle dans le Crédit
lyonnais, pour 2,2 milliards d'euros. Cela me conduit à traiter de la
signification du montant de 8 milliards d'euros inscrit, au titre de 2003, pour
le compte d'affectation spéciale.
Ce chiffre de 8 milliards d'euros ne doit être interprété ni comme une
obligation de résultat ni comme une obligation de dépense. Il s'agit d'un
compte qui mesure les opérations en capital, c'est-à-dire les flux
d'investissement et de désendettement.
Le chiffre de 8 milliards d'euros correspond à une estimation de ce qu'il
paraît envisageable d'atteindre en 2003. La réalisation dépendra de l'intérêt
stratégique des entreprises et de l'intérêt patrimonial de l'Etat compte tenu
des conditions de marché.
Le résultat que nous venons d'obtenir avec le Crédit lyonnais a, je crois,
amplement démontré cependant la capacité du Gouvernement à atteindre ses
objectifs en matière patrimoniale.
Vous m'avez enfin interrogé sur le compte 902-33, dont l'objet sera
prochainement élargi. Nous modifierons, en effet, sa nomenclature lors du
collectif budgétaire pour pouvoir allouer au fonds de réserve des retraites 500
millions d'euros sur les 2,2 milliards d'euros de la vente du Crédit
lyonnais.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les
informations que je pouvais apporter en réponse aux interrogations des
rapporteurs spéciaux, que je remercie, encore une fois, de la qualité de leur
travail.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et
des Républicains et Indépendants.)
CHARGES COMMUNES
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant à l'état B et concernant les charges communes.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre I : 2 592 080 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre I.
(Ces crédits sont adoptés).
M. le président.
« Titre II : 31 590 797 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre II.
(Ces crédits sont adoptés).
M. le président. « Titre III : 150 175 120 euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Chacun ici apprécie l'initiative prise par la
commission des finances tendant à réduire les crédits dont dispose le
Gouvernement, initiative qui est la conséquence directe de la révision à la
baisse des ressources fiscales pour 2003.
Monsieur le ministre, j'étais tenté de proposer un amendement de réduction des
crédits figurant au titre III sur les mesures générales intéressant les agents
du secteur public. J'y ai renoncé, ayant conscience qu'il s'agit de crédits
évaluatifs, de dépenses de constatation. En définitive, notre initiative, si
elle avait été votée, aurait été exposée à une présomption d'affichage, en
contradiction avec les principes qui régissent nos travaux budgétaires, à
savoir une exigence de sincérité et de transparence.
Mais je lance un appel au Gouvernement : si nous voulons maîtriser la dépense
publique, peut-être faudrait-t-il, monsieur le ministre, retarder quelque peu
pendant cette année 2003 les recrutements d'agents de la fonction publique
prévus par le Gouvernement, de sorte que la masse des crédits engagés soit
révisée à la baisse en conséquence.
Enfin, je veux vous remercier, monsieur le ministre, des indications que vous
avez bien voulu apporter s'agissant de la restructuration du capital et des
moyens mis à la disposition de France Télécom. J'ignore quelle sera la décision
du Gouvernement, mais, quoi qu'il en soit, qu'il s'agisse d'une consolidation
du capital ou du recours à un établissement public, qui, sans être capitalisé,
ferait appel à l'emprunt, l'option qui sera retenue mettra à contribution,
directement ou indirectment, les finances publiques et devra donc être
autorisée par le Parlement.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Je ne veux pas esquiver les questions et les remarques
de M. le président de la commisssion des finances.
Le choix qui a été fait de ne pas déposer d'amendement sur un crédit
évaluatif me paraît sage, car nous sommes dans une démarche de grande sincérité
et nous pourrions, en effet, être accusés de sous-estimer la dépense.
D'ailleurs, si la dépense était surestimée, il y aurait, comme l'on dit, une
économie de constatation. Cela étant, monsieur le président de la commission,
vous connaissez sur le sujet mon point de vue personnel, qui est aussi celui du
Gouvernement.
Les collectivités territoriales, dont le souci est précisément de faire
l'usage le plus parcimonieux possible des deniers prélevés sur nos concitoyens,
procèdent à l'occasion des recrutements à un examen très attentif de leur
nécessité et, par ailleurs, elles font en sorte que ces recrutements s'opèrent
dans des délais propres à concilier la qualité des services et leur moindre
coût pour nos compatriotes.
Ce qui est vrai de la gestion dans nos collectivités locales doit l'être au
niveau de l'Etat.
Il ne viendrait à l'idée de personne, je l'espère, d'imaginer que les crédits
autorisés par le Parlement doivent être absolument dépensés. Viendrait-il à
l'idée d'un maire de considérer que les crédits qu'il a sollicités de son
conseil municipal doivent être impérativement dépensés ? Ne demandons pas à
l'Etat de faire ce que nous ne faisons pas dans nos collectivités
territoriales. Par conséquent, monsieur le président de la commission, le
Gouvernement est tout à fait conscient que la fonction publique constitue la
dépense sur laquelle il faut en permanence « avoir l'oeil », un haut niveau de
service rendu à nos compatriotes et l'optimisation des ressources humaines de
l'Etat étant par ailleurs conciliables.
M. le président.
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 441 708 912 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 151 000 000 euros ;
Crédits de paiement : 18 000 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
J'appelle en discussion les articles 68 et 68
bis,
qui sont rattachés
pour leur examen aux crédits affectés aux charges communes.
Article 68
M. le président.
« Art. 68. - L'article 32 de la loi de finances rectificative pour 1986 (n°
86-824 du 11 juillet 1986) est ainsi modifié :
« 1° Au I, les mots : "Caisse d'amortissement de la dette publique" sont
remplacés par les mots : "Caisse de la dette publique" et les mots : "pour une
durée de vingt ans" sont supprimés ;
« 2° Le II est ainsi rédigé :
« II. - La Caisse de la dette publique peut effectuer, sur les marchés
financiers, toutes les opérations concourant à la qualité de la signature de
l'Etat. Elle peut notamment acheter les titres émis par l'Etat, garantis par
lui ou émis par des établissements ou des entreprises publics, en vue de leur
conservation, de leur annulation ou de leur cession.
« La Caisse de la dette publique peut se voir attribuer tout titre de dette
publique négociable émis par l'Etat dans le cadre de l'autorisation donnée
chaque année à cette fin, par la loi de finances, au ministre chargé de
l'économie. Elle est autorisée à prêter et à vendre ces titres. » ;
« 3° Le III est ainsi rédigé :
« III. - L'Etat peut accorder à la caisse des dotations, des prêts ou avances,
et des avances de trésorerie effectuées en application du 1° de l'article 26 de
la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances. »
;
« 4° Le V est ainsi rédigé :
« V. - Les opérations réalisées par la Caisse de la dette publique sont
retracées dans le rapport d'activité sur la gestion de la dette et de la
trésorerie prévu par l'article 8 de la loi de finances rectificative pour 2000
(n° 2000-1353 du 30 décembre 2000). »
L'amendement n° II-29, présenté par M. Fréville, au nom de la commission des
finances, est ainsi libellé :
« Compléter
in fine
cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« 5° Après le V est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« V
bis
. - Le Fonds de soutien des rentes est supprimé à compter du 15
janvier 2003. Dans tous les textes législatifs et réglementaires applicables,
les mots : "caisse d'amortissement de la dette publique" sont remplacés par les
mots : "caisse de la dette publique". »
La parole est à M. Yves Fréville, rapporteur spécial.
M. Yves Fréville,
rapporteur spécial.
Le Trésor dispose actuellement de deux bras séculiers
pour intervenir sur le marché secondaire des titres de la dette publique : la
CADEP, la caisse d'amortissement de la dette publique, qui a été créée en 1986,
mais qui ne peut qu'amortir des titres, et le fonds de soutien des rentes, qui
date de 1937, qui peut intervenir, mais qui ne dispose pas de tous les moyens
de contrôle de la CADEP.
Le Gouvernement propose de fusionner ces deux organismes en une caisse de la
dette publique. Nous ne pouvons qu'y être favorables.
Reste un problème : le texte du Gouvernement ne prévoit pas explicitement la
suppression du fonds de soutien des rentes, sans doute parce qu'il considère
que c'est une disposition de nature réglementaire. La commission des finances
estime cependant qu'il serait plus clair de faire apparaître directement la
suppression du fonds de soutien des rentes dans la loi.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Cet amendement technique améliore le texte du
Gouvernement, qui y est donc favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-29.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 68, modifié.
(L'article 68 est adopté.)
Article 68 bis
M. le président.
« Art. 68
bis.
- Le ministre chargé de l'économie est autorisé à
accorder, dans la limite d'un encours cumulé en principal de 1,1 milliard
d'euros, la garantie de l'Etat aux prêts accordés par l'Agence française de
développement aux pays éligibles à l'initiative en faveur des pays pauvres très
endettés et devant, dans le cadre du volet bilatéral complémentaire à cette
initiative, faire l'objet d'un refinancement par dons. Pour chaque pays
concerné, la garantie des prêts sera octroyée dès la mise en place du
refinancement par dons. »
- (Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les charges communes.
COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR
M. le président. Nous allons maintenant examiner les articles 42 à 47 du projet de loi de finances, qui concernent les comptes spéciaux du Trésor.
C. - Opérations à caractère définitif
des comptes d'affectation spéciale
Article 42
M. le président.
« Art. 42. - Le montant des crédits ouverts aux ministres, pour 2003, au titre
des services votés des opérations définitives des comptes d'affectation
spéciale, est fixé à la somme de 3 125 303 000 EUR. »
- (Adopté.)
Article 43
M. le président.
« Art. 43. - I. - Il est ouvert aux ministres, pour 2003, au titre des mesures
nouvelles des opérations définitives des dépenses en capital des comptes
d'affectation spéciale, des autorisations de programme s'élevant à la somme de
7 983 770 000 EUR.
« II. - Il est ouvert aux ministres, pour 2003, au titre des mesures nouvelles
des opérations définitives des comptes d'affectation spéciale, des crédits de
paiement s'élevant à la somme de 8 463 876 500 EUR, ainsi répartie :
« Dépenses ordinaires civiles 480 106 500 EUR
« Dépenses civiles en capital 7 983 770 000 EUR
« Total 8 463 876 500 EUR. »
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, sur l'article.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le compte
d'affectation des produits de cession de titres, parts et droits de sociétés -
en résumé, le compte d'utilisation du produit des privatisations d'entreprises
publiques - est pourvu pour l'année 2003 d'un montant de recettes de 8
milliards d'euros, qui seront, de manière exclusive, affectées aux dotations en
capital aux entreprises publiques restantes.
Monsieur le ministre, je vous ai demandé ainsi qu'à M. Francis Mer, à quatre
reprises maintenant, en commission des finances ou en séance publique,
d'indiquer à quelles privatisations partielles ou totales et de quelles
entreprises correspondaient ces 8 milliards d'euros. Votre intervention il y a
quelques instants ne répond toujours pas aux questions qui ont été posées lors
de l'examen de la première partie du projet de loi de finances.
J'ai bien noté que vous aviez déclaré à nos collègues députés qu'il ne
s'agissait que d'un objectif de recettes. Mais, monsieur le ministre, vous ne
nous ferez pas croire que vous n'avez pas un programme bien précis de
privatisation. Pourquoi n'indiquez-vous donc pas à la représentation nationale
les entreprises et les participations publiques dont vous comptez défaire la
nation en priorité ?
Monsieur le ministre, je le redis, c'est une question élémentaire de
démocratie, mais nous savons maintenant, hélas ! à quelle conception
démocratique correspondent les silences du Gouvernement sur le sujet.
J'aurais voulu pouvoir le dire aussi à M. le ministre des finances, de
l'économie et de l'industrie dont l'absence, ce matin comme lors du vote de la
première partie du projet de loi de finances, est, je le crains, révélatrice de
l'attention qu'il porte au Parlement : les pratiques de la monarchie patronale
n'ont pas leur place dans la gestion du pays.
M. Pierre Hérisson.
Oh !
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Le secteur public n'est pas votre propriété, monsieur le ministre, mais celle
de la nation, dont le Parlement constitue la représentation. Vous n'avez pas
mandat pour en jouer comme à la bourse. Vous l'aviez d'ailleurs vous-même
reconnu à l'Assemblée nationale, en déclarant à propos de la réalisation des 8
milliards d'euros que dans tous les cas le Parlement serait tenu informé.
C'était le 15 novembre, soit neuf jours avant la fin de la privatisation du
Crédit lyonnais !
Le désengagement de l'Etat du Crédit lyonnais est ainsi une décision
extrêmement grave, qui répond à une vision industrielle et non, comme vous
voudriez nous le faire croire, à une vision « patrimoniale ».
Et voici que, dans la foulée, le Gouvernement vient d'annoncer qu'il allait
recapitaliser France Télécom, engluée dans les lourdes conséquences financières
de l'aventurisme mis en oeuvre par Michel Bon, à hauteur de 9 milliards de
francs.
Le nouveau PDG de France Télécom, Thierry Breton, parce qu'il ne veut
certainement pas dévier du cap fixé, celui de la privatisation définitive, est
sans doute satisfait de cette mesure, qui montre, encore une fois, ce que
signifie le fonctionnement de ce compte 902-24.
Deux questions se posent immédiatement, monsieur le ministre.
D'une part, si le produit de la cession des parts du Crédit lyonnais sert à la
recapitalisation de France Télécom, où l'Etat va-t-il « dénicher » les 6,8
milliards d'euros complémentaires ?
D'autre part, si c'est la dette publique qui est sollicitée pour « faire le
joint », qu'est-ce qui empêcherait qu'une opération identique ne soit menée
pour que l'Etat reprenne à sa charge la dette d'autres entreprises publiques,
par exemple la SNCF ou RFF ? Nous disposons encore de quelques marges de
manoeuvre, même en restant dans les limites imposées par les critères de
convergence, et il serait regrettable de nous priver d'une telle possibilité,
monsieur le ministre.
Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de bien vouloir informer le Sénat
des orientations que le Gouvernement entend prendre sur ces différents
points.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Madame Beaudeau, le Gouvernement ne souhaite absolument
rien vous cacher. Lors de mon intervention liminaire, j'ai souhaité livrer
toutes les informations relatives à la stratégie que conduit le Gouvernement en
matière d'ouverture du capital ou de cession d'actifs d'entreprises du secteur
concurrentiel. J'ai donc exposé les lignes directrices de la politique
gouvernementale.
Toutefois, je ne suis pas en mesure, madame Beaudeau, de vous dire quelles
seront les conditions de marché dans les mois qui viennent. Je peux cependant
vous assurer que le Gouvernement veillera tout particulièrement à défendre
l'intérêt patrimonial de l'Etat.
Il est par ailleurs de mon devoir de vous préciser que ces questions relèvent
de la compétence, non pas du Parlement, mais de l'exécutif, sous réserve bien
entendu que le Gouvernement obtienne les autorisations qu'il sollicite.
Pour reprendre le dernier exemple que vous avez cité, madame Beaudeau, je vous
indique que la situation du Crédit lyonnais obéit à l'interprétation des
conditions de marché et à la défense des intérêts patrimoniaux de l'Etat. On ne
peut pas faire grief au Gouvernement d'avoir une vision industrielle, comme
vous l'avez fait, madame Beaudeau ; je considère même que c'est son devoir.
S'agissant de France Télécom, je vous apporte quelques éléments d'information
supplémentaires, mais ils ne seront vraisemblablement pas à la hauteur de vos
attentes, madame Beaudeau.
Le soutien que nous apporterons à France Télécom prendra la forme d'un
renforcement substantiel de ses fonds propres et, si cela s'avère nécessaire,
dans l'intervalle, nous soutiendrons son refinancement. Ce faisant, l'Etat se
comportera en investisseur avisé dans le cadre d'une économie de marché, dans
le respect d'ailleurs des règles communautaires.
Quant à l'impact de ces opérations sur les finances publiques, je rappelle
trois éléments que vous connaissez bien, en votre qualité de membre de la
commission des finances.
En premier lieu, ces opérations d'investissement n'ont pas de conséquences sur
le déficit budgétaire au sens du traité de Maastricht.
En deuxième lieu, cet investissement sera financé par le recours à
l'endettement. La dette des administrations publiques sera donc augmentée à due
concurrence du montant de l'investissement réalisé par l'Etat dans France
Télécom.
Enfin, en troisième lieu, compte tenu du mécanisme que nous envisageons, ces
opérations n'auront pas non plus de conséquences sur l'équilibre budgétaire en
2003. La sincérité du projet de loi de finances soumis à votre vote n'est donc
pas en cause.
Dans les prochains jours, je vous l'ai dit, le Gouvernement soumettra au
Parlement les détails du plan de redressement de France Télécom et de son
financement.
M. le président.
L'amendement n° II-34, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« I. - A la fin du I de cet article, majorer la somme : "7 983 770 000 euros"
de la somme : "6 466 000 euros".
« II. - Majorer la ligne "Dépenses ordinaires civiles" du II de cet article de
13 534 000 euros.
« III. - Majorer la ligne « Dépenses civiles en capital" du II de cet article
de 6 466 000 euros.
« IV. - En conséquence, majorer la ligne "Total" du II de cet article de 20
000 000 euros. »
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
Il s'agit d'un amendement de coordination, qui tire les
conséquences d'un amendement adopté en première partie et affectant les
ressources de la deuxième section du compte « Fonds national de l'eau ».
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Paul Loridant,
rapporteur spécial.
La commission des finances ne peut que prendre acte
du vote intervenu lors de la première partie de la loi de finances.
En tant que rapporteur des comptes spéciaux du Trésor, je ne peux cependant
qu'exprimer, dans la continuité du rapport, mon désarroi, car les reports du
compte « fonds d'adduction d'eau » s'accroissent d'année en année, mais dans sa
souveraineté le Sénat n'en a pas moins décidé de majorer ses crédits.
Le Gouvernement en prend acte, et la commission des finances ne peut
qu'émettre un avis favorable sur l'amendement n° II-34.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-34.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 43, modifié.
(L'article 43 est adopté.)
II. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE TEMPORAIRE
Articles 44 à 47
M. le président.
« Art. 44. - I. - Le montant des découverts applicables, en 2003, aux services
votés des comptes de commerce est fixé à 1 936 254 800 euros.
« II. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des finances
et de l'industrie, pour 2003, au titre des services votés des comptes d'avances
du Trésor, est fixé à la somme de 57 509 890 000 euros.
« III. - Le montant des crédits ouverts au ministre de l'économie, des
finances et de l'industrie, pour 2003, au titre des services votés des comptes
de prêts, est fixé à la somme de 720 890 000 euros. »
- (Adopté.)
« Art. 45. - Il est ouvert aux ministres, pour 2003, au titre des mesures
nouvelles des opérations temporaires des comptes d'affectation spéciale, un
crédit de paiement de dépenses ordinaires de 2 519 500 euros. »
- (Adopté.)
« Art. 46. - Il est ouvert au ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, pour 2003, au titre des mesures nouvelles des comptes de prêts,
des crédits de paiement s'élevant à 794 300 000 euros. »
- (Adopté.)
« Art. 47. - Il est ouvert aux ministres, pour 2003, au titre des mesures
nouvelles des comptes de commerce, une autorisation de découvert s'élevant à
713 000 euros. »
- (Adopté.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les comptes spéciaux du Trésor.
Budget annexe des Monnaies et médailles
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le budget annexe des Monnaies et médailles.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Bertrand Auban,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le projet de budget que nous examinons
aujourd'hui est celui d'un service public entré dans un demi-sommeil, après
avoir été particulièrement sollicité depuis 1998 pour la fabrication de
l'euro.
En effet, son activité principale, la frappe de notre monnaie courante,
s'effondrera en 2003 : il ne sera plus demandé à l'établissement monétaire de
Pessac, en Gironde, que de fabriquer 400 millions de pièces d'euros. Si l'on se
souvient du pic de production de 2,7 milliards de pièces enregistré en 2000, on
prend aisément la mesure de cet effondrement.
Les crédits demandés pour 2003, quasiment divisés par deux par rapport à
l'année précédente, s'élèvent à 96 millions d'euros. Cette diminution, certes
énorme, résulte essentiellement d'un effet mécanique sur le chapitre des
achats, directement lié à l'activité de frappe, qui passe de 101 millions à 24
millions d'euros.
Les frais de personnel diminuent de 3 % et s'établissent désormais à 47
millions d'euros. Les embauches ont été gelées après les recrutements effectués
en 1997 et en 1998, et aucun départ en retraite n'est compensé. Du reste, 82
postes vacants d'ouvrier sont supprimés, ce qui ramène l'effectif autorisé à
857 postes.
Parallèlement, les recettes d'exploitation, divisées par trois, tombent à 66
millions d'euros. Quasiment privée de sa recette « administrative » provenant
de la cession des pièces de monnaie françaises au Trésor, la direction des
Monnaies et médailles dépend désormais essentiellement d'activités
commerciales, fortement concurrentielles. Certaines demeurent dans sa tradition
: c'est le cas de la fabrication des monnaies courantes étrangères, des
monnaies de collection, des médailles, des décorations, etc. D'autres s'en
éloignent un peu, comme les fontes d'art ou les créations de bijoux. Quoi qu'il
en soit, la prévision de recettes commerciales de 45 millions d'euros semble à
la fois réaliste et volontariste.
Dès lors que les recettes diminuent davantage que les dépenses, le budget
annexe, qui, depuis 1999, était présenté d'emblée en équilibre, ne peut se
passer en 2003 du recours à une subvention, d'un montant sans précédent de 30
millions d'euros, représentant le prix à payer pour sauvegarder le savoir-faire
et l'outil industriel de la Monnaie de Paris.
J'en viens aux observations, voire aux inquiétudes, que cette situation
m'inspire.
Le bon déroulement du passage à l'euro ne doit pas occulter le fait qu'il a
été demandé trop de pièces à la Monnaie de Paris, par suite d'une surestimation
de la quantité de monnaie métallique en circulation. Ainsi, 8,9 milliards de
pièces d'euros ont été produites alors que seules 5,1 milliards d'entre elles
ont été injectées dans le circuit économique, soit un surplus de 43 %.
S'agissant du projet de budget pour 2003, il n'est pas exclu que certains
chapitres de dépenses soient surestimés et fassent ultérieurement l'objet
d'annulations de crédits.
On ne peut nier un effort d'adaptation à la récession, notamment une gestion
rationalisée des ressources humaines qui, au-delà des suppressions de postes,
porte sur le développement de la polyvalence, le recentrage sur les métiers de
la monnaie, ainsi que sur de possibles redéploiements de fonctionnaires
d'administration centrale au sein du ministère de tutelle.
Par ailleurs, une réorganisation des activités devrait permettre la
rentabilisation des plus porteuses - je précise que certaines d'entre elles ont
déjà été transférées de Paris vers l'établissement monétaire de Pessac,
aujourd'hui surdimensionné - et la disparition des activités structurellement
déficitaires.
Enfin, une réflexion approfondie sur les achats a conduit à des progrès en
termes d'expression des besoins, de gestion des délais, d'application des
procédures, et à l'utilisation plus systématique des techniques de négociation.
En outre, la démonétisation du franc devrait favoriser la reconstitution, à bon
prix, de stocks de métaux et d'alliages.
Ces orientations sont bonnes, mais des synergies devraient pouvoir être
trouvées, notamment avec la direction du Trésor et la Banque de France, pour
lesquelles la direction des Monnaies et médailles doit rester un prestataire
prioritaire de services.
Je voudrais maintenant évoquer la stratégie commerciale de la Monnaie de
Paris. Remporter de nouveaux appels d'offres de monnaies courantes étrangères
est indispensable, mais non suffisant. Consciente de cela, la direction des
Monnaies et médailles veut attirer les collectionneurs et amateurs de
productions d'art. Son idée-force est de faire de la Monnaie de Paris un centre
de création artistique, en exploitant au mieux le concept de marque « Monnaie
de Paris ». Ce défi, certes à la hauteur du savoir-faire de cet établissement,
constitue néanmoins un pari risqué en termes de compétitivité des prix.
Incontestablement, l'avenir de la Monnaie de Paris est préoccupant. Celle-ci
est menacée jusque dans ses activités monopolistiques : nul ne sait aujourd'hui
si tous les instituts monétaires européens survivront au sein de l'Europe.
Par ailleurs, une réflexion s'impose sur les conséquences du recours au
porte-monnaie électronique, utilisable pour les paiements d'au plus trente
euros. Estimé coûteux aujourd'hui, le porte-monnaie électronique peut, à terme,
être jugé pratique et sûr. Le recours à cette monnaie virtuelle ralentirait
alors significativement la circulation, et donc la fabrication, des pièces
métalliques.
Monsieur le ministre, dans le contexte de vide de l'« après euro », comment
percevez-vous l'avenir de la direction des Monnaies et médailles, dont le
personnel est aujourd'hui quelque peu désorienté ? Sous réserve de ces
observations, il est proposé au Sénat d'adopter les crédits du budget annexe
des Monnaies et médailles.
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais
formuler, en préambule, une réflexion à caractère général et républicain.
Chaque année, le Parlement examine la situation des institutions ou emblèmes
républicains au travers de leurs projets de budget, qu'il s'agisse du
Journal officiel
, journal de la République, de la Légion d'honneur,
emblème et récompense des républiques et même, jadis, du Consulat, des palmes
académiques, emblème des récompenses de l'éducation et de la culture
républicaines, du Conseil d'Etat, structure suprême du jugement républicain,
mais aussi des Monnaies et médailles de l'Etat républicain.
Je constate que ces institutions demeurent car elles sont capables de
s'adapter aux changements entraînés par l'évolution de la République, ou plutôt
des républiques. C'est le cas des Monnaies et médailles.
Il est une théorie devenue étonnante, peut-être même révolutionnaire. Dans un
ouvrage qui vient d'être publié,
La Tragédie monétaire,
que vous pouvez
trouver à la bibliothèque du Sénat, Pierre Lecomte démontre que « l'idée de
l'étalon-or est une idée fondatrice de justice, de liberté et de prospérité ».
Il ajoute qu'« elle ne pourra jamais disparaître parce qu'elle est
incontournable, tant pour réguler la mondialisation que pour rétablir la
stabilité monétaire et financière internationale ».
Bien entendu, je n'accepte pas forcément toute cette théorie, mais elle induit
une idée forte, à savoir que les monnaies ne laisseront pas la nation « la plus
riche du monde conserver le privilège d'émettre la monnaie internationale et de
pouvoir acheter une partie importante des biens du monde avec du simple papier
».
Les Monnaies et médailles ont toujours su s'adapter. Avec le passage à l'euro,
l'Hôtel des Monnaies et médailles était, aux yeux de certains, voué à la
disparition. Son bilan est remarquable et le rapport de M. Bertrand Auban
indique que « le programme de frappe initialement prévu à 7,6 milliards de
pièces a été porté à 8,141 milliards de pièces ». A la fin de 2001, la
direction des Monnaies et médailles avait atteint l'objectif à 96 %. Mais, en
2003, la production nationale se réduira de près de 64 %. En revanche, la
Monnaie de Paris affiche une prévision de production de 15 % des pièces «
Europe 2003 », des séries de pièces courantes françaises et de pièces «
commémoratives », dont celles du Tour de France.
D'autres autouts existent, grâce aux séries « belle épreuve » et « brillant
universel » commandées par Monaco. Du savoir-faire des Monnaies et médailles
résultent des commandes comme celles de la Grèce, de la Polynésie française et
de la Nouvelle-Calédonie.
Devra également apparaître, sous forme de crédits et recettes, la progression
du chiffre d'affaires export, portant sur les poinçons, les cachets de douanes
et les timbres secs. Des marchés nouveaux, y compris européens, s'offrent aux
Monnaies et médailles : la direction ne doit-elle pas se montrer plus
ambitieuse ? La subvention d'Etat de 30 millions d'euros doit s'accompagner de
projets, non pas seulement pour l'établissement parisien, mais aussi pour
l'établissement monétaire, davantage fragilisé, de Pessac.
Il a été indiqué tout à l'heure que la réduction de 3,5 millions d'euros des
crédits serait largement supportable par le budget des Monnaies et médailles.
Je proteste contre cette vision des choses.
Premièrement, ce sont exclusivement les personnels qui feront les frais de
cette réduction portant notamment sur les salaires et les indemnités. Cela est
injuste : vous décidez à l'avance que les crédits destinés à financer les
dépenses de personnel seraient trop importants. Cela signifie également que
vous n'avez nullement confiance dans le plan de relance de l'administration des
Monnaies et médailles, qui, avec le personnel, a l'intention de se battre pour
redresser une situation loin d'être définitivement compromise.
Avant d'aborder les possibilités de développement et de renouveau, je voudrais
attirer l'attention sur la situation assez dramatique dans laquelle se trouve
plongé l'Hôtel des Monnaies et médailles : le laminoir de Pessac est arrêté ;
quatre-vingt-deux départs à la retraite ne sont pas compensés ; les acquis
sociaux sont remis en cause ; les salaires sont insuffisamment revalorisés.
Cette année, le projet de budget est très insuffisant, comme l'est,
notoirement, la subvention de 30 millions d'euros, pour répondre à la crise que
traversent les Monnaies et médailles.
Le projet de budget annexe des Monnaies et médailles présente des prévisions
de dépenses divisées par deux par rapport à 2001. Elles s'élèvent à 96,4
millions d'euros, en diminution de 86,4 millions d'euros par rapport à 2002.
Les crédits du chapitre « achats » décroissent de 76,5 %, la baisse atteignant
89 % pour l'établissement de Pessac. Quant aux recettes, divisées par trois,
elles s'établissent à 66 millions d'euros.
Pour aggraver cette situation déjà inquiétante, vous proposez une réduction
des crédits. Pour la Monnaie, votre proposition de réduction de 3,5 millions
d'euros des crédits affectera quatre chapitres : 1,5 million d'euros au titre
des charges, le même montant au titre des traitements externes, 0,2 million
d'euros de primes et indemnités et 0,3 million d'euros au titre des prestations
et cotisations sociales.
Comment l'Hôtel des Monnaies et médailles, privé des aides nécessaires et
victime maintenant de ce mauvais coup, pourra-t-il envisager son redressement ?
Car ce redressement est possible ! N'y aurait-il que M. Marini pour ne pas y
croire ?
Avec cette nouvelle proposition, on aggrave la situation des Monnaies et
médailles et on ruine l'espoir justifié par un plan de reclassement que
présente de façon encore trop timide la direction des Monnaies et médailles,
ainsi que l'action des organisations syndicales ; qui croient en une
possibilité de renouveau des Monnaies et médailles, de même que M. le
rapporteur spécial et les membres du groupe communiste républicain et
citoyen.
J'ai rencontré les représentants des salariés : ils sont conscients de la
gravité de la situation, mais aussi de l'existence de possibilités réelles, qui
peuvent se révéler fécondes.
Premièrement, il convient de conserver l'unité de l'Hôtel des Monnaies et
médailles, en développant les deux sites de Paris et de Pessac de façon
complémentaire, ainsi que l'ensemble de l'outil de travail.
Deuxièmement, une offre internationale doit se développer. Le savoir-faire des
ouvriers, des créateurs, peut-être mis au service d'autres pays, dans le cadre
d'une coopération à mettre en place.
Troisièmement, la nécessité de créer et de produire de nouvelles petites
pièces mieux étudiées apparaît. Autant les pièces d'un euro et de deux euros
sont réussies, fonctionnelles et admises, autant les plus petites seront à
revoir. Il faudra d'ailleurs peut-être en accroître le nombre.
Quatrièmement, ne faut-il pas maintenir l'exclusivité de la fabrication des
médailles officielles, du type de la Légion d'honneur ?
Cinquièmement, la qualité des petites pièces est loin d'être parfaite. Un tri
régulier des pièces endommagées est nécessaire. Un service de la Monnaie ne
devrait-il pas s'en charger ?
Sixièmement, la livraison des pièces ne devrait-elle pas également revenir à
la Monnaie ?
Septièmement, en matière artistique, Paris ne peut-il pas développer la
fabrication des médailles commémoratives destinées à la désignation
d'établissements ? A cet égard, il existe un savoir-faire exceptionnel, qui
reste à valoriser.
Les pistes de recherche ne manquent pas. Je constate, au nom du groupe
communiste républicain et citoyen, que le Gouvernement n'a pas la volonté
d'aller assez loin, assez vite pour les explorer. Notre groupe ne votera donc
pas ce projet de budget, qui a été encore amputé par rapport aux propositions
initiales.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire.
J'indique, pour la
troisième fois, que je répondrai au rapporteur spécial conformément au principe
retenu pour la discussion modernisée de la deuxième partie du projet de loi de
finances.
Je voudrais tout d'abord dire à M. Bertrand Auban que j'ai retrouvé, dans son
rapport, la qualité maintenant légendaire des travaux de la commission des
finances.
Je soulignerai que la direction des Monnaies et médailles tient compte de
l'évolution de la circulation des moyens monétaires, qui a abouti à une
véritable contraction, constatée dans l'ensemble de la zone euro à partir du
début de l'année 2002. Elle a d'ailleurs démontré sa capacité à adapter son
outil de production à la première mise en circulation de l'euro et à réaliser
des programmes de frappe tout à fait exceptionnels, qui font notre fierté. Je
tenais à insister sur ce point.
Ce phénomène de contraction de la circulation fiduciaire a d'ailleurs concerné
les pièces comme les billets. Il est probable que les encaisses dormantes,
c'est-à-dire les pièces stockées, pour des raisons diverses, par les
particuliers, les commerçants, les entreprises ou les banques, et qui
représentent traditionnellement une part importante de la circulation
fiduciaire, se reconstituent très lentement. C'est, en tout cas, l'explication
que nous avons trouvée à cette situation.
Alors qu'il était prévu de frapper, en 2002, 2,1 milliards d'euros
métalliques, ce contingent a été ramené à 1,1 milliard d'euros pour tenir
compte des besoins réels. En 2003, le programme de frappe des monnaies
courantes françaises atteindra, au total, 400 millions d'euros métalliques,
avec des valeurs faciales comprises entre un et dix centimes.
Une telle réduction d'activité impose donc la recherche de solutions pérennes,
qui permettent aux Monnaies et médailles de sauvegarder leur savoir-faire
séculaire, tout en s'adaptant aux réalités économiques d'aujourd'hui et de
demain.
Quels sont les objectifs de la direction des Monnaies et médailles ?
L'évolution économique, qui s'inscrit dans la durée, appelle des mesures
adaptées conduisant à résorber le déficit de l'activité concurrentielle et à
redimensionner l'établissement monétaire de Pessac. En pratique, un certain
nombre d'orientations, différenciées selon les sites, sont d'ores et déjà mises
en oeuvre.
Pour le site de Pessac, un plan d'urgence a été mis en place, s'articulant
autour de trois axes : la préservation de l'emploi, la sauvegarde du
savoir-faire industriel et la préférence donnée à l'emploi industriel sur
l'emploi administratif.
Pour l'établissement parisien, l'analyse du déficit structurel de
l'établissement a été engagée, par le biais de l'examen de la rentabilité des
produits du secteur concurrentiel et de l'amélioration de leur
commercialisation.
Ces mesures visent à compléter l'action déterminée que la direction des
Monnaies et médailles a entreprise en vue de réduire le déficit prévisionnel
pour l'année 2003.
Sur le fond, M. le rapporteur spécial m'a demandé de tracer des perspectives
d'avenir pour les Monnaies et médailles, après la frappe de l'euro. Je lui
répondrai que la direction des Monnaies et médailles veille à ce que le
savoir-faire des établissements soit sauvegardé. Néanmoins, personne n'échappe,
c'est la loi de l'économie, à l'obligation de recentrer son activité sur ses
métiers de base, notamment, en l'occurrence, sur la mission de frappe des
monnaies métalliques.
Dans un contexte de surcapacité provoquée par l'introduction de l'euro, le
marché international est devenu de plus en plus difficile. Cependant, des
besoins existent et la Monnaie de Paris optimisera tous les éléments de coût
qui entrent dans la détermination de ses prix, ce qui, au fond, représente la
meilleure chance d'améliorer sa performance.
Le transfert à Pessac des activités liées au domaine monétaire est d'ores et
déjà engagé. S'agissant de l'établissement parisien, la résorption de son
déficit structurel constituera le principal défi à relever. Il conviendra
d'évaluer rapidement la rentabilité relative, comme je le disais tout à
l'heure, des activités commerciales de la Monnaie de Paris qui s'exercent dans
le secteur concurrentiel, afin de rectifier la situation existante, en tant que
de besoin, et de rétablir un niveau normal et acceptable de productivité pour
de telles activités.
Pour conclure, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais vous dire que je
me réjouis du très vif souci de concertation que manifeste le nouveau directeur
des Monnaies et médailles, dont je salue d'ailleurs la présence au banc du
Gouvernement, afin que l'évolution de ce service public puisse se poursuivre,
au terme de la frappe de l'euro, dans les meilleures conditions et à la
satisfaction de tous.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des Républicains et
Indépendants et du RPR.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget
annexe des Monnaies et Médailles et figurant aux articles 40 et 41 du projet de
loi.
Services votés
M. le président.
« Crédits : 176 770 083 euros. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 40, au titre des services
votés.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 3 544 000 euros ;
II. - Crédits :
moins
80 369 048 euros. »
L'amendement n° II-42, présenté par MM. Arthuis et Marini, au nom de la
commission des finances, est ainsi libellé :
« Dans le II de cet article, augmenter la réduction de crédits de la ligne "
Monnaies et Médailles " de 3 500 000 euros.
« « En conséquence, porter le montant de cette ligne à
moins
83 869 048
euros. »
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
La commission des finances propose de tirer les
conséquences du vote d'un amendement tendant à réduire de 3,5 millions d'euros
la subvention inscrite au titre III des services financiers et concernant le
budget annexe des Monnaies et médailles. Il s'agit donc de la contrepartie du
vote émis par le Sénat au début de la matinée.
La répartition de cette économie est la suivante : 1,5 million d'euros sur le
chapitre 61-00, Autres charges externes ; 1,5 million d'euros sur le chapitre
64-02, Traitements, c'est-à-dire les primes liées au régime indiciaire ; 200
000 euros sur le chapitre 64-03, Primes et indemnités ; 300 000 euros sur le
chapitre 64-05, Prestations et cotisations sociales - c'est la conséquence des
mesures que je viens d'énoncer.
J'ai bien entendu Mme Beaudeau mais également M. le ministre. Nous sommes tous
très admiratifs à l'endroit des grands professionnels des Monnaies et
médailles. Au moment où nous célébrons les métiers d'art, nous pouvons
considérer qu'il y a là une démarche tout à fait originale et un capital qu'il
faut absolument préserver. Mais cet établissement a des contraintes de gestion.
Quelle entreprise constatant la réduction de la moitié de ses achats et des
deux tiers de son chiffre d'affaires pourrait maintenir quasiment en l'état ses
effectifs ?
Madame Beaudeau, je vous en prie, sortons de l'incantation et de
l'hallucination ! Certes, il faut faire preuve de beaucoup d'humanité dans le
traitement de ce dossier, mais je ne vois pas ce qui pourrait justifier que
l'Etat demande 30 millions d'impôts pour laisser en l'état cette
organisation.
Le Sénat, lui aussi, fait confiance à la direction et à l'ensemble des
professionnels des Monnaies et médailles pour s'adapter aux circonstances
nouvelles et pour maintenir, bien sûr, le potentiel professionnel de cet
établissement, tout en assumant une décision de gestion qui est incontournable.
(MM. Auguste Cazalet et Jean Chérioux applaudissent.)
M. Pierre Hérisson.
Très bien !
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau, pour explication de vote.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je note que le Gouvernement avait prévu, sur la demande de la direction des
Monnaies et médailles, une subvention de 30 millions d'euros pour le
fonctionnement de cet établissement. C'est vous, monsieur le président de la
commission des finances, qui, avec M. le rapporteur général, proposez une
diminution de 10 % des crédits des Monnaies et médailles qui ne concerne que le
personnel.
C'est pourquoi, je le rappelle, nous voterons contre votre proposition.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Madame Beaudeau, le Gouvernement
est certainement très touché par les arbitrages auxquels vous faites référence
mais, de toute façon, vous ne votez pas les crédits, en toute circonstance.
(Mme Marie-Claude Beaudeau s'exclame.)
Ce qui est nouveau, c'est que nous avons dû faire le constat réaliste que les
recettes diminueraient de 700 millions d'euros en 2003. Il s'agit d'une
constatation récente, puisqu'il n'en avait pas été fait état à l'Assemblée
nationale lors de l'examen du présent projet de loi de finances. C'est donc une
nouveauté. Qui pourrait, constatant une baisse de ses recettes, maintenair en
l'état ses dépenses ? Voter le montant des crédits mis à la disposition du
Gouvernement, c'est le devoir, l'exigence, la prérogative du Parlement, et nous
assumons notre responsabilité.
Fallait-il réduire les crédits prévus pour les RMIstes ?
(Mme Marie-Claude
Beaudeau s'exclame à nouveau.)
Ou bien fallait-il demander aux Monnaies et
médailles de faire un petit effort ? Nous avons fait ce choix, et nous
proposons au Sénat de l'adopter.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Je vous ferai remarquer que, l'année dernière, vous ne votiez pas les crédits
!
M. le président.
La parole est à M. Bernard Auban, pour explication de vote.
M. Bertrand Auban.
Nous admirons tous le savoir-faire de cet établissement et nous voulons tous
le pérenniser et le maintenir dans son état de production. Aussi, il aurait été
souhaitable non pas de réduire les crédits inscrits dans le projet de loi de
finances, mais de laisser à l'administration et à la direction des Monnaies et
médailles le soin de rendre d'éventuels reliquats - je dis bien « éventuels »
car il ne s'agit pas d'une science exacte, ce sont des prévisions, en annulant
des crédits.
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Alain Lambert,
ministre délégué.
CommeM. Bertrand Auban l'a dit, ce sont des crédits que
l'on ouvre. Pour des gestionnaires publics, le but n'est pas de consommer
systématiquement tous les crédits qui sont ouverts. Si nous entrions dans cette
démarche, ce serait, bien sûr, très inquiétant.
Je voulais simplement indiquer à Mme Beaudeau qu'entre le moment où le projet
de loi de finances est élaboré et le moment où il est examiné par le Parlement
il s'écoule plusieurs mois pendant lesquels peuvent survenir des éléments
nouveaux. C'est vrai sur le plan des recettes fiscales, puisque nous sommes
obligés de constater des moins-values. Mais il y a également des informations
qui sont relatives à l'ensemble des données. Ainsi, parmi les agents qui
appartiennent à l'administration centrale, certains rejoindront leur corps
d'origine. C'est ce qui m'a permis d'émettre tout à l'heure un avis favorable,
car je considère que la subvention qui a été initialement prévue et qui a fait
l'objet de l'amendement présenté par la commission des finances devrait couvrir
les besoins de financement des Monnaies et médailles.
Il n'y a donc pas lieu, me semble-t-il, de s'inquiéter de cette réduction. Ce
qui compte, c'est que les Monnaies et médailles puissent avoir les moyens
d'assumer leur mission. Le véritable enjeu, c'est, à l'évidence, la
performance, et nous fondons de très grands espoirs à cet égard.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-42.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix, modifiés, les crédits inscrits à l'article 41, au titre des
mesures nouvelles.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le budget annexe des Monnaies et médailles.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à quinze heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quinze heures quinze,
sous la présidence de M. Bernard Angels.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté
par l'Assemblée nationale.
Economie, finances et industrie
(suite)
INDUSTRIE
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
l'industrie.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, madame le
ministre, mes chers collègues, nous avons assisté ces dernières années à la
disparition progressive de ce qui fut le ministère de l'industrie.
Le bas de la courbe a été atteint avec le premier gouvernement de M.
Jean-Pierre Raffarin, qui ne comportait pas de ministère de l'industrie.
Heureusement, le second, grâce à vous, madame, a retrouvé un ministre, même
s'il n'a pas pour autant retrouvé un budget, mais nous y reviendrons.
Au sein du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le
ministre de l'industrie a sous son autorité quatre directions, dont trois
seulement sont générales. On ne comprend guère pourquoi, mais c'est ainsi !
Il s'agit tout d'abord de la direction générale de l'énergie et des matières
premières, qui supervisait le nucléaire jusqu'en février 2002, date à laquelle
elle a perdu le contrôle de la sécurité. Cette direction est également
compétente pour les hydrocarbures, le gaz, l'électricité, le charbon et les
énergies renouvelables.
Il s'agit ensuite de la direction générale de l'industrie, des technologies,
de l'information et des postes. On peut, là aussi, se demander ce que font les
postes au sein du ministère de l'industrie !
Il s'agit encore de la direction - cette fois - non générale, elle, de
l'action régionale et de la petite et moyenne industrie.
Enfin, le 22 février dernier a été créée une nouvelle direction générale de la
sûreté nucléaire et de la radioprotection, qui assure le contrôle de la sûreté
nucléaire et de la radioprotection, hors défense.
De surcroît existent dans les régions les directions régionales de
l'industrie, de la recherche et de l'environnement, les DRIRE, placées sous
l'autorité conjointe de Mme la ministre déléguée à l'industrie et de Mme la
ministre de l'écologie et du développement durable.
Voilà pour la structure administrative.
J'en viens à la présentation financière.
Ainsi que je l'ai précisé, il n'y a pas de budget. Pour trouver les crédits
alloués au ministère de l'industrie, il faut fouiller dans les agrégats : on
finit par trouver un agrégat 21, puis un agrégat 22, suivis d'un agrégat 23 et,
enfin, d'un agrégat 24, auxquels s'ajoute l'agrégat mixte 18, créé cette
année.
L'agrégat 18 concerne les services de l'action régionale pour la sécurité et
la compétitivité industrielles ; l'agrégat 21, l'énergie, hors charbon ;
l'agrégat 22, les PMI, la recherche et l'innovation ; l'agrégat 23, la
formation, les télécommunications et « divers ». Ce mot : « divers » pourrait
être employé plus souvent dans cette liste d'agrégats, tant leur contenu,
effectivement, est bien divers !
Enfin, l'agrégat 24 concerne les reconversions et les restructurations.
Au total, les quatre agrégats purement industriels représentent 2,5 milliards
d'euros.
Si l'on tente - exercice habituel - d'établir une comparaison d'une année sur
l'autre, on relève, en valeur absolue, une augmentation de 7 %. Il est
cependant difficile d'accorder une signification précise à ce chiffre, car les
agrégats du ministère de l'industrie multiplient les reports et les
annulations, si bien que l'on est à peu près certain de ne pas trouver à la
sortie ce que l'on avait enregistré à l'entrée.
L'exemple le plus frappant en est donné par l'affectation au budget de
l'industrie de 200 millions d'euros se substituant à l'impôt sur le revenu des
personnes physiques pour alimenter l'Institut français du pétrole. Hormis cette
somme, l'augmentation atteint 1,6 % : elle est donc à peu près équivalente à
celle que l'on constate pour un grand nombre de budgets.
Votre budget, madame le ministre, est très « plombé », si j'ose m'exprimer
ainsi, par le poids de l'énergie : aux Charbonnages de France sont affectés 444
millions d'euros, et 428 millions d'euros au Commissariat à l'énergie atomique,
le CEA. Les Charbonnages sont tournés vers le passé, alors que le CEA est
tourné vers l'avenir. Ensemble, ces deux organismes mobilisent entre 38 % et 40
% de vos crédits. Ce sont là les données les plus significatives.
Quelles autres variations méritent d'être signalées, outre les 200 millions
d'euros de l'Institut français du pétrole ?
A l'agrégat 22 figure une forte baisse - de 22 % - de la recherche
industrielle et de l'innovation, ce qui pourrait évidemment faire sursauter si
l'on ignorait que cet agrégat croule sous le poids des reports.
Autre variation intéressante : à la suite d'une décision prise à Bruxelles,
nous constatons la suppression des autorisations de programme des constructions
navales. On fait beaucoup de choses à Bruxelles, y compris supprimer les
autorisations de programme des constructions navales !
Il s'ensuit, dans ce même domaine, la reconduction des crédits de paiement.
S'agissant des autres aspects de ce projet de budget, il convient de se
reporter au rapport qui vous a été remis.
En conclusion, je soulignerai que cette accumulation de crédits disparates et
variant d'une année à l'autre ne saurait donner une véritable idée de l'apport
public à la politique industrielle de la France. Voilà plusieurs exercices que
je fais cette constatation, d'abord devant vos prédécesseurs, et maintenant
devant vous, madame la ministre, mais en vain. Il reste toujours à chiffrer la
participation des fonds publics à la politique industrielle de la France ;
peut-être l'année prochaine, si nous nous trouvons de nouveau face à face,
pourrez-vous enfin me donner une réponse ?
Ces crédits ont été approuvés, mais ce ne sont, encore une fois, que des
éléments du budget plus général du ministère des finances. C'est sur celui-ci
qu'interviendra le vote final.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Pierre Hérisson, rapporteur pour avis.
M. Pierre Hérisson,
en remplacement de M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission
des affaires économiques et du Plan, pour l'industrie.
Monsieur le
président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais présenter le
rapport sur les crédits consacrés à l'industrie en vous demandant de bien
vouloir excuser mon collègue Francis Grignon, qui est retenu à Strasbourg
aujourd'hui.
Les crédits consacrés à l'industrie dans le projet de loi de finances pour
2003 hors postes et télécommunications enregistrent une légère diminution de
1,66 % par rapport à 2002 et s'établissent à 1 830 millions d'euros. Les
autorisations de programme sont, en revanche, presque stables.
Toutefois, ce projet de budget a été élaboré avec l'ambition de renforcer la
compétitivité des entreprises françaises grâce à une politique active en faveur
de l'innovation et de la recherche.
Une attention toute particulière est donnée au soutien aux petites et moyennes
industries, et les capacités d'intervention en leur faveur sont maintenues à un
haut niveau en 2003, soit 236 millions d'euros. Ces actions sont désormais
intégralement contractualisées dans le cadre des contrats de plan
Etat-région.
Ce projet de budget vise également à accompagner les entreprises et les
régions victimes de sinistres industriels. Ainsi, les crédits accordés aux
restructurations industrielles enregistrent une hausse importante. En effet,
vous nous proposez, madame la ministre, un doublement de ces dotations.
Je voudrais maintenant faire quelques observations sur des secteurs
industriels spécifiques.
Par rapport à la situation difficile dans laquelle se trouvent les industries
du textile et de l'habillement, je voudrais me féliciter des mesures que vous
avez annoncées, madame la ministre, en faveur de ce secteur, à l'occasion de la
question orale avec débat posée par M. Christian Poncelet, président du
Sénat.
Par ailleurs, l'industrie sidérurgique européenne est au coeur d'un conflit
commercial avec les Etats-Unis, du fait de la hausse des droits de douane
décidée par le gouvernement américain en mars dernier. L'Union européenne
avait, dans des délais remarquables, adopté un plan de riposte visant à
surtaxer toute une gamme de produits importés des Etats-Unis, même si ce plan
n'a pas trouvé à s'appliquer pour le moment. En outre, un contentieux est en
cours auprès de l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce. Il devrait aboutir
au cours du printemps 2003. Il conviendra donc d'être vigilant à l'issue de ce
conflit.
Je dirai également un mot de l'industrie automobile et de l'évolution du
régime de la distribution en Europe.
La commission des affaires économiques a déjà eu l'occasion d'étudier ce
dossier en mai dernier, lors de l'examen de la proposition de résolution
déposée par notre collègue Francis Grignon. Malgré les démarches de la
commission des affaires économiques, la Commission européenne a très peu
infléchi sa position initiale.
L'examen de ce dossier a permis de voir que les pouvoirs de la Commission
européenne en matière de concurrence sont sûrement, en tout cas probablement,
disproportionnés. Il appartiendra à la Convention sur l'avenir de l'Union
européenne de prendre ce problème à bras le corps. En effet, il n'est pas
normal que l'avis des Etats membres, plus particulièrement des parlements, ne
soit pas pris en compte sur de tels sujets, qui peuvent engendrer des
conséquences dévastatrices, telle la fragilisation de l'industrie automobile,
dans ce secteur d'activité de première importance dans un pays comme la
France.
Sur la question des brevets, je précise simplement que l'accord de Londres,
qui devrait permettre une baisse du coût du brevet européen, devrait être
ratifié très prochainement. Il importera d'être attentif aux mesures qui seront
proposées pour accompagner cette ratification et qui viseront à soutenir le
dépôt de brevets par les entreprises et les centres de recherche.
Enfin, je souhaite dire un mot des actions prévues en faveur de la
normalisation et du développement de la qualité.
L'association française de normalisation est placée au coeur du système de
normalisation français. Elle est chargée d'une mission générale de recensement
des besoins en normes nouvelles et de représentation des intérêts français dans
les instances internationales de normalisation.
La définition des normes internationales et européennes constitue un enjeu
majeur dans la compétition économique de demain, car leur respect constitue le
meilleur gage de compétition loyale entre les entreprises.
