SEANCE DU 10 OCTOBRE 2000
M. le président.
La parole est à M. Bizet, auteur de la question n° 851, adressée à M. le
ministre des affaires étrangères.
M. Jean Bizet.
Ma question vise à interpeller M. le ministre des affaires étrangères sur le
financement de la politique agricole commune. Définie dans le cadre du Conseil
européen de Berlin, cette politique semble aujourd'hui, selon les craintes
émises par le commissaire en charge de l'agriculture, M. Franz Fischler, remise
en cause par le projet de la Commission européenne de financer la
reconstruction et le développement des Balkans entre 2001 et 2003, en partie
grâce à une réduction des dépenses prévues pour le fonctionnement des marchés
agricoles.
Cette réduction de l'ordre de 300 millions d'euros serait assurée par une
réorganisation du marché du sucre. Je suis étonné de constater qu'une
réorganisation d'une telle ampleur de ce marché n'ait pas été réalisée plut
tôt, à moins que les économies ainsi dégagées ne se traduisent d'une manière ou
d'une autre par une diminution du soutien communautaire global, les engagements
pris lors du Conseil européen de Berlin risquant dans ce cas de ne plus être
respectés.
On peut constater une fois de plus, dans cette affaire, le manque de cohérence
et de coordination des travaux du Conseil. Il est difficilement acceptable que
les ministres des affaires étrangères prennent des décisions apparemment sans
se soucier de leur financement, et que l'on propose ensuite aux ministres des
finances de remettre en cause un accord global sur la politique agricole
commune qui a été longuement et difficilement négocié.
Ce manque de cohérence est également un motif d'inquiétude si l'on songe à la
reprise des négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.
La « clause de paix » qui protège l'agriculture européenne va s'éteindre en
2003. Ce n'est plus si loin ! Et si les négociations continuent à piétiner,
l'Union européenne risque d'en aborder la phase finale en position très
défavorable, car elle serait alors obligée de négocier sous la menace d'un
contentieux lourd de nombreux risques.
Je voudrais obtenir l'assurance, monsieur le secrétaire d'Etat, que le
Gouvernement a bien l'intention de faire respecter les décisions prises à
Berlin et que ces décisions restent bien la base de la position communautaire
dans les négociations de l'OMC.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Paul,
secrétaire d'Etat à l'outre-mer.
Monsieur le sénateur, je voudrais, au
nom du Gouvernement et plus particulièrement de mon collège Hubert Védrine,
vous rassurer.
Comme vous l'avez relevé, la Commission européenne a en effet proposé un
effort financier important de l'Union européenne en faveur de la région des
Balkans pour la période 2001-2006. Cette contribution suppose, selon la
Commission, de réviser les perspectives financières adoptées au Conseil
européen de Berlin, en mars 1999, et qui lient aujourd'hui le Conseil, la
Commission et le Parlement européen.
Il est clair - je tiens à le souligner ici - que le gouvernement français ne
saurait accepter que le financement de la reconstruction et du développement
des Balkans puisse être assuré, comme le propose la Commission, par un
prélèvement à hauteur de 300 millions d'euros sur les dépenses agricoles. Les
autorités françaises s'opposent donc à cette proposition de révision des
perspectives financières et l'ont déjà indiqué très clairement et à plusieurs
reprises à Bruxelles. Les partenaires de la France partagent également la
volonté de cette dernière de ne pas remettre en cause les règles de discipline
budgétaire définies à Berlin et considèrent que l'effort supplémentaire à
fournir en faveur des Balkans peut être financé sans modifier les plafonds de
crédits arrêtés l'an dernier.
Le Gouvernement a donc bien l'intention de faire respecter les décisions
adoptées en 1999 sur la programmation budgétaire prévue pour les années 2000 à
2006 qui couvrent, notamment, le financement de la réforme de la politique
agricole commune. Les dépenses agricoles, y compris celles de l'organisation
commune du marché du sucre, évolueront dans le cadre des enveloppes fixées à
Berlin. Ces décisions restent également le fondement de la position
communautaire dans les négociations de l'Organisation mondiale du commerce.
M. Jean Bizet.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet.
Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de ces précisions dont je
prends bonne note. Je souhaite vivement qu'il ne soit pas procédé à une
ponction de 300 millions d'euros sur le budget de la politique agricole
commune, car ce serait dramatique pour l'ensemble des négociations et pour les
agriculteurs de notre pays.
J'avoue que cela me fait penser à ce qui s'est passé lors des accords de Blair
House en 1992 : au cours desquels la Commission ayant outrepassé les missions
qui lui avaient été confiées, nous restons depuis lors dépendants, s'agissant
des protéines végétales, à hauteur de quelque 76 %.
Néanmoins, monsieur le secrétaire d'Etat, je prends bonne note de vos
informations et je vous en remercie.
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