Séance du 21 juin 2000
SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
1.
Procès-verbal
(p.
0
).
2.
Décès d'un ancien sénateur
(p.
1
).
3.
Commission mixte paritaire
(p.
2
).
4.
Candidature à un organisme extraparlementaire
(p.
3
).
5.
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
(p.
4
).
6.
Souhaits de bienvenue à M. le ministre des transports de l'Union indienne
(p.
5
).
7.
Gens du voyage.
- Adoption d'un projet de loi en nouvelle lecture (p.
6
).
Discussion générale : MM. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense
chargé des anciens combattants ; Jean-Paul Delevoye, rapporteur de la
commission des lois ; Nicolas About, Mme Odette Terrade.
Clôture de la discussion générale.
M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement.
Article 1er (p. 7 )
Amendement n° 1 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 2 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 3 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 4 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 5 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 6 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 7 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire
d'Etat. - Adoption.
Amendements n°s 8 et 9 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 1er bis (supprimé) (p. 8 )
Amendement n° 10 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Article 2 (p. 9 )
Amendement n° 11 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 12 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 3 (p. 10 )
Amendement n° 13 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 14 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 11 )
Amendement n° 15 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 12 )
Amendement n° 16 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson,
secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (p. 13 )
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, Louis Besson, secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article.
Article 8. - Adoption (p.
14
)
Article 9 (p.
15
)
Amendements n°s 21 rectifié du Gouvernement et 18 à 20 de la commission. - MM.
le rapporteur, Louis Besson, secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 21
rectifié ; adoption des amendements n°s 18 à 20.
Adoption de l'article modifié.
Vote sur l'ensemble (p. 16 )
MM. Jean-Claude Peyronnet, Daniel Eckenspieller.
Adoption du projet de loi.
8.
Nomination d'un membre d'un organisme extraparlementaire
(p.
17
).
9.
Référé devant les juridictions administratives.
- Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire (p.
18
).
Discussion générale : MM. René Garrec, rapporteur pour le Sénat de la
commission mixte paritaire ; Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ;
Robert Bret.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire (p.
19
)
Vote sur l'ensemble (p.
20
)
Mme Dinah Derycke.
Adoption du projet de loi.
10.
Prestation compensatoire en matière de divorce.
- Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire (p.
21
).
Discussion générale : MM. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la
commission mixte paritaire ; Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ;
Nicolas About, Robert Bret.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire (p.
22
)
Vote sur l'ensemble (p.
23
)
M. Jacques Pelletier, Mme Dinah Derycke.
Adoption du projet de loi.
11.
Conventions avec le Vietnam relatives à l'adoption d'enfants et à l'entraide
judiciaire.
- Adoption de deux projets de loi (p.
24
).
Discussion générale commune : MM. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement ;
Michel Caldaguès, rapporteur de la commission des affaires étrangères ; James
Bordas.
Clôture de la discussion générale commune.
Convention relative à l'adoption d'enfants (p. 25 )
M. Claude Estier.
Adoption de l'article unique du projet de loi.
Convention relative à l'entraide judiciaire (p. 26 )
Adoption de l'article unique du projet de loi.
M. le secrétaire d'Etat.
12.
Transmission d'une proposition de loi constitutionnelle
(p.
27
).
13.
Transmission d'un projet de loi
(p.
28
).
14.
Dépôt d'une proposition de loi organique
(p.
29
).
15.
Dépôt de rapports
(p.
30
).
16.
Dépôt d'un rapport d'information
(p.
31
).
17.
Ordre du jour
(p.
32
).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. JACQUES VALADE
vice-président
M. le président.
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
DÉCÈS D'UN ANCIEN SÉNATEUR
M. le président. J'ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Mohammed Guéroui, qui fut sénateur de Sétif-Batna de 1959 à 1962.
3
COMMISSION MIXTE PARITAIRE
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« Conformément à l'article 45, alinéa 2, de la Constitution, j'ai l'honneur de
vous faire connaître que j'ai décidé de provoquer la réunion d'une commission
mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en
discussion du projet de loi d'orientation pour l'outre-mer.
« Je vous serais obligé de bien vouloir, en conséquence, inviter le Sénat à
désigner ses représentants au sein de cette commission.
« J'adresse ce jour à M. le président de l'Assemblée nationale une demande
tendant aux mêmes fins.
« Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de ma haute
considération.
« Signé : LIONEL JOSPIN. »
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l'article 12 du règlement.
4
CANDIDATURE
À UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle au Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien
vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du
conseil d'administration de l'établissement public de la Cité des sciences et
de l'industrie.
La commission des affaires économiques et du Plan a fait connaître qu'elle
propose la candidature de M. Pierre André pour siéger au sein de cet organisme
extraparlementaire.
Cette candidature a été affichée et sera ratifiée, conformément à l'article 9
du règlement, s'il n'y a pas d'opposition à l'expiration du délai d'une heure.
5
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président.
M. le président a reçu de M. le Premier ministre le rapport annuel concernant
l'activité du service public de l'équarrissage pour l'année 1998, établi en
application de l'article 3 de la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
6
SOUHAITS DE BIENVENUE À M. LE MINISTRE
DES TRANSPORTS DE L'UNION INDIENNE
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, j'ai le plaisir de saluer
la présence dans notre tribune officielle de M. Rajnath Singh, ministre des
transports du gouvernement de l'Union indienne.
(M. le secrétaire d'Etat,
Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et applaudissent.)
Cette visite suit celles de Mme Heptullah, présidente de la Rajya Shaba, qui
avait clôturé la réunion des Sénats du monde le 14 mars dernier, et de M.
Balayogi, président de la Lok Shaba.
Je veux saluer ici l'excellence des relations et la densité des échanges qui
existent entre nos deux pays, auxquels contribuent le groupe d'amitié
France-Inde, que préside notre collègue Pierre Fauchon, et le Forum
d'initiative franco-indien, que dirige notre collègue le président Jean
François-Poncet.
Au nom du Sénat, je souhaite la bienvenue à M. Rajnath Singh et je forme des
voeux pour que son séjour en France renforce encore les liens d'amitié et de
coopération qui existent entre nos deux pays.
(Applaudissements.)
7
GENS DU VOYAGE
Adoption d'un projet de la loi en nouvelle lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi (n°
352, 1999-2000), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
nouvelle lecture, relatif à l'accueil et l'habitat des gens du voyage. [Rapport
n° 412 (1999-2000).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret,
secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants.
Monsieur
le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d'abord
d'excuser M. Louis Besson, retenu en cet instant à l'Assemblée nationale par
une question d'actualité. Il rejoindra le Sénat dans quelques minutes,
vraisemblablement avant la fin de la présente discussion. Je vais donc le
suppléer en attendant son arrivée.
Ce projet de loi sur l'accueil et l'habitat des gens du voyage a déjà fait
l'objet de deux lectures complètes par l'Assemblée nationale et par votre Haute
Assemblée, suivies d'une commission mixte paritaire qui est restée
infructueuse, puis d'une troisième lecture à l'Assemblée nationale.
Ces examens successifs ont permis de clarifier les positions, d'enrichir le
texte, de faire préciser ou évoluer les positions du Gouvernement. Le nombre
d'amendements déposés et la qualité du travail effectué en commission
confirment à la fois l'intérêt suscité par ce sujet et la plus-value du travail
parlementaire.
Ces lectures successives permettent aussi de faire le point sur les objectifs
de ce projet, sur les constats qui le fondent, sur les solutions qui ont fait
l'objet d'un accord, mais aussi sur les points de désaccord qui subsistent,
dont certains correspondent à des questions de fond.
L'objectif est partagé, semble-t-il, par la quasi-totalité des parlementaires
qui sont intervenus dans les débats : il s'agit de la cohabitation harmonieuse
des différentes catégories de la population, que leur mode de vie soit
sédentaire ou nomade.
Le mode de vie des gens du voyage itinérants doit donc pouvoir s'exercer, mais
dans le respect des règles. Pas plus que la voie de fait ne peut être admise,
il ne saurait être question d'envisager une sédentarisation qui ne serait pas
voulue par les gens du voyage eux-mêmes.
Pour que le mode de vie des itinérants puisse s'exercer, il faut une offre de
places de caravanes répondant aux besoins. Il faut donc développer les aires
d'accueil tout en renforçant les moyens juridiques dont disposent les maires
qui ont réalisé de telles aires, afin qu'ils soient mieux armés pour lutter
contre les stationnements illicites.
Les tensions actuelles viennent surtout d'une insuffisante mise en application
de cette logique générale : de fortes tensions continuent d'exister dix ans
après le vote de l'article 28 de la loi du 31 mai 1990, dont l'objet était de
développer les aires d'accueil. Le nombre actuel de places pour l'accueil des
caravanes d'itinérants a augmenté, mais il ne répond pas aux besoins ; il
faudrait multiplier le nombre de places par six pour y répondre.
Cet échec relatif de l'article 28 tient à plusieurs causes.
Tout d'abord, la concertation préalable de tous les acteurs concernés pour
évaluer les besoins et définir les solutions locales n'a probablement pas
toujours été suffisante. Les solutions d'accueil des gens du voyage doivent,
vous le savez, reposer sur un fort partenariat.
L'article 28 ne prévoyait pas, par ailleurs, de solutions intercommunales,
lesquelles sont pourtant une des clés des problèmes à traiter.
Les subventions apportées par l'Etat pour l'investissement n'étaient, ensuite,
que de 35 % du coût des travaux et il n'existait pas d'aide à la gestion alors
que nous nous accordons tous à reconnaître qu'une aire non gérée ou mal gérée
risque de connaître une dégradation rapide.
Les moyens mis à la disposition des communes qui ont réalisé une aire pour
lutter contre les stationnements illicites se sont révélés, en outre,
insuffisants.
Enfin, il n'était prévu dans la loi de 1990 ni délai de mise en oeuvre ni
sanction ou moyen de contrainte lorsqu'une commune ne réalisait pas l'aire que
la loi lui imposait.
L'ensemble de ces raisons a abouti à ce qu'un quart seulement des communes de
plus de 5 000 habitants se sont dotées d'une aire.
Certaines de celles qui ont aménagé une aire ont connu un afflux plus
important de gens du voyage et, par voie de conséquence, de nouveaux
stationnements illicites, et l'inaction de certaines communes a parfois abouti
à ce qu'elles se défaussent sur celles qui ont respecté la loi, ce qui a
contribué à donner le sentiment d'un problème sans solution.
Le projet de loi, tel qu'il vous est soumis, prend en compte ce bilan de
l'article 28 et le Gouvernement vous propose des solutions pour remédier aux
difficultés.
Je citerai d'abord la concertation et la réflexion partagée pour l'élaboration
des schémas départementaux. Le niveau départemental est en effet le bon niveau
pour la connaissance des problèmes et la définition de solutions adaptées.
J'évoquerai ensuite le soutien affirmé aux solutions intercommunales et la
définition de deux délais successifs communs à tous les acteurs, à savoir
dix-huit mois au plus pour l'adoption du schéma départemental et deux ans
maximum pour la réalisation des aires, après l'adoption du schéma.
Par ailleurs, l'Etat consent un important effort financier. C'est ainsi que
1,7 milliard de francs seront consacrés en quatre ans aux subventions à
l'investissement. En effet, le taux de subvention double, passant de 35 % à 70
% du coût des travaux. En outre, 300 millions de francs seront consacrés, à
terme, à l'aide à la gestion créée par le présent projet de loi, soit 10 000
francs par place et par an.
Enfin, le projet de loi prévoit le renforcement des moyens juridiques mis à la
disposition des communes qui ont réalisé des aires de stationnement.
Globalement, les solutions que je viens de décrire brièvement ont fait l'objet
d'un accord entre les deux assemblées.
Certaines questions continuent cependant de faire débat.
Ainsi, le Gouvernement et l'Assemblée nationale souhaitent maintenir une
obligation spécifique pour les communes de plus de 5 000 habitants, qui devront
toutes aménager ou cofinancer l'aménagement d'une aire. Il s'agit de créer une
garantie pour que, si une solution intercommunale n'est pas trouvée, des
réponses soient néanmoins apportées.
Le texte qui vous est soumis prévoit, en outre, que le préfet aura les moyens
de faire respecter les obligations posées par la loi. Si, au terme d'un délai
de dix-huit mois, le schéma n'a pas été conjointement adopté par le préfet et
le président du conseil général, le préfet pourra l'adopter seul.
Si, au terme d'un délai de deux ans après l'adoption du schéma, une commune
n'a pas aménagé l'aire prévue au schéma, le préfet pourra procéder à
l'aménagement de cette aire au nom et pour le compte de cette commune.
L'expérience de l'article 28 nous montre qu'il est nécessaire que ces
dispositions existent. Le souhait du Gouvernement est naturellement que le
préfet n'ait pas à les mettre en oeuvre, mais le simple fait qu'elles existent
pourra y aider...
Aboutir à une solution concrète permettant le respect de la loi par la
concertation et la discussion est évidemment préférable à toute décision
autoritaire, mais il reste que l'Etat doit avoir les moyens de garantir le
respect de la loi.
Ce texte est attendu par tous les acteurs concernés, afin que, dans un délai
rapide, soient aménagées en nombre suffisant des aires d'accueil répondant aux
besoins des gens du voyage.
(Applaudissements sur les travées socialistes
ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
secrétaire d'Etat, je vous remercie d'avoir fait un récapitulatif complet du
parcours de ce texte et d'avoir mis le doigt sur les points d'accord et de
désaccord.
Cette loi est effectivement très attendue, car l'absence de règle crée des
tensions de plus en plus vives sur le terrain. Le texte proposé par le
Gouvernement et voté par l'Assemblée nationale n'atténue cependant pas les
inquiétudes des élus quant à l'efficacité de l'action publique, car nous
croyons plus au respect de la loi par la concertation que par la capacité de
contrainte.
Nul ne peut contester l'obligation d'offrir un nombre de places suffisant pour
désamorcer la tentation des gens du voyage d'occuper de force un espace libre.
Le constat est unanime entre les deux assemblées. Toutefois, la localisation de
l'aire d'accueil, communale ou intercommunale, et la préservation de ce
patrimoine doivent relever de la solidarité nationale et d'un partenariat fort,
d'où notre revendication que l'on augmente l'aide forfaitaire et que l'on
intègre dans la partie de l'investissement la capacité de restaurer ou de
réparer.
Nous pouvions nous mettre d'accord sur un certain nombre de points. En faisant
un effort, les uns et les autres, nous aurions pu nous entendre sur le schéma
national, auquel le Sénat est très attaché, et qui permet de responsabiliser
l'Etat sur les grands déplacements. Nous pouvions nous entendre sur la
coopération interdépartementale, voire interrégionale. Nous pouvions, moyennant
une augmentation de la dotation forfaitaire de fonctionnement, nous entendre
sur le partenariat financier, et nous avons d'ailleurs souligné l'effort qu'a
fait le Gouvernement en augmentant de façon sensible les subventions.
Nous avons fait une proposition très réaliste, au Sénat, pour augmenter
l'efficacité de la procédure judiciaire, avec l'introduction d'une procédure de
référé d'heure à heure, et nous restons attachés, comme le Gouvernement, mais
contrairement à l'Assemblée nationale, au maintien des compétences respectives
du juge administratif et du juge judiciaire.
Grâce à des échanges, à des réflexions, nous pouvions parvenir à un accord sur
les moyens nécessaires à mettre en oeuvre pour pallier ce que vous appelez les
« insuffisances » de l'article 28 de la loi de 1990 : augmentation des
subventions, appui à la négociation à l'échelon départemental, moyens
judiciaires pour lutter contre le caractère illicite.
Ces outils constituent - nous en convenons - une avancée par rapport à la loi
de 1990. Pourquoi, alors, mettre en doute leur pertinence, voire leur
efficacité, en prévoyant d'agir par la contrainte au motif que les élus
refuseraient d'appliquer la loi ? C'est un procès injuste, et c'est là où nos
raisonnements divergent grandement.
Le ministre lui-même a reconnu que cet article 28 avait été introduit dans un
texte qui ne concernait pas les gens du voyage. Ainsi donc, par définition, de
par sa nature, il ne pouvait répondre aux problèmes posés par les gens du
voyage.
Vous aviez listé toute une série de problèmes qui, effectivement, étaient
posés et auxquels vous apportiez des solutions. Et, paradoxalement, au moment
où vous apportez des solutions, vous dites qu'elles ne pourront pas être
appliquées sur le terrain.
Quelle réflexion peut-on tirer de l'examen de la situation actuelle, de
l'attitude des maires face à l'article 28 et à l'obligation qui leur a été
faite ? Les élus ont-ils un comportement de résistance ?
A voir l'exemple de celles et de ceux qui se sont engagés dans cette
politique, qui ont réalisé des aires de stationnement pour les gens du voyage,
on se rend bien compte qu'ils sont totalement isolés.
Isolés, ils le sont vis-à-vis de leurs collègues, vous avez raison, certains
se réjouissant qu'il existe des aires d'accueil parce qu'ils ne veulent pas en
créer eux-mêmes. Ils le sont aussi vis-à-vis de la justice et de l'Etat parce
qu'ils ont sur les bras un problème quasiment insoluble : le temps de faire le
financement, de mener l'action de justice, de mobiliser l'action de l'Etat, les
gens du voyage se déplacent de quelques centaines de mètres, et le problème
n'est toujours pas réglé. Enfin, ils sont isolés financièrement parce qu'il
doivent prendre en charge le coût des dégradations.
Tout cela existe encore aujourd'hui. Vous palliez ces inconvénients en
accordant des moyens financiers. Nous, nous avons proposé une procédure
judiciaire adaptée à l'urgence, à savoir le référé d'heure à heure. Si
l'efficacité de ces procédures est révélée, les maires réaliseront les aires
d'accueil, pas forcément de gaieté de coeur, mais pour pouvoir faire appliquer
la loi dans les zones d'interdiction, car, là, il y a une contrepartie.
A partir du moment où l'Etat fait un effort d'accompagnement dans la
réalisation des aires, où, en même temps, il met en place des actions
permettant le respect de l'interdiction du stationnement illicite, à l'évidence
la contractualisation, aux yeux de la population, est équilibrée et l'on peut
inciter les élus à s'engager dans cette politique.
Mon inquiétude - sur ce point, je ne partage pas votre analyse - n'est pas
liée à la résistance des élus à l'échelon départemental ; les solutions seront
trouvées. Elle n'est pas liée non plus au référé d'heure à heure. Mon
inquiétude, exprimée par les élus, tient à la volonté réelle ou la capacité de
l'Etat d'appliquer avec détermination et diligence les décisions de justice.
Mon regret est de ne pas avoir vu augmenter l'effort financier pour la
participation au fonctionnement de la gestion des aires.
Pour vous faire une confidence - ce sentiment est d'ailleurs confirmé par
l'impression que m'ont donnée les représentants du corps préfectoral - je ne
crois pas un seul instant à la capacité de contrainte du préfet. Cela
favorisera, au contraire, une explosion de contentieux, qui allongera la durée
de réalisation. Cela permettra à certains - c'est tout à fait contraire au
pacte républicain - de mobiliser les citoyens contre l'Etat, en augmentant les
risques de rejet d'une minorité au moment où l'intégration est au coeur de nos
préoccupations et où l'Etat doit jouer l'unité de la nation et non la division
entre communautés.
Je regrette que l'esprit de la décentralisation soit ainsi bafoué, car l'Etat
ne manifeste pas, dans ce texte, sa confiance dans la capacité des élus à
appliquer la loi républicaine. J'ai même entendu un membre du Gouvernement,
constatant la résistance des maires à appliquer partout sur le territoire
français la loi républicaine, dire qu'il ne pouvait pas accepter cette
inégalité des citoyens devant la loi républicaine.
M. Nicolas About.
Il n'a qu'à gérer une commune !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Dans ce cas, monsieur le secrétaire d'Etat, pourquoi ne pas
ouvrir le débat dans les deux sens ? Pourquoi ce procès est-il instruit
uniquement contre les collectivités locales ? Si l'on pose le problème de
l'égalité des citoyens face à l'application de la loi républicaine par les
collectivités locales, posons aussi le problème de l'égalité des citoyens face
à son application par l'Etat. Pourquoi ne pas mettre des policiers, des lits
d'hopitaux, des médecins, des services publics en nombre partout ?
Si l'on ouvre ce procès, personne n'y gagnera !
(M. About applaudit.)
C'est contraire à l'esprit des lois de décentralisation, qui doit privilégier
le partenariat pour renforcer l'efficacité de l'action publique et l'égalité
des citoyens devant la loi.
Je ne comprends pas ce mauvais procès fait aux élus locaux, mauvais procès dû
à l'insuffisance des textes et à l'incapacité de l'Etat à faire appliquer les
décisions de justice. C'est donc le doute qui freinait la décision des élus.
Par ailleurs, je suis très étonné, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'au moment
où, très justement, vous soulignez les insuffisances de l'article 28 de la loi
de 1990 et où, très légitimement, vous nous proposez des solutions pertinentes,
financières et judiciaires, pour pallier ces insuffisances, vous estimez
qu'elles ne seront pas corrigées puisque vous remettez les solutions en doute
en faisant jouer la contrainte. Pourquoi, alors, les proposer ?
Monsieur le secrétaire d'Etat, sur un sujet aussi difficile que celui des gens
du voyage, il faut jouer la confiance et non le doute, et ce texte aurait donc
dû être fondé sur la confiance.
La spécificité de la France repose sur un contrat entre les collectivités
locales et l'Etat, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays
européens. Nous avons l'habitude de voir ce contrat écorné sur le plan
financier ; nous le voyons, aujourd'hui, écorné sur le plan des compétences.
Prenons garde que cela ne se retourne pas contre les gens du voyage, qui ont
aujourd'hui besoin d'intégration, de place, de respect, mais aussi d'une
incitation forte à respecter les lois de la République, afin d'être en mesure
d'exiger que celle-ci les accueille.
(Applaudissements sur les travées du
RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur
certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les
incidents entre populations nomades et habitants des communes, bien souvent «
envahies », sont de plus en plus fréquents.
La presse ne cesse de s'en faire l'écho, à la faveur, bien sûr, des
traditionnels pélerinages des gens du voyage, mais aussi à l'occasion des
pérégrinations intercommunales dans l'ensemble de nos régions.
C'est la « pagaille semée à l'université de Grenoble par un campement illégal
».
Ce sont des habitants excédés par les problèmes que pose l'arrivée de 150
caravanes à Sophia et à Villeneuve-Loubet.
C'est un maire agressé et hospitalisé à Ville-la-Grand, c'est un autre maire
blessé à Maurepas, alors qu'ils tentaient de faire appliquer la loi.
C'est encore l'annulation, au dernier moment, d'un tournoi de football, en
raison des risques pour la sécurité des enfants.
C'est la remise en état de zones saccagées - éclairage, sanitaires, structures
d'accueil - comme à Saint-Quentin-en-Yvelines, les années précédentes.
Ces cas ne sont pas isolés. Ils ne sont pas inventés. Vous le savez, monsieur
le secrétaire d'Etat : c'est la réalité ! Il ne faut pas se la cacher, car elle
engendre, au quotidien, un climat d'exaspération.
Il ne s'agit pas, ici, de condamner le mode de vie des gens du voyage. Mais
reconnaissons que, comme le notait un quotidien, « s'octroyer sans vergogne un
terrain privé, se brancher sans autorisation sur l'eau de la commune et sur le
réseau électrique » - quand on n'enlève pas les câbles ! - « n'est pas
forcément la meilleure des solutions pour être accueilli à bras ouverts ».