Or l'influence française dans la définition des normes européennes et
internationales semble en perte de vitesse, même si un plan stratégique pour
l'AFNOR a été défini pour la période 2002-2005 afin de renforcer cette
influence. En effet, trop souvent les normes constituent des freins au
développement de l'activité de nos entreprises et de nos industries. Il
conviendra donc d'être attentif à l'évolution de cette question.
Compte tenu de tous ces éléments et des nouvelles orientations impulsées par
le Gouvernement en matière de politique industrielle, j'émets, mes chers
collègues, au nom de la commission des affaires économiques et du Plan, un avis
favorable pour l'adoption de ces crédits.
(Applaudissements sur les travées
de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Je vous donne de nouveau la parole, monsieur Hérisson, pour présenter votre
rapport sur les technologies de l'information et de la poste.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour les technologies de l'information et La Poste.
Je ne m'attarderai pas
sur l'examen des 437 millions d'euros que le projet de loi de finances pour
2003 prévoit, comme l'an passé et selon une présentation très éclatée, de
consacrer au secteur des postes et télécommunications.
La vraie nouveauté du budget pour 2003 est ailleurs : elle se trouve à
l'article 13 de la première partie du projet de loi de finances. Cet article
prévoit enfin, après cinq ans de promesses non tenues, de normaliser la
fiscalité locale de France Télécom, c'est-à-dire d'imposer l'entreprise pour
chaque établissement ou propriété.
Je souligne l'immense mérite de cet article qui met fin à une anomalie, à
savoir l'affectation directe au budget de l'Etat de recettes fiscales d'origine
locale. Il met aussi fin, sans alourdir pour autant la charge fiscale de
l'opérateur historique, à la distorsion de concurrence qui le pénalisait par
rapport à ses concurrents. En outre, le dispositif prévu à cet article
maintient le niveau de la péréquation.
Madame la ministre, je vous sais gré d'avoir engagé cette réforme. Toutefois,
en qualité de vice-président de l'Association des maires de France, je ne peux
pas céder à l'illusion du trompe-l'oeil puisqu'un impôt local continuera
d'alimenter indirectement les caisses de l'Etat.
En effet, l'Etat reprend d'une main ce qu'il rend de l'autre, alors même que
les collectivités subissent des transferts de charges considérables en matière
d'aménagement numérique du territoire. Il ne reste, évidemment, qu'à déplorer
que le précédent gouvernement ait laissé derrière lui les finances publiques
dans un état tel que le Gouvernement en soit réduit à neutraliser l'opération
pour le budget de l'Etat.
La faible incidence budgétaire des postes et télécommunications contraste avec
l'importance considérable de ces secteurs pour les clients, usagers et
contribuables.
J'évoquerai d'abord les fortes turbulences traversées par les acteurs du
secteur des télécommunications.
Je considérerai d'abord les opérateurs, au premier rang desquels l'opérateur
historique, dont le bilan est très dégradé - une dette colossale de 70
milliards d'euros, 12 milliards d'euros de provisions exceptionnelles - mais la
performance opérationnelle indéniable.
Afin de parer à la crise de financement qu'annoncent les fonds propres
négatifs, M. Thierry Breton finalise avec vous un plan de redressement, que
notre assemblée examinera de près, en étant tout spécialement attentive à ses
prolongements législatifs éventuels, ainsi qu'à son « euro-compatibilité ».
L'avance d'actionnaire de 9 milliards d'euros annoncée ce matin aura-t-elle la
bénédiction de Bruxelles ?
La situation des équipementiers de télécommunications est tout aussi
préoccupante et l'horizon fuyant de l'UMTS - universal mobile telecommunication
system - ne permet pas d'espérer une amélioration.
Pourtant, le marché des télécommunications a encore connu en 2001 une
croissance à deux chiffres, soutenue par les mobiles et par Internet.
Cependant, le développement des télécoms se trouve encore entravé : d'une
part, par l'enlisement du dégroupage, dont on peut espérer que la nouvelle
offre de référence de France Télécom permettra enfin de sortir ; d'autre part,
et sur un autre registre, par l'inquiétude croissante des populations quant aux
risques supposés de la téléphonie mobile pour la santé.
Enfin, ce développement doit être mis au service de l'aménagement du
territoire.
La proposition de loi sénatoriale, que je vous remercie d'avoir soutenue,
madame la ministre, est une étape importante vers la couverture en téléphonie
mobile des centres-bourgs et vers une meilleure couverture de l'ensemble du
territoire. Mais il nous faut également favoriser, peut-être en l'intégrant
dans le service universel, l'accès de tous au haut débit. Je salue à cet égard
l'impulsion donnée par le Premier ministre.
L'année 2002 aura également été décisive pour La Poste. Une nouvelle directive
européenne programme désormais l'ouverture à la concurrence en trois étapes :
2003, c'est-à-dire demain, puis 2006, enfin la libéralisation totale en 2009,
cette dernière étant à confirmer.
Or notre opérateur postal, avec lequel il nous faudra travailler dans le cadre
d'un contrat de plan qui permette une véritable modernisation sur le
territoire, n'a pas profité des années passées pour se préparer, enregistrant
même une perte pour l'exercice 2001.
Outre les échéances européennes, La Poste se trouve aussi devant la nécessité
de renégocier les accords Galmot, relatifs au service public de transport de la
presse. Surtout, c'est l'arrivée à échéance du contrat de plan entre l'Etat et
La Poste qui offre l'opportunité de moderniser cette entreprise publique, qui
est la première entreprise de main-d'oeuvre de notre territoire.
Il s'agit là d'un enjeu majeur pour l'avenir de cette grande entreprise
publique, qui doit retrouver un équilibre entre ses trois métiers que sont le
courrier, les activités financières et, bien évidemment, les services du
colis.
Dans cette perspective, je regrette que La Poste, entreprise de main-d'oeuvre
par excellence, se trouve exclue des mesures d'allégement de charges sociales
sur les salaires prévues par le projet de loi Fillon. Afin que le handicap
concurrentiel de La Poste ne se trouve pas aggravé, ce sujet devra être abordé
lors de la négociation du contrat de plan.
J'insiste, madame la ministre, sur l'importance décisive de ce contrat de
plan, qui devra être préparé sans précipitation et dans une grande transparence
avec le Parlement.
Vous savez que la commission des affaires économiques n'a pas attendu que La
Poste soit au pied du mur pour réclamer une grande loi d'orientation postale,
indispensable notamment pour régler le dossier des retraites et prévoir le
financement de l'aménagement postal du territoire. Je rappelle, à cet égard, le
rapport tout à fait remarquable du président de la commission des affaires
économiques, notre collègue Gérard Larcher.
Je conclurai en indiquant que la commission des affaires économiques et du
Plan a émis un avis favorable sur les crédits relatifs à La Poste et aux
technologies de l'information figurant dans le projet de budget pour 2003.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Roland Courteau, rapporteur pour avis.
M. Roland Courteau,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan,
pour l'énergie.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers
collègues, qu'il me soit tout d'abord permis de saluer le remarquable travail
effectué par mon prédécesseur, Jean Besson, en cette fonction de rapporteur.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
Cette année, l'attention de notre commission des affaires économiques s'est
portée sur quatre sujets d'importance.
Le premier d'entre eux concerne la libéralisation des marchés énergétiques, au
sujet de laquelle le Sénat a, sur l'initiative de notre commission, adopté une
résolution. Si la commission des affaires économiques se félicite des résultats
du dernier Conseil des ministres de l'énergie, je ne peux, à titre personnel,
que vous faire part, madame la ministre, de mon inquiétude sur le processus de
libéralisation engagé.
Les exemples de libéralisation ayant abouti se multiplient, comme en
Californie, où le prix de l'énergie a augmenté de plus de 40 %, en Espagne, où
ont eu lieu de nombreuses coupures de courant et au Royaume-Uni, où plus de 85
000 particuliers ont saisi les autorités de la concurrence.
Je suis, à titre personnel, très inquiet des incidences de la libéralisation
sur le service public et la péréquation tarifaire, et ce n'est pas le rapport
intermédiaire de la Commission qui permettra aux autorités de « rectifier le
tir » en 2006 si le processus est, comme je le crois, mal engagé.
Je suis également préocupé par les conséquences de l'accès des tiers aux
stockages gaziers et par celles de la séparation juridique des opérateurs
historiques puisque aussi bien la possiblité d'exemption que vous avez obtenue
à Bruxelles devra être octroyée conjointement par les Quinze et par le
Parlement européen, ce qui n'est pas une mince affaire !
Autrement dit, l'accord du 25 septembre me déçoit, et il me surprend d'autant
plus que les conclusions du sommet de Barcelone, formulées en présence du
Président de la République et du Premier ministre d'alors, ne permettaient pas
de présager un tel revirement huit mois plus tard.
La commission des affaires économiques suit également avec la plus grande
attention deux dossiers qui intéressent EDF.
Il s'agit, d'une part, du processus de négociation qui permettra, nous le
souhaitons tous, de résoudre le problème que pose le financement des retraites.
A titre personnel, je souhaite vous dire, madame la ministre, combien je suis
attaché au maintien des droits acquis des salariés.
Il s'agit d'autre part, de la politique d'acquisition d'EDF à l'étranger, dont
nous croyons la réorientation nécessaire, car elle ne semble pas porter tous
les fruits que l'on en attendait, c'est le moins que l'on puisse dire.
Le troisième sujet dont je souhaiterais souligner l'importance cruciale
concerne les énergies renouvelables et la lutte contre le réchauffement
climatique.
La commission des affaires économiques est unanimement favorable au
développement des énergies renouvelables, afin que soient respectés les
engagements du protocole de Kyoto. Nous observons cependant avec préocccupation
l'accroissement régulier des émissions dues aux transports. Le recours, à
terme, à la technologie de la pile à combustible nous semble constituer un
motif d'espoir, même si, nous en sommes conscients, beaucoup reste à faire à
cet égard.
De même, la commission des affaires économiques à émis des réserves quant à
l'étendue de l'obligation d'achat telle qu'elle résulte de la loi du 10 février
2001, considérant que son champ est trop large.
A titre personnel, je demeure pourtant convaincu que le développement de la
petite hydro-électricité, de l'énergie solaire et de l'énergie éolienne est
conditionné par l'existence d'une obligation d'achat.
Plusieurs de mes collègues ont également fait part de leurs préoccupations
s'agissant de l'évolution des crédits de l'Agence de l'environnement et de la
maîtrise de l'énergie, l'ADEME. Ils souhaiteraient obtenir des assurances sur
le devenir de ces crédits et le maintien de la contribution de l'Etat à cette
agence.
Dernier sujet important : le nucléaire. Vous le savez, mes chers collègues, la
commission des affaires économiques considère qu'il n'existe pas, pour le
moment, d'alternative à la production d'électricité nucléaire pour notre pays.
Cependant, le renforcement de la sûreté et de la transparence des procédures
constitue la condition
sine qua non
de l'acceptabilité sociale de
l'énergie nucléaire. C'est pourquoi nous considérons qu'il est nécessaire
d'examiner dès que possible le projet de loi sur la transparence nucléaire et
de faire le point sur le problème de la gestion des déchets ainsi que sur les
trois axes de recherche en cours.
La commission a noté avec satisfaction que, pour assurer l'avenir, la France
avait également constitué différents fonds destinés au démantèlement des
installations nucléaires.
Nous savons qu'une directive sur la transparence est également en cours de
discussion à Bruxelles. Nous souhaiterions obtenir des assurances sur le fait
qu'il n'en résultera pas une diminution globale des garanties dont disposent
actuellement nos concitoyens du fait de l'existence, en France, d'un système de
sécurité nucléaire, qui a d'ailleurs été récemment clarifié et renforcé.
La commission des affaires économiques estime enfin que, pour préparer
l'avenir, il est souhaitable d'engager dès que possible l'industrialisation
d'un réacteur de nouvelle génération de type EPR, susceptible d'améliorer la
sûreté en divisant par dix les risques de fusion du coeur.
Mes chers collègues, contrairement à son rapporteur pour avis qui, vous n'en
serez pas surpris, compte tenu de tous les motifs d'inquiétude qu'il a évoqués,
lui proposait de rejeter les crédits de l'énergie figurant dans le présent
projet de loi de finances, la commission des affaires économiques et du Plan a
émis un avis favorable sur l'adoption de ces mêmes crédits.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe
CRC.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 18 minutes ;
Groupe socialiste, 15 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des
présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minutes.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Madame la ministre, la discussion budgétaire nous donne l'occasion non
seulement d'analyser vos propositions contenues dans le projet de loi pour 2003
mais aussi de débattre utilement des importantes questions d'actualité qui
concernent votre département ministériel.
A périmètre constant, les crédits de l'industrie pour 2003 sont en baisse par
rapport au budget précédent, de 1,62 % pour les dépenses ordinaires et les
crédits de paiement et de 0,41 % pour les autorisations de programme.
Les dotations consacrées à La Poste et aux télécommunications sont en baisse
de 0,2 % par rapport à 2002. Ces dotations, il est bon de rappeler, avaient
connu une progression de 4,6 % en 2000, de 1,6 % en 2001 et de 2,2 % en 2002.
Quelles grandes tendances peut-on dégager de ces chiffres ?
Dans le domaine de l'énergie, le budget est marqué par une priorité affichée à
l'ouverture des marchés énergétiques.
La forte augmentation des crédits attribués à la commission de régulation de
l'électricité s'explique évidemment par l'extension de ses compétences au
secteur gazier, mais on y devine aussi la volonté politique d'accélérer
l'ouverture à la concurrence des marchés électrique et gazier. J'y
reviendrai.
L'ADEME est traitée de manière paradoxale. Vous lui accordez, madame la
ministre, une augmentation importante de crédits pour soutenir les efforts en
faveur des énergies renouvelables, mais votre collègue ministre de l'écologie
et du développement durable opère une réduction drastique de ses moyens.
Au bout du compte, les capacités d'engagement de l'ADEME en 2003 seront ainsi
inférieures de 30 % aux moyens accordés en 2002, ce qui inquiète à juste titre
les élus en charge de la gestion des déchets.
Les crédits destinés à financer les études portant sur la sûreté nucléaire et
la radioprotection chutent de façon importante.
Nous avons aussi noté l'apparente stabilisation des crédits consacrés aux
restructurations industrielles : on observe à la fois une croissance des moyens
affectés aux reconversions et restructurations et une diminution très forte des
crédits consacrés à l'« après-mines » et au fonds d'industrialisation de la
Lorraine.
L'un des éléments clés du budget de l'industrie est le chapitre 66-01,
consacré au développement de la recherche et de l'innovation.
Nous devons déplorer que les dotations allouées à ce chapitre reculent, tant
en crédits de paiement qu'en autorisations de programme, alors qu'elles sont
appelées à financer les pôles de compétence que sont, par exemple, les
biotechnologies, les entreprises médianes, la société de l'information.
Un constat similaire s'impose pour les crédits soutenant l'investissement des
PME. Nous relevons là un manque d'ambition, une stratégie qui peut conduire au
sacrifice de l'avenir.
Dans ce budget, les écoles d'ingénieurs, l'Ecole des mines en particulier,
tirent leur épingle du jeu, ce dont nous nous félicitons.
Pour ce qui est des dotations consacrées à La Poste et aux télécommunications,
trois lignes budgétaires retiennent notre attention.
Tout d'abord, les aides au transport de la presse mobilisent 66 % des crédits
réservés à La Poste et aux télécommunications, elles sont maintenues au niveau
de 2002, soit près de 290 millions d'euros. Il s'agit là d'un point clé dans
les relations entre La Poste et l'Etat.
Le futur contrat entre ces deux partenaires pourra-t-il laisser le soutien de
l'Etat à ce niveau, alors que La Poste évalue le coût du service rendu à 800
millions d'euros ?
S'agissant, ensuite, des crédits en faveur des administrations et autorités
des postes et télécommunications, vous avez proposé d'accroître de manière
significative les moyens alloués à l'autorité de régulation des
télécommunications, l'ART, répondant ainsi à une attente affirmée de ladite
autorité. Cependant, l'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à
réduire de 100 000 euros les crédits inscrits à ce titre.
Ce qui me paraît surtout important, c'est que cette discussion budgétaire vous
amène, madame la ministre, à prendre une position claire, que beaucoup
attendent : envisagez-vous, oui ou non, d'étendre les compétences de l'ART à la
régulation postale ?
La dotation de la commission supérieure du service public de La Poste et des
télécommunications est simplement reconduite pour la troisième année
consécutive.
Le nouveau président de cette commission, que je salue, a de légitimes
ambitions de travail et il saura, j'en suis sûr, vous convaincre, madame la
ministre, de la nécessité de revoir à l'avenir cette dotation à la hausse.
En ce qui concerne l'effort budgétaire en faveur des écoles de
télécommunications, qui a été continu de 1997 à 2002, il marque le pas cette
année.
Au cours de la précédente législature, les subventions de l'Etat sont passées
de 62,9 millions à 89,7 millions d'euros, soit une hausse de 42 %.
L'objectif était d'augmenter le nombre de diplômes délivrés par le groupe des
écoles de télécommunications, le GET, pour qu'il atteigne 1 500 par an, et de
faire passer de 400 à 600 le nombre des chercheurs-enseignants du GET.
Madame la ministre, partagez-vous cette ambition ? Quelle est, dans ce
domaine, votre « feuille de route » pour la présente législature ?
Je souhaite à présent dépasser le cadre budgétaire et m'arrêter sur les
questions d'actualité qui placent votre ministère en première ligne, comme cela
a été rarement le cas auparavant.
Nous nous trouvons en effet face à des enjeux qui mobilisent les acteurs
politiques, économiques et sociaux. Vous me permettrez de relever ceux qui me
paraissent les plus saillants : les restructurations industrielles et les
licenciements économiques massifs ; la diffusion de l'innovation dans les
entreprises ; EDF-GDF ; le domaine des télécommunications et La Poste.
Ces dossiers suscitent des attentes, des interrogations, qui appellent des
clarifications, des prises de position.
Madame la ministre, de nombreuses questions vous ont été posées sur ces thèmes
lors du débat budgétaire qui s'est déroulé à l'Assemblée nationale. Vous y avez
parfois apporté des réponses, mais certaines sont restées incomplètes.
Le Gouvernement a annoncé une loi d'orientation sur l'énergie, des mesures en
faveur de l'innovation, ainsi qu'un plan d'accompagnement pour France
Télécom.
Nous salivons d'impatience, madame la ministre, une impatience que vous devez
comprendre.
On pourrait faire un parallèle osé en rappelant, à ceux qui sont passionnés
par ces problèmes, la phrase célèbre : « Le meilleur moment de l'amour, c'est
quand on monte l'escalier. »
(Sourires.)
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Clemenceau !
M. Pierre-Yvon Trémel.
Mais nous sommes déjà dans l'antichambre, et je m'autorise à vous poser des
questions précises sur lesquelles vous saurez certainement m'apporter des
éléments d'information concrets.
S'agissant tout d'abord des restructurations industrielles, le service
statistique du ministère des affaires sociales, du travail et de la solidarité
a recensé, sur les dix dernières années, 3,5 millions de licenciements
économiques, dont 208 000 pour les trois premiers mois de l'année 2002.
Quels moyens préconisez-vous, madame la ministre, au regard des rapports qui
ont été établis par MM. Aubert et Viet, pour essayer d'anticiper les mutations
structurelles des entreprises ?
S'agissant ensuite de l'avenir d'EDF et de GDF, notre débat ne peut bien sûr
se dérouler sans évoquer « l'après 25 novembre ».
Vous avez estimé que nous étions « parvenus à un compromis global acceptable
pour tous les Etats membres, y compris la France ». Nous ne partageons ni votre
conclusion... ni votre optimisme.
Nous attendons, madame la ministre, que vous nous disiez comment il sera
possible de sauvegarder la péréquation tarifaire, de gérer la situation de 67
000 personnes travaillant au sein d'EDF-GDF Services, et de garantir que cette
libéralisation entraînera l'obtention d'un service équivalent et de meilleurs
prix pour les entreprises et pour les ménages.
J'en viens au secteur des télécommunications : l'urgence, c'est le plan de
sauvetage de France Télécom.
Peut-être, madame la ministre, pourrez-vous nous en dire un peu plus,
aujourd'hui, sur l'implication de l'Etat et sur l'emploi au sein de France
Télécom.
L'urgence, c'est aussi la nécessité de trouver une issue à la grave crise
traversée par le secteur des télécommunications.
Opérateurs et équipementiers vivent une période noire depuis plusieurs mois,
sans signe de reprise à court terme.
La Bretagne, la région de Lannion, en particulier, est au bord de l'asphyxie :
1 700 suppressions d'emplois.
Comment comptez-vous passer aux actes, madame la ministre, pour relancer
l'investissement ?
Nous sommes tous d'accord sur les analyses concernant la fracture numérique,
et la nécessité de relance du haut débit. Nous souhaiterions avoir des signes
concrets de cette volonté dans les semaines et les mois qui viennent.
Je veux, enfin, redire combien nous attendons la sortie du contrat d'objectifs
entre La Poste et l'Etat. La Poste est confrontée à des mutations profondes et
nous souhaitons connaître les orientations stratégiques du Gouvernement face à
des problèmes récurrents comme le financement des missions de service public,
le financement des retraites des postiers ou l'élargissement des services
financiers.
Le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques de
l'Assemblée nationale qualifie ce budget de « budget serré sans être sacrifié »
; quant à son collègue rapporteur spécial de la commission des finances, il
estime que « dans ce budget, il y a ce qui se voit et il y a ce qui ne se voit
pas ».
Ce qui se voit, madame la ministre, c'est le sacrifice de l'avenir et
l'absence d'ambition dans une conjoncture difficile.
Ce qui ne se voit pas, ce sont les signes, les pistes pour répondre aux grands
enjeux devant lesquels sont placés nos entreprises et nos services publics.
Le groupe socialiste, qui aurait souhaité voir d'autres choix, se prononcera
donc contre l'adoption de votre projet de budget.
(Applaudissements sur les
travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c'est à la
place de mon collègue et ami M. Yves Coquelle, qui, habituellement, intervient
sur ce budget pour le groupe communiste républicain et citoyen, que je ferai
cette intervention.
C'est dans une conjoncture industrielle particulièrement déprimée que nous
devons aujourd'hui débattre du projet de budget de l'industrie.
D'après les indicateurs de l'INSEE, le moral de nos industriels est au plus
bas : ils prévoient ainsi, pour 2002, une diminution de leurs investissements
de 7 %. Dans l'industrie manufacturière, la chute est encore plus marquée
puisqu'elle atteint 9 %. Cette contraction de l'activité industrielle, outre
son côté inquiétant étant donné la faiblesse des taux d'intérêt, a évidemment
des répercussions dans le domaine des services, par le biais notamment du
secteur des services aux entreprises.
Plus globalement, à travers des effets de transmission, c'est l'ensemble de
l'activité économique qui est touchée, démentant de manière flagrante les
prévisions de croissance affichées par l'ensemble des conjoncturistes et par le
Gouvernement.
Les conséquences sont immédiatement visibles : les plans de restructuration se
multiplient, infléchissant à la hausse la courbe du chômage. De source
syndicale, les plans sociaux recensés entre le 15 septembre et le 15 octobre ne
concerneraient pas moins de 40 000 personnes. Et l'on sait que, depuis cette
date, la liste s'est encore allongée. L'INSEE, quant à lui, annonce pour les
quatre derniers mois de l'année 80 000 demandeurs d'emploi supplémentaires.
Cette situation pèsera inévitablement sur la consommation et, en retour, sur la
croissance économique.
Or, loin de tenter de contenir cette hémorragie d'emplois, le Gouvernement
veut, au contraire, supprimer les dispositifs de la loi de modernisation
sociale qui auraient pu constituer encore quelques ultimes obstacles aux
pratiques actuelles qui font de l'emploi la variable d'ajustement. Pis : il
s'évertue, semble-t-il, à assouplir encore le peu de contraintes qui pèseraient
en ce domaine sur les entreprises.
Au plus haut de l'euphorie boursière, certaines entreprises comme Danone ou
Michelin, affichant pourtant des profits confortables, multipliaient les plans
sociaux. Aujourd'hui, de nombreuses entreprises licencient sous prétexte de
débâcle financière.
Après nos vieilles industries du textile ou de la sidérurgie, ce sont nos
industries de pointe, de haute technologie, au premier rang desquelles figurent
celles des technologies de communication, qui licencient massivement.
En septembre dernier, Alcatel annonçait son intention de supprimer 10 000
nouveaux emplois entre la fin de l'année 2002 et le début de l'année 2003.
Selon son P-DG, la nécessité de réduire de 30 % ses coûts par rapport à 2002
devait conduire le groupe à se recentrer sur ses usines à forte valeur ajoutée,
riches en innovations de produits, et à externaliser les autres sites de
production. Il précisait : « Malheureusement, cela se traduit par des
suppressions d'emplois importantes, car nous sommes une entreprise de
main-d'oeuvre intellectuelle. »
Autrement dit, il s'agissait cette fois de licencier du personnel formé et
qualifié. Le développement de la sous-traitance, qui permet de réduire
drastiquement les coûts en économisant sur la masse salariale, en grignotant
les statuts du personnel, en multipliant les contrats précaires, bref, en
flexibilisant l'outil de production et la main-d'oeuvre, donne la clé de
lecture du concept, pour le moins inquiétant, d'« entreprises sans usines ».
La situation, madame la ministre, est extrêmement grave !
Elle est amplement révélatrice de l'échec d'une politique qui s'en remet
aveuglément aux seules forces du marché, de l'échec de votre politique
d'incitations fiscales et de réduction des charges sociales qui, outre qu'elle
met en danger notre système de sécurité sociale, nous engage sur la voie d'une
croissance particulièrement faible et instable, frôlant dangereusement la
récession.
Elle exige des mesures autrement plus volontaristes, à la hauteur d'une
véritable politique industrielle, dégagées des pressions qu'exercent sur elle
les marchés financiers, règne par excellence du court terme. Nous devons
réorienter les richesses créées et les profits vers les investissements
productifs, générateurs d'emplois et de revenus susceptibles d'alimenter la
consommation, plutôt que d'entretenir la spéculation et de favoriser les
multiples opérations de croissance externe réalisées, dans la plupart des cas,
sans réel projet industriel à la clé.
Or, si les autorisations de programme sont d'un montant comparable à celui de
2002, les crédits de l'industrie s'élèvent, eux, à 1,96 milliard d'euros, en
baisse de 1,6 %. Cette médiocrité budgétaire, entièrement soumise aux critères
du pacte de stabilité, vous oblige à une certaine sélectivité.
Certes, au rang de vos priorités figurent notamment la recherche et
l'innovation, ce qui est appréciable. Il n'en demeure pas moins que ces aides
destinées à conforter la compétitivité des entreprises seront largement
insuffisantes si elles ne sont pas complétées par des moyens de régulation
appropriés.
Or, précisément, vous souhaitez renforcer le rôle de la CRE, autorité dont
nous avons à maintes reprises dénoncé le caractère non démocratique. Cette
autorité affiche clairement ses intentions de pousser plus avant le processus
de déréglementation et d'ouverture à la concurrence, avec comme conséquence le
démantèlement des services publics énergétiques. Mais j'y reviendrai dans une
intervention portant sur le titre III, tout à l'heure.
Madame la ministre, le groupe communiste républicain et citoyen constate que
votre budget choisit le repli, la voie de la régression économique et sociale.
Nous le regrettons, et c'est pourquoi nous ne voterons pas les crédits de votre
ministère pour 2003.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe
socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans la mesure
où les différents rapporteurs ont exprimé à la fois leur approbation et leurs
suggestions - que je partage -, avec infiniment plus de compétence que je ne
pourrais le faire moi-même, je souhaiterais attirer votre attention sur un
certain nombre de préoccupations très fortes de nos concitoyens à l'égard de
l'évolution de notre politique industrielle.
Tout d'abord, comment ne pas évoquer, alors que les médias leur consacrent
chaque jour des commentaires aussi étoffés que parfois contradictoires, la
situation de La Poste, de France Télécom, de EDF et de GDF ?
Vous le savez, madame la ministre, les élus sont extrêmement attachés à la
présence des bureaux de poste sur notre territoire, à ce maillage exceptionnel
permis par 300 000 agents et 17 000 bureaux de poste répartis dans toute la
France. Les maires ont d'ailleurs à coeur de faciliter la poursuite de cette
implantation par la mise à disposition de locaux aussi bien dans les petites
communes rurales que dans les quartiers des grandes villes.
Bien évidemment, il s'agit pour l'entreprise d'une contrainte financière qui,
au même titre que le soutien au transport et à la distribution de la presse,
relève des obligations de service public et justifierait donc à la fois
évaluation et compensation intégrale. On ne peut en outre multiplier à l'infini
les charges et brider les virtualités.
Les services financiers de La Poste concourent notablement à son équilibre
économique sans oublier le rôle social et d'aménagement du territoire qu'ils
remplissent. De plus, ils ont un besoin urgent de diversification et
d'élargissement leur permettant de s'ouvrir à une nouvelle clientèle dont ils
ne peuvent satisfaire aujourd'hui la légitime exigence. Le moment paraît
opportun, alors que 2003 verra à la fois la signature d'un nouveau contrat de
plan et la poursuite de la libéralisation du courrier, de faire rimer, comme le
souhaite le Gouvernement, service public et compétitivité.
S'agissant de France Télécom, des 240 000 personnes employées par l'entreprise
et du caractère éminemment stratégique de son activité, on peut bien sûr
pleurer sur le lait renversé et sur le caractère abyssal d'une dette oscillant,
selon les évaluations des uns et des autres, entre 70 milliards et 80 milliards
d'euros - deux siècles du budget de la région Poitou-Charentes, avait, je
crois, relevé le Premier ministre dans une émission télévisée. Mais il importe
surtout de se poser deux questions. Comment en est-on arrivé là ? Quand et
comment va-t-on en sortir ?
S'agissant d'une entreprise dans laquelle les capitaux publics sont
majoritaires, il ne paraît guère douteux que des choix stratégiques très
lourds, comme l'achat d'Orange et d'une licence UMTS britannique, n'ont pas été
opérés dans un contexte de transparence adéquat et ils nous laissent perplexes
sur l'attitude de l'actionnaire majoritaire, c'est-à-dire l'Etat.
Il est plus qu'urgent que se mettent en place des moyens adaptés et rénovés de
gouvernance des entreprises publiques permettant d'éviter le renouvellement de
pareilles désillusions ou, à tout le moins, imposant que la puissance publique,
légitimée par le suffrage universel, prenne à l'avenir toutes ses
responsabilités pour des investissements de cette dimension.
Aujourd'hui, nous sommes demandeurs de scénarios réalistes de résorption de la
dette, limitant la « casse » pour le personnel et les petits actionnaires et
mobilisant la responsabilité de l'actionnaire majoritaire qu'est l'Etat. Il
convient, en outre, de faire vite, car il y aurait péril en la demeure,
d'autant plus que des enjeux particulièrement sensibles, comme le développement
du haut débit, ne peuvent guère attendre.
Enfin, car il faut bien se limiter à quelques exemples particulièrement
significatifs, la situation de EDF et GDF, si elle est loin d'inspirer les
mêmes inquiétudes, n'en suscite pas moins un certain nombre d'interrogations.
Vous avez vous-même tenu à rassurer le personnel, madame la ministre, en
déclarant devant l'Assemblée nationale que l'adaptation à la libéralisation de
ces deux grandes entreprises et l'ouverture minoritaire de leur capital ne
remettront en cause ni le statut des agents ni le système actuel de financement
des retraites.
Je voudrais cependant mettre l'accent sur un certain paradoxe dans l'évolution
des relations entre EDF et GDF.
En effet, dans le domaine industriel, le rapprochement initial entre les
services publics de l'électricité et du gaz fut, d'abord, le fruit d'une
volonté politique bien plus que d'une analyse économique. En 1946, alors que le
gaz était, à l'époque, une production purement locale, Marcel Paul proposa la
création d'un établissement public unique « EGF ». Puis, avec l'apparition du
gaz naturel dans les années cinquante, les deux entreprises se sont rapprochées
au point d'avoir aujourd'hui une grande partie de leur personnel en commun.
Enfin, depuis quelques années, une révolution technico-économique est apparue
dans le domaine énergétique avec la mise au point de turbines à gaz, permettant
de produire de l'électricité de manière très compétitive.
Or on voit aujourd'hui EDF afficher son ambition de devenir un « grand gazier
», en rachetant des sociétés étrangères dans ce domaine, tandis que, de son
côté, GDF recherche des partenariats auprès des pétroliers ou de Suez.
Pourquoi, précisément aujourd'hui, « détricoter » le maillage entre EDF et GDF,
alors que les synergies industrielles entre les deux entrepreneurs sont plus
fortes que jamais ?
Dans un tout autre ordre d'idées, permettez-moi, madame la ministre, de
réaffirmer clairement que c'est bien à l'Etat d'assumer son rôle de péréquation
et d'équité dans la prise en charge des pollutions héritées du passé industriel
et, sur ce point, je souhaite être rassuré quant à la diminution des crédits
liés à la gestion de « l'après-mines ».
Ainsi, lorsque les Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais ont arrêté
leurs activités, elles ont cessé d'assurer la maîtrise d'ouvrage du
fonctionnement des stations de pompage d'évacuation des eaux souterraines, mais
aussi des eaux de surface. Comme nous l'a récemment démontré, lors des assises
de la décentralisation de Lille, notre collègue député Christian Decocq, c'est
désormais un système hydraulique complet de l'ensemble de l'ancien bassin
minier qui doit être géré pour un coût de fonctionnement évalué à 70 millions
d'euros par an.
Il me semble profondément anormal que des négociations liées aux sorties de
concessions puissent imposer aux collectivités territoriales d'accepter le
transfert de la gestion de ces stations de pompage, quitte à en supporter à
tout jamais les charges de fonctionnement, contre une indemnité forfaitaire
limitée au coût de sept années dudit fonctionnement, sous prétexte qu'elle est
versée en une seule fois.
Dans une région comme le Nord - Pas-de-Calais, qui a tant fait pour la
reconstruction de notre pays et qui se relève des trois crises terribles du
charbon, de la sidérurgie et du textile, ce n'est pas du misérabilisme que
d'attendre de l'Etat qu'il assume la charge des pollutions de stock : sédiments
toxiques déposés dans le lit des rivières et canaux, pollution des sols sans
comparaison avec le nombre de sites concernés et conséquences des activités
charbonnières. Débarrassés de ces handicaps, nous pourrons parfaire la réussite
de notre reconversion.
En conclusion, je tiens à rappeler toute l'importance que le groupe du
Rassemblement pour la République accorde à la politique industrielle à l'égard
du tissu de nos PME et PMI et des créateurs d'entreprises. Nous faisons
totalement confiance au Gouvernement, et à vous-même, madame la ministre, pour
instaurer les conditions optimales à la liberté d'entreprendre et au
développement de l'investissement et de la croissance. C'est aussi en rénovant
l'environnement législatif, réglementaire et fiscal de nos entreprises, tout en
facilitant la recherche et l'innovation que nous gagnerons la bataille de
l'emploi.
(Applaudissements sur les travées du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Jean Besson.
M. Jean Besson.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma
contribution au débat portera sur deux points : le nucléaire et la place des
collectivités locales dans le marché européen de l'énergie.
S'agissant du nucléaire, j'affirme avec constance trois convictions : d'abord,
le nucléaire doit rester un pilier essentiel de notre politique énergétique ;
ensuite, il est impératif de poursuivre les recherches sur les réacteurs du
futur pour assurer le renouvellement de notre parc productif ; enfin, il est
tout aussi indispensable de garantir la sûreté des installations.
Les récentes décisions des Etats-Unis et de la Finlande témoignent de la
compétitivité d'une telle option après quinze ans d'un « hiver nucléaire » qui
aura touché presque tous les pays occidentaux, à l'exception de la France, il
convient de le souligner.
Notre pays a la chance de pouvoir s'appuyer sur le groupe Areva, leader
mondial en ce domaine. L'entreprise a mis au point le réacteur du futur, « EPR
», fruit d'une coopération entre Framatome et Siemens.
D'une puissance de 1 450 mégawatts, ce réacteur permettra de diviser par dix
les risques de fusion du coeur, et donc d'accroître en proportion inverse la
sécurité. Il permettra également d'optimiser le rendement du combustible.
Les études sont achevées depuis quatre ans, et il est vraiment impératif
d'engager la construction d'une centrale de référence. C'est un impératif pour
le renouvellement de notre parc ; c'est aussi un impératif industriel
majeur.
C'est pourquoi je souhaite vivement connaître, madame la ministre, vos
intentions et celles du Gouvernement, alors que vous annoncez la préparation
d'un projet de loi d'orientation sur l'énergie.
Le deuxième point de mon intervention concerne la place des collectivités
locales dans le marché européen de l'énergie. Nous connaissons, depuis le
récent conseil des ministres de l'énergie, le calendrier probable de
libéralisation du marché.
Je regrette, pour ma part, que le conseil des ministres s'oriente vers une
ouverture complète du marché, sachant que la clientèle des particuliers risque
d'être très fragilisée face aux puissants groupes qui vont dominer le marché
européen. Je redoute aussi un déséquilibre tarifaire important entre les zones
urbaines et les zones rurales.
En tout état de cause, les échéances annoncées nous laissent peu de temps.
L'heure est à l'action et, dans ce contexte d'ouverture complète, les
collectivités locales vont avoir à jouer un rôle déterminant pour faire valoir
les impératifs du service public et de l'aménagement du territoire.
Nous devons impérativement nous mettre en situation d'évoluer efficacement
dans ce périmètre européen dont les règles sont sensiblement différentes des
nôtres et qu'à vrai dire nous connaissons peu.
Pour être acteurs de ce marché et non pas le subir, nous devons à mon sens
travailler dans deux directions.
Premièrement, il faut harmoniser notre spécificité française avec la nouvelle
règle du jeu. Nous sommes les héritiers d'une conception du service public qui
nous permet de disposer d'un parc productif et d'un réseau solides et
performant. Les collectivités locales, le plus souvent regroupées à l'échelon
départemental, sont propriétaires d'un réseau de distribution de qualité et, de
plus, d'une qualité homogène en tout point du territoire, sous réserve, bien
entendu, de réaliser les extensions nécessaires.
Cela pourrait se faire grâce à une péréquation nationale concernant
l'investissement initial comme la maintenance et le renouvellement grâce au
régime du concessionnaire unique.
Si nous n'y prenons garde et si nous n'installons pas de solides verrous, cet
atout majeur risque de s'altérer bien rapidement.
N'oublions pas que, dans quelques mois, en 2004, 65 % du marché destiné aux
professionnels sera ouvert à la concurrence. Il est évident que cette ouverture
va générer une tension sur les prix, peut-être pas durable, mais certainement
suffisante pour détourner les opérateurs des missions non génératrices de
valeur ajoutée.
Pour prévenir une telle situation, je propose, tout d'abord, de conforter les
mécanismes publics de financement de l'électrification rurale, en prenant en
compte, notamment, la distinction désormais nécessaire entre acheminement et
fourniture dans les assiettes de calcul..
Je propose ensuite d'imposer aux distributeurs des cahiers des charges
rigoureux édictant des normes techniques impératives pour la construction, le
renouvellement, la fiabilisation des réseaux ou encore l'accueil et le service
des usagers. Il s'agit de garantir une péréquation non seulement des tarifs de
l'acheminement de l'électricité et du gaz, mais aussi la qualité du service en
tout point du territoire national.
Je propose enfin de reconnaître aux collectivités locales un véritable pouvoir
de contrôle et de sanction pour imposer le respect des obligations définies par
les cahiers des charges. Sans cette contrainte, ces obligations resteront
purement théoriques.
La deuxième direction dans laquelle nous devons travailler est de rechercher
les points de convergence avec ce qui se fait en Europe, en particulier en
matière d'association des collectivités locales à la protection des petits
consommateurs.
Les collectivités peuvent jouer un rôle essentiel, à condition de s'organiser,
d'imaginer des partenariats entre elles ou en économie mixte avec des
producteurs industriels, à condition que les instruments juridiques, en
particulier le code des marchés publics, s'adaptent à la spécificité de ce
marché.
Parmi les possibilités à explorer, je pense aux groupements d'achats à un
échelon probablement interdépartemental, ou régional, à l'organisation, le cas
échéant, d'un service public local de fourniture au profit des particuliers, ou
encore à des participations aux moyens de production, à des quotes-parts en
production ou en réservation d'énergie.
Soyons-en conscients, une telle démarche sera particulièrement difficile.
Ne perdons pas de vue aussi que l'énergie, en particulier l'électricité, n'est
pas une marchandise comme les autres. Outre les critères de prix, il conviendra
de prendre en compte la continuité de fourniture, l'adaptation aux variations
de la demande... Tout cela suppose des contrats d'alimentation intégrant durée
et pérennité de la ressource. Autant d'exigences difficiles à concilier avec le
code des marchés publics !
Je tenais, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à
vous livrer ces quelques réflexions complémentaires de celles de mon ami Trémel
qui sont aussi celles de la Fédération nationale des collectivités concédantes
et des régies.
Je souhaite, madame la ministre, que vous puissiez prendre en compte ces
enjeux, pour faire évoluer, avec les ministres concernés, le cadre
institutionnel appelé à réglementer de telles procédures.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Madame la ministre, M. Jean Clouet a mis en
évidence, dans son rapport spécial, les conditions de financement de la dette
de Charbonnages de France et je souhaite revenir un instant sur ce point
particulier.
La Cour des comptes elle-même s'est interrogée sur les modalités de ce
financement. Charbonnages de France gère sa trésorerie, et sa dette atteint
aujourd'hui à peu près 5 milliards d'euros. Comme Charbonnages de France ne
jouit pas sur le marché d'une cotation du meilleur niveau, il en résulte une
pénalité que la Cour a estimée à 2 % voire 3 % d'intérêts supplémentaires.
Si l'Etat reprenait à sa charge cet endettement et le gérait lui-même
directement ou par un établissement de défaisance, il en résulterait sans doute
une économie de l'ordre de 15 millions d'euros.
Je me permets d'insister sur ce point et d'interroger le Gouvernement sur ses
intentions. Cette question a en effet un impact direct sur les finances
publiques.
Il ne faudrait pas, par inertie, accréditer l'idée que l'Etat accorde une
sorte de rente de situation aux prêteurs de Charbonnages de France. Il n'y a
d'ambiguïté pour personne, c'est l'Etat qui est garant du remboursement de
cette dette, il serait donc judicieux qu'il la gère directement et obtienne un
allégement de sa charge.
Au nom de la commission des finances, je vous serais reconnaissant, madame la
ministre, de nous apporter quelques précisions sur ce point.
M. le président.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée à l'industrie.
J'ai bien entendu la question posée par
M. le président de la commission des finances au nom de sa commission et je
souhaite immédiatement lui apporter une réponse positive.
Je puis vous assurer que le Gouvernement est tout à fait favorable au principe
de la reprise de la dette de Charbonnages de France par l'Etat.
Les modalités d'un tel transfert sont actuellement à l'étude.
Je tiens maintenant à remercier MM. les rapporteurs, Mme la sénatrice et MM.
les sénateurs de la qualité et de l'intérêt tout particulier de leurs
interventions. Je souhaite leur apporter les réponses les plus précises
possible.
Je puis d'emblée assurer les rapporteurs pour avis et le rapporteur spécial,
Jean Clouet, que, dans la perspective de la mise en oeuvre de la loi organique
sur les lois de finances, nous chercherons, avec votre concours, à améliorer la
présentation des crédits du ministère de l'industrie dès l'année prochaine pour
qu'ils gagnent en lisibilité.
Autrement dit, si nous nous retrouvons l'année prochaine, je m'engage à aller
dans cette direction.
En attendant cet effort nécessaire de simplification, je vais tenter de
dégager la signification politique de ces lignes et de ces agrégats
budgétaires.
Le budget pour 2003 du ministère de l'industrie a pour ambition de favoriser
la compétitivité des entreprises françaises. En cela, nous cherchons à
atteindre cinq objectifs, que je rappelle brièvement : mettre en oeuvre une
politique énergétique indépendante, sûre et équilibrée ; donner aux entreprises
les moyens d'une croissance soutenue et durable par une politique active en
faveur des PMI, de l'innovation, de la recherche, du développement et de la
formation ; faciliter les mutations industrielles par une aide appropriée aux
entreprises et aux régions victimes de sinitres industriels ; préparer l'avenir
de La Poste et, enfin, favoriser le développement des télécommunications.
Dans un contexte budgétaire difficile - je n'ai pas besoin de le rappeler -
les crédits d'investissement, c'est-à-dire ceux qui permettent de préparer
l'avenir, sont stabilisés.
Par souci d'une gestion rigoureuse des deniers publics, les dépenses courantes
diminuent pour leur part de 1,1 % tout en permettant, grâce à l'utilisation des
soldes disponibles, le financement des actions prioritaires.
S'agissant de la mise en oeuvre d'une politique de l'énergie indépendante,
équilibrée et sûre, et sans détailler le contenu du projet de budget que vous
connaissez tous parfaitement, je souhaiterais insister, à l'instar du
rapporteur pour avis, M. Roland Courteau - même si nous divergeons sur les
objectifs retenus -, sur le fait que ce budget s'inscrit dans un ensemble plus
vaste de réformes qui visent à refonder la politique énergétique française face
à un monde qui change.
Nous vivons dans un monde plus ouvert. La libéralisation des marchés,
notamment ceux de l'énergie, se poursuit en effet partout dans le monde,
entraînant restructuration et création de grands ensembles régionaux.
Nous vivons dans un monde plus complexe et dans lequel les problèmes
environnementaux, liés notamment à l'effet de serre, se posent de manière
globale et deviennent un élément déterminant du dialogue Nord-Sud, comme le
Président de la République l'avait souligné au sommet de Johannesburg. Le
Gouvernement, vous le savez, considère que le développement durable est
désormais une priorité à laquelle nous avons d'ores et déjà consacré, jeudi
dernier, un séminaire réunissant tous les ministres.
Nous vivons enfin dans un monde plus incertain : les attentats du 11 septembre
2001 comme la tragédie permanente du Moyen-Orient ou les menaces d'une guerre
en Irak, même si le danger s'en est peu éloigné, démontrent bien que la
sécurité d'approvisionnement est une exigence d'une parfaite actualité.
Face à ces évolutions, le Gouvernement entend poursuivre et encadrer la
libéralisation des marchés de l'énergie en veillant à une coexistence
équilibrée entre concurrence et service public, dont je maintiens et affirme
qu'il est parfaitement possible de concilier les exigences !
Cette volonté gouvernementale est matérialisée dans le projet de loi sur les
marchés énergétiques que vous avez approuvé en première lecture, le 17 octobre,
et qui sera examiné à l'Assemblée nationale le 11 décembre prochain.
Par ailleurs, au plan européen, alors que la France était encore, voilà
quelques semaines, complètement isolée face à ses quatorze partenaires, nous
avons obtenu, lundi dernier, au conseil des ministres européens de l'énergie à
Bruxelles, un compromis qui établit un équilibre satisfaisant entre les
obligations de service public, la libéralisation progressive des marchés de
l'électricité et du gaz et les conditions de l'adaptation de nos entreprises
EDF et GDF pour qu'elles puissent pleinement tirer parti de leurs remarquables
atouts. Ce compromis ayant été trouvé, vous ne serez pas surpris, monsieur
Courteau, que je ne puisse partager votre analyse sur ce point.
En revanche, comme vous l'avez souligné, monsieur Besson, nous partageons la
même volonté de préserver un service public de qualité sur l'ensemble du
territoire dans des conditions de prix et de service identiques. A cet égard,
je dirai que jamais un texte communautaire n'a été aussi loin que celui que
nous avons approuvé à Bruxelles, lundi dernier, dans la reconnaissance des
missions de service public, vous le savez fort bien.
L'ouverture du marché aux ménages supposera de prendre des dispositions
nécessaires dans la loi de transposition du deuxième paquet de directives
européennes. J'ai bien noté, monsieur Besson, vos différentes remarques qui
viendront alimenter notre réflexion à cette occasion.
Notre deuxième objectif est de donner les moyens aux deux grandes entreprises
nationales EDF et GDF de s'adapter à cette libéralisation et d'en tirer le
meilleur profit, autrement dit, de devenir deux grandes entreprises
européennes.
Cela passe par une ouverture minoritaire de leur capital qui leur permettra,
d'une part, de nouer des alliances et, d'autre part, de réunir les capitaux
nécessaires à leur développement autrement que par un endettement au risque
difficilement maîtrisable, comme nous avons eu, hélas, l'occasion de le
constater dans le cas d'autres entreprises, qu'elles soient privées ou
publiques.
Cette évolution - je ne le dirai jamais assez - se fera évidemment sans
remettre en cause le statut des agents et en veillant à ce que le système
spécifique de financement des retraites reçoive les garanties nécessaires.
Troisième objectif : doter la France d'une loi d'orientation sur les énergies
qui définira et précisera, après un grand débat national qui se tiendra au
début de l'année prochaine, nos grandes options énergétiques en matière
nucléaire, en matière d'énergies renouvelables pour atteindre l'objectif prévu
par les textes européens de 21 % d'énergies renouvelables, en matière de
maîtrise de la sécurité d'approvisionnement de l'énergie.
Je sais la part active que d'ores et déjà, monsieur Besson, ainsi qu'un
certain nombre de vos collègues, vous êtes prêts à y apporter.
Par ailleurs, nous devons donner aux entreprises les moyens d'avoir une
croissance soutenue et durable en engageant une politique active en faveur de
l'innovation, de la recherche et du développement et de la formation.
Comme l'a très bien souligné M. Jean Clouet, l'innovation constitue un facteur
décisif de notre compétitivité.
La capacité de nos entreprises à innover et la diffusion des efforts de
recherche et de développement dans l'industrie sont en effet un facteur
déterminant de la croissance de notre économie. Au cours des dernières années,
nous avons constaté que plus de la moitié de la croissance dans les pays
développés est issue des secteurs innovants et de la diffusion de l'innovation
dans les entreprises.
Or, jusqu'à présent, nos efforts dans ce domaine sont restés, vous en
conviendrez, nettement insuffisants. En effet, les dépenses totales de
recherche et de développement représentent en France un peu moins de 2,2 % du
PIB, ce qui est inférieur à nos partenaires allemands, japonais, ou américains.
En réalité, les dépenses du secteur public sont comparables à celles de nos
partenaires, et ce sont les dépenses des entreprises privées qui sont
inférieures.
Nous devons donc trouver plus particulièrement les moyens d'aider et d'inciter
les entreprises à investir dans la recherche et le développement, ainsi que
dans l'innovation. L'Union européenne a retenu l'objectif de 3 % du PIB
consacrés à la recherche et au développement à l'horizon 2010 ; tel est aussi
l'objectif que le Président de la République nous a assigné, et que nous
tentons d'atteindre.
Dès mon arrivée au Gouvernement, j'ai lancé un important travail de réflexion
sur ce sujet au sein de mon ministère, avec le plein appui de M. Francis Mer,
du Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, et en liaison étroite avec Mme
Claudie Haigneré.
Plusieurs pistes sont en train d'être examinées. Elles découlent pour
l'essentiel des propositions formulées par les entreprises elles-mêmes ou par
leurs instances représentatives, car notre souci est d'apporter les réponses
les plus concrètes et les plus efficaces possible aux besoins qui ont été
exprimés par les professionnels issus du terrain. D'ici à quelques jours, je
serai en mesure de proposer une série d'actions visant à redynamiser
l'innovation dans les entreprises.
Les mesures envisagées vont constituer un soutien très important à ceux qui
apportent aux sociétés innovantes les moyens de se développer - il sera ainsi
créé un véhicule juridique et fiscal pour les « investisseurs providentiels » -
ainsi qu'aux « jeunes entreprises innovantes ».
Elles s'adresseront à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille et
leur ancienneté, puisque celles-ci pourront bénéficier d'une puissante
rénovation du crédit impôt recherche.
Elles viseront enfin à simplifier les circuits d'aide à l'innovation par la
décentralisation et par la déconcentration, en confiant à l'ANVAR, l'Agence
nationale de valorisation de la recherche, un rôle de coordination accru dans
les territoires et à favoriser la valorisation de la recherche et du
développement dans les entreprises avec une série de mesures concrètes.
Globalement, le ministère consacrera près de 200 millions d'euros à la
formation d'ingénieurs.
En particulier, sur la base de propositions formulées en 2001 par un groupe de
travail composé d'industriels et d'enseignants, les écoles des mines mettront
en oeuvre, à compter de 2003, un nouveau plan d'orientation stratégique. Ce
plan permettra d'accroître encore la démarche d'ouverture des élèves ingénieurs
vers l'entreprise par la généralisation de l'entrepreneuriat, d'orienter la
recherche sur une anticipation des besoins des entreprises et d'accentuer
l'ouverture des écoles, au plan tant international que régional.
