SEANCE DU 11 DECEMBRE 2000
M. le président.
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° II-27, MM. Ostermann, Besse, Braun, Cazalet, Chaumont,
Gaillard, Joyandet, Trégouët, Cornu, Martin, Vasselle, Murat, Rispat, Neuwirth,
Darcos, Fournier, de Broissia, Vial, Leclerc, Schosteck, Lanier et Mme Olin
proposent d'insérer, après l'article 48
undecies,
un article additionnel
ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 244
sexies
du code général des impôts, il est
inséré un article additionnel ainsi rédigé :
«
Art. ...
- Les entreprises soumises à un régime réel d'imposition
dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux peuvent déduire
chaque année de leur bénéfice une somme plafonnée soit à 15 000 francs, soit à
35 % de ce bénéfice dans la limite de 52 500 francs. Ce plafond est majoré de
20 % de la fraction de bénéfice comprise entre 150 000 francs et 500 000
francs.
« Cette déduction doit être utilisée dans les cinq années qui suivent celle de
sa réalisation pour l'acquisition et la création d'immobilisations
amortissables strictement nécessaires à l'activité. La base d'amortissement de
l'acquisition ou de la création d'immobilisations amortissables doit être
réduite à due concurrence.
« Lorsqu'elle n'est pas utilisée conformément à son objet, la déduction est
rapportée aux résultats de la cinquième année suivant sa réalisation. »
« II. - Les dispositions du I ci-dessus sont applicables pour l'imposition des
résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2001.
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat de l'application des I
et II ci-dessus, sont compensées à due concurrence par la création de taxes
additionnelles aux droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général
des impôts. »
Par amendement n° II-58, MM. Grignon, Badré, Bécot, Fréville, Hérisson,
Hoeffel, Richert, Machet et les membres du groupe de l'Union centriste
proposent d'insérer, après l'article 47, un article additionnel ainsi rédigé
:
« I. - Après l'article 244
sexies
du code général des impôts, il est
inséré un article additionnel ainsi rédigé :
«
Art. ...
- Les entreprises soumises à un régime réel d'imposition
dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux peuvent déduire
chaque année de leur bénéfice une somme plafonnée soit à 15 000 francs, soit à
35 % de ce bénéfice dans la limite de 52 500 francs. Ce plafond est majoré de
20 % de la fraction de bénéfice comprise entre 150 000 francs et 500 000
francs.
« Cette déduction doit être utilisée dans les cinq années qui suivent celle de
sa réalisation pour l'acquisition et la création d'immobilisations
amortissables strictement nécessaires à l'activité.
« La base d'amortissement de l'acquisition ou de la création d'immobilisations
amortissables doit être réduite à due concurrence.
« Lorsqu'elle n'est pas utilisée conformément à son objet, la déduction est
rapportée aux résultats de la cinquième année suivant sa réalisation. »
« II. - Les dispositions du I ci-dessus sont applicables pour l'imposition des
résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2001.
« III. - Les pertes de recettes résultant pour l'Etat du I et du II ci-dessus
sont compensées à due concurrence par la création de taxes additionnelles aux
droits prévus aux articles 403, 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Cazalet, pour présenter l'amendement n° II-27.
M. Auguste Cazalet.
Cet amendement a pour objet de favoriser l'investissement dans les petites
entreprises.
La majeure partie des petites entreprises sont des entreprises individuelles
soumises à l'impôt sur le revenu dont le régime fiscal et la capacité
d'autofinancement limitée ne favorisent pas l'investissement.
Or, des incitations fiscales en faveur de l'investissement sont prévues tant
pour les PME sous forme sociétaire que pour les exploitants agricoles.
Une incitation fiscale comme celle qui existe dans l'agriculture depuis 1986
serait de nature à encourager l'investissement dans les nouvelles technologies,
la modernisation des biens productifs et à améliorer la structure financière
des entreprises individuelles. De plus, il s'agit d'une mesure d'équité par
rapport aux entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, dont le taux
d'imposition devrait être abaissé.
C'est pourquoi il est nécessaire d'étendre aux entreprises individuelles le
mécanisme de déduction fiscale pour un investissement autorisé par l'article 72
D du code général des impôts. Il convient de noter que la mesure préconisée ne
va pas aussi loin que ce qui existe pour les agriculteurs puisqu'elle se limite
aux immobilisations amortissables et ne porte pas sur les stocks.
Il faut préciser que ce mécanisme sera neutre en matière de rentrées fiscales
pour chaque période de cinq ans. En effet, il s'agit seulement d'une opération
d'amortissement anticipé puisque la déduction pratiquée réduit d'autant la base
d'amortissement.
D'autre part, ce mécanisme fait l'objet d'une réintégration de la déduction si
celle-ci ne donne pas effectivement lieu à une opération d'investissement dans
les cinq années qui suivent.
M. le président.
La parole est à M. Fréville, pour défendre l'amendement n° II-58.
