SEANCE DU 6 DECEMBRE 2001
M. le président.
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc.
Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les
ministres, mes chers collègues, depuis quelques jours, le Proche-Orient
s'embrase dangereusement. Par dizaines, des enfants, des femmes et des hommes
sans défense sont sacrifiés aveuglément, des familles sont meurtries à
jamais.
Des odieux attentats perpétrés à Jérusalem et Haïfa aux brutales représailles
ordonnées par le Premier ministre israélien, c'est bien l'idée même de la
recherche de la paix qui est remise en cause. Or, il n'y a pas de solution
militaire au conflit, il y a seulement une solution politique.
M. René-Pierre Signé.
Oui !
Mme Hélène Luc.
Alors que la plupart des dirigeants de ce monde, y compris George W. Bush,
reconnaissent le bien-fondé de la coexistence entre un Etat d'Israël dont la
sécurité devra être enfin garantie et un Etat palestinien dont le droit à
l'existence sera enfin reconnu, ce sont les extrémistes qui, aujourd'hui,
voudraient imposer leur stratégie suicidaire, dont personne ne peut prévoir les
conséquences.
La tentative d'éliminer Yasser Arafat de la scène politique serait lourde de
conséquence pour l'avenir. Comme vous l'avez déclaré hier soir, monsieur le
Premier ministre, ce n'est pas le bon choix.
La France, tout en exprimant sa solidarité avec le peuple israélien, s'honore
d'apporter un soutien nécessaire et remarqué à cet homme qui, dans un contexte
particulièrement difficile, représente la légitimité pour toute solution à la
crise actuelle.
Aujourd'hui, il faut agir avant qu'il ne soit trop tard afin que ces deux
peuples ne soient pas emportés par le vertige d'une vengeance sans fin.
La diplomatie française a pris une position qui la distingue et qui l'honore,
en appelant les deux parties à faire preuve de responsabilité.
M. René-Pierre Signé.
Le Premier ministre !
Mme Hélène Luc.
Monsieur le Premier ministre, la France devrait proposer et mettre en oeuvre
une initiative avec l'Europe, les Etats-Unis, en associant les Etats concernés
comme l'Egypte, pour l'envoi dans les plus brefs délais d'une force
d'interposition sous l'égide de l'ONU, pour arrêter la violence et permettre de
créer les conditions d'une reprise authentique des négociations. Elle peut
aboutir rapidement à une conférence internationale.
M. Dominique Braye.
La question !
Mme Hélène Luc.
Monsieur le Premier ministre, la France peut, par ses initiatives, donner une
chance à la paix. Elle a l'autorité morale, reconnue par les deux pays, pour y
contribuer. Elle devrait faire savoir immédiatement qu'elle est prête...
M. le président.
Posez votre question, madame Luc.
Mme Hélène Luc.
... à participer à une force d'interposition. La situation dramatique appelle
des décisions fortes.
M. Patrick Lassourd.
La question !
Mme Hélène Luc.
Monsieur le Premier ministre, je voudrais avoir votre avis sur cette
proposition.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti, madame Luc !
La parole est à M. le ministre.
M. Charles Josselin,
ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
Madame la
sénatrice, M. Hubert Védrine étant à Bruxelles - il vous prie d'excuser son
absence -, il m'a demandé de répondre à votre question.
Les attentats survenus samedi et dimanche à Jérusalem et à Haïfa ont provoqué
la révulsion, soulevé l'indignation. Rien ne peut justifier de tels actes
criminels. En outre, ce sont les espoirs de paix que les terroristes cherchent
à détruire.
La France a renouvelé ses appels aux dirigeants palestiniens et israéliens
pour engager le sursaut nécessaire qui mettra fin à l'effusion de sang. Tout
doit être fait pour juguler la violence kamikaze qu'a choisie le terrorisme
pour s'exprimer. Nous l'avons clairement demandé à l'autorité palestinienne,
mais la vraie urgence aujourd'hui, c'est d'aider l'autorité palestinienne à
mener concrètement la lutte contre le terrorisme.
Dès lors, toute politique, toute action visant à affaiblir Yasser Arafat et
l'autorité palestinienne ne peut qu'être source de dangers plus grands encore.
On ne peut à la fois leur demander d'agir et leur ôter les moyens d'agir.
C'est ensemble qu'Israéliens et Palestiniens doivent sortir de l'impasse,
c'est ensemble qu'il leur faut, en priorité, retrouver les ressorts d'une
coopération en matière de sécurité pour le bien de chacun. Si les parties ne
peuvent y parvenir seules, elles doivent accepter que leurs partenaires de la
communauté internationale les aident à surmonter les obstacles et les
oppositions internes qui existent dans chaque camp. Le réengagement américain,
soutenu par l'Union européenne, peut les aider à y parvenir. C'est le sens de
la coalition internationale pour la paix et la sécurité au Proche-Orient que
nous souhaitons voir se constituer avec tous les partenaires intéressés à la
recherche de la paix.
M. Roland Muzeau.
Sharon la refuse !
M. Charles Josselin,
ministre délégué.
La communauté internationale doit se mobiliser
davantage pour aider les parties à rompre la spirale de la violence : avec le
temps qui passe, au Proche-Orient, ce sont des morts supplémentaires et des
souffrances inutiles infligées aux populations.
Quant à l'éventualité d'une force de protection, la France soutient - elle l'a
soutenu dès le sommet de Gênes - un tel mécanisme de surveillance. Encore
faut-il que les parties en soient d'accord, ...
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur le ministre !
M. Charles Josselin,
ministre délégué.
... qu'elles se soient entendues pour faire cesser la
violence. Nous sommes en tout cas prêts à y contribuer. Tel est l'objectif
auquel je peux vous assurer que la France continue à travailler avec toute sa
détermination.
(Applaudissements sur les travées socialistes et sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
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