Qu'ils soient de droite ou de gauche, les maires constatent leur impuissance
face à ces situations, de plus en plus mal supportées par les populations.
C'est ainsi que les problèmes ne font que se déplacer sans jamais être
résolus.
Les maires déplorent l'inapplication de la loi, des procédures d'expulsion,
toujours lentes et compliquées, toujours inefficaces à court terme puisque, à
peine partis, les revoilà ! Au final, tout cela représente un coût très élevé
pour la collectivité.
Le texte que le Sénat avait adopté lors des précédentes lectures tenait compte
de la plupart de ces aspects.
A la suite de l'excellent travail de notre rapporteur, il préservait un
équilibre entre les droits et les obligations de chacun ; un véritable
partenariat entre l'Etat, les départements, les communes, les représentants des
gens du voyage était organisé ; enfin, et surtout, tous les moyens étaient
recherchés pour permettre au maire d'assurer l'évacuation de campements
sauvages dans les plus brefs délais.
Or, par un texte inapproprié, on va placer, une fois de plus, les élus dans
des situations délicates, les préfets étant privés du pouvoir d'expulsion et
n'ayant pas l'obligation d'accorder le concours de la force publique de façon
systématique.
Tous, nous reconnaissons la nécessité d'aménager plus d'aires d'accueil. Mais
ne nous leurrons pas !
Obligé de construire et d'aménager des aires d'accueil, le maire se verra
reprocher celles-ci par les habitants du fait des troubles généralement
occasionnés par les campements.
En contrepartie, nous réclamons donc que les gens du voyage respectent la loi
et se la voient appliquer comme tous les citoyens français, ni plus ni moins,
que les zones de campement ne soient pas des zones de non-droit, que la police
y ait accès, qu'elles soient à dimension humaine pour pouvoir être gérées par
les collectivités.
Comment, en effet, ne pas comprendre ce propriétaire, dans son bon droit,
indigné d'être traité en « sous-citoyen », qui se demande pourquoi il payerait
des frais d'huissier pour récupérer son terrain - sans parler du coût des
éventuelles détériorations que son bien aura subies ! - alors qu'il est
confronté à un campement illicite ? Sa révolte est légitime. Elle l'est
d'autant plus que l'Etat, lui, fuit ses responsabilités dans cette affaire.
Combien de fois le maire se retrouve-t-il seul, après le refus du préfet
d'accorder l'appui de la force publique ?
Comment accepter que des gens qui ne remplissent pas de déclaration d'impôts
ou qui ne sont pas imposables, mais qui perçoivent souvent le RMI - pour avoir
fait partie d'une commission d'attribution du RMI, j'ai été surpris de voir que
même l'insertion ne pouvait pas se faire parce qu'ils étaient partis en
pèlerinage ! - parviennent tout de même à acquérir des véhicules de plus de 500
000 francs et des caravanes haut de gamme que la majorité de nos concitoyens
n'aura jamais les moyens de s'offrir, même après une vie de labeur ?
Cette réalité, nos concitoyens ne la comprennent pas et c'est bien normal !
Alors, monsieur le secrétaire d'Etat, je vous interroge : le Gouvernement
fera-t-il appliquer la loi ? Le Gouvernement est-il prêt à payer les aires
d'accueil ? Le Gouvernement est-il disposé à gérer ou à faire gérer ces aires
d'accueil par des organismes adaptés et non par les collectivités ?
Je sais bien que les solutions gouvernementales s'appuient toujours, et dans
tous les domaines, sur les collectivités locales.
Nous observons que le débat démocratique a ses limites. Les navettes
parlementaires n'ont servi à rien puisque le texte qui nous revient de
l'Assemblée nationale est sensiblement le même que celui qu'elle nous avait
transmis en première et en deuxième lecture. Malheureusement, nous en sommes là
!
Alors, sans agressivité ni xénophobie, l'homme politique doit tenir compte de
son devoir d'accueillir dignement les gens au mode de vie différent, mais il
doit aussi apprécier les réalités. Le Gouvernement se gargarise de morale mais
pas toujours des réalités. Les difficultés sont pour les collectivités : il
leur laisse le soin d'accueillir une population toujours grandissante, mais il
les laisse seules dans la tourmente, et ce ne sont pas quelques subventions qui
leur donneront le sentiment de recevoir un réel appui de l'Etat !
Si nous dénonçons la manoeuvre, nous ne refusons pas le défi. C'est pourquoi
les membres du groupe des Républicains et Indépendants voteront les amendements
que nous présentera notre excellent rapporteur, M. Delevoye ; en revanche, ils
ne voteront le projet de loi que dans la mesure où ces amendements auront été
adoptés.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Terrade.
Mme Odette Terrade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous examinons à nouveau le projet de loi relatif à l'accueil et à l'habitat
des gens du voyage. En effet, après les deux lectures dans chacune des deux
chambres, la commission mixte paritaire, réunie au Sénat le 9 mai dernier,
n'est pas parvenue à un accord sur les dispositions de ce texte. Il est vrai
que l'esprit qui a prévalu à l'Assemblée nationale, et que mon groupe partage,
ne semblait guère compatible avec l'approche privilégiée au Sénat, tout au long
des différentes lectures.
La principale opposition de la majorité sénatoriale porte sur le pouvoir de
substitution que le texte accorde au représentant de l'Etat dans le
département, tant en matière d'approbation du schéma départemental qu'en
matière de réalisation des aires d'accueil par les communes figurant dans ce
schéma.
Sous couvert de respect du principe de décentralisation, nos collègues des
travées de droite ont longuement vanté les avantages du maintien d'une
législation contractuelle et incitative, sans contrainte pour les collectivités
locales qui refuseraient d'appliquer les dispositions de la loi.
Ce choix suscite deux remarques principales.
D'abord, je vous rappelle que c'est la logique qui a guidé la loi du 31 mai
1990, en particulier son article 28. Si cette loi a permis des avancées
considérables, son bilan n'en demeure pas moins insatisfaisant. En effet, faute
de contrainte et d'obligation de délai, nous connaissons une pénurie aiguë
d'aires d'accueil.
Faute de contrainte - M. le secrétaire d'Etat l'a rappelé tout à l'heure - ce
sont les communes qui ont respecté la loi et qui se sont dotées d'aires
d'accueil qui sont aujourd'hui pénalisées, car elles subissent des pressions
énormes de la part de la communauté des gens du voyage pour qui ces places ne
suffisent pas. Trois quarts des communes de plus de 5 000 habitants n'ont pas
encore aménagé d'aires d'accueil, malgré l'obligation légale.
M. le secrétaire d'Etat l'a rappelé, il faut multiplier par six le nombre de
places pour parvenir aux 30 000 qui sont nécessaires.
Dans ces conditions, que devient le droit de choisir son mode de vie, droit
qui, bien entendu, mais je préfère le rappeler, vaut aussi pour les gens du
voyage ?
Ma seconde remarque porte sur la conception qu'a la majorité sénatoriale de la
décentralisation.
A vous entendre, mes chers collègues, vous en seriez les seuls garants. Mais
le moins que l'on puisse dire, c'est que vous en faites une étrange
interprétation. En effet, l'article 72 de notre Constitution prévoit que la
libre administration des collectivités locales s'effectue « dans les conditions
prévues par la loi » et que le représentant de l'Etat « a la charge des
intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois ». En
aucun cas, la décentralisation ne doit être un moyen ou un prétexte pour ne pas
appliquer la loi.
Une autre opposition de la majorité sénatoriale porte sur la volonté exprimée
dans le projet de loi de faire du schéma départemental la référence en matière
d'accueil des gens du voyage.
Mon groupe continue, pour sa part, à préférer la solution proposée une
nouvelle fois par l'Assemblée nationale. Contrairement à un schéma national,
les schémas départementaux nous semblent plus souples, moins complexes,
davantage liés à la réalité du terrain, d'autant que, par ailleurs, la
responsabilité de l'Etat en matière de grands rassemblements est établie.
S'agissant du financement, les rapports du Sénat ne manquaient pas de
souligner l'effort consenti. En effet, une circulaire du 16 septembre 1992 du
ministère de l'équipement prévoit un financement des investissements par l'Etat
à hauteur de 35 %. Le présent projet de loi porte la prise en charge de l'Etat
à 70 % des dépenses. La progression est notable, même si mon groupe aurait
préféré un déplafonnement de cette aide afin que celle-ci corresponde
effectivement à 70 % des dépenses réelles engagées. Ce plafonnement peut avoir
pour effet de tirer vers le bas les coûts et donc la qualité des aires
réalisées.
L'Assemblée nationale avait prévu une bonification accrue de la dotation
globale de fonctionnement pour les communes ayant construit une aire et
connaissant de fortes difficultés sociales et financières. Le Sénat n'a pas
retenu cette disposition réintroduite en nouvelle lecture à l'Assemblée
nationale et que mon groupe soutient tant elle lui semble équitable.
Le dernier point de désaccord concerne les mesures d'expulsion. Aujourd'hui,
comme lors des précédentes lectures, la majorité sénatoriale ne partage pas la
préférence de l'Assemblée nationale pour l'unification de la compétence
contentieuse au profit du juge civil. Or ce choix ne me semble pas prendre en
considération la complexité de la jurisprudence relative à la définition même
du domaine public dont découle la compétence du juge. Mon groupe approuve donc
le retour aux dispositions initiales, opéré par l'Assemblée nationale.
J'ai pu constater combien la majorité sénatoriale était exigeante en matière
de répression du stationnement illicite des gens du voyage. J'aurais aimé
qu'elle le soit autant pour ce qui concerne la réalisation effective des aires
d'accueil.
Je souhaite néanmoins vous redire, mes chers collègues, que l'interdiction de
stationnement sur le territoire communal n'est possible que si la collectivité
a rempli ses obligations en matière de réalisation d'aires d'accueil. Il est
donc urgent que ce texte soit adopté, afin que le nombre de places disponibles
augmente significativement et que les situations de tension puissent enfin se
résoudre.
Bien entendu, comme lors des précédentes lectures, le groupe communiste
républicain et citoyen appelle de ses voeux le dépôt d'un projet de loi relatif
aux gens du voyage qui soit plus global, dépassant la seule question de leur
accueil. Il est urgent de réformer la loi de 1969, notamment l'obligation du
carnet de circulation, qui fait des membres de cette communauté des citoyens à
part, ne jouissant pas des mêmes droits que les sédentaires.
Le texte que nous propose l'Assemblée nationale concilie le droit de choisir
son mode d'habitat avec la libre circulation, dans un rapport équilibré entre
les droits et les devoirs de chacun. Cette approche nous agrée, car nous
souhaitons que les gens du voyage soient des citoyens à part entière, soumis
bien entendu aux mêmes devoirs que les autres, mais jouissant également des
mêmes droits.
Mon groupe ne soutiendra pas les amendements de la majorité sénatoriale et ne
pourra donc pas voter le texte après qu'il aura été ainsi modifié.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je voudrais tout d'abord prier la Haute Assemblée de
bien vouloir m'excuser de ne pas avoir pu assister au début de la discussion.
En effet, une obligation me retenait à quinze heures à l'Assemblée nationale.
Je vous ai rejoints aussi tôt que possible, mesdames, messieurs les sénateurs,
et je vous remercie d'avoir bien accueilli mon collègue Jean-Pierre Masseret,
qui m'a suppléé dans cette circonstance.
Je n'ai pas pu bénéficier de la totalité du contenu des interventions, mais M.
Masseret m'en a néanmoins entretenu, en me signalant tout particulièrement,
monsieur le rapporteur, votre analyse qui vous conduit à réfuter la volonté du
Gouvernement de prévoir des mesures coercitives - employons le terme - en cas
de non-application spontanée de la loi par les collectivités locales.
L'Etat est enclin à penser que l'immense majorité des maires sera de bonne
volonté. Confrontés à ces problèmes difficiles, ni l'Etat ni la représentation
nationale ne doivent, pour reprendre l'expression de M. About, « fuir leurs
responsabilités ». Mieux vaut que les élus de bonne volonté qui se heurteront à
des incompréhensions de voisinage puissent s'appuyer sur une loi qui, certes,
leur crée des obligations mais qui leur donne aussi des moyens. Les élus, dès
lors qu'il seront de bonne volonté, apprécieront cette possibilité d'ultime
recours.
J'ai entendu l'intégralité de l'intervention de Mme Terrade. Le Gouvernement
partage sa conception républicaine de la décentralisation : le fait que notre
territoire soit fractionné en collectivités ne doit pas être une cause d'échec
de l'application de cette loi sur la totalité de l'Hexagone. La clarté de son
exposé m'évitera de revenir sur cet aspect.
Monsieur About, je ne pense pas que l'on puisse accuser le Gouvernement de se
gargariser de morale et de laisser les difficultés aux collectivités. Les
membres du Gouvernement sont, dans une proportion assez élevée, des élus locaux
et ils ont tous bien conscience, monsieur le sénateur, que leur mission au
Gouvernement est plus temporaire que les responsabilités qu'ils peuvent avoir à
assumer sur le terrain. Donc, ils n'iraient pas dans ce sens, faute de quoi ils
nourriraient leur propre déception.
Je crois, en tout état de cause - c'est l'honneur mais aussi la charge, voire
la servitude de la fonction locale - que la collectivité a la maîtrise des
territoires, ce qui n'est pas le cas de l'Etat lui-même.
M. Nicolas About.
Si, par la loi, au contraire !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
L'Etat peut aider, accompagner, se montrer clair sur
les principes de son action et les objectifs qu'il se fixe. Ce texte en est un
exemple : il apporte des solutions claires et, pour la première fois, me
semble-t-il, financées, à un problème qui se pose.
Certes, madame Terrade, l'aide de l'Etat est plafonnée mais, de l'avis
général, les dépassements ne devraient être qu'exceptionnels. Je vous précise
que le doublement du taux de la subvention de l'Etat ne fait pas obstacle à des
financements croisés. D'ailleurs, des caisses d'allocations familiales, des
conseils régionaux ou généraux apportent déjà leur contribution aux côtés des
villes, ce qui est appréciable. Avec un taux de 70 %, on peut néanmoins
considérer que l'essentiel du chemin est fait, si vous me permettez cette
expression.
Ce qui est surtout très important à mes yeux, c'est l'aide au fonctionnement
qui pourra être effective dès le 1er janvier 2001 et qui, à hauteur de 10 000
francs annuels par place, permettra d'assurer, nous semble-t-il, ce qui la
plupart du temps ne se faisait pas, c'est-à-dire la gestion, le gardiennage et
la maintenance des aires d'accueil.
En effet, nombre de maires ont vu leurs efforts ruinés, certes parce qu'ils
ont été trop peu nombreux à y consentir, mais aussi parce qu'ils se trouvaient
seuls à assumer les charges induites par la réalisation d'une aire. Nous
pallions, je crois, cette carence, et ce sera une grande avancée.
En fait, ce n'est qu'une mise à parité car l'aide au fonctionnement qui sera
apportée par l'Etat annuellement, et qui sera répétitive, est, d'une certaine
manière, l'équivalent de l'allocation de logement temporaire, l'ALT, pour les
structures d'accueil que constituent les foyers. Il est clair qu'une aire
d'accueil ne peut pas vraiment s'assimiler à l'habitat traditionnel. Il fallait
donc trouver une équivalence et c'est ce que nous avons cherché.
Monsieur About, je souhaite vous avoir convaincu qu'il n'y a pas de manoeuvre.
J'ai été l'un des membres du Gouvernement à indiquer que, si les citoyens le
souhaitent, j'assumerai à nouveau des fonctions locales, et je n'ai nullement
l'intention de me piéger moi-même, croyez-moi !
M. Nicolas About.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je souhaite vous avoir quelque peu rassuré sur ce
point.
Les dispositions qui vous sont proposées, et qui renforcent les possibilités
de lutter contre les occupations illicites, constituent des avancées
incontestables. Vous y avez contribué.
Je pense au référé d'heure et à heure à votre souhait que l'exécution soit
possible sur simple transmission de la décision, sans que soient mis en oeuvre
les processus complexes de notification parfois délicate et pouvant mettre en
échec la communication de l'information.
Je pense aussi aux dispositions ouvrant au juge la possibilité, par
injonction, de décider que le territoire de la commune devra être quitté pour
éviter la répétition de procédures.
Je pense enfin, car j'ai compris que, sur ce point, le Gouvernement ne serait
pas entendu, à l'unification de la juridiction compétente : que les terrains
soient publics ou privés, vos collègues de l'Assemblée nationale souhaitent que
la juridiction civile soit seule compétente. Bref, nous sommes dans une logique
de simplification, de recherche d'efficacité.
Dans cette optique, mon collègue ministre de l'intérieur m'associera à une
prochaine réunion des préfets, qu'il s'agit de sensibiliser à la nécessité
d'accorder le concours de la force publique lorsque les collectivités locales
sont elles-mêmes respectueuses de la loi, comme souvent les juridictions le
font remarquer. Ma collègue garde des sceaux donnera, par ailleurs, toutes
instructions utiles pour qu'il soit fait diligence dans l'instruction des
instances qui pourraient être engagées à ce sujet.
J'espère donc que nous aboutirons à ce texte équilibré, qui nécessite des
prises de conscience permettant de surmonter les points d'incompréhension
majeurs qui existent entre les diverses composantes de la population du
pays.
Les gens du voyage qui, fautes d'aires d'accueil, sont souvent « invités » à
aller ailleurs nous disent souvent : « Nous sommes déjà dehors et on veut
encore nous mettre dehors ! » C'est, quelque part, une vérité.
L'essentiel, c'est que les aires aménagées soient en nombre suffisant pour que
tous disposent d'une place adaptée, convenable, et qu'ainsi la vie dans nos
collectivités retrouve un caractère paisible.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe
communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, aux termes de l'article 42, alinéa 10, du règlement, à partir
de la deuxième lecture au Sénat des projets ou propositions de loi, la
discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux chambres du
Parlement n'ont pas encore adopté un texte identique.
Article 1er
M. le président.
« Art. 1er. - I. - Les communes participent à l'accueil des personnes dites
gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences
mobiles.
« I
bis.
-
Supprimé.
»
« II. - Dans chaque département, au vu d'une évaluation préalable des besoins
et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours
des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux
soins et d'exercice des activités économiques, un schéma départemental prévoit
les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et
les communes où celles-ci doivent être réalisées.
« Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma
départemental. Il précise la destination des aires permanentes d'accueil et
leur capacité. Il définit la nature des actions à caractère social destinées
aux gens du voyage qui les fréquentent.
« Le schéma départemental détermine les emplacements susceptibles d'être
occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou
occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l'Etat intervient pour
assurer le bon déroulement de ces rassemblements.
« Une annexe au schéma départemental recense les autorisations délivrées sur
le fondement de l'article L. 443-3 du code de l'urbanisme. Elle recense
également les terrains devant être mis à la disposition des gens du voyage par
leurs employeurs, notamment dans le cadre d'emplois saisonniers.
« III. - Le schéma départemental est élaboré par le représentant de l'Etat
dans le département et le président du conseil général. Après avis du conseil
municipal des communes concernées et de la commission consultative prévue au
IV, il est approuvé conjointement par le représentant de l'Etat dans le
département et le président du conseil général dans un délai de dix-huit mois à
compter de la publication de la présente loi. Passé ce délai, il est approuvé
par le représentant de l'Etat dans le département. Il fait l'objet d'une
publication.
« Le schéma départemental est révisé selon la même procédure au moins tous les
six ans à compter de sa publication.
« IV. - Dans chaque département, une commission consultative, comprenant
notamment des représentants des communes concernées, des représentants des gens
du voyage et des associations intervenant auprès des gens du voyage, est
associée à l'élaboration et à la mise en oeuvre du schéma. Elle est présidée
conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et par le
président du conseil général, ou par leurs représentants.
« La commission consultative établit chaque année un bilan d'application du
schéma. Elle peut désigner un médiateur chargé d'examiner les difficultés
rencontrées dans la mise en oeuvre de ce schéma et de formuler des propositions
de règlement de ces difficultés. Le médiateur rend compte à la commission de
ses activités.
« V. - Le représentant de l'Etat dans la région coordonne les travaux
d'élaboration des schémas départementaux. Il s'assure de la cohérence de leur
contenu et de leurs dates de publication. Il réunit à cet effet une commission
constituée des représentants de l'Etat dans les départements, du président du
conseil régional et des présidents des conseils généraux, ou de leurs
représentants.
« VI. -
Supprimé.
»
Par amendement n° 1, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Est considéré comme résidence mobile, au sens de la présente loi, tout
véhicule ou élément de véhicule constituant le domicile permanent de ses
occupants et conservant des moyens de mobilité lui permettant de se déplacer
par lui-même ou d'être déplacé par simple traction. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Il s'agit de définir une nouvelle notion figurant dans ce
texte de loi, celle de « résidence mobile ».
Cela nous paraît important parce que l'application du dispositif prévu à
l'article 9 permet aux maires d'interdire ce stationnement en dehors de l'aire
aménagée. Il doit donc y avoir une définition très précise de la résidence
mobile. D'ailleurs, M. le secrétaire d'Etat lui-même avait donné une définition
lors du débat à l'Assemblée nationale, définition que nous avons reprise avec
l'accord du Gouvernement. Il nous apparaît très utile de préciser cette
notion.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur, le Gouvernement n'est pas en
désaccord avec cette définition de la résidence mobile. Toutefois, depuis la
première lecture de ce projet de loi, la Haute Assemblée a introduit dans le
projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains un article
qui aborde le problème de façon plus générale et qui habilite le Gouvernement à
clarifier par décret la notion de résidence mobile.
Il est vrai que les maires sont confrontés à des problèmes de résidences
mobiles habitées par les gens du voyage mais aussi à des problèmes d'urbanisme
avec certains résidents secondaires qui ne vivent pas dans un habitat en
dur.
Cet article additionnel adopté par le Sénat a été accepté par le Gouvernement
qui, dans ces conditions, procédera par voie réglementaire. Mais je puis d'ores
et déjà indiquer que ces textes réglementaires ne seront pas en contradiction
avec la définition que vous donnez. Ils présenteront simplement l'intérêt de
viser l'ensemble des résidences mobiles et pas seulement celles qui sont
utilisées par les gens du voyage.
Le souhait de la commission des lois du Sénat étant ainsi satisfait, peut-être
M. le rapporteur pourrait-il retirer cet amendement.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je suis quelque peu surpris par votre argumentation, monsieur
le secrétaire d'Etat. Il est parfaitement compréhensible qu'une loi sur
l'urbanisme laisse au décret le soin de déterminer ce qui distingue une
résidence mobile permettant à des vacanciers ou à d'autres personnes de
disposer non pas d'une résidence secondaire mais d'un pied-à-terre.
En revanche, dans ce texte très équilibré qui vise à autoriser le
stationnement des gens du voyage, c'est-à-dire
ipso facto
à l'interdire
sur d'autres zones, il convient que les maires puissent mobiliser les forces de
police et de gendarmerie à partir d'une décision de justice. Or le juge ne se
prononcera qu'à partir du moment où il estimera que les résidences mobiles
visées concernent des gens du voyage, ce qui ne serait pas possible si la
définition était totalement floue.
En l'occurrence, nous visons très spécifiquement les résidences mobiles qui
constituent l'habitat permanent de leurs occupants. C'est une caractéristique
des gens du voyage, ce qui permet d'engager une action en justice et une
intervention de l'Etat en cas de stationnement illicite. Cette précision
constitue selon nous un apport très important.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 1, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 2, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rétablir
le I
bis
de l'article 1er dans la rédaction suivante :
« I
bis.
