SEANCE DU 27 JUIN 2002
HOMMAGE AUX CONSEILLERS MUNICIPAUX
TUÉS À NANTERRE
M. le président.
Mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, avant la reprise de
nos travaux, je voudrais, au nom du Sénat tout entier, saluer la mémoire des
huit conseillers municipaux de la ville de Nanterre
(Mmes et MM. les membres
du Gouvernement, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent)
, victimes, le 27 mars
dernier, d'une folie meurtrière lors de la réunion du conseil municipal présidé
par notre ancienne collègue, Mme Jacqueline Fraysse.
Je salue d'ailleurs la présence, dans notre tribune officielle, de Mme
Fraysse, accompagnée d'une importante délégation du conseil municipal de
Nanterre et des familles des victimes. Je leur souhaite très chaleureusement la
bienvenue et je leur exprime toute ma sympathie sincèrement et profondément
attristée.
Vous me permettrez de citer les huit élus locaux tombés sous les balles d'un
fou meurtrier :
- Louisa Benakli, 40 ans, avocate, maire adjointe chargée de l'enfance ;
- Christian Bouthier, 46 ans, ancien professeur d'histoire-géographie au
collège André-Doucet, à Nanterre ;
- Jacotte Duplenne, 48 ans, maire adjointe chargée de la jeunesse, enseignante
spécialisée pour les enfants handicapés ;
- Monique Leroy-Sauter, 43 ans, commissaire aux comptes et professeur à
l'université ;
- Olivier Mazzotti, 38 ans, enseignant en histoire et géographie ;
- Valérie Meot, 40 ans, institutrice à l'école maternelle ;
- Michel Raoult, 58 ans, ingénieur, fondateur de l'association « Choisir la
vie » ;
- Pascal Sternberg, 30 ans, l'un des plus jeunes élus du conseil municipal.
Nous pensons aussi aux 19 blessés lors de cette tragédie.
Comment pouvait-on imaginer pareil carnage, pareille tuerie ?
Alors que le conseil municipal se termine, la nuit du 27 mars, vers une heure
du matin, et que la séance, consacrée à l'examen du budget, touche à sa fin,
tout bascule dans l'horreur : le tueur fou, assis dans les rangs du public, se
lève et ouvre le feu.
Aucune panique, aucun hurlement, malgré l'horreur du moment.
Au contraire, des gestes courageux, efficaces, permettant de maîtriser et de
ceinturer le meurtrier, d'appeler les secours, mais aussi des gestes sincères
d'entraide, de solidarité, de fraternité et de compassion, lorsque c'était
encore possible.
Comment ne pas être indigné par un tel acte monstrueux touchant des élus du
suffrage universel ?
Avec Nanterre, bouleversée, c'est la démocratie qui est frappée au coeur.
Permettez-moi d'associer tous les sénateurs aux milliers d'hommes et de femmes
qui ont, par leur présence silencieuse, par leurs témoignages, par des messages
d'amitié, exprimé leur tristesse et leur solidarité.
Le Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, ne
peut que s'incliner avec respect devant ces acteurs de la démocratie locale,
morts dans le noble exercice de leur mandat.
En notre nom à tous, j'ai été présent, aux côtés du Président de la République
et du Premier ministre, à la cérémonie officielle du 2 avril à Nanterre,
cérémonie qui fut digne, recueillie et pleine d'émotion.
Rendons aujourd'hui un juste hommage au courage et au dévouement de ces élus,
qui, s'ils avaient des opinions diverses, partageaient cependant la même
passion pour la défense de l'intérêt général. Je salue leur action au service
de leurs administrés, la sincérité de leur engagement politique et leur
dévouement au bien commun.
Le Sénat se devait aussi de renouveler l'expression de sa compassion aux
familles.
Notre sympathie va aux élus du conseil municipal, qui ont fait preuve d'un
remarquable sang-froid et d'une grande maîtrise.
Croyez, chère madame la députée-maire, à notre affectueux soutien dans ces
circonstances douloureuses, à notre entière solidarité et à notre profond
respect. Quel courage vous avez eu, vous-même et tous les membres du conseil
municipal !
En hommage aux victimes de cette tragédie, je vous propose, mes chers
collèges, d'observer une minute de silence.
(Mmes et MM. les membres du
Gouvernement, Mmes et MM. les sénateurs observent une minute de
silence.)
M. Jean-François Copé,
secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, porte-parole du
Gouvernement.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-François Copé,
secrétaire d'Etat.
Le mercredi 27 mars dernier, à une heure du matin,
alors que le conseil municipal de Nanterre finissait ses travaux, un individu
assis dans le public s'est levé et a brandi une arme à feu : il en a fait usage
sur l'ensemble des membres du conseil. Une première fois maîtrisé, il a réussi
à sortir une seconde arme et a fait feu à nouveau.
Le bilan de cette nuit du 27 mars est terrible : 8 morts, 19 blessés graves ;
autant de victimes du devoir, car c'est leur travail tardif, au service de
leurs concitoyens, qui a exposé ces élus, de façon inacceptable, à ce destin
tragique.
Malgré la mort de l'auteur du crime, qui s'est suicidé peu après les faits, le
procureur général de Nanterre a décidé de continuer l'enquête, dans l'intérêt
de toutes ces familles.
La vérité leur est due sur la façon dont Richard Durn, alors qu'il souffrait
de troubles psychologiques graves, a pu se procurer des armes et les conserver.
Cette question grave de la délivrance d'autorisations d'acquisition et de
détention d'armes doit absolument trouver une solution satisfaisante pour que
ne recommencent plus de pareils faits. Nous savons que, depuis le 27 mars,
d'autres drames se sont produits avec des armes à feu, qui ont provoqué
d'autres morts brutales et incompréhensibles. Des mesures de contrôle sur les
détentions d'armes seront prises pour prévenir ces phénomènes, qui, même s'ils
sont isolés, ne doivent plus pouvoir se reproduire.
Cette tragédie de la folie humaine est une blessure indélébile pour notre
République et pour la démocratie locale, touchée en plein coeur.
Le Gouvernement s'associe à l'hommage qui est rendu aujourd'hui au dévouement
et au courage de ces élus qui, par-delà leurs propres convictions politiques,
témoignent de la force de l'engagement citoyen des femmes et des hommes
politiques de ce pays au service de l'intérêt général.
Le Gouvernement s'associe à la douleur des familles des victimes, à celle du
conseil municipal de Nanterre et de son maire, Mme Fraysse. A tous, le
Gouvernement exprime sa profonde tristesse, sa solidarité et son immense
compassion.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, merci de vous associer, au nom du Gouvernement,
à l'hommage que le Sénat rend aux conseillers municipaux de Nanterre.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quelques
instants afin de témoigner notre tristesse et d'exprimer nos condoléances aux
familles des victimes.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures
trente.)