SEANCE DU 28 JUIN 2001
M. le président.
La parole est à M. Nogrix.
M. Philippe Nogrix.
Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, jamais je n'aurais dû être
amené à vous poser cette question lors de la séance des questions d'actualité.
Mais les décisions à prendre n'étant pas encore intervenues, il est devenu
urgent que vous nous donniez une réponse attendue, que vous nous fassiez part
d'une position claire et définitive sur la sortie du décret relatif à la
rémunération des heures passées en chambre de veille par des éducateurs des
associations financées, notamment, par les conseils généraux. Tout retard de
votre part ne ferait que compliquer les relations entre salariés, associations,
employeurs et bailleurs de fonds.
Jusqu'en 1995, tout allait bien. Les heures passées en chambre de veille
étaient rémunérées sur la base d'équivalences instituées par les conventions
collectives.
Mais, en 1995, le doute commença à s'installer avec un arrêt de la Cour de
cassation dont il ressortait que le fait de rester en permanence à la
disposition de l'employeur était constitutif d'un travail effectif et devait
être rémunéré au tarif heures pleines.
Le Gouvernement, tardivement, crut trouver la solution avec l'article 29 de la
loi « Aubry II » du 19 janvier 2000 qui validait les heures d'équivalences
instituées par des conventions collectives agréées dans les secteurs sanitaire
et social.
Cette loi définit, par ailleurs, le régime d'instauration des heures
d'équivalences qui requiert soit un accord de branche étendu, complété par un
décret simple, soit un décret en Conseil d'Etat.
Les conséquences financières de votre attentisme sont très lourdes. C'est
ainsi que, pour une association de Bretagne, le surcoût à financer s'élèverait
à 4,17 millions de francs sur la seule année 2000, soit plus de 20 millions de
francs pour un rappel de cinq ans.
Un jugement donnant raison au salarié peut aller jusqu'à ordonner le versement
de 300 000 francs de rappel de salaire. Cela ne pourra que conduire à des
dépôts de bilan ou à la mise en oeuvre de dispositifs alternatifs contraires
aux intérêts des associations et de leurs salariés.
Dans un courrier du 4 avril 2000, Mme Nicole Péry indique que la signature du
décret que je vous réclame aujourd'hui interviendra avant les vacances d'été.
De nombreux courriers vous sont parvenus sur le sujet depuis plus d'un an
maintenant.
Il faut, madame la ministre, arrêter le suspens qui n'a que trop duré.
D'autant que le projet de décret est rédigé et qu'il n'attend que votre
signature pour être adressé au Conseil d'Etat.
(Applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et du
RPR.)
M. le président.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Elisabeth Guigou,
ministre de l'emploi et de la solidarité.
Monsieur le sénateur, comme
vous l'avez rappelé, nous avons tenté de résoudre le problème que vous
mentionnez par la loi du 19 janvier 2000.
Mais il est vrai aussi que nous avons de multiples contentieux en cours. Des
décisions définitives ont été rendues. Portant sur des périodes anciennes,
puisqu'il s'agit d'actions engagées avant la publication de la loi du 19
janvier 2000, elles donnent d'ailleurs satisfaction aux salariés. Quant aux
contentieux postérieurs à la publication de cette loi, nous ne saurions
anticiper les jugements.
Compte tenu de cette incertitude, il est très difficile d'extrapoler les
incidences budgétaires prévisionnelles sur les budgets de l'ensemble des
établissements concernés.
Nous avons évidemment prévu de traiter les incidences budgétaires de ces
contentieux par la réglementation.
Nous sommes tout à fait conscients des difficultés que peut occasionner pour
certaines petites associations le poids de ces contentieux. C'est pourquoi nous
étudions, pour le champ des financements Etat et assurance-maladie, une
procédure qui permettra, d'une part, d'évaluer la charge exceptionnelle globale
et, d'autre part, les risques encourus par certains départements ou certaines
associations pour le maintien ou la poursuite de leurs activités.
L'objectif reste de mettre en place, dès que les décisions définitives seront
rendues - le plus rapidement possible donc - les compléments de dotation
ponctuels qui sont absolument nécessaires. Nous souhaitons que les autres
cofinanceurs s'inspirent de cette procédure.
Pour l'avenir, nous constatons que les partenaires sociaux n'ont pas réussi à
s'accorder sur un nouveau régime d'équivalence négocié au cours de l'année
2001. Aussi le Gouvernement a-t-il décidé de prendre, comme la loi l'y
autorise, un décret soumis à l'avis du Conseil d'Etat, afin de conforter la
légalité du dispositif conventionnel.
Toujours pour l'avenir, il apparaît souhaitable que les partenaires sociaux
puissent négocier, sur le plan national et sur le plan local, un accord
mutuellement satisfaisant qui prenne en compte les légitimes intérêts des
salariés sans générer des effets d'« aubaine » qui ne seraient pas compatibles
avec une bonne gestion des fonds publics.
(Applaudisements sur les travées
socialistes.)
OPACITÉ DES RELATIONS COMPTABLES
ENTRE L'ÉTAT ET LA SÉCURITE SOCIALE