- Un schéma national d'accueil des gens du voyage définit les
conditions d'accueil des gens du voyage dans le cadre de rassemblements
traditionnels.
« Dans le respect des orientations de la politique nationale d'aménagement et
de développement du territoire, le schéma national fixe la liste des terrains
susceptibles d'être utilisés à cette fin et prévoit les aménagements
nécessaires qui devront être réalisés sur ces terrains.
« Le conseil national de l'aménagement et du développement du territoire, créé
par la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le
développement du territoire, et la commission nationale consultative des gens
du voyage sont associés à l'élaboration du projet de schéma national d'accueil
des gens du voyage. Ils donnent leur avis sur ce projet.
« Les directives territoriales d'aménagement mentionnées à l'article L.
111-1-1 du code de l'urbanisme, lorsqu'elles précisent les objectifs de l'Etat
en matière de localisation des terrains d'accueil des gens du voyage dans le
cadre des rassemblements traditionnels, prennent en compte les orientations du
schéma national. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
En toute logique, cet amendement vise à reprendre une
disposition adoptée par le Sénat en première et en deuxième lecture. Il
consiste à prévoir l'élaboration d'un schéma national pour l'accueil des gens
du voyage lors des grands rassemblements afin d'impliquer l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement n'ayant pas été convaincu au cours des
deux lectures précédentes, sa position reste donc négative.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 2, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 3, M. Delevoye, au nom de la commission, propose :
I. - De supprimer la première phrase du deuxième alinéa du II de l'article
1er.
II. - En conséquence, de rédiger comme suit le début de la deuxième phrase du
même alinéa : « Le schéma départemental précise la destination... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous avons acté, dès le début de la discussion de ce projet
de loi, que le département était le bon niveau pour une approche globale de
l'aménagement d'aires en faveur des gens du voyage.
Dans cette optique, nous estimons qu'il est parfaitement irréaliste d'obliger
les communes de 5 000 habitants - même si l'on peut comprendre pourquoi on a
choisi ce seuil - à mettre en place des aires d'accueil.
En effet, une commune de 5 000 habitants entièrement urbanisée et englobée au
sein d'une grande agglomération urbaine ne pourra pas le faire, pour des
raisons d'ordre purement technique. En revanche, une commune plus petite située
à la périphérie de cette agglomération pourra parfaitement réaliser une aire,
au sein d'une intercommunalité, voire après avoir conclu une convention avec ce
territoire rural, et ce dans des conditions bien plus agréables pour les gens
du voyage et bien plus sécurisantes pour les habitants des agglomérations
urbaines.
On ne peut que constater l'intérêt qu'il y aurait à ne pas occulter certaines
zones dans lesquelles, sans obligation, les élus locaux risqueraient de ne pas
accepter ces zones d'accueil.
Pour améliorer la qualité de l'offre des aires d'accueil pour les gens du
voyage, il convient de supprimer la mention spécifique des communes de plus de
5 000 habitants, ce qui
a contrario
permet une approche
départementale.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
La commission et le Gouvernement aboutissent à des
conclusions divergentes sur ce point, alors que, en fait, nos analyses ne sont
pas aussi divergentes.
En faisant inscrire obligatoirement dans les schémas départementaux les
communes de plus de 5 000 habitants, le Gouvernement souhaite que, dans
l'hypothèse d'une absence de réponse intercommunale, il y ait au moins la
garantie que les communes les plus importantes feront un effort.
Ne pas les citer peut les amener à ne pas se sentir concernées par le schéma
et, éventuellement, à ne pas contribuer à la réalisation d'une aire qui
pourrait voir le jour dans une commune de plus petite taille.
Il est bien clair que le texte encourage les réponses intercommunales, la
référence à ce seuil étant une garantie qu'au minimum les communes de plus de 5
000 habitants ne s'abstrairont pas d'une participation à une solution.
Mentionner les communes de plus de 5 000 habitants dans le texte ne signifie
pas que, si l'analyse des besoins fait ressortir la nécessité de réaliser une
aire dans un secteur géographique où il n'y aura aucune commune atteignant ou
dépassant les 5 000 habitants, il ne puisse pas être demandé à des communes de
plus petite taille d'accueillir une aire.
Il s'agit donc, selon nous, d'une obligation qui est une garantie et nous la
concevons avec beaucoup de souplesse. A cet égard, nous ne sommes pas très
éloignés du raisonnement de M. le rapporteur. Nous souhaitons cependant que le
Sénat n'adopte pas l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 3, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 4, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit l'avant-dernier alinéa du II de l'article 1er :
« Le schéma départemental prend en compte les terrains qui, en application du
schéma national et sous la responsabilité de l'Etat, sont susceptibles d'être
occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels. Il peut
prévoir les adaptations nécessaires. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
En toute logique, il s'agit de coordonner le schéma national
et le schéma départemental.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
En toute logique également, le Gouvernement est
défavorable à l'amendement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 4, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 5, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le début de la dernière phrase du dernier alinéa du II de l'article
1er : « Elle peut également recenser les terrains mis à la disposition... ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Ainsi que l'avait suggéré le Sénat, l'Assemblée nationale a
admis que la question des travailleurs saisonniers soit abordée dans le cadre
du schéma départemental.
Nous avons cependant souhaité apporter une clarification au texte de
l'Assemblée nationale, car il n'existe pas d'obligation de mise à disposition
de terrains par les employeurs de travailleurs saisonniers. C'est la raison
pour laquelle le schéma ne peut que recenser les terrains mis à disposition.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Favorable.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 6, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
supprimer l'avant-dernière phrase du premiser alinéa III de l'article 1er.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Cet amendement traite effectivement de l'un des points de
divergence de fond entre le Gouvernement, quelques groupes de la majorité
parlementaire à l'Assemblée nationale et nous-mêmes : il s'agit de la
suppression de la faculté pour le représentant de l'Etat d'approuver seul le
schéma départemental.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je crois que le Gouvernement s'est déjà bien expliqué
sur ce point.
Sur l'initiative du Parlement et non pas du Gouvernement avait été voté, dans
la loi du 31 mai 1990, un article 28 qui ne prévoyait pas d'issue dans
l'hypothèse où il n'interviendrait pas d'accord entre le conseil général et le
préfet. Tirant les leçons de ce que, dix ans plus tard, un tiers seulement des
objectifs ont été atteints, il faut bien que nous avancions. Nous souhaitons
donc, bien sûr, que le Sénat repousse l'amendement.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je répéterai devant vous ce
qui a été dit tout à l'heure devant votre collègue M. Masseret.
Vous avez tiré de bonnes conclusions des difficultés d'application de
l'article 28 et vous y avez apporté des solutions - nous y avons tous contribué
- avec les subventions et les procédures judiciaires. Je crois que ces
dispositions suffisaient. Elles permettent en effet de donner aux élus locaux
l'assurance qu'en créant des aires d'accueil ils pourront mobiliser les
services de l'Etat pour interdire les stationnements illicites.
Il s'agit de dispositifs fortement incitatifs, ce qui vaut mieux qu'une
contrainte à laquelle personne ne croit.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez mis en place des mesures afin de
remédier à l'échec de l'article 28. Mais vous ne croyez pas en leur efficacité
puisque vous êtes obligé de prévoir une contrainte du préfet sur les
collectivités territoriales.
Par ailleurs - je reprends l'argument de Mme Terrade - à nos yeux, la
décentralisation, au nom de l'efficacité de l'action publique, est fondée sur
un partenariat équilibré reposant sur un contrat entre l'Etat et les
collectivités territoriales. Ce contrat implique l'équilibre entre les deux
parties. Or, en l'occurrence, parce qu'il est à peu près convaincu que les élus
n'appliqueront pas la loi, le Gouvernement prévoit un dispositif
contraignant.
En agissant ainsi, il rompt le climat de confiance qui doit régner entre
l'Etat et les collectivités locales et c'est contraire à l'esprit de la
décentralisation.
Je crois que nous étions tous d'accord pour trouver une réponse équilibrée aux
problèmes que posent les gens du voyage : faire en sorte que ceux-ci puissent
respecter les lois de la République et n'exiger ce respect qu'à partir du
moment où ils pourront être accueillis normalement dans les aires
d'accueils.
Quand vous avez dit que vous aviez conscience du caractère fugace de votre
passage au Gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai cru que vous aviez
inventé la notion de nomades politiques. J'étais en train de me dire qu'il
fallait donner un caractère juridique à la résidence mobile que pouvait
constituer un poste gouvernemental
(Sourires),
mais je n'ai pas voulu le faire ni par la contrainte ni
autrement...
Mme Odette Terrade.
Moi, je tiens à ce qu'il reste le plus longtemps possible !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous n'avons pas intérêt à remettre en cause l'esprit de la
décentralisation...
M. Serge Vinçon.
Tout à fait !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
... ni en recentralisant sur le plan fiscal, ni en créant une
capacité de mobilisation d'un certain nombre de personnes contre l'Etat, car la
contrainte suscitera des phénomènes de résistance et non une volonté de
partenariat.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Dernier point : si aux mesures efficaces que vous allez
mettre en place - l'augmentation des subventions, les référés d'heure à heure -
vous ajoutez la détermination des préfets à mettre en application les décisions
de justice, les élus seront beaucoup plus enclins à installer des aires
d'accueil parce que ce sera l'intérêt de chacun. Mais, à partir du moment où
interviendra la contrainte, vous allez offrir l'opportunité à un certain nombre
d'élus de dire : que l'Etat se débrouille, que l'Etat assume la totalité de la
charge !
On aurait pu dire d'une façon un peu provocatrice : que l'Etat assume un
service national des aires d'accueil, qu'il les crée lui-même, qu'il les
finance lui-même, qu'il paie des gardiens lui-même au nom de la politique pour
l'emploi, qu'il assume la protection, la réparation, ainsi que l'évacuation des
zones illicites créant ainsi un formidable service national des aires d'accueil
pour les gens du voyage, au nom de la solidarité nationale et, demain, de la
solidarité européenne. Ainsi, il assumera pleinement ses responsabilités.
(Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et
Indépendants.)
Nous n'avons pas intérêt à marginaliser une minorité nomade ni à nous
servir pour opposer l'Etat et les collectivités territoriales. Il faut au
contraire renforcer la contractualisation. Et je connais sur ce point votre
état d'esprit !
C'est la raison pour laquelle, alors que nous cherchons à apporter une
solution sur le terrain, nous ne croyons ni à votre proposition, ni à la
capacité du préfet à agir par la contrainte. Nous estimons que cela risque de
se retourner contre la communauté des gens du voyage.
M. Serge Vinçon.
Très bien !
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
J'ai l'avantage ou l'inconvénient d'être en « rechute
» dans la fonction que j'assume en ce moment puisque j'ai déjà défendu la loi
du 31 mai 1990.
(Sourires.)
Une disposition de cette loi du 31 mai 1990 prévoyait une possibilité
d'approbation unilatérale des plans départementaux d'action pour le logement
des personnes défavorisées. Vous aviez combattu cette disposition qui avait
néanmoins été votée.
Parce qu'elle existait ou en tout cas malgré son existence, tous les plans
départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées ont été
conclus dans la confiance et à l'amiable, dans le délai prévu par la loi.
Une disposition ne prévoyait pas de possibilité d'approbation unilatérale,
celle qui concernait les gens du voyage.
Je constate que, dix ans après, un département sur trois a un schéma
co-approuvé alors que les deux tiers n'en sont pas dotés. Par conséquent, cette
loi du 31 mai 1990 nous donne l'exemple des deux cas de figure : cela a marché
dans le premier et pas dans le second. Ce constat est difficilement
réfutable.
Les choses doivent être claires : le Gouvernement donne la priorité à la
confiance, il veut simplement éviter la paralysie.
Monsieur le rapporteur, j'ai le souvenir que, lors de la précédente lecture,
une voix s'était élevée dans les rangs de la majorité sénatoriale - c'était
celle d'un président de conseil général d'un groupe qui n'est pas le vôtre -
pour dire : « Finalement, pourquoi s'embêter à être coresponsable d'un schéma
dont le contenu peut indisposer certains de nos maires ? Une approbation
unilatérale serait bien préférable. » Je ne partageais pas cet avis, mais vous
voyez que bien des argumentations sont possibles.
Nous sommes dans une rédaction de compromis. Ce que nous souhaitons, c'est
que, dans la plupart des cas, on réussisse à trouver un accord local. Je crois
que ce peut être le cas dans l'immense majorité des situations. Même en cas de
mauvaise volonté ou de référence à ce raisonnement que je viens d'évoquer et
qui a ses défenseurs, raisonnement consistant à dire qu'il s'agit d'un sujet
difficile et qu'il vaut mieux en rester au schéma arrêté par le seul préfet
afin de ne pas supporter une responsabilité partagée, nous aurions la certitude
de pouvoir aboutir. Or je crois que c'est bien l'objectif de tout législateur
que de souhaiter voter une loi qui s'applique partout, faute de quoi ce n'est
pas tout à fait la loi !
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 6, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 7, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, dans la
première phrase du premier alinéa du IV de l'article 1er, de remplacer les mots
: « comprenant notamment des représentants des communes concernées, des
représentants des gens du voyage et des associations intervenant auprès des
gens du voyage » par les mots : « composée des représentants du département,
des représentants des communes et de leurs groupements, des représentants des
services de l'Etat, des représentants des gens du voyage et des associations
intervenant auprès des gens du voyage ainsi que des personnalités qualifiées
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Cet amendement précise de façon plus fine la composition de
la commission départementale chargée d'élaborer le schéma départemental.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement se permet d'attirer l'attention de la
Haute Assemblée sur le fait que la rédaction actuelle est plus souple que celle
qui est proposée par cet amendement. Elle contient en effet la mention «
notamment », qui a l'avantage de permettre une adaptation de la composition de
la commission départementale à la réalité du contexte local.
En donnant une définition limitative et trop stricte, l'amendement n° 7, s'il
était adopté, risquerait de soulever des problèmes liés à une moins bonne
adaptabilité à la diversité des situations. Le Gouvernement préfère donc le
statu quo
et préconise le rejet de l'amendement n° 7.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je suis un peu surpris par votre argumentation, monsieur le
secrétaire d'Etat, car notre texte est au contraire beaucoup plus souple et
plus large que la rédaction actuelle du projet de loi. En effet, il fait
mention de « personnalités qualifiées », ce qui apporte une beaucoup plus
grande souplesse dans la composition de la commission.
Votre argument serait donc beaucoup plus adapté à une demande de rejet du
texte du Gouvernement au profit du nôtre !
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 7, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je suis maintenant saisi de deux amendements présentés par M. Delevoye, au nom
de la commission.
L'amendement n° 8 tend à rédiger comme suit le V de l'article 1er :
« V. - En région d'Ile-de-France, une commission régionale composée des
représentants de l'Etat dans les départements, du président du conseil régional
et des présidents de conseils généraux, ou de leurs représentants, assure, le
cas échéant, la coordination des travaux d'élaboration des schémas
départementaux ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs dates de
publication.
« Les propositions de la commission régionale sont soumises pour avis aux
commissions consultatives départementales concernées. »
L'amendement n° 9 vise à rétablir le VI de l'article 1er dans la rédaction
suivante :
« VI. - Hors la région d'Ile-de-France, une commission interdépartementale
composée des représentants de l'Etat dans les départements et des présidents de
conseils généraux concernés, ou de leurs représentants, assure, le cas échéant,
la coordination des travaux d'élaboration des schémas départementaux de
départements limitrophes ainsi que la cohérence de leur contenu et de leurs
dates de publication.
« Les propositions de la commission interdépartementale sont soumises pour
avis aux commissions consultatives départementales concernées. »
La parole est à M. le rapporteur pour défendre ces deux amendements.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous avions souhaité qu'il y ait une approche régionale de la
situation en Ile-de-France afin de permettre une coordination plus souple entre
les schémas départementaux et une coordination interdépartementale dans les
autres régions.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement rappelle - c'était d'ailleurs un
souhait de la Haute Assemblée - qu'il n'y a pas de tutelle d'une collectivité
sur une autre. Cela légitime à ses yeux que la commission régionale soit
présidée par le représentant de l'Etat dans la région. Il convient en outre de
ne pas instituer une coordination interdépartementale obligatoire. En effet,
les départements français sont très inégalement sollicités par les gens du
voyage itinérants. Certains, peu fréquentés, n'éprouveront pas le besoin de
résoudre, par une solution interdépartementale, les éventuels problèmes
rencontrés.
Le texte du projet de loi évite cette lourdeur. Le Gouvernement ne souhaite
donc pas qu'il soit amendé.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de ne pas être,
là non plus, en accord avec votre argumentation.
Nous souhaitons, au contraire, que ce soit l'expression d'une volonté des
commissions départementales de se regrouper pour réfléchir à une meilleure
coordination de l'offre, quelles que soient les frontières, et non pas le fait
de l'autorité d'un préfet qui serait susceptible de mettre en place à cette
occasion une tutelle sur les collectivités territoriales.
Donc, cet amendement s'inscrit plutôt dans une approche de bon sens du terrain
afin qu'une réflexion d'ensemble, dépassant l'espace départemental, puisse
avoir lieu si les commissions départementales le souhaitent.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 8, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 9, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 1er
bis
M. le président.
L'article 1er
bis
a été supprimé par l'Assemblé nationale.
Mais, par amendement n° 10, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
rétablir cet article dans la rédaction suivante :
« Il est inséré dans le chapitre V du titre Ier du livre II de la deuxième
partie du code général des collectivités territoriales un article L. 2215-1-1
ainsi rédigé :
«
Art. L. 2215-1-1. -
Dans le cadre des pouvoirs qui lui sont reconnus
par l'article L. 2215-1, le représentant de l'Etat dans le département veille à
la mise en oeuvre des orientations fixées par le schéma national prévu par la
loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
En rétablissant le schéma national, la commission souhaite
réaffirmer le rôle de l'Etat dans les grands rassemblements traditionnels.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a émis un avis négatif sur la création
d'un schéma national.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 10, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 1er
bis
est rétabli dans cette rédaction.
Article 2
M. le président.
« Art. 2. - I. - Les communes figurant au schéma départemental en application
des dispositions des II et III de l'article 1er sont tenues, dans un délai de
deux ans suivant la publication de ce schéma, de participer à sa mise en
oeuvre. Elles le font en mettant à la disposition des gens du voyage une ou
plusieurs aires d'accueil, aménagées et entretenues. Elles peuvent également
transférer cette compétence à un établissement public de coopération
intercommunale chargé de mettre en oeuvre les dispositions du schéma
départemental ou contribuer financièrement à l'aménagement et à l'entretien de
ces aires d'accueil dans le cadre de conventions intercommunales. »
« I
bis.
-
Supprimé.
« II. -
Non modifié.
»
Par amendement n° 11, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit les deux premières phrases du I de cet article : « Les communes et
leurs groupements concourent à la mise en oeuvre du schéma départemental par la
réservation, en fonction des orientations fixées par celui-ci de terrains
aménagés et entretenus en vue du passage et du séjour des gens du voyage. A
cette fin, dans un délai de deux ans à compter de la publication du schéma
départemental, les communes mettent à la disposition des gens du voyage les
aires d'accueil, aménagées et entretenues, prévues par ce dernier. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
L'Assemblée nationale avait décidé de mentionner les communes
de plus de 5 000 habitants à l'article 1er et non plus à l'article 2.
La rédaction des deux assemblées était relativement proche mais la rédaction
adoptée par le Sénat paraît néanmoins plus précise. C'est la raison pour
laquelle cet amendement vise à la reprendre.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Il s'agit d'un amendement de coordination avec
l'amendement n° 3, qui n'avait pas recueilli l'adhésion du Gouvernement.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 11, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 12, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
rétablir le I
bis
de l'article 2 dans la rédaction suivante :
« I
bis
. - Sur la demande de la commune concernée, le délai mentionné
au I peut être prolongé par le représentant de l'Etat dans le département,
après avis de la commission consultative départementale, lorsque la réalisation
de l'aire dans ce délai se heurte à des difficultés techniques ou de procédure
dûment constatées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous sommes d'accord sur le
fait qu'une loi doit imposer un délai, mais nous avons souhaité une
prolongation du délai légal de deux ans sur la demande de la commune concernée
lorsque celle-ci devra faire face à des difficultés imprévues d'ordre technique
ou procédurale qui empêcheraient la réalisation de l'aire. Cette prolongation
du délai ne pourrait être appliquée que sous condition de difficulté de
réalisation ; il ne s'agit pas de permettre à une commune d'échapper à ses
obligations.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement ne fait pas du tout de procès
d'intention à la commission, pas plus sur cette disposition que sur les
autres.
Le Gouvernement souhaite simplement souligner que, dans la rédaction du projet
de loi telle qu'elle vous est présentée, le préfet n'a pas une obligation
systématique de mettre en oeuvre son pouvoir de substitution. Selon l'article
3, le préfet « peut », et non pas « doit » : il y a donc déjà, nous
semble-t-il, une certaine souplesse. Autrement dit, le texte réserve un pouvoir
d'appréciation quant aux difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre des
obligations du schéma.
Dans ces conditions, le Gouvernement considère que cet amendement est d'ores
et déjà satisfait.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 12, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
M. le président.
« Art. 3. - I. - Si, à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la
publication du schéma départemental et après mise en demeure par le préfet
restée sans effet dans les trois mois suivants, une commune ou un établissement
public de coopération intercommunale n'a pas rempli les obligations mises à sa
charge par le schéma départemental, l'Etat peut acquérir les terrains
nécessaires, réaliser les travaux d'aménagement et gérer les aires d'accueil au
nom et pour le compte de la commune ou de l'établissement public défaillant.
« Les dépenses d'acquisition, d'aménagement et de fonctionnement de ces aires
constituent des dépenses obligatoires pour les communes ou les établissements
publics qui, selon le schéma départemental, doivent en assumer les charges. Les
communes ou les établissements publics deviennent de plein droit propriétaires
des aires ainsi aménagées, à dater de l'achèvement de ces aménagements. »
« II. - Le 31° de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités
territoriales est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« 31° Les dépenses occasionnées par l'application des dispositions des
articles 2 et 3 de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des
gens du voyage ;
« 32° L'acquittement des dettes exigibles. »
Par amendement n° 13, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
supprimer le I de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Il s'agit de la suppression du pouvoir de substitution
reconnu au représentant de l'Etat.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Nous nous sommes expliqués sur ce point. J'appelle
néanmoins l'attention de la Haute Assemblée sur le fait que la substitution
existe pour tous les problèmes de sécurité. Il s'agit donc ici, non d'une
innovation législative, mais de l'extension d'un mécanisme à un problème
difficile, à propos duquel nous souhaitons voir chacun mettre en oeuvre la loi
républicaine sur son territoire.
Par conséquent, nous ne pouvons accepter que cette possibilité de substitution
soit supprimée.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 13, repoussé par le Gouvernement.
(L.'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 14, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa du texte présenté par le II de l'article 3 pour remplacer le 31°
de l'article L. 2321-2 du code général des collectivités territoriales, de
remplacer les mots : « des articles 2 et 3 » par les mots : « de l'article 2
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
C'est un amendement de coordination, monsieur le
président.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Défavorable, par coordination.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 14, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
M. le président.
« Art. 4. - L'Etat prend en charge les investissements nécessaires à
l'aménagement et à la réhabilitation des aires prévues au premier alinéa du II
de l'article 1er, dans la proportion de 70 % des dépenses engagées dans le
délai fixé à l'article 2, dans la limite d'un plafond fixé par décret.