La poursuite, en 2003, de l'installation du centre de micro-électronique de
Gardanne s'inscrit dans la logique de ce plan de développement.
Par ailleurs, une plus grande coordination des actions des écoles sera
recherchée. Globalement, les écoles des mines bénéficient d'un budget de 100,5
millions d'euros, en augmentation de 4 % par rapport à 2002.
La dotation du groupement des écoles de télécommunication, le GET, augmentera
dans une proportion moindre, de l'ordre de 1,1 %, pour tenir compte du rythme
réel de son développement.
Une attention toute particulière sera portée aux PMI.
Les capacités d'intervention en faveur des PMI sont maintenues à un haut
niveau en 2003, à savoir 236 millions d'euros. Elles se décomposent en deux
rubriques principales.
D'une part, les crédits de l'ANVAR, dont le niveau est conforme aux
engagements prévus dans le contrat pluriannuel 2000-2003 de l'Agence,
permettront à celle-ci de réaliser les objectifs prioritaires qui lui ont été
assignés.
D'autre part, les actions en matière de développement des PMI et de diffusion
des technologies sont gérées au niveau régional et intégralement
contractualisées dans les contrats de plan Etat-région. Les crédits inscrits
dans le projet de loi de finances pour 2003 permettent de couvrir les
engagements pris.
Je partage pleinement le souci exprimé par M. le rapporteur spécial sur la
nécessité de soutenir les secteurs d'activité plus traditionnels comme, par
exemple, le textile. Comme vous le savez, j'ai eu l'occasion de m'exprimer à ce
sujet devant votre Haute Assemblée le 10 octobre dernier. A l'invitation de M.
le président Christian Poncelet, j'ai pu, le 4 novembre, comprendre mieux
encore les difficultés de ce secteur sur le terrain. Une série de mesures
adaptées à leur situation spécifique ont été - ou vont être - prises pour les
aider à réussir leur mutation.
De la même manière, je suis très attentive à deux secteurs évoqués par M.
Grignon dans son rapport.
Le premier concerne les produits sidérurgiques, qui ont été brutalement
confrontés au doublement des droits de douane décidé unilatéralement par le
gouvernement américain en mars dernier.
Dans ce dossier, la France a vigoureusement soutenu la position de fermeté
proposée par la Commission. Les mesures définitives de sauvegarde communautaire
sont désormais en vigueur pour trois ans. En ce qui concerne les mesures de
rétorsion, le Conseil a tenu compte des concessions américaines qui ont, de
fait, exonéré la moitié des exportations de produits européens. Globalement les
industries françaises et, plus largement, européennes ont accueilli
favorablement les choix de la Commission. C'est une manifestation de fermeté et
de cohésion communautaires dont nous pouvons nous féliciter. Nous souhaiterions
qu'elle soit exemplaire.
Ainsi, et en sens inverse, dans son rapport, M. Grignon a tout à fait raison
de souligner la grave préoccupation que suscite la décision de la Commission
relative au régime de la distribution automobile.
Il est vrai que, malgré de très nombreuses démarches, entreprises tant par le
Gouvernement que par la commission du Sénat, le commissaire Monti a très peu
infléchi sa position initiale. Il est cependant difficile d'apprécier
précisément l'ampleur des mutations que ce nouveau règlement va entraîner sur
les structures de vente et d'entretien des véhicules, en particulier au niveau
territorial.
D'une part, pour le consommateur, on peut s'attendre à un renforcement de la
convergence des prix hors taxe de vente de véhicules au sein de l'Union
européenne, mais il est difficile de présumer que celle-ci se produira à la
baisse, comme l'espère la Commission. Il est plus probable que les écarts de
fiscalité seront très clairement mis en évidence.
D'autre part, pour l'après-vente sont à prévoir un resserrement des réseaux
sur le plan géographique, une plus grande technicité, des services nouveaux -
information en ligne, formules forfaitaires d'entretien, interventions rapides,
etc. - et, enfin, une plus grande concurrence à terme en ce qui concerne le
prix des pièces de rechange.
Toutefois, les constructeurs automobiles français et européens estiment
aujourd'hui que ce nouveau règlement préserve tout de même l'essentiel, à
savoir la propre maîtrise de leurs réseaux. Or ce point est fondamental non
seulement pour la dynamique d'innovation et la politique d'entretien, mais
aussi la sécurité des automobilistes.
Sur un plan plus général, M. Hérisson a évoqué les perspectives de la
convention afin de réfléchir à un meilleur équilibre institutionnel et
politique. A titre personnel, je rejoins tout à fait la préoccupation qu'il a
exprimée.
Plusieurs intervenants ont insisté, à juste titre, sur l'action tout à fait
essentielle tendant à retrouver les moyens d'une politique dynamique en matière
de reconversion et de restructuration industrielles. Il s'agit là d'un axe
fondamental de la politique que je souhaite mener, qui concerne
l'accompagnement des mutations industrielles. Monsieur le rapporteur spécial
est intervenu à juste titre à ce sujet.
L'innovation technologique et la concurrence internationale nécessitent des
adaptations de plus en plus rapides de notre économie et de nos entreprises.
Certains secteurs, et certains bassins d'emplois, sont déjà et vont être, hélas
! à nouveau touchés par ces évolutions.
Notre politique dans ce domaine est de veiller d'abord à sauvegarder les
activités et les emplois qui peuvent l'être en travaillant en étroite liaison
avec le Comité interministériel de restructuration industrielle, le CIRI, et
les collectivités territoriales sur tous les dossiers d'entreprises en
difficulté. Mais notre intervention ne s'arrête pas là : nous veillons
également à favoriser, dans les bassins les plus touchés, les actions de
redéploiement industriel vers d'autres activités.
Les moyens de cette politique d'accompagnement et de redéploiement industriel
ont été prévus dans le projet de loi de finances pour 2003. Ils ont été doublés
par rapport à 2002, passant de 18,2 millions d'euros à 35 millions d'euros en
crédits de paiement. Cela concerne le fonds d'intervention sur la Lorraine, qui
obtient 15,38 millions d'euros ; monsieur Trémel, je ne suis pas d'accord avec
vos conclusions. Ces moyens seront bien sûr mis en oeuvre dans chacune des
régions, en étroite concertation avec les élus locaux. J'irai d'ailleurs sur le
terrain, partout où cela sera utile, pour m'en assurer.
J'en viens à l'avenir de La Poste. Messieurs les rapporteurs, mesdames,
messieurs les sénateurs, l'examen du budget du ministère est un moment
privilégié pour parler ensemble de l'avenir de La Poste. Vous l'avez souligné,
monsieur Hérisson, 2003 sera, il est vrai, une année importante pour La Poste,
qui verra la signature d'un nouveau contrat de plan avec l'Etat. Celui-ci sera
discuté et négocié à partir des propositions que le nouveau président de La
Poste, M. Jean-Paul Bailly, nous fera à la fin de l'année. Quels en sont les
principaux enjeux ?
A partir de 2003, une nouvelle étape de la libéralisation progressive du
courrier sera franchie. Le courrier d'un poids de plus de 100 grammes, contre
350 grammes aujourd'hui, pourra être ainsi être librement distribué.
Je partage naturellement la préoccupation de M. Hérisson sur la nécessité de
concilier la compétitivité de La Poste et l'accomplissement de ses missions de
service public.
A cet égard, je voudrais souligner que la direction européenne reconnaît les
missions de service universel fournies par La Poste. Cette orientation conforte
les missions actuelles de service public en France. Le Gouvernement y est
particulièrement attentif et veillera à l'amélioration constante de la qualité
de la distribution du courrier.
Ainsi, s'agissant des missions de service public, la loi en confie deux à La
Poste : la distribution du courrier six jours sur sept pour tous les Français
et toutes les entreprises, ainsi que le transport et la distribution de la
presse. Mais, au-delà du service public, La Poste exerce des missions d'intérêt
général pour la collectivité. Il s'agit de l'aménagement du territoire, de la
présence en zone urbaine sensible et de la gestion des livrets A pour le compte
des populations fragiles.
Comme vous, monsieur Lecerf, je suis particulièrement attachée, dans le cadre
de ces missions, à la présence de La Poste sur l'ensemble de notre territoire.
Il s'agit là d'un élément de la cohésion nationale et sociale que nous devons
absolument préserver.
(M. Joseph Ostermann applaudit.)
Le Gouvernement veille à ce que La Poste, service public auquel les Français
et nous-mêmes sommes très attachés, continue à être compétitive en se
modernisant pour offrir des services de qualité partout, à tous ses
utilisateurs et dans les meilleures conditions de coût. Il veille également à
ce que les évolutions soient menées dans le cadre d'un dialogue social de
grande qualité, d'une large concertation avec les organisations syndicales et
les personnels concernés.
L'accroissement de la part du courrier en concurrence ainsi que différentes
observations des autorités européennes me conduisent aujourd'hui à m'interroger
sur le dispositif pertinent de régulation du service postal.
Monsieur Trémel, le ministère travaille actuellement sur plusieurs dispositifs
de régulation possibles. Je ferai très prochainement des propositions sur ce
sujet à M. le Premier ministre et, le cas échéant, le Parlement pourrait être
amené à se prononcer.
Parmi les grands enjeux de l'année 2003, citons aussi la renégociation des
accords entre La Poste, l'Etat et la presse, car les accords précédents, dits
accords Galmot, ont expiré à la fin de l'année 2001. Ces accords concernant le
transport et la distribution de la presse représentent un enjeu considérable,
d'abord pour l'Etat, qui inscrit une contribution de 290 millions d'euros dans
le projet de loi de finances, ensuite pour La Poste, pour qui la presse
représente une part significative de son trafic et, enfin, pour la presse, à
qui la distribution postale permet de fidéliser les lecteurs abonnés.
Ces grands sujets feront partie du contrat de plan à venir de La Poste. Au
cours de l'année 2003, j'aurai l'occasion de m'exprimer sur les différentes
dispositions qu'il contiendra et de les mettre en perspective pour conforter
l'avenir de ce grand service public auquel les Français et le Gouvernement sont
très attachés.
Enfin, il convient de favoriser le développement des télécommunications.
Comme l'a souligné M. Hérisson, les télécommunications constituent un secteur
qui connaît de graves difficultés, mais qui reste tout à fait majeur dans notre
économie et qui conserve un potentiel important de croissance. Telle est la
conviction du Gouvernement, dont la politique a pour ambition de favoriser le
développement des télécommunications.
La croissance de ce marché est bien inférieure aux prévisions et les
entreprises sont dans une situation financière difficile, qui fragilise
notamment l'emploi. Il est bien connu que l'une des causes de cette situation
provient des lourdes ponctions que les différents Etats européens ont
effectuées sur les opérations de téléphonie mobile de troisième génération.
M. Pierre Hérisson,
rapporteur pour avis.
Très bien !
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
Afin de renouer avec la croissance et le succès que
l'industrie européenne a connu avec le développement du GSM, le
Global
System for Mobile Communications
, le président de la République a transmis
tout récemment au président de la Commission européenne et au président en
exercice du Conseil européen quelques éléments de réflexion sur ce sujet et
tendant à faciliter le déploiement des réseaux du futur par les opérateurs et à
en assouplir les conditions d'exploitation, à mobiliser des aides européennes
au financement de la construction des réseaux, tels les fonds européens et la
Banque européenne d'investissement, et à financer des programmes de recherche
pour accélérer l'émergence de nouveaux services de télécommunications, par
exemple la vidéo.
Je me réjouis que ces suggestions françaises aient été mises à l'ordre du jour
du prochain Conseil des ministres européens des télécommunications, les 4 et 5
décembre prochain. Je serai tout à fait heureuse de soutenir devant ledit
Conseil ces propositions du Président de la République française.
En ce qui concerne France Télécom, je rappelle qu'il s'agit d'une très grande
entreprise, performante et essentielle pour la collectivité. Elle emploie 240
000 personnes. Elle connaît, chacun le sait, des difficultés financières liées
à des investissements hasardeux et mal menés au plus haut de la « bulle »
financière des télécommunications.
Le Gouvernement a pris la mesure de ces difficultés et entend les traiter avec
méthode et sans précipitation excessive, qui nuirait à l'entreprise.
M. Thierry Breton, le nouveau président, est à pied d'oeuvre depuis le 2
octobre dernier. Il a toute la compétence et l'expérience nécessaires et,
naturellement, toute la confiance du Gouvernement. Un conseil d'administration
de France Télécom se tiendra le 4 décembre prochain. A cette occasion, son
président présentera les conclusions de l'état des lieux qu'il a conduit depuis
son arrivée, ainsi que la stratégie et le plan de redressement qu'il propose
pour l'entreprise.
A cet égard, le renforcement des fonds propres de France Telecom est
indispensable à son rétablissement financier. Les modalités n'en sont pas
encore définitivement fixées. Elles devront être élaborées par l'entreprise en
liaison avec les actionnaires et les investisseurs. L'Etat soutiendra
financièrement cette opération, en jouant son rôle d'actionnaire dans le cadre
des règles communautaires. Comme l'a souligné M. Lecerf à juste titre, le
Gouvernement aura à coeur de prendre en compte, dans toute la mesure du
possible, la situation des actionnaires individuels et salariés.
En conclusion, je tiens à souligner que le projet de budget du ministère de
l'industrie pour 2003 a été construit sur un équilibre entre la nécessité de
gérer au mieux les crédits publics et la préservation de l'avenir. En effet, et
vous avez pu le constater, nos priorités portent sur la formation,
l'innovation, en particulier dans les PMI, le développement de secteurs majeurs
comme La Poste et les télécommunications et, enfin, la disponibilité d'une
énergie compétitive.
Cette politique s'inscrit dans la dimension européenne. En étroite
concertation avec mes homologues allemands, nous agissons pour que l'Union
européenne redevienne un territoire attractif pour le développement industriel.
Il s'agit non seulement de permettre aux secteurs porteurs comme les
biotechnologies ou les nouvelles techniques de l'information et de la
communication de réaliser tout leur potentiel, mais aussi de créer des
conditions plus favorables d'un développement de secteurs plus traditionnels,
constitués de dizaines de milliers d'entreprises, souvent familiales, et
employant des centaines de milliers de salariés.
Nous refusons toute fatalité qui condamnerait une grande partie de notre tissu
industriel. Notre politique, visant à libérer les énergies créatrices, devra
redonner à toutes nos entreprises industrielles, quels que soient leur taille
et leur secteur, un avenir et, surtout, une confiance dans l'avenir.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant l'industrie seront mis aux
voix aujourd'hui même, à la fin de l'examen des crédits affectés au commerce
extérieur.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 23 186 385 euros. »
La parole est à Mme Odette Terrade, sur le titre III.
Mme Odette Terrade.
Madame la ministre, vous avez déclaré devant l'Assemblée nationale que la plus
grande ambition de ce budget pour 2003 était de favoriser la compétitivité des
entreprises françaises. Je ne crois franchement pas que votre politique de
laisser-faire, qui vise à abandonner des pans entiers de notre économie à la
seule régulation du marché, puisse aboutir à une telle ambition.
Comme je le disais tout à l'heure, lorsque des entreprises licencient à tour
de bras du personnel qualifié, précarisent leurs salariés, c'est précisément la
compétitivité de nos entreprises qui risque à terme d'en pâtir.
Pour autant, vous visez vos objectifs de libéralisation de nos économies et de
privatisation de nos grandes entreprises de service public. Ainsi, le 25
novembre dernier, vous avez approuvé l'ouverture totale à la concurrence des
marchés de l'électricité et du gaz pour 2007. Nous savons tous, ici, que cette
déréglementation conduira inévitablement à une dégradation de la qualité de nos
services publics ! Vous le reconnaissez vous-même, madame la ministre, puisque
vous avez souhaité que la Commission européenne se livre à un bilan d'étape en
2006, afin, « si besoin est, de prendre des mesures correctrices qui pourraient
s'imposer ». Vous ajoutiez que « seule une situation très dégradée » pourrait
constituer un obstacle à l'ouverture du marché aux particuliers.
Nous avons déjà eu l'occasion de nous livrer à un bilan en nous appuyant sur
des études montrant la dégradation des services publics du rail, de la poste,
des télécommunications et de l'énergie dans les pays qui avaient libéralisé
totalement ces activités. S'agissant du rail, n'oublions jamais le drame de
Paddington en Grande-Bretagne !
En France, le bilan d'étape est clair, puisqu'il témoigne d'une dégradation
déjà avancée de nos services publics.
En ce qui concerne le service postal, il faut noter la fermeture de nombreux
bureaux de postes jugés non rentables, entre 500 et 700 d'ici à la fin de
l'année, la concentration des centres de tri, la compression de la masse
salariale, la précarisation du personnel, le non-remplacement des départs à la
retraite, autant d'éléments compromettant la qualité de ce service de
proximité, son rôle de « production » de lien social et d'aménagement du
territoire. Les pertes de recettes consécutives à l'ouverture partielle à la
concurrence contraignent déjà la poste à une rationalisation forcenée, à un
développement de ses activités financières au détriment des usagers les plus
nécessiteux et, à terme, à l'augmentation de ses tarifs en direction des
usagers non éligibles.
En ce qui concerne le service public de l'électricité et du gaz, des
entreprises comme EDF et GDF font l'objet d'une véritable ponction financière
de la part des gros clients éligibles qui obtiennent de substantiels rabais de
tarifs, de l'ordre de 15 % pour EDF et de 20 % pour GDF. Un tel transfert de
richesse, au nom de la compétitivité, est-il admissible lorsque ces mêmes
industriels licencient à tour de bras pour répondre aux exigences des marchés
financiers ? Il est d'autant plus intolérable qu'il conduit inévitablement à la
hausse de la facture des particuliers.
A Gaz de France, malgré une situation financière confortable avec 766 millions
d'euros de bénéfice net, les tarifs domestiques ont augmenté de 30 % ces deux
dernières années. Cette politique de forte augmentation de la marge fondée sur
l'augmentation des tarifs des particuliers est contraire aux principes mêmes du
service public, celui d'une tarification au coût de revient. GDF a-t-il
l'intention de se constituer un « trésor de guerre » sur le dos des usagers
pour faire face aux déboires financiers de son département international et se
lancer à nouveau vers d'autres conquêtes internationales ? Ce transfert
financier du département national vers le département international du groupe a
pour conséquence immédiate la fermeture de nombreuses agences de proximité !
Est-il maintenant nécessaire de prendre l'exemple des télécommunications, en
insistant sur le problème de la fracture numérique, sur le désistement probable
de l'un des opérateurs privés qui s'étaient engagés, en septembre dernier, à
couvrir en téléphonie mobile les fameuses « zones blanches » ?
On peut aussi souligner la ponction financière qu'ont opérée les marchés
financiers et les banques à la suite des difficultés financières de France
Télécom. Qu'en est-il de la renégociation de la charge de la dette ? Les
financiers qui ont avalisé la stratégie à court terme de développement à
l'international de France Télécom n'ont-ils pas, eux aussi, leur part de
responsabilité à assumer ?
Les petits actionnaires qui ont vu leur épargne se volatiliser lorsque le
cours de l'action a atteint le niveau extrémement bas de 8 euros ont dû, quant
à eux, éprouver les méfaits des sautes d'humeur des marchés financiers et des
dérives spéculatives insensées.
Que dire de plus, madame la ministre, si ce n'est que l'ouverture à la
concurrence et la privatisation conduisent à un double transfert de richesse
des entreprises de service public vers les industriels, autrement dit du
secteur public vers le secteur privé et des industriels vers les marchés
financiers.
Cette ponction se traduit par une dégradation continue de la qualité de nos
services publics, en même temps qu'elle porte atteinte à l'emploi et à notre
croissance. Les projets de votre Gouvernement, madame la ministre, constituent
donc une avancée supplémentaire dans le mouvement de « réappropriation » par le
marché de secteurs de l'économie qui, parce qu'ils constituaient des biens
collectifs, avaient été mis sous la tutelle de la puissance publique. Qui plus
est, ces secteurs sont placés sous la coupe des marchés financiers, ce qui
renforce encore les mécanismes d'usure de tout ce qui fondait notre solidarité
sociale, ainsi que notre cohérence nationale et territoriale.
Nous avons, quant à nous, avec les milliers de salariés et d'usagers qui
manifestent depuis quelques semaines dans les rues, la volonté que soit
maintenu notre système de solidarité sociale, au travers, notamment, des
entreprises publiques, soustraites aux critères de rentabilité du marché,
respectueuses des obligations de service public et socialement responsables.
C'est, pour nous, un tout autre choix de société que celui que vous nous
proposez.
(M. Jean-Pierre Bel applaudit.)
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 315 347 872 euros. »
L'amendement n° II-40, présenté par MM. Arthuis, Marini et Clouet au nom de la
commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre IV de 2 000 000 euros. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Cet amendement est cosigné par le
président de la commission, Jean Arthuis, et le rapporteur spécial Jean
Clouet.
Lors des débats préalables au vote de l'article d'équilibre dans la première
partie du projet de loi de finances, nous avons appris que la réévaluation des
conditions économiques de l'année 2002 conduisait à constater un niveau de
recettes fiscales sensiblement inférieur pour l'Etat. Toutes les conséquences
doivent donc en être tirées pour l'exercice 2003.
Nous avons vivement félicité le Gouvernement, notamment le ministre du budget,
de cette volonté de transparence et nous avons constaté qu'enfin le réalisme
l'emportait sur des présentations trop souvent fictives de nos comptes
financiers prévisionnels.
Dans ce contexte, la commission des finances estime, mes chers collègues,
qu'il convient, en contrepartie des 700 millions d'euros de réduction des
recettes fiscales, de faire figurer quelques mesures raisonnables et ciblées de
réduction des dépenses des différents départements ministériels. Lorsque les
recettes s'établissent à un niveau un peu inférieur à ce qui est escompté, il
est logique d'ajuster les dépenses en conséquence. D'ailleurs, nous avons eu la
chance - il convient de le souligner - de voir apparaître des recettes non
fiscales et même une recette fiscale supplémentaire, sur la proposition du
Sénat, qui ont permis de compenser l'essentiel de la réduction prévisionnelle
de recettes fiscales de 700 millions d'euros.
Madame le ministre, ce préalable étant rappelé, le présent amendement vise à
réduire de 2 millions d'euros les crédits figurant au titre IV de votre
ministère : il s'agit plus précisément, en son sein, de l'article 40 du
chapitre 45-10 relatif au Commissariat à l'énergie atomique.
En effet, la subvention de fonctionnement versée, sur les crédits de
l'industrie, au CEA sera amputée, pour 2002, de 4,4 millions d'euros par la loi
de finances rectificative de fin d'année, dans le cadre des annulations
globales qui touchent le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie.
Ainsi, la dotation réelle qui sera consommée par le CEA en 2002 s'élèvera non
pas à 366,4 millions d'euros, mais à 361,964 millions d'euros. Considérons
qu'il faut calculer l'effort pour 2003 à partir de la réalité de 2002 et non à
partir du chiffre initial du budget prévisionnel de 2002.
En réduisant de 2 millions d'euros la dotation prévue pour 2003, qui
s'établirait donc à 366,797 millions d'euros, le CEA bénéficierait d'une
progression réelle de sa subvention de fonctionnement de 1,3 % par rapport aux
dépenses réelles de 2002.
Je rappelle que les chiffres du projet de loi de finances préparé par le
Gouvernement et faisant référence à la loi de finances initiale pour 2002 ne
montraient, pour le même crédit, qu'une progression de 0,65 % de loi de
finances initiale à loi de finances initiale.
Nous sommes attachés, vous le savez, madame le ministre, au principe de
réalité. Dans notre logique, il faut privilégier les évolutions effectives de
moyens par rapport à des prévisions portant sur des faits quelque peu
éloignés.
Je souligne également que cet amendement, qui ne porte que sur le titre IV,
laisse complètement indemnes les moyens d'investissement du CEA.
Enfin, je livre un dernier élément à votre sagacité, mes chers collègues :
cette diminution représente 0,47 % du total des crédits de l'industrie en
dépenses obligatoires et en crédits de paiement dont bénéficie le CEA. Je
rappelle que le CEA dispose de ressources issues du ministère de la défense et
de ressources propres.
Par ailleurs, cette diminution, par rapport au titre IV du budget de
l'économie, des finances et de l'industrie, ne représente que 0,08 %.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
Je remercie M. Marini de l'explication complète qu'il
vient d'apporter ; il me dispense de toute autre précision.
Le Gouvernement partage tout à fait les réflexions qui ont été formulées et il
émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel, contre l'amendement.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Au nom du groupe socialiste, je tiens à exprimer notre désaccord sur le fond
et sur la forme de la démarche proposée. En outre, cet amendement semble très
peu cohérent avec la position constante qui est défendue par la commission des
affaires économiques en ce qui concerne tous les paramètres de notre
approvisionnement énergétique.
Le groupe socialiste votera donc contre cet amendement.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Etant cosignataire de cet
amendement, naturellement, je le voterai.
Je souhaite remercier Mme la ministre pour l'accord qu'elle vient d'exprimer
au nom du Gouvernement et rappeler à notre collègue M. Trémel que cet
amendement n'a pas été déposé par plaisir. Mais nous voulons qu'il soit bien
clair que la nouvelle majorité entend rompre avec une politique d'affichage
budgétaire, qui était une forme d'illusionnisme budgétaire.
(Très bien ! sur
les travées du RPR.)
Il ne sert à rien d'inscrire des crédits dès lors
qu'ils ne seront pas mobilisés !
Nous sommes confrontés à une situation économique sans doute plus incertaine
que celle que l'on pouvait imaginer au mois de septembre dernier, lorsque le
Gouvernement a arrêté son projet de loi de finances pour 2003. Nous tirons les
conséquences de cette épreuve de vérité et de sincérité et nous ajustons les
crédits qui sont mis à la disposition du Gouvernement. Voilà, mon cher
collègue, quelle doit être notre ligne de conduite.
M. Gérard Cornu.
Très bien !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-40.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président. « Titre V. - Autorisations de programme : 410 384 000 euros ;
« Crédits de paiement : 175 967 000 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 730 741 000 euros.
« Crédits de paiement : 537 978 000 euros. »
La parole est à M. Roger Rinchet.
M. Roger Rinchet.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, faire de la
politique, c'est assurer le quotidien, certes, mais c'est surtout essayer de
voir à dix, vingt ou cinquante ans ce que sera la vie de notre planète. C'est
essayer de penser loin, tâche difficile, mais exaltante et indispensable.
L'avenir de la planète en matière environnementale, on en parle beaucoup. On
en a parlé savamment à Rio, à Kyoto, à Johannesburg. On en parle à Paris. On en
parle partout.
Mais il faut aussi encourager et soutenir tous ceux qui ont la volonté d'agir,
de changer concrètement les choses en matière d'environnement et de
développement durable.
La France et l'Europe doivent être, dans ce domaine, les fers de lance de ce
vrai combat écologique, celui des actes, des réalisations, si modestes
soient-elles, qui permettront, dans les décennies à venir, de renverser les
tendances actuelles et ainsi de sauver du désastre écologique irrémédiable
notre petite planète qui, ne l'oublions pas, aura doublé sa population d'ici à
2050 !
Les bonnes volontés et les initiatives existent, nombreuses, tant chez les
citoyens que chez les élus, en matière d'élimination des déchets, de
dépollution ou d'énergies renouvelables naturelles et propres.
Mais tout ce qui est mis en place aujourd'hui coûte très cher en ce qui
concerne les énergies renouvelables, apparemment plus onéreuses et donc moins
compétitives que les énergies classiques.
Les pionniers en énergies renouvelables doivent avoir les moyens de faire
partager leur foi par le plus grand nombre, ce qui passe par une aide
importante des pouvoirs publics, faute de quoi les réalisations actuelles
seront sans lendemain et les grands projets qui se préparent resteront dans les
cartons.
M. Roland Courteau.
Exactement !
M. Roger Rinchet.
C'est pourquoi je voudrais brièvement évoquer l'Agence de l'environnement et
de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, son budget, son avenir, son rôle
essentiel dans le « décollage » des énergies renouvelables.
Certes, madame la ministre, les crédits de votre ministère en faveur de
l'ADEME sont en nette augmentation. Nous l'apprécions. Mais, à y regarder de
plus près, nous nous rendons compte que, globalement, les moyens qui lui sont
dévolus sont en diminution, en particulier ceux qui proviennent du ministère de
l'écologie et du développement durable, alors que les missions de l'ADEME se
sont alourdies, notamment avec l'élimination des stocks de farines animales.
Je connais bien l'argument souvent invoqué pour justifier les diminutions des
crédits dans les budgets qui consiste à souligner la sous-consommation des
crédits alloués l'année précédente. Or cette sous-consommation est due non pas
au manque de dossiers à financer, mais plutôt à la complexité des formalités
administratives qui paralyse la vie de nos institutions.
Alors, oui à une simplification et à une accélération des procédures, et nous
assisterons à une consommation bien supérieure des crédits, car les dossiers en
attente sont nombreux.
Il ne faudrait pas, en réduisant les moyens alloués à l'ADEME, afficher un
manque de volonté de promouvoir les énergies renouvelables au moment où, à
travers le pays, se développe une prise de conscience de l'importance de ces
nouvelles énergies, et alors que de nombreux pays ont pris sur nous, en matière
d'énergies renouvelables, une très large avance sur le plan tant de la
recherche que des réalisations pratiques. L'Allemagne, l'Autriche et même la
Scandinavie ont pris sur nous une avance considérable dans le domaine de
l'énergie solaire, alors que ces pays sont moins généreusement ensoleillés que
ne l'est la France. Il y a vraiment, dans ce domaine, matière à réflexion et à
action.
Ne brisons pas cet élan que nous avons eu tant de mal à susciter. Ce serait
une catastrophe pour la grande politique environnementale dont tous les hommes
et les femmes de bonne volonté se recommandent aujourd'hui.
Ne laissons pas gagner l'idée, trop souvent répandue par les incrédules ou par
certains lobbies des énergies classiques, que les énergies renouvelables sont
des chimères et leurs promoteurs des Don Quichotte.
Pour être convaincu de la nécessité de maintenir les aides publiques à leur
niveau actuel, il conviendrait de procéder à une étude comparée de la globalité
des coûts, directs et indirects, des différentes énergies. Les marées noires à
répétition, les menaces sur la couche d'ozone, les conséquences du
réchauffement de la planète ou les mesures de protection contre toutes les
pollutions devraient faire pencher radicalement la balance en faveur des
énergies renouvelables. Maire depuis trente ans d'une petite commune de quatre
mille habitants qui développe, depuis vingt ans, l'énergie solaire, je ne pense
pas être un rêveur. Je pourrais, si nous en avions le temps, comme je le fais
régulièrement dans tous les colloques consacrés à l'énergie en France ou en
Europe, vous dire tout ce que l'énergie solaire a déjà pu nous apporter sur le
plan tant économique qu'écologique.
Nous pourrions aussi imaginer tout ce que les énergies nouvelles pourraient
apporter sur le plan politique au monde, qui deviendrait tellement moins
dépendant des quelques pays détenteurs d'énormes réserves d'énergies fossiles,
avec tous les dérèglements majeurs de l'équilibre du monde que cela induit.
L'indépendance politique dépend grandement, dans notre pays moderne, de
l'indépendance énergétique.
C'est pourquoi, madame la ministre, je vous demande de faire en sorte que
l'ADEME puisse être dotée de moyens accrus. Pourront alors être aidés, dans des
délais plus réduits, tous ces projets émanant de citoyens, d'entreprises ou de
collectivités publiques qui devraient nous permettre, dans un premier temps, de
respecter nos engagements à l'égard du protocole de Kyoto - 2010, c'est demain
! - et, plus durablement, d'améliorer la vie sur notre planète pour ce siècle
qui commence et qui sera celui de nos enfants et nos petits-enfants ! C'est
peut-être là le vrai sens du développement durable.
(Applaudissements sur
les travées du groupe socialiste et du groupe CRC).
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Bel.
M. Jean-Pierre Bel.
A ce moment de nos travaux, madame la ministre, mon intervention portera,
au-delà des orientations de notre politique industrielle, de l'aide et du
soutien apportés à nos PME et à nos PMI, sur les actions que vous comptez
mettre en place pour enrayer le déclin continu de l'industrie textile.
En prenant connaissance des débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale,
j'ai été frappé de constater que même le rapporteur spécial du budget,
appartenant à la majorité, M. Novelli, reconnaissait que « la politique
industrielle à mener n'apparaît pas clairement dans ce budget ». Pour l'avenir
de nos entreprises, pour le maintien de l'activité et de l'emploi, très
sincèrement, j'espère qu'il se trompe.
Je ne voudrais pas que soient corroborées les craintes, exprimées par beaucoup
d'observateurs, à un moment où la conjoncture internationale est incertaine et
où la consommation des ménages faiblit, de voir démantelés les outils
générateurs de politiques actives en faveur de l'emploi.
Il n'est pas nécessaire d'être un économiste éclairé pour constater que la
liste des plans sociaux s'allonge et que les licenciements économiques se
multiplient. Ces évidences sont, malheureusement, confortées quand nous
entendons des discours officiels opposer de façon caricaturale les « emplois
non marchands » aux « emplois marchands ».
En effet, même si cela ne dépend pas directement de votre ministère - c'est
tout de même son environnement ! - l'affaiblissement des outils de l'insertion
par l'économique et des dipositifs d'aide au travail, permettez-moi de le dire
ici, ne nous rassure pas sur l'avenir.
Pour les 6 millions de salariés qui sont concernés comme pour leurs
entreprises, il est essentiel de savoir si vous avez gardé l'ambition d'une
vraie politique industrielle.
Certains, comme, semble-t-il, M. le ministre de l'économie, des finances et de
l'industrie, pensent que « l'industrie n'a pas besoin qu'on s'occupe d'elle ou
qu'on l'aide ». C'est une façon de voir. Mais que serait-il advenu alors, pour
prendre un exemple qui concerne ma région, de l'aéronautique ou du secteur
spatial sans les politiques volontaristes du début de la Ve République ?
Nous aimerions croire, madame la ministre, aux intentions que vous affichez
pour développer une politique active en faveur des PMI par le soutien à
l'innovation et à la recherche, mais il faudra plus que de bonnes intentions,
certainement plus que ce qui a déjà été dévoilé pour obtenir des résultats
significatifs. C'est vrai pour la métallurgie, la sidérurgie et l'automobile ;
c'est particulièrement vrai pour les industries du textile et de
l'habillement.
Nous l'avons rappelé au moment de la discussion de la question orale relative
au textile posée par le président du Sénat, M. Christian Poncelet, le 10
octobre : près de 450 000 salariés sont concernés directement ou indirectement
dans 3 000 entreprises, soit une perte de 55 % de l'effectif en cinq ans. Il
faudra plus que l'annonce de la constitution d'une zone
pan-euro-méditerranéenne pour donner des chances de survie à l'industrie
textile !
Il n'y a plus de temps à perdre pour adopter des mesures offensives et d'abord
pour l'aide à l'innovation et à la recherche ; il faut doter les Réseaux
innovation textile habillement de réels moyens, favoriser la mise en place de
chargés de mission en matière d'innovation, améliorer et simplifier les
conditions d'utilisation des crédits d'impôt recherche. En avons-nous les
moyens ? On peut en douter quand on constate le recul des dotations allouées à
la recherche et à l'innovation inscrites au chapitre 66-01 et la stagnation des
subventions à l'investissement dans le chapitre 66-02.
Nous savons tous que la matière première du futur est, plus que jamais, la
matière grise alliée à la connaissance ; elle seule peut garantir demain la
valeur ajoutée des entreprises.
Par ailleurs, nous savons bien aussi que, pour le développement des PMI, la
diffusion des technologies s'effectue dans les contrats de plan Etat-régions.
La participation des régions permet sensiblement d'amplifier ces fonds, et nous
nous en félicitons. Nous sommes néanmoins préoccupés de voir le soutien à
l'investissement matériel des entreprises - le fonds de développement des PMI,
le FD-PMI -, qui, le plus souvent, profite aux plus petites entreprises,
connaître une très nette baisse, puisqu'il diminue de près de 2,5 millions
d'euros.
Pour terminer, madame la ministre, j'aimerais vous interroger sur les
déclarations qu'a faites votre collègue ministre de l'intérieur au sujet de
l'avenir du textile. Je ne suis pas de ceux qui s'étonneraient de ce que,
décidément, M. Sarkozy s'intéresse à tout et s'exprime sur tout, d'autant que
je n'ignore pas sa très grande proximité avec le président de l'Union des
industries textiles, M. Guillaume Sarkozy...
Que M. Nicolas Sarkozy connaisse bien les problèmes du textile, je m'en
félicite !
Mais je m'interroge quand le même Nicolas Sarkozy, de passage à Troyes, dans
l'Aube, le 19 novembre dernier - soit à peine plus d'un mois après la
discussion au Sénat de la question sur le textile à l'occasion de laquelle vous
nous aviez apporté un certain nombre de réponses, madame la ministre -, annonce
que M. le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, est très préoccupé par le
textile et qu'il prépare des mesures. Ou il en a trop dit, et il n'est pas bon
de susciter de faux espoirs, ou ses propos sont fondés sur du concret et des
éléments fiables, et alors, madame la ministre, il vous appartient sans plus
attendre, à vous qui avez la charge de ce ministère, de nous en faire part.
Madame la ministre, pour tout un secteur jadis fleuron de l'économie
nationale, pour des centaines de milliers de femmes et d'hommes qui osent
encore y croire, pour des régions entières qui sont à nouveau prêtes à se
mobiliser, l'heure n'est plus aux voeux pieux ou aux déclarations d'intention
mais, au contraire, à une politique d'accompagnement de nos industries.
C'est en fonction de vos réponses que nous vérifierons si vous croyez encore
en ces femmes et en ces hommes, en leur capacité et en leur savoir-faire, ou si
vous vous résignez à sacrifier un pan entier de notre économie.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe
CRC.)
M. le président.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur.
Madame la ministre, je souhaite à mon tour appeler votre attention sur les
difficultés importantes que connaît l'entreprise CIT-Alcatel où, vous le savez,
1 000 licenciements ont été annoncés, sur les 8 000 emplois que compte cette
entreprise sur divers sites en France. Je me permets de vous interroger après
avoir étudié de manière approfondie cette question avec les salariés de
l'entreprise CIT-Alcatel d'Ormes, dans le département du Loiret, et avec les
dirigeants de cette société.
Comme vous l'avez dit à l'instant, madame la ministre, ces difficultés sont
directement liées au surendettement des principaux opérateurs européens et
mondiaux dans ce domaine, et tout particulièrement de France Télécom.
Les solutions qui doivent être trouvées relèvent à la fois de la France et de
l'Europe.
Pour ce qui est de l'Europe, une action particulière doit être engagée pour
alléger le coût des licences UMTS payées par les opérateurs qui est - vous
l'avez dit, madame la ministre - l'une des principales causes des difficultés
de ces entreprises donneuses d'ordres.
Mais ces solutions passent aussi par un développement de l'accès au haut débit
et à l'ADSL dans notre pays.
L'extension de l'accès large bande est, en effet, susceptible de relancer
l'investissement dans ce secteur. La progression de l'équipement des lignes
téléphoniques en accès large bande peut avoir des effets d'entraînement sur de
nombreuses autres activités qui dépendent en partie des télécommunications.
L'ADSL, qui rend les communications plus rapides, peut susciter un
développement du commerce électronique, notamment la vente de musique ou de
vidéogrammes sur internet et une offre de services beaucoup plus riche.
L'ADSL permet également un accès plus large des consommateurs aux services
électroniques. Si, aujourd'hui, les services proposés sur internet ne
concernent que ceux d'entre nous qui possèdent un ordinateur, l'ADSL en fera
bénéficier davantage de personnes grâce à la possibilité, demain, d'une
connexion par le téléviseur.
Enfin, l'ADSL ouvre de nouvelles opportunités aux entreprises et aux
administrations publiques. D'une part, l'ADSL permet l'extension du télétravail
et rend possible les échanges par vidéo-conférence entre plusieurs personnes.
D'autre part, son développement peut être un facteur de réduction de la coupure
entre les villes et le monde rural.
En 2002, 13 millions de lignes téléphoniques seulement étaient équipées de
l'accès large bande en Europe, contre 18 millions en Amérique du Nord. Pour
résorber ce retard européen, il faudrait équiper environ 7 % de lignes par an,
étant donné que 4 % à 6 % des lignes sont équipées annuellement en Amérique du
Nord.
Rattraper ce retard en France et en Europe, c'est incontestablement la réponse
la plus efficace qui peut être apportée aux salariés d'une entreprise comme
CIT-Alcatel et au groupe Alcatel. Cela suppose une politique nationale. L'Etat
et ses services peuvent donner l'exemple en investissant massivement dans
l'ADSL pour la formation, pour les services aux usagers, pour
l'administration.
Comme vous le savez, madame la ministre, il n'y a pas une seule école au
Canada qui ne soit dotée d'un accès à Internet par large bande. Ce qui est
possible à Terre-Neuve doit donc l'être en France. D'ailleurs, le Premier
ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, vient d'afficher son ambition d'atteindre 10
millions d'abonnés à l'ADSL en cinq ans.
C'est pourquoi je souhaite vous demander, madame la ministre, quels moyens
concrets vous comptez dégager, à court terme, pour atteindre cet objectif de 10
millions d'abonnés en cinq ans.
Cela étant, il est, bien entendu, essentiel, comme vous l'avez déjà indiqué,
qu'une action concertée soit menée et qu'un plan de relance de l'ADSL et du
haut débit soit défini au plan européen.
Vous avez souligné l'importance du conseil des ministres européens auquel vous
allez participer les 4 et 5 décembre prochain. Il est vrai que les décisions
qui seront prises lors de ce conseil sont attendues par les salariés de
CIT-Alcatel et du secteur. Je vous remercie, par avance, de bien vouloir nous
tenir informés, peut-être de manière plus précise que ce que vous avez indiqué
tout à l'heure, des orientations que vous comptez défendre, au nom de la
France, lors de cette réunion décisive.
(Applaudissements sur les travées du
groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
J'apprécie que M. Rinchet partage l'intérêt de notre
gouvernement pour le développement durable, en général, et pour les énergies
nouvelles, en particulier. Je dois dire que je préfère l'expression « énergies
nouvelles » à celle d'« énergies renouvelables ». Je la trouve beaucoup plus
dynamique. J'ai souhaité, d'ailleurs, que le débat national dont j'ai la charge
et que je vais engager très prochainement porte sur les énergies et non pas sur
l'énergie. En cela même, il y a toute une réponse à votre question, monsieur le
sénateur.
S'agissant des crédits de l'ADEME, vous savez parfaitement, monsieur Rinchet,
qu'à l'Assemblée nationale j'ai combattu un amendement qui tendait à le
réduire. Je suis sûre que cela ne vous a pas échappé. Je n'ai pas besoin de
multiplier les commentaires, vous aurez compris à quel point les missions de
l'ADEME sont, à mes yeux, plus que jamais nécessaires dans le contexte que nous
connaissons.
M. Bel a évoqué tant de sujets qu'il me faudrait beaucoup de temps pour lui
répondre.
Monsieur le sénateur, l'accompagnement des mutations industrielles est
véritablement, comme je vous l'ai déjà dit, et ce n'est pas un hasard, un axe
fondamental de la politique que je souhaite mener. Je me permets de vous
renvoyer à l'intervention que j'ai faite devant cette même assemblée, le 10
octobre dernier, s'agissant plus particulièrement du textile, que vous avez
évoqué. A titre de complément, je vous invite également à prendre connaissance
des initiatives très concrètes que j'ai d'ores et déjà lancées dans l'un des
départements...
M. Jean-Pierre Bel.
Ce n'est pas le seul !
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
... - je dis bien : « dans l'un des départements » -
qui se trouvent plus particulièrement affectés par la crise du textile.
Mme Odette Terrade.
Et le Nord ?
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
Je me suis rendue dans les Vosges, et je suis prête à
aller dans les autres départements touchés pour réaffirmer ma détermination et
ma foi dans l'avenir du textile et pour la concrétiser en proposant un travail
de terrain. Je suis persuadée qu'il s'agit non pas d'un secteur en déclin, mais
d'un secteur en pleine mutation que nous avons tout lieu de soutenir.
Monsieur Sueur, je vous remercie du soutien que vous avez apporté à l'action
du Gouvernement, action qui traduit les propositions et suggestions du
Président de la République en faveur du développement des
télécommunications.
Vous avez rappelé que l'objectif du Gouvernement, certes ambitieux mais
néanmoins réalisable, visait à relancer le réseau à haut débit et à attirer 10
millions d'abonnés sur cinq ans. Le temps dont je dispose ne me permet pas de
vous exposer les moyens qui nous permettront d'atteindre cet objectif très
important.
S'agissant du conseil des ministres européens des télécommunications, je ne
vous cache pas que l'exercice ne sera pas facile. Amener nos partenaires
européens à partager le constat que nous faisons et à accepter que la
Commission européenne présente des propositions sur la base de ce constat ne
serait pas un mince résultat, car il nous donnerait une base de départ, une
rampe de lancement pour une véritable politique industrielle européenne des
télécommunications.
C'est dans ce cadre que nous devons, ensemble, là aussi, rechercher des
solutions positives aux difficultés de ce secteur qui est en crise -
provisoirement, je l'espère - et que le Gouvernement a bien l'intention de
relancer.
M. le président.
En accord avec la commission des finances, j'appelle en discussion
l'amendement n° II-31 tendant à insérer un article additionnel après l'article
68
bis
.
Article additionnel après l'article 68 bis
M. le président.
L'amendement n° II-31, présenté par MM. Hérisson et Larcher, est ainsi libellé
:
« Après l'article 68
bis
, insérer un article additionnel ainsi rédigé
:
« Le Gouvernement déposera chaque année au Parlement un rapport présentant le
bilan d'activité de l'Autorité de régulation des télécommunications. »
La parole est à M. Pierre Hérisson.
M. Pierre Hérisson.
Lors de la discussion du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale, un
amendement d'origine parlementaire a été adopté qui a réduit la dotation
budgétaire pour 2003 de l'Autorité de régulation des télécommunications, l'ART,
de 100 000 euros.
Chacun s'accorde à reconnaître la place qu'a su prendre cette autorité de
régulation. Pionnière en son genre, l'ART incarne le nouveau mode de régulation
sectorielle rendu nécessaire par l'ouverture à la concurrence de nos secteurs
publics. La Commission de régulation de l'électricité a ainsi été constituée
sur un modèle très voisin de celui de l'ART et son expérience a profité à
tous.
Alors même que le rôle de l'ART est allé croissant avec l'ouverture à la
concurrence et que l'ampleur de sa tâche s'en est trouvée accrue, les députés
ont choisi de réduire de 100 000 euros la dotation de l'autorité pour l'année
2003.
Outre le fait que cette réduction ne peut être considérée comme une
contribution sérieuse au respect du pacte de stabilité, elle handicaperait
sérieusement l'ART dans l'exercice de ses missions. Il faut, en outre, rappeler
que l'ART souffre déjà de la non-application de la loi de 1996 concernant son
financement et de la sous-estimation de ses ressources, comparées à toutes les
autorités de régulation européennes.
C'est pourquoi, en demandant au Gouvernement de mieux informer le Parlement
sur le bilan annuel d'activité de l'ART, cet amendement vise à attirer
l'attention du Gouvernement sur l'impérieuse nécessité de rétablir les crédits
de l'autorité, renforcée par les explications que je viens d'ajouter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Clouet,
rapporteur spécial.
La commission souhaiterait connaître l'avis du
Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Fontaine,
ministre déléguée.
Monsieur le rapporteur spécial, le Gouvernement
s'interroge sur la nature de cette proposition, qui pourrait bien être un
cavalier budgétaire. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement s'en remet à
la sagesse de la Haute Assemblée.
(Sourires.)
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Nous avons entendu Mme la
ministre. Cet amendement est peut-être, en l'état, un cavalier budgétaire, mais
il est surtout un appel que lancent nos collègues de la commission des affaires
économiques pour que l'on rétablisse les crédits de l'ART.
Cela étant, mon cher collègue Pierre Hérisson, la commission des finances est
à la recherche d'économies, et vous savez à quelles conditions il pourrait y
avoir rétablissement de crédits sans modification de l'enveloppe globale...
Faisons confiance au Gouvernement pour trouver les moyens propres à vous
satisfaire.
Quant aux rapports et aux bilans, dont je tiens à souligner combien ils sont
judicieux, il ne faudrait pas non plus qu'ils se multiplient, car tous ces
volumineux documents pourraient vite être chronophages ! Incitons plutôt à
l'accélération de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de
finances, dont la finalité est d'assurer une pleine transparence des actions
que conduit l'Etat, pour permettre à chaque ministre de rendre compte de son
action, et au Parlement de se faire une opinion sur la bonne exécution des
budgets.
Dans ces conditions, peut-être peut-on s'en remettre à la sagesse du Sénat, à
moins que M. Hérisson ne retire son amendement.
M. le président.
Monsieur Hérisson, l'amendement n° II-31 est-il maintenu ?
M. Pierre Hérisson.
Madame la ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes
chers collègues, je vais, bien sûr, retirer cet amendement...
(Protestations
sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Pierre Bel.
La sagesse !
M. Pierre Hérisson.
... en précisant que je fais confiance au Gouvernement.
Je rappelle cependant que l'Autorité de régulation des télécommunications,
dont le rôle a été défini par la loi de 1996, n'est pas une agence ni une
association chargée de fabriquer des rapports. Il s'agit, par rapport aux
autorités de régulation des autres pays de l'Union européenne, de la seule
autorité qui assure, comme son nom l'indique, la régulation des
télécommunications, dès lors que le marché a été ouvert à la concurrence. Il ne
s'agit donc pas simplement d'une autorité instituée pour le plaisir de créer
une autorité et une compétence !
Aux Etats-Unis, je le rappelle, cette autorité est totalement indépendante.
Ses membres sont nommés pour une durée déterminée par le Président des
Etats-Unis, mais, dès lors que cette nomination est intervenue, celui-ci n'a
plus aucun pouvoir sur eux. Nous n'en sommes pas là dans notre pays, mais il
n'en demeure pas moins que cette autorité a besoin de financements.
Madame la ministre, je vous demande de veiller, à l'avenir, à ce que
l'Autorité de régulation des télécommunications se voit attribuer un budget
comparable à celui des autres pays de l'Union européenne. En effet, il ne
représente aujourd'hui qu'un faible pourcentage du budget de l'autorité de
régulation de la Grande-Bretagne ou de l'Allemagne, pour ne citer que ces deux
pays.
Monsieur le président, je profite du temps de parole qui m'est imparti pour
attirer l'attention de la conférence des présidents sur une difficulté de
fonctionnement. Le temps de parole des rapporteurs pour avis a été limité à
cinq minutes. Or il suffit de demander la parole sur les articles pour exprimer
un avis budgétaire beaucoup plus approfondi que ne le font les rapporteurs pour
avis. Je considère que cette situation rend difficile le bon déroulement des
débats au sein de notre assemblée.
(Applaudissements.)
M. le président.
L'amendement n° II-31 est retiré.
Je prends acte de votre remarque, monsieur Hérisson, et je la transmettrai à
la prochaine conférence des présidents. M. le président de la commission des
finances, qui est présent, pourra également se faire votre interprète.
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'industrie.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept
heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES,
COMMERCE ET ARTISANAT
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il faut souligner la modestie
traditionnelle du budget de l'artisanat et du commerce. Pour 2003, il ne
représentera encore qu'un sixième de l'effort financier total de l'Etat en
direction des PME. Dans l'action du secrétariat d'Etat, le « budgétaire » n'est
peut-être pas le plus important. Pour autant, il ne doit pas être sous-évalué.
En effet, les crédits d'intervention qui composent ce budget ont souvent un
effet de levier qui en démultiplie l'impact.
J'en viens aux chiffres.
Les crédits s'élevaient à 61 millions d'euros en 2002 ; ils triplent en 2003
et passent à 184 millions d'euros. Cette augmentation provient d'un changement
de périmètre budgétaire, en raison de la budgétisation, pour 2003, de la taxe
d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA. Cette taxe finançait notamment le
fonds d'indemnisation pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le
FISAC, ainsi que l'aide au départ des commerçants et artisans. Désormais, ces
dotations sont inscrites dans le budget du secrétariat d'Etat. En réalité, dans
un périmètre élargi aux actions ainsi budgétisées, on observe une simple
reconduction des moyens.
Désormais, les crédits du secrétariat d'Etat connaissent cinq grandes
affectations : la formation professionnelle, les actions économiques, le
financement des contrats de plan, le soutien social à travers l'aide au départ
des commerçants et des artisans, et enfin, l'accès au crédit des PME.
A ce propos, malgré une modération budgétaire d'ensemble, il m'a semblé qu'une
économie supplémentaire pourrait être réalisée. En effet, les crédits consacrés
aux bonifications d'intérêt paraissent surévalués, car ce dispositif est en
voie d'extinction. L'effort envisagé s'élèverait à 1 million d'euros. Le
président de la commission, le rapporteur général et moi-même avons déposé un
amendement en ce sens.
