SEANCE DU 5 OCTOBRE 2000
M. le président.
La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues,
ma question s'adresse à M. le ministre des affairesétrangères.
Nous voulons, après d'autres, exprimer notre immense émotion et notre
indignation face à la violence insensée de la répression menée par l'armée
israélienne à l'encontre des manifestants de la population et palestiniens.
Après une semaine, le bilan est accablant : plus de soixante-dix morts et près
de 2 000 blessés, essentiellement palestiniens.
Ne nous leurrons pas sur les raisons profondes de cette explosion. Au-delà de
la provocation ayant mis le feu aux poudres, elle résulte du désespoir des
Palestiniens, en particulier des jeunes, de voir bafouer leur dignité et leurs
droits légitimes. Malgré des avancées, les accords signés ne sont en effet que
très partiellement appliqués, et les résolutions internationales encore
ignorées.
La situation est extrêmement grave - vous l'avez souligné, monsieur le
ministre - et peut à tout moment basculer dans un embrasement tragique.
Il est urgent de trouver une solution à ce désastre humain et politique, et
l'Union européenne, aujourd'hui présidée par la France, a la responsabilité de
prendre une initiative politique forte. Elle doit organiser prochainement une
conférence pour renforcer le partenariat euro-méditerranéen. Elle a les moyens
d'agir.
Dans ce contexte, monsieur le ministre, que compte faire l'Union européenne,
premièrement, pour obtenir immédiatement l'arrêt des tirs de l'armée
israélienne et son retrait des villes et des territoires palestiniens ;
deuxièmement, pour contribuer à la mise en place d'une commission d'enquête
internationale sous l'égide des Nations unies ; troisièmement, pour obtenir
rapidement une avancée politique significative vers la paix, redonnant à
l'ensemble du peuple palestinien l'espoir de voir se concrétiser son droit à un
Etat viable, avec Jérusalem-Est comme capitale ?
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. Charles Ceccaldi-Raynaud.
C'est un discours anti-israélien !
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Hubert Védrine,
ministre des affaires étrangères.
Madame la sénatrice, vous connaissez
comme moi la situation de fond dans la région et vous savez quelle est la
position des pays membres de l'Union européenne.
Vous me demandez ce que fait l'Union européenne. Quand nous avons à nous
exprimer en tant que président de l'Union en exercice, nous faisons des
propositions que nos partenaires amendent, et nous aboutissons à une expression
collective au nom des Quinze ; mais vous conviendrez, en examinant ces
propositions, qu'elles n'ont pas la même force que celles que nous avons eu
l'occasion de formuler au nom de la France, parce que les Quinze n'ont pas tous
la même position sur ce sujet. Certes, tout le monde est pour la paix, bien
sûr, mais, sur les modalités, le mode d'expression, les initiatives à prendre
ou à ne pas prendre, les Quinze ne sont pas tout à fait d'accord entre eux.
C'est pourquoi, dans la réalité des choses, aux questions justifiées que vous
avez posées à la fin de votre intervention, c'est plutôt la France, les
Etats-Unis - qui sont depuis cinquante ans au coeur du jeu dans la région -
ainsi que l'Egypte ou d'autres pays, qui ont eu jusqu'ici la possibilité de
répondre.
Ces questions sont importantes et reconnues comme telles, puisque c'est
précisément de cela que sont venus discuter à Paris MM. Arafat et Barak. Ces
discussions ont avancé et ce qui s'est passé hier n'est pas négligeable, mais
elles n'ont pas abouti et les deux protagonistes ne se retrouveront pas
ensemble aujourd'hui à Charm El Cheikh.
Je suis cependant convaincu que la négociation va se poursuivre étant donné
l'urgence, car la gravité de la situation est connue.
Je rappelais à l'instant que nous étions sur un volcan. Certes, c'était une
métaphore, mais vous voyez bien ce qu'elle signifie : nous connaissons tous la
situation des populations, les risques de provocation, les tensions permanentes
et les souffrances accumulées. C'est précisément pour cela qu'un processus de
paix a été engagé, malgré les déconvenues que nous pouvons enregistrer : on va
de tension en négociation, de négociation en drame, de drame en négociation, et
ce sans arrêt.
Nous, Français, nous essayons de convaincre nos partenaires européens d'aller
plus loin dans l'expression et dans l'initiative, et nous le faisons autant que
nous le pouvons : je crois d'ailleurs que les idées à partir desquelles est
aujourd'hui recherchée une solution au conflit du Proche-Orient doivent
énormément à tout ce qui a été dit par la France depuis une vingtaine d'années,
car c'est peut-être le pays qui a le plus fait évoluer les mentalités sur ce
plan.
La seule réponse au drame que vous évoquez, la seule réponse à la tragédie et
la meilleure réponse à la provocation, c'est encore et toujours de participer
inlassablement à la recherche de la solution qui, seule, permettra de changer
la situation au Proche-Orient et de bâtir un Proche-Orient en paix.
Par conséquent, nous faisons tout ce qui dépend de nous, mais, au bout du
compte, je le rappelle encore, il appartiendra aux Israéliens et aux
Palestiniens de faire, le moment venu, le choix historique. Ce choix sera
politiquement très difficile, il supposera des renoncements de part et d'autre,
mais nous aiderons les intéressés de toutes les façons possibles pour qu'ils
aient le courage d'accomplir ce pas pour leurs peuples.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
SUPPRESSION DE L'OBLIGATION DE TRADUCTION
FRANÇAISE DES BREVETS EUROPÉENS