« La région, le département et les caisses d'allocations familiales peuvent
accorder des subventions complémentaires pour la réalisation de ces aires
d'accueil. »
Par amendement n° 15, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, dans le
premier alinéa de l'article 4, après les mots : « de l'article 1er, »,
d'insérer les mots : « ainsi que la réparation de dommages éventuels, ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous avions repris, en première lecture, la proposition de
notre collègue M. Lassourd, par laquelle la contribution de l'Etat, en
partenariat financier avec les collectivités locales, devait intégrer, outre
l'investissement et le fonctionnement, la réparation de dommages éventuels.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'est déjà exprimé sur ce point. Il
souhaite trouver par la voie réglementaire une solution au problème posé. Il ne
lui paraît pas opportun que la loi elle-même précise que les subventions de
l'Etat sont de droit pour la réparation de dommages éventuels : ce serait
admettre l'automaticité de ce droit. Je rappelle que l'Etat consacrera 300
millions de francs par an au fonctionnement des aires d'accueil. Or des cas de
négligence pourraient apparaître, qui ne justifieraient pas que l'Etat
subventionne les travaux de remise en état.
Un texte réglementaire devrait donc prévoir que les dommages éventuels subis
malgré une gestion rigoureuse des aires ouvrent droit à subvention. S'il y a
négligence, c'est que l'aide au fonctionnement aura été mal utilisée.
Le Gouvernement ne souhaite pas que la collectivité nationale supporte une
aide à la gestion et fasse en même temps les frais d'une mauvaise gestion qui
aboutirait à la nécessité d'effectuer des réparations.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 15.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 15, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 4, ainsi modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
M. le président.
« Art. 5. - I et II. -
Non modifiés.
« III. - L'article L. 851-1 du même code est complété par un II ainsi rédigé
:
«
II. -
Une aide forfaitaire est versée aux communes ou aux
établissements publics de coopération intercommunale qui gèrent une ou
plusieurs aires d'accueil de gens du voyage. Elle est également versée aux
personnes morales qui gèrent une aire en application d'une convention prévue au
II de l'article 2 de la loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des
gens du voyage.
« Une convention passée avec l'Etat fixe, compte tenu de la capacité effective
des aires d'accueil, le montant prévisionnel de l'aide versée annuellement à
ces gestionnaires. Cette convention détermine les modalités de calcul du droit
d'usage perçu par les gestionnaires des aires d'accueil et définit les
conditions de leur gardiennage. »
« IV et V. -
Non modifiés.
»
Par amendement n° 16, M. Delevoye, au nom de la commission, propose, dans la
seconde phrase du second alinéa du texte présenté par le III de cet article
pour le II de l'article L. 851-1 du code de la sécurité sociale, de remplacer
les mots : « du droit d'usage perçu » par les mots : « de la redevance perçue
».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Il est prévu que le gestionnaire d'une aire d'accueil perçoit
un droit auprès de ceux qui y stationnent. Ce droit peut s'analyser comme une
redevance. Cette dernière notion juridique permettrait à la commune d'envisager
une délégation de service public.
Puisque cet article 5 traite de l'aide forfaitaire, j'indique que nous nous
réjouissons de voir l'Etat participer au fonctionnement des aires d'accueil. Je
rappelle simplement que le Sénat avait souhaité, lors des lectures précédentes,
une augmentation de cette aide forfaitaire, estimant qu'elle devait atteindre
15 000 francs par an et par place, au lieu des 10 000 francs que vous avez
retenus, monsieur le secrétaire d'Etat. Mais vous nous avez systématiquement
opposé l'article 40 de la Constitution.
Nous déplorons cette faiblesse des aides forfaitaires, car c'est la qualité du
fonctionnement qui assurera la pérennité des installations. Un accompagnement
financier plus marqué de la part de l'Etat aurait été bienvenu.
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement a déjà eu l'occasion de dire que la
redevance a une connotation fiscale plus contraignante que le droit d'usage ;
ce dernier terme semble donc mieux adapté. Cela étant, j'admet bien volontiers
qu'il ne s'agit pas d'une question fondamentale.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Nous sommes quelque peu surpris par l'argumentation de M. le
secrétaire d'Etat, car la redevance est, par définition, la contrepartie d'un
service rendu.
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 16, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 5, ainsi modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 7
M. le président.
« Art. 7. - Le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des
collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Cette population est la population totale majorée, sauf disposition
particulière, d'un habitant par résidence secondaire et d'un habitant par place
de caravane située sur une aire d'accueil des gens du voyage satisfaisant aux
conditions de la convention de l'article L. 851-1 du code de la sécurité
sociale et aux normes techniques en vigueur, fixées par un décret en Conseil
d'Etat. La majoration de population est portée à deux habitants par place de
caravane pour les communes éligibles l'année précédente à la dotation de
solidarité urbaine prévue à l'article L. 2334-15 ou à la première fraction de
la dotation de solidarité rurale prévue à l'article L. 2334-21. »
M. le président.
Par amendement n° 17, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit cet article :
« I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 2334-2 du code général des
collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Cette population est la population totale majorée, sauf disposition
particulière, d'un habitant par résidence secondaire et de quatre habitants par
place de caravane située sur une aire d'accueil des gens du voyage satisfaisant
aux conditions de la convention de l'article L. 851-1 du code de la sécurité
sociale et aux normes techniques en vigueur, fixées par décret en Conseil
d'Etat. »
« II. - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la majoration de la
population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de
fonctionnement est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe
additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des
impôts. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
L'article 7 tend à majorer la population prise en compte pour
le calcul de la DGF.
Nous partageons le souci exprimé par Mme Terrade concernant le déplafonnement
de l'aide à l'investissement à hauteur de 70 % des dépenses engagées. Il est
vrai que certaines communes auront peut-être plus de difficultés que d'autres à
réaliser des aires d'accueil et qu'il conviendrait d'instaurer une certaine
souplesse dans l'accompagnement de l'Etat.
A propos de l'aide forfaitaire, je le répète, nous aurions préféré qu'elle
soit plus importante. Le Gouvernement ayant chaque fois invoqué l'article 40 de
la Constitution, nous nous étions ralliés à un amendement de M. Peyronnet
prévoyant une majoration de DGF fondée sur quatre habitants par place, étant
entendu que l'enveloppe de cette dotation est constante : ainsi, lorsque l'on
modifie les critères de répartition de la DGF, certaines communes reçoivent en
moins ce que d'autres reçoivent en plus.
L'Assemblée nationale ne nous a pas suivis et a retenu une procédure assez
complexe, prévoyant deux habitants par place pour les communes éligibles à la
dotation de solidarité urbaine ou à la fraction bourgs-centres de la dotation
de solidarité rurale. Cela va compliquer encore un peu plus le système de la
DGF au moment même où les spécialistes financiers s'accordent à considérer que
son mécanisme devra être complètement revu en 2002 ou en 2003, faute de quoi le
système explosera. La preuve en est que l'Etat a augmenté de 500 millions de
francs l'enveloppe de cette dotation parce qu'elle ne pouvait plus financer
l'intercommunalité et qu'il a encore ajouté 250 millions de francs pour
compenser la chute de 16 % de la dotation de compensation de la taxe
professionnelle.
En vérité, nous n'avons pas intérêt à « bidouiller » en permanence le
mécanisme de la DGF. C'est bien pourquoi il eût été bien plus sage de mettre en
place une aide forfaitaire de 15 000 francs par place et par commune, ou par
groupement intercommunal : un contrat parfaitement clair aurait ainsi été
passé, couvrant aussi bien l'investissement que le fonctionnement.
Monsieur le secrétaire d'Etat, imaginez que, demain, l'affectation des
territoires changeant, une commune qui possédait une aire d'accueil voie cette
aire se déplacer sur le territoire d'une autre commune. Comment, alors,
pourrait-on reprendre la DGF accordée auparavant au titre de cette aire
d'accueil ? Comment repérer dans le budget la somme ainsi accordée pour la
transmettre à une autre commune ? Au bout de dix ou quinze ans, s'il y a
mobilité des aires d'accueil - cela peut arriver ! - nous connaîtrons des
difficultés financières considérables.
Mieux aurait donc valu instituer un contrat très clair avec l'Etat, avec un
schéma, une définition de la localisation des aires, un accompagnement de
l'Etat pour l'investissement, d'une part, et pour le fonctionnement, d'autre
part, une garantie sur les procédures judiciaires, une garantie sur la
mobilisation des forces de police pour l'évacuation des zones illicites. Cela
aurait eu l'avantage d'être clair, efficace, équilibré, et chacun y aurait
gagné.
M. Jacques Machet.
Très bien !
M. le président.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le rapporteur, les garanties que vous
demandez figurent bien dans ce texte, mais avec des formulations qui respectent
les traditions de notre droit : les décisions relèvent de la justice, les
moyens d'exécution des décisions de justice sont sous la responsabilité des
préfets.
Par ailleurs, le Gouvernement a tout fait pour que les procédures judiciaires
soient accélérées et il s'est engagé à ce que les préfets soient sensibilisés à
la mise en oeuvre des décisions de justice.
En ce qui concerne les questions de financement, je pense que nous pouvons,
les uns et les autres, une fois n'est pas coutume, coiffer notre casquette
locale. L'aire d'accueil pose un problème de gestion. Une aide à la gestion
est, pour la première fois, prévue. Mais nous souhaitons que la réponse soit,
le plus possible, intercommunale.
L'aide à la gestion va aller, bien sûr, au maître d'ouvrage de l'aire
d'accueil et, éventuellement, par son truchement, à l'organisme
gestionnaire.
Cependant, une aire d'accueil sur un territoire communal représente des
dépenses non pas seulement pour ceux qui gèrent l'aire d'accueil mais aussi
pour la collectivité locale qui contribue à la mise en place d'un certain
nombre de moyens : les enfants vont aller à l'école, certains membres de la
famille vont éventuellement émarger à l'action sociale de la commune.
Dès lors, il me paraît normal qu'en plus d'une aide à la gestion il y ait une
aide versée à la commune abritant l'aide d'accueil, par le biais d'un
renforcement de la DGF. Les deux formes d'aide ont leur légitimité, mais elles
n'ont pas la même finalité. Il vaut mieux les additionner plutôt que grossir
l'une et supprimer l'autre.
S'agissant plus particulièrement de la DGF, vous l'imaginez bien, c'est une
question qui fait l'objet de débats interministériels. Le texte était
initialement ce que vous savez : majoration d'un habitant par place de
caravane. A la suite du souci exprimé par les parlementaires, aussi bien au
Sénat qu'à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a eu la volonté de
revaloriser cette aide. Par décision interministérielle, a été décidé un
doublement pour les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine ou à
la dotation de solidarité rurale. L'aide est donc renforcée pour les communes
ayant les moyens les plus limités.
Je ne peux pas aller au-delà de cet arbitrage inter ministériel et je demande,
par conséquent, le rejet de l'amendement n° 17, lequel aurait de surcroît, pour
effet d'augmenter la fiscalité, alors que beaucoup d'efforts sont faits pour la
réduire.
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 17, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
En conséquence, l'article 7 est ainsi rédigé.
Article 8
M. le président.
« Art. 8. - Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
« 1° Au 2° de l'article L. 111-1-2, après les mots : "Les constructions et
installations nécessaires à des équipements collectifs, ", sont insérés les
mots : "à la réalisation d'aires d'accueil ou de terrains de passage des gens
du voyage, " ;
« 2° Au premier alinéa de l'article L. 121-10, après les mots : "la
satisfaction des besoins présents et futurs en matière d'habitat", sont ajoutés
les mots : ", y compris ceux des gens du voyage" ;
« 3° Le chapitre III du titre IV du livre IV est complété par un article L.
443-3 ainsi rédigé :
«
Art. L. 443-3
. - Dans les zones constructibles, des terrains bâtis
ou non bâtis peuvent être aménagés afin de permettre l'installation de
caravanes constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. L'autorisation
d'aménagement est délivrée dans les formes, conditions et délais définis par le
décret en Conseil d'Etat mentionné à l'article L. 443-1. »
- (Adopté.)
Article 9
M. le président.
« Art. 9. - I. - Dès lors qu'une commune remplit les obligations qui lui
incombent en application de l'article 2, son maire ou, à Paris, le préfet de
police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées le
stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles
mentionnées à l'article 1er. Ces dispositions sont également applicables aux
communes non inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire
d'accueil, ainsi qu'à celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au
financement d'une telle aire.
« II. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I,
y compris sur le domaine public, le maire peut, par voie d'assignation délivrée
aux occupants et, le cas échéant, au propriétaire du terrain ou au titulaire
d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance aux
fins de faire ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut
agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la
sécurité ou la tranquillité publiques.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous
astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la
présente loi à défaut de quitter le territoire communal et ordonner l'expulsion
de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction.
« Le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre
provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au
seul vu de la minute. Si le cas requiert célérité, il fait application des
dispositions du second alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure
civile.
« III. - Les dispositions du I et du II ne sont pas applicables au
stationnement des résidences mobiles appartenant aux personnes mentionnées à
l'article 1er de la présente loi :
« 1° Lorsque ces personnes sont propriétaires du terrain sur lequel elles
stationnent ;
« 2° Lorsqu'elles disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de
l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ;
« 3° Lorsqu'elles stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions
prévues à l'article L. 443-3 du code de l'urbanisme.
« IV. - En cas d'occupation, en violation de l'arrêté prévu au I, d'un terrain
privé affecté à une activité à caractère économique, et dès lors que cette
occupation est de nature à entraver ladite activité, le propriétaire ou le
titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain peut saisir le président du
tribunal de grande instance aux fins de faire ordonner l'évacuation forcée des
résidences mobiles. Dans ce cas, le juge statue en la forme des référés. Sa
décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut
ordonner que l'exécution aura lieu au seul vu de la minute. Si le cas requiert
célérité, il fait application des dispositions du second alinéa de l'article
485 du nouveau code de procédure civile. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion
commune.
Par amendement n° 18, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le I de cet article :
« I. - La section I du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième
partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un
article L. 2213-61 ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-6-1.
- Dès qu'une commune respecte l'obligation qui lui
incombe, en application du schéma départemental prévu à l'article 1er de la
loin° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, de réaliser
une aire d'accueil, le maire ou, à Paris, le préfet de police, peut, par
arrêté, interdire le stationnement sur le territoire de la commune, en dehors
des aires d'accueil aménagées, des résidences mobiles mentionnées au même
article.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont applicables aux communes non
inscrites au schéma départemental mais dotées d'une aire d'accueil, ainsi qu'à
celles qui décident, sans y être tenues, de contribuer au financement d'une
telle aire.
« Elles ne sont pas applicables au stationnement des résidences mobiles
appartenant à des gens du voyage lorsque ceux-ci sont propriétaires du terrain
sur lequel elles stationnent, lorsqu'ils disposent d'une autorisation délivrée
sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ou qu'ils
stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions prévues à l'article L.
443-3 dudit code. »
Par amendement n° 21, le Gouvernement propose de rédiger ainsi la première
phrase du I de l'article 9 :
« Dès lors qu'une commune respecte les obligations qui lui incombent en
application de l'article 2 de la présente loi, son maire ou, à Paris, le préfet
de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées
le stationnement sur le territoire de la commune de résidences mobiles
mentionnées à l'article 1er. »
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 18.
M. Jean-Paul Delevoye
rapporteur.
Compte tenu du dépôt tardif de l'amendement n° 21, la
commission des lois n'a pu l'examiner. Cependant, sur le fond, les solutions
proposées par la commission et par le Gouvernement sont assez proches puisque
celui-ci admet désormais, comme l'avait demandé le Sénat, que le maire puisse
prendre un arrêté d'interdiction dès la réalisation d'une aire d'accueil, et
non pas à compter de la réalisation de l'ensemble des obligations. Je me
réjouis de cette évolution.
Toutefois, l'amendement n° 21 est incompatible avec l'amendement n° 18, qui
prévoit en outre l'intégration de cette disposition dans le code général des
collectivités territoriales, dans la mesure où cela concerne, à l'évidence, les
pouvoirs de police du maire. Tenant beaucoup à cette codification, nous ne
pouvons nous rallier à la proposition du Gouvernement même si, sur le fond - la
mise en place des procédures d'interdiction du stationnement sur les zones
périphériques dès la réalisation de l'aire d'accueil - celle-ci nous donne
satisfaction.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour présenter l'amendement n° 21 et
pour donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 18.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
En fait, le Gouvernement avait déposé un seul
amendement mais, par une alchimie dont je n'ai pas le secret, celui-ci a été
scindé en trois. Peut-être cela était-il préférable pour assumer un
parallélisme avec les amendements de la commission. Néanmoins, l'amendement
gouvernemental s'entend comme un tout.
Je suis très clair : je souhaite la reprise de la présentation initiale,
c'est-à-dire un seul amendement regroupant les amendements n°s 21, 22 et 23.
M. le président.
Je suis donc saisi d'un amendement n° 21 rectifié, déposé par le Gouvernement,
et tendant :
A. - A rédiger ainsi la première phrase du I de cet article :
« Dès lors qu'une commune respecte les obligations qui lui incombent en
application de l'article 2 de la présente loi, son maire ou, à Paris, le préfet
de police peut, par arrêté, interdire en dehors des aires d'accueil aménagées
le stationnement sur le territoire de la commune des résidences mobiles
mentionnées à l'article 1er. »
B. - A rédiger ainsi le II de cet article :
« II. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I
sur un terrain n'appartenant pas au domaine public, le maire peut, par voie
d'assignation délivrée aux occupants ainsi qu'au propriétaire du terrain ou au
titulaire d'un droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande
instance pour voir ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut
agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la
sécurité ou la tranquilité publiques.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous
astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la
présente loi, à défaut de quitter le territoire communal et ordonner
l'explusion de tout terrain qui serait occupé en violation de cette injonction.
Le juge statue en la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre
provisoire. En cas de nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au
seul vu de la minute. Si le cas requiert célérité, il fait application des
dispositions du second alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure
civile. »
C. - A remplacer les III et IV de cet article par trois paragraphes ainsi
rédigés :
« III. - En cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté prévu au I
sur un terrain appartenant au domaine public, le juge administratif peut
prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte, de rejoindre l'aire de
stationnement aménagée en application de la présente loi, à défaut de quitter
le territoire communal et ordonner l'explusion de tout terrain qui serait
occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des
référés.
« IV. - Les dispositions du I et du II ne sont pas applicables au
stationnement des résidences mobiles appartenant aux personnes mentionnées à
l'article 1er de la présente loi :
« 1° Lorsque ces personnes sont propriétaires du terrain sur lequel elles
stationnent ;
« 2° Lorsqu'elles disposent d'une autorisation délivrée sur le fondement de
l'article L. 443-1 du code de l'urbanisme ;
« 3° Lorsqu'elles stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions
prévues à l'article L. 433-3 du code de l'urbanisme.
« V. - En cas d'occupation, en violation de l'arrêté prévu au I, d'un terrain
privé affecté à une activité à caractère économique, et dès lors que cette
occupation est de nature à entraver ladite activité, le propriétaire ou le
titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain peut saisir le président du
tribunal de grande instance aux fins de faire ordonner l'évacuation forcée des
résidences mobiles. Dans ce cas, le juge statue en la forme des référés. Sa
décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de nécessité, il peut
ordonner que l'exécution aura lieu au seul vu de la minute. Si le cas requiert
célérité, il fait application des dispositions du second alinéa de l'article
485 du nouveau code de procédure civile. »
Vous avez la parole, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Avec cet amendement, le Gouvernement souhaite le
maintien de la non-codification de cet article, le rétablissement de la
compétence du tribunal administratif pour les terrains publics - le
Gouvernement a considéré en effet qu'il n'était pas opportun, à l'occasion d'un
texte, si spécifique soit-il, de modifier les répartitions de compétences entre
les juridictions - et, enfin, la limitation des nouveaux pouvoirs du juge au
seul cas où il serait saisi par le maire. Tels sont les trois objets de
l'amendement n° 21 rectifié.
Le Gouvernement est par conséquent défavorable aux amendements de la
commission.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° 21 rectifié ?
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
J'ai déjà indiqué que le dépôt des amendements n°s 21, 22 et
23 ayant été tardif, la commission n'a pas abordé ces sujets. Je peux cependant
dire qu'il y a dans l'amendement n° 21 rectifié des points sur lesquels nous
sommes d'accord sur le fond.
Ainsi, nous sommes favorables au fait que le juge administratif retrouve sa
compétence. C'était une de nos divergences avec l'Assemblée nationale.
En revanche, nous ne sommes pas favorables aux dispositions de ce qui était
l'amendement n° 23, dispositions qui concernent les biens économiques, sujet
cher à M. About notamment. Vous retenez le critère de l'entrave à l'activité ;
nous retenons celui de l'atteinte à l'activité.
La différence de fond porte sur la codification. Vous ne pouvez adhérer à
notre démarche, car vous souhaitez le maintien de la non-codification, alors
que nous réaffirmons, nous, le principe de la codification de ces dispositions
dans le code général des collectivités territoriales.
Par conséquent, nous maintenons nos amendements et nous sommes défavorables à
l'amendement n° 21 rectifié.
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, je me permets de vous faire observer que le
fait de scinder votre amendement en trois aurait peut-être permis à la
commission d'en retenir une partie, alors que, maintenant, c'est tout ou rien
!
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 21 rectifié, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 18, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 19, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de rédiger
comme suit le II de cet article :
« II. - La section I du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième
partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un
article L. 2213-6-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 2213-6-2.
- I. - En cas de stationnement effectué en
violation de l'arrêté prévu à l'article L. 2213-6-1 sur un terrain
n'appartenant pas au domaine public, le maire peut, par voie d'assignation
délivrée aux occupants ainsi qu'au propriétaire du terrain ou au titulaire d'un
droit réel d'usage, saisir le président du tribunal de grande instance aux fins
de faire ordonner l'évacuation forcée des résidences mobiles.
« Sauf dans le cas où le terrain appartient à la commune, le maire ne peut
agir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, à
la sécurité ou à la tranquillité publiques.
« Le propriétaire ou le titulaire d'un droit réel d'usage sur le terrain peut
saisir le président du tribunal de grande instance aux mêmes fins, lorsque le
stationnement de résidences mobiles, en violation de l'arrêté prévu à l'article
L. 2213-6-1, sur un terrain privé affecté à une activité à caractère économique
est de nature à porter atteinte à ladite activité.
« Le juge peut, en outre, prescrire aux occupants, le cas échéant sous
astreinte, de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la
loi n° du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, à
défaut de quitter le territoire communal, et ordonner l'expulsion de tout
terrain qui serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en
la forme des référés. Sa décision est exécutoire à titre provisoire. En cas de
nécessité, il peut ordonner que l'exécution aura lieu au vu de la seule minute.
Si le cas requiert célérité, il fait application des dispositions du second
alinéa de l'article 485 du nouveau code de procédure civile.
« II. - Sans préjudice des dispositions de l'article L. 116-1 du code de la
voirie routière, en cas de stationnement effectué en violation de l'arrêté
prévu à l'article L. 2213-6-1 sur un terrain appartenant au domaine public, le
juge administratif peut prescrire aux occupants, le cas échéant sous astreinte,
de rejoindre l'aire de stationnement aménagée en application de la loi n°
du relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, à défaut de
quitter le territoire communal, et ordonner l'expulsion de tout terrain qui
serait occupé en violation de cette injonction. Le juge statue en la forme des
référés.