J'en viens à mes observations.
Ma première observation porte sur votre démarche budgétaire, qui doit être
expliquée. Comme je l'ai dit, les moyens de votre ministère sont globalement
reconduits.
Or votre projet de loi en faveur de l'initiative économique, monsieur le
secrétaire d'Etat, comprendra de nombreuses mesures destinées à favoriser la
création et la reprise d'entreprises. De plus, ce texte connaîtra le renfort
d'un autre projet destiné, lui, à promouvoir le développement économique.
Par ailleurs, avec la budgétisation de la TACA, 154 millions d'euros de
réserves sont affectés au budget de l'Etat, ce qui représente tout de même 84 %
du budget du secrétariat d'Etat.
Dès lors, pourquoi ne pas renforcer les moyens de ce dernier ?
D'abord, les mesures contenues dans le projet de loi pour l'initiative
économique n'auront pas de conséquence budgétaire pour le secrétariat d'Etat.
Ensuite, les recettes fiscales des chambres de commerce et d'industrie et des
chambres des métiers sont fortement augmentées, ce qui est sans incidence sur
le budget de l'Etat. Enfin, le passage d'une politique de subvention à une
politique d'allégement des charges se dessine, sans effet sur ce budget.
En outre, l'état des finances publiques impose que les priorités d'action ne
se traduisent plus par des crédits nouveaux.
Ma deuxième observation a trait à la budgétisation du FISAC. Je m'en réjouis
pour l'avoir préconisée l'année dernière. Il était en effet anormal que le
Parlement n'exerce pas son contrôle sur un organisme qui est doté de moyens
importants.
J'ai pu regretter que la formule du compte d'affectation spéciale que j'avais
suggérée n'ait pas été retenue car il pourrait s'avérer être plus difficile de
résister, dans un contexte de tension budgétaire, à la tentation de diminuer
les moyens du FISAC si n'apparaît plus, en regard, le produit de la TACA.
Toutefois, le contrôle parlementaire sur le FISAC renouvelle les perspectives
d'évaluation et donc d'optimisation de son action. Vous vous êtes en outre
engagé, monsieur le secrétaire d'Etat, à maintenir les crédits du FISAC durant
trois ans. Comme ils viennent d'être augmentés de 6 %, il y a lieu,
semble-t-il, d'être satisfait.
Ma troisième observation est relative à la préservation de l'EPARECA,
l'établissement public d'aménagement et de restructuration des espaces
commerciaux et artisanaux.
Dans un récent rapport d'information élaboré conjointement avec mon excellent
collègue Eric Doligé, j'ai exposé la nécessité de relancer l'action de
l'EPARECA, destiné à réhabiliter le commerce dans les banlieues.
Pour 2003, le Gouvernement a décidé de faire figurer une dotation à l'EPARECA
sur un compte d'affectation spéciale. Sans engager le Gouvernement, cette
inscription donne un cadre budgétaire à l'accord de nouveaux crédits à
l'EPARECA.
Dans l'attente de leur versement, il a été décidé d'abonder immédiatement la
trésorerie de l'établissement public de 3 millions d'euros prélevés sur le
produit de la TACA, avant sa budgétisation. Ce montant correspond à celui que
le président de l'EPARECA avait sollicité.
Ma dernière observation concerne la relance des simplifications
administratives. Je vous félicite, monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir
décidé d'amplifier l'effort de simplification des formalités administratives en
direction des petites entreprises.
Les dernières mesures qu'avait prises le précédent gouvernement m'inspirent
deux réflexions, dont vous tirerez peut-être profit.
D'une part, ces simplifications sont très souvent fondées sur les nouvelles
technologies. Or la mise en réseau ne permet pas toujours la simplification et
la capacité d'adaptation des utilisateurs risque d'être surévaluée.
D'autre part, certaines de ces simplifications passent par la création d'une
interface chargée de gérer une complexité qui, elle, demeure intacte, même si
l'usager peut y trouver son compte.
Dans votre projet de loi en faveur de l'initiative économique, des
simplifications utiles sont envisagées. En la matière, il faut surtout attendre
un projet d'ordonnance très ambitieux.
De ce qui vient d'être dit, la commission des finances a retenu l'essentiel, à
savoir le retour bienvenu à l'universalité budgétaire consécutif à la
budgétisation de la TACA et la maîtrise des dépenses. Aussi, elle vous
recommande, mes chers collègues, l'adoption de ce projet de budget.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants,
de l'Union centriste ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
l'examen des crédits budgétaires des PME, du commerce et de l'artisanat
s'inscrit, cette année, dans un contexte très particulier. En effet, le soutien
à ces activités a constitué pour le Gouvernement, et singulièrement pour le
Premier ministre, l'une des toutes premières priorités qu'il a entendu mettre
en oeuvre.
Or, comme le disait de manière différente bien que convergente le président de
la commission des finances, Jean Arthuis, l'intérêt que l'on porte à un secteur
ne se traduit pas nécessairement par des dépenses budgétaires en hausse, mais
bien plus par des réponses juridiques ou techniques qui répondent aux attentes
des intéressés. Cela est particulièrement vrai dans le domaine des PME, du
commerce et de l'artisanat.
Je dois, à cet égard, citer les deux lois Fillon, l'une visant à faciliter
l'insertion durable en entreprise de jeunes non formés, l'autre apportant les
assouplissements indispensables au régime des 35 heures. Je pense également au
projet d'ordonnance destiné à simplifier les formalités administratives, dont
vous avez fort justement rappelé, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'elles
constituent une véritable taxe déguisée.
Permettez-moi à ce propos de relayer auprès de vous, monsieur le secrétaire
d'Etat, une préoccupation forte des artisans de mon département qui est
certainement valable pour l'ensemble de notre territoire. Vous ne méconnaissez
pas cette préoccupation dont nous avons déjà eu l'occasion de discuter
ensemble, elle a trait au « document unique » institué par le décret du 5
novembre 2001. Celui-ci fait obligation aux employeurs de consigner dans un
document unique les résultats de l'évaluation des risques qui ont été
identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise, le non-respect de
cette obligation étant assorti d'une sanction pénale. Ne serait-il pas
envisageable, précisément dans un souci de simplification, d'aménager la règle
pour les unités comprenant moins de 250 salariés sans que soient pour autant
négligés les principes de précaution ? Une telle mesure serait un signe très
encourageant pour nos artisans et pour nos commerçants.
Le troisième axe concerne la création et la reprise d'entreprise.
Nous aurons l'occasion d'en débattre de manière approfondie dans quelques
semaines lors de l'examen du projet de loi « Agir pour l'initiative économique
», qui marquera une véritable rupture avec ce que nous avons connu dans le
passé.
Enfin, un futur projet de loi sur le statut de la petite entreprise permettra
de résoudre un certain nombre de difficultés, pendantes depuis de longues
années : la protection du patrimoine, la reconnaissance du conjoint, la
fiscalité des investissements, etc.
Telles sont, mes chers collègues, brossées à grands traits, les mesures à
venir qui concourront à créer l'environnement nouveau dont nos PME et nos
entrepreneurs, commerçants et artisans, ont besoin.
Dans ces perspectives, le projet de budget pour 2003 doit s'analyser comme un
dispositif de transition. Il comporte cependant des mesures fiscales qui ne
sont pas négligeables : des allégements de charges patronales, qui ne sont plus
conditionnées par l'application des 35 heures ou qui bénéficieront aux
contrats-jeunes, la suppression de la part salariale de la taxe
professionnelle, ou encore celle du droit de licence sur les débits de
boissons.
Le projet de loi de finances procède également, M. le rapporteur spécial l'a
souligné, à la budgétisation de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la
fameuse TACA, ce qui permettra au Parlement de mieux contrôler ce qui était
jusqu'alors une taxe parafiscale.
Certes, on peut regretter qu'à la faveur de cette opération, rendue nécessaire
par le projet de loi de finances de 2001, les excédents de la TACA aient été
récupérés par le budget général, mais cela participe d'une logique budgétaire
incontestable et ne devrait pas porter atteinte aux différentes actions que
finance cette taxe.
L'essentiel ne tient pas, en effet - je le dis très clairement - dans
l'affichage budgétaire, mais bien dans la consommation des crédits affectés au
fonds d'aide pour la sauvegarde de l'industrie et du commerce, le FISAC, dont
la dotation augmente même de près de 6 % pour atteindre 71 millions d'euros, à
l'aide au départ des artisans, reconduite à hauteur de 45 millions d'euros, au
comité professionnel de la distribution des carburants, pour 10 millions
d'euros.
S'agissant des autres dépenses d'intervention, les crédits affectés à la
formation professionnelle diminuent, car les actions de sensibilisation aux
métiers d'apprentissage sont de plus en plus prises en charge par les régions,
ce qui est une bonne chose.
En outre, si la subvention à l'agence pour la création d'entreprises est
reconduite, les crédits d'intervention ouverts au titre des contrats de plan
Etat-région augmentent, quant à eux, de plus de 23 %, pour s'établir à 4,6
millions d'euros.
S'agissant de l'accès aux crédits des PME, le secrétariat d'Etat poursuit la
politique engagée depuis plusieurs années, politique qui tend à redéployer son
soutien en faveur du fonds de garantie d'emprunts, en limitant à due
concurrence les bonifications d'intérêts.
Quant aux dépenses en capital, elles sont reconduites à l'identique par
rapport à 2002, en ce qui concerne tant les autorisations de programme que les
crédits de paiement.
A cet égard, je ne peux manquer, même si je n'ignore pas les contraintes
budgétaires, d'exprimer à nouveau les inquiétudes que j'avais manifestées l'an
dernier quant au taux de réalisation des contrats de plan Etat-régions et aux
montants ouverts à ce titre, lesquels sont encore insuffisants, malgré un
important rattrapage, pour garantir le respect des engagement de l'Etat à
l'horizon 2006.
Enfin, je dois mentionner les articles rattachés 64 et 65, qui ont pour objet
de permettre aux chambres consulaires d'accroître le produit de leurs « taxes
pour frais ». Les modifications prévues par ces deux articles, que je détaille
dans mon rapport écrit, vont dans le bon sens.
S'agissant des chambres de commerce et d'industrie, et dans l'attente d'une
réforme globale de leur mode de fonctionnement, je vous présenterai tout à
l'heure, à titre personnel, un amendement visant à lever l'obstacle fiscal qui
empêche leur regroupement volontaire.
Avant de conclure, je souhaite faire trois observations.
La première concerne le FISAC. De mon point de vue, la gestion du FISAC doit
aussi participer au mouvement de décentralisation qui s'engage et intervenir le
plus possible à l'échelon de la région, ce qui permettra aussi de favoriser la
proximité dans l'instruction des dossiers à travers les chambres consulaires
départementales, qui me semblent mieux adaptées pour l'instruction. Je suis
convaincu que la pérennité du fonds ne sera garantie que si une telle réforme
est entreprise.
La deuxième observation concerne la fiscalité. C'est l'élément déterminant des
politiques d'aides aux entreprises, bien davantage que tous les mécanismes de
prise en charge qu'on institue ici ou là. La meilleure preuve en a été fournie
par la baisse expérimentale de la TVA sur les travaux de réparation et de
rénovation des logements privés, qui doit dès lors être pérennisée.
Dans le même ordre d'idée, il faut naturellement obtenir de nos partenaires
européens l'application du taux réduit de TVA à la restauration traditionnelle.
Je sais que le Gouvernement y travaille d'arrache-pied.
Enfin, la troisième et dernière observation vise l'apprentissage. Tout doit
être mis en oeuvre pour favoriser celui-ci. La survie d'un nombre considérable
de nos entreprises commerciales et artisanales en dépend. Dans l'immédiat, cela
signifie qu'il faut mettre fin aux inégalités qui affectent les ressources des
centres de formation d'apprentis comme de divers établissements en instituant
le dispositif de financement équitable, stable et sécurisant que j'appelle de
mes voeux depuis plusieurs années.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des affaires économiques
et du Plan a émis un avis favorable sur les crédits budgétaires des PME, du
commerce et de l'artisanat pour 2003, et sur les articles rattachés 64 et 65.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 23 minutes ;
Groupe socialiste, 20 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 14 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 10 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 6 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes.
Je vous rappelle qu'en application des décisions de la conférence des
présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix
minutes.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Bernard Dussaut.
M. Bernard Dussaut.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
petites et moyennes entreprises représentent plus de 99 % des entreprises de
notre territoire et emploient 65 % des actifs. A l'échelle européenne, les deux
tiers des emplois existants dans le secteur des entreprises sont localisés dans
les PME. Quant aux très petites entreprises, celles qui comptent moins de dix
salariés, elles représentent un tiers de tous les emplois.
L'importance économique de ce secteur est donc, pour nous et pour nos
partenaires européens, incontournable, et elle l'est d'autant plus que le
contexte international est défavorable.
Le Premier ministre ne s'y est pas trompé : dès le 7 octobre dernier, à Lyon,
profitant de la tribune que lui offrait le colloque « Agir pour le
développement économique », il annonçait un projet de loi sur l'initiative
économique en faveur de la création et de la transmission d'entreprise. Deux
semaines plus tard, au congrès de l'Union professionnelle artisanale, l'UPA, il
développait un bel et habile discours sur la valeur du territoire et des
relations de proximité ainsi que sur l'importance du maintien et, surtout, du
développement de la présence des artisans, des commerçants et des PME sur
l'ensemble du pays.
A Lyon, puis salle Wagram à Paris, le Premier ministre espérait faire remonter
la croissance grâce aux PME. Rappelant que, dans une situation économique
délicate, l'artisanat demeurait un moteur de l'emploi, il proposait un contrat
d'objectif : créer 500 000 emplois dans l'artisanat d'ici à 2007.
Quant à vous, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez annoncé un projet de
loi sur le statut de la petite entreprise et une ordonnance de simplification
administrative, reprenant ainsi des dossiers de la précédente législature.
La discussion budgétaire se présentait donc sous les meilleurs auspices pour
votre département ministériel, tous ces projets ne pouvant être accueillis que
très favorablement.
Or, des inquiétudes se font sentir et l'UPA, si enthousiaste le 24 octobre
dernier, redoute que vous ne vous donniez pas les moyens des politiques que
vous avez annoncées.
Quant à nous, nous sommes fort sceptiques au vu des crédits budgétaires
accordés pour la mise en oeuvre d'une politique si dynamique.
En effet, à périmètre constant, c'est-à-dire sans prendre en compte la
budgétisation de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, votre
budget est en baisse puisqu'il passe de 60,97 millions d'euros en 2002 à 57,86
millions d'euros pour 2003, soit une régression de 3,11 millions d'euros.
Certes, la baisse n'est guère élevée mais, sur un si petit budget, elle se
remarque : moins 5,10 %
Vous avez répondu à l'Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d'Etat, que
« les entreprises de notre pays n'ont pas besoin de vivre avec des subventions
». Dans un même ordre d'idée, le Premier ministre avait dit : « l'avenir n'est
pas aux aides mais aux allégements ».
Fort bien, mais, vous en conviendrez, contribuer à créer un environnement
favorable au développement des entreprises nécessite des moyens, en particulier
des moyens financiers. Un environnement favorisant la création puis la
pérennité des entreprises ne découle en effet pas seulement d'un état d'esprit
« entrepreneurial » !
Or, les crédits d'intervention en faveur du commerce, de l'artisanat et des
services accusent une baisse de 9,2 % par rapport à l'année dernière. Ils sont
notamment constitués des crédits destinés aux actions économiques, inscrits au
chapitre 44.03.20. Ces crédits, qui constituent la seule aide directe de l'Etat
en direction des corps intermédiaires de l'artisanat, régressent
particulièrement, avec une baisse de 24 %.
Ce sont pourtant les corps intermédiaires, organisations professionnelles et
chambres des métiers, qui permettent un soutien très concret aux petites
entreprises, qui sont créatrices d'emplois et qui doivent pour une bonne part
porter le contrat d'objectif fixé par le Premier ministre.
Certes, des annonces peuvent être faites, mais le constat est établi : les
crédits prévus ne permettront pas un cadre de développement satisfaisant.
La formation et l'apprentissage sont un autre sujet de préoccupation.
On sait que les petites et moyennes entreprises manquent de main-d'oeuvre
qualifiée, notamment dans les secteurs de bouche, du commerce et du bâtiment et
travaux publics. On sait aussi que, structurellement, un problème se posera à
partir de 2005 et qu'il s'accentuera ensuite : 31 % des artisans sont
aujourd'hui âgés de plus de cinquante ans et seront amenés à céder leur
entreprise dans les dix années qui viennent.
Il faudrait donc se préparer activement à cette situation.
Or, les crédits consacrés à la formation, inscrits au chapitre 44.03.10,
diminuent de 6,4 %. La justification de cette baisse par l'existence de
financements complémentaires à ceux de l'Etat et par l'implication croissante
des régions dans le dispositif de formation n'est pas très satisfaisante. Faire
face aux besoins demandera un effort autrement plus important.
Dans son sixième rapport, l'observatoire des PME européennes insiste sur le
fait que la formation professionnelle continue peut être considérée comme « un
des moyens cruciaux permettant de relever les défis de l'avenir », mais il
constate l'existence de barrières, surtout dans les plus petites PME, qui font
obstacle au développement des activités de formation difficultés engendrées par
l'absence d'un salarié parti en formation, difficultés à identifier et à
formuler précisément les réels besoins en formation, coût, formalités
administratives.
Très préoccupées, les organisations professionnelles ont souhaité que des
états généraux de la formation soient organisés afin de reconsidérer le
dispositif actuel, qui a vingt ans.
En ce qui concerne l'apprentissage, les efforts doivent être très soutenus. Le
nombre de contrats d'apprentissage réalisé a régressé : de 235 516 en 2001, il
est passé à 225 000 en 2002, soit 10 516 contrats de moins. Il nous semble donc
tout à fait important de réhabiliter dans l'esprit des jeunes ce dispositif et
de valoriser la formation aux métiers, mais encore faut-il que les financements
suivent.
Or, nous nous inquiétons de la suppression des taxes parafiscales à partir du
1er janvier 2004, car elle implique la disparition des taxes affectées à la
formation professionnelle dans le BTP, l'automobile et les transports. Aucune
solution n'a pour le moment été avancée pour remplacer cette source de
financement. Comment, monsieur le secrétaire d'Etat, les CFA, les centres de
formation d'apprentis, seront-ils financer ?
Il faut que les chefs d'entreprise qui cesseront leur activité d'ici peu
puissent envisager assez tôt une transmission. Une entreprise sur cinq ne
trouve pas de repreneur, alors que les chances de réussite sont bien
supérieures que dans le cas d'une création. Des dispositions importantes et
attendues par les organisations professionnelles figuraient dans le projet de
loi d'orientation sur l'artisanat, et nous espérons que vous les reprendrez.
L'article 15 du projet de loi de finances « rebudgétise » le produit de la
taxe d'aide au commerce et à l'artisanat tout en maintenant son recouvrement
par l'ORGANIC, l'organisation autonome nationale d'assurance vieillesse de
l'industrie et du commerce. Les dépenses de solidarité en faveur des
commerçants et des artisans seront désormais financées à partir du budget de
l'Etat.
L'excédent de cette taxe permettrait d'alimenter le fonds d'intervention pour
la sauvegarde de l'artisanat et du commerce, le FISAC. Nous sommes tous
profondément attachés à celui-ci, car les aides qu'il octroie permettent des
opérations essentielles.
Le traitement des petits dossiers au plus près du terrain avait été mis en
place par votre prédécesseur. Il est tout à fait louable que vous souhaitiez
accentuer cette démarche.
Votre projet visant à relever le plafond des subventions d'investissement de
20 % à 30 % pour les communes de moins de 2 000 habitants me semble également
une très bonne chose. Les communes rurales doivent pouvoir profiter de ce type
d'aide.
Ne pourriez-vous pas envisager de diversifier l'utilisation du FISAC et aider
au financement de l'acquisition de fonds de commerce ou de mises aux normes ?
Les commerçants le réclament.
Cette année, le financement du FISAC sera garanti dans le budget de l'Etat.
Nous souhaiterions avoir l'assurance, monsieur le secrétaire d'Etat, que cette
garantie est pluriannuelle et qu'elle ne se limitera pas au budget 2003.
En effet, ainsi que l'a noté le rapporteur spécial, M. Auguste Cazalet, à la
page 18 de son rapport : « Il risque d'être plus difficile de résister, dans un
contexte de tension budgétaire, à la tentation de diminuer, à terme, les moyens
du FISAC si n'apparaît plus, en regard, le produit de la TACA. »
En ce qui concerne l'accès au marché pour les petites et moyennes entreprises,
la question des relations avec la grande distribution s'est posée de manière
vive très récemment.
La loi sur les nouvelles régulations économiques a permis un meilleur
équilibre des relations entre les différents acteurs du marché tendant à
protéger les intérêts des petites et moyennes entreprises face aux grands
groupes. La pratique des marges arrière a cependant continué de progresser ces
dernières années, passant de 20 % à 30 %.
La commission d'examen des pratiques commerciales s'est réunie le 27 novembre
pour discuter de votre projet de circulaire relatif à la négociation
commerciale entre les fournisseurs et les distributeurs. Aucun avis sur ce
projet n'a été pris, les distributeurs ayant réclamé des précisions sur
certains points, notamment sur la question du seuil de revente à perte. La
commission doit se réunir de nouveau le 11 décembre prochain.
Les risques d'une augmentation du décalage entre grande distribution et
distribution traditionnelle sont très importants. Monsieur le secrétaire
d'Etat, nous sommes dans un contexte très tendu. Pouvez-vous nous préciser de
quelle manière vous aborderez cette situation ?
Nous sommes donc dans une période d'attente. Beaucoup d'annonces ont été
faites, beaucoup d'incertitudes demeurent et les moyens que vous dégagez ne
semblent pas en cohérence avec les objectifs que vous affichez.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le groupe socialiste ne votera pas le projet de
budget de votre département ministériel.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe
CRC.)
M. le président.
La parole est à M. Christian Gaudin.
M. Christian Gaudin.
Monsieur le secrétaire d'Etat, lorsque nous abordons l'examen de votre projet
de budget, nous entrons dans le domaine du paradoxe.
Reprenant la phrase clef d'une très bonne campagne de promotion, reconnaissons
que « les petites et moyennes entreprises de commerce et d'artisanat
constituent la première entreprise de France ». La première certes, mais aussi
la plus dynamique, puisque, contrairement aux grandes entreprises, les PME
maintiennent leurs offres d'emplois. Voilà un secteur qui demande, parfois en
vain, une main-d'oeuvre qualifiée, et qui demeure trop souvent ignoré des
jeunes.
Nous le savons, votre projet de budget est modeste. Il est en effet constitué
de crédits d'intervention destinés à financer une politique d'incitation et
d'impulsions. Les orientations que vous avez déjà arrêtées et celles que vous
annoncez pour l'année à venir vont dans le bon sens. En défendant la
simplification des démarches, une administration au service des entreprises -
et non le contraire -, vous suscitez le désir de créer, d'évoluer, d'innover.
Entreprendre est un état d'esprit qu'il faut valoriser et généraliser, et j'y
reviendrai dans un instant.
Le 8 novembre dernier, vous avez déclaré devant l'Assemblée nationale vouloir
aider les entreprises par le biais des fonds d'investissement de proximité,
ouvrant là une voie nouvelle à une politique beaucoup plus enracinée dans les
territoires. Nous ne pouvons que partager votre volonté de vous appuyer sur «
une logique de proximité économique ».
Aider une entreprise à se créer, à se développer, à passer un cap difficile ou
encore à se maintenir est en effet une priorité.
Toutefois, si la bonne santé des entreprises et des commerces est vitale pour
notre pays, elle l'est davantage encore en milieu rural. Ainsi, la vie
économique d'un canton dépend parfois d'une seule entreprise ; la vie d'un
village est liée au maintien de ses commerces de bouche tout autant qu'à celui
de son école. La vitalité économique de notre pays doit s'étendre à l'ensemble
de son territoire. Au cours des dernières décennies, nous avons surtout déploré
une destruction de celui-ci : un rééquilibrage est devenu impératif.
L'aménagement du territoire, c'est d'abord assurer la sauvegarde du tissu
économique, des commerces et des services. C'est pourquoi j'approuve tout à
fait le relèvement du seuil de subvention du FISAC à 30 % pour les communes
rurales et les programmes d'aide à la sécurisation des commerces ou de soutien
aux commerces de bouche en voie de disparition.
Les actions entreprises grâce au FISAC qui sont déjà recentrées sur les
opérations de restructuration et de rééquilibrage du territoire suscitent
beaucoup d'espoir. Il est important de mettre très vite en place une politique
incitative et d'accélérer la décentralisation grâce aux fonds disponibles. Au
regard des besoins, il serait regrettable de ne pas utiliser d'une manière
pertinente l'ensemble des fonds à présent budgétisés.
J'approuve bien sûr votre décision d'expérimenter la décentralisation du
FISAC. L'aide à un commerce, à une entreprise, à un artisan doit intervenir
rapidement, avec un minimum d'intermédiaires et de dossiers.
J'espère néanmoins que cette décentralisation, attendue, n'impliquera pas un
transfert de charges supplémentaires en direction des collectivités
territoriales.
Monsieur le secrétaire d'Etat, un rappel s'impose : entre 1993 et 1999, les
grandes entreprises ont réduit leurs effectifs de 2 %, alors que l'emploi, dans
les PME, a progressé de 9 %.
Non seulement les PME, le commerce et l'artisanat jouent un rôle prépondérant
dans un aménagement équilibré de notre territoire, mais ils représentent, de
plus, le plus important gisement d'emplois.
Certains métiers cherchent désespérément des personnels qualifiés. Malgré la
crise liée à l'ESB, l'encéphalopathie spongiforme bovine, les artisans bouchers
ont su garder leur clientèle et manquent de main-d'oeuvre. Les mêmes
difficultés de recrutement existent pour les artisans plombiers, les horlogers,
les pharmaciens, lesquels manquent de préparateurs en pharmacie, dont ils
assurent pourtant la formation, et c'est l'ensemble de l'encadrement qui risque
de ne pas être remplacé dans le secteur du bâtiment.
Le problème est sérieux. Dès 2005, chaque année, 850 000 départs à la retraite
libéreront autant d'emplois qualifiés, qui seront insuffisamment pourvus par
650 000 jeunes, peu ou insuffisamment formés.
Actuellement, 150 000 jeunes sortent chaque année de l'école sans diplôme, 60
000 d'entre eux n'ayant, de plus, aucune qualification. Or si les formations en
alternance rencontrent un franc succès, l'apprentissage a marqué, en 2002, une
régression inquiétante.
C'est à juste titre que le ministre de l'éducation nationale, M. Luc Ferry, a
décidé de valoriser la voie professionnelle et de former aux métiers.
L'orientation scolaire est à revoir entièrement. La voie professionnelle est
associée à l'échec scolaire et l'orientation est subie par l'élève.
L'enseignement général est trop souvent seul valorisé au collège. J'espère,
monsieur le secrétaire d'Etat, que vous saurez intervenir, en veillant à créer
des liens entre l'enseignement et les métiers. Dès les premières années du
collège, instaurons des présentations, des rencontres entre les parents, les
élèves et les enseignants, d'une part, et le monde de l'entreprise ou de
l'artisanat, d'autre part, afin de faire connaître les emplois et les métiers
offrant des débouchés. Le bassin scolaire ne peut plus ignorer le bassin
d'emploi.
Un enfant en échec scolaire et qui croit n'avoir aucun avenir professionnel
sera passif ou violent. Il y a une méconnaissance des métiers et surtout des
parcours de réussite. Rappelons que les deux tiers des entreprises créées par
des jeunes le sont par des anciens élèves issus de la voie professionnelle.
La création n'est cependant pas la seule manière d'entreprendre, et je dois,
monsieur le secrétaire d'Etat, rappeler l'importance de s'intéresser à la
question de la reprise après cession de l'artisan partant à la retraite. Là
encore, les chiffres sont éloquents.
Si l'artisanat a créé un million d'emplois en dix ans, dont plus de 250 000
ces deux dernières années en solde net, 30 % des artisans ont aujourd'hui plus
de cinquante ans. Ainsi, 300 000 chefs d'entreprise atteindront, dans les dix
ans qui viennent, l'âge de la retraite. Anticiper la transmission est un
élément essentiel, puisque cela concerne un million de salariés. Aujourd'hui,
on estime à 40 000 le nombre d'emplois perdus chaque année par manque de
repreneurs.
C'est un véritable enjeu économique et d'aménagement du territoire, puisque le
nombre des artisans passera de 2,5 millions à 4 millions dans la décennie à
venir. Comme le disait récemment M. Griset, président de l'Assemblée permanente
des chambres de métiers : « Nous sommes dans un pays de salariat et de fonction
publique. L'idée de se mettre à son compte n'a pas été très valorisée en
France. »
Sur les plans fiscal et financier, la création d'entreprise a, depuis
toujours, bénéficié d'aides et d'exonérations, d'où la préférence pour créer
plutôt que pour reprendre.
Il y a pourtant un intérêt à valoriser la transmission du savoir-faire du
cédant au repreneur. Citons à cet égard l'exemple des Pays-Bas, où, récemment,
a été rendue possible la transmission d'une société sans que cela entraîne
aucune conséquence pour l'impôt sur le revenu du cédant. Celui-ci doit être âgé
de cinquante-cinq ans au moins et s'engager à coopérer avec son successeur
pendant trois ans. Les Néerlandais appellent ce dispositif « la transmission
silencieuse », c'est-à-dire en douceur. Pourquoi ne pas favoriser, sur le plan
fiscal, la reprise lorsque l'entrepreneur cédant, à l'approche de sa retraite,
s'engage à parrainer un salarié ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, la voie que vous devez privilégier, en
partenariat avec le ministère de l'éducation nationale, est celle qui favorise
le développement, dans l'ensemble du système éducatif, de la connaissance de la
vie professionnelle et d'une sensibilisation à l'esprit d'entreprise.
Il me reste, pour conclure, à évoquer un aspect nouveau des conditions de
soutien et de développement des PME de l'artisanat et du commerce, entreprises
qui représentent l'essentiel de l'économie en secteur rural et qui créent les
emplois.
L'utilisation des technologies de l'information et de la communication en zone
rurale apportera les mêmes fonctionnalités qu'en milieu urbain. Le réseau
Internet est ainsi un facteur incontournable d'aménagement du territoire. Les
importantes initiatives prises par les collectivités territoriales pour
faciliter, notamment, l'accès au haut débit doivent être accompagnées d'une
sensibilisation des entreprises par les chambres consulaires. Les PME doivent
intégrer la culture des technologies de l'information et de la communication,
ce qui leur ouvrira de nouvelles perspectives en termes de marchés,
d'efficience et de simplification administrative. Il serait souhaitable,
monsieur le secrétaire d'Etat, que, sur ce point aussi, capital pour
l'aménagement du territoire, vous preniez l'initiative.
Vous préparez actuellement trois réformes importantes concernant le projet de
loi sur l'initiative économique, la simplification administrative et le statut
de l'entrepreneur. Vous ne pourrez bien sûr pas aborder l'ensemble des sujets
évoqués lors de ces débats. Toutefois, certaines réalisations locales
constituent des avancées qu'il faudra prendre en compte et généraliser. J'ai eu
l'occasion de découvrir le site réalisé par le greffe du tribunal de commerce
de Paris, qui permet de déposer une demande de création d'entreprise en ligne,
y compris les documents et pièces joints, et de recevoir aussitôt un numéro
d'enregistrement. Voilà un bon exemple de simplification administrative.
Ces débats seront donc repris l'an prochain. Nous resterons attentifs à la
progression de vos travaux, tout en étant déjà rassurés quant à la voie choisie
et aux priorités que vous défendez. Le groupe de l'Union centriste votera,
monsieur le secrétaire d'Etat, votre projet de budget.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR et des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
comme ceux du commerce extérieur, les crédits du commerce, de l'artisanat et
des petites et moyennes entreprises n'ont, le plus souvent, qu'un caractère
indicatif, le véritable budget, en la matière, consistant plutôt en
l'accumulation des mesures fiscales diverses et variées qui figurent dans
l'évaluation des voies et moyens.
Que pèsent en effet les 184 millions d'euros de crédits inscrits au projet de
budget au regard de la suppression de la part salaires de la taxe
professionnelle, de la mise en oeuvre, cette année, de la réduction de la taxe
professionnelle pour les professions libérales, des exonérations temporaires
d'impôt sur les sociétés ?
Ainsi, le coût de la seule mesure de taxation des PME au taux réduit de
l'impôt sur les sociétés est de 1 300 millions d'euros, soit sept fois le
montant des dépenses budgétaires inscrites.
Ce projet de budget des PME, du commerce et de l'artisanat a donc un caractère
assez nettement indicatif, résultant plus de l'affirmation d'orientations que
d'une véritable mobilisation de ressources publiques.
Si ces crédits passent de 61 millions d'euros en 2002 à 184 millions d'euros
en 2003, leur augmentation est trompeuse. Elle est liée à la budgétisation de
la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat, la TACA, jusqu'ici perçue au
profit du FISAC.
Or si l'on analyse de manière plus précise les crédits, on constate en fait
une stagnation des engagements publics à périmètre constant, et, pis encore,
l'affectation d'une partie non négligeable des moyens du fonds au budget
général.
Ce sont ainsi 251 millions d'euros, soit deux fois le montant de la hausse des
crédits en 2003, qui tombent dans l'escarcelle du budget général et corrigent
ce déficit que d'aucuns voudraient encore réduire.
Le rapporteur spécial de la commission des finances de notre assemblée note
d'ailleurs, dans son rapport, que, « en réalité, l'évolution des moyens
attribués aux PME, au commerce et à l'artisanat marque une baisse de 5 % dans
son périmètre d'action antérieur et une quasi-stagnation dans un périmètre
élargi aux actions nouvellement budgétées ».
Cela qualifie clairement la politique menée par le Gouvernement pour les
secteurs du commerce et de l'artisanat.
Nous observons d'ailleurs que personne, dans cet hémicycle, pas même ceux qui
défendent régulièrement, lors des discussions budgétaires, les revendications
de ces secteurs professionnels, ne semble trouver à redire à ces choix
budgétaires pour 2003.
Force est pourtant de constater que le Gouvernement a encore à faire pour
répondre aux attentes des professionnels !
Ainsi, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances
pour 2003, la majorité sénatoriale a repoussé notre amendement tendant à
relever le plafond des CODEVI, ce qui aurait pourtant permis de donner de
nouveaux moyens aux PME, aux commerçants et aux artisans. Au lieu de cela, nous
avons assisté, une fois de plus, au dépôt puis au retrait d'amendements visant
à abaisser la TVA affectant la restauration traditionnelle.
Il est d'ailleurs symptomatique de constater que, une fois encore, tout en
feignant de s'en faire les porte-parole, mes collègues de la majorité
sénatoriale n'ont pas cru devoir répondre aux attentes des petites entreprises
et des exploitants individuels. C'est à croire qu'il n'y a jamais assez
d'argent pour faire droit à certaines revendications, au demeurant parfaitement
légitimes !
Pour ce qui nous concerne, nous estimons que ce secteur, qui compte plus de
deux millions d'entreprises, dont 800 000 artisanales, et qui emploie 5
millions de salariés, constitue un élément essentiel du tissu économique de
notre pays.
De plus, ces entreprises, qui sont réparties à travers l'ensemble du pays,
contribuent à l'aménagement équilibré du territoire et, en conséquence, une
véritable politique en leur faveur nécessite des mesures d'une autre nature que
celles qui sont prises, notamment en matière d'accès au crédit.
Posons donc la question : si l'on peut concevoir, pour les particuliers, des
prêts immobiliers complémentaires à taux zéro, pour quelle raison une telle
démarche ne peut-elle être envisagée pour financer les PME, les commerçants et
les artisans ?
Nous constatons, crise financière après crise financière, que les banques, qui
injectent chaque année 2 500 milliards d'euros dans l'économie nationale, ne le
font pas pour soutenir l'activité de crédit d'investissement aux entreprises,
mais plutôt pour accaparer cette puissance monétaire et l'orienter vers les
marchés financiers. Cette liaison entre le système bancaire et le système de
production, fondée sur la spéculation financière, provoque de graves
difficultés dans ce secteur d'activité.
En effet, la difficulté de l'accès au crédit est sans aucun doute, comme la
question du renforcement des fonds propres, l'un des facteurs essentiels de la
disparition précoce des commerces et des exploitations artisanales. Nous
pensons que la croissance, l'emploi, les entreprises et l'artisanat ont besoin,
en urgence, d'une réelle politique de crédits publics, étrangère à la
spéculation financière.
Par ailleurs, concernant la formation, alors que nous savons tous, déjà, que
la faiblesse de la formation initiale et professionnelle ne permet pas de
répondre aux besoins en main-d'oeuvre qualifiée, notamment dans l'artisanat,
qu'en sera-t-il demain, puisque le montant des crédits affectés à la formation
professionnelle dans votre projet de budget baisse de 6,4 %, malgré la
participation des régions à laquelle il a été fait allusion tout à l'heure ?
Plutôt que de décider des allégements de cotisations sociales, inopérantes en
termes de créations réelles d'emplois, il est nécessaire, selon nous, de
revaloriser les salaires et d'améliorer les conditions de travail, afin de
rendre réellement attractifs les emplois dans les PME, le commerce et
l'artisanat.
Si vous souhaitez, monsieur le secrétaire d'Etat, que ce secteur puisse
donner suite à la demande de M. le Premier ministre de créer un demi-million
d'emplois en cinq ans, il est impératif que ces volets relatifs aux conditions
de travail et aux salaires figurent dans le projet de loi sur la création et le
développement d'entreprise que vous nous annoncez pour l'an prochain.
Sous le bénéfice de ces observations, le groupe communiste républicain et
citoyen ne votera pas les crédits des PME, du commerce et de l'artisanat pour
2003, leur montant n'étant manifestement pas à la hauteur des enjeux.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe
socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Joseph Ostermann.
M. Joseph Ostermann.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai eu le plaisir de vous rencontrer à la
chambre de métiers du Bas-Rhin, et je suis heureux de vous retrouver dans cet
hémicycle, à l'occasion de l'examen de votre premier projet de budget.
Cet exercice nous permet de dialoguer ensemble sur les grandes orientations
que vous souhaitez donner à cette nouvelle législature. Il convient de le
reconnaître, le projet de budget de votre secrétariat d'Etat ne constitue qu'un
faible reflet de la politique menée et des moyens engagés en faveur des
artisans, des commerçants et des PME.
De surcroît, ce projet de budget est limité et l'augmentation des crédits en
2003 n'est due qu'à la budgétisation de la TACA. En effet, si les excédents
récurrents engendrés par cette taxe, le souci de lisibilité ainsi que le
contexte de rigueur budgétaire justifient amplement une telle mesure, il n'en
demeure pas moins qu'elle suscite l'inquiétude, notamment au sein des chambres
de métiers, qui craignent de perdre ainsi une partie des crédits qui leur
étaient affectés et leur permettaient de mener leurs actions d'animation
économique.
Pourriez-vous, monsieur le secrétaire d'Etat, nous apporter quelques
éclaircissements sur ce point ?
Il est un autre aspect de ce projet de budget qui me paraît important : je
veux parler du FISAC. Cet outil a prouvé son utilité en matière d'aménagement
du territoire et de maintien de l'équilibre des territoires ruraux. Ainsi, s'il
est positif de voir s'accroître les crédits de ce fonds, il est toutefois
permis de s'interroger sur le contraste qui existe entre la dynamique des
crédits, d'une part, le montant des aides versées et le nombre des dossiers
traités, d'autre part, qui accusent tous deux une baisse.
En zone rurale, par exemple, 14,3 millions d'euros ont été versés pour 523
décisions prises en 2000, contre seulement 9,3 millions d'euros pour 354
décisions prises en 2001.
Ces chiffres témoignent certainement des problèmes régulièrement mis en avant
en ce qui concerne le FISAC : délais d'instruction, règles d'éligibilité, etc.
Pourriez-vous nous indiquer, monsieur le secrétaire d'Etat, quelles mesures
vous entendez prendre pour simplifier et clarifier la procédure d'attribution
des aides ?
Permettez-moi maintenant d'évoquer le volet fiscal de votre action, qui
suscite le plus d'attentes de la part des chefs d'entreprise et qui est aussi
l'un des dispositifs les plus efficaces en matière de lutte contre le chômage.
Rappelons, en effet, que ce sont les petites entreprises qui offrent les plus
grandes potentialités en matière de création d'emplois, puisqu'elles ne peuvent
se délocaliser pour échapper à la mise en oeuvre des 35 heures.
Ainsi, selon une enquête du CREDOC, le centre de recherche pour l'étude et
l'observation des conditions de vie, publiée l'été dernier, plus des trois
quarts des projets d'embauche concernent des établissements de moins de
cinquante salariés. Or, toujours selon cette étude, les chefs d'entreprise
affirment éprouver des difficultés de recrutement pour 58 % des projets
d'embauche. Le problème, si souvent dénoncé, de l'inadéquation entre l'offre et
la demande n'est donc pas surestimé.
Une enquête récemment conduite conjointement par l'association Jeunesse et
Entreprise et le ministère de l'éducation nationale à propos des attentes
réciproques des entreprises et des jeunes ne laisse nullement entrevoir des
perspectives plus réjouissantes : les jeunes rêvent d'être enseignants,
militaires, psychologues, avocats, journalistes ; 30 % d'entre eux aspirent à
rejoindre le secteur public, et seulement 28 % à travailler dans le secteur
privé, qui emploie pourtant 58 % de la population active. Il existe donc un
fossé entre les aspirations des jeunes et les besoins des entreprises.
Le secteur privé en général, et l'artisanat en particulier, souffrent d'un
manque d'attractivité de leurs métiers. Le résultat de ces études conduit
également à penser que les jeunes se dirigent de préférence vers les métiers
qu'ils connaissent ! Par conséquent, il convient de renforcer les efforts
d'information en direction des jeunes, sur les métiers, d'une part, sur le
monde de l'entreprise et ses valeurs, d'autre part.
C'est là aussi que le levier fiscal se révèle indispensable. Les capacités des
petites entreprises, des commerçants et des artisans à proposer des salaires
suffisamment attrayants ainsi que de véritables possibilités d'évolution de
carrière pour embaucher et retenir leurs salariés sont limitées.
Selon une étude de la direction de l'animation, de la recherche, des études et
des statistiques, la DARES, les rémunérations moyennes dans les très petites
entreprises sont inférieures de près de 11 % aux salaires versés dans les
grandes entreprises ; dans près d'un cas sur trois, ces rémunérations sont
proches du SMIC. C'est la raison pour laquelle la réduction des charges pesant
sur les salaires pourrait permettre d'améliorer les rémunérations.
La réduction du taux de la TVA pour les travaux dans les logements a prouvé
son efficacité en matière de création d'emplois ; par conséquent, cette mesure
gagnerait à être étendue à d'autres secteurs à forte intensité de
main-d'oeuvre, tels que la restauration. Je tiens d'ailleurs à vous féliciter,
monsieur le secrétaire d'Etat, d'avoir proposé de proroger le dispositif
applicable aux travaux dans les logements. Cette mesure profite directement aux
artisans.
En revanche, les promesses du président Jacques Chirac lors de la campagne
électorale ont suscité de très fortes attentes chez les hôteliers et les
restaurateurs, qui restent pour l'heure déçues. C'est pourquoi je vous invite à
plaider ce dossier au plus vite auprès des instances européennes, car l'effet
d'une telle disposition serait important. Ainsi, selon l'économiste Thomas
Picketty, un abaissement du taux de TVA à 5,5 % permettrait de créer, à terme,
100 000 emplois.
En outre, en échange d'une baisse du taux de TVA, les professionnels du
secteur se sont engagés à revaloriser les salaires à hauteur de 10 % et à
accroître leur effort de formation, comme M. Gérard Cornu l'a déjà indiqué.
Enfin, je souhaiterais attirer votre attention, monsieur le secrétaire d'Etat,
sur l'importance que revêt la formation pour les petites entreprises, notamment
pour les entreprises artisanales. La faiblesse de la formation, tant initiale
que permanente, n'est rien de moins que l'une des causes du manque
d'attractivité de ces entreprises.
Il est par conséquent urgent d'agir dans ce domaine. Votre collègue Luc Ferry
a récemment annoncé une série de mesures en faveur de la formation
professionnelle. C'est encourageant, mais je souhaiterais évoquer plus
spécifiquement la question de l'apprentissage, qui est bien souvent
négligée.
L'apprentissage a fait et fait encore preuve de son efficacité et de son
adaptation aux besoins de l'entreprise. Ainsi, selon une enquête, au 1er
février 2000, sept mois après leur sortie de formation, sept apprentis sur dix
ont trouvé un emploi, et 37 % d'entre eux ont été embauchés par leur entreprise
formatrice. Or force est de constater que, malgré ces résultats exceptionnels,
l'apprentissage est aujourd'hui encore considéré par de nombreux jeunes comme
étant une voie de garage.
De plus, les statistiques du ministère de l'éducation nationale de janvier
2002 ont montré, pour la première fois depuis 1992, que le nombre d'apprentis
était en baisse au 31 décembre 2001.
Ce déficit d'image est aggravé par deux problèmes majeurs dont souffre notre
système de formation des apprentis et sur lesquels je souhaiterais attirer
votre attention : son financement et son statut.
J'évoquerai d'abord le financement. Deux modalités viennent grever son
développement : la restriction du versement de la taxe aux entreprises dont le
siège social est situé dans la région et la régionalisation des collectes par
les réseaux, qui risque de remettre en question les pratiques de reversement de
fonds libres opérées par les chambres de commerce et d'industrie, les CCI, au
profit des chambres de métiers.
En outre, il devient urgent de remédier au vieillissement des centres de
formation des apprentis qui, faute de financements suffisants et convenablement
répartis, ne sont plus à même d'assurer efficacement leurs missions.
Par ailleurs, l'apprentissage souffre de l'absence d'un véritable statut qui
permettrait d'assurer une plus grande équité entre l'étudiant et l'apprenti.
Est ainsi souvent mise en avant la nécessité d'instaurer un dispositif d'aide
au transport et au logement, un accès aux services médicaux, le développement
d'activités sportives, ou encore un accompagnement social.
Toutes ces mesures, qui paraissent simples à mettre en oeuvre, permettraient
aux apprentis de se sentir reconnus et de ne plus avoir le sentiment d'être
considérés comme des étudiants de seconde zone.
Le budget que vous nous présentez aujourd'hui, monsieur le secrétaire d'Etat,
ne nous permet pas de déceler vos intentions sur cette question. Pourriez-vous,
par conséquent, nous indiquer si vous entendez entreprendre une réforme
d'ampleur de l'apprentissage et, si oui, selon quel calendrier ?
En conclusion, votre budget, s'il comporte quelques points positifs, ne
représente qu'une part réduite de l'action du Gouvernement en direction des
PME, du commerce et de l'artisanat. Mais vous disposez de la législature pour
aborder les nombreux dossiers en suspens.
C'est pourquoi, monsieur le secrétaire d'Etat, je voterai les crédits de votre
secrétariat d'Etat, afin de vous encourager à mener une politique courageuse et
ambitieuse.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Aymeri deMontesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Monsieur le secrétaire d'Etat, l'action du Gouvernement en faveur des PME, du
commerce et de l'artisanat ne se résume pas au budget de votre secrétariat
d'Etat. La modestie de ce budget n'exprime en rien la vigueur des 2,4 millions
de PME françaises. Le vrai débat n'est pas tant le niveau de la dépense
budgétaire que le changement de concept, de l'esprit et de l'organisation d'un
ensemble d'entreprises, essentiel pour l'économie française.
En effet, les performances de nos entreprises ne sont pas directement liées
aux dépenses budgétaires.
En revanche, le dynamisme de nos entreprises est en étroite corrélation avec
le volontarisme du Gouvernement, les incitations fiscales et la réforme de
l'Etat.
Libérer les entreprises des contraintes administratives, parfois absurdes,
sera un facteur de prospérité, et contribuera à créer un sentiment d'équité
dans notre pays.
Nos PME sont très attentives aux dispositions qui les concernent. Ainsi, la
budgétisation de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat mérite d'être
saluée, car elle témoigne de votre volonté de maîtrise des dépenses et de
transparence. Le Parlement pourra désormais contrôler les quelque 126 millions
d'euros supplémentaires inscrits au budget de votre secrétariat d'Etat.
Cela étant dit, monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi vous êtes-vous arrêté
en si bon chemin, en conservant deux autres outils en situation
extrabudgétaire, à savoir le Fonds national de promotion et de communication de
l'artisanat, le FNPCA, et l'établissement public national d'aménagement et de
restructuration des espaces commerciaux et artisanaux, l'EPARECA ?
Votre projet de loi relatif à l'initiative économique est conforme aux
convictions du Premier ministre, dont l'expérience ministérielle en fait un
homme proche du monde des entreprises et de l'artisanat. Il en résulte qu'en
juillet dernier, selon un sondage IPSOS, plus de la moitié des dirigeants de
très petites entreprises manifestaient leur confiance dans le Gouvernement. Les
suggestions pragmatiques et de bon sens que vous avez recueillies auprès des 4
000 acteurs et décideurs du monde économique auront sans doute un effet positif
très fort pour un coût budgétaire très faible. Je soutiens la proposition
formulée par le rapporteur spécial M. Auguste Cazalet et tendant à mettre en
oeuvre au plus vite la loi organique du 1er août 2001, relative aux lois de
finances, afin de présenter clairement aux Français les objectifs et les
résultats de votre politique économique.
Le dynamisme économique de nos entreprises dépend bien sûr, de la baisse des
charges patronales. Comme mon collègue M. Ostermann, je considère que la
promesse du président Jacques Chirac de faire passer la TVA sur la restauration
traditionnelle de 19,6 % à 5,5 %, lorsqu'elle aboutira à Bruxelles, aura un
effet stimulant sur nos PME. Nos départements tournés vers le tourisme, et
notamment mon département, le Gers, en tireront grand profit. Je fais le pari
de vous en remercier par avance.
En outre, la majorité sénatoriale, en retirant ses amendements, témoigne sa
confiance dans les engagements du Gouvernement.
Plus fondamentalement, nous devons absolument accélérer la réforme de l'Etat,
en rationalisant l'administration centrale, en simplifiant surtout les
démarches administratives et en exploitant tout le potentiel de la
décentralisation.
A l'échelon ministériel, on ne peut que regretter que la direction des
entreprises commerciales, artisanales et de services ne soit pas encore
parvenue à collaborer plus étroitement avec les autres directions de Bercy. La
présentation de votre budget par agrégats gagnerait en lisibilité et en
exhaustivité.
Le maquis inextricable des démarches administratives empêche trop souvent nos
citoyens de concrétiser leurs projets. Des avancées sont à signaler, comme la
simplification de l'accès des petites entreprises aux marchés publics ou la
simplification des règles relatives aux cotisations sociales des travailleurs
indépendants, mais la route est encore trop abrupte.
Vous avez bien fait d'accorder la priorité aux nouvelles technologies :
celle-ci est nécessaire pour combler le retard français en la matière. En
effet, notre pays compte, en avril 2002, moins de 16 millions d'internautes.
Hélas ! la dématérialisation des formalités n'a pas toujours été l'occasion
d'une simplification, sur le fond, des procédures. Parfois, on n'a fait que
déplacer le problème. Je pense notamment aux difficultés que les entreprises
employant moins de neuf salariés rencontrent pour établir des fiches de paie
par Internet.
Enfin, je voudrais souligner le rôle capital que pourraient jouer les chambres
consulaires dans le cadre de la décentralisation. Elles expérimentent le
fonctionnement en réseau depuis de nombreuses années. Ces acteurs publics
décisifs du développement local se proposent de devenir des délégataires du
service public dans des domaines clés comme l'appui aux entreprises, la
création et la transmission d'enterprises, la formation initiale et
professionnelle, ou encore la gestion des équipements collectifs. Grâce à leur
assistance technique au montage de projets et à leurs conseils en ingénierie,
les chambres consulaires permettraient de lutter contre la non-consommation des
fonds structurels européens, qui est scandaleuse.
M. Jean-Pierre Bel.
Effectivement !
M. Aymeri de Montesquiou.
Je citerai en particulier la région Midi-Pyrénées. Cette solution aurait le
mérite d'être prudente, simple et efficace.
Dans le même sens, la déconcentration et la décentralisation du FISAC
permettraient de calmer les craintes des artisans de voir ces crédits détournés
de leur vocation initiale.
Ce travail de simplification est essentiel pour mettre fin au découragement
qui saisit trop souvent les PME et les artisans. Les chefs d'entreprise sont
dissuadés de concrétiser des projets créateurs d'emploi en raison des lourdeurs
stériles et inutiles de l'administration française. Réconcilions l'intérêt
général et l'économie de marché, et la cohésion sociale s'en trouvera
renforcée.
