SEANCE DU 6 FEVRIER 2001
M. le président.
La parole est à M. Vissac, auteur de la question n° 971, adressée à M. le
ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Guy Vissac.
Monsieur le ministre, j'ai bien conscience que le problème du traitement des
boues des stations d'épuration fait partie de vos préoccupations et de celles
de Mme le ministre de l'environnement, mais je crois néanmoins utile d'y
insister, car il se pose avec de plus en plus d'acuité et entraîne pour les
élus des collectivités d'importantes difficultés de gestion.
Les plans d'épandage des boues sur les terres agricoles sont remis en cause
dans de nombreux cas. En les refusant, les agriculteurs expriment leurs
inquiétudes, voire leur opposition à l'utilisation de ces déchets en vue
d'amender leurs terres. Ils estiment que les boues peuvent contenir des
éléments nocifs pour la qualité des produits cultivés.
Des dispositifs d'analyse des boues et des sols avant épandage peuvent éviter
les risques. Ils permettent éventuellement de démontrer la présence d'éléments
nocifs ou l'existence de charges d'amendement surabondantes autant pour le
produit que pour la terre. Il faut cependant déplorer que ces méthodes ne
soient pas uniformément utilisées dans tous les départements, voire parfois
dans les différents points d'un même département.
Ne serait-il pas nécessaire d'apporter des solutions au sein de ce qui est,
actuellement, un débat ouvert au cas par cas ?
Le problème du traitement des boues embarrasse aussi bien les agriculteurs que
les responsables des collectivités.
Il est temps de rapprocher les points de vue et d'établir légalement des
règles concernant les méthodes ainsi que des normes qualitatives et
quantitatives.
A côté de l'épandage, il existe d'autres solutions, notamment
l'incinération.
Monsieur le ministre, il me paraît urgent de répondre aux préoccupations des
élus et des agriculteurs sur ce problème, qui présente à la fois des aspects
agricoles et des aspects environnementaux.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Jean Glavany,
ministre de l'agriculture et de la pêche.
Monsieur le sénateur, votre
question est tout à fait actuelle mais elle est aussi quasi éternelle.
Quand les agriculteurs épandent sur leurs terres les boues des stations
d'épuration, ils enrichissent leur sol, et l'on peut donc estimer que les
collectivités locales leur rendent service en leur livrant ces boues
puisqu'elles leur permettent de disposer d'un facteur d'enrichissement
agronomique à bon marché. Réciproquement, les agriculteurs rendent eux aussi un
vrai service aux collectivités locales, d'autant que celles-ci, pour traiter
ces boues des stations d'épuration, n'ont aujourd'hui que trois solutions à
leur disposition : l'épandage, l'incinération ou la mise en décharge. Il
convient toutefois de rappeler que, à partir de 2002, la mise en décharge sera
réservée aux seuls déchets dits « ultimes » ; les collectivités locales
n'auront donc plus alors le choix qu'entre l'incinération et l'épandage.
Il s'agit d'un pacte entre les collectivités locales et les agriculteurs,
l'épandage devant rendre service à chacun. Ce pacte ne peut continuer à
fonctionner que sur le mode de la confiance, vous avez eu raison, monsieur le
sénateur, de le souligner. Il n'y a pas de moyens légaux d'imposer aux
agriculteurs de rendre service aux collectivités locales en épandant les boues,
et je vois mal le législateur intervenir en ce sens. Par conséquent, quand des
agriculteurs refusent d'épandre les boues, notamment parce que certaines
filières en aval rejettent les produits cultivés sur des terres ayant reçu des
épandages, on ne peut aller contre leur décision, et on ne peut pas davantage
obliger les professionnels du secteur agroalimentaire à accepter de tels
produits.
Tout doit donc être fondé sur la confiance, et il faut en particulier que les
collectivités locales soient capables de convaincre les agriculteurs de
continuer à pratiquer l'épandage. Pour cela, il faut non seulement que le
dialogue se poursuive, mais aussi que des garanties soient données aux
agriculteurs.
Le dialogue, nous l'avons organiser au sein du comité national qui a été mis
en place en 1998 et dont le travail a permis, je crois, d'aborder certains
problèmes et de débloquer des situations qui étaient très tendues sur le
terrain.
S'agissant des garanties, il faut en particulier veiller à ce que les
collectivités locales s'engagent à livrer des boues sans danger et fassent donc
analyser les boues issues de leurs stations d'épuration. Les agriculteurs
auront alors l'assurance que le service qu'ils rendent aux collectivités
locales est sans risque pour eux.
C'est donc par le dialogue et la concertation en même temps que par le biais
de garanties données aux agriculteurs qu'il restera possible de recourir à
l'épandage. Mais si cette pratique devait se réduire, vous l'avez dit, monsieur
le sénateur, les collectivités locales seraient contraintes de multiplier les
investissements pour assurer l'incinération des boues de stations d'épuration,
ce qui représenterait pour elles un surcoût considérable.
Au fond, nous sommes dans une situation simple et quasi universelle. Dans nos
sociétés développées, les collectivités publiques au sens large se sont
longtemps totalement désintéressées du traitement de leurs déchets.
Aujourd'hui, elles sont au pied du mur : elles se rendent compte que le
traitement de leurs déchets exige d'elles une implication croissante, et les
agriculteurs, qui leur rendaient gratuitement service jusqu'à maintenant ne
pourront pas continuer à le faire sans garantie de leur part.
Le dialogue doit se poursuivre, la question reste pendante et j'aurais
sûrement l'occasion de revenir pour répondre à vos questions.
M. Guy Vissac.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Vissac.
M. Guy Vissac.
Je tiens tout d'abord à remercier M. le ministre de sa présence : la question
de l'épandage des boues relève du ministère de l'aménagement du territoire et
de l'environnement, mais aussi du ministère de l'agriculture.
Il est vrai que des garanties sont nécessaires afin de créer un climat de
confiance entre les deux partenaires que sont les collectivités locales et les
agriculteurs. Sans qu'il s'agisse nécessairement d'une loi, une règle générale
instituant l'analyse tant des boues que des terres qui les reçoivent serait
peut-être de nature à instaurer définitivement la confiance entre les
partenaires.
Aujourd'hui, même lorsque les boues de stations d'épuration sont analysées,
les collectivités locales sont confrontées à un refus des plans d'épandage qui
s'explique en fait par l'appréhension que provoquent les produits issus des
terres épandées. Ces produits, nous disent les agriculteurs, ne seront pas
payés au même prix que les autres.
Quoi qu'il en soit, monsieur le ministre, puisque vous m'invitez à revenir sur
cette question, je serai au rendez-vous.
AIDES FINANCIÈRES AUX HANDICAPÉS