« III. - Les dispositions du I ne sont pas applicables au stationnement des
résidences mobiles appartenant à des gens du voyage, lorsque ceux-ci sont
propriétaires du terrain sur lequel elles stationnent, lorsqu'ils disposent
d'une autorisation délivrée sur le fondement de l'article L. 443-1 du code de
l'urbanisme ou qu'ils stationnent sur un terrain aménagé dans les conditions
prévues à l'article L. 443-3 dudit code. »
M. le rapporteur s'est exprimé et M. le secrétaire d'Etat a fait part de son
avis défavorable.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 19, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Par amendement n° 20, M. Delevoye, au nom de la commission, propose de
supprimer le III et le IV de l'article 9.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Paul Delevoye,
rapporteur.
Il s'agit d'un amendement de conséquence.
M. le président.
Le Gouvernement a déjà fait part de son avis défavorable.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, repoussé par le Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président.
Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l'objet de la nouvelle
lecture.
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M.
Peyronnet, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Peyronnet.
Je serai très bref sur un texte que nous examinons en nouvelle lecture et sur
lequel nous nous sommes, par conséquent, déjà très largement exprimés.
Notre groupe considère que le Gouvernement a présenté un bon projet, qui
pouvait être néanmoins amélioré. Il l'a d'ailleurs été en partie à l'occasion
de cette discussion, même si nous aurions certainement pu aller plus loin.
Comme M. le rapporteur l'a rappelé tout à l'heure, le schéma national n'était
pas une mauvaise idée.
Quant à la suggestion que j'avais faite de la coopération interdépartementale,
elle me semblait assez bonne. Les moyens financiers pouvaient encore être
améliorés, malgré l'effort très important que le Gouvernement aréalisé.
Au bout du compte, la commission des lois s'en tient aux positions qu'elle
avait exprimées lors des deux premières lectures. Nous considérons que ses
propositions dénaturent complètement le texte du Gouvernement, jusqu'à le
rendre à peu près inopérant.
Au nom de la défense de la décentralisation, la majorité du Sénat propose de
refuser les contraintes qui pourraient peser sur un président de conseil
général ne faisant pas diligence dans l'établissement du schéma départemental
et elle refuse de considérer les contraintes qui pourraient peser sur un maire
qui, une fois le schéma adopté, refuserait de réaliser des aires de
stationnement. Ce refus de substitution du préfet soit au président du conseil
général soit au maire rend le texte complètement inopérant, j'y insiste. En
effet, on ne peut s'en remettre à la seule bonne volonté. C'est la même logique
qui a fait se concentrer les logements sociaux dans certaines communes, avec
les conséquences que l'on sait et que l'on est amené à corriger par une autre
loi !
Regrettant cette obstination avec laquelle la majorité s'est arc-boutée sur
ses positions et leurs conséquences, à savoir que finalement, le Sénat
s'interdit de modifier plus encore le projet de loi pour l'améliorer, nous
serons amenés à voter contre le texte de la commission des lois afin que l'on
en revienne à celui de l'Assemblée nationale.
(Applaudissements sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Eckenspieller.
M. Daniel Eckenspieller.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
discussion de ce projet de loi atteint probablement son terme avec cette
nouvelle lecture.
A ce stade de nos débats, j'aimerais d'abord remercier notre rapporteur,
Jean-Paul Delevoye, ainsi que la commission, pour l'excellence de leur travail
et la pertinence de leurs propositions.
Qui mieux que le rapporteur en effet pouvait prendre en compte, au plus près,
la réalité des besoins des communes et proposer une rédaction de rechange
susceptible d'apporter des réponses concrètes aux problèmes soulevés par la
nécessité de l'accueil des gens du voyage, d'une part, et par le respect des
règles édictées, d'autre part ?
Notre satisfaction du travail accompli par notre assemblée n'a finalement
d'égale aujourd'hui que notre déception devant l'échec de la commission mixte
paritaire.
Il nous avait pourtant semblé que la rédaction du Sénat, on ne peut plus
équilibrée, aurait pu trouver grâce aux yeux du Gouvernement.
Nous aurions certainement pu trouver une réponse aux attentes des communes
sans nous inscrire, une fois de plus, dans une démarche d'autorité plutôt que
dans une démarche de véritable partenariat, et sans que soit une nouvelle fois
jetée sur elles la suspicion.
Ce n'est pas la première fois cette année que le Gouvernement et l'Assemblée
nationale font un procès d'intention aux collectivités locales en général, et
aux communes en particulier.
Lors de la discussion du projet de loi sur la solidarité et le renouvellement
urbains, vous proposiez, monsieur le secrétaire d'Etat, que le représentant de
l'Etat puisse imposer aux communes la construction de logements sociaux,
partant d'emblée du postulat que celles-ci ne respecteraient pas les règles.
Vous renouvelez aujourd'hui ce procès d'intention, que vous aviez conduit lors
des lectures précédentes, en permettant au représentant de l'Etat d'approuver
seul le schéma départemental d'accueil des gens du voyage.
Comment inciter au dialogue et au partenariat en la matière quand, d'entrée de
jeu, on annonce aux collectivités locales que, de toute manière, elles n'auront
ni le dernier mot ni la possibilité de négocier à égalité avec le préfet ?
Une fois de plus, c'est sous la contrainte que les intéressés arriveront à la
table de négociation.
Nous prenons acte de cette obstination, mais nous refusons de suivre cette
voie.
Le groupe du Rassemblement pour la République votera le texte amendé par le
Sénat, parce que ce dernier manifeste clairement sa confiance dans l'esprit de
responsabilité des élus locaux.
(Applaudissements sur les travées du RPR et
des Républicains et Indépendants. - M. Adnot applaudit également.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Mme Odette Terrade.
Le groupe communiste républicain et citoyen vote contre.
(Le projet de loi est adopté.)
8
NOMINATION D'UN MEMBRE
D'UN ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE
M. le président.
Je rappelle que la commission des affaires économiques et du Plan a proposé
une candidature pour un organisme extraparlementaire.
La présidence n'a reçu aucune opposition dans le délai d'une heure prévu par
l'article 9 du règlement.
En conséquence, cette candidature est ratifiée et je proclame M. Pierre André
membre du conseil d'administration de l'établissement public de la Cité des
sciences et de l'industrie.
9
RÉFÉRÉ DEVANT
LES JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES
Adoption des conclusions
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 396,
1999-2000) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au référé
devant les juridictions admistratives.
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. René Garrec,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat - sur mon papier, j'avais écrit «
madame la ministre »,...
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Me permettez-vous de vous interrompre,
monsieur lerapporteur ?
M. René Garrec,
rapporteur.
Je vous en prie.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat, avec l'autorisation de M. le
rapporteur.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Mme le garde des sceaux préside en ce moment même le
Conseil supérieur de la magistrature. Elle ne pourra nous rejoindre que dans
une heure. Compte tenu du rythme que le Sénat a donné à ses travaux, vous
éviterez une suspension de séance si vous voulez bien accepter que je la
supplée, mais, effectivement, je serai obligé de vous demander de vous exprimer
au masculin !
(Sourires.)
M. le président.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'espère que votre propos n'est pas une
critique du rythme des travaux du Sénat...
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Nullement !
M. le président.
Ce serait un paradoxe total,...
M. Henri de Raincourt.
Ce serait même rigolo !
M. le président.
... car cela irait à l'inverse des reproches qu'on nous fait certaines fois
!
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Il n'y a pas de malentendu !
M. le président.
Nous apprécions votre présence, de la même façon que nous avons apprécié, au
début de cette séance, celle de M. Jean-Pierre Masseret, qui nous a suppléé
avec efficacité. Nous vous sommes reconnaissants à l'un et à l'autre.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur, sachant que vous avez un homme au
banc du Gouvernement !
(Sourires.)
M. René Garrec,
rapporteur.
Monsieur le président, ai-je droit à une petite incidente ?
Je pense aux problèmes de mathématiques qui étaient posés à l'école et qui
concernaient les trains : un train part à telle heure, il roule à telle
vitesse, etc.
On parle souvent de « train de sénateur ». Or, le travail de notre assemblée
se caractérise, en l'occurrence, par une assez belle vélocité, dont on peut, me
semble-t-il, se féliciter !
La commission mixte paritaire qui s'est réunie le 7 juin 2000 est parvenue à
élaborer un texte commun en vue de renforcer l'efficacité du référé devant les
juridictions administratives.
Après deux lectures dans chaque assemblée, la commission mixte paritaire était
saisie de quatre articles restant en discussion et d'une question nouvelle,
tenant à la publication, le 4 mai 2000, du code de justice administrative.
Il s'agit de régler la question de la coordination entre le code de justice
administrative, publié sous forme d'ordonnance et ayant de ce fait valeur
réglementaire, et le projet de loi, qui modifie sensiblement les procédures
d'urgence applicables devant le juge administratif.
La commission mixte paritaire a décidé d'intégrer dans le code de justice
administrative les dispositions du projet de loi, afin de rassembler dans un
texte unique, facilement accessible pour nos concitoyens, l'ensemble des règles
législatives relatives à la justice administrative.
Tout d'abord, je voudrais revenir sur les quatre points pour lesquels nos deux
assemblées n'étaient pas encore parvenues à un accord. J'aborderai ensuite la
question de la codification des dispositions du projet de loi. Je terminerai en
attirant votre attention sur le choix de la date d'entrée en vigueur des
nouvelles dispositions relatives à la justice administrative.
S'agissant des dispositions restant en discussion, la commission mixte
paritaire a retenu le texte du Sénat pour trois des quatre articles restant en
discussion.
Cette proportion élevée démontre à la fois la pertinence des propositions du
Sénat - ce dont je me félicite - et l'esprit de conciliation de nos collègues
députés, en particulier de M. François Colcombet, rapporteur pour l'Assemblée
nationale, dont les prises de position constructives tout au long du débat et
de la procédure législative doivent être soulignées.
A l'article 3, permettant au juge des référés d'ordonner en urgence la
suspension de l'exécution d'une décision administrative, l'Assemblée nationale,
malgré l'avis défavorable du Gouvernement, avait décidé que le juge serait
désormais tenu de prononcer la suspension dès lors que les conditions seraient
remplies, alors que le droit en vigueur comme le projet de loi prévoient une
simple faculté.
Je me félicite que la commission mixte paritaire ait adopté le texte du Sénat,
afin que le juge dispose d'un minimum de pouvoir d'appréciation pour ordonner
la suspension d'une décision administrative.
A l'article 4, permettant au juge des référés d'ordonner une injonction à
l'administration lorsqu'une liberté fondamentale est menacée, le Sénat avait
supprimé la possibilité pour le préfet de saisir le juge au titre du
référé-injonction à l'encontre d'une collectivité locale, tandis que
l'Assemblée nationale avait rétabli cette disposition.
La commission mixte paritaire s'est rangée à la position du Sénat, considérant
qu'il n'était pas souhaitable d'étendre l'intérêt à agir du préfet, au risque
de modifier considérablement la nature du contrôle de légalité des actes pris
par les collectivités territoriales, alors que le préfet dispose déjà de la
procédure de sursis d'extrême urgence.
L'article 16 tend à protéger l'environnement lors de la réalisation de travaux
et d'ouvrages publics. Il permet la suspension de droit des actes des
collectivités publiques lorsque ceux-ci ne sont pas accompagnés d'une étude
d'impact. L'Assemblée nationale avait ajouté que la simple insuffisance de
l'étude d'impact serait un motif de suspension automatique de l'acte.
Finalement, rejoignant la jurisprudence et la position du Sénat, la commission
mixte paritaire a adopté le texte du Sénat afin de ne pas paralyser tous les
projets d'aménagement.
Enfin, elle a adopté l'article 17
bis
, relatif à l'appel des décisions
du juge des référés devant le président de la cour administrative d'appel, dans
la rédaction de l'Assemblée nationale. Sa suppression par le Sénat résultait
d'une erreur de coordination, nous devons le reconnaître et nous nous en
excusons.
En définitive, pour les quatre points restant en discussion au fond, une
solution équilibrée a été trouvée entre les positions respectives de nos deux
assemblées, démontrant, s'il en était besoin, l'intérêt du bicaméralisme. Je
dis cela à l'intention de mon président, même s'il n'est plus là !
(Sourires.)
M. Hubert Haenel.
Les bons sont là !
M. René Garrec,
rapporteur.
J'en arrive maintenant à la question de la coordination entre
le code de justice administrative récemment publié par ordonnance et le projet
de loi sur le référé administratif.
Sur la codification, la loi du 16 décembre 1999 a habilité le Gouvernement à
procéder, dans un délai de neuf mois, par ordonnance, à l'adoption de la partie
législative du code de justice administrative. Cette ordonnance a été publiée
au
Journal officiel
dans le délai prescrit, puisqu'elle date du 4 mai
2000.
Le Gouvernement peut encore, par voie réglementaire, modifier cette ordonnance
jusqu'en septembre 2000. Passé ce délai, l'ordonnance ne pourra plus être
modifiée que par la loi dans les secteurs qui sont du domainelégislatif.
Lors du vote de la loi du 16 décembre 1999, sur proposition de notre collègue
M. Patrice Gélard, rapporteur au nom de la commission des lois, le Sénat avait
souligné que la procédure de codification par ordonnance n'empêcherait pas le
Parlement d'exercer son contrôle à l'occasion de l'examen du projet de loi de
ratification.
Le Sénat avait précisé que le projet de loi de ratification devait être déposé
devant le Parlement dans un délai de deux mois à compter de sa publication. Le
Gouvernement a donc jusqu'au 4 juillet 2000 pour déposer le projet de loi de
ratification sur le bureau d'une des deux assemblées. L'ordonnance deviendra
caduque si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le
Parlement avant cette date.
Comme les ordonnances demeurent des actes réglementaires tant qu'elles n'ont
pas été ratifiées par une loi, elles ont pour effet de conférer aux
dispositions législatives codifiées une simple valeur réglementaire. Jusqu'à
leur ratification, ces dispositions subissent un déclassement dans la
hiérarchie des normes et peuvent faire, le cas échéant, l'objet d'un recours
contentieux.
Afin d'éviter des contentieux liés à la coexistence du code de justice
administrative et de la loi sur le référé, la commission mixte paritaire a
décidé, avant la ratification explicite par le législateur, de modifier la
partie du code de justice administrative relative au référé et aux procédures
d'urgence.
Il est bien entendu que cette modification législative n'a aucunement pour
effet de ratifier l'ensemble del'ordonnance.
Conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, seules les
dispositions modifiées et celles qui en sont inséparables seraient ainsi
implicitement ratifiées.
En l'occurrence, seul le livre 5 du code de justice administrative peut être
considé comme implicitement ratifié par le législateur.
Cette ratification implicite partielle ne prive aucunement le Gouvernement de
l'obligation de déposer le projet de loi de ratification.
Je terminerai mon propos par la question de l'entrée en vigueur de la loi et
du code.
L'insertion de certaines dispositions du projet de loi dans le code de la
justice administrative soulève de délicats problèmes de calendrier. En effet,
l'ordonnance du 4 mai 2000 portant code de justice administrative n'entrera en
vigueur que le 1er janvier 2001. Or, selon son article 21, le projet de loi
relatif au référé devant les juridictions administratives entrera en vigueur à
la date de parution de son décret d'application, prévue pour octobre 2000. Il
convient donc d'harmoniser les dates d'entrée en vigueur de la loi nouvelle et
du code.
La commission mixte paritaire a décidé de faire coïncider la date d'entrée en
vigueur de l'ordonnance portant code de justice administrative et la date
d'entrée en vigueur de la loi sur le référé, afin que l'ensemble de ces
dispositions entrent en vigueur le 1er janvier 2001.
L'abrogation des textes antérieurs, en particulier l'abrogation du code des
tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, correspondra
ainsi à l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles.
Bien entendu, monsieur le secrétaire d'Etat, cette codification s'exerce sans
préjudice de la possibilité pour le Gouvernement de modifier l'ordonnance du 4
mai 2000 par voie réglementaire, en tant que de besoin, avant septembre
2000.
Je me félicite du consensus ainsi trouvé entre les députés et les sénateurs,
que ce soit sur les questions de fond ou sur la codification. Sous le bénéfice
de ces observations, je vous propose d'adopter le texte élaboré par la
commission mixte paritaire pour le projet de loi relatif au référé devant les
juridictions administratives.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants et du
RPR.)
M. Hubert Haenel.
C'est d'une clarté remarquable !
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, monsieur le rapporteur,
mesdames, messieurs les sénateurs, voilà un an, Mme le garde des sceaux venait
devant la Haute Assemblée présenter, en première lecture, le projet de loi
relatif au référé devant les juridictions administratives élaboré par le
Gouvernement en vue de faire du juge administratif un juge plus efficace, car
plus rapide.
Le juge devait disposer des moyens de procédure lui permettant de prendre les
décisions qui s'imposent dans de brefs délais quand des situations d'urgence
lui sont soumises.
En un mot, le projet vise à créer un véritable juge de l'urgence qui réponde
aux attentes légitimes des justiciables.
Le texte revient aujourd'hui devant vous après qu'un accord, dont le
Gouvernement se félicite, a été trouvé, au sein de la commission mixte
paritaire, sur les dispositions restant en discussion entre les deux
assemblées.
Mme Guigou tient, tout d'abord, à saluer le travail précis et constructif du
Parlement, et, cet après-midi, du Sénat et de sa commission des lois, qu'elle
remercie particulièrement en la personne de son rapporteur, M. René Garrec.
En effet, dépassant le caractère procédural, d'apparence technique de ce
texte, le Sénat a su mesurer l'importance du projet de loi en l'amendant et en
l'enrichissant de dispositions visant à l'amélioration effective de la justice
administrative.
Des amendements de portée significative ont étéadoptés.
Je prendrai pour seul exemple des contributions dont le Sénat a enrichi le
projet de loi l'introduction, à laquelle votre assemblée s'est montrée très
attachée, d'une possibilité de faire appel s'agissant des décisions prises par
le juge en matière de référé-libertés et d'en confier l'examen au président de
la section du contentieux du Conseil d'Etat. Cette solution présente l'intérêt
de garantir le double degré de juridiction et d'assurer une unité procédurale
et jurisprudentielle, à l'instar du déféré préfectoral dans le domaine des
libertés.
En commission mixte paritaire, les deux assemblées, rejoignant en cela les
souhaits du Gouvernement, se sont attachées à codifier les dispositions
relatives au référé dans le code de justice administrative paru au
Journal
officiel
du 7 mai dernier et qui entrera en vigueur le 1er janvier 2001,
procédant du même coup à l'indispensable renumérotation de la partie
législative du livre V de ce code.
Il appartient maintenant au Gouvernement de prendre le décret d'application de
la future loi, décret dont la rédaction est en cours. Dans l'attente de ce
décret, les tribunaux administratifs, magistrats et personnels des greffes,
devront se préparer au mieux à l'utilisation de ces nouvelles procédures
d'urgence en vue d'exercer avec une pleine efficacité les pouvoirs ainsi
confiés par la loi.
Enfin, je rappelle l'effort qui a été accompli depuis trois ans en termes de
moyens donnés à la juridiction administrative.
De nouvelles juridictions ont été créées ou le seront prochainement : ainsi,
après les deux cours administratives d'appel mises en place, en septembre 1997
à Marseille et, en septembre 1999, à Douai, un nouveau tribunal administratif
ouvrira ses portes à Cergy-Pontoise en septembre 2000.
Quant aux effectifs, depuis trois ans également, il a été créé, pour
l'ensemble de la juridiction administrative, deux cent cinq emplois de
magistrat et de greffier. Cet effort sera bien entendu poursuivi pour
permettre, en particulier, la mise en oeuvre la plus satisfaisante de la
réforme sur les procédures d'urgence.
(Applaudissements sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
voici la dernière étape du cheminement législatif de ce projet de loi relatif
au référé devant les juridictions administratives : l'adoption des conclusions
de la commission mixte paritaire.
Ce projet de loi a résisté aux méandres de la vie politique, on le sait, et à
la dissolution du printemps 1997.
Il a été sensiblement amélioré et enrichi de nouvelles dispositions. Nous nous
félicitons particulièrement du travail sérieux qui a été réalisé par les deux
chambres et la commission mixte paritaire.
Ce texte institue, pour les juridictions administratives, des procédures
novatrices de référé, calquées sur les procédures qui existent pour la
juridiction judiciaire. Cela permettra d'assurer, en urgence, un traitement
optimum des litiges dans lesquels l'administration est partie.
Il constitue une réforme globale des procédures de référé devant les
juridictions administratives, confrontées depuis plusieurs années déjà à une
progression constante du nombre de contentieux.
L'objet du texte est simple, mais son ambition est grande, tant il remet en
cause les concepts de l'administration toute puissante et inattaquable.
Cette loi vient démocratiser et rendre plus accessibles les procédures
administratives.
Elle devrait également être un moteur de la dépénalisation du débat sur la
responsabilité des élus, en permettant à nos concitoyens de déférer les actes
de ceux-ci devant les juridictions administratives. Car si les demandeurs à
choisir la voie pénale sont aussi nombreux, c'est parce que la voie
administrative est lente et bloquée.
Les points de désaccord constatés entre la rédaction de l'Assemblée nationale
et celle du Sénat ont été résolus de façon équilibrée.
La procédure du référé-injonction n'est pas ouverte aux préfets lorsqu'une
collectivité territoriale ou un établissement public local est en cause au
motif que le représentant de l'Etat dans le département dispose déjà de
suffisamment de recours pour apprécier et contrôler la légalité des
décisions.
L'autre point d'achoppement était l'instauration d'un appel pour les
procédures d'urgence, à l'article 17
bis.
Mon groupe n'avait pas, lors des lectures précédentes, souhaité instaurer
d'appel, au motif que, les procédures d'urgence étant provisoires et donc
susceptibles d'être révisées à tout moment, il n'était pas nécessaire de
prévoir d'appel.
Cette question a été tranchée. L'appel est instauré. Cela ne nous pose pas
plus de problème. C'est une garantie supplémentaire pour les justiciables, à la
réserve près qu'il est à espérer que la création d'un appel ne vienne pas
démultiplier le nombre de dossiers à instruire en attente.
Cette compétence nouvelle risque d'entraîner un surcroît de travail pour les
cours et de ne pas favoriser l'harmonisation de la jurisprudence du Conseil
d'Etat.
La question essentielle reste celle des moyens.
Il est évident qu'aucune réforme ne peut être envisagée sans appréhender le
financement et que l'introduction de l'appel n'est pas sans soulever ce type de
question.
Il est vrai que le ministère connaît depuis 1998 des augmentations sensibles
de crédits. Sur les trois dernières années, ce sont un peu plus de cent postes
qui ont été créés.
Si personne ne peut contester ces chiffres, force est, cependant, de constater
que le retard était important, que le rattrapage ne suffira pas à le combler et
que le présent projet de loi ne va pas contribuer à y remédier.
Aussi, tout en affirmant notre soutien à ce texte, je souhaitais dire, à
nouveau, combien il est important que les efforts consentis soient encore
démultipliés.
Je me félicite, monsieur le secrétaire d'Etat, que le décret soit en cours.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement,
d'une part, aucun amendement n'est recevable, sauf accord du Gouvernement ;
d'autre part, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat
statue sur les amendements puis, par un seul vote, sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire :
« TITRE Ier
« DU JUGE DES RÉFÉRÉS
(Division et intitulé supprimés)
« Art. 1er A. - 1° Le livre V du code de justice administrative est
intitulé : "Le référé".