Les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen
voteront, dans leur majorité, les crédits de votre secrétariat d'Etat.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et du
RPR.)
M. le président.
La parole est à M. Serge Mathieu.
M. Serge Mathieu.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
modestie du budget du secrétariat d'Etat aux PME, au commerce, à l'artisanat,
aux professions libérales et à la consommation ne reflète pas l'importance de
ce secteur dans notre économie ni la priorité que le Gouvernement entend lui
donner.
Un budget modeste n'est d'ailleurs pas nécessairement un mauvais budget. Dans
un environnement national et international difficile, il faut, au contraire,
abandonner « l'inflation budgétaire » pour privilégier l'efficacité des
interventions publiques.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Très bien !
M. Serge Mathieu.
Ainsi, le secrétariat d'Etat a d'abord un rôle d'entraînement, d'« effet de
levier », pour le montage des différentes opérations auquel il apporte un
soutien financier.
En outre, c'est la politique économique générale qui tient une place
déterminante, car elle fixe l'environnement dans lequel évoluent les
entreprises.
Il est toujours bon de rappeler les chiffres, même s'ils sont bien connus :
2,4 millions de PME emploient 65 % des actifs et réalisent plus de la moitié de
la valeur ajoutée de l'ensemble des entreprises des secteurs de l'industrie, du
commerce et des services.
Ces entreprises constituent donc une véritable force économique qui se
caractérise par la diversité et le dynamisme. Leur rôle est primordial dans la
défense de l'emploi, dans la création et le renforcement du lien social et dans
toute politique d'aménagement du territoire.
Comme le Premier ministre l'a dit, « l'artisanat est la première entreprise de
France ».
Nous nous réjouissons que le Gouvernement se soit engagé à rompre avec les
pratiques passées, en reconnaissant pleinement la place des PME, du commerce et
de l'artisanat et en affichant clairement ses priorités, en particulier la
création d'entreprises.
La première priorité consiste à enclencher le cercle vertueux de la création
de richesse et d'emploi par une politique sociale et fiscale adaptée.
La première étape a été l'assouplissement de la loi sur les 35 heures, qui
était absolument nécessaire pour les PME. Le présent projet de loi de finances
en a été la deuxième. Il comporte plusieurs mesures qui intéressent directement
les PME, le commerce et l'artisanat. J'en rappellerai simplement quatre : la
baisse de l'impôt sur le revenu, la baisse d'impôts et de charges ciblée sur
l'emploi et l'initiative qui s'élève à près de 4 milliards d'euros, la
prorogation du taux réduit de TVA sur les travaux dans les logements,
l'allégement de la taxe professionnelle des professions libérales et des
travailleurs indépendants.
De plus, dès votre entrée en fonction, monsieur le secrétaire d'Etat, vous
avez résolument ouvert de grands chantiers qui avaient été délaissés depuis
plusieurs années. Ils auront, très prochainement, une traduction législative et
nous pourrons en débattre dans le détail.
Je tiens cependant à rappeler ici les principaux axes : une ordonnance sur la
simplification administrative ; un projet de loi sur l'incitation à
l'exportation afin que nos PME accèdent plus facilement aux marchés étrangers ;
un statut pour l'entrepreneur et son conjoint ; une réforme du droit de la
faillite, pour laquelle votre collègue M. Dominique Perben a lancé la
concertation ; un projet de loi facilitant la création d'entreprises et
l'initiative économique, qui contiendra un volet très attendu sur la
transmission d'entreprises ; une réflexion globale sur l'attractivité de notre
territoire ; enfin, la ferme volonté de négocier, à Bruxelles, un taux de TVA
réduit sur la restauration traditionnelle.
Pendant quatre ans, le précédent gouvernement ne s'était pas particulièrement
soucié des PME ni du secteur artisanal, si ce n'est par l'annonce d'un projet
de loi d'orientation non financé, à la veille des échéances électorales.
(Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
En cinq mois, monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez déjà fait mieux que
votre prédécesseur, sans multiplier les promesses inconsidérées, mais en
préparant l'avenir de nos PME avec pragmatisme.
M. Jean-Pierre Bel.
Un peu de patience ! Il est trop tôt pour le dire !
M. Serge Mathieu.
C'est pourquoi nous voterons les crédits du secrétariat d'Etat aux PME, au
commerce et à l'artisanat.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. François Marc.
M. François Marc.
A l'occasion de l'une de vos premières allocutions devant les chambres de
métiers, vous avez déclaré, monsieur le secrétaire d'Etat, que les petites
entités économiques « sont et demeureront la clef de voûte d'une activité
économique à taille humaire, respectueuse de l'homme et de son environnement ».
Bien entendu, je ne peux qu'approuver cette analyse. Reste à savoir si vous
offrez effectivement aux petites entreprises et aux artisants les moyens de
subsister dans un environnement économique très libéral.
Les petites et moyennes entreprises sont une force pour notre pays. Ne perdons
jamais de vue qu'elles représentent 37 % de l'emploi salarié en France et,
surtout, 65 % des actifs. Elles s'affirment ainsi comme un réel rempart contre
les dérives d'un système ultralibéral, où la démesure prévaut, et dont nous
avons d'ailleurs pu constater les cruelles retombées en matière d'emplois, non
seulement dans le cadre de l'actualité récente de grands groupes américains,
mais aussi dans le contexte français, avec les charrettes de licenciements
annoncées dans de grands groupes, notamment Alcatel, Vivendi et France
Télécom.
Les entreprises de taille modeste maintiennent, en effet, le pouvoir de
décision à une échelle nationale, voire régionale, et constituent, dès lors, un
pôle de résistance devant la logique de délocalisation accélérée. Notons que
les PME ont accru leurs effectifs de 9 % entre 1993 et 1999, alors que les
grandes entreprises réduisaient les leurs de 2 %.
La raison d'être de votre ministère, avez-vous dit à l'occasion de votre
rencontre avec les représentants consulaires, est de leur « apporter au maximum
concours et soutien ».
Le budget que vous nous soumettez aujourd'hui montre que vous peinez
grandement à tenir vos engagements. En effet, à périmètre constant, le budget
attribué aux PME, au commerce et à l'artisanat diminue de 5,1 %, et on ne peut
que le déplorer.
Le Gouvernement déclare vouloir « libérer les initiatives », le moins que l'on
puisse dire c'est que vous ne soutenez pas ces initiatives à hauteur de nos
espérances.
Vous justifiez la baisse globale des crédits, d'une part, par la disparition
des aides consacrées à l'aménagement et la réduction du temps de travail et,
d'autre part, par la décentralisation de certains crédits, notamment le FISAC.
Je souhaite insister ici, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la suppression des
aides destinées à accompagner le passage aux 35 heures dans les petites
entreprises. Qu'adviendra-t-il des aides aux PME qui sont déjà passées aux 35
heures ? Par ailleurs, à la suite des mesures d'assouplissement mises en place
par le précédent gouvernement, ne l'oublions pas, nombre de très petites
entreprises ne sont pas encore passées aux 35 heures. Aujourd'hui, les
objectifs du Gouvernement semblent clairs : les salariés des PME, du commerce
et de l'artisanat seront définitivement exclus du bénéfice de l'aménagement et
de la réduction du temps de travail.
Cette position nous semble inacceptable, car elle tendrait à pérenniser une
situation d'inégalité entre les salariés.
Les crédits inscrits au sein de l'agrégat 25 de ce budget financent quatre
catégories d'actions : les aides à la formation, les actions économiques et
l'amélioration de la compétitivité des PME, l'accès au crédit et, enfin, le
financement de l'aide au départ.
Or si, dans certains domaines, et je le constate avec satisfaction, le
Gouvernement poursuit l'action de ses prédécesseurs, il est regrettable, me
semble-t-il, qu'un certain nombre de crédits, qui sont fondamentaux pour
affronter les enjeux à venir, diminuent sensiblement.
Il en est ainsi des aides à la formation. A partir de 2005, notre pays subira
un choc démographique terrible. En effet, 850 000 actifs par an partiront à la
retraite, alors que les jeunes arrivant sur le marché du travail ne disposeront
pas forcément d'une formation adaptée aux besoins des entreprises. Or, face à
l'accélération des besoins, les crédits consacrés aux aides à la formation
accusent une baisse de plus de 6 %. Pensez-vous vraiment que c'est en réduisant
les aides à la formation que notre pays sera mieux à même d'affronter le
papy-boom ? La promotion de la formation initiale ou continue est un impératif
absolu si nous ne voulons pas courir à la catastrophe ; cela faisait partie des
priorités du précédent gouvernement, apparemment pas du gouvernement auquel
vous appartenez.
Concernant, ensuite, les aides consacrées aux actions économiques et à
l'amélioration de la compétitivité des PME, je note que les crédits consacrés
aux actions économiques reculeront de 3 millions d'euros, soit une baisse de
24,4 %.
Pour autant, je n'ai pas que des critiques à formuler et je me réjouis que
vous repreniez, pour une large part, les orientations retenues par vos
prédécesseurs, en ce qui concerne tant les encouragements à la création
d'entreprise que les actions en faveur du développement économique des
territoires, ou encore l'aménagement de la fiscalité et la simplification des
formalités administratives. Je salue le relèvement du plafond de subvention de
20 % à 30 % dans les zones rurales.
Les crédits du fonds d'indemnisation pour la sauvegarde de l'artisanat et du
commerce sont désormais budgétisés. Il s'agit là d'un outil essentiel
d'aménagement et d'aide aux territoires en difficulté. Vous avez émis le
souhait de décentraliser ses actions. Cela permettrait probablement de mieux
apprécier la cohérence locale ou régionale des projets. Mais cette démarche
impose nécessairement des précisions quant aux critères retenus pour affecter
ce fonds, car il ne faudrait pas que seuls les mieux lotis puissent en profiter
!
Enfin, j'en viens aux aides destinées à améliorer l'accès au crédit des
PME.
Si le coût du crédit n'est plus un problème majeur aujourd'hui, l'accès au
financement demeure une réelle difficulté pour les PME à des moments décisifs
de leur développement : la création, la reprise, le développement rapide,
etc.
L'intervention de l'Etat en ce domaine est vitale pour bon nombre d'entre
elles. Elle permet en effet de contrebalancer la frilosité du système bancaire
en offrant aux petites entreprises des garanties d'emprunt, qui sont bien
souvent la clé de leur accès au financement. Gageons que vous aurez la sagesse
de poursuivre les orientations définies par le précédent gouvernement, afin de
soutenir autant que de besoin l'accès au crédit pour toutes les PME.
Par ailleurs, je tiens à souligner que des inquiétudes se font jour parmi les
PME exportatrices concernant leurs marchés à l'export en raison d'évolutions
possibles du dispositif de couverture à l'export, je veux parler bien sûr de la
COFACE, la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur. Pour le
développement de leurs ventes à l'extérieur, les grandes entreprises n'ont pas
forcément besoin d'une couverture spécifique ; ce n'est pas le cas des PME,
qui, eu égard à la taille de leur structure et
de facto
de leur marché,
sont soumises à un fort risque à l'export. Il est donc essentiel, monsieur le
secrétaire d'Etat, que le système COFACE puisse perdurer et continuer d'offrir
un système d'assurance efficace aux PME exportatrices.
Le budget attribué aux PME, au commerce et à l'artisanat pour 2003 apparaît
ainsi bien frileux pour un gouvernement qui prétend « mettre les entreprises au
coeur de la République ».
Indubitablement, le budget des PME est un budget sacrifié, cette année. Si les
orientations définies, loin de marquer une rupture avec celles de vos
prédécesseurs, nous semblent globalement pertinentes, les crédits qui y sont
affectés se révèlent fondamentalement insuffisants pour faire face aux défis
qui s'imposent déjà ou s'imposeront demain aux PME et aux artisans.
C'est pourquoi nous ne voterons pas ce budget.
(Applaudissements sur les
travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'ai l'honneur d'intervenir sur l'un des budgets de l'Etat qui est important
par son impact et par les enjeux auxquels il se rapporte, alors même qu'il ne
représente pas un niveau de crédits d'une grande ampleur.
Ce budget est important par son impact et par ses enjeux en raison du poids
considérable que constituent les PME dans le paysage de notre économie.
Rappelons-le, les PME rassemblent à elles seules 8 millions d'actifs,
l'artisanat 2,3 millions à lui seul. A ce titre, elles sont le premier
employeur de France. Il est donc essentiel, pour l'Etat, de leur apporter les
conditions qui leur permettront de maintenir cette dynamique, voire de les
encourager à la développer.
Ces conditions ne nécessitent pas forcément un montant de crédits important.
Les entreprises ont davantage besoin d'un Etat « facilitateur » que d'un Etat «
subventionneur ».
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Jean-René Lecerf.
Dans ce cadre, les allégements de charges et la suppression de contraintes
parfois tatillonnes seront plus déterminants que les aides financières que les
pouvoirs publics pourraient leur apporter. Il s'agit là d'un message fort, que
le Gouvernement a bien compris et dont on peut lire la traduction dans le
projet de loi de finances.
Votre budget, monsieur le secrétaire d'Etat, met en avant plusieurs priorités,
comme l'aide à la formation professionnelle des commerçants et des artisans et
les actions économiques en direction du secteur de l'artisanat, du commerce et
des services. Au-delà de ces seuls aspects, il s'inscrit dans un cadre plus
large, dont le Gouvernement a commencé à dresser les contours essentiels et qui
visent à rendre plus favorable l'environnement dans lequel évoluent les
entreprises.
Un des premiers signes forts de votre volonté s'est concrétisé par
l'assouplissement des 35 heures, dont la mise en oeuvre imposée par le
précédent gouvernement avait posé - on le sait - bien des problèmes aux petites
et moyennes entreprises.
Des réformes importantes sont initiées, d'autres verront le jour en 2003 : la
diminution des charges des entreprises dans le cadre de l'unification
progressive du SMIC ; l'exonération des charges sur les bas salaires ; la
poursuite de la suppression de la part salariale dans le calcul de la taxe
professionnelle ; l'aménagement de la prime pour l'emploi pour les travailleurs
à temps partiel. Le projet de loi sur l'initiative économique, que vous nous
soumettrez au début de l'année 2003, proposera des innovations qui sont très
attendues par les milieux économiques.
D'autres mesures, indirectes, auront un effet sur la consommation, comme la
diminution de l'impôt sur le revenu, l'allégement de la taxe professionnelle
pour les professions libérales et la prorogation du taux réduit de la TVA pour
le bâtiment. Nous attendons aussi de la part du Gouvernement qu'il procède
bientôt à l'allégement de la TVA sur la restauration et, peut-être, dans
d'autres secteurs d'activités, comme la confiserie ou la chocolaterie.
Il faudra réussir ces réformes comme sans doute bien d'autres, aussi
nécessaires qu'ambitieuses, pour que soit atteint dans cinq ans l'objectif
annoncé par M. le Premier ministre de créer 1 million d'entreprises
nouvelles.
La création d'entreprises constitue en effet un des socles du dynamisme de
l'économie française. Il est donc indispensable et urgent d'offrir aux futurs
créateurs d'entreprises des conditions favorables qui leur permettront de créer
leur outil de travail et de contribuer ainsi à la création des emplois dont
notre pays à besoin.
Il s'agit non pas pour l'Etat d'apporter des financements aux promoteurs de
projets, mais bien de jouer ici le rôle de « facilitateur », vous l'avez bien
compris, monsieur le secrétaire d'Etat. Les grandes lignes du projet de loi que
vous nous soumettez au début de l'année prochaine vont pleinement dans la
direction attendue par les PME, qu'il s'agisse des aides à la préparation de
projets, de la simplification des procédures, de la diminution du montant
requis pour constituer le capital initial, qui se trouverait ainsi
symboliquement réduit à un euro, ou des facilités accordées pour s'acquitter
des cotisations sociales avant d'avoir perçu le moindre revenu.
Ces diverses mesures, d'un coût limité pour le budget de l'Etat, auront un
effet important sur l'incitation à la création d'entreprises. Mais il faudra
que ces initiatives soient accompagnées d'une véritable revalorisation de
l'entreprise et des métiers du commerce et de l'artisanat.
La formation devra jouer un rôle de premier plan dans ce domaine, comme en a
exprimé le souhait le ministre de l'éducation nationale, M. Luc Ferry, à
travers la réforme à venir de l'enseignement professionnel. Il faudra expliquer
à nos jeunes que les filières artisanales constituent des voies aussi nobles
que d'autres, qu'elles débouchent sur de beaux métiers pouvant de surcroît être
lucratifs, ce qui n'est ni négligeable ni infamant.
A côté de l'amélioration des conditions de création des entreprises, il
conviendra de mettre en oeuvre avec volontarisme les réformes qui permettront
aux entreprises existantes de pérenniser leur activité et, si possible, de la
développer. Je le dis avec d'autant plus de force que, en ma qualité d'élu d'un
département frontalier de la Belgique, je constate que les entreprises qui
cèdent à la tentation de la délocalisation ou du moins celles qui choisissent
de s'implanter de l'autre côté de la frontière sont de plus en plus
nombreuses.
Les entreprises françaises sont parfois lasses d'avoir l'impression d'être les
seules à se montrer vertueuses. Quels arguments peut-on opposer aujourd'hui à
un chef d'entreprise du nord de la France, dont les installations sont situées
à dix ou à cinq kilomètres de la Belgique, hormis le civisme ou la patience,
l'un et l'autre ne pesant pas toujours très lourds dans le contexte d'une
économie de marché ?
Il est urgent d'agir dans ce domaine et, sur ce point, je souhaiterais
exprimer une inquiétude. Lors du débat sur les recettes de la loi de finances
pour 2003, le principe de déliaison des taux a suscité des commentaires de la
part de certains collègues qui auraient souhaité qu'on supprime les modalités
d'encadrement pour en permettre l'application, sans aucune restriction, au nom
de la libre administration locale.
Si cette intention était compréhensible du point de vue de l'autonomie des
collectivités territoriales, elle n'était pas sans danger pour l'équilibre de
notre économie. On aurait en effet pu voir des exécutifs faire le choix
politique d'alléger les taux de fiscalité applicables aux particuliers, pour
alourdir ceux qui auraient été imposés aux entreprises. La conjugaison des
charges nouvelles pesant sur les départements, l'APA et les SDIS notamment, sur
les régions - les transports ferroviaires par exemple - avec les échéances de
mars 2004 n'engageait guère à repousser cette tentation. Mais nous n'en sommes
pas là !
Avec la création d'entreprises et l'allégement des charges, il faudra réformer
également les conditions de reprise. Le gouvernement précédent a brillé par son
inaction en ce domaine. Ce dossier présente pourtant, lui aussi, un véritable
caractère d'urgence. Les départs en retraite seront d'une telle ampleur dans
les années à venir, surtout dans le secteur de l'artisanat, qu'il faudra donner
aux repreneurs potentiels les moyens qui leur permettront de mener à bien leur
projet.
Cette question soulève plus largement le problème des effectifs dans le
secteur de l'artisanat. J'évoquais tout à l'heure la formation, qui sera l'une
des conditions essentielles de pérennisation des entreprises et pour que des
secteurs entiers ne soient pas confrontés à une véritable pénurie de
main-d'oeuvre. En effet, à partir de 2005, ce seront chaque année 850 000
personnes qualifiées qui partiront à la retraite alors que les estimations
révèlent que 650 000 jeunes à peine entreront sur le marché du travail, souvent
sans être suffisamment formés.
Des moyens importants devront donc être mis en oeuvre pour éviter le risque
d'une pénurie alors même que l'on commence déjà à en éprouver les premiers
symptômes dans certains corps de métiers. Ces moyens devront concerner la
formation initiale, tout autant que la formation professionnelle. Les
techniques évoluant, certains métiers disparaissent, d'autres nécessitent des
savoir-faire nouveaux et, pour faire face aux adaptations auxquelles ils se
trouvent confrontés, les artisans seront dans l'obligation de compléter leur
formation professionnelle. L'un des enjeux essentiels de l'avenir de
l'artisanat réside probablement dans la capacité de notre pays à développer
l'attractivité de ses métiers et à en assurer une formation de qualité.
Au-delà de son impact économique, qui est certes essentiel, l'entreprise est
aussi un élément structurant du lien social. Il en va de même de l'activité
commerciale. Dans les zones rurales, les commerces de proximité jouent un rôle
tout aussi fondamental dans l'aménagement du territoire que les services
publics. A ce titre, il est indispensable de soutenir le commerce dans les
secteurs où il se trouve fragilisé. L'Etat pourrait imaginer, dans ce cadre, de
mieux coordonner ses aides avec les collectivités territoriales, lesquelles ont
souvent fait preuve de dynamisme et d'imagination pour contribuer à sauver leur
commerce de proximité. Ici encore, un assouplissement des conditions de reprise
des entreprises pourrait avoir un effet bénéfique sur l'activité
commerciale.
L'actualité récente me conduit à aborder un autre point qui me paraît
important, celui de la revitalisation des centres-villes au moyen du commerce
de détail. Il ne s'agit pas de remettre en cause le commerce des grandes
surfaces, d'autant que certaines d'entre elles sont implantées dans les
centres-villes et contribuent ainsi à leur dynamisme. Mais il y a encore trop
de villes dont l'activité du centre a pâti de la création d'une zone
commerciale située dans la périphérie. L'Etat pourrait, dans un tel contexte,
apporter un appui aux collectivités locales qui souhaiteraient soutenir la
création de commerces en centre-ville, notamment par le biais d'exonérations
fiscales spécifiques.
Il s'agit là d'une proposition que l'on pourrait resituer dans le contexte
plus global du rôle joué par les collectivités territoriales sur le plan
économique. Depuis longtemps, on évoque une loi qui viendrait clarifier la
répartition des compétences entre les différentes collectivités territoriales
sur ce point. La région, qui s'était vu conférer une mission particulière par
les lois de décentralisation, s'est trouvée depuis en concurrence avec les
départements et les communes, de même qu'avec les intercommunalités.
Les entreprises françaises ont besoin d'un cadre allégé, qui leur permette
d'exercer leur activité avec le moins de contraintes possible. Vous avez,
monsieur le secrétaire d'Etat, compris ce message !
Certes, il reste beaucoup à faire ; je pense, par exemple, au problème du
statut du conjoint dans l'entreprise, le plus souvent l'épouse, qui souffre
encore d'une véritable précarité. Il s'agit là d'un enjeu important parmi bien
d'autres. Mais, nous n'en doutons pas, les projets que vous nous présenterez
dans les mois à venir permettront d'avancer dans la résolution de ces
problèmes.
C'est avec confiance, monsieur le secrétaire d'Etat, que le groupe du
Rassemblement pour la République votera votre budget.
(Applaudissements sur
les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Renaud Dutreil,
secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à
l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation.
Monsieur le
président, mesdames, messieurs les sénateurs, oui, le Gouvernement place
l'entreprise au coeur de son projet républicain, l'entreprise, toutes les
entreprises, les 2,4 millions d'entreprises du secteur de l'artisanat, du
commerce et de l'industrie, sans oublier les professions libérales puisque,
pour la première fois, dans un Gouvernement, celles-ci sont officiellement
prises en compte.
En plaçant l'entreprise au coeur de son projet politique, le Gouvernement a
conscience que les entreprises sont le muscle cardiaque qui permet à notre
société de vivre, de se développer, de créer des emplois, du pouvoir d'achat,
de la richesse, ce qui, à l'évidence, a été trop souvent oublié.
Certes, les crédits de mon secrétariat d'Etat sont modestes, mais l'ambition
est grande puisque c'est une ambition collective de l'ensemble du Gouvernement.
Vous avez pu en juger par différentes mesures qui ont déjà été annoncées, voire
mises en oeuvre.
Je citerai pour mémoire les allégements de charges sociales, l'assouplissement
des 35 heures - les petites entreprises, celles de moins de vingt salariés
notamment, risquaient d'être broyées par l'application mécanique du système -
la suppression de la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle,
qui va profiter à 1,2 million d'entreprises, enfin l'allégement progressif de
la taxe professionnelle des professions libérales et des travailleurs
indépendants, que ces secteurs attendent depuis si longtemps.
S'y ajoutent quelques mesures de simplification telles que l'annualisation du
paiement de la TVA, le relèvement des seuils d'assujettissement aux acomptes de
la taxe professionnelle et de l'impôt sur les sociétés, mais aussi une mesure
dont on a pu constater les bienfaits : la prorogation de l'application du taux
réduit de TVA aux services d'aides à la personne et aux travaux d'entretien des
logements.
En outre, un texte important vous sera présenté au début de 2003. Ce projet,
qui traitera de l'initiative économique, aura trois objectifs.
Le premier objectif sera de stimuler la création d'entreprises dans notre
pays, car il est essentiel que notre tissu économique se renouvelle : nous
avons 2,4 millions d'entreprises alors que nos voisins britanniques en ont 3,4
millions ; quant aux Espagnols, ils créent tous les ans deux fois plus
d'entreprises que nous. Il faut donc renouveler notre tissu en stimulant la
création d'entreprises et en inoculant, plus que par le passé, l'esprit
d'entreprise chez nos concitoyens. Nous le ferons en commençant par l'école ;
M. Luc Ferry a dû vous annoncer son intention d'ouvrir l'école de la République
sur l'entreprise.
Le deuxième objectif sera de favoriser le développement des entreprises, de
drainer les capitaux, l'épargne des Français vers les entreprises, de
transformer l'argent dormant en argent fertile, c'est-à-dire capable de créer
de la richesse en s'investissant dans l'avenir.
Le troisième objectif sera d'anticiper le choc démographique et préparer la
transmission d'entreprise. Ce point a été évoqué par bien des orateurs ; il est
en effet essentiel.
Près de 500 000 chefs d'entreprise vont, au cours des dix prochaines années, «
passer la main », transmettre leur outil de travail, qui est souvent l'oeuvre
de leur vie, à une nouvelle génération. Il est donc essentiel que l'Etat se
fasse alors le plus discret possible sur le plan de la fiscalité.
Ce projet de loi intitulé « Agir pour l'initiative économique » est donc un
projet ambitieux : il s'agit de faire souffler l'esprit d'entreprise sur
l'ensemble de notre société.
Il vise à alléger les contraintes qui pèsent sur la création, sur le
développement et sur la transmission d'entreprises. Il vise également à mieux
irriguer nos territoires grâce à la création d'outils nouveaux tels que les
fonds d'investissement de proximité, qui permettront d'apporter un soutien aux
stratégies territoriales, régionales, départementales ou des grandes
agglomérations. Ces outils répondent à la volonté de mettre en place une
économie de proximité, une politique de développement enraciné dans les
territoires.
Aussi, je souris un peu lorsque j'entends certains d'entre vous critiquer la
réduction de 3 millions d'euros des crédits de mon ministère, alors que, dans
le même temps, près de 350 millions d'euros seront mobilisés, par le biais du
projet de loi que j'ai cité, en faveur des entreprises de notre pays quelle que
soit leur taille, qu'il s'agisse des très petites entreprises ou d'entreprises
moyennes, de façon qu'elles puissent se développer, se créer, se multiplier. Il
importe de considérer notre action, non pas sous l'angle des subventions, mais
dans son aspect de libération des énergies, comme le souligne si souvent M. le
Premier ministre. Moins d'aides, plus d'air, plus d'oxygène, telle est la
demande que nous expriment aujourd'hui les artisans, les commerçants, les
professions libérales, les entrepreneurs, comme l'ont rappelé, à juste titre,
certains orateurs.
Ce projet de loi, qui viendra en discussion devant le Sénat au mois de février
prochain, s'inscrit dans un ensemble de textes qui compléteront ce travail.
Un deuxième texte interviendra ensuite sous la forme d'une ordonnance, après
le vote d'une loi d'habilitation. Ce texte visera à simplifier la vie des
entreprises. En effet, notre organisation administrative constitue une sorte de
taxe dissimulée qui pèse sur les épaules des entrepreneurs et des entreprises,
notamment les plus petites, qui sont les plus fragilisées par ces difficultés
administratives.
Evoquer une simplification suscite, bien entendu, beaucoup de critiques, tant
le scepticisme est inscrit dans les mentalités, notamment chez les
entrepreneurs.
Nous avons décidé de simplifier vite et fort : des mesures très simples seront
mises en oeuvre. J'en cite deux, attendues depuis plus de vingt ans par les
entrepreneurs.
La première est l'instauration du guichet social unique pour les très petites
entreprises, afin qu'elles n'aient en face d'elles qu'un seul organisme chargé
de prélever les charges sociales et, ensuite, de les redistribuer à qui de
droit, lancer les appels de cotisations, traiter les difficultés, gérer les
contentieux, au lieu de cette pléthore d'organismes existant à l'heure
actuelle.
La seconde innovation consiste à mettre en place le titre emploi salarié en
entreprise, l'équivalent du titre emploi salarié agricole - TESA - en
agriculture, inspiré du chèque emploi-service tant apprécié par les familles et
qui permettra à de très petites entreprises de s'acquitter de façon très simple
des formalités d'embauche et de rémunération d'un salarié.
Il s'agit de mesures de bon sens qui, bien plus que les crédits alloués à un
ministère, traduisent la volonté du Gouvernement d'accompagner le développement
de ces entreprises.
Viendra ensuite un troisième texte relatif au statut de l'entrepreneur. Je
n'oublie pas, bien évidemment, celui du conjoint de l'entrepreneur, parce que,
bien souvent, c'est toute une famille qui s'engage dans l'aventure
entrepreneuriale : il faut donc veiller à ce que les droits sociaux ouverts à
ceux qui ont choisi de créer une entreprise soient égaux à ceux dont
bénéficient les salariés du public ou du privé.
J'en arrive au projet de budget du secrétariat d'Etat aux PME.
Il est inutile de rappeler qu'il ne résume pas notre action. J'ai veillé, en
l'élaborant, à ne retenir que les actions les plus efficaces et les mieux
cadrées. Je préfère des actions fortes d'allégements et de simplification qui
permettent aux entreprises de se développer plutôt que la distribution de
subventions éparpillées, peu lisibles, qui ne sont pas toujours efficaces et
qui, en réalité, dissimulent bien souvent l'incapacité de l'Etat à comprendre
la logique des entreprises.
Ce budget est en diminution de 3 millions d'euros, ce qui, évidemment, en
valeur absolue, est une somme de faible importance, mais qui correspond, à
périmètre constant, à une réduction de 5,1 % des crédits de mon secrétariat
d'Etat.
Certains crédits ont pu être diminués parce qu'ils étaient affectés à des
actions ponctuelles qui ne sont pas reconduites. Je pense en particulier aux
crédits qui étaient destinés à la mise en oeuvre des accords sur la RTT et au
passage à l'euro. D'autres crédits ne sont plus nécessaires parce que les
actions qu'ils finançaient ont été menées à bien. Je pense en particulier à la
restructuration des chambres de métiers dans les départements d'outre-mer.
Certains orateurs se sont attardés sur la diminution des crédits destinés aux
conventions de développement économique qui atteint un peu plus d'un million
d'euros, ce qui représente un montant relativement modeste. Mais je tiens à
affirmer de la façon la plus nette, car certains ont pu s'en inquiéter, que les
chambres de métiers ou les organisations professionnelles qui bénéficient de
ces crédits d'animation économique ne pâtiront pas de cette diminution
budgétaire puisqu'elle sera compensée par le FISAC.
Une autre grande innovation concerne la budgétisation du FISAC. Vous avez
rappelé la nécessité de cette opération qui tire les conséquences de la loi
organique relative aux lois de finances. Il est en effet nécessaire que le
Parlement puisse discuter en toute transparence des crédits affectés au
commerce et à l'artisanat.
Cette opération n'aura aucun impact négatif pour les bénéficiaires des
crédits. J'ai, en effet, veillé à ce que l'affectation de ces fonds reste
rapide et souple puisque l'ORGANIC, qui est le gestionnaire actuel du FISAC, en
restera l'attributaire au cours de l'exercie 2003.
De plus, je veillerai, et M. Alain Lambert s'y est engagé, à ce que, dans les
trois années qui viennent, ces crédits ne diminuent pas. Dans le budget pour
2003, ils sont même en augmentation et s'élèvent à 71 millions d'euros au lieu
de 67 millions d'euros lors de l'exercice précédent.
Il est également important, au-delà de ce rappel relatif au montant des
crédits du FISAC, de souligner la nécessité de réformer ce fonds pour qu'il
soit plus efficace, plus proche de ceux qui doivent normalement en bénéficier.
Je vais donc accélérer les procédures en permettant des attributions de
subventions au fil de l'eau et en évitant ces blocages que représentent à
l'heure actuelle un certain nombre de formalités administratives et de
consultations.
Je vais également relever le plafond des subventions de 20 % à 30 % pour les
communes de moins de 2 000 habitants. Etant moi-même élu d'un département
rural, je sais à quel point une petite commune a besoin d'un montant important
de subventions pour s'engager dans un projet.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Tout à fait !
M. Renaud Dutreil,
secrétaire d'Etat.
Si l'on ne fait pas l'effort suffisant pour
l'accompagner, très souvent, le projet lui-même est abandonné. Il faut donc que
le FISAC puisse être à la hauteur des attentes des communes du monde rural.
Enfin, je vais poursuivre la décentralisation des crédits du FISAC, que j'ai
expérimentée dans la région Languedoc-Roussillon à laquelle ont été affectés 12
millions d'euros au titre de la solidarité envers les entreprises victimes des
inondations au mois de septembre dernier. Je souhaite notamment encourager des
opérations aussi essentielles que la sécurisation des commerces et des
entreprises, à un moment où les agressions et les actes de vandalisme se
multiplient. Il faut également veiller au maintien, tout aussi indispensable,
des commerces de bouche dans nos petites villes, dans nos chefs-lieux de canton
et dans nos villes moyennes, car ils représentent bien souvent la vitalité même
du commerce. Des actions seront donc engagées en partenariat avec les régions,
mais également avec les chambres de commerce et les chambres de métiers, qui
sont, sur le terrain, d'une très grande efficacité.
J'ai voulu également rétablir un nouveau pacte de confiance avec ces deux
grands réseaux consulaires que sont les chambres de métiers et les chambres de
commerce et d'industrie. Mises à la diète pendant de nombreuses années, les
chambres de commerce et les chambres de métiers doivent être accompagnées dans
leur action et leur développement.
C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de donner une liberté supplémentaire
aux compagnies consulaires en revalorisant l'impôt additionnel à la taxe
professionnelle, l'IATP, à hauteur de 4 %, voire de 7 % pour les chambres de
commerce qui accusent le plus de retard en matière fiscale. Ce geste de
confiance n'exclut pas, bien évidemment, la responsabilité de ces chambres
consulaires qui savent bien qu'aujourd'hui il faut veiller à ne pas prélever
trop d'impôt. Elles en ont une pleine conscience, et je leur fais une totale
confiance à ce sujet.
Le Gouvernement travaille également sur un dossier très important qui a fait
l'objet d'un engagement du Président de la République pendant sa campagne : la
TVA sur la restauration. Il s'agit là - cela est maintenant compris - d'un
dossier européen. Il faut en effet recueillir l'adhésion de tous les Etats
membres de l'Union européenne sur ce dossier, et nous travaillons sans relâche
- le Premier ministre lui-même s'y est personnellement engagé - pour que, le
plus rapidement possible, cette promesse puisse être tenue. Nous savons qu'elle
se traduira par de nombreuses créations d'emplois.
Par ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez vécu comme moi la
crise qui a opposé les agriculteurs et la distribution. Ces relations
commerciales doivent désormais être abordées sous un nouvel angle, dans un
climat pacifié. Le montant des marges arrière a dérivé au fil du temps de façon
excessive et il est important aujourd'hui d'organiser leur reflux.
C'est ce que j'ai entrepris, en renouant d'abord les fils du dialogue qui
avaient été coupés. C'est désormais chose faite avec la mise en place de la
commission d'examen des pratiques commerciales. Celle-ci travaille dans de
nouvelles conditions puisque les agriculteurs qui n'en faisaient pas partie y
sont maintenant représentés.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Renaud Dutreil
secrétaire d'Etat.
De plus, différents textes sont actuellement à l'étude
et des concertations sont engageés afin de nous permettre de sortir
progressivement du piège que représentent les marges arrière. Cela doit se
faire sans diaboliser ni même désigner les coupables, car l'économie de marché
doit respecter tous les acteurs, quels qu'ils soient.
Je souhaite que la mise en place de ces nouveaux équilibres soit l'objet, de
la part du Gouvernement, d'une très grande attention, parce que, vous le savez,
mesdames, messieurs les sénateurs, les sensibilités peuvent être très vives à
ce sujet.
Voilà quelques éléments qui traduisent une ambition globale, celle de donner à
notre pays des entreprises allantes, qui investissent, qui créent de la
richesse et qui soient capables de lutter à armes égales avec leurs
concurrentes européennes ou mondiales.
Les talents sont nombreux ; notre appareil industriel et commercial est de
grande qualité. Pendant de trop longues années, nos entreprises ont été
accablées de difficultés administratives, de charges excessives, de taxes
superflues. Ainsi, faire comprendre à l'ensemble des Français que leur sort est
lié à celui de nos entreprises va dans le sens de l'intérêt général.
Tels sont les objectifs que je me suis fixés et que traduisent non seulement
ce projet de budget mais également l'ensemble des textes en préparation qui
vous seront soumis au cours de l'année 2003.
(Applaudissements sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi
que sur certaines travées du RDSE.)
(M. Adrien Gouteyron remplace M. Bernard Angels au fauteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
vice-président
M. le président.
Je rappelle au Sénat que les crédits concernant les petites et moyennes
entreprises, le commerce et l'artisanat seront mis aux voix aujourd'hui même à
la fin de l'examen des crédits affectés au commerce extérieur.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 23 186 385 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV : 315 347 872 euros. »
L'amendement n° II-41, présenté par MM. Arthuis, Marini et Cazalet, au nom de
la commission des finances, est ainsi libellé :
« Réduire les crédits du titre IV de 1 000 000 euros. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Dans le cadre de la politique de maîtrise des
dépenses publiques menée par la commission des finances, cet amendement vise à
réduire légèrement les crédits destinés aux PME, à l'artisanat et au
commerce.
Cet objectif est d'autant plus justifié que le Gouvernement a révisé à la
baisse les recettes fiscales : 700 millions d'euros en moins dans les caisses
de l'Etat. Il faut donc rechercher des économies si l'on ne veut pas augmenter
les impôts.
La réduction envisagée porte sur les bonifications d'intérêt, dispositif qui
est en extinction depuis 2001. En effet, il a déjà été jugé inefficace par le
précédent gouvernement.
Cette appréciation est reprise par le nouveau gouvernement qui ne peut que
déplorer, au surplus, l'aspect « interventionniste » de la bonification
d'intérêt.
Aussi, la politique de garantie d'emprunt, qui lui avait été substituée, est
aujourd'hui renforcée par le secrétariat d'Etat. Il apparaît ainsi que les 9,15
millions d'euros prévus pour ces bonifications en 2003 sont excessifs compte
tenu de l'orientation qui est adoptée.
Il est indispensable que chaque membre du Gouvernement participe, dans toute
la mesure du possible, à l'effort de compensation de la nouvelle dégradation
des recettes fiscales. Celui qui vous est demandé, monsieur le secrétaire
d'Etat, tient compte de l'effort de modération que traduit votre projet de
budget, et qui a été salué.
La réduction proposée s'élève à 1 million d'euros. Elle est réaliste et, je
crois, acceptable.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil
secrétaire d'Etat.
Mon secrétariat d'Etat a déjà fait un effort
substantiel, comme vous l'avez remarqué, dans le cadre de la préparation de ce
projet de loi de finances. Je suis bien conscient de la nécessité pour chacun
de contribuer à une meilleure gestion des deniers publics.
Permettez-moi d'attirer votre attention sur un point qui n'est pas abordé dans
cet amendement mais qui est connexe, je veux parler de la Société française
pour l'assurance du capital-risque, la SOFARIS. Il s'agit d'un outil performant
dont le rôle est essentiel. Je vous sais gré de ne pas avoir cédé à la
tentation de toucher aux crédits affectés à la SOFARIS, crédits qui sont à
renforcer plutôt qu'à réduire.
En ce qui concerne l'amendement n° II-41, je m'en remets à la sagesse du
Sénat.
M. le président.
La parole est à M. Bernard Dussaut, contre l'amendement.
M. Bernard Dussaut.
Je constate un décalage toujours important entre les déclarations du Premier
ministre, qui ne cesse de vanter le retour à l'emploi de nombreux chômeurs
grâce au développement et à la création d'entreprises dans le secteur des
petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, et, dans le
même temps, les décisions de la majorité sénatoriale qui pratique des coupes
sévères dans un budget déjà très faible. Nous voterons donc contre cet
amendement visant à réduire d'un million d'euros les crédits destinés aux PME,
au commerce et l'artisanat.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Je souhaite vivement que le
Sénat adopte l'amendement présenté par M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial
de la commission des finances pour les crédits des petites et moyennes
entreprises, du commerce et de l'artisanat.
Je souhaite aussi vous rendre hommage, monsieur le secrétaire d'Etat, pour la
conviction dont vous avez fait preuve voilà un instant du haut de la tribune du
Sénat. Vous avez ainsi montré à quel point le Gouvernement dirigé par M.
Raffarin entendait mobiliser les énergies locales, celles des entrepreneurs,
des responsables de petites et moyennes entreprises qui, sur l'ensemble du
territoire national, participent à la création de richesses et d'emplois.
Je ne doute pas que ces orientations nouvelles, cette impulsion, cette ardeur
auront des effet très bénéfiques.
Monsieur Dussaut, c'en est fini de la politique d'affichage ! Il ne suffit pas
d'inscrire des crédits pour emporter la conviction.
M. Gérard Cornu,
rapporteur pour avis.
Oui, c'est cela la rupture !
M. Jean Arthuis,
président de la commission des finances.
Nous avons constaté, au cours
des dernières années, la discordance qui existait entre les budgets
d'affichage, les budgets d'illusion et l'exécution budgétaire.
Le Gouvernement entend se montrer sincère. C'est si vrai qu'il a tenu à
modifier son projet de loi de finances pour 2003 en tirant les conséquences
d'une conjoncture moins porteuse qu'on ne pouvait l'imaginer au mois de
septembre lorsque furent arrêtées les décisions budgétaires.
La commission des finances, et le rapporteur spécial y a veillé tout
spécialement, a tenu compte des niveaux de consommation des crédits en 2002 et,
par conséquent, cet ajustement ne doit pas contrarier l'efficacité de la
politique gouvernementale, bien au contraire.
Nous rendons hommage aux actions de la SOFARIS et je voudrais préciser que les
collectivités territoriales sont bien souvent partenaires de la banque de
développement des PME en s'associant, sur le plan local, à des mises à
disposition de crédits pour la BDPME. Il ne s'agit pas d'aides directes sous
forme d'intérêts, sous forme de prises en charge de commissionnements
bancaires, mais je puis témoigner que cette orientation est particulièrement
efficace.
Tels sont les motifs qui me portent à voter cet amendement ainsi que les
crédits destinés aux PME, au commerce et à l'artisanat, monsieur le secrétaire
d'Etat, en vous remerciant de la compréhension que vous venez de manifester à
notre endroit. Nous voulons vous aider.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-41.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 410 384 000 euros ;
« Crédits de paiement : 175 967 000 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 730 741 000 euros ;
« Crédits de paiement : 537 978 000 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre VI est réservé.
J'appelle en discussion les articles 64 et 65, qui sont rattachés pour leur
examen aux crédits affectés aux petites et moyennes entreprises, au commerce et
à l'artisanat, ainsi que, en accord avec la commission des finances, les
amendements n°s II-33 et II-45 rectifié tendant à insérer un article
additionnel après l'article 64.
« Economie, finances et industrie
Article 64
M. le président.
« Art. 64. - Les quinzième et seizième alinéas de l'article 1600 du code
général des impôts sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour 2003, le produit de la taxe est arrêté par les chambres de commerce et
d'industrie sans pouvoir augmenter de plus de 4 % par rapport au montant décidé
pour 2002.
« Cette limite est portée à 7 % pour les chambres de commerce et d'industrie
pour lesquelles le rapport constaté au titre de l'année 2002 entre, d'une part,
le produit de la taxe et, d'autre part, le total des bases imposées est
inférieur d'au moins 45 % au rapport moyen constaté en 2002 au niveau
national.
« Pour 2003, le produit de la taxe arrêté dans les conditions prévues aux deux
alinéas précédents est majoré du montant du prélèvement prévu au III de
l'article 13 de la loi de finances pour 2003 (n° du ). »
L'amendement n° II-15, présenté par MM. Valade, Vinçon, Lecerf et les membres
du groupe du Rassemblement pour la République, est ainsi libellé :
« I. - Après le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour
remplacer les quinzième et seizième alinéas de l'article 1600 du code général
des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les chambres de commerce et d'industrie de circonscription
départementale dont le rapport constaté au titre de l'année 2002 entre, d'une
part, le produit de la taxe et, d'autre part, le total des bases imposées, est
inférieur d'au moins 55 % au rapport moyen constaté en 2002 au niveau national,
cette limite est portée à 1 millions d'euros, à condition que le montant
d'imposition additionnelle à la taxe professionnelle perçu en 2002 ne dépasse
pas 2,2 millions d'euros.
« II. - En conséquence, dans le premier alinéa de cet article, remplace les
mots : " trois alinéas " par les mots : " quatre alinéas ". »
La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf.
C'est très volontiers que je défends cet amendement qui tient particulièrement
à coeur à M. le président de la commission des affaires culturelles.
Avant la suppression de la procédure excessivement lourde de convention avec
l'Etat, l'article 64 tend à porter, pour 2003, le taux maximum d'augmentation
du produit de l'IATP à 4 %, par rapport à 2002, sauf dans le cas des chambres
de commerce et d'industrie qui, en 2002, ont eu un taux d'imposition inférieur
d'au moins 45 % au taux moyen national. Dans ce dernier cas, en effet, il est
proposé que le produit de l'IATP puisse croître dans la limite de 7 % par
rapport au produit décidé pour 2002.
Cependant, certaines de ces institutions consulaires doivent corriger les
conséquences de stratégies tendant à privilégier à la fois une faible
mobilisation de la ressource fiscale et une politique d'investissement
importante. Ces choix ont finalement conduit à limiter la capacité d'action de
certaines chambres de commerce et d'industrie, empêchant désormais toute mesure
nécessaire de soutien, notamment aux PME et à la création d'emplois.
Un tel déséquilibre ne peut être corrigé qu'en sollicitant la ressource
fiscale. C'est l'objet de cet amendement, par lequel nous proposons une mesure
très ciblée et visant à résoudre les difficultés particulières de certaines
chambres de commerce et d'industrie en accord avec les conclusions de
l'inspection générale du commerce et de l'industrie diligentées par les
ministres de tutelle.
Ainsi, cet amendement institue une limite maximale d'augmentation du produit
de l'IATP perçu en 2003 par rapport au produit perçu en 2002, qui est, d'une
part, spécifique aux institutions consulaires départementales et dont le taux
d'imposition en 2002 a été inférieur d'au moins 55 % au taux moyens national
et, d'autre part, dont le produit de l'IATP perçu en 2002 n'a pas dépassé 2,2
millions d'euros.
Ces institutions consulaires pourraient augmenter le produit de l'IATP d'un
million d'euros en 2003 par rapport à 2002. Comme vous le voyez, le cumul de
ces critères permettra de « cibler » strictement la mesure proposée en évitant
tout effet pervers ou d'aubaine.
Le caractère à la fois très précis et spécifique de cette mesure ne remet en
aucune manière en cause l'objectif du Gouvernement et de la majorité
sénatoriale de ne pas augmenter les prélèvement obligatoires.
C'est la raison pour laquelle je vous demande, mes chers collègues, de bien
vouloir l'adopter.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Depuis cette année, le produit de l'impôt additionnel
à la taxe professionnelle, l'IATP, est arrêté par toutes les chambres de
commerce et d'industrie, mais dans d'étroites limites.
Le présent projet de loi de finance prévoit un assouplissement important de
ces dispositions et l'amendement vise à apporter un assouplissement
supplémentaire. Ainsi, les chambres de commerce et d'industrie de
circonscription départementale dont la pression fiscale est inférieure d'au
moins 55 % à la moyenne nationale pourraient porter la progression du produit
de l'IATP à un million d'euros si, toutefois, le produit reçu en 2002 ne
dépasse pas 2,2 millions d'euros.
L'aménagement proposé vise les situations les plus critiques et ne devrait
donc pas entraîner une augmentation des prélèvements obligatoires de nature à
préoccuper la commission des finances.
Je m'en remets donc à l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Renaud Dutreil,
secrétaire d'Etat.
Je rappelle que le Gouvernement a décidé, pour 2003,
de donner une nouvelle liberté aux chambres de commerce avec des augmentations
de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle, l'IATP, qui varieront de 4 à
7 %.
Cependant, cette nouvelle liberté ne permet pas de résoudre un certain nombre
de difficultés que connaissent aujourd'hui un nombre limité de chambres de
commerce.
Dans la mesure où cet amendement ne remet pas en cause sa politique et les
principes qu'il a posés, le Gouvernement y est favorable.
(M. Jean Bizet
applaudit.)
M. le président.
Quel est désormais l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-15.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-32 rectifié, présenté par Mmes Michaux-Chevry et Payet, MM.
Masson et Ostermann, est ainsi libellé :
« I. - Compléter
in fine
le texte proposé par cet article pour
remplacer les quinzième et seizième alinéas de l'article 1600 du code général
des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, le produit arrêté par les chambres de commerce et d'industrie des
départements d'outre-mer pour l'année 2003 n'est pas soumis aux dispositions
des trois alinéas précédents. »
« II. - En conséquence, au premier alinéa de cet article, remplacer le mot : "
trois " par le mot : " quatre ". »
L'amendement n° II-44, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« I. - Compléter
in fine
le texte proposé par cet article pour
remplacer les quinzième et seizième alinéas de l'article 1600 du code général
des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« Par ailleurs, le produit de la taxe est arrêté par les chambres de commerce
et d'industrie de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la
Réunion sans pouvoir augmenter de plus de 7 % par rapport au montant décidé
pour 2002.
« II. - En conséquence, au premier alinéa de cet article, remplacer le mot : "
trois " par le mot : " quatre ". »
L'amendement n° II-32 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour présenter l'amendement n°
II-44.
M. Renaud Dutreil,
secrétaire d'Etat.
Sur le fond, l'amendement présenté par le Gouvernement
a le même objectif que l'amendement qui a été évoqué. Mais, en particulier pour
permettre une meilleure insertion de ce dispositif dans le code général des
impôts, le Gouvernement a souhaité une rédaction différente.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
Favorable.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-44.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je mets aux voix l'article 64, modifié.
(L'article est adopté.)
Article additionnel après l'article 64
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
L'amendement n° II-33, présenté par MM. Cornu, P. André et Gouteyron, est
ainsi libellé :
« Après l'article 64, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« En cas de dissolution de deux ou plusieurs chambres de commerce et
d'industrie ayant décidé de concourir à la création d'une nouvelle chambre par
délibération conforme de leurs assemblées générales respectives, le taux de
l'imposition additionnelle à la taxe professionnelle appliquée aux
ressortissants des chambres dissoutes est rapproché du taux d'imposition
additionnelle de taxe professionnelle de la nouvelle chambre par paliers.
« L'écart constaté l'année au cours de laquelle la création est décidée entre
le taux de l'imposition additionnelle à la taxe professionnelle de la nouvelle
chambre (soit la somme des impositions additionnelles à la taxe professionnelle
divisée par la somme des bases) et celui de l'imposition additionnelle à la
taxe professionnelle de chaque ressortissant est réduit chaque année dans les
conditions fixées aux I et II ci-après :
« I. - Cet écart est réduit sur un nombre d'années déterminé au moment de la
fusion comme suit :
« - sur dix ans, lorsque le taux le moins élevé des taux appliqués aux
ressortissants des chambres dissoutes est inférieur à 10 % du taux le plus
élevé ;
« - sur neuf ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 10 %
du taux le plus élevé et inférieur à 20 % ;
« - sur huit ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 20 %
du taux le plus élevé et inférieur à 30 % ;
« - sur sept ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 30 %
du taux le plus élevé et inférieur à 40 % ;
« - sur six ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 40 %
du taux le plus élevé et inférieur à 50 % ;
« - sur cinq ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 50 %
du taux le plus élevé et inférieur à 60 % ;
« - sur quatre ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 60
% du taux le plus élevé et inférieur à 70 % ;
« - sur trois ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 70 %
du taux le plus élevé et inférieur à 80 % ;
« - sur deux ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 80 %
du taux le plus élevé et inférieur à 90.
« Lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 90 % du taux le plus
élevé, le taux de la chambre nouvelle s'applique dès création de celle-ci.
« Toutefois, les chambres décidant de leur dissolution et de la création d'une
nouvelle chambre peuvent, dans le cadre de la délibération conforme de leurs
assemblées générales respectives, diminuer la durée de la période de réduction
des écarts de taux résultant des dispositions visées ci-dessus.