M. Yves Fréville.
Je ne reprendrai pas l'excellente argumentation de notre collègue Auguste
Cazalet, notre amendement, dans son esprit et dans sa lettre, étant très proche
du sien.
Je formulerai simplement deux remarques.
Premièrement, nous aurons tout intérêt, mes chers collègues, à rapprocher
progressivement la fiscalité agricole et la fiscalité générale des entreprises
individuelles. Je pense qu'il serait intéressant de prendre exemple sur la
fiscalité agricole pour préciser la fiscalité applicable à d'autres types
d'entreprises individuelles en matière d'impôt sur le revenu.
Deuxièmement, je suis favorable, vous le savez bien, mes chers collègues, à ce
que l'on se rapproche le plus possible de la liberté d'amortissement. La mesure
proposée va dans ce sens ; c'est pourquoi je l'ai défendue.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s II-27 et II-58 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission est favorable - elle l'a montré par une
série d'amendements qu'elle a déposés en première partie du projet de loi de
finances - à l'allégement de la fiscalité sur les entreprises. Elle partage
donc les objectifs poursuivis par les auteurs de ces amendements.
Toutefois, le rapprochement du régime des bénéfices industriels et commerciaux
de celui des exploitants agricoles mérite une étude plus globale et plus
attentive car il est bien d'autres sujets que celui du régime fiscal de
l'investissement. Il faudrait sans doute s'interroger sur une éventuelle
fragilisation de certains éléments du régime de la fiscalité des exploitants
agricoles si l'on devait établir, dans un souci complètement cartésien, un
strict parallélisme.
Par ailleurs, je me demandais en vous écoutant, mes chers collègues, si la
bonne solution pour ces exploitations individuelles n'était pas une véritable
baisse des taux de l'impôt sur le revenu, car nous parlons d'exploitations
individuelles assujetties à l'impôt sur le revenu.
Faut-il multiplier les dispositifs complexes de déduction, d'imputation,
d'incitation fiscales ? N'est-il pas préférable, à l'instar de ce que font nos
amis et partenaires allemands, d'engager une baisse massive, rapide, des taux
de l'impôt sur le revenu dans l'objectif d'améliorer les conditions
d'exploitation des entreprises ?
Mes chers collègues, je le répète, cette mesure exige une étude plus
approfondie, notamment avec les milieux professionnels concernés. Je vous
suggère donc, après avoir entendu l'avis du Gouvernement, de retirer ces
amendements.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s II-27 et II-58 ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'est pas favorable à ces amendements,
pas plus qu'il ne l'était à celui qui avait été déposé sur le sujet lors de
l'examen de la première partie du projet de loi de finances.
Tout d'abord, je tiens à confirmer à M. le rapporteur général ce que j'avais
eu l'occasion de lui dire au cours de notre débat de première partie,
c'est-à-dire que le coût de cette disposition est élevé puisqu'elle est évaluée
à 8,5 millliards de francs. J'en profite pour lui préciser que mes services
tiennent les éléments du chiffrage à son entière disposition, ainsi qu'à celle
de la commission des finances.
Cela montre que les questions de rapprochement entre la fiscalité agricole et
la fiscalité des entreprises individuelles peut sans doute se concevoir, mais
que tout dépend du sens dans lequel on entend le rapprochement.
J'en viens à la proposition même.
La déduction ficale qui est accordée aux agricultueurs se justifie par les
caractéristiques particulières qui s'attachent à la production de ce secteur :
faiblesse du chiffre d'affaires par rapport au capital investi, importance des
éléments non amortissables et, surtout, irrégularité des revenus.
Etendre la mesure à cette catégorie particulière que sont les entreprises
artisanales priverait la déduction accordée au secteur agricole de sa
spécificité.
En outre, une telle mesure serait contraire aux principes comptables et
fiscaux en matière de provisions. Comme l'a fort bien fait M. le rapporteur
général, je rappellerai que ce n'est pas au travers d'un mécanisme de
provisions que l'on abaisse les taux d'impositon.
Enfin, pour conclure, j'ajouterai que les mesures d'allégement en matière
d'impôt sur le revenu qui sont contenues dans le plan du Gouvernement ont aussi
pour objet de réduire le taux d'imposition des entreprises individuelles et
donc de renforcer leur capacité de financement.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Ce n'est pas assez !
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Nous avons déjà eu, le débat, monsieur le rapporteur
général. Nous nous rejoignons sur les orientations mais nous divergeons sur
l'intensité et sur le calendrier, si je puis résumer ainsi nos positions
respectives.
Pour l'instant, je souhaiterais que ces amendements soient retirés.
M. le président.
Monsieur Cazalet, maintenez-vous votre amendement ?
M. Auguste Cazalet.
Je vais accéder au souhait de la commission des finances et le retirer.
M. le président.
L'amendement n° II-27 est retiré.
L'amendement n° II-58 est-il maintenu, monsieur Fréville ?
M. Yves Fréville.
Non, monsieur le président, je le retire également.
M. le président.
L'amendement n° II-58 est retiré.
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