SEANCE DU 12 JUIN 2001
M. le président.
« Art. 25. - Les ressources et les charges de trésorerie de l'Etat résultent
des opérations suivantes :
« 1° Le mouvement des fonds, disponibilités et encaisses de l'Etat ;
« 2° L'escompte et l'encaissement des traites, obligations et effets de toute
nature émis au profit de l'Etat ;
« 3° La gestion des fonds déposés par des correspondants et les opérations
faites pour leur compte ;
« 4° L'émission, la conversion, la gestion et le remboursement des emprunts et
autres dettes de l'Etat. Les ressources et les charges de trésorerie afférentes
à ces opérations incluent les primes et décotes à l'émission.
« Les ressources et les charges de trésorerie sont imputées à des comptes
distincts. En revanche, les ressources et les charges de nature budgétaire
résultant de l'exécution d'opérations de trésorerie sont imputées à des comptes
budgétaires dans les conditions prévues aux articles 2, 4 et 6. »
Je suis saisi de quatre amendements présentés par M. Lambert, au nom de la
commission.
L'amendement n° 75 vise, dans le premier alinéa et la seconde phrase du
cinquième alinéa (4°) de cet article, à remplacer (deux fois) le mot : «
charges » par le mot : « emplois ».
L'amendement n° 76 a pour objet, dans le deuxième alinéa (1°) de l'article 25,
de supprimer les mots : « fonds, » et les mots : « et encaisses ».
L'amendement n° 77 tend, dans le troisième alinéa (2°) de l'article 25, à
supprimer les mots : « traites, obligations et ».
L'amendement n° 78 a pour objet, à la fin du quatrième alinéa (3°) de
l'article 25, de supprimer les mots : « et les opérations faites pour leur
compte ».
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre ces quatre amendements.
M. Alain Lambert,
rapporteur.
L'article 25 que nous examinons traite des opérations de
trésorerie. La frontière qui a été tracée par l'Assemblée nationale entre les
opérations budgétaires et les opérations de trésorerie, et qui sera précisée à
l'article 31, apparaît satisfaisante. Dès lors, les quatre amendements de la
commission sont rédactionnels.
Le premier, l'amendement n° 75, vise à préciser que les opérations de
trésorerie sont tenues selon les principes de la comptabilité d'engagement.
Le deuxième, l'amendement n° 76, est un amendement que l'on pourrait qualifier
de modernisation, les distinctions faites par l'énumération de 1959 n'ayant
plus beaucoup de sens aujourd'hui.
Le troisième, l'amendement n° 77, est également un amendement de modernisation
pour les mêmes raisons.
Enfin, le dernier, l'amendement n° 78, est de nature rédactionnelle : la
gestion des fonds recouvre à la fois celle de la trésorerie de l'Etat et les
opérations faites pour le compte des correspondants, qui sont, bien sûr, ceux
du Trésor.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 75 à 78 ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement est favorable à ces quatre
amendements.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 75, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 76, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 77, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 78, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 262 rectifié, MM. Fréville, Arthuis et Badré proposent,
après le cinquième alinéa de l'article 25, d'insérer un alinéa ainsi rédigé
:
« ... Les avances aux collectivités locales et à certains organismes sur le
montant des impositions leur revenant. »
La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville.
Cet amendement pèse lourd, environ 300 milliards de francs !
La rédaction de la loi organique est intéressante en ce sens qu'elle fixe la
liste des opérations de trésorerie, ce qui n'existait pas antérieurement. J'en
déduis que toutes les opérations qui ne sont pas classées comme opérations de
trésorerie sont, par nature, des opérations budgétaires.
Qu'en est-il des avances aux collectivités locales sur le montant de leurs
impositions ?
Actuellement retracées en opérations temporaires dans le budget, elles
gonflent ce dernier, à la fois en recettes et en dépenses, d'une masse de
l'ordre de 300 milliards de francs. Leur solde peut faire varier chaque année
le déficit budgétaire de plus ou moins 10 milliards de francs ! Je ne vais pas
rappeler tous les antécédents de ces variations, que nous connaissons bien les
uns et les autres.
Je me pose vraiment la question : faut-il maintenir les avances sur
impositions locales dans le budget ? Ne vaudrait-il pas mieux les classer en
opérations de trésorerie ? En effet, ce sont normalement des opérations à moins
d'un an. Je sais très bien qu'il peut survenir des décalages importants, qui
portent sur plusieurs années et que le « culot » - je crois que c'est le terme
du compte d'avance - est actuellement de l'ordre de 100 milliards de francs. Il
s'agit donc de sommes importantes.
Maintenant que la commission des finances nous a proposé la suppression de la
distinction entre les opérations définitives et les opérations temporaires dans
les articles 2 et 4, il ne sera plus possible d'isoler, dans l'article
d'équilibre, ces avances sur impositions locales. Elles seront fondues avec
toutes les autres opérations en capital, en conséquence des votes
antérieurs.
Je préférerais - c'est une suggestion - que l'on tranche dans le vif et que
l'on considère que ce sont des opérations de trésorerie.
Je trouverais un avantage : dans l'article suivant, nous verrons que les
dépôts des collectivités locales comme correspondants du Trésor sont des
ressources de trésorerie. J'ai toujours pensé qu'il y avait, même si ce n'est
pas vrai à l'échelle microéconomique, une certaine corrélation entre le fait
que les collectivités locales placent gratuitement, sans intérêts, leur
trésorerie auprès de l'Etat et qu'en contrepartie les avances sur imposition
locale ne donnent pas lieu à rémunération de la part des collectivités
locales.
M. Joël Bourdin.
C'est de bon sens !
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert,
rapporteur.
La commission considère que cet amendement est satisfait.