« Chaque année, pour chaque chambre dissoute, l'écart entre le taux de
l'imposition additionnelle à la taxe professionnelle fictif qu'auraient payé
les ressortissants de ladite chambre compte tenu de la décision d'augmentation
prise par la nouvelle chambre et le taux de l'imposition additionnelle à la
taxe professionnelle de la nouvelle chambre est divisé par le nombre d'années
restant à courir pour respecter la durée totale de la période de réduction des
écarts des taux ci-dessus définie. Ce quotient est ajouté ou retranché, selon
le cas, au taux de l'imposition additionnelle à la taxe professionnelle fictif
mentionné ci-dessus : le résultat de cette opération constitue le taux de
l'imposition additionnelle à la taxe professionnelle appliquée aux
ressortissants de la chambre dissoute.
« II. - En cas de création d'un nouvelle chambre au cours d'une période de
réduction d'écarts de taux résultant d'une création antérieure par dissolution
de chambres, les calculs visés au I sont effectués en comparant les taux
d'imposition additionnelle à la base professionnelle de la chambre issue de la
première dissolution et de la chambre tierce, la période de réduction des
écarts de taux ne pouvant être plus courte que le nombre d'années restant à
courir pour achever la première opération de création. »
L'amendement n° II-45 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi
libellé :
« Après l'article 64, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
«
I. -
L'article 1600 du code général des impôts dans sa rédaction
actuelle constitue un I et est complété par un II, un III et un IV ainsi
rédigés :
«
II. -
Une chambre de commerce et d'industrie créée par dissolution de
deux ou plusieurs chambres de commerce et d'industrie vote le produit de la
taxe additionnelle à la taxe professionnelle à compter de l'année suivant celle
de sa création.
« Le produit voté est, pour la première année qui suit celle de la création de
la chambre de commerce et d'industrie, égal au maximum à la somme des produits
votés l'année précédente par chacune des chambres dissoutes majoré, le cas
échéant, dans les conditions prévues au I.
« L'écart constaté entre le taux de la taxe additionnelle à la taxe
professionnelle appliqué au profit de la chambre de commerce et d'industrie
nouvellement constituée et le taux de la taxe additionnelle à la taxe
professionnelle des chambres de commerce et d'industrie dissoutes est, chaque
année, réduit dans les conditions fixées aux 1 et 2 ci-après :
« 1. Cette réduction s'effectue pendant la durée suivante :
« - sur une période de dix ans, lorsque le taux le moins élevé résultant des
produits votés par chacune des chambres de commerce et d'industrie dissoutes au
titre l'année de la création de la chambre est inférieur à 10 % du taux le plus
élevé ;
« - sur neuf ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 10 %
du taux le plus élevé et inférieur à 20 % ;
« - sur huit ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 20 %
du taux le plus élevé et inférieur à 30 % ;
« - sur sept ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 30 %
du taux le plus élevé et inférieur à 40 % ;
« - sur six ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 40 %
du taux le plus élevé et inférieur à 50 % ;
« - sur cinq ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 50 %
du taux le plus élevé et inférieur à 60 % ;
« - sur quatre ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 60
% du taux le plus élevé et inférieur à 70 % ;
« - sur trois ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 70 %
du taux le plus élevé et inférieur à 80 % ;
« - sur deux ans, lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 80 %
du taux le plus élevé et inférieur à 90 % ;
« Lorsque le taux le moins élevé est égal ou supérieur à 90 % du taux le plus
élevé, le taux de la chambre de commerce et d'industrie nouvellement constituée
s'applique dès la première année.
« Toutefois, les chambres décidant de leur dissolution et de la création d'une
nouvelle chambre peuvent, dans le cadre de la délibération conforme de leurs
assemblées générales respectives, diminuer la durée de la période de réduction
des écarts de taux résultant des dispositions visées ci-dessus.
« 2. Le taux applicable chaque année pendant la durée de réduction des écarts
de taux est égal sur le territoire de chaque chambre de commerce et d'industrie
dissoute :
«
a)
au taux qui résulte de la division de la part du produit voté par
la chambre de commerce et d'industrie afférente au territoire de la chambre
dissoute par les bases imposables sur ce territoire ;
«
b)
majoré ou diminué de l'écart entre le taux correspondant au
produit voté par la chambre de commerce et d'industrie et le taux calculé
conformément au
a
, cet écart étant divisé par le nombre d'années restant
à courir compte tenu de la durée fixée au 1.
«
III. -
En cas de création postérieurement au 1er juillet d'une
chambre de commerce et d'industrie par dissolution de deux ou plusieurs
chambres de commerce et d'industrie, les délibérations prises en application de
l'article 1602 A par les chambres dissoutes sont applicables aux opérations
réalisées l'année de la création de la nouvelle chambre de commerce et
d'industrie.
« Les exonérations applicables antérieurement à la création de nouvelle
chambre de commerce et d'industrie sont maintenues pour la durée restant à
courir.
«
IV.
- En cas de création d'une nouvelle chambre au cours d'une
période de réduction d'écarts de taux résultant d'une création antérieure par
dissolution de chambres, les calculs visés au II sont effectués en comparant
les taux d'imposition additionnelle à la taxe professionnelle de la chambre
issue de la première dissolution et de la chambre tierce, la période de
réduction des écarts de taux ne pouvant être plus courte que le nombre d'années
restant à courir pour achever la première opération de création. »
« II. - Les dispositions du I s'appliquent pour les chambres de commerce et
d'industrie constituées par dissolution de chambres de commerce et d'industrie
préexistantes à compter du 1er janvier 2003. »
La parole est à M. Gérard Cornu.
M. Gérard Cornu.
Je rappelle, monsieur le président, que M. Pierre André et vous-même êtes
co-signataire de cet amendement.
Mes chers collègues, je vous épargnerai le caractère technique de cet
amendement en vous en résumant la philosophie. Il tend à lever les obstacles
qui empêchent certaines chambres de commerce et d'industrie de fusionner. Vous
savez que certains départements comptent plusieurs chambres de commerce et que
celles-ci ont parfois une réelle volonté de fusion.
Mais l'impôt additionnel à la taxe professionnelle pose un problème financier
et constitue un obstacle important à cette fusion.
L'amendement vise donc à lever cet obstacle en instituant le même mécanisme
que celui qui est appliqué aux communautés d'agglomération ou aux communautés
de communes avec la taxe professionnelle unique, assorti d'un dispositif de
lissage dans le temps de l'IATP.
Nous proposons donc d'adapter aux chambres de commerce et d'industrie le
système en vigueur pour les communautés de communes à TPU.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour défendre l'amendement n° II-45
rectifié et donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° II-33.
M. Renaud Dutreil,
secrétaire d'Etat.
Je partage l'objectif fixé par l'amendement n° II-33.
Je souhaiterais cependant substituer à la rédaction proposée celle qui fait
l'objet de l'amendement n° II-45 rectifié du Gouvernement.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Auguste Cazalet,
rapporteur spécial.
L'amendement n° II-33 a pour objet de faciliter les
regroupements de certaines chambres de commerce et d'industrie.
Les CCI sont en partie financées par l'impôt additionnel à la taxe
professionnelle. Or il existe une forte disparité de pression fiscale entre les
circonscriptions des différentes chambres.
Ainsi, certaines fusions, pourtant opportunes, s'avèrent difficiles à
concrétiser en raison de l'ajustement fiscal immédiat qui en résulterait pour
tous les ressortissants. Ceux dont l'IATP devrait connaître une forte
augmentation peuvent être, pour ce seul motif, hostiles à la fusion.
Le dispositif proposé vise précisément à lisser les ajustements durant un
nombre d'années proportionnel à l'écart entre le taux d'imposition antérieure
et le taux cible résultat de la fusion proposée. Cet amendement semble donc
très opportun et de nature à débloquer un certain nombre de projets de
fusion.
Je demande toutefois le retrait de l'amendement n° II-33 au profit de
l'amendement n° II-45 rectifié du Gouvernement, qui comporte des modifications
de pure forme et auquel je suis favorable.
M. le président.
Monsieur Cornu, l'amendement n° II-33 est-il maintenu ?
M. Gérard Cornu.
Monsieur le président, nous ne pouvons que nous féliciter l'un et l'autre du
caractère pointilleux du Gouvernement et de son souci des termes dans lesquels
sont rédigés ses amendements.
Quand on fait partie d'une majorité, on ne peut pas s'opposer à un amendement
du Gouvernement pour défendre un amendement personnel. Mais je me réjouis que
notre amendement ait incité le Gouvernement à déposer l'amendement n° II-45
rectifié, qui est mieux rédigé.
Je retire l'amendement n° II-33.
M. le président.
L'amendement n° II-33 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° II-45 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances, après l'article 64.
Article 65
M. le président.
« Art. 65. - Au
a
de l'article 1601 du code général des impôts, la
somme : "101 EUR" est remplacée par la somme : "105 EUR". »
- (Adopté.)
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant les petites et moyennes entreprises, le commerce et l'artisanat.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les
reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à
vingt-deux heures.)
M. le président.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté
par l'Assemblée nationale.
COMMERCE EXTÉRIEUR
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le commerce extérieur.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Massion,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, le solde commercial de la France a dégagé un
excédent de 3,3 milliards d'euros en 2001. Sur les neuf premiers mois de
l'année 2002, le solde est encore excédentaire de 8,8 milliards d'euros grâce à
des exportations très dynamiques et à des importations qui, malheureusement, le
sont beaucoup moins compte tenu du niveau assez faible de la croissance
économique dans notre pays.
Je me garderai bien de faire des prévisions sur l'évolution de notre solde en
raison des incertitudes qui pèsent sur la situation internationale et de son
impact sur le prix du pétrole. En revanche, ce que l'on peut dire de manière
certaine, c'est que la France a conservé son rang parmi les principaux pays
exportateurs et que nos entreprises ont bien résisté au ralentissement de la
croissance mondiale.
Le budget du commerce extérieur pour 2003 est particulièrement stable par
rapport aux années précédentes. Il y a à cela plusieurs raisons. D'abord, les
grandes entreprises sont de moins en moins consommatrices de financements
bilatéraux. De nombreuses procédures, gérées par la Compagnie française
d'assurance pour le commerce extérieur, la COFACE, ou par Natexis, ne sont
d'ailleurs pas consommatrices de crédits, car il s'agit de fonds dont la
dotation initiale n'est pas épuisée ou de procédures d'assurance et de garantie
qui dégagent des excédents.
Ensuite, la direction des relations économiques extérieures, la DREE a conclu
un contrat d'objectifs et de moyens avec la direction du budget qui prévoit
l'absorption de la dérive des dépenses des missions économiques en échange
d'une exonération des mesures de régulation budgétaire. Les moyens des services
sont donc d'une grande stabilité.
Enfin, les subventions versées aux organismes de soutien au commerce extérieur
stagnent.
Vous l'aurez compris, monsieur le ministre, chacun peut trouver dans ces
facteurs d'explication des raisons de se féliciter comme de se plaindre.
Je commencerai par l'aspect positif, c'est-à-dire la capacité de la Direction
des relations économiques extérieures à se moderniser et à maîtriser ses
dépenses.
Les contrats d'objectifs et de moyens successifs ont permis de réaliser
d'importantes économies et de stabiliser les dépenses de fonctionnement, tout
en responsabilisant les chefs de mission sur leur gestion. Cette démarche se
poursuit et préfigure désormais la mise en oeuvre des dispositions de la loi
organique relative aux lois de finances : définition d'objectifs et
d'indicateurs, mise en oeuvre progressive d'un suivi analytique des coûts,
développement du contrôle de gestion. La modernisation de la DREE s'est
d'ailleurs vu récompensée, en juillet 2002, par l'obtention de la norme de
qualité ISO 9001 pour l'ensemble des services apportés aux entreprises.
J'en viens aux aspects que je considère moins satisfaisants, qui concernent
le soutien à l'internationalisation des PME, et plus particulièrement les
dotations des établissements publics en charge du commerce extérieur,
principalement le Centre français du commerce extérieur, le CFCE, et
UbiFrance.
Je ne veux pas dresser un tableau trop sombre de l'appui public apporté aux
PME : de nombreuses initiatives ont été engagées à leur attention et la réforme
de l'assurance-prospection mise en oeuvre à la fin de l'exercice 2000 pour la
rendre plus accessible aux PME est une réussite. Il s'agit plutôt de tirer un
signal d'alarme concernant ces deux organismes, qui connaissent tous les deux
une situation budgétaire difficile : pour le CFCE, celle-ci résulte de la
baisse de ses recettes commerciales issues de la vente de produits et de
prestations aux entreprises ; pour UbiFrance, elle est la conséquence de la
suppression du service national.
Ces deux organismes sont confrontés à une gestion très tendue, la baisse de
leurs ressources propres n'étant pas compensée par une croissance de leur
subvention.
Vous avez annoncé très récemment, monsieur le ministre, à la suite d'une
mission d'évaluation, la fusion des deux organismes. Je souhaite que cette
fusion permette aux entreprises d'accéder plus facilement aux différentes
prestations et que les actions de promotion et de soutien au commerce extérieur
soient mieux coordonnées. Un organisme unique présentera l'avantage d'assurer
une plus grande visibilité, tant pour les entreprises qu'à l'égard de
l'étranger.
UbiFrance assure deux missions essentielles pour le développement des
entreprises à l'international : l'organisation de la présence des entreprises
françaises dans les salons professionnels à l'étranger et la gestion des
volontaires internationaux en entreprise.
S'agissant de l'aide à la participation des entreprises aux foires et aux
salons professionnels, les efforts de la France sont largement inférieurs à
ceux des autres pays de l'Union européenne. Les chiffres parlent d'eux-mêmes :
l'Espagne, la Grande-Bretagne et l'Allemagne consacrent aux salons
internationaux entre sept et huit fois plus de subventions publiques que la
France ; la Grande-Bretagne appuie six fois plus de salons que la France ; la
subvention moyenne accordée par opération par l'Espagne, l'Allemagne et
l'Italie est trois fois supérieure à celle de la France ; enfin, le nombre
d'entreprises aidées est trois fois plus important en Grande-Bretagne. De tels
écarts sont difficilement justifiables lorsqu'on connaît l'importance de ces
salons pour une PME qui souhaite se développer à l'international.
S'il n'est pas possible de redéployer des crédits au profit de cette action,
je suggère que nous abandonnions l'organisation des grandes manifestations
françaises à l'étranger, qui sont particulièrement coûteuses et dont l'impact
commercial est faible, pour nous concentrer sur les foires et les salons
professionnels.
S'agissant des volontaires internationaux en entreprise, le dispositif ne
rencontre pas, jusqu'ici, le succès qu'il mérite et je ne puis, monsieur le
ministre, qu'appuyer votre volonté d'élargir le dispositif et de le rendre plus
accessible, notamment aux PME.
Je voudrais, avant de conclure, évoquer quelques pistes de réformes pour
l'avenir, afin de rendre le dispositif de soutien au commerce extérieur plus
proche encore des entreprises.
Les 3 500 conseillers du commerce extérieur de la France sont insuffisamment
utilisés. Ils ne disposent pas des moyens qui leur permettraient de se mettre
pleinement au service de nos entreprises, alors qu'ils peuvent étendre le champ
d'action des missions économiques, en particulier dans les régions éloignées
des capitales, et qu'ils constituent une source précieuse d'informations.
Les régions s'impliquent de plus en plus pour attirer des investissements
étrangers sur leur territoire, mais aussi pour soutenir les entreprises locales
dans leurs démarches de prospection à l'étranger. Dans le cadre de la
décentralisation, il pourrait être envisagé de leur confier la gestion des
aides et la coordination des acteurs locaux, en rattachant les directions
régionales du commerce extérieur aux régions. Dans cette hypothèse il faudrait
bien entendu conserver un lien très fort entre cet échelon régional,
l'administration centrale et les missions économiques à l'étranger, car il
s'agit de rechercher la plus grande efficacité et non de démanteler notre
dispositif. Je note d'ailleurs que l'Agence française pour les investissements
internationaux agit en partenariat avec les régions et cela fonctionne bien.
Les modalités de soutien au commerce extérieur doivent évoluer pour répondre
le plus efficacement possible aux demandes des entreprises, notamment de celles
qui sont les moins bien armées pour se développer à l'international. La
simplicité des procédures est un impératif pour viser la clientèle cible du
dispositif de soutien public au commerce extérieur, c'est-à-dire, pour
l'essentiel, les PME indépendantes.
Monsieur le ministre, vous n'avez pas dénoncé les actions de votre
prédécesseur, et je ne souhaite pas, pour ma part, freiner votre dynamisme et
votre ardeur. En matière de commerce extérieur, la recherche de la performance
est un objectif partagé par tous, et votre projet de budget reflète cette
continuité au service de nos entreprises.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, sur
certaines travées du RDSE et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Bécot,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen des
crédits consacrés au commerce extérieur pour 2003 intervient dans un contexte
ambivalent : d'une part, les échanges ont accusé un recul brutal l'an passé et,
d'autre part, le solde commercial français a renoué avec l'excédent.
La brusque contraction du commerce mondial, revenu à son plus bas niveau
depuis dix ans, tient au ralentissement quasi simultané des trois principales
économies, ainsi qu'à l'éclatement de la bulle des technologies de
l'information. Or c'est aussi au ralentissement de l'activité que nous devons
la bonne nouvelle du retour de notre excédent commercial, qui s'est établi à
3,3 milliards d'euros. En effet, il en est résulté une forte contraction de nos
importations. Nos exportations, elles aussi freinées par le fléchissement de la
demande mondiale, se sont malgré tout maintenues grâce à la bonne compétitivité
de nos produits, notamment automobiles.
Pour autant, l'heure n'est pas au triomphalisme, bien sûr : notre
compétitivité-prix a cessé de s'améliorer en 2001 et les effets de son érosion
se font maintenant sentir, avec un léger retard. Ainsi, depuis la fin 2001, nos
parts de marché en volume se sont nettement réduites. Il est donc impératif de
consolider notre compétitivité hors prix et de déployer à cette fin des efforts
accrus en termes de recherche et de développement.
Cette fragilité de nos performances à l'export nous invite, monsieur le
ministre, à affiner notre stratégie commerciale et à réfléchir à notre
spécialisation sectorielle et géographique. La très grande concentration de
notre avantage technologique sur l'aéronautique et le spatial ne
représente-t-elle pas une fragilité pour notre pays, qui délaisse le numérique
et les biotechnologies ? De même, faut-il se résigner à ce que notre tropisme
européen traditionnel nous ait détourné des pays manifestement les plus
porteurs ?
Cette indispensable réflexion stratégique sur notre politique commerciale doit
aussi être l'occasion de concevoir une politique d'attractivité pour le « site
» France : nous devons avoir pour objectif d'offrir aux investisseurs et aux
talents, nationaux et étrangers, le meilleur rapport entre la qualité des
infrastructures, de la main-d'oeuvre, des services publics, de l'environnement
juridique et le prix fiscal et social.
Si nous voulons que les bonnes décisions de politique commerciale soient
prises à Bruxelles, il nous revient d'entreprendre ce travail d'introspection.
Cela nous permettrait, notamment, de concentrer nos efforts sur quelques points
cruciaux à l'Organisation mondiale du commerce.
Jusqu'à présent, les négociations commerciales multilatérales lancées à Doha
n'ont guère avancé sur le fond, peut-être freinées par l'attitude américaine ;
je pense aux taxes sur l'acier et au
farm bill.
Mais il devient urgent
de bien cibler nos priorités et d'être vigilants, car des échéances importantes
se rapprochent en ce qui concerne trois sujets majeurs de négociation : l'accès
aux médicaments - sujet sur lequel je salue votre implication, monsieur le
ministre -, mais aussi, bientôt, l'agriculture et les services.
Parallèlement à ces batailles à l'extérieur, j'estime indispensable de lutter
à l'intérieur de notre territoire pour soutenir l'internationalisation de nos
entreprises. C'est à ce soutien public que vous entendez consacrer 460,30
millions d'euros en crédits de paiement. La diminution de cette enveloppe de
2,8 % poursuit une tendance décennale. Je sais qu'elle se justifie, notamment
par une meilleure gestion des procédures et par la rationalisation du réseau de
l'expansion économique et des organismes d'appui. Rappelons, à cet égard, le
caractère exemplaire de la gestion budgétaire de la DREE et de sa démarche
qualité couronnée, cet été, par la certification ISO 9001 de son réseau.
Toutefois, permettez-moi, monsieur le ministre, d'attirer votre attention sur
les reports de crédits, qui rendent inutile l'abondement des diverses lignes et
participent à la baisse de votre budget.
Je trouve surprenant que presque tous les mécanismes d'aide ou de soutien aux
exportations dégagent des excédents. Et je ne parle pas seulement de la COFACE,
sur laquelle l'Etat prélève encore 1,8 milliard d'euros en 2002. Je voudrais
aussi comprendre pourquoi les demandes d'aides se raréfient.
En tout cas, ce constat vous autorise, me semble-t-il, à faire preuve d'une
plus grande audace dans le soutien à l'export, afin d'optimiser l'enveloppe
budgétaire et de mieux l'adapter aux besoins des entreprises.
Si 95 % de nos entreprises n'exportent pas, c'est essentiellement en raison du
manque de lisibilité du dispositif public de soutien à l'export. C'est pourquoi
j'estime prioritaire de le rendre plus accessible et plus efficace. L'exemple
des nouvelles « missions économiques », offrant un guichet unique à l'étranger,
doit inspirer notre organisation en France, puisque nos entreprises ne savent
pas où s'adresser : réseau consulaire, organismes de promotion, services
déconcentrés ou décentralisés. Notre dispositif devrait se concentrer sur des «
guichets export », interlocuteurs uniques, près du terrain et visibles, points
d'entrée des demandes des entreprises.
Le projet « service d'information sur les marchés extérieurs » va dans ce
sens, mais c'est surtout le rapprochement opérationnel du CFCE et d'UbiFrance,
que vous avez annoncé, qui permettra d'offrir à nos entreprises un service
intégré d'information et de promotion sur les marchés étrangers. Le rapport que
vous ont remis MM. Lévy et Testu trace, en outre, des pistes précieuses
d'amélioration de ce service. Je sais que cela ne sera pas simple, mais soyez
assuré de mon soutien.
Je voudrais aussi vous encourager à rendre plus lisibles les dispositifs
d'appui financier à l'export, complexes et méconnus. La réforme réussie de
l'assurance-prospection en est un exemple probant.
Enfin, puisque tout projet d'expansion à l'étranger implique à la fois des
moyens financiers et des compétences, je soutiens, monsieur le ministre, votre
projet de promouvoir le départ de jeunes volontaires à l'international.
Pourquoi ne pas proposer à ces jeunes d'assurer, au sein de PME, en France, des
missions liées aux exportations ?
Pour conclure, je tiens à saluer la pertinence des propositions que Mme Clara
Gaymard avance dans le rapport qu'elle vient de nous remettre et qui sont
autant de pistes pour développer nos entreprises à l'international.
Afin de vous exprimer sa confiance, la commission des affaires économiques et
du Plan a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés au commerce
extérieur
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, des
Républicains et Indépendants et du RPR, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la
conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour
cette discussion sont les suivants :
Groupe du rassemblement pour la République, 7 minutes ;
Groupe socialiste, 6 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 5 minutes.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le ministre, analyser l'enveloppe budgétaire de notre commerce
extérieur revient à rendre lisible le projet politique porté par notre pays.
Alors que, depuis le 11 septembre 2001, les relations internationales se
durcissent au rythme toujours angoissant des événements terroristes, de la
volonté hégémonique du gouvernement américain Bush d'embraser une partie du
Moyen-Orient par le déclenchement de la guerre en Irak, plus que jamais la
justice et le droit internationnal doivent être notre principe commun. L'examen
des crédits affectés au commerce extérieur ne peut éluder cette dimension.
Certes, la France ne peut pas tout dans la résolution des problèmes de
pauvreté Nord-Sud. Pourtant, elle doit avoir valeur d'exemple et porter au
niveau de ses échanges commerciaux des principes politiques clairs de paix et
de justice.
L'analyse de la relative modicité des crédits ouverts au titre du projet de
budget du commerce extérieur dans le budget de l'Etat - moins de 245 millions
d'euros, c'est-à-dire moins d'un millième de l'enveloppe globale des crédits
budgétaires - ne présente d'intérêt qu'au travers des dépenses du titre III,
dont l'encours connaît une contraction, qui est motivée pour certains par
l'amélioration de la gestion courante du ministère.
Nous pouvons observer que l'effort global qui est consenti sur le chapitre du
commerce extérieur est plus important. En effet, si l'on ajoute les engagements
figurant dans le cadre du budget des charges communes et du budget des comptes
spéciaux du Trésor, l'on parvient à des montants plus importants : un peu plus
de 460 millions d'euros en crédits de paiement et près de 90 millions d'euros
en autorisations de programme.
Pour autant, le concours de la COFACE au budget général s'avère, dans les
faits, pratiquement aussi important que les crédits ouverts sur le budget du
commerce extérieur.
La véritable question posée par ce budget purement incitatif, qui ne peut
qu'accompagner les grandes tendances marquant nos échanges commerciaux
internationaux, est bel et bien celle de la conjoncture actuelle du commerce
extérieur français : notre pays continue de se classer au troisième rang pour
l'exportation de services et au quatrième rang pour celle des marchandises.
Notre pays ne doit-il pas peser plus franchement sur l'économie mondiale pour
militer pour plus de justice ? Je pense, vous le savez, à l'annulation de la
dette des pays du Sud ou bien encore à l'accès de tous aux médicaments
essentiels pour lutter contre les pandémies, le sida, par exemple.
S'agissant du solde global de ce commerce extérieur, on notera, tout d'abord,
qu'il demeure aujourd'hui assez nettement excédentaire. Cette situation n'est
cependant pas garantie dans un très proche avenir, puisque le ralentissement
des échanges, lié au ralentissement plus général de l'activité économique,
n'est pas sans conséquence sur la situation de notre commerce extérieur.
Poste à poste, on constate, en particulier, une régression de nos échanges
agricoles, et ce alors même que ces échanges demeurent encore assez nettement
excédentaires, pour plus de 7,5 milliards d'euros, essentiellement grâce à
l'industrie agroalimentaire.
Les échanges industriels, pour leur part, ont également souffert d'une
contraction de la demande singulièrement des pays de l'Union européenne et des
Etats-Unis, même si la France conserve un excédent non négligeable de plus de
10 milliards d'euros. Cet excédent efface les conséquences du déficit
énergétique, déficit inévitable compte tenu de la consommation de produits
pétroliers.
Enfin, la balance commerciale sur les services demeure également très
excédentaire et conforte utilement notre solde commercial positif global.
Pour autant, la situation qui dépend étroitement de la demande internationale
en direction de la France, ne doit pas faire oublier deux aspects fondamentaux
: peu d'entreprises participent réellement au processus d'exportation, tandis
que l'essentiel de nos échanges demeure concentré sur les pays de l'Union
européenne et les Etats-Unis.
Cette situation doit motiver des efforts particuliers de progression des flux
commerciaux avec les pays d'Europe centrale et orientale - d'autant plus que
certains sont appelés à faire bientôt partie de l'Union européenne - et avec
les pays en voie de développement qui ont, avec la France, des liens
historiques forts.
Un commerce international équitable qui n'est pas l'instrument de l'hégémonie
d'une seule puissance ; un commerce international fondé sur le respect des
droits fondamentaux de l'homme, telle est notre ambition.
La situation que je viens de décrire pose en fait clairement la question de la
place de la France dans le cadre des relations économiques internationales.
Nous devons concourir à créer les conditions d'un commerce international plus
équilibré, plus respectueux tant des possibilités réelles de développement des
pays associés au sein de l'OMC que de l'environnement, et soucieux de
développement durable.
Nous avons de la valeur ajoutée à faire partager, pour que le commerce
international contribue, à hauteur de ce que bien des peuples attendent de la
France, au développement réel des pays du Sud.
Les missions assignées à la direction des relations économiques extérieures et
le rôle que joue, avec les outils financiers dont elle dispose, la COFACE,
suffisent-ils ?
Apprécié à l'aune de ces différentes ambitions, votre budget, monsieur le
ministre, ne semble pas susceptible d'apporter de perspectives réelles, raison
pour laquelle nous ne voterons pas les crédits du commerce extérieur.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe
socialiste.)
M. le président.
La parole est à M. Jean Bizet.
M. Jean Bizet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que
président du groupe de travail chargé du suivi des négociations commerciales
multilatérales ouvertes à Doha, permettez-moi de saisir l'occasion de l'examen
des crédits destinés au commerce extérieur pour attirer votre attention sur la
place qui revient aux parlements auprès de l'Organisation mondiale du commerce,
l'OMC.
En réponse au « déficit démocratique » de l'organisation, tant dénoncé depuis
la conférence gouvernementale de Seattle, il est évident que doivent être
étudiées les modalités d'une plus grande transparence de l'OMC.
Le choc de Seattle a conduit les citoyens à se tourner vers les organisations
non gouvernementales, les ONG, ou vers les mouvements alternatifs pour faire
entendre leurs voix. On vient encore de le constater récemment à Florence.
La valeur du travail effectué par les ONG, leur efficacité médiatique et le
caractère naturel de leur association à ces questions montrent
a contrario
le relatif effacement des parlements dans ce débat, alors même qu'ils sont
les représentants les plus légitimes de la société civile. Je considère, en
effet, comme une priorité d'associer les parlements aux négociations en cours à
l'OMC.
La formalisation d'une telle présence parlementaire autour de l'OMC m'apparaît
non seulement légitime, mais nécessaire.
Cette association des parlementaires est indispensable, d'autant plus que les
accords de Marrakech, par leur caractère global et général, constituent un
véritable saut qualitatif. Auparavant, les accords commerciaux se négociaient
au coup par coup selon les domaines.Bien au-delà de la simple négociation de
tarifs douaniers, les accords de Marrakech portent sur tous les domaines de la
vie de nos concitoyens, des normes sanitaires, aux questions environnementales
et au droit du travail.
Enfin, avec l'organe de règlement des différends, l'ORD, l'OMC dispose d'un
instrument efficace, mais qui intervient sans aucun contrôle et dont la
jurisprudence peut influer directement sur les choix nationaux dans des
domaines aussi divers que la sécurité alimentaire, l'éducation, la culture ou
la politique des services publics.
Comme on le relève dans un rapport présenté à l'Union interparlementaire : «
Au fur et à mesure que de nouvelles questions relevant de la politique
intérieure entrent dans le champ de compétence de l'OMC, les retombées
constitutionnelles de l'expansion de l'organisation se font sentir et
l'équilibre des pouvoirs prévu par la Constitution évolue au détriment du
législatif. »
De quelle légitimité peut se prévaloir le Parlement pour être associé aux
travaux de l'OMC ? Elle est triple, à mes yeux.
Premièrement, en tant que médiateur, le Parlement intervient pour faire
connaître le point de vue de nos concitoyens. Incarnant la volonté souveraine
du peuple et représentant légitime de la société civile, le Parlement doit
contribuer à l'expression de la volonté populaire, même à l'échelon
international. A l'inverse, il lui revient d'expliquer au peuple la nécessité
de la régulation qu'assure l'OMC.
Deuxièmement, en tant que législateur, il lui appartient d'être associé en
amont au processus de négociation et d'être informé de son évolution, afin de
pouvoir influer sur les directives et les orientations qui vont définir le
droit commercial. La simple ratification des accords internationaux ne peut
plus suffire, à un moment où les accords commerciaux sont au coeur de la
gouvernance mondiale et qu'ils ont indiscutablement empiété sur des
prérogatives revenant traditionnellement aux parlements.
Troisièmement, enfin, notre fonction de contrôle de l'exécutif doit nous
amener à suivre les négociations et à vérifier leur adéquation avec les
orientations définies en amont afin d'en informer nos assemblées.
Ce sont bien évidemment ces trois rôles que nous nous efforçons de remplir à
travers les travaux de notre groupe de travail. Cependant, au-delà de ce
travail national propre à chaque parlement, la question d'une représentation
parlementaire de l'OMC prend aujourd'hui une dimension internationale.
Si l'idée de créer une assemblée parlementaire de l'OMC a été, à juste titre,
abandonnée, de nombreux parlements de par le monde souhaitent être associés aux
travaux de l'organisation par des réunions régulières. Depuis quelques mois, le
dialogue entre les différents parlements s'est intensifié, notamment au
Parlement européen et au sein de l'Union interparlementaire, l'UIP.
Cette dernière avait déjà rassemblé, en juin 2001, soixante-dix parlements
lors d'une réunion intitulée « Pour un système commercial multilatéral libre,
juste et équitable : la dimension parlementaire ». Cette réunion répondait au
souci croissant des parlements nationaux de voir reconnue leur légitimité à
être informés des négociations en cours à l'OMC, voire à contrôler l'exécutif
dans sa mission négociatrice. Ce souci se fonde sur l'aptitude reconnue des
parlements à faire office d'interface entre l'OMC et les opinions publiques,
pour lesquelles vous savez combien la mondialisation est porteuse
d'inquiétudes.
Afin d'aller plus loin, l'UIP prévoit une deuxième réunion interparlementaire
en février prochain, à Genève. Il me paraît tout à fait important que notre
assemblée y participe pleinement ; d'ailleurs, deux sénateurs sont invités à
s'y rendre.
Avant de conclure, je voudrais évoquer le cas américain, car il me paraît
illustratif du mouvement en cours. Si le Congrès a octroyé, cet été, au
président Bush la faculté de négocier directement des accords internationaux,
je relève qu'il a pris soin d'encadrer cette faculté. En effet, à la différence
de l'ancienne procédure
Fast Track, le Trade Promotion Act
, dit TPA,
prévoit certaines mesures restrictives. Les négociateurs américains n'ont ainsi
pas le droit d'affaiblir les lois américaines antidumping, et le président est
tenu de consulter le Congrès six mois avant de signer un accord qui pourrait
les menacer.
S'il s'agit donc d'une reprise en main par le président, le Congrès a refusé
de se dessaisir de toute sa compétence, et ce qui est lu comme un retour de
l'exécutif pourrait bien aussi se lire comme une preuve de la volonté du
Congrès de peser sur ces dossiers.
Le nouvel équilibre entre l'exécutif et le législatif aux Etats-Unis est-il
emblématique d'un mouvement plus large de « parlementarisation » des
négociations commerciales multilatérales ?
Je le souhaite, monsieur le ministre, et je compte sur vous pour créer les
conditions d'une véritable collaboration entre l'exécutif et le législatif
français, pour une mondialisation plus démocratique. Je crois que c'est un
moyen essentiel pour que nos concitoyens n'aient plus le sentiment de subir la
mondialisation et qu'ils se l'approprient afin d'en être tout simplement des
acteurs.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou.
Présentant votre premier budget, et ancien chef d'entreprise, monsieur le
ministre, votre vision du commerce extérieur doit être à l'origine d'une
politique rénovatrice.
Nous sommes dans une configuration constante depuis des dizaines d'années : le
commerce extérieur est réparti dans une proportion de 80 % - 20 % entre les
grandes entreprises et les PME. Ce chiffre nous est propre. Nous avons, en
effet, hérité d'une économie colbertiste, dans laquelle l'usage du protocole
fausse les données.
Nous devons donc impliquer davantage les PME à l'exportation pour équilibrer
les structures de notre commerce extérieur et, plus fondamentalement, nous
interroger sur l'efficacité réelle des missions économiques.
Je suis convaincu qu'il faut repenser totalement l'organisation même de notre
commerce extérieur. Il serait sans doute édifiant de connaître la corrélation
entre les crédits alloués aux missions économiques et nos exportations. Il
faudrait aussi prendre en compte le fait que l'Internet s'est très souvent
substitué aux missions économiques pour la collecte des informations. De plus,
les grandes entreprises disposent fréquemment de leurs propres réseaux à
l'étranger et, de ce fait, sollicitent beaucoup moins les missions
économiques.
La coordination entre le ministère des affaires étrangères et la direction des
affaires économiques extérieures, la DREE, qui est d'ordre stratégique, n'est
pas toujours satisfaisante. Il faut même s'interroger sur ce qui constitue
parfois un double emploi, d'autant plus regretter que les missions économiques
et les ambassades ne soient pas toujours en phase, quand elles ne sont pas en
concurrence, et réagir en conséquence.
L'ambassadeur a des contacts au plus haut niveau politique et, pour les
contrats de grande envergure et donc à caractère national, il négocie avec les
gouvernements étrangers. Il devrait donc avoir également la responsabilité des
relations économiques.
Chaque année, 2 400 PME sont détectées comme ayant la capacité à exporter.
Nous devons les initier aux marchés internationaux et donc mettre en oeuvre une
véritable stratégie d'internationalisation des PME.
La régionalisation constitue une solution. Notons que, dans certains pays, il
n'y a pas de ministère du commerce extérieur. En Allemagne, par exemple, ce
sont les chambres de commerce et d'industrie des
Länder q
ui ont cette
compétence.
Plutôt que de nous appuyer essentiellement sur nos missions économiques, il
nous faut développer et renforcer le niveau régional, qui constitue l'un des
axes majeurs de la politique du Premier ministre. Dans le cadre de la
décentralisation ne serait-il pas judicieux de mettre l'accent sur les
directions régionales du commerce extérieur, les DRCE, pour une approche plus
adaptée et spécifique de l'internationalisation des PME ? Je suis convaincu que
c'est à l'échelle régionale que doit se construire et se concrétiser le
potentiel international des entreprises.
En effet, les PME sont plus à l'aise dans un cadre régional que dans un cadre
national. Elles sont aidées à valoriser leur potentiel à l'international et
dans leurs démarches techniques par les directions régionales du commerce
extérieur, qui sont des interlocuteurs privilégiés. Le montage des dossiers,
l'accompagnement dans la prise de contacts commerciaux à l'étranger, la
détection des potentiels à l'export sont aussi assurés par les chambres
régionales de commerce et d'industrie. Ne faudrait-il pas envisager une fusion
de ces organismes pour une meilleure performance ?
Au sein de l'Union européenne, il existe vingt-quatre missions économiques.
Dans le cadre du marché unique, l'opportunité de leur existence et leur utilité
doivent être posées.
Nous devrions redéployer leurs effectifs dans les directions régionales du
commerce extérieur. Ainsi, est-il nécessaire d'avoir une trentaine de personnes
à la mission économique de Berlin, alors que la DRCE de Midi-Pyrénées en compte
trois fois moins ? Quarante personnes à la mission économique de Londres
sont-elles indispensables, alors que la DRCE Aquitaine n'en compte que sept ?
Ces femmes et ces hommes, qui ont l'expérience de l'étranger et qui connaissent
les démarches à effectuer et ces marchés, seraient beaucoup plus utiles et donc
plus performants pour aider les PME à cibler et à concrétiser leurs
exportations, en étant au plus près d'elles dans les régions.
Par ailleurs, faut-il comptabiliser dans le commerce extérieur nos ventes aux
pays de l'Union ? Il serait plus pertinent de faire une distinction avec les
pays tiers ; cela reflèterait une image plus exacte de notre commerce
extérieur.
Il est aussi essentiel de faire un effort pour les foires et salons
internationaux.
Le rôle primordial de la présence des entreprises dans ces manifestations est
unanimement reconnu. Les mesures nécessaires doivent être décidées pour que les
PME y soient bien représentées ; il faut prévoir des incitations fiscales en ce
sens et accorder les crédits nécessaires à UbiFrance pour organiser ces
manifestations. La représentation de nos entreprises dans les foires et salons
est loin d'être équivalente à celle de nos voisins allemands et italiens, qui
consacrent respectivement huit fois et quatre fois plus de moyens à ce budget.
Mes chiffres diffèrent légèrement de ceux de M. le rapporteur spécial, mais il
n'en reste pas moins que l'écart avec ces pays est considérable et que notre
volonté d'agir est identique.
Au nombre des relais indispensables pour construire notre politique
d'exportation, les étudiants comptent comme un vecteur essentiel, nous devons,
en particulier, développer nos relations avec les pays à fort potentiel
économique. Ainsi, une étroite collaboration entre les ministères chargés
respectivement de l'éducation, des affaires étrangères et du commerce extérieur
doit être mise en place pour faciliter l'accueil d'étudiants de pays
économiquement prometteurs.
Il y a 200 000 étudiants étrangers en Allemagne, 350 000 en Grande-Bretagne,
contre 160 000 seulement en France : il faut absolument définir une véritable
politique de détection de talents. La formation d'étudiants étrangers en France
grâce aux bourses allouées par notre gouvernement est le meilleur moyen de
faire connaître notre technologie, notre savoir-faire, la qualité de nos
produits et notre économie : ces étudiants seront les meilleurs ambassadeurs de
la France dans leurs pays respectifs.
Cette politique est vitale, car la part des exportations sera croissante dans
notre production et dans nos services. C'est à ce niveau que se joue une partie
de l'avenir de nos emplois. Dans le même esprit, le système des volontaires
internationaux en entreprise, désormais ouvert aux jeunes filles, a pris le
relais des coopérants du service national. C'est un outil efficace qui
permettra de former des cadres d'entreprise initiés à l'international.
Monsieur le ministre, la majorité des membres du groupe du Rassemblement
démocratique et social européen soutiendra votre action et votera votre budget,
qui s'inscrit dans la durée.
(Applaudissements sur certaines travées du RDSE
ainsi que sur celles du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et
Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Pierre-Yvon Trémel.
M. Pierre-Yvon Trémel.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rappel de
quelques grandes données suffit pour faire mesurer l'intérêt que nous devrions
porter à tout ce qui concerne notre commerce extérieur.
La France se classe ainsi au troisième rang mondial pour l'exportation de
services, au quatrième rang pour les marchandises, au troisième rang pour le
stock d'investissements directs à l'étranger et au septième rang en ce qui
concerne le stock d'investissements étranger reçus.
Au total, cinq millions d'emplois, soit 22 % de la population active, sont
liés directement ou indirectement à l'exportation. La somme des importations et
des exportations françaises représente plus de 50 % du PIB, et nos ventes à
l'étranger ont plus que doublé depuis quinze ans.
L'ouverture internationale de notre économie est donc aujourd'hui une réalité
incontournable qui nous est bénéfique.
Cette ouverture est tributaire d'un environnement qui s'était dégradé en 2000
et 2001, et qui a connu une reprise modérée en 2002.
La France a plutôt bien résisté à cette dégradation de l'environnement
international, comme le montrent les excédents commerciaux du second semestre
2001 et du premier semestre 2002.
Dans ce contexte, quelle lecture peut-on faire, monsieur le ministre, de votre
projet de budget ?
Le budget du commerce extérieur pour 2003 est en baisse de 3,35 % par rapport
à 2002.
Si l'on prend en considération les crédits inscrits au budget des charges
communes et des comptes spéciaux du Trésor, l'effort financier en faveur du
commerce extérieur s'établit à 460 millions d'euros, contre 473 millions
d'euros en 2002. Dès lors, on peut dire qu'il s'agit d'un budget de
reconduction, voire de transition.
Mais qu'aurait-on souhaité voir derrière les chiffres ?
La politique menée en faveur du commerce extérieur est à la fois source de
satisfactions et d'interrogations, en même temps qu'elle révèle des
insuffisances.
Au titre des satisfactions, je veux citer les progrès remarqués au sein du
réseau d'expansion économique et l'efficacité de certains outils comme
l'assurance-prospection.
Tous les observateurs s'accordent à reconnaître la qualité et l'efficacité de
la démarche menée par la direction des relations économiques extérieures.
Sont remarquées la bonne utilisation du contrat d'objectifs et de moyens, la
capacité d'adaptation de la structure, l'utilisation des technologies de
l'information et de la communication.
Ce travail de qualité du service public de l'exportation vient d'être reconnu
- nous le soulignons tous - par l'attribution du label ISO 9001.
Il faut également saluer la fusion entre les réseaux de la DREE et du Trésor à
l'étranger, la création de la mission PME et du médiateur PME.
Il convient aussi de se féliciter du bilan de l'assurance-prospection,
réformée de manière heureuse en 2001, à la demande de votre prédécesseur,
monsieur le ministre. Les efforts de simplification et de réduction des délais,
qui ont porté leurs fruits, gagneraient à être imités.
Un certain nombre de questions appellent de votre part, monsieur le ministre,
des réactions, des précisions, des orientations.
Comment expliquer les sous-consommations de crédits qui justifient des
reports, au titre V, sur le chapitre 57-90 ?
Comment envisagez-vous de rendre attractif le FASEP-garantie, garantie contre
le risque économique des investissements des PME à l'étranger, considéré comme
intéressant par les entreprises, mais peu sollicité en raison de son coût et de
sa complexité ?
Des critiques sont régulièrement émises sur les pertes d'efficacité qui
seraient dues à la multiplicité des intervenants à l'étranger, entraînant des
difficultés de lisibilité. Des doutes sont aussi émis régulièrement sur
l'engagement de nos services diplomatiques.
Sur ces critiques et sur ces doutes, j'aimerais connaître votre opinion,
monsieur le ministre.
Le rapprochement CFCE-UbiFrance est souvent évoqué, et Marc Massion en a parlé
à l'instant. Où en sommes-nous ?
Le remplacement du dispositif CSNE par celui du volontariat international en
entreprise, le VIE, fait apparaître une vraie question. Comment réduire le
décalage observé entre le nombre de candidatures de jeunes - garçons et filles
désormais, et qui sont plus de 20 000 - et le nombre de postes offerts par les
entreprises ?
Monsieur le ministre, vous avez affirmé votre volonté de relancer le VIE, mais
comment allez-vous opérer cette relance ?
Le rapporteur pour avis, M. Michel Bécot, a fort justement appelé notre
attention sur deux points essentiels : d'une part, la spécialisation de la
France dans des secteurs héritiers de la deuxième révolution industrielle et,
d'autre part, la spécialisation géographique de nos exportations et les
faiblesses de notre position sur des marchés à fort potentiel.
Cette double observation prend encore plus de poids alors que nous sommes
confrontés à une nécessaire adaptation face à un nouvel environnement marqué
par trois facteurs : l'élargissement de l'Union européenne, le rôle de plus en
plus important de l'Organisation mondiale du commerce, enfin la concurrence
croissante rencontrée dans les secteurs où sont nos atouts et nos compétences,
comme en témoigne l'exemple des vins du Nouveau Monde.
Quelle est votre stratégie face à ces éléments ? Quels sont les secteurs
d'excellence ? Quelles doivent être nos priorités géographiques à l'avenir ?
J'ai cité à l'instant l'OMC. Les suites à donner à la conférence de Doha sont,
bien entendu, au coeur de notre réflexion.
Le calendrier et le contenu de la négociation sont désormais bien délimités,
certaines préoccupations, par exemple dans les domaines de l'agriculture et des
services, trouvant une expression renforcée. De quelle manière le Gouvernement
entend-il informer et associer la représentation nationale sur le suivi de la
négociation ?
J'arrive enfin à ce qui relève, à mes yeux, des insuffisances de notre
politique extérieure.
La première de ces insuffisances est dénoncée de manière récurrente par les
parlementaires lors des débats budgétaires : la faible participation des PME au
commerce extérieur. Nous souhaitons, monsieur le ministre, que vous fassiez
évoluer cette situation et nous vous souhaitons une pleine réussite.
L'une des raisons de la présence insuffisante des PME est certainement la
multiplicité des intervenants à l'échelon régional. A quand un guichet export,
interlocuteur unique bien identifié, solution qui mérite toujours intérêt ?
Le soutien public pour la participation des entreprises aux salons
professionnels est beaucoup trop faible. Tous les rapporteurs l'ont rappelé,
chiffres à l'appui.
Enfin, les parlementaires représentant les régions où l'agroalimentaire tient
une forte place ont tout intérêt à ce que la conscience des dangers qui
menacent dangereusement nos performances à l'export dans ce domaine s'élargisse
: pertes de parts de marché pour les vins et spiritueux, persistance du recul
du secteur viande et animaux, chute de nos exportations sucrières, aggravation
de la détérioration des déficits pour les produits de la mer, nette diminution
de nos exportations de blé...
Monsieur le ministre, nous tirons l'alarme : il faut une large mobilisation
pour redresser la tendance.
Au total, les interrogations et les insuffisances l'emportent pour l'heure sur
les sujets de satisfaction. Le groupe socialiste ne peut donc apporter son
soutien à votre projet de budget.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe
CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos,
ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le Président, mesdames,
messieurs les sénateurs, je veux à mon tour présenter les éléments qui
caractérisent ce projet de budget et répondre aux différents orateurs, en les
remerciant d'abord de la qualité et de la précision de leurs interventions.
Quand on parle de commerce extérieur, il faut commencer par noter que, depuis
vingt ans, la production mondiale a été multipliée par dix, mais que, pendant
ce temps, les échanges commerciaux ont, eux, été multipliés par vingt alors que
les flux d'investissements étrangers l'ont été par quatre-vingt-dix.
Nous vivons à l'heure de la mondialisation et le commerce mondial a donc
progressé de manière spectaculaire à un taux de 5,8 % par an, alors que la
croissance française augmentait sur la même période de 2,3 % par an.
Une bonne insertion de nos entreprises dans les pays et les secteurs à
l'origine de flux internationaux à forte croissance est la garantie d'une
France compétitive et créatrice d'emplois.
Je citerai quelques chiffres encore : 28 % de notre richesse annuelle provient
de l'exportation et un Français sur cinq travaille pour alimenter les marchés
étrangers.
En outre, l'univers de nos entreprises et des citoyens s'est élargi.
Aujourd'hui le marché unique compte 375 millions de consommateurs, chiffre qui
passera, avec l'élargissement, à 450 millions en 2004.
Alors que nos grands groupes se sont internationalisés pendant les années
quatre-vingt-dix, nos PME prospectent encore insuffisamment à l'étranger. Grâce
à leur spécialisation et à leur excellence, elles peuvent être à l'origine de
gains de parts de marché et de créations d'emplois.
Plus que des subventions, nos entreprises réclament un cadre de travail
adapté. Le Gouvernement s'y emploie en allégeant les charges et en simplifiant
la réglementation, mais aussi en assurant une information pertinente aux
entreprises qui exportent ; l'Etat, les régions, les organismes consulaires,
les fédérations professionnelles facilitent leur tâche en les alertant et en
les incitant à aller sur les marchés et les secteurs en croissance.
L'Etat a également pour mission de veiller à ce que les règles du jeu soient
équitables et favorisent le développement durable ainsi que le commerce avec
les pays en développement.
Tel est l'enjeu des négociations commerciales multilatérales lancées à Doha,
négociations qui doivent nous permettre de garantir un meilleur accès aux
marchés étrangers à nos entreprises et de miser sur une mondialisation
maîtrisée.
C'est donc tout naturellement que les priorités de mon ministère s'organisent
autour de cinq axes.
Premier de ces axes, il faut faire de la France une force de proposition dans
la négociation du cycle de Doha et dans la perspective de la conférence
ministérielle de l'OMC, qui se tiendra à Cancùn, en septembre 2003.
Vous avez été nombreux à parler de l'importance de l'OMC. Nous nous trouvons
dans un nouveau cycle qui a pour particularité de lier commerce et
développement. Ce cycle est ambitieux, comme le montre le champ des sujets
couverts : développement durable, investissement, concurrence.
Nous devons travailler avec la Commission, car c'est de sa compétence, avec
nos partenaires européens et tout particulièrement avec nos amis allemands pour
proposer, dans les domaines de l'industrie, de l'agriculture et des services,
des objectifs de négociation réalistes protégeant le caractère multifonctionnel
de notre agriculture, tout en l'ouvrant davantage aux produits des pays en
développement, préservant notre diversité culturelle tout en obtenant un
meilleur accès de nos produits aux marchés étrangers.
Nous avons beaucoup à gagner du cycle de Doha en matière d'ouverture des
marchés étrangers pour nos entreprises : nouveaux services, abaissement des
barrières douanières, des « pics » tarifaires industriels notamment, mais aussi
une plus grande transparence et un accès véritable aux marchés publics.
Ces sujets seront à l'ordre du jour de la négociation qui commence. Il faudra
qu'elle se termine sur un « paquet » global et équilibré qui tienne compte de
l'intérêt de nos entreprises, de nos agriculteurs et de nos consommateurs en
même temps que des responsabilités mondiales en matière de gouvernance,
d'environnement, de normes sociales et de développement.
Permettez-moi de rappeler quelques échéances.
En décembre 2002 se déroulera la négociation sur l'accès au médicament et sur
le traitement spécial et différencié en faveur des pays en voie de
développement.
A la fin du mois de mars, nous devons nous mettre d'accord sur les objectifs
de la négociation agricole et, en fait, sur ses modalités.
Faute de parvenir à un accord, nos subventions agricoles pourraient être
remises en cause par l'OMC à compter de 2005.
En mars 2003, l'Union européenne devra également remettre son offre en matière
de services.