« 2° Le titre Ier du livre V est intitulé : "Le juge des référés" et comporte
les articles L. 511-1 et L. 511-2.
« 3° L'intitulé : "Chapitre Ier : le sursis à exécution de droit commun" du
titre Ier du livre V, ainsi que les sections 1, 2 et 3 de ce chapitre sont
supprimés. »
« Art. 1er. - L'article L. 511-1 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 511-1.
- Le juge des référés statue par des mesures qui
présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se
prononce dans les meilleurs délais. »
« Art. 2. - Après l'article L. 511-1 du même code, il est inséré un article L.
511-2 ainsi rédigé :
«
Art. L. 511-2.
- Sont juges des référés les présidents des tribunaux
administratifs et des cours administratives d'appel ainsi que les magistrats
qu'ils désignent à cet effet et qui, sauf absence ou empêchement, ont une
ancienneté minimale de deux ans et ont atteint au moins le grade de premier
conseiller.
« Pour les litiges relevant de la compétence du Conseil d'Etat, sont juges des
référés le président de la section du contentieux ainsi que les conseillers
d'Etat qu'il désigne à cet effet. »
« TITRE II
« DU JUGE DES RÉFÉRÉS
STATUANT EN URGENCE
(Division et intitulé supprimés)
« Art. 3 A. - 1° Le titre II du livre V du code de justice administrative
est intitulé : "Le juge des référés statuant en urgence" et comporte trois
chapitres, respectivement intitulés : "Pouvoirs", "Procédure" et "Voies de
recours".
« 2° Dans le titre II du livre V du code de justice administrative, il est
inséré un chapitre Ier intitulé : "Pouvoirs", qui comporte les articles L.
521-1 à L. 521-4. »
« Art. 3. - L'article L. 521-1 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 521-1.
- Quand une décision administrative, même de rejet,
fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des
référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de
l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence
le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de
l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision.
« Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en
annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La
suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en
annulation ou en réformation de la décision. »
« Art. 4. - L'article L. 521-2 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 521-2.
- Saisi d'une demande en ce sens justifiée par
l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la
sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit
public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public
aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et
manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de
quarante-huit heures. »
« Art. 5. - L'article L. 521-3 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 521-3.
- En cas d'urgence et sur simple requête qui sera
recevable même en l'absence de décision admnistrative préalable, le juge des
référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à
l'exécution d'aucune décision administrative. »
« Art. 6. - L'article L. 521-4 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
« Art.
L. 521-4
. - Saisi par toute personne intéressée, le juge des
référés peut, à tout moment, au vu d'un élément nouveau, modifier les mesures
qu'il avait ordonnées ou y mettre fin. »
« Art. 6
bis.
- Dans le titre II du livre V du code de justice
administrative, après le chapitre Ier, il est inséré un chapitre II intitulé :
"Procédure", qui comporte les articles L. 522-1 à L. 522-3. »
« Art. 7. - I. - L'article L. 522-1 du code de justice administrative est
ainsi rédigé :
«
Art. L. 522-1. -
Le juge des référés statue au terme d'une procédure
contradictoire écrite ou orale.
« Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L.
521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les
parties de la date et de l'heure de l'audience publique.
« Sauf renvoi à une formation collégiale, l'audience se déroule sans
conclusions du commissaire du Gouvernement. »
« II. - Dans le titre II du livre V du code de justice administrative, après
le chapitre II, il est inséré un chapitre III, intitulé : "Voies du recours",
qui comporte un article L. 523-1 ainsi rédigé :
«
Art. L. 523-1. -
Les décisions rendues en application des articles L.
521-1, L. 521-3, L. 521-4 et L. 522-3 sont rendues en dernier ressort.
« Les décisions rendues en application de l'article L. 521-2 sont susceptibles
d'appel devant le Conseil d'Etat dans les quinze jours de leur notification. En
ce cas, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat ou un
conseiller délégué à cet effet statue dans un délai de quarante-huit heures et
exerce le cas échéant les pouvoirs prévus à l'article L. 521-4. »
« Art. 8. - L'article L. 522-2 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 522-2.
- La demande visant au prononcé de mesures d'urgence
est dispensée de l'accomplissement de la formalité prévue à l'article 1089 B du
code général des impôts. »
« Art. 9. - L'article L. 522-3 du code de justice administrative est ainsi
rédigé :
«
Art. L. 522-3.
- Lorque la demande ne présente pas un caractère
d'urgence ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vue de la demande, que celle-ci
ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est
irrecevable ou qu'elle est mal fondée, le juge des référés peut la rejeter par
une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers
alinéas de l'article L. 522-1. »
« Art. 9
bis
. - I. - Le titre III du livre V du code de justice
administrative est intitulé : "Le juge des référés ordonnant un constat ou une
mesure d'instruction".
« II. - Après le titre III du livre V du code de justice administrative, il
est inséré un titre IV, intitulé : "Le juge des référés accordant une
provision", qui ne comporte pas de dispositions législatives.
« III. - Après le titre IV du livre V du code de justice administrative, il
est inséré un titre V intitulé : "Dispositions diverses et particulières à
certains contentieux", qui comporte cinq chapitres, respectivement intitulés :
"Le référé en matière de passation de contrats et marchés", "Le référé en
matière fiscale", "Le référé en matière de communication audiovisuelle", "La
suspension sur déféré" et "Dispositions diverses".
« 1° La section 1 du chapitre II du titre III du livre V du code de justice
administrative devient le chapitre Ier du titre V du livre V, intitulé : "Le
référé en matière de passation de contrats et marchés", qui comporte les
articles L. 551-1 et L. 551-2. Les articles L. 532-1 et L. 532-2 du code de
justice administrative sont respectivement renumérotés L. 551-1 et L. 551-2.
« 2° La section 2 du chapitre II du titre III du livre V du code de justice
administrative devient le chapitre II du titre V du livre V, intitulé : "Le
référé en matière fiscale", qui comporte les articles L. 552-1 et L. 552-2. Les
articles L. 532-3 et L. 532-4 du code de justice administrative sont
respectivement renumérotés L. 552-1 et L. 552-2. Les références faites aux
articles L. 532-3 et L. 532-4 dans les articles L. 211-2 et L. 321-1 sont
modifiées en conséquence.
« 3° La section 3 du chapitre II du titre III du livre V du code de justice
administrative devient le chapitre III du titre V du livre V, intitulé : "Le
référé en matière de communication audiovisuelle", qui comporte l'article L.
553-1. L'article L. 532-5 du code de justice administrative est renuméroté L.
553-1.
« 4° Le chapitre II du titre Ier du livre V du code de justice administrative
devient le chapitre IV du titre V du livre V, intitulé : "Les régimes spéciaux
de suspension" et qui comporte deux sections intitulées : "La suspension sur
déféré" et "La suspension en matière d'urbanisme et de protection de la nature
ou de l'environnement".
«
a)
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre V du code de
justice administrative devient la section 1 du chapitre IV du titre V du livre
V, intitulée : "La suspension sur déféré" et qui comporte les articles L. 554-1
à L. 554-9.
« Aux articles L. 512-1, L. 512-4, L. 512-5, L. 512-6, L. 512-7 et L. 512-8,
les mots : "sursis à exécution" sont remplacés par le mot : "suspension".
« Les articles L. 512-1, L. 512-2, L. 512-3, L. 512-4, L. 512-5, L. 512-6, L.
512-7, L. 512-8 et L. 512-9 sont respectivement renumérotés L. 554-1, L. 554-2,
L. 554-3, L. 554-4, L. 554-5, L. 554-6, L. 554-7, L. 554-8 et L. 554-9.
«
b)
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre V du code de
justice administrative devient la section 2 du chapitre IV du titre V du livre
V, intitulée : "La suspension en matière d'urbanisme et de protection de la
nature ou de l'environnement" et qui comporte les articles L. 554-10 à L.
554-12.
« Aux articles L. 512-11, L. 512-12 et L. 512-13, les mots : "sursis à
exécution" sont remplacés par le mot : "suspension".
« Les articles L. 512-11, L. 512-12 et L. 512-13 sont respectivement
renumérotés L. 554-10, L. 554-11 et L. 554-12. L'article L. 512-10 est
abrogé.
« 5° Sont supprimés :
« - le chapitre III du titre Ier du livre V du code de justice administrative
;
« - le chapitre Ier et la section 4 du chapitre II du titre III de ce même
livre ;
« - l'intitulé du chapitre II : "Procédures spéciales". »
« TITRE III
« DISPOSITIONS PARTICULIÈRES
A` CERTAINS CONTENTIEUX
(Division et intitulé supprimés)
« Art. 10. - Il est ajouté à la fin du troisième alinéa de l'article L. 551-1
du code de justice administrative ainsi qu'à la fin du troisième alinéa de
l'article L. 551-2 du même code une phrase ainsi rédigée :
"Dès qu'il est saisi, il peut enjoindre de différer la signature du contrat
jusqu'au terme de la procédure et pour une durée maximum de vingt jours". »
« Art. 13. - I. - Le premier alinéa de l'article L. 554-9 du code de justice
administrative est ainsi rédigé :
« La contestation par le maire des villes de Paris, Marseille et Lyon des
délibérations des conseils d'arrondissement, à l'exclusion de celles prises en
application des articles L. 2511-36 à L. 2511-45 du code général des
collectivités territoriales obéit aux règles définies par le dernier alinéa de
l'article L. 2511-23 dudit code ci-après reproduit :".
« II. - Le premier alinéa de l'article L. 554-3 du code de justice
administrative est ainsi rédigé :
« La demande de suspension présentée par le représentant de l'Etat à
l'encontre d'un acte d'une commune, d'un département ou d'une région, de nature
à compromettre l'exercice d'une liberté publique ou individuelle obéit aux
règles définies par les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 2131-6,
les sixième et septième alinéas de l'article L. 3132-1, ainsi que les cinquième
et sixième alinéas de l'article L. 4142-1 du code général des collectivités
territoriales, reproduits ci-après :". »
« Art. 16. - I. - Dans le dernier alinéa de l'article 2 de la loi n° 76-629 du
10 juillet 1976 relative à la protection de la nature, les mots : "la
juridiction saisie fait droit à la demande de sursis à exécution de la décision
attaquée dès que cette absence est constatée selon une procédure d'urgence"
sont remplacés par les mots : "le juge des référés, saisi d'une demande de
suspension de la décision attaquée, y fait droit dès que cette absence est
constatée".
« II. - Le premier alinéa de l'article 6 de la loi n° 83-630 du 12 juillet
1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de
l'environnement est ainsi rédigé : "Le juge administratif des référés, saisi
d'une demande de suspension d'une décision prise après des conclusions
défavorables du commissaire-enquêteur ou de la commission d'enquête, fait droit
à cette demande si elle comporte un moyen propre à créer, en l'état de
l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de celle-ci." »
« Art. 17
bis. -
Après le chapitre IV du titre V du livre V du code de
justice administrative, il est inséré un chapitre V, intitulé : "Dispositions
diverses" et qui comporte un article L. 555-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 555-1. - Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du
présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat
qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés
devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le
juge des référés." »
« TITRE IV
« DISPOSITIONS FINALES
(Division et intitulé supprimés)
« Art. 19. - Les articles L. 511-1, L. 511-2, L. 521-1, L. 521-2, L. 521-3, L.
521-4, L. 522-1, L. 522-2, L. 522-3 et L. 523-1 du code de justice
administrative, ainsi que l'article 18 de la présente loi sont applicables en
Nouvelle-Calédonie, dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité
territoriale de Mayotte.
« Les articles 10 et 17 sont applicables dans la collectivité territoriale de
Mayotte. »
« Art. 21. - La présente loi entrera en vigueur le même jour que l'ordonnance
n° 2000-387 du 4 mai 2000 relative à la partie législative du code de justice
administrative. »
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme
Derycke, pour explication de vote.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le président, je serai très brève puisque le groupe socialiste s'est
exprimé à plusieurs reprises par la voix de Simon Sutour lors des débats dans
notre Haute Assemblée.
Je souhaite simplement rappeler que l'efficacité de la justice dépend à la
fois de la rapidité du traitement des affaires et de l'exécution effective des
décisions. Or, malgré les efforts accomplis, l'accroissement constant du
contentieux administratif, des délais de jugement trop longs auxquels s'ajoute
l'inadaptation des procédures d'urgence créent une situation insatisfaisante
pour les justiciables. Ce projet de loi tend à améliorer cette situation.
En instituant des procédures nouvelles de référé, il permettra de traiter
efficacement et en urgence les litiges mettant en cause l'administration.
Il est attendu tant des magistrats des juridictions administratives que des
justiciables qui verront leurs droits renforcés, notamment par une amélioration
des délais de jugement.
Le groupe socialiste votera donc ce projet de loi sur lequel, je tiens à le
souligner, nos deux assemblées ont mené, tout au long des navettes, un travail
très constructif.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que
sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix
l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la
commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que le projet de loi a été adopté à l'unanimité.
10
PRESTATION COMPENSATOIRE
EN MATIÈRE DE DIVORCE
Adoption des conclusions
d'une commission mixte paritaire
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 397,
1999-2000) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur
les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la
prestation compensatoire en matière de divorce.
Dans la discussion générale, la parole est à M. lerapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au fil des
lectures successives, nous avons le bénéfice d'avoir des ministres différents.
Nous nous réjouissons, notamment, de la polyvalence de M. Besson. Mais nous
connaissons les difficultés de fin de session. Pourtant, je crois que c'est un
moment important du travail parlementaire. La prestation compensatoire en cas
de divorce est en effet resté un problème récurrent.
En fait, la loi de 1975 a cherché à régler définitivement les problèmes,
notamment pécuniaires, rencontrés par les époux à la suite d'un divorce. Or tel
n'a pas été lecas.
En effet, la plupart du temps, la prestation compensatoire était versée sous
la forme non pas d'un capital, ce qui était la règle, mais d'une rente,
générant ainsi des injustices et des situations humaines difficiles à
supporter.
Hélas ! la jurisprudence de la Cour de cassation, trop rigide, n'a pas permis
de procéder à des révisions qui, pourtant, à l'évidence, auraient pu être
possibles. C'est pourquoi le Sénat, sur l'initiative de Nicolas About et de
Robert Pagès, avait proposé d'examiner les possibilités de révision de la
prestation compensatoire et avait pris des dispositions pour permettre cette
révision. L'Assemblée nationale s'est saisie de cette question deux ans après
puisque l'on attendait une grande loi sur le droit de la famille. Celle-ci
viendra un jour en discussion, mais elle n'est pas encore mûre.
Le Gouvernement et l'Assemblée nationale ont estimé que les bases sur
lesquelles le Sénat avait travaillé étaient intéressantes, ce dont nous nous
réjouissons. L'Assemblée nationale a également apporté des contributions non
négligeables, notamment en favorisant le versement en capital de la prestation
compensatoire. Bien entendu, lors de ces débats, des dispositions importantes
faisaient défaut : les mesures fiscales. En effet, tout était fait,
fiscalement, pour favoriser le versement d'une rente. Les juges comme les
parties privilégient donc ce mode deversement.
Le Sénat a approuvé ces dispositions en deuxième lecture et il a alors, sur
proposition du Gouvernement, adopté des mesures fiscales.
En deuxième lecture, l'Assemblée nationale n'a pas profondément modifié le
texte voté par le Sénat puisque seuls quatre articles restent en discussion. Ce
sont des points relativement mineurs par rapport au grand débat que nous avons
eu : il s'agit de l'assouplissement des possibilités de révision du montant des
rentes, de la prééminence donnée au versement en capital et surtout - nous en
avons longuement débattu tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, en
expliquant qu'il n'était pas possible de le supprimer - du maintien de la
transmission de la charge de la prestation compensatoire aux héritiers.
Bien entendu, une possibilité de révision de la prestation compensatoire est
ouverte aux parties, notamment aux héritiers, si leur situation connaît une
évolution par rapport à celle des créanciers. Mais il est apparu impossible de
supprimer totalement la transmissibilité de la prestation compensatoire lors du
décès du débiteur sans risquer de créer des situations injustes. Ce dispositif
ne peut être systématique puisque toutes les mesures que nous avons votées
visent précisément, à permettre des révisions en fonction de l'évolution des
situations.
Nous espérons que, pour l'avenir, le capital sera la règle et la rente
l'exception. Bien sûr, à l'heure actuelle, la possibilité de révision
existe.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale a apporté une précision utile en ce qui
concerne les déclarations sur l'honneur relatives à la situation financière des
époux. Mais en fait, pratiquement, dans le cas de divorce contentieux, elles
sont la règle, puisque le juge demande aux époux des éléments sur leur
situation.
En revanche, il nous est apparu, lors de la commission mixte paritaire, que là
où cela était le plus utile, c'était dans le cas d'un divorce par consentement
mutuel, puisque le juge pouvait alors vérifier si l'on ne créait pas des
inégalités qui, demain, provoqueraient des situations injustes. C'est pourquoi
il a été prévu que, dans le cas de divorce par consentement mutuel, il y aurait
aussi un état et une déclaration sur l'honneur de la situation desparties.
En ce qui concerne la transmissibilité de la rente et la déduction de la
pension de réversion, l'Assemblée nationale a adopté trois modifications
d'ordre formel.
Nous avions notamment posé le problème complexe de la perte du droit à
pension, puisque, dans certains cas, les retraites de la fonction publique et
les retraites du secteur privé n'obéissent pas toujours au même dispositif.
L'Assemblée nationale a donc retenu des termes qui couvrent toutes les
situations. Pour notre part, nous avions essayé de préciser deux cas.
Enfin, nous avions adopté, et c'est justifié, une disposition relative à la
non-prise en compte de la rente dans le calcul de l'impôt de solidarité sur la
fortune. Cette mesure avait été critiquée par le rapporteur de l'Assemblée
nationale, qui a tenu à dire, dans son rapport, qu'il n'avait pas compris ce
que nous voulions faire. En fait, cette disposition fiscale est quand même tout
à fait secondaire par rapport au dispositif.
L'important, pour nos deux assemblées, est de voter le plus rapidement
possible un texte qui permette de régler des situations difficiles. Le
législateur veut se tenir au-dessus des groupes de pression, au-dessus de ceux
qui, quelquefois, l'insultent par presse interposée. On n'a jamais le droit
d'insulter le législateur ! Nous sommes utiles à tous ceux qui sont confrontés
à des difficultés en raison de l'évolution de leur situation personnelle.
Aller au-delà aurait été détruire tout le dispositif, juste, prévu par la loi
de 1975. En fait, nous aurions créé d'autres injustices, ce qui n'est pas le
rôle de la loi.
C'est pourquoi, monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, la commission mixte paritaire a pu aboutir. Elle vous propose
d'adopter le projet de loi dans la rédaction résultant du texte qu'elle a
élaboré.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le président, mesdames, messieurs
les sénateurs, nous sommes maintenant au terme de l'entreprise de réforme de la
prestation compensatoire engagée voilà plus de deux ans par votre assemblée,
sur proposition de M. About.
Le Gouvernement souhaite rendre hommage à votre travail qui, conjugué à celui
de l'Assemblée nationale, aura abouti à une réforme consensuelle au-dessus de
toutes pressions - vous l'avez rappelé, monsieur le rapporteur - et au-delà des
clivages partisans.
On ne saurait passer sous silence la qualité de la réflexion menée par les
rapporteurs des commissions des lois de chaque assemblée. La réussite de la
commission mixte paritaire en est, me semble-t-il, la traduction éclatante.
Prise de vitesse par l'évolution de notre société, la législation ne
correspondait plus aux réalités familiales et professionnelles : les femmes
sont toujours plus nombreuses à s'impliquer dans le monde du travail, tandis
que la précarité économique peut fragiliser la solvabilité des débiteurs. Des
ajustements étaient devenus nécessaires.
Vous vous êtes ralliés à la nouvelle physionomie du régime de la prestation
compensatoire proposée par la commission des lois de l'Assemblée nationale. Vos
apports en deuxième lecture ont précisé et complété le dispositif.
La loi nouvelle permettra au principe, déjà affirmé en 1975, du versement en
capital de la prestation compensatoire de trouver enfin sa traduction concrète
dans les pratiques, en limitant le maintien artificiel des relations
financières entre anciens époux. En effet, l'adoption de différents amendements
a permis de diversifier les modalités de paiement de ce capital.
Les aménagements fiscaux que le Gouvernement vous a proposés en constituent le
complément indispensable.
L'équité commandait non pas de supprimer totalement les rentes viagères, mais
de les cantonner à des cas exceptionnels, lorsque l'âge et l'état de santé
empêchent le créancier de subvenir à ses besoins. L'octroi d'une telle rente,
qui pourra être révisée en cas de changement important de la situation des
parties, se justifie alorspleinement.
Même dans ces cas exceptionnels, vous avez adopté des passerelles permettant
de transformer cette rente en capital et d'apurer définitivement la dette du
débiteur.
Je n'ignore pas que la question la plus délicate concernait la
transmissibilité de la prestation aux héritiers. Vous êtes un certain nombre à
avoir, avec passion, défendu le principe de l'extinction de la prestation au
décès du débiteur.
Le Gouvernement s'est lui-même interrogé sur ce point, mais il pense que la
suppression automatique aurait présenté plus d'inconvénients que d'avantages au
vu des situations de nombreuses créancières pour qui la prestation
compensatoire constitue l'unique ressource, après une vie consacrée au foyer
familial au détriment de leur propre carrière. Ces situations, bien
qu'aujourd'hui en recul, ne pouvaient être ignorées par le droit.
Vous avez choisi une voix médiane et souple, plus soucieuse de l'équilibre
entre protection du créancier et intérêts des héritiers du débiteur, résidant
dans le maintien de la transmissibilité, mais tempérée par trois mesures :
d'abord, la déductibilité automatique des pensions de réversion éventuellement
versées du chef du conjoint décédé ; ensuite, la possibilité pour les héritiers
du débiteur de capitaliser la rente ; enfin, l'ouverture du droit à la révision
si le décès se traduit par un changement important de la situation des
parties.
Au terme de ce processus législatif, le Gouvernement souhaite une dernière
fois remercier tous les acteurs de ce débat, au premier rang desquels le
rapporteur de votre commission des lois, M. Jean-Jacques Hyest, pour la qualité
de leurs travaux, qui se sont traduits par un vote unanime de chacune des deux
assemblées, à l'occasion des différentes lectures. C'est là le signe de
l'excellence du travail qui a été réalisé.
(Applaudissements sur les travées socialistes. - M. James Bordas applaudit
également.)
M. le président.
La parole est à M. About.
M. Nicolas About.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
mandaté par personne et porte-parole d'aucun groupe de pression, je m'étais
promis de revenir sur les conséquences désastreuses de la loi de 1975 si le
hasard ou les électeurs me permettaient de retourner au Parlement. Ce fut chose
faite en 1995. Donc, dès 1996, je déposais une proposition de loi, qui portait
en germe la réforme d'aujourd'hui.
Dès le mois de février 1998, nous adoptions, mes chers collègues, le premier
volet de cette réforme du divorce. Il fallut ensuite attendre deux ans, deux
longues années de tergiversations, d'hésitation, de reports en effets
d'annonce, pour que, enfin, sous la pression de l'opinion publique - il ne faut
pas sous-estimer le rôle de ceux qui ont souffert de la loi de 1975 - le texte
soit inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.
Au fur et à mesure de la navette, ce texte s'est enrichi, et c'est l'occasion,
pour moi, de saluer le travail accompli par les deux commissions des lois et de
remercier notre rapporteur M. Jean-Jacques Hyest.
