SEANCE DU 5 DECEMBRE 2001
M. le président.
I. - Il est ouvert au ministre de la défense, pour 2002, au titre des mesures
nouvelles sur les dépenses en capital des services militaires, des
autorisations de programme ainsi réparties :
« Titre V "Equipement" 12 482 020 000 EUR
« Titre VI "Subventions d'inves- tissement accordées par
l'Etat" 527 364 000 EUR
« Total 13 009 384 000 EUR
« II. - Il est ouvert aux ministres de la défense, pour 2002, au titre des
mesures nouvelles sur les dépenses en capital des services militaires, des
crédits de paiement ainsi répartis :
« Titre V : "Equipement" 2 127 544 000 EUR
« Titre VI : "Subventions d'inves- tissement accordées par
l'Etat" 340 363 000 EUR
« Total 2 467 907 000 EUR. »
L'amendement n° II-55 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi
libellé :
« Dans le II de cet article, réduire les crédits de paiement au titre des
mesures nouvelles sur les dépenses en capital des services militaires sur le
titre V de 122 000 000 euros. »
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jacques Floch,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement, par cet amendement de minoration des
crédits du titre V, assure le financement du précédent amendement.
Contrairement à ce qui a été affirmé par certains, il n'est pas dans
l'intention du Gouvernement de réduire les moyens disponibles pour financer les
armements. Je confirme au contraire que le montant des crédits de paiement qui
seront disponibles sur les titres V et VI dans le projet de budget pour 2002
s'élève à 12,396 milliards d'euros. Il faut y ajouter la mobilisation prévue en
construction budgétaire de reports de crédits à hauteur de 411 millions
d'euros, qui au total conduit à augmenter de 0,7 % les moyens disponibles du
titre V.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Maurice Blin,
rapporteur spécial.
Tout a été dit en termes excellents au cours des
minutes précédentes. Je n'ajouterai donc pas grand-chose pour justifier la
décision que nous allons devoir prendre concernant la fameuse disposition
contenue dans l'amendement n° II-55 rectifié. Je limiterai mon propos à deux
constats.
Le premier constat touche aux conséquences, que l'on n'a pas fini de mesurer,
de cette décision irréaliste qu'a été le passage aux 35 heures.
Nous vivons ce soir très exactement ce que nous pouvions redouter ; c'est la
gendarmerie qui va en faire les frais, mais c'est évidemment un problème
national qui est posé.
Comment notre pays va-t-il pouvoir, à la fois, maintenir son niveau
d'investissement, qui, seul, assure l'avenir, et satisfaire aux revendications
des uns et des autres en matière d'emploi ? Indiscutablement, nous sommes,
comme disait M. Masseret tout à l'heure, au pied du mur. Et ce mur, il faut le
regarder en face. Le Gouvernement ne l'a pas fait, il risque de le payer très
cher, et nous le ferons savoir à qui de droit.
Par ailleurs, je répondrai très cordialement à notre collègue M. Masseret, que
je fréquente depuis longtemps dans cette noble assemblée, que, si le
Gouvernement n'a pas utilisé la procédure bien connue des reports de crédits,
c'est parce qu'il en a usé et abusé au cours des dernières années et qu'il
vient encore, dans le projet de loi de finances pour 2002, d'en user. Trop,
c'est trop !
Par conséquent, il est obligé, pour la clarté des choses - il faut respecter
un minimum - de vous demander d'amputer une nouvelle fois les crédits
d'équipement au bénéfice de dépenses de fonctionnement. Nous avons toujours dit
« non » ! Redisons « non » clairement et fortement, aujourd'hui comme demain.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du
RPR.)
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° II-55 rectifié, repoussé par la
commission.
Mme Hélène Luc.
Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Je vais mettre aux voix les crédits figurant au titre V.
M. Serge Vinçon.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Vinçon.
M. Serge Vinçon.
Ce sont justement les crédits qui figurent au titre V et qui sont destinés à
l'équipement de nos forces qui posent un problème.
Je rappellerai que la loi de programmation militaire, votée en 1996, fixait à
86 milliards de francs le niveau des crédits d'équipement de nos armées, niveau
qui devait être réévalué du montant de l'inflation année après année. Ces
crédits devraient donc avoisiner 93 milliards, voire 95 milliards de francs
aujourd'hui.