En mai 2003, les négociations porteront sur l'accès au marché des produits
industriels et sur l'amélioration du traitement des contentieux au sein de
l'OMC.
Puis, au mois de septembre, la réunion des ministres à Cancùn devrait
permettre d'aboutir sur les thèmes que je viens de mentionner et de lancer la
négociation sur les nouveaux sujets qui intéressent nos entreprises : la
transparence des marchés, l'investissement, la concurrence, la propriété
intellectuelle.
D'ici à la fin de l'année 2004, date prévue pour la fin du cycle, tout devrait
être terminé.
Il était important de rappeler ces différentes étapes du calendrier, qui sont
bien entendu théoriques et qui ne vaudront que si les différentes parties le
veulent bien. Toutefois, une forte attente s'exprime, parmi les pays en voie de
développement, notamment pour que nous accomplissions avec eux la démarche dans
les délais impartis.
Le premier dossier concerne l'accès au médicament. C'est un sujet sur lequel
les négociations vont bon train en ce moment et qui revêt un caractère
d'urgence pour le Président de la République. Il s'agit notamment de faire face
aux problèmes de crise sanitaire auxquels sont confontés les nombreux pays en
développement qui sont victimes d'une pandémie et qui ne possèdent pas
d'industries pharmaceutiques.
Nous recherchons actuellement un accord sur le cadre juridique qui permettra
de fabriquer et de mettre à disposition ces médicaments, non seulement dans le
cadre de l'OMC, mais également en concertation avec les industries
pharmaceutiques, les organisations non gouvernementales et la Commission
européenne, afin de proposer des mesures concrètes et réalistes.
Cette première priorité du ministère du commerce extérieur porte en fait sur
un très large domaine dans lequel la France est une force de proposition
importante, réaliste et pragmatique, en même temps que respectueuse de l'esprit
qui a animé les négociations de Doha.
L'élargissement de l'Union européenne constitue la deuxième priorité.
Il s'agit de faire du marché unique élargi le marché domestique de nos PME.
C'est un enjeu de taille, car, dans moins de deux ans, dix pays auront rejoint
l'Union.
L'expérience de l'élargissement à la Grèce, à l'Espagne et au Portugal montre
que l'enrichissement de ces pays s'est révélé une source de croissance pour nos
entreprises. Ainsi, c'est désormais avec l'Espagne que la France dégage son
premier excédent commercial.
Nous allons donc mobiliser nos entreprises en direction de ces dix pays et
veiller à ce que les nouveaux membres respectent les engagements d'ouverture de
leur marché et l'acquis communautaire. Il est évident que l'on ne peut pas
entreprendre des investissements ou des actions dans ces pays si l'on n'est pas
certain que ces derniers respectent bien leurs engagements sur leur marché.
Nous aurons donc à faire le
monitoring
des engagements pris par ces
pays.
Le troisième objectif est de placer les PME au coeur de notre dispositif
public. Celles-ci réalisent un quart seulement de nos exportations. Or il y a
un vivier d'environ 50 000 entreprises qui pourraient, si elles étaient mieux
informées et davantage encouragées à le faire, devenir des entreprises
exportatrices, notamment sur les marchés européens de proximité.
Nous y parviendrons en relançant le volontariat à l'international,
particulièrement bien adapaté aux PME, en réformant le centre français du
commerce extérieur et UbiFrance, en favorisant la participation des entreprises
aux salons à l'étranger et en nous rapprochant des PME grâce à la
décentralisation.
La décentralisation est la quatrième priorité de mon ministère, en même temps
que du Gouvernement tout entier. Elle permettra de rapprocher le dispositif
public des PME. Ce projet sera mené à bien, dès 2003, par les transferts de
compétences nécessaires en faveur des régions, dont le dispositif - les
chiffres que M. de Montesquiou a rappelés tout à l'heure le démontrent - est
actuellement trop faible.
La cinquième priorité est d'assurer l'attractivité du site « France »,
composante déterminante de la compétitivité de notre économie qui doit être
renforcée pour permettre une meilleure insertion de nos entreprises dans les
échanges mondiaux.
Le marché européen étant maintenant unique, les barrières douanières
s'abaissant, le contrôle des flux de marchandises et de services n'est plus à
l'ordre du jour pour les entreprises et les consommateurs. Encore faut-il
garder en France les outils de production, de recherche et les emplois. Le
Gouvernement est déterminé à alléger les charges et à simplifier notre
réglementation, pour rendre le site « France » plus attractif pour les
investisseurs étrangers.
Le projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter prévoit des moyens
quasiment identiques à ceux de 2002. Il dégage néanmoins des marges de
manoeuvre en raison des gains de productivité que mes services sont en train de
réaliser ou des réserves qui existent sur telle ou telle ligne.
Le budget de fonctionnement de 168 millions d'euros soutient une direction
centrale, la direction des relations économiques extérieures, qui compte 290
personnes, des directions régionales du commerce extérieur de 156 agents et un
réseau de 154 missions économiques composées de 1 923 spécialistes du commerce
extérieur.
La force de ce réseau à l'étranger, qui est commun à l'ensemble du ministère
de l'économie, des finances et de l'industrie depuis cette année, repose sur la
diversité de recrutement et d'origine puisqu'il s'appuie sur un important
recrutement local.
Mon objectif est d'accroître la mobilité en redéployant les moyens vers les
zones prioritaires dont j'ai parlé et en affectant le plus grand nombre
d'agents aux prestations aux entreprises, ce que les gains de productivité
obtenus grâce à la certification ISO 9001 et la fusion des différents services
du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à l'étranger, qui
crée des synergies et des économies et qui permet d'affecter plus de monde aux
services des PME, rendent possibles.
Le deuxième grand poste de ce budget correspond aux subventions de l'Etat aux
organismes de soutien du commerce : le centre français du commerce extérieur,
UbiFrance et l'agence française pour les investissements internationaux. La
dotation pour l'année 2003 est identique à celle de 2002, et atteint 45
millions d'euros au total. Dans ce domaine, les ambitions du Gouvernement sont
à la hauteur de l'enjeu : faire des PME la cible première de ce dispositif. Dès
mon arrivée au ministère, plutôt que de reprendre les projets inachevés de mes
prédécesseurs, j'ai demandé un audit des principaux produits réalisés par ces
organismes. Les rapports, que différents orateurs ont évoqués, m'ont été remis
en octobre dernier. Je les ai étudiés et je poursuis encore mes consultations
avec les fédérations professionnelles et les entreprises, avant d'engager les
concertations nécessaires avec les personnels.
Mon objectif est clair : il s'agit, d'une part, de proposer la réunion du
Centre français du commerce extérieur et d'UbiFrance, pour mieux diffuser
auprès des PME l'information et les prestations produites par ces organismes et
par les missions économiques à l'étranger, et, d'autre part, de redonner une
véritable priorité nationale aux volontaires à l'international. A cet égard,
vous avez été nombreux, mesdames, messieurs les sénateurs, à évoquer le
décalage existant entre les demandes de poste à l'international par les jeunes
et le nombre d'entreprises qui recrutent. Il est nécessaire de mener une grande
campagne de communication et de présentation du dispositif, qui s'est assoupli,
élargi et simplifié, et qui peut donc profiter à un grand nombre de jeunes.
Enfin, il s'agit de favoriser la participation des entreprises françaises aux
salons à l'étranger. Cela passe par une nouvelle organisation du dispositif
public et privé, grâce à la réforme d'UbiFrance, ainsi que par un renforcement
des moyens publics de soutien aux salons, car, nombre d'entre vous l'ont
rappelé, l'effort français dans ce secteur est, comparativement,
insuffisant.
Je souhaite donc redéployer des moyens existants pour accroître les soutiens
publics aux salons qui sont particulièrement adaptés aux attentes des petites
et moyennes entreprises. Mon objectif est que la présence commerciale française
sur les salons devienne comparable à celle de nos voisins allemands ou
italiens.
L'Agence française pour les investissements internationaux bénéficie elle
aussi d'une subvention. A l'heure de la mondialisation et au moment où les
investissements internationaux jouent un rôle croissant dans la réussite
économique des pays, sa mission apparaît indispensable au vu du recul de la
France, en termes d'attractivité, dans les principaux classements
internationaux privés et, surtout, du problème d'image dont nous souffrons.
Plutôt que de créer un réseau coûteux et distinct, l'Agence française pour les
investissements internationaux s'appuie sur le réseau à l'étranger des missions
économiques pour prospecter de nouveaux investissements qui participent à la
modernisation de notre outil de production, à une concurrence saine et à la
création d'emplois sur le territoire national.
Il nous faudra inverser la tendance, en matière de fiscalité et de charges
sociales, pour redonner à notre pays l'attractivité qui doit être la sienne.
Nous devrons le faire savoir sur les grandes places financières internationales
: ce sera bien évidemment l'une de mes principales missions l'année
prochaine.
Enfin, le troisième grand poste du projet de budget du commerce extérieur
concerne les procédures financières de soutien aux entreprises. Ses crédits
s'élèvent à 241 millions d'euros, l'objectif étant de mieux servir les PME.
Je rappelle que la COFACE, groupe privé, gère pour l'Etat un compte
d'assurance-crédit qui dégage un excédent depuis plusieurs années. Aujourd'hui,
l'encours porté par l'Etat est de 70 milliards d'euros, et 6,5 milliards
d'euros de nouveaux engagements ont été pris en 2002, notamment pour aider les
secteurs du transport aérien et du tourisme, qui ont été particulièrement
frappés par la conjoncture internationale après les tragiques attentats du 11
septembre 2001. Les autres procédures, en particulier l'assurance prospection,
tournée vers les PME, ont été assouplies.
Quant au FASEP-étude, qui permet d'aider les entreprises qui le souhaitent à
remettre des offres financées par les organisations internationales, sa
dotation est identique à ce qu'elle était l'année précédente. Je souhaite,
comme je l'ai indiqué, mettre nos procédures au service des PME, qui ne
bénéficient pas assez du dispositif. Je vais donc accroître notre effort pour
les salons à l'étranger,...
M. Marc Massion,
rapporteur spécial,
et M. Michel Bécot,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. François Loos,
ministre délégué.
... en utilisant une partie des moyens d'un fonds de
garantie pour les investissements à l'étranger, le Fonds d'étude et d'aide au
secteur privé, le FASEP-garantie, qui n'a traité que quarante-quatre dossiers
depuis sa création, pour les redéployer sous forme de crédits de soutien aux
PME désireuses de participer aux salons à l'étranger. Cet effort sera soutenu
pendant trois ans : chaque année, 7 millions d'euros viendront s'ajouter aux 4
millions d'euros actuellement alloués.
Ce troisième poste du projet de budget comprend aussi la participation de
l'Etat aux contrats de plan Etat-région dans le domaine du commerce extérieur,
soit 5,6 millions d'euros en crédits de paiement. Ces plans ont permis, en
étroite liaison avec les régions, de développer des politiques sectorielles
adaptées à chaque région et ciblées sur certains pays.
Vous connaissez les ambitions du Gouvernement en matière de décentralisation.
Nous souhaitons donner de véritables compétences aux régions s'agissant de
commerce extérieur : leur proximité, leur connaissance du tissu économique
local font des collectivités régionales un interlocuteur naturel des
entreprises désireuses de s'internationaliser.
M. Aymeri de Montesquiou.
Très bien !
M. François Loos,
ministre délégué.
Cette décentralisation pourra être menée à bien dès
2003, en concertation avec les élus et les personnels concernés.
Une mondialisation maîtrisée ouvrant de nouveaux marchés à nos entreprises,
des responsabilités assumées à l'égard des pays du Sud, une priorité donnée à
nos jeunes et à nos PME, véritables viviers d'exportations nouvelles, une
ambition sur les marchés de proximité et en forte croissance, une organisation
décentralisée plus proche du terrain : tous ces axes contribueront à donner
confiance aux Français, qui sauront, j'en suis sûr, tirer le meilleur parti de
cette ouverture sur le monde.
Je voudrais maintenant répondre à quelques questions que je n'ai pas évoquées
dans mon propos liminaire.
M. Massion m'a interrogé sur les procédures gérées par la COFACE, qui
n'utiliserait pas la totalité des crédits disponibles, et a notamment fait
allusion au FASEP-garantie. Plutôt que d'essayer de rendre le FASEP-garantie
plus efficace, j'ai surtout cherché à récupérer l'argent inutilisé qui servait
de garantie à ce dernier, afin de financer la participation française à
davantage de salons à l'étranger. Nous sommes alors certains de l'efficacité de
l'argent utilisé, tandis que la valorisation de ce fonds, en termes de prêts,
n'était pas aussi importante.
Vous avez en outre souligné, monsieur Massion, que les conseillers du commerce
extérieur étaient des acteurs importants et qu'il fallait les inciter à aider
et à sensibiliser davantage notre jeunesse. A cet égard, je souhaite qu'ils
prospectent plus systématiquement les entreprises susceptibles de recruter des
VIE à l'étranger. J'ai commencé, lors de tournées régionales, à leur demander
de mener cette action, mais j'aimerais que, à l'occasion de la réforme du
décret les concernant, nous prévoyions de leur confier systématiquement un
certain nombre de missions.
Enfin, vous avez évoqué, monsieur Massion, la nécessaire décentralisation.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, je souhaite que cette décentralisation puisse
s'opérer, mais sous certaines conditions. Un transfert de compétences ou une
action conjointe avec les régions sont de bonnes formules, encore faut-il que
l'action menée par les régions offre toutes les garanties de durée dans le
temps qui siéent à une bonne politique en matière de commerce extérieur : il ne
s'agit pas de réaliser des opérations au coup par coup ; la durée, la
compétence sont nécessaires. Sous ces réserves, la décentralisation sera
évidemment bénéfique à tous.
M. Michel Bécot m'a interrogé à propos de l'OMC, en rappelant que l'accès aux
médicaments et les négociations sur l'agriculture et sur les services devaient
être des priorités pour notre pays.
Il est évident que, dans les négociations internationales, nous apparaissons
aujourd'hui comme le porte-drapeau d'une certaine politique agricole. On nous
reproche souvent de recourir aux subventions et aux tarifs douaniers, et l'on
prétend parfois, parallèlement, que les pays en voie de développement
tireraient automatiquement bénéfice d'une réduction de ces derniers.
La réalité est différente.
Tout d'abord, les Européens sont les premiers acheteurs de produits agricoles
en provenance des pays en voie de développement. Nous leur en achetons pour 28
milliards d'euros par an, alors que les Etats-Unis ne leur en achètent que 8
milliards d'euros. Contrairement aux apparences et aux informations qui
circulent quelquefois, nous sommes donc très ouverts.
D'ailleurs, nous avons complètement ouvert nos marchés à quarante-neuf des
pays les plus pauvres, et nous serions en droit d'attendre des autres pays
développés qu'ils adoptent la même attitude. En outre, les parts de marché que
nous avons perdues dans le secteur agricole ces vingt dernières années,
notamment dans le domaine de la viticulture, ont été récupérées non par des
pays en voie de développement, mais par les pays du Nouveau Monde. Ce qui vaut
pour le vin vaut pour tous les autres produits agricoles : en fait, c'est le
groupe de Cairns qui a bénéficié des pertes de capacités que nous avons
acceptées par le passé.
J'indiquerai à Mme Terrade que la France mène une politique très active en
matière d'annulation de la dette et de conversion en investissements.
M. Bizet a parlé de l'OMC et de l'importance du rôle des parlements. Je pense
que les Etats-Unis jouent parfaitement sur ce registre, en donnant quelquefois
au Congrès la capacité de s'opposer à une décision de l'administration. Telle
n'est sans doute pas votre conception de la participation du Parlement français
aux négociations au sein de l'OMC, monsieur le sénateur, mais je suis à votre
entière disposition pour échanger sur ce sujet.
M. Aymeri de Montesquiou, quant à lui, a évoqué un certain nombre de sujets.
Je reviendrai sur le thème de la coordination entre les services du ministère
des affaires étrangères et ceux du ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie à l'étranger. Je souhaite lui dire que cette coordination est
inscrite dans un décret de 1979, qui donne à l'ambassadeur autorité sur
l'ensemble des services à l'étranger, et que, depuis 1995, il existe un comité
interministériel des moyens de l'Etat à l'étranger, qui assure la cohérence de
l'utilisation desdits moyens. Telle est la démarche actuelle en matière de
coopération, mais il est possible d'aller plus loin en cas de nécessité.
Enfin, j'ai déjà répondu, monsieur Trémel, à propos du FASEP-garantie et des
effectifs des VIE. Quant au chapitre 57-90 concernant l'immobilier, il comporte
des crédits en report, ce qui nous permet d'annuler une ligne budgétaire cette
année. Cela ne signifie pas que les moyens sont inexistants ; nous disposons
des réserves de l'année dernière, qui n'ont pas été consommées et nous semblent
suffisantes pour couvrir les besoins.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'économie, les finances et l'industrie.
Je rappelle au Sénat que les autres crédits concernant l'économie, les
finances et l'industrie ont été examinés aujourd'hui même.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 23 186 385 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III, modifiés par les
amendements n°s II-38 et II-39 précédemment adoptés par le Sénat.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 315 347 872 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV, modifiés par les
amendements n°s II-40 et II-41 précédemment adoptés par le Sénat.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 410 384 000 euros ;
« Crédits de paiement : 175 967 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V, modifiés par l'amendement n°
II-37 précédemment adopté par le Sénat.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 1 730 741 000 euros ;
« Crédits de paiement : 537 978 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
Services du Premier ministre
I. - SERVICES GÉNÉRAUX
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : I. - Services généraux (à l'exclusion des
crédits relatifs à la fonction publique, à la presse, à l'audiovisuel et au
Conseil supérieur de l'audiovisuel).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. François Marc,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, je vous présenterai, au fil de cette brève
intervention, les principales observations qui m'ont été inspirées par le
projet de budget des services généraux du Premier ministre pour l'année 2003.
Pour une présentation exhaustive de ces crédits, je vous invite à vous reporter
à mon rapport écrit.
Je rappellerai succinctement que le budget des services généraux du Premier
ministre regroupe des crédits aussi importants que ceux du Premier ministre, du
secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, du ministre de la fonction
publique, de la réforme de l'Etat et de l'aménagement du territoire, du
secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat, de huit autorités administratives
indépendantes, d'une vingtaine d'organismes rattachés au Premier ministre,
parmi lesquels on peut citer, notamment, le conseil d'analyse économique, la
commission nationale consultative des droits de l'homme ou la CADA, la
commission d'accès aux documents administratifs, ainsi que les fameux « fonds
secrets ».
S'agissant de la présentation des grandes masses de ce projet de budget, je
vous renvoie aux premières pages de mon rapport. Les crédits sont en légère
diminution, à hauteur de 1,8 %, mais leur montant dépasse néamoins le milliard
d'euros.
Ma première observation, à la suite de l'examen de ce projet de budget,
concerne la nature des crédits inscrits.
En effet, il s'agit pour moitié de crédits dits « d'assistance et de
solidarité ». Ces crédits existent depuis longtemps, mais leur montant est
demeuré modeste jusqu'à la loi de finances de 2001. En 2001 s'est opérée une
forte augmentation de la contribution de l'Etat au financement des exonérations
de taxe audiovisuelle pour des motifs sociaux, laquelle s'élève aujourd'hui à
près d'un demi-milliards d'euros.
Je ne porte pas de jugement sur la pertinence de cette augmentation, la
contribution en question relevant d'ailleurs de la compétence de notre collègue
Claude Belot. Je me demande cependant si ces crédits ne devraient pas être
inscrits à un autre budget, par exemple celui de la solidarité. Leur
rattachement actuel présente en effet l'inconvénient de fausser la perception
de l'évolution des crédits concernant réellement les services généraux du
Premier ministre, c'est-à-dire essentiellement les crédits du titre III. Par
exemple, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit une augmentation des
crédits des services généraux du Premier ministre, crédits d'assistance et de
solidarité exceptés, de 1,3 %. En revanche, ce budget diminue globalement, je
le rappelle, de 1,8 %, en raison de la baisse de la contribution de l'Etat au
financement des exonérations de taxe audiovisuelle.
Sur ce point, monsieur le ministre, ne pensez-vous pas que, dans un souci de
lisibilité, il serait opportun de rattacher les crédits d'assistance et de
solidarité à un autre budget ?
J'en viens maintenant à une remarque récurrente de ma part, que formulait
aussi mon prédécesseur, M. Roland du Luart, à propos de l'insuffisance des
informations transmises au Parlement au sujet des nombreux organismes placés
auprès du Premier ministre.
Je dois tout d'abord souligner l'amélioration récente de la qualité des
informations contenues dans le « jaune ». En effet, alors que, jusqu'à
récemment, il n'était, de fait, pas possible de connaître, même grossièrement,
le nombre d'organismes placés auprès du Premier ministre, un « toilettage » a
été effectué en 2001. Ainsi, alors que le « jaune » pour l'année 2001 énumérait
plus de soixante organismes rattachés au Premier ministre, la liste figurant
dans ceux des années 2002 et 2003 n'en comprend que quarante, ce qui est
certainement plus proche de la réalité.
Cette information devrait être encore améliorée à partir de l'année prochaine.
En effet, la loi de finances rectificative de 2002 a modifié le contenu des
informations devant figurer dans le « jaune » : celui-ci doit désormais évaluer
le coût de fonctionnement et indiquer le nombre de leurs membres comme le
nombre de réunions tenues lors des trois années précédentes. Afin de donner aux
services concernés le temps de réunir les informations nécessaires, la loi
précise que ces dispositions entrent vigueur le 1er janvier 2003. Bien entendu,
je me réjouis de cette mesure, qui améliorera la transparence de la nébuleuse
des organismes rattachés au Premier ministre.
J'en viens, monsieur le ministre, à ma deuxième question : est-il prévu de
réaliser un audit des organismes placés auprès du Premier ministre et, le cas
échéant, de réduire, ou éventuellement d'accroître, le nombre d'organismes
rattachés ? Je rappelle que leur nombre est passé de soixante à quarante en un
an, sans que l'on sache très bien dans quelles conditions cette évolution
peut-être réellement perçue, analysée et comprise.
Je voudrais, en dernier lieu, faire brièvement le point sur la réforme des
fonds spéciaux intervenue l'année dernière.
Jusqu'à cette réforme, le régime des fonds spéciaux différait du régime actuel
sur deux points essentiels. Tout d'abord, les fonds spéciaux concernaient en
partie des dépenses non liées à la sécurité, puisque seulement 60 % étaient
destinés à la direction générale de la sécurité extérieure, la DGSE. Ensuite,
les fonds spéciaux relatifs à la sécurité étaient les seuls à faire l'objet
d'une procédure de vérification, par une commission spéciale présidée par un
président de chambre à la Cour des comptes et ne comprenant, bien entendu,
aucun membre du Parlement.
La loi de finances initiale pour 2002 a réformé, comme chacun sait, le
dispositif antérieur sur ces deux points essentiels. Tout d'abord, les fonds
spéciaux concernent désormais les seules actions liées à la sécurité, et sont
donc passés de 60 millions d'euros à 40 millions d'euros environ. Ensuite, a
été instituée une « commission de vérification », chargée de vérifier chaque
année que les crédits sont utilisés conformément à leur destination.
La commission de vérification est, je le rappelle, composée de six membres,
dont quatre parlementaires - deux députés et deux sénateurs -, son président
étant obligatoirement l'un des deux députés. A ce sujet, j'ai l'honneur de vous
informer que M. le président du Sénat a désigné, le 16 septembre 2002, M. Serge
Vinçon ainsi que votre rapporteur spécial en qualité de membres de cette
commission.
En ce qui concerne la dotation demandée pour 2003 - 37 millions d'euros, ce
qui est identique au montant inscrit en loi de finances pour 2002 - il faut
rappeler que les crédits demandés au titre des fonds spéciaux sont en général
fortement sous-évalués, la DGSE bénéficiant traditionnellement d'abondements en
cours d'année. Une évaluation plus réaliste des besoins serait sans doute
préférable, même si le respect du secret des opérations concernées n'est
peut-être pas compatible avec une estimation précise à l'occasion de chaque loi
de finances.
D'où, monsieur le ministre, ma dernière question : serait-il, selon vous,
opportun de revaloriser, dans les prochaines lois de finances, le chapitre
37-91 pour permettre au Parlement une meilleur lisibilité budgétaire lors du
vote de ces crédits.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
les quelques observations que m'a inspirées ce budget.
Je rappelle que, compte tenu, notamment, de l'amélioration en cours de la
transparence des informations relatives aux organismes financés par ce budget,
la commission des finances vous propose d'adopter, mes chers collègues, le
budget des services généraux du Premier ministre.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du RPR, des
Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos,
ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, nous examinons ce soir les budgets des services
généraux du Premier ministre pour ce qui concerne les agrégats « administration
générale » et « autorités administratives indépendantes », du Commissariat
général au Plan, des Journaux officiels, du Conseil économique et social et du
SGDN, le secrétariat général de la défense nationale. En l'occurrence, il
s'agit des services généraux du Premier ministre.
Le projet de budget des services généraux du Premier ministre pour 2003
s'établit à quelque 1 143 millions d'euros, en diminution de 1,9 % par rapport
à l'année dernière.
Je ne présenterai que les crédits des deux derniers agrégats susmentionnés.
L'agrégat « administration générale » recouvre des actions et activités très
diverses. Tout d'abord, il comprend les crédits nécessaires au fonctionnement,
aux rémunérations et aux moyens matériels des cabinets ministériels et des
services. Il comprend également des crédits d'actions et d'investissement.
S'agissant de cet agrégat, les crédits passent de 292,26 millions d'euros à
301,39 millions d'euros.
L'augmentation modérée des crédits du titre III, 2 % en valeur absolue et 1,86
% à structure constante, s'explique, en particulier, par un ajustement des
moyens de fonctionnement, notamment en raison du développement de
l'administration électronique, ainsi que par la mise en place des moyens
nécessaires au fonctionnement de l'Observatoire national sur les effets du
réchauffement climatique en France métropolitaine et dans les départements et
territoires d'outre-mer.
Pour le titre IV, les moyens publics alloués à l'IFRI sont renforcés de 7,5 %
et ceux qui sont consacrés à l'IRIS sont consolidés.
Un effort très notable est fait en faveur des crédits d'investissement, qui
progressent de 44,7 %. L'effort d'investissement de l'Etat reprend de façon
significative en faveur des cités administratives, avec une hausse de 64 %,
après un relâchement de l'effort consenti dans ce domaine en 2002.
Les crédits de l'agrégat « autorités administratives indépendantes »
augmentent de 7,75 %.
La croissance la plus significative concerne le budget du Médiateur, avec
20,56 %. Ces moyens nouveaux permettront de financer, en particulier, les
dépenses liées au développement des délégués de proximité présents dans les
départements et les dépenses liées à la croissance de l'activité de la
médiature.
Les crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel augmentent, pour leur part,
de 4,28 %, notamment pour financer les travaux de planification nécessaires à
la mise en place de la télévision numérique terrestre et certaines dépenses de
rémunération.
Enfin, des moyens sont inscrits pour la mise en place d'une nouvelle autorité
administrative indépendante : la Commission nationale du débat public. Le
budget de cette institution nouvelle est fixé à 0,6 million d'euros, la moitié
de cette somme étant financée par transfert du budget du ministère de
l'écologie et du développement durable.
Après cette présentation générale du budget des services généraux du Premier
ministre, je voudrais répondre aux observations et aux questions de M. le
rapporteur spécial.
Tout d'abord, vous nous interrogez sur la pertinence du rattachement des
crédits de remboursement d'exonération de redevance au budget des services
généraux du Premier ministre, ces crédits, eu égard à leur objet, pouvant
relever du budget de la solidarité.
Les remboursements d'exonération de redevance, qui, certes, ne sont pas
étrangers à une logique d'aide à caractère social, représentent effectivement
une part relative très importante du budget des services généraux du Premier
ministre, à savoir 39,2 %.
Néanmoins, les crédits de remboursements d'exonération de redevance ainsi que
ceux qui sont relatifs à la presse écrite participent surtout de la politique
de la communication, qui relève de la compétence de la direction du
développement des médias, direction des services généraux du Premier ministre
mise à disposition du ministre de la culture et de la communication.
Votre deuxième question portait sur l'amélioration de l'information du
Parlement en ce qui concerne les commissions et instances placées auprès du
Premier ministre ou des ministres.
Les dispositions nouvelles de l'article 112 de la loi de finances pour 1996
introduites par la dernière loi de finances rectificative prévoient que devront
figurer dans cette annexe en particulier des informations sur le coût de ces
entités et sur leur fonctionnement.
Au-delà de la nécessaire amélioration de l'information communiquée à la
représentation nationale sur les entités administratives existantes qui peuvent
donner une impression de complexité et de manque de transparence, il convient
de souligner que le Premier ministre vient de demander, voilà quelques
semaines, au secrétaire général du Gouvernement de procéder à un réexamen
approfondi des missions des instances, quelle que soit leur appellation -
mission, commission, comité -, qui lui sont rattachées. Le Premier ministre a
d'ailleurs précisé dans la lettre de mission que le rattachement au Premier
ministre doit présenter un caractère exceptionnel.
La prochaine annexe jaune devrait donc non seulement comporter les
informations nouvelles prescrites par la dernière loi de finances
rectificative, mais également traduire les résultats de ce réexamen approfondi
actuellement mené.
Enfin, monsieur le rapporteur, vous nous interrogez sur le niveau de
suffisance des crédits inscrits sur le chapitre 37-91, relatifs aux fonds
compte tenu des consommations.
Les crédits inscrits sur ce chapitre correspondent à un niveau d'activité
normale des services concernés. Le Gouvernement estime indispensable, dans le
cadre d'une gestion étroite de ces fonds, d'effectuer des abondements
spécifiques en gestion dès lors qu'une opération spéciale doit être financée.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Je vous rappelle que les crédits inscrits à la ligne « Services généraux du
Premier ministre » seront mis aux voix le jeudi 5 décembre, à la suite des
crédits relatifs à la fonction publique.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 24 151 649 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre III est réservé.
« Titre IV :
moins
32 104 685 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre IV est réservé.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 31 792 000 euros ;
« Crédits de paiement : 6 901 000 euros. »
Le vote sur les crédits figurant au titre V est réservé.
II. - SECRÉTARIAT GÉNÉRAL DE LA DÉFENSE NATIONALE
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : II. - Secrétariat général de la défense
nationale.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Michel Moreigne,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, les crédits du secrétariat général de la défense
nationale, le SGDN, pour 2003, avec 48,23 millions d'euros, progressent de 22,5
%. Cette forte hausse résulte, pour près de la moitié, de l'augmentation des
dotations en capital destinées aux capacités techniques interministérielles
pour la sécurité des services de l'Etat en matière de systèmes d'information.
Par ailleurs, le réseau de transmission Rimbaud bénéficiera de 2,1 millions
d'euros de nouveaux crédits au titre du fonctionnement. Cette dotation explique
les 14 % d'augmentation des dépenses ordinaires, portées à 28 millions d'euros.
Quant aux dépenses en capital, elles continuent à progresser en 2003, de près
de 7 %, pour s'établir à plus de 20 millions d'euros.
Les services du SGDN paraissent disposer désormais des personnels nécessaires
à l'accomplissement de leurs missions. L'effectif budgétaire pour 2003 restera
stable avec deux cent soixante-dix-huit emplois.
L'Institut des hautes études de défense nationale, sous tutelle du SGDN, est
engagé dans un effort d'adaptation et d'ouverture pour remplir l'objectif
d'être un élément essentiel à la culture et à l'esprit de défense. Sa dotation
propre, même si elle est portée à 1,8 million d'euros pour 2003 en raison d'un
premier transfert d'emplois, ne lui assurera pas encore l'autonomie financière.
En effet, le coût réel de l'Institut ressortira à 8,5 millions d'euros en
2003.
Enfin, je rappelle que l'effort destiné à la défense civile de la nation
comprend aussi les crédits que les ministères civils lui consacrent et qui sont
présentés dans un « jaune » budgétaire. Leur montant, qui augmentera de près de
4 %, s'établira, pour 2003, à 1,4 milliard d'euros. Ce jaune est toutefois
menacé par un amendement de suppression adopté par l'Assemblée nationale.
Monsieur le ministre, vous nous ferez sans doute part de votre position sur ce
point.
Le SGDN, instrument privilégié du Premier ministre en matière de direction
générale de la défense mais travaillant également en liaison étroite et
permanente avec la présidence de la République, est maintenant relancé. Son
rôle est conforté, tant par les nouveaux moyens qui sont mis à sa disposition
que par les appels renouvelés à sa compétence.
Son secrétaire général, M. Jean-Claude Mallet, s'attache à centrer l'activité
prioritaire du SGDN sur des tâches de conception et d'impulsion. Il a su
dynamiser l'intervention du secrétariat dans les domaines où la coordination
interministérielle, lorsqu'elle relevait de ses missions, était nécessaire. Ses
services sont souvent sollicités, parfois très intensément, comme cela a été le
cas à la suite des attentats du 11 septembre.
En un temps où elle revêt tant d'importance, je milite pour une meilleure
coordination du renseignement. Cette responsabilité pourrait sans doute
utilement être confiée au SGDN.
J'espère également que les questions relatives à la sécurité européenne et à
l'Europe de la défense continueront à faire l'objet d'avancées. L'actuelle
insécurité internationale nous l'impose.
Enfin, j'apprécie que la mission de contrôle des matériels de guerre, assurée
par la CIEEMG, la commission interministérielle pour l'étude des exportations
de matériels de guerre, dispose désormais de moyens renforcés.
Les fonctions du SGDN recouvrent également la coordination de la protection
des populations. Dans un environnement international incertain, allant des
catastrophes naturelles aux nouvelles menaces, accidentelles ou terroristes,
comme aux Etats-Unis et, tout récemment, à Moscou, la liste des événements
démontrant la nécessité de cette mission est longue. M'inquiétant des risques
radiologiques, nucléaires, biologiques et chimiques, je constate leur réelle
prise en compte.
Mais il convenait de s'interroger, à la lumière de ces sinistres événements,
sur nos procédures d'urgence dans le cas de catastrophes étendues à une grande
partie du territoire. Le SGDN s'est efforcé d'améliorer non seulement
l'efficacité du renseignement, de la surveillance et de la détection en la
matière, mais aussi les moyens d'alerte, d'évacuation, de protection et de
décontamination des populations.
Ainsi, les capacités de gestion de crise, au plus haut niveau de l'Etat, ont
été développées pour maintenir opérationnels des équipements qui avaient subi,
jusqu'en 1999, une réduction des dépenses en capital. Les pouvoirs publics ont
également pris en charge les menaces liées aux nouvelles technologies de
l'information avec d'importants crédits pour des capacités interministérielles
coordonnées. Ils devraient d'ailleurs être complétés par une dotation nouvelle
dans la prochaine loi de finances rectificative.
J'apprécie que les responsabilités de chacun aient été redéfinies, notamment
dans le cadre des zones de défense. Je souhaite que la mise en place de la
politique civile de défense, garantissant une protection efficace de la
population française, soit poursuivie, en impliquant davantage encore les
citoyens.
C'est dans cette perspective que s'inscrit le rôle confié au SGDN au sein du
nouveau conseil de sécurité intérieure, créé par le décret du 15 mai 2002.
Enfin, je formule le souhait que le SGDN, qui est à la disposition des plus
hautes autorités politiques de notre pays et qui a été repositionné comme lieu
de convergence de la sécurité intérieure et extérieure, continue à s'affirmer
également comme étant un instrument majeur de la refondation de notre défense
non militaire.
Compte tenu de l'effort consenti en faveur des missions du SGDN, tant
traditionnelles que nouvelles, qui ressort nettement de ce budget, la
commission des finances, suivant la proposition de son rapporteur spécial, vous
propose, mes chers collègues, d'adopter les crédits du secrétariat général de
la défense nationale.
(Applaudissements sur les travées du groupe
socialiste, de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod.
Monsieur le ministre, je centrerai mon intervention sur le mot « défense »,
concept sur lequel je m'interroge depuis que, voilà quelques années, j'ai eu
l'honneur de succéder à Maurice Schumann à la tête du Haut Comité français pour
la défense civile.
Je me réjouis, bien entendu, de voir évoluer les crédits du secrétariat
général de la défense nationale. Je me réjouis également de constater qu'un
certain nombre d'aspects relatifs à la protection des populations sont de plus
en plus pris en compte au sein de ce budget, après une chute dramatique des
crédits du programme civil de défense, que notre excellent rapporteur avait
déjà soulignée il y a quelques années. Le redressement est spectaculaire.
D'ailleurs, il ne date pas de cette année. En effet, il avait commencé avant le
changement de gouvernement, en particulier à la suite des événements de 2001,
et un frémissement important était même intervenu auparavant.
Le mot « défense » pose problème. Notre organisation nationale comprend un
ministère de la défense, un secrétariat général de la défense nationale et une
notion globale de sécurité civile qui, dans l'esprit de nos concitoyens, se
mêle aux deux premiers.
Je suis de ceux qui regrettent que la mission régalienne et citoyenne, les
deux s'entremêlant, de la défense soit, aux yeux de nos compatriotes, attachée
au ministère des forces armées. Cela a été vrai pendant toute la guerre froide.
C'est de moins en moins le cas au fur et à mesure que les menaces étatiques
extérieures diminuent et que les menaces de déstabilisation intérieures ou les
menaces informelles provenant de l'extérieur augmentent.
Il y a, me semble-t-il, une difficulté réelle de répartition entre le rôle du
secrétariat général de la défense nationale, à qui je rends encore une fois
hommage pour son travail tout à fait remarquable, le rôle que l'ordonnance de
1959, en son article 17 sur la défense nationale, confie au ministre de
l'intérieur ès-qualités en matière de défense civile et la réalité de l'action
interministérielle.
Aussi, au-delà des crédits alloués au secrétariat général de la défense
nationale, que j'approuve, et dont M. le rapporteur spécial vient de
recommander l'adoption, s'étend un domaine de réflexion à explorer autour de la
constatation suivante : nos concitoyens ne sont pas suffisamment
responsabilisés en matière de défense civile.
Je n'en prendrai pour preuve qu'un exemple dramatique.
Les Américains ont évacué, on oublie de le dire, 35 000 personnes du World
Trade Center, dont 25 000 situées dans les tours, en une heure et quart, et ce
sans panique ni affolement. Certes, personne n'imaginait que les tours allaient
s'écrouler. Mais les Américains avaient l'habitude de se prêter à de tels
exercices. Depuis les attentats de 1993, les tours avaient été évacuées
systématiquement deux fois par an, de manière aléatoire. Tout le monde a
respecté scrupuleusement cet entraînement.
Or, à ma connaissance, jusqu'à présent aucun exercice d'évacuation impromptu
n'a eu lieu dans nos tours parisiennes. Je crois même savoir qu'un exercice
programmé en novembre dernier à la tour de la Défense a été annulé pour ne pas
affoler la population.
Aussi, monsieur le ministre, je vous prie d'être notre interprète auprès de M.
le Premier ministre - je présenterai demain exactement les mêmes observations à
M. le ministre de l'intérieur lors de l'examen des crédits du budget de la
sécurité - pour lui demander de « muscler » l'autorité en matière d'action
interministérielle. Je connais trop, d'expérience, la liberté d'action
restreinte des hauts fonctionnaires de la défense pour ne pas vous demander
d'agir !
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste, du
RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos,
ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, le projet de budget du secrétariat général de la
défense nationale pour 2003 s'élève, en crédits de paiement, à 48,23 millions
d'euros contre 39,36 millions d'euros en lois de finances initiale pour
2002.
Cette hausse des moyens s'inscrit pleinement dans la logique de la priorité
nationale accordée par le Gouvernement aux questions de sécurité et de
défense.
Comme l'a souligné M. le rapporteur, le SGDN y joue en effet un rôle-clé. Dans
l'adaptation de notre défense et de notre sécurité aux menaces
nouvelles-terrorisme, prolifération d'armes, agressions informatiques, menaces
mobiles s'adaptant en permanence au terrain - le SGDN assure une triple
fonction d'animation, d'impulsion et de coordination des actions et des
réflexions des différents départements ministériels concernés.
Répondant préalablement aux voeux de M. Paul Girod, le Président de la
République a, vous le savez, marqué fortement sa volonté d'accroître
l'efficacité et la cohésion de l'action de l'ensemble des acteurs publics
engagés dans ce secteur. Le secrétariat général de la défense nationale est
ainsi membre de droit du conseil de sécurité intérieure, instauré le 15 mai
dernier. Il y exerce ses compétences, en particulier dans le domaine des
instructions interministérielles concernant la défense, le renseignement et la
planification de sécurité.
Le Premier ministre, pour sa part, a rappelé, dans son discours du 14 octobre,
à l'IHEDN, l'importance primordiale qu'il attache à la coordination des
différents départements ministériels et des services de l'Etat engagés dans la
défense et la sécurité du pays. Il a notamment souhaité que soit engagée une
refonte de la planification de nos mesures de vigilance, de protection et de
réaction face aux menaces terroristes. Le SGDN a été chargé de préparer cette
refonte essentielle pour la sécurité de nos compatriotes.
Sur le plan des crédits d'investissement, les priorités gouvernementales se
traduisent tout particulièrement, au titre du projet de budget pour 2003, par
l'accroissement du programme civil de défense pour assurer la protection des
populations face au terrorisme, par un effort concernant l'adaptation des
moyens de l'Etat, en particulier des services de sécurité et de renseignement,
aux nouvelles technologies de l'information et par la sécurisation des
transmissions gouvernementales, celles-ci devant faire face à tous les types de
circonstances pour assurer la continuité de l'action des services publics.
Le programme civil de défense comporte un volet interministériel qui est
également assumé par le SGDN. C'est un outil de coordination placé entre les
mains du Premier ministre. Il permet de donner des impulsions et de mettre en
cohérence les différents programmes qui constituent ce que l'on appelle la
défense civile.
Le projet de loi de finances pour 2003 propose, à cet égard, une hausse des
moyens inscrits au budget du SGDN de 29 % par rapport à la loi de finances
initiale de 2002. Le total des crédits de paiement passe ainsi de 5 336 000
euros à 6 881 000 euros.
Il s'agit, pour le Gouvernement, de soutenir l'effort continu entrepris par le
SGDN, avant même le 11 septembre 2001, pour développer des instruments adaptés,
en particulier, aux risques de terrorisme et aux risques nucléaires,
radiologiques, biologiques et chimiques, NRBC. Votre rapporteur a insisté, à
juste titre, sur cette priorité.
L'adaptation des moyens de l'Etat aux nouvelles technologies de l'information
constitue un deuxième axe de priorité pour le SGDN. C'est, à mes yeux, un sujet
d'une importance primordiale : 10 163 000 euros de crédits de paiement en
services votés sont consacrés à cet effort. Ces crédits sont destinés à la
poursuite des opérations lancées, au titre des années antérieures, pour la
modernisation des moyens techniques de nos services.
Le Gouvernement estime essentiel de se doter des capacités de répondre au
développement accéléré des nouvelles technologies d'information et de
communication et de parer à tout usage malveillant à l'encontre de la sécurité
nationale.
Dans ce même domaine, une nouvelle tranche d'investissements vous sera
présentée au titre du projet de loi de finances rectificative pour 2002. Son
montant s'élève à 7 700 000 euros en autorisations de programme.
La sécurité des systèmes d'information constitue un autre champ d'action,
articulé avec le précédent. Le SGDN constate que l'Etat et les services publics
sont la cible d'attaques de plus en plus nombreuses et agressives. Sa mission
est de diffuser, dans les services publics et dans le tissu industriel
français, les procédures, les pratiques et, de fait, une nouvelle « culture de
sécurité » des systèmes d'information.
La dernière priorité est le renforcement de la sécurisation des liaisons
gouvernementales, qui se fonde d'abord sur la montée en puissance du programme
RIMBAUD. Conformément aux accords conclus cet été entre l'Etat et France
Télécom, le budget du SGDN prendra en charge, en 2003, la partie des coûts
d'exploitation qui excède les recettes d'exploitation encaissées par
l'opérateur au titre de ce réseau. La dotation initiale atteint, pour cette
première année, 2 100 000 euros. Elle explique en grande partie la hausse des
moyens de fonctionnement du SGDN, qui bénéficie également à l'IHEDN et à son
propre budget de fonctionnement.
L'IHEDN doit jouir de sa pleine autonomie d'établissement public, sans que
s'accroissent ses dépenses de gestion. Aussi, le transfert d'emplois
budgétaires correspondant à des personnels issus des ministères et mis à
disposition de l'Institut est-il engagé ; l'objectif est de mettre en place une
politique de ressources humaines appuyée sur des moyens budgétaires propres.
Un premier transfert d'emplois est proposé par le projet de loi de finances
pour 2003 à partir du ministère de la défense, ce qui entraîne une augmentation
de la subvention à l'IHEDN, qui atteint 1 789 000 euros. Cette mesure présente
un coût nul pour le budget de l'Etat, puisqu'il ne s'agit que d'un
transfert.
Le budget de fonctionnement du SGDN atteint, en 2003, 10 038 000 euros,
dotation RIMBAUD comprise. Les mesures nouvelles sont destinées au financement
de la participation française aux réseaux de communication civils de l'OTAN et
à l'augmentation des moyens de fonctionnement.
Il convient d'ajouter à ces crédits un effort significatif en projet de loi de
finances rectificative pour 2002, sous la forme de crédits de fonctionnement
non reconductibles, destinés au financement d'équipements informatiques
nécessaires à la mise en place d'un nouveau logiciel pour le contrôle des
exportations de matériels de guerre, ainsi qu'à la mise en oeuvre du programme
AdER, d'administration en réseau. Ces crédits permettront également le
financement de mesures indispensables de sécurité incendie et l'amélioration de
l'accessibilité des locaux du SGDN aux personnes à motricité réduite.
Le SGDN, comme d'autres départements ministériels, prépare par ailleurs
l'application de la loi organique pour les lois de finances.
Une première étape de la réforme de la nomenclature budgétaire est proposée
dans le projet de loi de finances pour 2003. Cinq chapitres sont supprimés et
deux sont créés.
En outre, vous avez remarqué, monsieur le rapporteur, que l'Assemblée
nationale a souhaité la suppression du jaune récapitulant les crédits civils
concourant à la défense de la nation. Nous en prenons acte.
Le projet de budget du SGDN est une bonne illustration des efforts du
Gouvernement, dans un contexte de discipline et d'effort budgétaire, pour que
l'Etat puisse mieux remplir ce qui constitue le noyau dur de sa mission :
élever le seuil de sécurité de la population sur le territoire national,
adapter et moderniser les moyens de sa protection et redonner ainsi aux
Français pleine confiance dans leur Etat pour garantir leur sécurité.
Comme vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur, le rôle du SGDN dans
l'organisation gouvernementale est désormais conforté. Le secrétariat général,
recentré sur les missions qui lui sont confiées par les plus hautes autorités
de l'Etat, tient bien la place que la représentation nationale souhaite lui
voir tenir.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants, et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du
RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le
secrétariat général de la défense nationale et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 3 587 719 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 9 495 000 euros ;
« Crédits de paiement : 4 747 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
III. - CONSEIL ÉCONOMIQUE ET SOCIAL
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
les services du Premier ministre : III. - Conseil économique et social.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Lise,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, pour la deuxième année consécutive, le Conseil
économique et social voit ses crédits augmenter modestement de 1,1 %.
En effet, 32,1 millions d'euros lui sont alloués et serviront à assurer la
continuité des actions engagées par le président Jacques Dermagne, actions pour
lesquelles le Parlement avait voté une revalorisation des moyens de 8,2 % dans
la loi de finances de 2001.
Les dépenses liées aux ressources humaines représentent les neuf dixièmes du
budget du Conseil qui, de ce fait, est peu élastique. Ces dépenses ne font
l'objet d'aucune mesure nouvelle. L'augmentation des crédits d'équipement est
sensible - 9,2 % - mais porte sur une masse faible. Le palais d'Iéna, qui
abrite le Conseil, est classé monument historique. Il nécessite donc des
opérations d'entretien et de rénovation coûteuses, visant à améliorer le
confort et surtout la sécurité des installations. L'enveloppe pour 2003
s'élèvera donc à 650 000 euros.
Le président Dermagne poursuit toujours une politique ambitieuse : affirmer la
place et le rôle du Conseil pour donner à la société civile le cadre et les
moyens de se faire mieux entendre, et ce sur les scènes nationale et
internationale.
Sur le plan national, le cadre dans lequel le Gouvernement sollicite son avis
constitue un bon indicateur du poids du Conseil. A cet égard, le bilan est
contrasté, il faut l'avouer.
En effet, sur la base de l'article 69 de la Constitution, c'est-à-dire sur des
projets de loi, d'ordonnance ou de décret, ou sur des propositions de loi, le
Gouvernement ne consulte pas le Conseil : les dernières saisines datent de
1998, ce que déplore le Conseil, à juste titre, me semble-t-il.
En revanche, sur la base de l'article 70, c'est-à-dire sur des problèmes de
caractère économique ou social, le Gouvernement fait appel au Conseil. Au-delà
du nombre des saisines, ce sont surtout les sujets traités qui importent. Sur
ce plan, il est satisfaisant de constater que le Gouvernement, en juin dernier,
a saisi le Conseil sur des sujets aussi essentiels que la convergence des SMIC,
la construction européenne ou l'attractivité du territoire.
Par ailleurs, si le Conseil économique et social sait être patient - et c'est
le cas -, il peut constater, parfois jusqu'à dix ans après, les retombées de
certains de ses travaux dans des mesures gouvernementales.
Sur l'année écoulée, les travaux du Conseil sur les droits de la personne
malade, sur les mutations de la société et le travail social, sur les maladies
génétiques rares, sur l'accueil des jeunes dans les centres de vacances et de
loisirs ou encore sur la médiation et la conciliation de proximité, ont inspiré
le Gouvernement.
S'agissant de ses relations avec le Parlement, le Conseil économique et social
a tenu à renforcer des liens jugés trop distendus. La création, l'an dernier,
d'un poste de chargé des relations avec le Parlement a permis de faire un
premier pas en ce sens. Mais le Conseil voudrait aller plus loin et devenir «
l'assemblée du premier mot », pour reprendre une formule de son président, qui
cite en exemple le cas de l'Italie, où les présidents de commissions
parlementaires peuvent saisir le Conseil économique et social italien.
A l'échelon international, le dynamisme du Conseil se traduit par des actions
de coopération, nombreuses et efficaces, qui aident à l'émergence de nouvelles
assemblées consultatives dans le monde, les pays concernés manifestant souvent
le souhait d'adopter le modèle français. Par ailleurs, le Conseil économique et
social français joue un rôle moteur au sein de l'Association internationale des
conseils économiques et sociaux et des institutions similaires.
Enfin, alors que la question de la société civile, dont le Premier ministre se
veut à l'écoute, a été débattue cette année - je précise que le Conseil
économique et social a apporté une brillante contribution à ce débat - il est
certainement bienvenu de redire quelques mots sur la question, certes
récurrente, de la représentativité du Conseil.
Sans chercher à « coller » exactement à la société civile, qui est, par
définition, en perpétuelle mutation, celui-ci pourrait tirer avantage d'une
composition « rafraîchie ». Mais cette composition étant fixée par une loi
organique, c'est bien sûr au législateur qu'il revient d'analyser le bien-fondé
de sa modification.
Pour l'heure, la commission des finances vous propose, mes chers collègues,
d'adopter les crédits du Conseil économique et social pour 2003.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les budgets
dont l'augmentation se poursuit en 2003 ne sont pas très nombreux. Je note que
le budget du Conseil économique et social, après une progression de 8,1 % en
2001 et de 1,7 % en 2002, n'augmente que de 1,1 % en 2003, mais que ses crédits
d'équipement progressent de 9,2 %. C'est dire à la fois l'importance de notre
Conseil économique et social et mon regret qu'il ne bénéficie pas
d'augmentations plus sensibles cette année.
Je n'aborderai pas le problème du personnel, ni les dépenses de matériels de
l'équipement administratif, qui bénéficient de reports de crédits non
négligeables pour 2003, ni l'amélioration des conditions de travail, ni les
autorisations de programme qui progressent de 9,2 %. Ces dépenses sont
nécessaires, et je ne les trouve pas excessives !
Au moment du vote du budget d'un tel organisme, la seule question qui nous
préoccupe est simple : le Conseil économique et social est-il utile, efficace,
nécessaire au fonctionnement de l'Etat ?
Notre réponse est simple : oui, le Conseil économique et social est utile. Je
n'en veux pour preuve que le fait que 50 % de ses avis influencent les choix du
Gouvernement, performance plus éclatante que celle de nos commissions, mes
chers collègues...
Oui, le Conseil économique et social est efficace, et cela pour une raison
fort simple : ses avis sont en général clairement formulés.
Le Gouvernement est très souvent en accord ou en désaccord avec l'ensemble de
l'avis formulé. Il est rare qu'il n'en accepte qu'une partie.