Au départ, ma proposition de loi comportait trois points. Le premier, c'était
la révision du montant de la rente en cas de changement notable dans la
situation des parties. Le deuxième point, c'était la limitation de la durée de
la rente. J'avais proposé dix ans. Enfin, le troisième point, c'était la
non-transmissibilité de la dette aux héritiers.
Sur les deux premiers points, j'estime que les objectifs que je m'étais fixés
sont globalement satisfaits. La révision sera désormais possible en cas de
changement important dans la situation des parties. On peut espérer
que,désormais, la maladie, le chômage ou une baisse importante des revenus
seront enfin des causes suffisantes pour obtenir la révision.
Quant à la limitation de la rente dans le temps - je remercie ceux qui ont
travaillé sur ce point - les dispositions introduites par les deux chambres y
contribuent très largement, puique l'attribution de la rente viagère restera
exceptionnelle et nécessitera une motivation spéciale de la part du juge. Des
dispositions fiscales viennent enfin, et de façon très opportune, favoriser le
versement en capital. De surcroît, en autorisant l'étalement des échéances sur
huit ans, on opère incontestablement un revirement en faveur du capital, et on
fixe un terme raisonnable aux liens financiers qui unissaient les ex-époux.
Il restera néanmoins - permettez-moi de le dire, monsieur le secrétaire
d'Etat, monsieur le rapporteur - une ombre au tableau : la transmissibilité de
la rente aux héritiers. Voilà un an, j'ai cru que Mme le garde des sceaux
allait dans mon sens. En effet pendant un quart de seconde, j'ai vu dans ses
yeux qu'elle était favorable à la suppression de cette transmissibilité.
(Sourires.)
. Mais, finalement, elle n'a pas franchi le pas. C'est
dommage !
Vous le savez, cette transmissibilité est une anomalie française. Aucun pays
de l'Union européenne ne reconnaît un tel principe, qui ne figure dans aucun
droit successoral. Dans toute l'Europe, les rentes découlant d'un divorce
finissent toujours par s'éteindre au décès du débiteur. J'ai toutefois la
conviction que l'histoire finira, un jour, par me donner raison. Il faut bien
vivre d'espoir.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Absolument !
M. Nicolas About.
Les situations aberrantes engendrées par cette transmission ne seront plus
tenables bien longtemps, même si vous avez très largement contribué à en
atténuer les effets.
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
On permet les révisions.
M. Nicolas About.
Absolument !
C'est pourquoi, monsieur le rapporteur, conscient du travail accompli, pour
avoir souhaité et initié ce texte, je le voterai en vous remerciant mais aussi
en pensant à tous ceux qui ont souffert des manques de la loi de 1975...
M. Jean-Jacques Hyest,
rapporteur.
Et de la jurisprudence !
M. Nicolas About.
... et de son application non conforme aux voeux du législateur pendant
vingt-cinq ans. J'espère que, demain, les juges respecteront l'esprit de cette
loi.
(Applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du
RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Bret.
M. Robert Bret.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
nous parvenons aujourd'hui, avec l'examen du texte élaboré par la commission
mixte paritaire, au terme de nos débats sur la prestation compensatoire en
matière de divorce.
Près de deux ans et demi auront été nécessaires pour imposer ce débat et pour
aboutir à un accord entre les deux chambres, susceptible d'éviter que les
situations douloureuses, dont nous avons tous pris connaissance et conscience,
ne se reproduisent.
Parti de deux propositions de loi sénatoriales, ce texte, qui aurait pu
connaître le même sort que tant d'autres d'origine parlementaire, aura demain
force de loi. Nous ne pouvons que nous en féliciter.
A l'Assemblée nationale comme au Sénat, au-delà des passions, un consensus a
donc été trouvé pour apporter des remèdes durables à un dossier dont les
conséquences sociales, humaines et économiques sont telles qu'on ne peut y être
indifférent.
Les navettes parlementaires auront eu l'avantage de mettre en avant la
nécessité et l'urgence de moderniser les dispositions du code civil relatives à
la prestation compensatoire.
Les points essentiels de cette réforme, je le souligne, portent sur la
révision désormais plus ouverte du montant des rentes et sur l'incitation au
versement en capital, avec, notamment, les mesures fiscales proposées par le
Gouvernement.
En effet, c'est bien l'absence de ces deux mesures dans la loi de 1975 qui a,
principalement, généré ces situations dramatiques.
Mon seul regret concerne, vous le savez, l'impossibilité en droit de supprimer
la transmissibilité de cette dette qui mène à des situations invraisemblables
que j'ai déjà eu l'occasion d'évoquer.
Mais je veux être optimiste et espérer sincèrement que le versement en
capital, une fois privilégié, et la possibilité de révision, désormais ouverte
y compris aux prestations compensatoires dues par les héritiers du débiteur,
éviteront que de tels faits ne se reproduisent.
Les parlementaires communistes avaient, par ailleurs, fait des propositions
pour supprimer le versement de cette prestation en cas de remariage, de
concubinage notoire ou de conclusion d'un PACS, mesures qui ont l'avantage
d'éviter de surcharger les tribunaux, qui sont déjà engorgés, et de générer des
frais supplémentaires pour les parties.
En conclusion, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen,
conscients à la fois du chemin parcouru depuis les débats du 25 février 1998,
initiés par nos collègues Nicolas About et Robert Pagès, et du fait que le
résultat d'aujourd'hui était loin d'être acquis hier encore, voteront le texte
tel qu'il résulte des travaux de la commission mixte paritaire, même si des
questions demeurent entières et s'ils estiment qu'on aurait pu aller plus
loin.
S'agissant d'un compromis qui permet une entrée en vigueur très prochaine de
dispositions meilleures, nous l'acceptons en tant que tel.
(Applaudissements
sur lestravées socialistes.)
M. Nicolas About.
Très bien !
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement,
lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la
commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur
l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
« TITRE Ier
« DE LA PRESTATION COMPENSATOIRE
« Art. 1er AA. - L'article 271 du code civil est complété par un alinéa ainsi
rédigé :
« Dans le cadre de la fixation d'une prestation compensatoire, par le juge ou
par les parties dans la convention visée à l'article 278, ou à l'occasion d'une
demande de révision, les parties fournissent au juge une déclaration certifiant
sur l'honneur l'exactitude de leurs ressources, revenus, patrimoine et
conditions de vie. »
« Art. 2
bis
. - L'article 276-2 du code civil est ainsi rédigé :
«
Art. 276-2.
- A la mort de l'époux débiteur, la charge de la rente
viagère passe à ses hétitiers. Les pensions de réversion éventuellement versées
du chef du conjoint décédé sont déduites de plein droit de la rente versée au
créancier. Sauf décision contraire du juge saisi par le créancier, une
déduction du même montant continue à être opérée si le créancier perd son droit
à pension de réversion. »
« Art. 2
octies
A. - Dans le premier alinéa de l'article 285 et dans
l'article 294 du code civil, après la référence : "275-1", est insérée la
référence : ", 277". »
« Art. 2
undecies. - Supprimé. »
« TITRE II
« DISPOSITIONS TRANSITOIRES »
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Vote sur l'ensemble
M. le président.
Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la
parole à M. Pelletier, pour explication de vote.
M. Jacques Pelletier.
Je considère que le maintien de la transmissibilité de la charge de la
prestation compensatoire aux héritiers est une solution inique, comme l'a très
bien fait remarquer tout à l'heure notre collègue Nicolas About.
J'avais proposé en première lecture, comme d'autres collègues, que cette
transmissibilité n'ait lieu que si le ou la bénéficiaire de la prestation se
trouvait vraiment dans une situation de précarité. Ces amendements ont été
repoussés.
On nous dit qu'il y a possibilité de révision. C'est exact. Mais compte tenu
de la lenteur de la justice et du nombre de mois, sinon d'années, nécessaires
pour faire modifier un jugement, cette disposition ne me semble pas
opérationnelle immédiatement.
Je suis conscient de l'amélioration que le texte de la commission mixte
paritaire apporte à la législation actuelle. C'est pourquoi je ne voterai pas
contre, mais je m'abstiendrai.
M. le président.
La parole est à Mme Derycke.
Mme Dinah Derycke.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
réforme de la prestation compensatoire est une première étape de la réforme du
droit de la famille - cela a été rappelé à plusieurs reprises cet après-midi -
et il faut se féliciter aujourd'hui du climat consensuel dans lequel son examen
s'achève.
Cela montre bien que sur le sujet de la famille, que l'on taxe souvent de «
délicat », les clivages politiques peuvent se réduire et que la navette entre
les deux assemblées peut enrichir le débat.
C'est, en effet, une proposition de loi de notre collègue Nicolas About qui a
rouvert le débat sur les injustices résultant de la loi de 1975.
Le texte a été repris et inscrit à l'ordre du jour par le Gouvernement.
L'Assemblée nationale a modifié l'architecture générale du texte en
introduisant des dispositions concernant notamment le versement en capital.
Cette architecture a été acceptée par le Sénat, qui a ensuite été appelé à
voter un dispositif fiscal très avantageux proposé par Mme la garde des sceaux,
avec l'accord, que nous devons saluer ici, de Bercy.
Dans ces conditions, il était presque évident que la commission mixte
paritaire déboucherait sur un texte conforme et que la loi serait votée avant
le 1er juillet, répondant ainsi aux souhaits émis par l'ensemble des
parlementaires.
En effet, il était urgent de réformer la loi de 1975 et de mettre fin aux
situations les plus iniques. Celles-ci résultaient à la fois d'une culture et
de pratiques judiciaires privilégiant le versement sous forme de rente,
permettant ainsi de conserver une dimension alimentaire à la prestation
compensatoire, et d'une jurisprudence stricte interdisant, de fait, toute
révision.
En levant cette impossibilité et en instituant le versement en capital comme
la règle, nous modifierons, je l'espère, non seulement le texte de la loi, mais
aussi les pratiques judiciaires et la manière de convevoir la prestation
compensatoire.
Celle-ci doit en effet recouvrer pleinement son caractère indemnitaire, qui
implique qu'elle soit le plus souvent versée en capital et que si, par
exception, elle devait être versée sous forme de rente, elle ne soit jamais
révisable à la hausse.
La réaffirmation de ce principe implique que, parallèlement, la rente viagère
demeure transmissible aux héritiers. La loi ne peut, en effet, reconnaître le
caractère indemnitaire de la prestation compensatoire et considérer, à la mort
du débiteur, qu'il s'agit d'une obligation alimentaire. Je sais que cette
position a suscité bien des rancoeurs et même de la colère - M. le rapporteur
et plusieurs d'entre nous ont reçu des insultes - dans les rangs des
associations de débirentiers.
Mais je crois vraiment que les parlementaires - et notre quasi-unanimité cet
après-midi en est peut-être le signe - sont parvenus à un texte équilibré :
celui-ci conserve nombre de droits aux créanciers tout en améliorant ceux des
débiteurs ; il prépare un avenir plus en phase avec les évolutions de notre
société tout en réglant les situations douloureuses créées par la loi de
1975.
Le groupe socialiste se satisfait du cheminement pris par cette réforme et
votera le texte issu de la commission mixte paritaire.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi dans la rédaction
résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président.
Je constate que ce texte a été adopté à l'unanimité des suffrages exprimés.
11
CONVENTIONS AVEC LE VIETNAM RELATIVES
À LA COOPÉRATION EN MATIÈRE D'ADOPTION
D'ENFANTS ET À L'ENTRAIDE JUDICIAIRE
Adoption de deux projets de loi
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion :
- du projet de loi (n° 392 rectifié, 1999-2000), adopté par l'Assemblée
nationale, autorisant la ratification de la convention relative à la
coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et la
République socialiste du Vietnam. [Rapport n° 410 (1999-2000).] ;
- du projet de loi (n° 218, 1999-2000) autorisant la ratification de la
convention relative à l'entraide judiciaire en matière civile entre la
République française et la République socialiste du Vietnam. [Rapport n° 282
(1999-2000)] ;
La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient
l'objet d'une discussion générale commune.
Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire
d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat au logement.
Monsieur le président, monsieur le
rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, afin de consolider les relations
juridiques bilatérales nouées par la création, en 1993, de la Maison du droit
franco-vietnamienne à Hanoï et favorisées par l'adoption au Vietnam, en 1995,
d'un code civil et d'une législation commerciale, la France a proposé au
Vietnam, en 1997, l'ouverture de négociations en vue de la conclusion d'une
convention d'entraide judiciaire civile, qui ont abouti à la signature d'un
texte le 24 février 1999.
Cette convention, la première signée en la matière par le Vietnam avec un pays
occidental, a créé un climat favorable à la signature, le 1er février 2000,
d'une convention bilatérale sur les adoptions.
De facture classique, la convention bilatérale franco-vietnamienne relative à
l'entraide judiciaire en matière civile couvre cinq domaines : l'entraide à
l'accès à la justice, la commission rogatoire, l'authentification des actes,
l'information sur le droit étranger et, enfin, le régime de reconnaissance et
d'exécution des décisions étrangères.
Elle précise les conditions du refus de l'entraide, notamment en cas
d'atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l'ordre public de l'Etat
requis, et désigne les ministères de la justice de chaque Etat en qualité
d'autorité centrale.
Les procédures de modification par consultation, d'entrée en vigueur et de
dénonciation y sont spécifiées, comme sont prévues des rencontres entre les
parties, destinées à examiner le fonctionnement pratique de la convention. Les
difficultés d'application sont réglées par voie diplomatique.
Instaurant des modes plus directs de coopération judiciaire, tendant à
promouvoir l'entraide en matière civile, cette convention comporte des
dispositions de nature à rassurer nos compatriotes investisseurs, résidents ou
de passage au Vietnam.
En effet, sont acquis aux ressortissants de chacun des deux Etats, personnes
physiques ou morales, le libre accès à la justice, les mêmes droits et
obligations pour la défense de leurs intérêts dans l'autre Etat, y compris le
bénéfice de l'aide juridictionnelle, dans les mêmes conditions que les
ressortissants de ce dernier.
Les commissions rogatoires qui concernent les ressortissants de l'une des
parties peuvent être exécutées par les agents diplomatiques ou consulaires de
cette partie, et le champ d'application des dispositions est étendu aux
décisions des juridictions pénales statuant sur l'action civile en réparation
de dommages.
Enfin, les actes visés dans la convention sont dispensés de légalisation.
Pour conclure, il convient de souligner que ce nouveau dispositif
conventionnel constitue une contribution non négligeable à l'action menée par
la France pour préserver et amplifier l'influence du droit écrit
romano-germanique dans la sphère asiatique.
J'en viens au projet de loi autorisant la ratification de la convention
relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants.
La Haute Assemblée a été saisie, voilà maintenant deux ans, de la ratification
de la convention de La Haye du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants
et à la coopération en matière d'adoption internationale.
Vient aujourd'hui à l'ordre du jour de votre assemblée, sur le sujet sensible
de l'adoption internationale, qui concerne un nombre toujours plus grand de
familles dans notre pays, l'approbation de la convention bilatérale
franco-vietnamienne relative à la coopération en matière d'adoption
d'enfants.
Ce texte est formellement lié au précédent puisqu'il vise expressément, dans
l'un de ses considérants, la convention relative à l'entraide judiciaire en
matière civile.
Cette convention était devenue nécessaire dans la mesure où le Vietnam
constitue, depuis déjà quelques années, le premier pays d'origine des enfants
étrangers adoptés en France, avec près de 1 400 adoptions par an, ce qui
représente environ le tiers des adoptions internationales. La France accueille
ainsi près de la moitié des enfants vietnamiens adoptés dans le monde.
Cependant, il était constaté que certaines procédures se déroulaient dans des
conditions n'offrant pas les garanties suffisantes de transparence et ne
respectaient pas les droits fondamentaux des principaux intéressés, tels que
définis par la convention des Nations unies sur les droits de l'enfant du 20
novembre 1989.
Sur recommandation de l'autorité centrale pour l'adoption internationale et
après consultation des autorités vietnamiennes, le Gouvernement avait donc été
amené à suspendre provisoirement, à compter du 29 avril 1999, les procédures
d'adoption entre les deux pays, jusqu'à la conclusion d'un accord de
coopération.
Si la France a, comme je le rappelais, ratifié la convention de La Haye, le
Vietnam n'a, pour l'instant, pas fait le choix d'adhérer à cet instrument
international.
C'est pourquoi nos deux pays se sont orientés vers une convention bilatérale,
qui présente un double avantage.
Le premier consiste à répondre dans des délais très brefs à une situation
d'urgence. Ainsi la ratification de cette convention permettra-t-elle la
reprise des adoptions avec le Vietnam sur des bases claires.
En second lieu, ce texte permettra de mieux préparer le Vietnam à une future
adhésion à la convention de La Haye.
La convention bilatérale soumise à votre approbation instaure en effet des
garanties procédurales très proches de celles qui sont définies dans la
convention de La Haye.
Signée à Hanoï le 1er février 2000, à l'issue de deux sessions de négociations
ayant eu lieu à Hanoï en juin 1999 et à Paris en octobre dernier, la présente
convention s'organise autour de deux types de dispositions : celles qui
définissent les règles de droit applicables et celles qui déterminent les
structurescompétentes ainsi que les règles de procédure.
Concernant les règles de droit applicables, la convention retient, comme dans
la convention de La Haye, la résidence habituelle comme principal critère de
compétence.
Ainsi, les couples résidant habituellement sur le territoire de l'un des Etats
contractants pourront adopter un enfant ressortissant de l'autre Etat
contractant n'ayant pas atteint la limite d'âge fixée par sa législation
nationale.
La convention précise par ailleurs, une fois l'adoptabilité de l'enfant
établie par l'Etat d'origine et la décision d'adoption intervenue, que la loi
de l'Etat d'accueil s'applique lors du prononcé de la décision d'adoption,
celle-ci étant reconnue de plein droit sur le territoire de l'autre Etat
contractant et emportant tous les effets de droit subséquents.
Ces dispositions permettront aux juridictions françaises, alors que le Vietnam
ne connaît que l'adoption simple, de prononcer notamment des décisions
d'adoption plénière, répondant ainsi aux souhaits exprimés par les candidats à
l'adoption, qui privilégient nettement ce second type d'adoption.
En ce qui concerne les procédures et les autorités compétentes, la convention
désigne, dans chaque Etat, une autorité centrale garante de la transparence et
de la régularité des procédures, à savoir le ministère de la justice pour le
Vietnam et la Mission de l'adoption internationale pour la France. Ce schéma,
également très proche de celui qui est défini dans la convention de La Haye,
tient compte des spécificités institutionnelles du Vietnam et devrait éviter
l'activité d'intermédiaires qui portent atteinte à la crédibilité de la
procédure.
Enfin, la convention prévoit un dispositif de coopération portant sur son
application, mais aussi sur l'assistance technique aux autorités ou
institutions intervenant en matière d'adoption. Ce volet paraît déterminant
pour une mise en oeuvre effective de la convention, d'autant plus que les
autorités centrales vietnamiennes auront à convaincre les comités provinciaux
de la nécessité d'un strict respect des procédures ainsi établies.
Telles sont, monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames,
messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appellent la
convention relative à l'entraide judiciaire en matière civile entre la
République française et la République socialiste du Vietnam, signée à Paris le
24 février 1999, et la convention relative à la coopération en matière
d'adoption d'enfants, signée à Hanoï le 1er février 2000, qui font l'objet des
projets de loi proposés aujourd'hui à votre approbation.
(Applaudissements.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Caldaguès,
rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des
forces armées.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes
chers collègues, l'examen de deux conventions bilatérales franco-vietnamiennes
a été l'occasion, pour notre commission des affaires étrangères, de la défense
et des forces armées de constater l'excellence des relations que la France
entretient avec le Vietnam, excellence confirmée par la récente visite
officielle de dirigeants vietnamiens en France.
La stabilisation du contexte régional, en particulier de la question
cambodgienne, et les nouvelles orientations définies par Hanoï, à savoir une
ouverture politique et économique certes prudente et progressive mais réelle,
ont favorisé l'essor de ces relations qui font aujourd'hui de notre pays un
partenaire majeur du Vietnam.
Par l'intermédiaire de nos crédits de coopération culturelle, des protocoles
financiers et des financements de l'Agence française de développement, nous
figurons au deuxième rang des donateurs après le Japon, notre coopération
touchant à des domaines extrêmement divers comme les infrastructures, l'appui
administratif et institutionnel, le développement rural, la santé, l'éducation
ou la formation.
Notre commission est particulièrement sensible aux actions portant sur
l'enseignement bilingue, les filières universitaires francophones ou les
bourses à l'intention des étudiants vietnamiens désireux de suivre une
formation en France, car elles doivent contribuer à entretenir une présence du
français dans un environnement local déjà très imprégné de l'usage de
l'anglais.
La première convention dont nous sommes saisis, relative à l'entraide
judiciaire en matière civile, témoigne de la place importante acquise par la
coopération française dans le domaine juridique, particulièrement au travers de
la Maison du droit franco-vietnamienne, fondée en 1993, à laquelle coopèrent de
nombreux praticiens français.
Cette structure a vocation à former des juristes francophones. Elle a
contribué à la refonte du système juridique vietnamien et à l'élaboration d'un
code civil et d'un droit commercial. On peut penser que la qualité de cette
coopération n'est pas étrangère au fait que la France soit le premier pays
occidental à conclure avec le Vietnam une convention d'entraide judiciaire en
matière civile.
Très classique dans ses dispositions relatives à l'exécution des commissions
rogatoires et à la reconnaissance des décisions judiciaires, cette convention
est attendue par les sociétés françaises qui effectuent au Vietnam des
investissements ou de simples opérations commerciales et qui ne disposent pour
le moment, en cas de conflit à l'encontre d'une société vietnamienne, que du
recours à l'arbitrage au Vietnam ou à l'étranger.
Tout en reconnaissant qu'elle pourrait donner lieu à certaines difficultés
d'application compte tenu de certaines particularités du droit vietnamien, la
commission des affaires étrangères vous demande d'approuver cette convention
d'entraide judiciaire en matière civile, qui améliorera la sécurité juridique
des opérations menées par les entreprises françaises au Vietnam.
La seconde convention, relative à l'adoption, revêt, pour sa part, une
importance toute particulière - il s'agit d'un domaine très sensible - ainsi
qu'un caractère urgent.
Je ne reviendrai pas sur la chronologie des événements qui ont entraîné la
suspension des procédures d'adoption en direction du Vietnam et la négociation
de cette convention.
J'ai largement exposé, dans mon rapport écrit, la situation singulière du
Vietnam, de très loin le premier pays de provenance des enfants adoptés en
France. Nous sommes d'ailleurs au deuxième rang dans le monde pour l'adoption
internationale, après les Etats-Unis, et nous serions même très largement au
premier rang si l'on rapportait le nombre des adoptions aux populations
respectives. Voilà qui, à mon avis contredit fortement les imputations de
xénophobie parfois faites aux Français par certains commentateurs de supposés
sondages. Les statistiques sont tout de même très éloquentes lorsqu'il s'agit
de passer à l'acte !
Tout en considérant qu'il était légitime d'avoir suspendu des procédures qui
ne présentaient pas toutes les garanties - mon rapport écrit fait référence aux
anomalies et dérives choquantes que l'autorité centrale pour l'adoption
internationale a été amenée à constater avant de préconiser des mesures
correctrices - la commission des affaires étrangères s'est félicitée de la
rapidité - assez exceptionnelle, à vrai dire - avec laquelle les autorités
françaises et vietnamiennes ont mené les négociations en vue de la conclusion
d'une convention bilatérale.