En effet, le 3° de l'article 25 prévoit déjà que les ressources et les charges
de trésorerie résultent notamment de la gestion des fonds déposés par des
correspondants, ce qui comprend, selon nous, les avances aux collectivités
territoriales et à certains organismes sur le montant des impositions leur
revenant.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Cet amendement traduit deux préoccupations : d'une
part, les avances se traduiraient par un gonflement des masses budgétaires ;
d'autre part, les avances porteraient intérêt.
Je souhaite lever ces deux inquiétudes.
En effet, les avances pourront être retracées dans des comptes de concours
financiers sans porter intérêt. Il n'est pas dans l'intention du Gouvernement
de facturer un intérêt sur les avances faites aux collectivités locales, je
puis vous rassurer sur ce point.
Par ailleurs, le fait de retracer les avances ne se traduit que par un
gonflement apparent des masses budgétaires puisque, au sein du tableau
d'équilibre tel qu'il est présenté aujourd'hui, les recettes et les dépenses
des comptes d'avance sont parfaitement isolées, on ne peut pas les confondre
avec celles du budget général.
Dès lors, je dois dire que la proposition consistant à débudgétiser les
avances aux collectivités locales qui est faite par M. Fréville m'étonne un
peu, en effet, il nous propose rarement des opérations de débudgétisation.
Le fait de débudgétiser ces avances me paraît porter atteinte à un principe
auquel je tiens beaucoup, comme M. le rapporteur : celui de la sincérité et de
la transparence budgétaire.
Il me semble souhaitable que le Parlement soit pleinement informé des
relations financières entre l'Etat et les collectivités locales. Je crois que
la présentation actuelle du budget de l'Etat contribue aujourd'hui et devra y
contribuer demain.
Telles sont les raisons pour lesquelles je souhaiterais, monsieur le sénateur,
que vous retiriez cet amendement.
M. le président.
Monsieur Fréville, l'amendement est-il maintenu ?
M. Yves Fréville.
Je suis assez gêné parce que Mme le secrétaire d'Etat me demande de le retirer
mais M. le président de la commission des finances me dit qu'il est satisfait.
Donc, en votant l'amendement de la commission, nous voterons bien, comme je le
souhaite, que les avances seront, pour employer le terme de Mme le secrétaire
d'Etat, débudgétisées.
Dans le doute, je préfère maintenir mon amendement.
M. Michel Charasse.
Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président.
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse.
Réflexion faite, je trouve que la rédaction initiale est meilleure.
La gestion des fonds, cela dit bien ce que cela veut dire, alors que les
avances que vous visez dans votre amendement n° 262 rectifié, mon cher
collègue, constituent en fait un mélange des genres.
Vous classez sous la rubrique « ressources et charges de trésorerie » des
opérations qui mélangent des dépenses et des mouvements de trésorerie, des
opérations qui sont blanches pour l'Etat et d'autres qui ne le sont pas.
Comme vous le savez, mes chers collègues, 90 % au moins du produit des impôts
locaux - si je prends juste les impôts directs - sont en fait gagés par des
recouvrements ; il y donc là effectivement une avance de trésorerie. Mais elle
est compensée ensuite par une recette. On peut considérer que l'avance de
trésorerie n'est pas plus forte que celle que l'Etat fait pour son propre
compte en attendant que les impôts rentrent en fin d'année en faisant les
dépenses en début d'année.
En revanche, il y a une dépense nette : ce compte retrace les charges
résultant de la garantie de versement aux collectivités locales des sommes
qu'elles ont inscrites à leur budget, que celles-ci soient recouvrées ou non
par l'Etat. Comme vous le savez, lorsque, dans le compte d'avance, on inscrit
une recette de 100, 100 doivent être reversés. Si l'on n'encaisse que 90 parce
que les contribuables ne paient pas...
M. Yves Fréville.
Il y a une admission en non-valeur.
M. Michel Charasse.
Certes, mais il en résulte une dépense dans un premier temps : avant de la
traduire en admission en non-valeur, il faut un certain temps. L'avance de
trésorerie peut se poursuivre trois, quatre ou cinq ans, jusqu'à ce que le
recouvrement intervienne - s'il intervient - si on retrouve le contribuable...
Dans cette attente, il s'agit d'une véritable charge.
Pour ces raisons, la formulation que préfère M. le rapporteur, « gestion des
fonds déposés », me paraît de beaucoup la meilleure. C'est la raison pour
laquelle je voterai contre l'amendement n° 262 rectifié.
De toute façon, je pense que M. Fréville a satisfaction.
Cette disposition, en fait, polluerait l'esprit et la rédaction de l'article
25.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Le débat qui vient d'avoir lieu ne me semble pas très
clair.
M. Lambert a dit que l'amendement de M. Fréville était satisfait par l'article
25. Il me semblait qu'il était satisfait par l'article 24 - c'est ce que
j'avais indiqué dans une précédente intervention - qui concerne les comptes de
concours financiers.
Je ne sais pas si on peut réconcilier les approches. Mais il subsiste un doute
dans mon esprit. Je pense que nous pourrons résoudre cette question
ultérieurement.
M. Alain Lambert,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert,
rapporteur.
Je considère que l'amendement n° 262 rectifié est satisfait.
J'y suis donc défavorable.
M. le président.
Monsieur Fréville, l'amendement n° 262 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Fréville.
Dans le doute, je préfère le maintenir.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 262 rectifié, repoussé par la commission et
par le Gouvernement.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par
assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)
M. le président.
Par amendement n° 79, M. Lambert, au nom de la commission des finances,
propose de supprimer le dernier alinéa de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Lambert,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination avec le regroupement des
dispositions comptables dans un nouveau chapitre, après l'article 26.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 79, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 25, modifié.
(L'article 25 est adopté.)
Article 26