Or, en 1998, le Gouvernement a procédé à une revue de programme en vue
d'abaisser le niveau des crédits d'équipement à 85 milliards de francs,
l'engagement étant pris de maintenir ce niveau jusqu'au terme de la loi de
programmation.
En réalité, que s'est-il passé ?
Dès 1998, ces crédits ont été réduits à 81 milliards de francs. En 1999, ils
furent certes réévalués, conformément à la loi de programmation, à 86 milliards
de francs. Mais, en 2000, ils n'atteignaient plus que 82,9 milliards de francs,
en 2001, 83,4 millions de francs et, cette année, ils s'élèvent à 82,9
milliards de francs. Autrement dit, le Gouvernement a lui-même décidé de ne pas
tenir le chiffre qu'il s'était fixé après la révision de la loi de
programmation militaire.
En conséquence, si l'on fait le bilan de ces six années de programmation, on
constate que, en gros, nous avons perdu en crédits l'équivalent d'une annuité
d'équipement, c'est-à-dire entre 80 milliards et 85 milliards de francs, ce qui
est évidemment inacceptable.
Il en résulte que l'activité opérationnelle de nos forces se trouve réduite -
et je suis gentil - à environ 65 % de sa capacité, c'est-à-dire que nos chars
circulent à 65 %, que nos avions volent à 65 %, que nos bateaux naviguent à 65
%, ce qui est en dessous de tous les critères de qualification opérationnelle
requis pour les forces occidentales de l'OTAN.
Qui plus est, comment pouvons-nous adopter ces crédits du titre V alors que,
dans une dizaine de jours, à l'occasion du projet de loi de finances
rectificative, ils vont encore être réduits de 2,4 milliards de francs ? Nous
ne pouvons pas entrer dans ce jeu de dupes qui consiste à réduire les crédits
au prétexte de satisfaire, dans l'immédiat à une mesure catégorielle relative
aux conditions de vie de nos militaires, alors que les uns et les autres nous
avons mis en garde le Gouvernement sur le risque que faisait courir ce que l'on
a appelé « l'esprit des 35 heures ». La commission des affaires étrangères, de
la défense et des forces armées, au printemps dernier, a justement rédigé un
rapport sur l'état d'esprit qui régnait dans certaines forces. Il n'y a pas que
la gendarmerie qui est concernée ; le sont aussi l'armée de terre, la marine et
l'aviation.
Nous ne pouvons donc admettre que, le 5 décembre, on nous présente un
amendement de réévaluation des crédits du titre III, alors que, depuis l'année
dernière, nous avons mis en garde le Gouvernement sur les risques que nous
sentions venir.
Dès lors, ce soir, nous ne pourrons pas voter les crédits du titre V, parce
qu'ils sont plus faibles que ce qui nous était annoncé et parce que nous ne
pouvons admettre la manoeuvre qui consiste à les diminuer aujourd'hui, alors
qu'ils le seront encore dans le collectif budgétaire, le 20 décembre prochain.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union
centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. Jacques Floch,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jacques Floch,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite simplement citer trois chiffres qui
devraient vous faire réfléchir, mesdames, messieurs les sénateurs.
En 1996, 61 milliards de francs de crédits ont été engagés ; en 2001, 120
milliards de francs de crédits ont été engagés ; sur l'ensemble de la loi de
programmation, cela fait 94 % des crédits de paiement.
M. Serge Vinçon,
rapporteur pour avis.
Non, 84 % !
M. Michel Caldaguès.
On vous l'a répété dix fois et on l'a prouvé : c'est un mensonge !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Un chiffre pour comparer,
monsieur le secrétaire d'Etat : vous trouverez plus de 100 milliards de francs
pour financer les 35 heures dans le privé !
(Protestations sur les travées
socialistes.)
M. Jean-Pierre Masseret.
C'est une obsession !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Non, c'est la réalité !
M. le président.
Je mets aux voix les crédits figurant au titre V.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président.
Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 290 |
Majorité absolue des suffrages | 146 |
Pour l'adoption | 89 |
Contre | 201 |
Je mets aux voix les crédits figurant au titre VI.
(Ces crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'article 32.
(L'article 32 n'est pas adopté.)
Article additionnel après l'article 64 ter