Cette convention doit permettre de poursuivre les adoptions d'enfants
vietnamiens dans un cadre plus précis et plus transparent. En effet, tant pour
les enfants en attente d'adoption que pour les familles adoptantes, il était
indispensable que puissent reprendre le plus tôt possible les procédures dans
des conditions plus satisfaisantes. Je souligne au passage que cela représente
1 300 adoptions chaque année pour la France.
Au surplus, cette convention permettra d'établir, pour l'adoption au Vietnam,
un cadre très proche de celui de la convention de La Haye, et de faire
prévaloir un certain nombre de principes fondamentaux, tels que la garantie de
l'adoptabilité de l'enfant, les exigences en matière de consentement et
l'absence de contrepartie financière, les unes et les autres ayant été, dans le
passé, trop souvent oubliées.
Nous sommes conscients qu'il reste beaucoup à faire pour mettre fin à des
pratiques, hélas ! trop répandues, qui tirent parti des difficultés sociales
propres aux pays d'origine et de l'attente des familles d'accueil, pratiques
qui heurtent profondément notre conception du respect de la personne
humaine.
Incontestablement, cette convention permettra d'accentuer la transparence et
la régularité des procédures d'adoptions au Vietnam, qui occupent une place si
importante dans l'adoption en France.
Enfin, la commission a relevé l'approche pragmatique retenue dans cette
convention bilatérale, puisque les particularités de l'organisation
administrative vietnamienne, dans laquelle les provinces possèdent des
compétences importantes en matière d'adoption, ont été prises en compte. Ainsi
peut être envisagée une première étape très significative rapprochant
progressivement le Vietnam des procédures de la convention de La Haye,
auxquelles il ne semblait pouvoir intégralement se conformer d'emblée.
Pour ces différentes raisons, la commission des affaires étrangères, de la
défense et des forces armées vous demande, mes chers collègues, d'approuver
également la convention franco-vietnamienne relative à l'adoption.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Bordas.
M. James Bordas.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
Gouvernement a décidé, voilà près d'un an, après consultation des autorités
vietnamiennes, de suspendre provisoirement la procédure d'adoption entre la
France et le Vietnam. Une telle mesure était justifiée par l'existence de
filières parallèles et illégales d'adoption, ces dernières menaçant les
intérêts vitaux des enfants.
Si le Vietnam est, en effet, le premier pays d'origine des enfants étrangers
adoptés en France - on compte près de 1 400 adoptions par an - il n'a pas
encore adhéré à la convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des
enfants et la coopération en matière d'adoption internationale.
De fait, de nombreux abus ont été constatés, violant avec force les
instruments internationaux en vigueur : enlèvements d'enfants, fraudes dans
l'établissement de l'état civil, recours à des intermédiaires clandestins qui
pratiquent des tarifs mirobolants pour hâter la procédure, offres d'achat de
nouveau-nés aux familles déshéritées, commandes et « fabrication » de faux
orphelins sont autant de pratiques délictueuses qui se sont développées ces
dernières années.
Pour autant, la décision de suspendre provisoirement les adoptions à partir
d'avril 1999 ne pouvait perdurer. Elle présentait l'inconvénient majeur de
jeter la suspicion sur l'attribution honnête des enfants adoptés, interdisant
de poursuivre d'autes adoptions dans ce pays. Le préjudice qui en résultait,
tant pour l'enfant que pour les familles naturelles et les familles d'accueil,
était considérable. Y mettre fin dans les meilleurs délais devenait une
priorité vitale, au sens fort du terme.
J'avais eu l'occasion, le 29 juin 1999, d'interroger ici même Mme Guigou,
garde des sceaux, ministre de la justice, et je n'ai cessé, depuis lors, avec
certains de mes collègues, d'exiger du Gouvernement qu'il prenne les mesures
qui s'imposent pour les personnes désireuses d'adopter un enfant vietnamien
dans le respect des législations en vigueur.
Garantir la régularité et la transparence des procédures d'adoption est
aujourd'hui essentiel.
L'enfant, par sa fragilité et son innoncence, a toujours constitué une proie
facile, objet de toutes les convoitises. Préserver son intégrité physique et
morale, assurer sa dignité, lui transmettre un savoir et certaines valeurs sont
sans aucun doute quelques-unes des tâches les plus importantes qui incombent
aux familles d'accueil.
Parce que l'enfant ne doit pas se contenter d'exister, mais doit aspirer à
être, plus que jamais il était indispensable de définir les règles de droit
applicables en matière d'adoption et de déterminer les structures et procédures
adéquates.
La convention relative à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre
la République française et la République socialiste du Vietnam s'efforce de
défendre la notion de droit de l'enfant et non celle de droit à l'enfant. Elle
vise à assurer, dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant, une
sécurité juridique accrue. Elle répond donc, fondamentalement, à l'ensemble de
nos préoccupations. La ratifier est aujourd'hui, pour la France, une priorité.
Bien davantage, c'est pour nous, bien d'avantage, un véritable devoir moral.
Conclue pour une période de cinq ans renouvelable par périodes de trois ans,
sauf décision de non-prorogation, cette convention doit conférer une grande
stabilité en matière d'adoption. Elle constitue un progrès considérable dans un
domaine où de trop nombreuses zones de non-droit existent.
La convention reprend l'essentiel des conditions fixées dans la convention de
La Haye. Ces dernières, qui visent toutes à entourer la procédure d'adoption
d'un certain nombre de précautions de nature à garantir la viabilité de la
relation entre adoptants et adoptés, constituent des avancées considérables
dont il faut se féliciter.
Ainsi, par exemple, il est convenu que la loi applicable, lors du prononcé de
la décision d'adoption, est celle de l'Etat d'accueil. Une telle disposition
est essentielle dans la mesure où la législation française est plus favorable
que la législation vietnamienne - vous savez, notamment, que le droit
vietnamien ne connaît pas l'adoption plénière. De nombreux garde-fous ont
aussi été institués. Ainsi, les autorités centrales des deux pays - le
ministère de la justice pour le Vietnam, la mission de l'adoption
internationale pour la France - sont habilitées à prendre toutes mesures
appropriées pour prévenir et, le cas échéant, faire sanctionner la perception
de gains matériels indus à l'occasion d'une adoption. De même, elles sont
seules compétentes pour vérifier si l'enfant proposé à l'adoption est bien
adoptable et si le consentement à son adoption a été donné de façon
éclairée.
Ces dispositions, qui s'efforcent aussi d'éviter tout contact direct entre la
famille adoptive et les parentsbiologiques de l'enfant, devraient paralyser les
voiesclandestines.
Ce texte n'est pas parfait, c'est incontestable. Il faut regretter, notamment,
un manque de clarté évident et déplorer l'absence de clause prévoyant
l'obligation de s'assurer du consentement de l'enfant, à la différence de
l'article 4 de la convention de La Haye. De ce point de vue, le gouvernement
français devrait donner instruction à la mission pour l'adoption internationale
de s'assurer du consentement de l'adolescent à son adoption.
Pour autant, il est aujourd'hui impératif, plus que jamais, d'en autoriser la
ratification. Seule cette convention est à même de permettre la reprise des
adoptions avec le Vietnam sur des bases légalement indiscutables. A court
terme, elle présente donc l'avantage de remédier rapidement à une situation de
crise.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le Gouvernement devrait, par ailleurs, veiller
à débloquer sans délai les dossiers en cours et à rassurer les nombreuses
familles dont les projets d'adoption étaient jusqu'alors suspendus. Il est
clair, en effet, que l'on ne devrait pas demander à ces familles d'engager une
nouvelle procédure, conformément aux dispositions de la convention.
L'intérêt de la convention ne s'arrête pas là. A plus long terme, elle jette
les bases d'une adhésion future du Vietnam à la convention de La Haye, comme
cela a déjà été dit. La sécurité morale et juridique internationale devrait
s'en trouver considérablement améliorée.
(Applaudissement sur les travées
des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale commune ?...
La discussion générale commune est close.
Convention relative à l'adoption d'enfants
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi autorisant
la ratification de la convention relative à la coopération en matière
d'adoption d'enfants entre la République française et la République socialiste
du Vietnam.
J'en donne lecture :
« Article unique. - Est autorisée la ratification de la convention relative à
la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française et
la République socialiste du Vietnam, signée à Hanoï le 1er février 2000, et
dont le texte est annexé à la présente loi. »
Je vais mettre aux voix l'article unique du projet de loi.
M. Claude Estier.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Estier.
M. Claude Estier.
Les deux textes sur lesquels nous avons à nous prononcer sont importants pour
le bon développement des relations franco-vietnamiennes, auxquelles nous
sommes, je le crois, tous attachés.
L'un de ces projets vise à autoriser la ratification de la convention relative
à la coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République française
et la République socialiste du Vietnam.
Il convient de remarquer la rapidité de la procédure. Cette convention,
conclue à Hanoï le 1er février 2000, adoptée en mai dernier en conseil des
ministres, votée par l'Assemblée nationale le 6 juin dernier, va être adoptée
aujourd'hui au Sénat. Il est rare - je prends à témoin M. le président de la
commission des affaires étrangères - que l'on procède aussi rapidement pour la
ratification d'une convention !
Cette urgence est justifiée par l'existence d'une situation très délicate qui
a été décrite tant par M. le rapporteur que par M. le secrétaire d'Etat ; le
nombre très élevé d'adoptions d'enfants vietnamiens - entre 1 300 et 1 400 par
an - et les conditions peu satisfaisantes dans lesquelles ces adoptions se
déroulaient ont incité le Gouvernement à négocier cette convention avec le
Vietnam.
Le texte que nous allons voter aura donc des conséquences concrètes pour des
centaines d'enfants et pour les familles d'accueil. En ce sens, la démarche du
Gouvernement est positive et mérite notre soutien.
Il s'agit, bien entendu, de préserver, de garantir, de respecter les droits de
l'enfant ; c'est le coeur même de la démarche engagée par le Gouvernement et
que nous devons aujourd'hui parachever.
Mais il s'agit aussi d'apporter des garanties aux familles adoptantes. Dans le
droit-fil de la convention de La Haye sur la protection des enfants et la
coopération en matière d'adoption internationale, que nous avons votée en 1998,
notre souci demeure d'encadrer les adoptions internationales, qui ont connu,
par le passé, trop d'abus.
Par ailleurs, les Nations unies poursuivent un travail de fond destiné à
prévenir les abus qui peuvent parfois se greffer sur les adoptions, en
contradiction flagrante de la convention internationale sur les droits de
l'enfant adoptée en 1989.
Or, comme il a été rappelé, le Vietnam n'a pas signé la convention de La Haye.
Cela a créé une situation difficile et obligé la France à suspendre les
adoptions en avril 1999. C'est pour sortir de cette situation délicate et
souvent dramatique pour les familles adoptantes et pour les enfants qu'il a été
nécessaire de signer une convention bilatérale.
Elle repose sur les mêmes fondements que la convention de La Haye et vise à
garantir les droits de l'enfant.
D'autres l'ont dit avant moi, mais je tiens à rappeler que l'adoption met en
avant la notion de droits de l'enfant et non celle de droit à l'enfant.
Adopter, ce n'est pas donner un enfant à un couple malheureux, c'est procurer
des parents à un enfant qui n'en a plus.
Dans cet état d'esprit, il était devenu nécessaire et urgent d'introduire
régularité et transparence dans les procédures d'adoption entre la France et le
Vietnam. Cette convention doit nous permettre de faire en sorte que les droits
de l'enfant et ceux des familles soient mieux protégés, en France comme au
Vietnam.
Le groupe socialiste votera donc ce projet de loi, tout en demandant au
Gouvernement de maintenir une vigilance sans relâche dans le domaine de
l'adoption internationale. Il n'est pas juste, il est même ignoble, que des
marchands n'ayant d'autre but que le profit puissent utiliser et détourner la
détresse des adoptants et la misère des familles de certains pays en
développement.
Sans développer davantage, je dirai que le groupe socialiste votera de la même
manière la ratification de la convention sur l'entraide judiciaire entre la
France et le Vietnam.
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi
que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que le projet de loi a été adopté à l'unanimité.
Convention relative à l'entraide judiciaire
M. le président.
Nous passons à la discussion de l'article unique du projet de loi autorisant
la ratification de la convention relative à l'entraide judiciaire en matière
civile entre la République française et la République socialiste du Vietnam.
J'en donne lecture :
«
Article unique. -
Est autorisée la ratification de la convention
relative à l'entraide judiciaire en matière civile entre la République
française et la République socialiste du Vietnam, signée à Paris le 24 février
1999, et dont le texte est annexé à la présente loi. »
Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'article unique du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président.
Je constate que le projet de loi a été adopté à l'unanimité.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Louis Besson,
secrétaire d'Etat.
Je veux très brièvement apporter un élément de réponse
à M. Bordas pour qu'il sache que l'article 8 de la convention relative à la
coopération en matière d'adoption d'enfants entre la République socialiste du
Vietnam et la République française prévoit bien les formes selon lesquelles le
consentement de l'enfant est recueilli. Les lois vietnamiennes et françaises
prévoient l'une et l'autre le recueil du consentement de l'enfant, à partir de
l'âge de treize ans en France et à partir de l'âge de neuf ans au Vietnam. Ces
dispositions sont prévues et elles s'appliqueront.
Je veux par ailleurs dire à M. le président Estier que le Gouvernement
maintient naturellement la vigilance, comme il l'a appelé à le faire.
Je veux enfin renouveler les remerciements du Gouvernement pour la diligence
dont a su faire preuve la commission, et pour la qualité de son travail, qui
permettent l'adoption, dans des délais courts, de ce texte dont l'importance a
été légitimement soulignée.
(Applaudissements.)
12
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi
constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la durée du
mandat du Président de la République.
Le projet de loi constitutionnelle sera imprimé sous le n° 423, distribué et
renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale sous réserve de
la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions
prévues par le règlement.
13
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, le projet de loi de finances
rectificative pour 2000, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en
nouvelle lecture.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 428, distribué et renvoyé à la
commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de
la nation.
14
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION
DE LOI ORGANIQUE
M. le président.
J'ai reçu de MM. Robert Badinter, Claude Estier et des membres du groupe
socialiste et apparentés, une proposition de loi organique tendant à fixer à
six ans la durée du mandat de sénateur.
La proposition de loi organique sera imprimée sous le n° 429, distribuée et
renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale, sous réserve de
la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions
prévues par le règlement.
15
DÉPÔT DE RAPPORTS
M. le président.
J'ai reçu de M. Jean-François Le Grand un rapport fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan sur le projet de loi, adopté avec
modifications par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à
l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux
relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de
l'aviation civile (n° 369, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 424 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Jacques Hyest un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée
nationale, relative à la prolongation du mandat et à la date de renouvellement
des conseils d'administration des services d'incendie et de secours ainsi qu'au
reclassement et à la cessation anticipée d'activité des sapeurs-pompiers
professionnels (n° 405, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 425 et distribué.
J'ai reçu de M. Jacques Larché un rapport fait au nom de la commission des
lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et
d'administration générale sur le projet de loi constitutionnelle, adopté par
l'Assemblée nationale, relatif à la durée du mandat du Président de la
République (n° 423, 1999-2000).
Le rapport sera imprimé sous le n° 426 et distribué.
J'ai reçu de M. Jean-Pierre Schosteck un rapport fait au nom de la commission
des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du
règlement et d'administration générale sur le projet de loi, adopté par
l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la sécurité du
dépôt et de la collecte de fonds par les entreprises privées (n° 380,
1999-2000.)
Le rapport sera imprimé sous le n° 427 et distribué.
16
DÉPÔT D'UN RAPPORT D'INFORMATION
M. le président.
J'ai reçu de Mme Josette Durrieu un rapport d'information fait au nom des
délégués élus par le Sénat sur les travaux de la délégation française à
l'assemblée parlementaire du Conseil d'Europe au cours de la session ordinaire
1999 de cette assemblée, adressé à M. le président du Sénat, en application de
l'article 108 du règlement.
Le rapport d'information sera imprimé sous le n° 430 et distribué.
17
ORDRE DU JOUR
M. le président.
Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment
fixée au jeudi 22 juin 2000 :
A dix heures trente :
1. Examen d'une demande de la commission des lois tendant à obtenir du Sénat
l'autorisation de désigner une mission d'information au Maroc afin d'étudier le
système politique, judiciaire et administratif de ce pays.
2. Discussion en nouvelle lecture du projet de loi (n° 414, 1999-2000), adopté
avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture, relatif à la
chasse.
Rapport (n° 421, 1999-2000) de Mme Anne Heinis, fait au nom de la commission
des affaires économiques et du Plan.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
A quinze heures et, éventuellement, le soir :
3. Questions d'actualité au Gouvernement.
4. Suite de l'ordre du jour du matin.
Délais limites pour les inscriptions de parole
et pour le dépôt des amendements
Projet de loi de finances rectificative pour 2000, adopté avec modifications
par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 428, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : samedi 24 juin 2000, à seize
heures.
Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture,
relative à la protection des trésors nationaux et modifiant la loi n° 92-1477
du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de
circulation et à la complémentarité entre les services de police, de
gendarmerie et de douane (n° 300, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 26 juin 2000, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en nouvelle
lecture, modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté
de communication (n° 418, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : lundi 26 juin 2000, à dix-sept
heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, instaurant une journée
nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de
l'Etat français et d'hommage aux « Justes » de France (n° 244, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 juin 2000, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence,
relatif à la sécurité du dépôt et de la collecte de fonds par les entreprises
privées (n° 380, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 juin 2000, à dix-sept
heures.
Proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la
prolongation du mandat et à la date de renouvellement des conseils
d'administration des services d'incendie et de secours ainsi qu'au reclassement
et à la cessation anticipée d'activités des sapeurs-pompiers professionnels (n°
405, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 juin 2000, à dix-sept
heures.
Proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, interdisant les
candidatures multiples aux élections cantonales (n° 301, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 juin 2000, à dix-sept
heures.
Projet de loi, adopté avec modifications par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, relatif à l'élargissement du conseil d'administration d'Air France et
aux relations avec l'Etat et portant modification du code de l'aviation civile
(n° 369, 1999-2000).
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 27 juin 2000, à dix-sept
heures.
Projet de loi constitutionnelle, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à
la durée du mandat du Président de la République (n° 423, 1999-2000).
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale :
mercredi 28 juin 2000, à dix-sept heures.
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 28 juin 2000, à dix-sept
heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
DOMINIQUE PLANCHON
ORGANISMES EXTRAPARLEMENTAIRES
CONSEIL D'ADMINISTRATION DE L'ÉTABLISSEMENT PUBLIC
DE LA CITÉ DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE
Lors de sa séance du mercredi 21 juin 2000, le Sénat a désigné M. Pierre André pour siéger au sein du conseil d'administration de l'Etablissement public de la Cité des sciences et de l'industrie.
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
M. Philippe François a été nommé rapporteur du projet de loi n° 408 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, d'orientation sur la forêt.
COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES,
DE LA DÉFENSE ET DES FORCES ARMÉES
M. André Dulait a été nommé rapporteur du projet de loi n° 376 (1999-2000)
autorisant la ratification du traité d'entraide judiciaire en matière pénale
entre la France et les Etats-Unis d'Amérique, signé à Paris le 10 décembre
1998.
M. André Dulait a été nommé rapporteur du projet de loi n° 377 (1999-2000)
autorisant la ratification du traité d'extradition entre la France et les
Etats-Unis d'Amérique, signé à Paris le 23 avril 1996.
Mme Paulette Brisepierre a été nommée rapporteur du projet de loi n° 399
(1999-2000) autorisant l'approbation de l'avenant n° 2 à la convention de
sécurité sociale du 16 janvier 1985 entre le Gouvernement de la République
française et le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire, signée à
Abidjan le 15 décembre 1998.
M. Hubert Durand-Chastel a été nommé rapporteur du projet de loi n° 400
(1999-2000) autorisant la ratification de la convention de sécurité sociale
entre la République française et la République du Chili, signée à Santiago le
25 juin 1999.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL,
DU RÈGLEMENT ETD'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Jacques Larché a été nommé rapporteur du projet de loi constitutionnelle n°
423 (1999-2000), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la durée du mandat
du Président de la République.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON QUESTIONS ORALES REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT (Application des articles 76 à 78 du réglement)
Maîtrise des animaux dangereux
857.
- 21 juin 2000. -
M. René-Pierre Signé
attire l'attention de
M. le ministre de l'intérieur
sur le trouble persistant que représentent les chiens de type molossoïde pour
l'ordre public et la sécurité des personnes, tout au moins lorsque ces animaux
ne sont pas maîtrisés, voire lorsqu'ils sont élevés en vue de servir d'armes à
leurs propriétaires. La loi n° 99-5 du 9 janvier 1999 réglementant la
détention, la déclaration et la reproduction de ces animaux est une bonne loi.
Il semble pourtant que l'application de ce texte requiert des moyens faisant
actuellement défaut aux forces de police et de gendarmerie. Et faute d'être
pleinement appliquée, la législation crée, en fait, une économie souterraine
hautement profitable pour les trafiquants d'animaux ; elle génère aussi un
engouement malsain, une sorte de mythe construit autour de la dangerosité des
pitbulls, american staffordshires et autres rottweilers. Il observe que les
premières victimes du risque créé par la circulation incontrôlée de ces chiens
sont des populations défavorisées, des personnes de tous âges qui vivent dans
les cités de nos périphéries. Parallèlement, un trafic d'animaux dangereux se
développe ; des combats de chiens sont organisés. Certains s'enrichissent au
mépris de toute légalité. Il comprend la circonspection des forces de l'ordre
chargées de capturer les chiens. Il souhaite connaître quels moyens peuvent
être mis en oeuvre afin d'améliorer leur formation et leur protection en vue de
ces missions difficiles ? De façon plus générale, il lui demande quelles sont
les mesures que le Gouvernement envisage de prendre en vue de renforcer
l'efficacité et l'effectivité de la loi.
Mines antipersonnel et opérations de déminage
858. - 21 juin 2000. - M. Michel Pelchat souhaite attirer l'attention de M. le ministre de la défense sur le douloureux problème des mines antipersonnel. Le déminage est un objectif majeur pour la communauté internationale dans laquelle la France doit jouer un rôle, non seulement en raison de sa tradition humanitaire, mais aussi en raison d'un savoir-faire unanimement reconnu. Pourtant, dans ce domaine, la France n'a pas été en mesure de jouer le rôle qui aurait dû être le sien, sur le plan européen comme à l'échelle internationale. Par exemple, pour un pays comme le Cambodge où seulement 148 km² sur plus de 1 000 km² ont été déminés, la part de la France dans ce déminage insuffisant a malheureusement été, jusqu'à présent, beaucoup trop faible. En effet, en France, faute de référence, il n'y a pratiquement pas de sociétés de déminage sur le terrain. En matière de développement d'équipements, il n'y a pas de stratégies nationales, pas de financements dédiés (les financements français en matière d'aide étant réservés dans les « pots communs » des Nations unies ou de la Communauté européenne), pas d'instance de coordination des quelques industriels ou laboratoires maîtrisant les technologies utilisables. En conséquence, il lui demande quelles mesures il pourrait envisager afin de fédérer l'ensemble des acteurs français compétents en matière de déminage humanitaire, qu'il s'agisse d'organismes gouvernementaux, d'organisations humanitaires, d'industriels ou de spécialistes du déminage, afin de proposer un dispositif français cohérent de coopération internationale susceptible de bénéficier des soutiens et des financements européens et d'aider utilement au déminage de pays amis comme le Cambodge.