Le Conseil économique et social apparaît donc comme nécessaire au
fonctionnement d'un Etat républicain et démocratique. La représentativité de
ses membres s'est renforcée, élargie. Le monde associatif, économique, syndical
notamment, peut apporter sa contribution à l'avis formulé.
Je ne dis pas que le Gouvernement retienne beaucoup d'avis pour son action
gouvernementale. Il ne retient trop souvent - et cela quel que soit le
Gouvernement - que ce qui va dans le sens de son orientation. Toutefois, pour
le long terme, il est plus coopératif. Je n'en veux pour preuve que certaines
études sur le niveau de vie des Français, le logement social ou les allocations
familiales. Le Conseil économique et social, selon l'étude que M. Beurier lui a
consacrée, révèle les tendances lourdes du corps social, alors que le
Gouvernement doit agir rapidement en fonction d'un contexte évolutif.
L'influence sur la politique gouvernementale est donc réelle, tout en restant
modérée.
Je suis dialecticienne, et par conséquent convaincue que les idées doivent
mûrir, cheminer et même faire l'objet de luttes pour qu'elles puissent devenir
un jour « doctrine de Gouvernement ».
Je n'oublie pas que le Conseil peut être saisi d'une demande d'avis, mais
aussi se saisir lui-même d'un projet d'avis et d'étude, son ouverture est donc
plus grande.
Le fonctionnement du Conseil est méconnu et c'est bien dommage. Je rappelle
que les ministres sont informés à l'avance des débats qui les concernent,
qu'ils peuvent y assister et intervenir - le font-ils ? -, que les séances sont
publiques, que la presse y est présente, et que le
Journal officiel
publie avis, rapports et études dans une édition particulière.
Nous voterons donc en faveur des crédits permettant aux 72 membres de section,
aux 140 fonctionnaires dont un tiers sont des personnels d'encadrement chargés
d'assister les conseillers dans leurs travaux, de pouvoir accomplir une tâche
en souhaitant qu'ils puissent encore renforcer une activité féconde dont la
République a besoin.
Vous voyez, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu'il nous arrive de
voter en faveur d'un projet de budget, répondant ainsi à l'appel du rapporteur
spécial M. Claude Lise, qui, cette année, insiste à juste titre sur l'action
internationale en notant les actions en direction de l'euro-Méditerranée, de
l'Afrique, et des pays francophones, des démocraties émergentes et même de la
Chine.
Ainsi, à l'invitation de la France, le nombre de conseils économiques et
sociaux est passé en douze ans d'une vingtaine à plus d'une cinquantaine. Le
rôle international du Conseil économique et social ne date pas d'aujourd'hui,
mais il en sort renforcé et dynamisé, ce qui nous conforte dans notre vote
positif.
(Ah ! et applaudissement sur les travées du RPR, des Républicains et
Indépendants et de l'Union centriste.)
M. Marcel-Pierre Cléach.
Pour une fois !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos,
ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le président, mesdames,
messieurs les sénateurs, le président Jacques Dermagne et le bureau du Conseil
économique et social ont engagé depuis le début de la mandature 1999-2004 une
politique de modernisation et d'ouverture sur l'extérieur.
Les moyens de cette politique ont été dégagés sur l'exercice 2001, grâce à une
revalorisation significative de 8,17 % du budget de fonctionnement, par
ailleurs relativement modeste.
Ces nouveaux crédits ont permis la création d'un service international, d'un
service de la communication et de la mise en place d'un réseau informatique.
La progression plus modeste des crédits, tant pour l'exercice 2002 que pour
l'exercice 2003, avec une augmentation de 1,08 %, vise cependant à conforter ce
développement.
Au total, le projet de budget pour 2003 s'élève à 32,14 millions d'euros, dont
31,19 millions d'euros relevant du titre III et 0,95 millions d'euros du titre
V, en progression de 1,08 % par rapport à l'année 2002.
Au cours de l'année 2001, le Conseil économique et social a tenu vingt et une
assemblées plénières, contre dix-huit l'année précédente. Ses membres ont
participé à 388 réunions au cours desquelles 275 personnalités extérieures ont
été auditionnées. A l'issue de ces travaux, quatre études et vingt et un avis
et rapports ont été adoptés, dont six sur saisine gouvernementale. Au cours du
seul premier semestre 2002, neuf avis et deux études ont été adoptés, dont
trois sur saisine gouvernementale. Ces chiffres vous montrent le niveau très
élevé du travail accompli par le Conseil économique et social.
Depuis juin 1999, le site Internet du Conseil met en ligne le texte intégral
des rapports des douze derniers mois, ainsi que les notices des travaux publiés
depuis 1947. En 2001, le nombre d'accès moyen mensuel a été de 556 528, en
progression de 85 % par rapport à l'année précédente.
Pour toutes ces raisons, nous vous présentons ce projet de budget qui s'élève
à 32,14 millions d'euros.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Conseil
économique et social et figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III : 448 220 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président.
Je constate que ces crédits ont été adoptés à l'unanimité des suffrage
exprimés.
ÉTAT C
M. le président.
« Titre V. - Autorisations de programme : 950 000 euros ;
« Crédits de paiement : 950 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Je constate que ces crédits ont été adoptés à l'unanimité des suffrages
exprimés.
IV. - PLAN
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant les services
du Premier ministre : « IV. - Plan. »
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Haut,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, les crédits demandés pour le Plan et les
organismes qui lui sont associés en 2003 s'élèvent à 24,82 millions d'euros, en
diminution de 7 % par rapport à 2002, ce mouvement ne faisant toutefois que
refléter les résultats de l'exécution des gestions passées. Sur une année, une
telle diminution ne peut avoir de conséquences, mais cela ne doit pas être
pérennisé.
Il convient cependant de noter la forte diminution des crédits alloués à
l'évaluation, en particulier au Conseil national de l'évaluation, le CNE, et au
Fonds national pour le développement de l'évaluation, le FNDE.
Cette évolution ne me paraît pas particulièrement bienvenue, compte tenu de
l'importance croissante que va prendre l'évaluation avec la mise en oeuvre de
la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui fera
obligation aux administrations de présenter les résultats de leurs activités
sur la base d'indicateurs de résultats et de performances.
En dehors de ce point particulier, je souhaite faire quelques observations
générales et soulever quelques interrogations.
L'abandon de la planification « à la française » a conduit à une véritable
transformation du Plan, désormais chargé de l'animation de l'analyse
prospective et stratégique et de la coordination de l'évaluation des politiques
publiques. Le gouvernement précédent avait relancé le Commissariat général du
Plan en fixant de nouvelles missions, conformément aux diverses orientations du
Premier ministre arrêtées entre 1998 et 2000.
L'évaluation des politiques publiques me paraît revêtir aujourd'hui un grand
intérêt. Le décret du 18 novembre 1998 a d'ailleurs renforcé le rôle du
Commissariat général du Plan dans le dispositif interministériel d'évaluation
des politiques publiques. Le Commissariat assure le secrétariat du Conseil
national d'évaluation et, à ce titre, met en place les instances d'évaluation,
suit les études lancées par ces instances et gère les crédits du FNDE. Il
propose au Premier ministre les suites à donner aux évaluations réalisées.
Le décret de 1998 visait notamment à multiplier le nombre d'évaluations
réalisées et à raccourcir leur délai de réalisation. Les objectifs ont été
partiellement atteints. Au total, ce sont en effet quinze études d'évaluation
qui ont été décidées en trois ans, cinq en 1999, trois en 2000 et sept en 2001,
soit plus que les évaluations réalisées en huit ans dans le cadre du dispositif
antérieur régi par le décret du 22 janvier 1990.
Les délais de production des études d'évaluation sont malgré tout encore très
longs même si des progrès ont été constatés par rapport aux évaluations
précédentes. Entre cinq et six mois s'écoulent généralement entre la décision
d'entreprendre une évaluation et l'installation de l'instance qui la conduit.
Il semble donc que les procédures d'évaluation restent perfectibles. Enfin, il
serait nécessaire de mieux communiquer sur le suivi des évaluations et le
devenir de leurs recommandation.
Enfin, le Plan conduit lui-même des travaux de recherche, ou y participe. On
pourrait même évoquer ceux qui sont réalisés par des organismes associés ou
subventionnés. Le service des études et de la recherche du Commissariat général
établit un rapport d'activité des études effectuées. J'ai ainsi comptabilisé,
entre le 1er janvier 2001 et le 31 mars 2002, 31 études achevées et 16 études
en cours. C'est parce que les études du Commissariat général du Plan sont
toujours marquées par une grande rigueur intellectuelle et par le souci de
l'intérêt général qu'il conviendrait d'accorder encore plus d'attention aux
travaux réalisés.
J'en viens maintenant à mes interrogations.
La première concerne l'évaluation.
Comme je l'indiquais, il me paraît important d'évaluer les politiques
publiques, mais, bien entendu, cela ne doit pas se traduire par une diminution
des crédits prévus à cet effet. Le maintien de crédits adaptés est-il envisagé
par le Gouvernement ?
Je m'interroge ensuite sur la possibilité de la saisine du Commissariat
général du Plan par le Parlement. Le Sénat, en particulier, ne pourrait-il pas
saisir le Commissariat sur un certain nombre de questions dans le cadre de ses
travaux parlementaires et lui commander diverses études ?
La troisième interrogation, qui est la plus importante, porte sur le débat qui
s'est déroulé à l'Assemblée nationale. Quel avenir pour le Plan ? Si j'en crois
les déclarations du Premier ministre, le Gouvernement souhaite pouvoir être
éclairé par des études prospectives et stratégiques sur les évolutions qui vont
se poursuivre à la fois dans notre pays, mais aussi en Europe et dans le monde.
Le Plan sera-t-il le lieu où ces études pourront être réalisées ?
Il serait intéressant de connaître au plus tôt les orientations du Premier
ministre et du Gouvernement en la matière. Un nouveau programme de travail ne
peut-il pas être fixé par le Premier ministre pour sortir rapidement de ces
interrogations, qui nuisent à la sérénité des travaux du Commissariat ?
Je vous précise enfin, monsieur le ministre, que la commission des finances
recommande le vote des crédits demandés pour le Plan et les organismes qui lui
sont rattachés.
(Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du
groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe de l'Union centriste et
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Paul Alduy,
rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques et du Plan.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits
inscrits au titre du Plan s'élèvent à 24,83 millions d'euros.
Cette somme très modeste au regard du budget total de l'Etat ne reflète en
rien l'importance stratégique que revêtent les fonctions de prospective et
d'évaluation confiées au Commissariat général ; elle ne reflète pas davantage
la contribution majeure qu'il apporte pour éclairer les grands débats qui
animent la société française.
Pour votre rapporteur pour avis, la planification « à la française » conserve,
par sa singularité et par le relief qu'elle donne aux grands débats de société,
un caractère à la fois original et irremplaçable.
Concernant le budget proprement dit, l'excellente intervention de mon collègue
Claude Haut m'évite de m'attarder sur le sujet. Je note seulement que le budget
présenté est un budget sincère qui remet de l'ordre. On assistait les années
précédentes à des reports surréalistes, faute de consommation des crédits. Le
budget pour 2003 est en diminution de 7,7 %, mais, en fait, il correspond au
niveau de la consommation des crédits en 2002.
Néanmoins, il apparaît nécessaire de maintenir les reports 2002 sur 2003 si
l'on veut poursuivre - et c'est une nécessité - les évaluations engagées,
notamment au travers des contrats de Plan Etat-régions.
Je centrerai mon intervention sur l'analyse qualitative des travaux du
Commissariat du Plan.
La presse s'est récemment fait l'écho de deux rapports qui illustrent
parfaitement le rôle de centre d'analyses et de prospectives que le
Commissariat du Plan peut et doit jouer. Il s'agit du rapport « Rentabilité et
risque dans le nouveau régime de croissance » du groupe de travail présidé par
Dominique Plihon et du rapport « Immigration, marché du travail, intégration »
du séminaire présidé par François Heran.
Dans l'un et l'autre cas, on voit bien que les décideurs politiques et
économiques et l'ensemble des forces vives, je pense notamment aux syndicats,
ont besoin de ces informations pour alimenter, corriger ou renforcer leurs
prises de positions dans les débats et les négociations où ils sont engagés.
Néanmoins, il ressort de la lecture des rapports d'activité du Commissariat et
des organismes satellites, le centre d'études prospectives et d'informations
internationales, le CEPII, le centre d'étude des revenus et des coûts, le CERC,
le centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie, le
CREDOC, ou l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, une
impression d'éclectisme et d'éparpillement plutôt que celle d'une planification
coordonnée du programme de travail de ces organismes. Le Plan, non seulement ne
planifie plus l'investissement de l'Etat, comme à son origine, mais semble ne
pas planifier l'utilisation de son budget : on voit les services juxtaposés,
des organismes rattachés très autonomes qui vivent leur vie non seulement sans
contrôle parlementaire mais encore sans commande ou contrôle réel de
l'exécutif.
Le plus étonnant est le positionnement du conseil d'analyse économique par
rapport au Commissariat général du Plan.
Sans méconnaître les éminentes qualités de ce collège d'économistes de très
haut niveau, force est de constater qu'il est monodisciplinaire. Or l'intérêt
majeur du Commissariat général du Plan réside dans son caractère
multidisciplinaire.
Il apparaît donc essentiel de réaffirmer le rôle de chef de file du
Commissariat général du Plan. En d'autres termes, le conseil d'analyse
économique devrait être placé sous l'autorité du Commissariat général du Plan,
alors qu'aujourd'hui ce dernier en est seulement membre de droit.
Plus concrètement, le président du conseil d'analyse économique devrait être
le commissaire au Plan. On voit sur cet exemple la lente désorganisation du
dispositif. Il faut remettre de l'ordre et réaffirmer le
leadership
du
commissaire au Plan.
Mais surtout, aujourd'hui, il est urgent que le programme de travail et la
coordination des actions du Commissariat général du Plan soient redéfinies en
fonction des priorités du nouveau gouvernement. La réforme des retraites, la
redéfinition des emplois aidés et des politiques de réinsertion, les conditions
de réussite de la territorialisation des politiques publiques sont autant de
défis nouveaux pour l'action gouvernementale, qui impose une mobilisation forte
du Commissariat, en matière d'évaluation et de prospective.
Par ailleurs, le Gouvernement a souhaité ouvrir un nouveau chantier en matière
de décentralisation, que le Sénat soutient pleinement. En faisant de
l'expérimentation une voie possible pour transférer de nouvelles compétences,
le Gouvernement doit pouvoir s'appuyer sur le Commissariat général du Plan en
tant qu'instance d'évaluation des politiques publiques. Faute d'une évaluation
rigoureuse, les expérimentations ne seront que des expériences sans
lendemain.
La commission des affaires économiques souhaite, comme M. le rapporteur
spécial l'a indiqué, que le Parlement soit associé à la redéfinition du rôle et
des missions du Commissariat.
De même, on note cette année encore une anomalie grave : aucun parlementaire
ne figure parmi les membres du Conseil national d'évaluation et les organes du
Parlement, à commencer par les commissions permanentes des assemblées, ne
peuvent saisir le Conseil national de l'évaluation d'une proposition
d'évaluation.
Pour conclure, je rappellerai les propos de M. le Premier ministre lors de son
discours de politique générale : la France a besoin pour tenir son rang dans la
compétition internationale d'« un Etat stratège », c'est-à-dire d'un Etat qui «
renforce ses capacités de réflexion et de prospective, pour évaluer sur le long
terme les défis de demain ». J'ajoute que la France a besoin dans cette étape
de réorganisation de l'appareil de l'Etat, avec le double mouvement de
décentralisation et de réforme des administrations nationales, d'un Etat
innovant et évaluateur. Le Commissariat général du Plan devient, dans ce
contexte, un outil décisif à condition de voir ses missions redéfinies, sa
capacité de coordination renforcée et le contrôle du Parlement enfin
affirmé.
Le titre même de « Commissariat général du Plan » ne correspond plus à son
rôle ; c'est plutôt d'une « délégation interministérielle de l'analyse
stratégique et de l'évaluation des politiques publiques » dont le Gouvernement
a aujourd'hui besoin.
Cette nouvelle dénomination - ou une autre - marquerait la réorientation des
axes de travail du Commissariat, vers plus de concertation, d'évaluation et de
prospective.
Dans l'attente de cette réorganisation que nous appelons de nos voeux, la
commission des affaires économiques et du Plan a émis un avis favorable sur
l'adoption des crédits consacrés au Plan.
(Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, des
Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
J'indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé à cinq minutes le
temps de parole dont chaque groupe dispose pour cette discussion.
La parole est à M. Joël Bourdin.
M. Joël Bourdin.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le président
que je suis de la délégation du Sénat pour la planification, qui fête cette
année son vingtième anniversaire, souhaite, en saluant les travaux du
Commissariat général du Plan, témoigner sa gratitude pour l'excellence des
relations qui unissent la délégation et, plus largement, le Sénat et le
commissariat. Il souhaite aussi dire son estime pour la qualité de la
contribution de cet organisme aux débats publics.
Des rumeurs et une initiative isolée ont pu laisser penser que le Commissariat
pourrait disparaître. Je ne souscris ni aux unes ni à l'autre.
A l'heure où le Premier ministre a très pertinemment - comme vient de
l'indiquer notre collègue Jean-Paul Alduy - fixé le cap d'un « Etat stratège »,
on ne peut sérieusement imaginer de se passer de ce « réducteur d'incertitudes
» qu'a toujours été le Commissariat général du Plan.
Il y a lieu, au contraire, de tout mettre en oeuvre pour qu'il augmente encore
son rayonnement. Mais avant d'envisager cette question, je voudrais dire
quelques mots d'un sujet qui, au Sénat, nous tient à coeur : l'information
économique. Le budget du Plan est en effet le support du soutien du budget de
l'Etat aux organismes indépendants de réflexion économique.
Il est notoire que notre pays souffre, par rapport à ses voisins anglo-saxons,
d'un développement trop limité de sa culture économique. Cette situation
résulte d'un ensemble de données. Parmi celles-ci, je me dois d'évoquer la
relative faiblesse des institutions indépendantes par rapport à
l'épanouissement des
Think tanks
anglais et plus encore américains.
J'ai eu l'honneur de travailler sur ces sujets pour le compte de la commission
des finances et de la délégation du Sénat pour la planification. L'une de nos
conclusions est qu'il convient de relancer le processus entamé par M. Raymond
Barre à la suite du rapport Lenoir-Baudoin Prot, c'est-à-dire de mettre en
oeuvre les mesures susceptibles de consolider un pôle indépendant d'expertise
économique. Cela suppose quelques moyens financiers. Il me semble que le
rapporteur général partage cette conviction vu ses propositions que nous avons
examinées lors de la discussion de la première partie de ce projet de loi de
finances. A ce propos, je me félicite du fait que l'Assemblée nationale ait
jugé bon d'amender le budget du Plan pour augmenter la subvention versée à
l'Observatoire français des conjonctures économiques, l'OFCE, qui, depuis sa
création, est un partenaire efficace du Sénat.
C'est bien, mais cela ne suffit pas ! Il existe aujourd'hui quelques
organismes indépendants qui pourraient légitimement prétendre au soutien
public. Il faudra donc reprendre cette question. Mais déjà, je crois qu'on
ferait beaucoup - et sans que cela coûte - en instaurant des relations apaisées
entre les pôles d'expertise gouvernementaux et les instituts indépendants. On
pourrait, par exemple, faciliter l'accès aux données publiques et énoncer un
principe de gratuité des informations statistiques standards mises en ligne. Il
faut aussi que les programmes statistiques annuels tiennent mieux compte de la
demande sociale. Il faut enfin ranimer le dialogue entre l'expertise de
l'exécutif et l'expertise indépendante.
Avec ce mot « dialogue », je reviens au Commissariat général du Plan, dont
l'une des vocations historiques est de garantir que la décision publique soit
mieux concertée.
Cette mission a sans doute été quelque peu perdue de vue à mesure que des
structures
adhoc
de concertation ont été instituées. Je ne crois pas que
la gouvernance du pays ait intérêt à la multiplication de telles structures.
L'esprit de concertation s'y efface trop souvent devant des tactiques
d'affichage. Je pense, au contraire, que notre pays doit placer au coeur de sa
gouvernance des enceintes stables de concertation.
C'est également d'une culture solide de prospective et d'évaluation des
services et des politiques publics dont nous avons besoin et qui appelle
l'existence d'un point d'ancrage administratif doté de permanence et de moyens
et qui privilégiant une action en continu. A ce propos, il est souvent question
de la concurrence existant entre le conseil d'analyse économique, la direction
de la prévision et le Commissariat général du Plan. Je crois pourtant que tout
distingue ces différents organismes. La direction de la prévision est un
service du ministère de l'économie et des finances et elle a bien l'intention
de le rester. Nous le savons au Sénat puisque notre collaboration avec la
direction de la prévision a été interrompue pour ce motif. Quant au conseil
d'analyse économique, le brillant de son succès n'enlève rien au sérieux des
taches du Commissariat général du Plan et il me semble que nul Premier ministre
ne saurait se plaindre d'un excès de moyens d'analyse.
Notre délégation travaille à un rapport sur l'organisation des processus
d'évaluation des politiques publiques dans notre pays. Sans déflorer ses
conclusions, je puis vous dire que les processus nous apparaissent profondément
perfectibles. Il nous paraît nécessaire de les réorganiser et de les doter des
moyens nécessaires. Le budget du Plan et la situation actuelle du conseil
national de l'évaluation laissent beaucoup à désirer sur ce point.
Il faut, enfin, hisser l'évaluation au niveau politique et, en particulier,
associer pleinement le Parlement à un processus qui est aujourd'hui confisqué
par l'exécutif.
Le Commissariat général du Plan n'a, dit-on, pas reçu de nouvelle lettre de
mission du Gouvernement.
J'ai gardé à l'esprit les excellents propos du président de la commission des
finances lors de l'examen des crédits du Plan. Ils m'autorisent à vous
indiquer, et ce n'est qu'à moitié une boutade, que, si le Gouvernement ne
percevait pas l'utilité d'un organisme d'expertise, le Parlement saurait, quant
à lui, réconcilier pouvoir et expertise.
Nous avons récemment adopté une réforme de notre droit budgétaire qui doit
être un outil de la réforme de l'Etat. Nous devrons sans doute l'accompagner
par une réforme des processus d'évaluation des politiques publiques.
La Cour des comptes est au service du Gouvernement et du Parlement et la
nouvelle loi organique sur les lois de finances a consolidé l'accès du
Parlement à l'expertise de la Cour.
Ce n'est pas trop rêver, ce me semble, que d'imaginer de transposer un tel
modèle au Commissariat général du Plan. Par cette perspective, vous aurez
compris, monsieur le ministre, quel prix attache le Sénat à un organisme qui
peut pleinement contribuer à l'affirmation d'un Etat rénové qui ne saurait se
passer d'un Sénat stratège.
(Applaudissements sur les travées des
Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec 24,8
millions d'euros, les crédits destinés au Plan baissent de 7,7 %. Ces chiffres
traduisent une politique sévère de restrictions budgétaires qui nous paraît
inquiétante.
Dans la période actuelle de mondialisation, de mise en réseaux des firmes,
notamment sous l'impulsion des nouvelles technologies de l'information, de
turbulences boursières et financières, nous avons un besoin crucial d'un outil
d'analyse et de prospective socio-économique capable d'accroître la visibilité
à moyen et à long termes, de générer une information susceptible d'orienter et
de guider, autant que faire ce peut, les grands choix et les enjeux de société
qui se présentent à nous aujourd'hui.
C'est précisément la mission que remplit le Plan et ce, il faut le souligner,
à travers une large concertation des différents partenaires sociaux, des
représentants des administrations centrales, des collectivités locales et en
étroite association avec le monde universitaire. Personne ne nierait
aujourd'hui la qualité des études et des diagnostics produits dans le cadre de
la réflexion du Commissairat général du Plan.
Dans cette période manifeste de transition budgétaire, d'énormes incertitudes
pèsent sur les moyens futurs du Plan ainsi que sur la nature même de ses
missions.
C'est également la pluralité des analyses permettant d'alimenter les débats
sur toutes les grandes questions de société que vous compromettez en réduisant
de manière importante les crédits destinés à certains organismes subventionnés
par le Plan.
Ainsi, les crédits de recherche versés à l'Observatoire français des
conjonctures économiques diminuent de plus de 32 %, les subventions affectées
aux crédits de fonctionnement de l'Institut de recherche syndicale baissent de
plus de 12 %. Quant aux dotations budgétaires du Conseil de l'emploi, des
revenus et de la cohésion sociale, elles régressent de plus de 16 %.
Cette réduction des moyens budgétaires du Plan va bien au-delà d'un simple
désengagement financier de l'Etat. Elle manifeste qu'une étape supplémentaire
consacrant l'abandon par l'Etat de ses fonctions régulatrices au profit des
forces du marché, notamment celles des marchés financiers, est franchie.
Pourtant, la récente débâcle financière et la situation de la croissance
jettent de sérieux doutes quant aux mécanismes régulateurs du marché.
Il est donc peut-être utile de rappeler qu'après la Seconde Guerre mondiale
les initiateurs de la planification française avaient élaboré une stratégie
collective capable d'enclencher une dynamique vertueuse de croissance. Ils
cherchaient non seulement à augmenter globalement les investissements
productifs, mais aussi à les canaliser et à les orienter vers les secteurs les
plus porteurs à même de moderniser et d'accroître le potentiel économique de la
France. Qui nierait qu'ils y soient parvenus ?
Enfin, comment ne pas souligner que le Commissariat général du Plan joue un
rôle éminent en matière de planification territoriale. C'est à ce niveau que se
situent précisément les exigences d'une planification moderne, capable de
penser et d'élaborer de manière collective une stratégie de développement
équilibré de notre territoire, notamment à travers les contrats de plan
Etat-régions.
Or, loin de veiller à assurer la cohérence nationale de notre territoire,
l'accélération du processus de décentralisation engagé par le Gouvernement
comporte de graves risques de fractionnement de notre territoire, de
marginalisation de certaines zones, et de formation de poches de pauvreté.
Outre qu'il suppose de nouveaux moyens financiers, le transfert des
compétences aux régions requiert, à n'en pas douter, une véritable vision à
long terme, dont l'Etat
a priori
est le garant, à travers la persistance
d'un « dialogue » qu'il doit entretenir avec les régions. Les contrats de plan
Etat-régions en sont l'un des moyens.
En ce domaine, que ce soit en matière de réflexion prospective ou d'évaluation
des politiques mises en oeuvre, le Commissariat général du Plan a évidemment
toute sa place. Encore faut-il qu'il en ait les moyens et qu'il ne soit pas
affaibli, au gré d'une concentration avec d'autres organismes à des fins de
réduction des coûts qui lui ferait perdre son rôle spécifique.
Pour toutes les raisons que je viens de développer, le groupe CRC votera
contre les crédits de ce budget.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos,
ministre délégué au commerce extérieur.
Monsieur le président, messieurs
les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, à l'issue du vote de
l'Assemblée nationale, les crédits inscrits au budget du Plan pour 2003
s'élèvent à 25,32 millions d'euros en crédits de paiement. Ils sont certes en
diminution de 1,37 million d'euros par rapport à la dotation 2002, mais ils
sont supérieurs aux 24,8 millions d'euros inscrits au budget initial.
En ce qui concerne les crédits de personnel, dans le cadre des actions
préparatoires à la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative
aux lois de finances, une partie des emplois et des crédits alloués à la
rémunération d'agents de catégorie A - contractuels à durée déterminée ou
titulaires en détachement sur des emplois contractuels - fait désormais l'objet
d'une présentation globalisée, ce qui permet une plus grande souplesse de
gestion dans la limite d'un plafond fixé en emplois et en crédits.
Je voudrais revenir sur le rôle et sur le positionnement administratif du
Commissariat général du Plan.
Le rôle du Commissariat général du Plan et des organismes qui lui sont
rattachés est de contribuer à la réflexion stratégique collective, notamment
dans le domaine économique et social, et d'éclairer le Gouvernement sur les
enjeux de moyen et long terme et les moyens d'y répondre.
Les missions du Plan se déclinent autour de trois axes : animer l'analyse
prospective, constituer un lieu privilégié de la concertation avec l'ensemble
des acteurs socio-professionnels et piloter le dispositif d'évaluation des
politiques publiques.
Ces missions sont aujourd'hui plus que jamais nécessaires. Dans un monde en
évolution, avec des acteurs nombreux ayant chacun sa stratégie, les décisions
publiques ne sont véritablement acceptées que si elles ont été sérieusement
instruites, les différentes options équitablement confrontées et les catégories
sociales les plus concernées entendues. Cette méthode, rigoureuse, ouverte et
participative, qui est celle du Commissariat général du Plan, est
particulièrement adaptée à la préparation des réformes structurelles.
Les organismes rattachés au Commissariat général du Plan sont indépendants.
Cela figure d'ailleurs dans leur statut la plupart du temps, notamment dans
ceux de l'OFCE.
Le positionnement du Commissariat général du Plan et de ses organismes
rattachés auprès du Premier ministre permet une approche interministérielle,
nécessaire à l'approche pluridisciplinaire des analyses et des
préconisations.
Ces institutions devraient donc être amenées dans un proche avenir à jouer un
rôle déterminant dans le renforcement des capacités stratégiques de l'Etat, que
le Premier ministre a inscrit comme priorité dans son discours de politique
générale du 3 juillet dernier en annonçant son intention « de renforcer la
capacité de réflexion et de prospective d'un Etat qui doit aussi être un Etat
stratège à qui il incombe d'évaluer sur le long terme les défis de la nation
».
En effet, au cours des récentes années, le travail de prospective et la
concertation sociale ont tous deux beaucoup décliné. Nous avons un besoin
urgent de revitaliser ces fonctions qui sont au coeur des missions d'un Etat
moderne.
Dans ce cadre, un plan de dynamisation de la prospective sera présenté dans
les prochaines semaines. Il comportera trois axes.
Le premier vise à mieux fédérer les moyens humains et administratifs à la
disposition du Premier ministre, la réflexion stratégique étant balkanisée
entre de multiples services et organismes. A cette occasion, la question de la
saisine pourra être examinée dans ce cadre et des propositions pourront être
faites.
Le deuxième axe tend à développer la prospective pluridisciplinaire. Il faut
en effet mieux intégrer les travaux de prospective et d'évaluation conduits par
les différents départements ministériels afin de favoriser l'émergence de
diagnostics partagés.
Enfin, il s'agit de rapprocher l'université et la recherche privée du conseil
de politique publique, ce qui se fait naturellement chez nos voisins, mais trop
peu en France.
C'est pour toutes ces raisons que je vous demande d'approuver les crédits
d'évaluation et de prospective alloués au Plan.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants, de
l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le Plan et
figurant aux états B et C.
ÉTAT B
M. le président.
« Titre III :
moins
1 246 181 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre III.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
« Titre IV : 540 429 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre IV.
(Ces crédits sont adoptés.)
ÉTAT C
M. le président.
« Titre VI. - Autorisations de programme : 958 000 euros ;
« Crédits de paiement : 479 000 euros. »
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le Plan.
Budget annexe des Journaux officiels
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi de finances concernant
le budget annexe des Journaux officiels.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Thierry Foucaud,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Après avoir sérieusement diminué
dans le budget prévisionnel pour 2002, les recettes des Journaux officiels
devraient croître de 14 % cette année, opérant ainsi un rattrapage au niveau
des recettes qui avait été atteint en 2001 après plusieurs années de croissance
ininterrompue.
Vous trouverez le détail des chiffres dans mon rapport écrit, je n'en citerai
que quelques-uns, qui caractérisent bien ce projet de budget.
D'abord, une dotation de 1,8 million d'euros est nécessaire pour financer
l'une des deux opérations majeures de ce budget : l'acquisition par la
direction des Journaux officiels de l'Office des publications officielles des
Communautés européennes, l'OPOCE. En effet, à partir du 1er janvier 2002, la
direction des Journaux officiels vendra en direct, en tant que revendeur
exclusif, l'ensemble de ses publications. Cette opération est à saluer car elle
contribue à la simplification de l'accès au droit pour nos concitoyens, qui
constitue un objectif aussi louable que nécessaire.
La deuxième opération importante de ce budget réside dans la mise en place du
système informatique de production du service public de la diffusion du droit
par l'Internet. C'est la mise en oeuvre concrète du programme d'action
gouvernemental pour la société de l'information annoncé le 2 octobre 2000 par
le précédent Premier ministre, Lionel Jospin.
La commission des finances militait en faveur de cette avancée démocratique
depuis plusieurs années, comme je le faisais remarquer dans mon rapport sur le
projet de loi de finances pour 2002. A cette époque, j'avais également
manifesté mon inquiétude que soit sous-traité à un opérateur privé le
traitement des données juridiques. Mais nous avons été entendus sur ce point,
puisque la concession avec l'ORT a pris fin et que la direction des Journaux
officiels est désormais l'unique responsable de l'exploitation du site
Légifrance, qui est placé sous la responsabilité du secrétaire général du
Gouvernement, en vertu du décret du 7 août 2002.
Grâce à la mise en place d'un site unique et gratuit pour l'accès au droit, le
site Légifrance qui se substitue aux deux sites Légifrance et Jurifrance,
l'accès à l'ensemble des données juridiques, y compris la jurisprudence,
devient gratuit, alors qu'auparavant il fallait payer pour avoir accès à la
jurisprudence. En dehors de ces deux importantes opérations, on peut formuler
quelques remarques sur ce budget.
En ce qui concerne les recettes, celles-ci devraient augmenter de 2 % en 2003,
en dépit du développement de la saisie en ligne des annonces, qui se traduit
par une baisse des recettes. Cette hausse est due à la hausse des tarifs
d'annonce. Par ailleurs, le lancement d'un CD-Rom « 120 ans de JO », qui
succède à l'ancienne version « 50 ans de JO », devrait contribuer à la hausse
des recettes de diffusion.
S'agissant des dépenses d'exploitation, leur augmentation résulte de la hausse
des frais d'affranchissement et de l'intégration dans les comptes des Journaux
officiels des achats de l'Office des publications officielles des Communautés
européennes, l'OPOCE.
Les investissements progressent grâce au projet de service public d'accès au
droit, notamment, ce qui permet au ratio investissement/recettes d'amorcer un
redressement après les niveaux extrêmement bas atteints en 2002 : 0,9 %.
En 2003, l'action de la Direction des Journaux officiels continuera d'être
orientée en fonction des trois objectifs suivants : premièrement, conforter son
rôle d'éditeur public, ce à quoi contribue le rachat de l'OPOCE ; deuxièmement,
renforcer son efficacité grâce, notamment, à un programme d'investissement
immobilier d'une durée de cinq ans et à la modernisation du système central de
photocomposition ; troisièmement, développer sa réactivité, ce à quoi devrait
contribuer l'ouverture du site Légifrance.
Plus généralement, la Direction des Journaux officiels est à la recherche
d'une efficacité accrue au travers de la modernisation de ses outils de
production et de gestion, ou au travers de l'adaptation de ses services.
Enfin, et pour être à peu près exhaustif, il faut évoquer les débats qui
portent sur l'avenir juridique de la Direction des Journaux officiels au sujet
duquel deux questions principales se posent.
La première question a trait à l'impact du droit européen en matière de
concurrence et de marchés publics sur les relations juridiques entre la
Direction des Journaux officiels et la Société de composition et d'impression
des Journaux officiels, la SACI-JO. Il apparaît, notamment, d'après le rapport
de Mme Catherine Bergeal, que la convention liant l'Etat et la SACI-JO pourrait
faire courir un risque juridique aux deux contractants. Je ne suis pas de cet
avis et je l'ai déjà dit : personne, en effet, n'a démontré qu'un tel risque
existait. Une mission de réflexion est d'ailleurs actuellement en oeuvre. Il
n'y a donc pas lieu de se prononcer pour l'immédiat.
La deuxième question tient à la nouvelle définition des budgets annexes par la
loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001. En son article
18, elle donne une définition restrictive des budgets annexes, qui est
susceptible de ne plus concerner les Journaux officiels. Un groupe de travail a
été mis en place par le ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, qui s'est réuni à deux reprises ce jour.
Très brièvement, j'indique que je ne peux faire abstraction d'un courrier
adressé à M. le président du Sénat, qui me l'a transmis, envoyé par
l'encadrement technique de la SACI-JO et qui attire l'attention sur le malaise
et l'inquiétude qu'éprouvent les personnels de l'encadrement de la SACI-JO
quant à leur charge de travail. Il me paraît essentiel que la direction et les
représentants du personnel d'encadrement de la SACI-JO puissent trouver les
solutions indispensables pour assurer la publication des comptes rendus des
débats des assemblées.
Sous réserve de ces observations, mes chers collègues, je vous propose
d'adopter le budget annexe des Journaux officiels.
(M. le président de la commission des finances applaudit.)
M. le président.
La parole est à Mme Marie-Claude Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
permettez-moi tout d'abord de remercier notre collègue Thierry Foucaud de la
qualité de son rapport.
Si le projet de budget annexe des Journaux officiels pour 2003 présente un
certain nombre d'évolutions positives, notamment dans la définition et
l'extension du périmètre de leur mission de service public, il acte également
une insuffisance grave de moyens humains et matériels pour faire face à la
croissance de toutes leurs activités et il n'est pas de nature à apaiser
totalement notre inquiétude pour l'avenir de ce service essentiel de la
République.
Certes, nous notons avec satisfaction, même si ce chiffre a une valeur
relative, que, comme chaque année, les Journaux officiels vont apporter une
contribution positive de 27 millions d'euros au budget de l'Etat, contre 13
millions d'euros en 2002. Parmi les points positifs, nous relevons également
l'acquisition de la diffusion des ouvrages et périodiques de l'Office des
publications des Communautés européennes et, surtout, le passage de la
diffusion du droit par Internet,
via
le site Légifrance, sous l'entière
responsabilité de la direction des Journaux officiels.
Cela nous semble aller dans le sens de la Constitution, sous l'égide des
Journaux officiels, d'un service public gratuit de l'accès au droit, que nous
réclamons depuis des années.
Cependant, la situation présente laisse apparaître des difficultés inédites et
inquiétantes pour faire face à ces missions nouvelles, comme pour assurer des
activités en expansion avec, entre autres, l'augmentation du travail
parlementaire et l'établissement du délai légal de onze jours pour la
publication des annonces de marchés publics.
Le délai de publication du
Bulletin des associations
s'est beaucoup
allongé.
Le
Bulletin officiel des annonces des marchés publics,
le
BOAMP
,
paraît parfois sans avoir été corrigé, ce qui est inadmissible.
Enfin, mes chers collègues, en tant qu'usagers assidus des Journaux officiels,
nous devons déplorer l'allongement du délai de parution des Journaux officiels
des débats parlementaires et des erreurs de correction dans le Journal officiel
des questions écrites, notamment lors de la session extraordinaire de l'été
dernier.
En aucun cas nous ne voulons imputer la détérioration du service aux ouvriers
et employés des Journaux officiels, dont l'excellence du savoir-faire et le
sens du service public sont unanimement reconnus.
Nous ne saurions admettre non plus que cette dégradation des services rendus
serve de prétexte à une remise en cause de tout ou partie des missions des
Journaux officiels.
La situation actuelle, qui est due à l'insuffisance de personnels aux Journaux
officiels, a des répercussions jusque dans notre assemblée, avec notamment, je
l'ai dit, des retards dans l'élaboration des comptes rendus et la publication
de l'intégralité de ceux-ci.
Jusqu'à aujourd'hui, la qualité du travail fourni tant par les services de la
séance du Sénat, à qui je veux rendre hommage, que par ceux des Journaux
officiels est reconnue de tous.
La véritable source des difficultés des Journaux officiels, qui ont d'ailleurs
été exprimées - M. le rapporteur spécial vient de le dire - dans une lettre
adressée par l'encadrement technique de la SACI-JO, le 31 octobre dernier, à M.
le président du Sénat, réside dans le manque de personnels, qui devient
préoccupant : quatorze postes de photocompositeurs redéployés, notamment, vers
les activités informatiques manquent à la saisie.
La détérioration des conditions de travail de toutes les catégories de
personnels s'accentue.
Le recours à la sous-traitance s'accroît. Je note ainsi que les crédits des
services extérieurs sont en progression, pour 2003, de 6,5 millions d'euros à
31,9 millions d'euros. L'activité Internet, bien que passée sous la
responsabilité directe des Journaux officiels, reste principalement
sous-traitée, entre autres à l'ancien concessionnaire.
Une politique de création d'emplois est maintenant nécessaire pour assurer la
pérennité et le développement de ce service indispensable à la vie démocratique
de notre pays.
Les salariés et leur syndicat estiment à vingt le nombre minimal de
photocompositeurs et à dix le nombre de correcteurs à recruter immédiatement à
la SACIJO, pour accomplir la charge actuelle de travail dans des conditions
normales.
Plusieurs dizaines de créations de postes nouveaux à la Direction des Journaux
officiels et à la SACI-JO, et non de redéploiements, sont également nécessaires
pour que les Journaux officiels maîtrisent en propre et en totalité l'activité
de diffusion du droit sur Internet. En outre, cela rendrait possible
l'amélioration nécessaire du site Légifrance.
Le projet de budget annexe ne répond en rien à ce besoin de personnels en
prévoyant une hausse des dépenses de seulement 1,8 % et le gel des effectifs
sans même compenser les effets de l'entrée en vigueur de l'accord sur la
réduction du temps de travail.
En ce qui concerne l'investissement, nous dressons le même constat. Certes, un
certain nombre de travaux, assez mineurs, visant à la modernisation de
l'établissement du 15e arrondissement de Paris font reculer la rumeur
persistante de délocalisation. Je vous demande, monsieur le ministre, de la
démentir définitivement, car elle serait synonyme de remise en cause de
l'avenir de l'entreprise.
D'ailleurs, l'acquisition de plus en plus impérative d'une nouvelle rotative
cinq couleurs et l'adaptation des lieux pour l'accueillir ne sont pas
programmées. Vous voyez bien que notre inquiétude est fondée !
Enfin, s'agissant de l'avenir juridique des Journaux officiels, une
clarification de la situation se fait encore attendre.
Pourtant, la démonstration juridique a été faite de la compatibilité du statut
actuel de la DJO, de la SACIJO et des relations qui les lient au regard du
droit européen des marchés publics.
Quant au maintien d'un budget annexe, les Journaux officiels rentrent bien
dans les conditions requises par l'article 18 de la nouvelle loi organique
relative aux lois de finances, comme vient de le rappeler notre collègue
Thierry Foucaud. Aussi, toutes les conditions de la levée de l'incertitude
juridique qui pèse sur l'avenir des Journaux officiels sont rassemblées.
Monsieur le ministre, il faut faire cesser les rumeurs d'une éventuelle
perspective de transformation en établissement public à caractère industriel ou
commercial, un EPIC.
Sous toutes ces réserves, nous voterons le budget des Journaux officiels pour
2003, que nous considérons comme un budget d'attente.
(Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Loos
ministre délégué au commerce extérieur.
Je ne reprendrai pas toute la
présentation du budget annexe des Journaux officiels. Je dirai simplement que
l'excédent d'exploitation atteindrait, dans l'hypothèse d'une progression des
recettes et des dépenses, 26,9 millions d'euros, ce qui représenterait un
doublement de la contribution du budget annexe de 2003 par rapport à 2002.
Je répondrai maintenant aux questions qui ont été posées par M. le rapporteur
spécial et par Mme Beaudeau.
S'agissant des statuts, Catherine Bergeal estime, dans son rapport, qu'il
existe une contradiction entre les dispositions nationales et communautaires en
matière de marchés publics et le maintien de deux structures distinctes : la
Direction des Journaux officiels et la SACI.
Le Gouvernement souhaite que, sur ce point, comme sur l'éventuelle
transformation des Journaux officiels en EPIC, une large concertation ait lieu
avec les représentants du personnel pour aboutir à une solution aussi
consensuelle que possible. Cette concertation est engagée, mais elle n'a pas
encore permis d'aboutir à un résultat, ce qui devrait intervenir en 2003.
Sur le problème du niveau des investissements et de l'emploi qui a été soulevé
par Mme Beaudeau, il faut souligner que la progression des dépenses inscrites
au budget pour 2003 s'élève à 6,7 %, ce qui constitue une hausse sensiblement
supérieure à celle du budget général. Cette progression permettra, grâce à
l'excédent d'exploitation dégagé, à la fois, je le répète, de doubler le
reversement du budget annexe au budget général et de financer l'ensemble des
investissements de modernisation, dont le montant sera multiplié par cinq en
2003.
Quant à l'emploi, M. le rapporteur spécial a lui-même reconnu que
l'augmentation des emplois à durée temporaire permettait de faire face, dans
des conditions satisfaisantes, aux pointes de production, tout en relevant que
les efforts de productivité étaient notables.
Enfin, quant à l'éventualité d'une délocalisation, je vous affirme qu'aucun
projet n'est prévu en ce sens. Vous pouvez donc tout à fait rassurer ceux que
cette question préoccupe.
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant le budget
annexe des Journaux officiels et figurant aux articles 40 et 41 du projet de
loi.
Services votés
M. le président.
« Crédits : 149 580 582 euros. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 40, au titre des services
votés.
(Ces crédits sont adoptés.)
Mesures nouvelles
M. le président.
« I. - Autorisations de programme : 13 851 000 euros ;
« II. - Crédits : 46 282 344 euros. »
Je mets aux voix les crédits inscrits à l'article 41, au titre des mesures
nouvelles.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président.
Nous avons achevé l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant le budget annexe des Journaux officiels.
3
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION
DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le
Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen. - Lettre
rectificative n° 4 à l'avant-projet de budget 2003. - Section I : Parlement
européen. - Section II : Conseil. - Section III : Commission. - Section IV :
Cour de justice. - Section V : Cour des comptes. - Section VI : Comité
économique et social. - Section VII : Comité des régions. - Section VIII
a
: Médiateur européen. - Section VIII
b
: Contrôleur européen de
la protection des données.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2146 et distribué.
4
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée à aujourd'hui, mardi 3 décembre 2002, à dix heures, à quinze heures et le
soir :
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2003, adopté par
l'Assemblée nationale (n°s 67 et 68, 2002-2003) (M. Philippe Marini, rapporteur
général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation).
Deuxième partie. -
Moyens des services et dispositions spéciales :
- Intérieur, sécurité intérieure et libertés locales :
SécuritéProcédure de questions et de réponses avec un droit de réplique
des sénateurs.
(et article 73) :
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial (rapport n° 68, annexe n° 22)
;
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (police et sécurité, avis n° 73, tome II) ;
M. Jean-Pierre Schosteck, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (sécurité civile, avis n° 73, tome III).
Décentralisation (et article 72) :
M. Michel Mercier, rapporteur spécial (rapport n° 68, annexe n° 23) ;
M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis de la commission des lois
constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale (avis n° 73, tome I).
- Agriculture, alimentation, pêche et affaires rurales (et articles 60, 60
bis
et 61) :
- Budget annexe des prestations sociales agricoles :
M. Joël Bourdin, rapporteur spécial (rapport n° 68, annexe n° 3) ;
M. Gérard César, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et du Plan (agriculture, avis n° 70, tome I) ;
M. Alain Gérard, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et du Plan (pêche, avis n° 70, tome II) ;
M. Gérard Delfau, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et du Plan (développement rural, avis n° 70, tome III) ;
M. Bernard Dussaut, rapporteur pour avis de la commission des affaires
économiques et du Plan (industries agricoles et alimentaires, avis n° 70, tome
IV) ;
Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission des affaires
culturelles (enseignement agricole, avis n° 69, tome VIII) ;
M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur pour avis de la commission des affaires
sociales (prestations sociales agricoles, avis n° 72, tome VI).
Délai limite pour les inscriptions de parole
dans les discussions précédant l'examen des crédits
de chaque ministère
Le délai limite pour les inscriptions de parole dans les discussions précédant
l'examen des crédits de chaque ministère est fixé à la veille du jour prévu
pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements
aux crédits budgétaires
pour le projet de loi de finances pour 2003
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux divers crédits budgétaires
et articles rattachés du projet de loi de finances pour 2003 est fixé à la
veille du jour prévu pour la discussion, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements aux
articles de la deuxième partie non joints à l'examen
des crédits du projet de loi de finances pour 2003
Le délai limite pour le dépôt des amendements aux articles de la deuxième
partie non joints à l'examen des crédits du projet de loi de finances pour 2003
est fixé au vendredi 6 décembre 2002, à seize heures.
Personne ne demande la parole?...
La séance est levée.
(La séance est levée le mardi 3 décembre 2002, à zéro heure
cinquante-cinq.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
ERRATUM
au compte rendu intégral de la séance du 14 novembre 2002
Page 3902, deuxième colonne, 12e alinéa,
Au lieu de : « M. Jean Chérioux.
M. Borvo a fait une remarque... »,
Lire : «
Mme Borvo a fait une remarque... ».
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Conditions de représentation des communes associées
112.
- 30 novembre 2002. -
M. Philippe Richert
attire l'attention de
M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés
locales
sur les problèmes posés par l'application du code électoral aux communes
associées. Conformément à l'article L. 228 du code électoral, sont éligibles au
conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au
rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devaient l'être. En toute
logique, les électeurs domiciliés dans les communes associées et remplissant
les conditions posées par l'article susindiqué du code électoral sont éligibles
au conseil municipal. De son côté, la commune associée est représentée au
conseil municipal par les conseillers municipaux élus à partir de cette section
électorale par un maire délégué élu. A l'heure actuelle, rien ne s'oppose à ce
qu'une personne remplissant les conditions de cet article, mais domiciliée dans
la ville centre et sans attache directe avec la commune associée, se fasse
élire par la section électorale de la commune associée, voire devienne maire
délégué. Aussi, ne serait-il pas envisageable, dans l'intérêt des communes
associées, de prévoir une disposition législative qui restreigne la possibilité
de candidatures pour les élus des communes associées aux électeurs
effectivement domiciliés dans la commune associée ou les citoyens inscrits au
rôle des contributions directes ou justifiant qu'ils devraient y être inscrits
au 1er janvier de l'année de l'élection au titre d'une propriété sur le
territoire de la commune associée ? Une telle disposition semble plus cohérente
et permettrait de sauvegarder l'identité et la spécificité des communes
associées, qui seraient ainsi représentées par des élus qui justifient d'un
lien direct avec elles. Il remercie le ministre de bien vouloir lui donner son
avis sur le problème qu'il vient de soulever.
Conditions de réalisation
de la liaison est-ouest à Avignon
113.
- 30 novembre 2002. -
M. Alain Dufaut
attire l'attention de
M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de
la mer
sur ses légitimes préoccupations concernant le devenir de la liaison est-ouest.
La liaison est-ouest, plus communément baptisée LEO, est une voie rapide dont
la construction était inscrite au 12e contrat de plan Etat-région, et avait
pour triple mission : de relier les autoroutes A 7 et A 9 par le sud d'Avignon,
de décharger le trafic de transit du tour des remparts et de la rocade urbaine
d'Avignon, de desservir la nouvelle gare TGV d'Avignon et la rendre
parfaitement accessible pour les usagers de trois départements, Vaucluse,
Bouches-du-Rhône et Gard. Depuis 1998, date à laquelle le tracé a été
définitivement arrêté, sur la base de la solution mixte, le dossier de cette
infrastructure vitale pour l'essor économique de toute une région ne cesse de
prendre du retard. Si l'enquête d'utilité publique s'est terminée en 2002,
l'enquête hydraulique a été repoussée en 2003 et l'engagement de l'Etat qui,
dans sa programmation, avait annoncé « le début des travaux simultanés des deux
ponts sur la Durance fin 2003 » est remis en cause ! En effet, aucun crédit
travaux (autorisations de programme AP) n'est inscrit sur l'année 2003 pour la
LEO. Le dernier comité d'engagement du contrat de plan, qui s'est tenu à
Marseille le 18 novembre, a prévu, pour la LEO, en 2003, des crédits d'étude et
d'acquisition foncière dont on n'a aucun besoin, alors qu'il aurait fallu 22,4
MEUR d'AP travaux pour démarrer, au minimum, un des deux ponts sur la Durance.
Ce désengagement, quand on sait que les crédits vauclusiens « partent » pour 9
MEUR supplémentaires sur la L 2 à Marseille, ou pour 4 MEUR de plus sur le
tunnel de Toulon, est inadmissible. Fin 2002, les Bouches-du-Rhône auront
consommé 48,8 % d'AP de son contrat de plan. Le Var aura consommé (avec le
tunnel de Toulon) 48,6 % des AP de son contrat de plan et le Vaucluse, éternel
parent pauvre du contrat de plan, n'aura consommé que 16,9 %. Alors même s'il
est vrai que le Vaucluse n'est pas, contrairement aux Bouches-du-Rhône et au
Var, représenté au niveau ministériel, il souhaite savoir comment il compte
faire pour corriger et inverser cette anomalie et faire en sorte que les
travaux de la LEO démarrent effectivement en 2003.